Il y a 2000 ans

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Francisco Cândido Xavier L’Esprit Emmanuel

Il y a 2000 ans…

Episodes de l’histoire du Christianisme au premier siècle


Léon Denis Après la Mort Christianisme et Spiritisme Le Problème de l’être et de la destinée La grande énigme (Dieu et l’Univers) Le génie celtique et le monde invisible Dans l’Invisible : Spiritisme et médiumnité Le pourquoi de la vie

Allan Kardec t Le livre des Esprits Le livre des Médiums L’Evangile selon le Spiritisme Le Spiritisme à sa plus simple expression La Genèse, les miracles et les prédictions Oeuvres posthumes Le Ciel et l’Enfer La prière Instruction pratique sur les manifestations

Chico Xavier Il y a 2000 ans Nosso Lar Les messagers Missionnaires de la lumière Dans le monde supérieur Les ouvriers de la vie éternelle Dans les domaines de la médiumnité Action et réaction Entre la terre et le ciel Libération Cinquante ans plus tard Avé Christ Renoncement Paul et Etienne

Disponibles sur la libraire spirite :

www.editions-philman.com Cette édition a été réalisée avec la collaboration du Centre Spirite Lyonnais Allan Kardec http://www.cslak.fr Imprimé en Europe — Dépôt légal : mai 2003 ISBN : 978-2-913720- 03-9 — EAN : 9782913720039


Francisco Cândido Xavier L’Esprit Emmanuel

Il y a 2000 ans…

Autobiographie de l'Esprit Emmanuel, Ex-sénateur Publius Lentulus Cornelius

Traduit du portugais par Célia Lopes de Oliveira et Jean-Manuel Ferreira


Portrait médiumnique d’Emmanuel, ici sous les traits du sénateur romain Publius Lentulus


DANS L'INTIMITÉ D'EMMANUEL Au lecteur Cher lecteur, avant que vous ne franchissiez le seuil de cette histoire, il serait juste de satisfaire votre curiosité avec certaines observations d'Emmanuel, l'ex-sénateur Publius Lentulus, descendant de l'orgueilleuse "Gens Cornelia", reçues de ce généreux Esprit, dans l'intimité du groupe d'études spirituelles de Pedro Leopoldo, dans l'Etat de Minas Gerais (Brésil). A travers ces observations, vous prendrez connaissance des premières paroles de l'auteur, à propos de cet ouvrage et de ses sentiments les plus profonds, au cours du travail qui fut exécuté du 24 octobre 1938 au 9 février 1939, selon les disponibilités de son médium, et bien sûr sans perturber les autres activités d'Emmanuel, relatives aux souffrants qui fréquemment le cherchent, et à la diffusion du spiritisme chrétien dans la patrie brésilienne. Le 7 septembre 1938, il affirmait en un court message adressé à ses amis incarnés : “Un jour, si Dieu me le permet, je vous parlerai de l'orgueilleux patricien Publius Lentulus, afin que vous appreniez un peu des douloureuses expériences d'une âme indifférente et ingrate. Attendons le temps et la permission de Jésus.” Emmanuel n'a pas oublié sa promesse. En effet, le 21 octobre de la même année, il en reparlait dans un autre communiqué familier : “Si la bonté de Jésus nous le permet, nous commencerons nos efforts dans quelques jours, j'attends en effet la possibilité pour nous de pouvoir psychographier nos souvenirs du temps où l'on constata le passage du divin maître sur la face de la Terre. Je ne sais pas si nous parviendrons à réaliser un tel projet aussi


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bien que nous le souhaitons. Aussi par avance, je veux signaler ma confiance en la miséricorde de notre Père d'infinie bonté.” Le 24 du même mois, le médium Xavier recevait la première page de ce livre et, le jour suivant, Emmanuel disait encore : “Nous commençons à nouveau, avec le soutien de Jésus, un travail sans prétention. Dieu permette que nous puissions le mener à bon terme. A présent, vous constaterez l'extension de mes faiblesses dans le passé, je me sens néanmoins réconforté par le fait de comparaître avec toute la sincérité de mon cœur, face au plénum de vos consciences. Priez avec moi, en demandant à Jésus que je puisse compléter ce travail, de manière à ce que le plénum s'agrandisse, audelà de votre milieu, et que ma confession soit un exemple pour tous.” Durant tout l'effort de la psychographie, l'auteur de ce livre n'a jamais cessé d'enseigner l'humilité et la foi à ceux qui l'accompagnaient. Le 30 décembre 1938, il commentait dans un nouveau message affectueux : “Je vous remercie, mes enfants, du précieux concours que vous me prêtez. Je me suis efforcé, tant que possible, d'adapter une histoire si ancienne à la saveur des expressions du monde moderne ; mais, en relatant la vérité, nous sommes amenés à pénétrer, avant tout, dans l'essence même des choses, des faits et des enseignements. Pour moi, ces mémoires ont été très douces, mais aussi très amères. Douces par la remémoration des souvenirs amicaux, mais profondément douloureuses, sachant que mon cœur endurci n'a pas su profiter de la minute radieuse qui sonna dans l'horloge de ma vie d'esprit, il y a deux mille ans. Jésus permette que je puisse atteindre les fins auxquelles je me suis proposé, en présentant dans ce travail, non pas un souvenir intéressant à l'égard de ma pauvre personnalité, mais rien de plus qu'une expérience pour ceux qui aujourd'hui travaillent sur les semailles et la moisson de notre divin maître.” D'autres fois, Emmanuel enseignait à ses compagnons incarnés la nécessité de notre liaison spirituelle avec Jésus, dans l'accomplissement de tous les travaux. Le 4 janvier 1939, il psychographiait cette prière


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concernant les mémoires de son passé lointain : “Jésus, fils miséricordieux du Père de toutes les grâces, deux mille ans se sont écoulés et ma pauvre âme revit encore ses jours tourmentés et tristes !… Que sont deux mille ans, Seigneur, dans l'horloge de l'éternité ? Je sens que ta miséricorde nous répond en ses profondeurs inconnues… Oui, le temps est le grand trésor de l'homme, et vingt siècles, comme vingt existences diverses, peuvent être vingt jours d'épreuves, d'expériences et de luttes rédemptrices. Seule ta bonté est infinie ! Seule ta miséricorde peut embrasser tous les siècles et tous les êtres, parce qu'en toi vit la glorieuse synthèse de toute l'évolution terrestre, le ferment divin de toutes les cultures, l'âme sublime de toutes les pensées. Devant mes pauvres yeux se dessine la vieille Rome de mes chagrins et de mes chutes douloureuses… Je me sens encore enveloppé dans la misère de mes faiblesses et je contemple les monuments des vanités humaines... Les styles politiques qui changent avec leurs caractéristiques de liberté et de force, les détenteurs de l'autorité et du pouvoir, les seigneurs de la fortune et de l'intelligence, les grandeurs éphémères qui durent à peine un jour fugace !… Les trônes et les pourpres, les mantes précieuses des honneurs terrestres, les toges de la justice humaine ratée, les parlements et les décrets supposés irrévocables !… En silence, Seigneur, tu as vu la confusion qui s'établissait entre les hommes inquiets et, avec le même amour vigilant, tu as toujours sauvé tes créatures dans l'instant douloureux des ruines suprêmes… Tu as donné ta main miséricordieuse et immaculée aux peuples les plus humbles et les plus fragiles, tu as brouillé les sciences mensongères de tous les temps, tu as humilié ceux qui se considéraient grands et puissants !… Sous ton regard compatissant, la mort a ouvert ses portes de ténèbres et les fausses gloires du monde ont été détruites dans le tourbillon des ambitions, réduisant toutes les vanités à un tas de cendres !… Devant mon âme(1) surgissent les réminiscences des constructions (1) Emmanuel se réfère ici à la vision spirituelle de son passé, projetée devant ses yeux d’Esprit (NDT).


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élégantes des collines célèbres ; je vois le Tibre qui passe, recueillant les détritus de la grande Babylone impériale, les aqueducs, les marbres précieux, les thermes qui paraissaient indestructibles… Je vois encore les rues mouvementées où une plèbe misérable attendait les grâces des grands seigneurs, les aumônes de blé, les fragments de tissu pour protéger du froid la nudité de la chair. Les cirques sont combles… Il y a une aristocratie du patriciat qui observe les épreuves élégantes du champ de Mars et, en tout, des chemins les plus humbles jusqu'aux palais les plus somptueux, on parle de César, l'Auguste !… Dans ces souvenirs, je passe, Seigneur, entre haillons et splendeurs, avec mon orgueil misérable ! Des voiles épais de mes ténèbres je ne pouvais te voir, en haut, où tu gardes ton royaume de grâces inépuisables… Tandis que le grand empire s'anéantissait dans ses luttes inquiétantes, tu apportais ton cœur dans le silence et, comme les autres, je ne comprenais pas que tu veillais ! Tu as permis que la Babel romaine se dressât très haut mais, quand tu as vu que la propre stabilité de la vie sur la planète était menacée, tu as dit : "Cela suffit ! Ils sont venus les temps d'œuvrer à la moisson de la vérité !" Et les grands monuments se sont effondrés, les statues des dieux anciens ont roulé de leurs merveilleux piédestaux ! Un souffle de mort a balayé les régions infestées par le virus de l'ambition et de l'égoïsme effréné, en dépeuplant alors la grande métropole du péché. Les cirques grouillants se sont écroulés, les palais sont tombés, les marbres luxueux ont noircis… Il a suffi d'une parole de toi, mon Dieu, pour que les grands seigneurs retournassent aux marges du Tibre, comme de misérables esclaves !… Nous avons déambulé, ainsi, dans notre nuit, jusqu'au jour où une nouvelle lumière a jailli en notre conscience. Il a fallu que les siècles passent, pour que nous apprenions les premières lettres de ta science infinie, de pardon et d'amour. Et nous voici, Jésus, pour louer ta grandeur ! Fais que nous puissions nous souvenir de toi à chaque pas, entendre ta voix en chaque


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son perçu en chemin, afin de fuir l'obscurité douloureuse !… Tendsnous tes mains et parle-nous encore de ton Royaume !… Nous avons grand soif de cette eau éternelle de la vie, que tu as symbolisée dans les enseignements à la Samaritaine. Nous sommes les ouvriers de ton Evangile et nous nous plions à tes décisions suaves et sacrées ! Protège-nous, Seigneur, et ne nous retire pas des épaules la croix lumineuse et rédemptrice, mais aidenous à sentir, dans les travaux de chaque jour, la lumière éternelle et immense de ton royaume de paix, d'harmonie et de savoir, sur nos chemins de lutte, de solidarité et d'espérance !…” Le 8 février 1939, veille de la fin de réception de ce livre, Emmanuel remerciait ses compagnons incarnés de leur concours, en un communiqué familier, duquel nous avons tiré quelques phrases : “Mes amis, Dieu vous aide et vous récompense. Notre modeste travail s'achève. Il ne reste que quelques pages et je vous remercie du fond du cœur. En retrouvant les Esprits amis des temps passés, je sens mon cœur satisfait et réconforté en constatant le dévouement de tous à la ferme pensée d'évolution, vers l'avant et vers le haut. En effet ce n'est pas sans raison qu'aujourd'hui nous travaillons sur le même ouvrage avec application et bonne volonté. Que Jésus vous récompense continuellement des efforts amicaux et sincères que vous m'avez prêtés et que son infinie bonté vous bénisse, est ma prière.” Voilà donc quelques-unes des annotations d'Emmanuel, fournies pendant la réception de ce livre. L'humilité de ce généreux Esprit vient démontrer que dans le monde invisible, aussi, les réalisations nécessitent efforts personnels, patience et foi. Les messages personnels de l'auteur sont une invitation pour que nous sachions tous prier, travailler et avoir confiance en Jésus-Christ, sans défaillir dans la lutte que la bonté divine nous offre pour notre rachat, sur le chemin de la rédemption. Pedro Leopoldo, le 2 mars 1939. L’éditeur - FEB (Fédération Spirite Brésilienne)



PREMIÈRE PARTIE CHAPITRE 1 Deux amis Les dernières clartés de l'après-midi s’étaient posées sur la ville romaine. Les eaux du Tibre, bordant les flancs de l'Aventin, réfléchissaient les ultimes lueurs du crépuscule, tandis que dans les rues étroites passaient des litières pressées, soutenues par des esclaves musculeux et prompts. De lourds nuages s'entassaient dans l'atmosphère, annonçant de prochaines averses, et les dernières fenêtres encore ouvertes des résidences privées et collectives, claquaient bruyamment au souffle des premiers vents de la nuit. Parmi les constructions élégantes et sobres, qui exhibaient de précieux marbres au pied de la colline, il y avait un édifice qui attirait l'attention des étrangers par la singularité de ses colonnes sévères et majestueuses. Son architecture et ses proportions laissaient imaginer, d'un simple coup d'œil, le rang du propriétaire. C'était, en effet, la résidence du sénateur Publius Lentulus Cornelius, homme encore jeune qui, selon la coutume de l'époque, exerçait au sénat des fonctions législatives et judiciaires, conformément aux droits qui lui revenaient, en tant que descendant de l'ancienne famille de sénateurs et consuls de la république. L'empire, fondé sous Auguste, avait limité les pouvoirs sénatoriaux, dont les détenteurs n'exerçaient déjà plus aucune influence directe sur les affaires privées du gouvernement impérial, mais


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l'hérédité des titres de dignité des familles patriciennes avait été maintenue, établissant ainsi les marques les plus nettes de séparation des classes, dans la hiérarchie sociale. Il était sept heures après midi, un jour de mai de l'an 31 de notre ère. Publius Lentulus terminait son dîner, allongé dans le triclinium en compagnie de son ami Flaminius Sévérus, tandis que Livia, son épouse, donnait des ordres à une jeune esclave étrusque. L'amphitryon était un homme relativement jeune et semblait avoir moins de trente ans, malgré son profil orgueilleux et austère auquel s'alliait sa tunique décorée d'une large barre pourprée qui imposait un certain respect à tous ceux qui l'approchaient ; à l'inverse, son ami, revêtant le même habit de sénateur, laissait entrevoir un âge avancé, illuminé de cheveux blancs et précoces, qui témoignaient de sa bonté et de son expérience de la vie. Laissant la jeune femme vaquer aux occupations domestiques, tous deux se dirigèrent vers le péristyle, pour prendre une bouffée d'oxygène dans la nuit chaude, en dépit de l'aspect menaçant du firmament qui présageait une pluie imminente. — La vérité, mon cher Publius, s'exclama Flaminius pensif, est que tu te consumes à vue d'œil. Il faut que tu prennes la situation en main sans perdre de temps. Tu as déjà eu recours à tous les docteurs pour le cas de ta fille ? — Malheureusement, rétorqua le patricien avec tristesse, j'ai usé de tous les moyens qui sont à notre portée. Ces derniers jours encore, ma pauvre Livia l'a emmenée se distraire dans notre propriété de Tibur(1) et a fait appel à l’un des meilleurs médecins de la ville, qui a affirmé qu'il s'agissait d'un cas sans remède pour la science actuelle. Le médecin n'a pu achever son diagnostic, certainement en raison de sa commisération à l'égard de notre petite malade et de notre désespoir ; mais, d'après nos observations, nous pensons que le médecin de Tibur présume avoir affaire à un cas de lèpre. — C'est une présomption audacieuse et absurde ! — Peut-être. Quant à l'origine de ce mal, si nous ne pouvons (1) Aujourd’hui, Tivoli (NDE).


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admettre un quelconque doute vis-à-vis de nos ancêtres, tu sais que Rome est pleine d'esclaves de toutes les régions du monde et qu'ils sont à notre contact tous les jours. — C'est vrai, affirma Flaminius avec peine. De sombres expectatives se lisaient sur le visage des deux amis, tandis que les premières gouttes de pluie étanchaient la soif des rosiers fleuris qui décoraient les colonnes claires et gracieuses. — Et le petit Pline ? Demanda Publius, désireux de changer de conversation. — Lui, comme tu le sais, continue à jouir d'une bonne santé et démontre de parfaites dispositions. Calpurnia s'embarrasse à chaque instant pour satisfaire les caprices de ses douze ans. Parfois, il est entêté et rebelle, il désobéit au vieux Parménide, et passe son temps aux exercices de gymnastique ; néanmoins, il a une grande prédilection pour les chevaux. Imagine-toi que, sur un coup de tête, il a déjoué la vigilance de son frère et a participé à une course de chars organisée lors des entraînements quotidiens d'un établissement sportif du Champ de Mars, et obtenu une des meilleures places. Quand je contemple mes deux fils, je me rappelle toujours ta petite Flavia Lentulia, car tu connais bien mes projets, en vue de resserrer les liens anciens qui unissent nos familles. Publius, silencieux, écoutait son ami comme si la jalousie harcelait son cœur de père. — Cependant, objecta-t-il, malgré nos projets, les augures ne favorisent pas nos espérances, car la vérité est que ma pauvre fille, en dépit de tous nos soins, ressemble plus à une de ces malheureuses petites créatures jetées au Vélabre(1). — Néanmoins, ayons confiance en la magnanimité des dieux... — Des dieux ? Répéta Publius, avec un découragement mal dissimulé. A propos de ce recours impondérable, j'ai imaginé mille théories dans mon cerveau bouillant. Il y a quelque temps, en visite chez toi, j'ai eu l'occasion de connaître un peu mieux ton vieil affranchi grec. Parménide, me parlant de sa jeunesse passée en Inde, me fit (1) Quartier de l’ancienne Rome situé sur un marais.


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part des croyances hindoues et de leur conception mystérieuse de l'âme. Crois-tu que chacun de nous puisse revenir après la mort, sur le théâtre de la vie, dans d'autres corps ? — D'aucune façon, répliqua Flaminius énergiquement. Parménide, malgré son caractère précieux, pousse très loin ses divagations spirituelles. — Néanmoins, mon ami, je commence à penser qu'il a raison. Comment pourrions-nous expliquer la diversité des destinées en ce monde ? Pourquoi l'opulence de nos quartiers aristocratiques et les misères de l'Esquilin ? La foi dans le pouvoir des dieux n'arrive pas à élucider ces problèmes torturants. En voyant ma malheureuse petite fille avec sa chair dilacérée et en putréfaction, je sens que ton esclave détient la vérité. Qu'aurait fait la petite Flavia, à peine âgée de sept ans, pour mériter des puissances célestes un châtiment aussi affreux ? Quelle joie pourraient trouver nos divinités dans les sanglots d'une enfant et dans les larmes douloureuses qui nous brûlent le cœur ? Ne serait-il pas plus compréhensible et acceptable que nous soyons venus de loin avec nos dettes envers les pouvoirs du ciel ? Flaminius hocha la tête, comme s'il voulait écarter un doute, mais, reprenant son aspect habituel, il déclara avec fermeté : — Tu as tort d'alimenter en toi de telles conjectures. Durant mes quarante-cinq ans d'existence, je n'ai jamais connu de croyances plus précieuses que les nôtres, dans le culte vénérable de nos ancêtres. Il faut que tu considères que la diversité des positions sociales est un problème originaire de notre constitution politique, la seule qui a établi une division nette entre les valeurs et les efforts de chacun ; quant à la question des souffrances, il convient de se rappeler que les dieux peuvent éprouver nos vertus morales, en nous menaçant au plus profond de notre âme, sans qu'il nous soit pour autant nécessaire d'adopter les principes absurdes des égyptiens et des grecs, qui, par ailleurs, les ont déjà abolis. As-tu déjà offert un quelconque sacrifice au temple, après tant de doutes angoissants ? — J'ai offert des sacrifices aux dieux, selon nos coutumes, répondit Publius avec émotion, et je m'enorgueillis plus que quiconque des glorieuses vertus de nos traditions familières. Toutefois, mes


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observations ne concernent pas uniquement ma fille. Il y a plusieurs jours que je vis torturé par la troublante énigme d'un rêve. — Un rêve ? Comment la fantaisie peut-elle ébranler de la sorte la fibre d'un patricien ? Publius Lentulus écoutait la question, plongé dans de profondes préoccupations. Ses yeux fixes semblaient dévorer un paysage que le temps avait éloigné au fil des années. Une pluie battante, à présent, tombait sans interruption, faisant abondamment déborder l'impluvium et remplissant la piscine qui décorait la cour du péristyle. Les deux amis s'étaient retirés vers un large banc de marbre, et s'installèrent sur les étoffes orientales qui le couvraient, afin de poursuivre leur conversation amicale. — Il y a des rêves, continua Publius, qui se distinguent de la fantaisie par leur expression d'une réalité irréfutable. Je revenais d'une réunion au sénat, où nous avions discuté d'un problème d'une profonde délicatesse morale, quand je me suis senti pris d'un abattement inexplicable. Je me suis couché tôt et, alors qu'il me semblait apercevoir près de moi l'image de Thémis, que nous gardons sur notre autel domestique comme tous ceux qui exercent les fonctions de la justice, j'ai senti qu'une force extraordinaire scellait mes paupières fatiguées et endolories. Néanmoins, je voyais d'autres endroits, en reconnaissant des paysages familiers que j'avais complètement oubliés. Réalité ou rêve, je ne sais le dire, mais je me suis vu portant les insignes de consul, au temps de la république. Il me semblait avoir régressé à l'époque de Lucius Sergius Catilina ; en effet, je le voyais à mes côtés, ainsi que Cicéron. Tous deux se représentaient à mes yeux comme deux personnifications : celle du mal et celle du bien. Je me sentais lié au premier par des liens forts et indestructibles, comme si j'étais en train de vivre l'époque ténébreuse de sa conspiration contre le sénat, en participant avec lui au complot ignominieux qui visait l'organisation intime de la république. Je soutenais ses intentions criminelles, en adhérant à tous ses projets avec mon autorité administrative, et en assumant la direction de réunions


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secrètes, où je décrétais d'horribles assassinats… En un clin d'œil, j'ai revécu toute la tragédie, sentant que mes mains étaient tachées du sang et des larmes des innocents. J'ai contemplé, effrayé, comme si j'étais en train de revenir involontairement à un passé obscur et douloureux, la trame des infamies perpétrées sous la révolution et écrasée au bon moment par l'influence de Cicéron et le détail le plus terrible est que j'avais joué un des rôles les plus importants et des plus saillants de l'ignominie… Toutes les scènes horribles de ce temps passèrent, alors, devant mes yeux épouvantés… Toutefois, ce qui m'humiliait le plus dans ces visions de mon passé coupable, comme si j'avais maintenant honte de pareilles réminiscences, c'est que je me prévalais de l'autorité et du pouvoir pour qu'en profitant de la situation, j'exerce les vengeances les plus acerbes envers mes ennemis personnels, contre lesquels je donnais des ordres d'emprisonnement, sous les plus terribles accusations. Et mon cœur pervers ne se satisfaisait pas de la captivité de mes ennemis dans les cachots infects, éloignés de l'amour le plus cher et le plus doux de leur famille. J'ai ordonné l'exécution de plusieurs d'entre eux, dans l'obscurité de la nuit. En plus de cela, à beaucoup de mes adversaires politiques, j'ai fait arracher les yeux en ma présence, en contemplant leurs supplices avec la froideur brutale des vengeances cruelles !… Pauvre de moi qui répandais la désolation et la disgrâce parmi tant d'âmes, parce qu'un jour, elles se souviendraient d'éliminer leur cruel bourreau ! Après toute la série de scandales qui m'éloignèrent du consulat, j'ai senti la fin de mes actes infâmes et misérables. Devant d'inflexibles bourreaux qui m'ont condamné au terrible supplice de la strangulation, j'éprouvai alors les affres de la mort. Le plus intéressant, pourtant, est que j'ai revu l'indescriptible instant de mon passage au travers des eaux ténébreuses de l'Achéron, lorsqu'il me semblait être descendu aux endroits sombres de l'Averne(1), où ne pénètrent pas les clartés des dieux. La grande foule des victimes cerna alors mon âme angoissée et souffrante, pour réclamer justice et répa(1) Lac près de Naples, qui était considéré comme l’entrée des enfers (NDT).


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ration, éclatant en clameurs et sanglots qui s'éteignaient au fond de mon cœur. Combien de temps suis-je resté, ainsi, prisonnier de ce martyre indéfinissable ? Je ne sais le dire. Je me souviens à peine d'avoir entrevu l'image céleste de Livia, qui, au milieu de ce tourbillon d'épouvantes, me tendait ses mains éclatantes et affectueuses. Il me semblait que mon épouse m'était familière depuis de lointaines époques, parce que je n'ai pas hésité un instant à prendre ses mains délicates, qui me conduisirent à un tribunal, où s'alignaient des personnages étranges et vénérables. Des cheveux blancs auréolaient la respectable et sereine physionomie de ces juges du ciel, émissaires des dieux pour le jugement des hommes de la Terre. L'atmosphère était caractérisée par une étrange légèreté, pleine de lumières caressantes qui illuminaient, devant tous ceux qui étaient présents, mes pensées les plus secrètes. Livia devait être mon ange gardien dans ce conseil de magistrats intangibles, car sa main droite se tenait au-dessus de ma tête, comme si elle m'imposait résignation et sérénité, afin que je puisse entendre les sentences suprêmes. Il serait inutile de te décrire ma surprise et mon appréhension, face à ce tribunal qui m'était inconnu, lorsque la figure de celui qui me paraissait détenir l'autorité centrale m'adressa la parole, s'exclamant : — Publius Lentulus, la justice des dieux, dans sa miséricorde, détermine ton retour au tourbillon des luttes du monde, pour que tu laves les taches de tes fautes dans les pleurs de la rémission. Tu vivras une époque de merveilleuses lueurs spirituelles. Tu auras à lutter contre toutes les situations et difficultés, en dépit du berceau doré qui te recevra à ta naissance, afin que tu édifies ta conscience assombrie, dans les douleurs qui purifient et régénèrent ! Tu seras heureux si tu sais bien profiter de l'opportunité bénie de la réhabilitation par le renoncement et par l'humilité… Il a été déterminé que tu sois puissant et riche, afin qu'avec ton détachement des chemins humains, au moment opportun, tu puisses être un élément de valeur pour tes mentors spirituels. Tu auras l'intelligence et la santé, la fortune et l'autorité, pour faciliter la régénération intégrale de ton âme, car viendra un moment


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où tu seras astreint à mépriser toutes les richesses et toutes les valeurs sociales, tu devras pour cela avoir préparé ton cœur à la nouvelle voie d'amour et d'humilité, de tolérance et de pardon qui va s'ouvrir, dans quelques années, à la face obscure de la Terre !… La vie est un concours de circonstances que tout esprit doit engrener pour son bien, dans le mécanisme de son destin. Profite, donc, de ces possibilités que la miséricorde des dieux met au service de ta rédemption. Ne néglige pas l'appel de la vérité quand sonnera l'heure du témoignage et des renoncements sanctificateurs… Livia cheminera avec toi au travers de la voie douloureuse du perfectionnement et, en elle, tu trouveras les bras amis et protecteurs pour les jours d'épreuves rudes et acerbes. L'essentiel est la fermeté de ton courage sur ce chemin scabreux, pour purifier ta foi et œuvrer à la réparation de ton passé délictueux et sombre !… A ce moment-là, la voix altière du patricien devint angoissée et douloureuse. De pénibles émotions opprimaient son cœur, accablé par un incoercible abattement. Flaminius Sévérus l'écoutait avec intérêt et attention, en cherchant le meilleur moyen de lui ôter ces pénibles impressions. L'envie le prenait de changer le cours de ses pensées en faisant appel à son éducation et à son orgueil, afin d'extirper son esprit de ce monde de sensibleries, incompatible avec sa formation intellectuelle ; mais, en même temps, il ne pouvait étouffer ses propres doutes, face à ce rêve, dont la netteté et l'aspect réaliste le laissaient abasourdi. Il comprenait qu'il était d'abord nécessaire de rétablir sa propre force de caractère, et que l'indulgence devait lui servir de bouclier pour éclairer l'ami qu'il considérait davantage comme un frère. Ce fut ainsi qu'en posant sa main effilée et blanche sur son épaule, il lui demanda d'une voix douce et amicale : — Et ensuite, qu'as-tu vu d'autre ? Publius Lentulus, se sentant compris, recouvra de nouvelles énergies et continua : — Après les exhortations de ce juge sévère et vénérable, je ne distinguais plus la silhouette de Livia à mes côtés, mais d'autres créatures gracieuses vêtues de péplums qui me paraissaient être de neige


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translucide, réconfortaient mon cœur avec leurs sourires accueillants et pleins de bonté. Répondant à leur appel affectueux, j'ai senti que mon esprit regagnait la Terre. J'observai Rome, qui n'était plus vraiment la cité de mon temps ; un courant de beauté était en train de rénover sa partie ancienne, car je remarquai l'existence de nouveaux cirques, de théâtres somptueux, de thermes élégants et de palais enchanteurs, que mes yeux n'avaient pas connus auparavant. J'ai pu voir mon père au milieu de ses papyrus et parchemins, étudiant les procès du sénat, comme nous le faisons aujourd'hui, et, après avoir imploré la bénédiction des dieux sur l'autel de notre maison, j'ai éprouvé une sensation de profonde inquiétude. Il me semblait avoir souffert d'une forte commotion cérébrale, et je suis resté assoupi dans un inexplicable vertige… Je ne sais décrire littéralement ce qui s'est passé, mais je me suis réveillé avec une forte fièvre, comme si cette digression de la pensée, au travers des mondes de Morphée, avait envahi mon corps d'une douloureuse sensation de fatigue. J'ignore ton jugement face à cette confidence amère et pénible, mais j'aimerais que tu m'éclaires là-dessus. — Que je t'éclaire là-dessus ? Dit Flaminius, en essayant d'imprimer à sa voix la tonalité d'une conviction énergique ; tu sais bien le respect que m'inspirent les augures du temple, mais, voyons, ce qui t'est arrivé n'est rien de plus qu'un rêve, et tu sais bien que nous devons redouter l'imagination dans nos conceptions d'hommes pragmatiques. C'est en rêvant excessivement que les illustres Athéniens se sont réduits à de misérables esclaves, ce qui nous oblige à reconnaître la bonté des dieux qui nous ont octroyé le sens de la réalité, nécessaire à nos conquêtes et à nos triomphes. Serait-il juste que tu renonces à ton amour-propre et à la position de ta famille, en te laissant emporter par la fantaisie ? Publius laissa son ami traiter longuement le sujet, écoutant ses exhortations et ses conseils, ensuite, il lui prit ses mains généreuses et s'exclama : — Mon ami, je serais indigne de la magnanimité des dieux si je me laissais aller au gré des événements. Un simple rêve ne m'exposerait pas à de si douloureuses conjectures, mais la vérité est


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que je ne t'ai pas encore tout dit. Flaminius Sévérus fronça les sourcils, achevant : — Tu n'as pas encore tout dit ? Qu'y a-t-il encore ? Un doute préoccupant s'était déjà installé au fond de lui avec la description minutieuse de ce rêve impressionnant, mais à présent il parvenait difficilement à cacher à son ami les pénibles émotions qui le tourmentaient. Publius, muet, lui prit le bras, et le conduisit aux galeries du tablinum situé à côté du péristyle, non loin de l'autel domestique, où figuraient les ancêtres les plus chers et les plus sacrés de la famille. Les deux amis pénétrèrent dans le bureau puis dans la salle des archives avec une profonde expression de recueillement et de respect. Dans un coin étaient disposés en ordre de nombreux parchemins et papyrus, tandis que dans les galeries abondaient des portraits de cire des ancêtres et des aïeux de la famille. Publius Lentulus avait les yeux larmoyants et la voix tressaillante, dominé par une forte émotion. En s'approchant d'une image de cire, parmi toutes celles qui s'alignaient là, il fit appel à l'attention de Flaminius, par une simple parole : — Tu reconnais ? — Oui, répondit son ami en tremblant, je reconnais cette effigie. Il s'agit de Publius Lentulus Sura, ton arrière-grand-père paternel, étranglé il y a presque un siècle, dans la révolution de Catilina. — Cela fait précisément quatre-vingt-quatorze ans que le père de mon grand-père a été éliminé dans ces terribles circonstances, s'exclama Publius avec emphase, se sentant détenir toute la vérité. Observe bien les traits de ce visage, et tu pourras vérifier la ressemblance parfaite qui existe entre cet ancêtre lointain et moi. La clé de mon rêve ne serait-elle pas là ? Le noble patricien observa l'évidente similitude de la physionomie de cette effigie avec le visage de son ami présent. Ses incertitudes étaient à leur comble, face à ces démonstrations hallucinantes. Il allait élucider le sujet, en prônant la question de la lignée et de l'hérédité, mais son interlocuteur, comme devinant les moindres détails de sa pensée, anticipa son jugement, s'exclamant :


Chapitre 1 - Deux amis

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— J'ai connu moi aussi les mêmes hésitations qui blessent ton raisonnement ; j'ai lutté contre la raison avant d'accepter l'hypothèse de notre conversation de ce soir. La ressemblance par l'image, même la plus extrême, est naturelle et possible ; ceci, pourtant, ne me satisfait pas pleinement. J'ai envoyé, ces derniers jours, un esclave de notre maison, dans les alentours de Taormina où nous possédons une vieille maison, dans laquelle nous gardions les archives du défunt, que j'ai fait transporter ici. Sûr de lui, il tournait dans ses mains nerveuses divers documents et s'exclama : — Observe ces papyrus ! Ce sont des notes de mon arrière-grandpère, concernant ses projets au consulat. J'ai trouvé dans cet amoncellement de parchemins plusieurs minutes d'actes de sentences de mort, que j'avais déjà remarquées dans les digressions de mon rêve inexplicable… Compare cette écriture ! Ne ressemble-t-elle pas à la mienne ? Que nous faut-il de plus que ces preuves calligraphiques ? Il y a plusieurs jours que je vis cet obscur dilemme… Serais-je Publius Lentulus Sura, réincarné ? Flaminius Sévérus pencha sa tête en avant, avec une inquiétude non dissimulée et avec une ineffable amertume. Nombreuses étaient les preuves de lucidité et de logique de son ami. Tout contribuait à ce que son château d'explications s'effondrât avec fracas, face à ce qu'il venait d'entendre et de voir ; mais sauvegardant les croyances et les traditions de ses aïeux, il ne se laissa pas abattre et essaya d'éclairer l'esprit d'un compagnon de si longue date. — Mon ami, murmura-t-il en le serrant contre lui, je comprends tes réactions face à ces événements hallucinants. Ce fait est de ceux qui frappent les esprits les plus froids, néanmoins nous ne pouvons compromettre notre intégrité en nous hasardant sur le chemin incertain des premières impressions. Si tout cela nous semble être la réalité, il y a aussi les réalités immédiates et positives qui exigent de nous des mesures actives. En considérant tes réflexions et croyant même en la véracité du phénomène, je ne pense pas qu'il faille plonger notre raisonnement dans ces sujets mystérieux et transcendants. Je suis contre ces perquisitions, certainement en vertu de mes expé-


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Première partie

riences de la vie quotidienne. J'adhère, d'une façon générale, à ton point de vue, mais je te conseille de ne pas l'étaler au delà de notre intimité ; de plus, bien que le caractère de tes concepts témoignent de ta lucidité, je te sens fatigué et abattu dans ce tourbillon de travaux liés au milieu familial et social. Il fit une pause et se mit à raisonner en cherchant un recours efficace pour remédier à la situation, puis il suggéra avec douceur : — Tu pourrais te reposer un peu en Palestine, en emmenant avec toi ta famille vers ce lieu paisible. Il existe là-bas des régions au climat merveilleux, qui permettrait peut-être la guérison de ta fille, et qui rétablirait de même tes forces physiques. Tu oublierais sans doute le tumulte de la ville, en revenant plus tard parmi nous, avec de meilleures dispositions. L'actuel procurateur de Judée est notre ami. Tu pourrais ainsi résoudre plusieurs de tes problèmes personnels tout en conservant tes fonctions. D'autant qu'il ne me serait pas difficile d'obtenir de l'Empereur une dispense pour tes travaux au sénat, de façon à ce que tu puisses continuer à percevoir les subsides de l'état, tant que tu resterais en Judée. Qu'en penses-tu ? Tu pourrais partir tranquille : je prendrais à ma charge la direction de toutes tes affaires à Rome, en veillant sur tes intérêts et sur tes propriétés. Le regard de Publius laissa transparaître une lueur d'espoir et, examinant toutes les raisons favorables ou contraires à l'exécution du projet, il expliqua : — L'idée est providentielle et généreuse, mais la santé de Livia ne m'autorise pas à prendre une résolution prompte et définitive. — Comment cela ? — Nous attendons, pour bientôt, notre deuxième enfant. — Et quand doit-il naître ? — Dans six mois. — Le voyage t'intéresse-t-il après l'hiver prochain ? — Oui. — Très bien : tu seras donc en Judée, précisément d'ici un an. Les deux amis reconnurent que la discussion avait été longue. L'averse avait cessé. Le firmament purifié resplendissait de constellations limpides.


Chapitre 1 - Deux amis

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Déjà commençait le trafic des chariots bruyants, accompagné des cris hargneux des conducteurs car, dans la Rome impériale, les heures du jour étaient exclusivement réservées à la circulation des palanquins, des patriciens et des piétons. Flaminius, ému, prit congé de son ami, reprenant sa litière somptueuse portée par des esclaves prestes et herculéens. Dès qu'il se retrouva seul, Publius Lentulus se dirigea vers la terrasse, où soufflaient les brises de la nuit. A la lueur vive du clair de lune, il contempla les maisons romaines étendues sur les collines sacrées de la cité glorieuse. Il leva les yeux sur le paysage nocturne, réfléchissant aux problèmes profonds de la vie et de l'âme, et laissa pencher sa tête en avant, attristé. Une incoercible mélancolie dominait son esprit volontaire et sensible, tandis qu'un souffle d'amour-propre et d'orgueil étouffait les larmes de son cœur tourmenté par d'inquiétantes pensées.


...

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TABLE DES MATIERES Dans l’intimité d’Emmanuel

7 PREMIÈRE PARTIE

CHAPITRE 1 - Deux amis

13

CHAPITRE 2 - Un esclave

26

CHAPITRE 3 - Dans la maison de Pilate

42

CHAPITRE 4 - En Galilée

56

CHAPITRE 5 - Le messie de Nazareth

70

CHAPITRE 6 - L’enlèvement

84

CHAPITRE 7 - Les prédications de Tibériade

99

CHAPITRE 8 - Dans le grand jour du calvaire

112

CHAPITRE 9 - La calomnie victorieuse

125

CHAPITRE 10 - L’apôtre de Samarie

144

DEUXIÈME PARTIE CHAPITRE 1 - La mort de Flaminius

185

CHAPITRE 2 - Ténèbres et noces

205

CHAPITRE 3 - Les desseins des ténèbres

221

CHAPITRE 4 - Tragédies et espérances

235

CHAPITRE 5 - Dans les catacombes de la foi et le cirque du martyre

259

CHAPITRE 6 - Aubades du royaume du Seigneur

297

CHAPITRE 7 - Toiles de l’infortune

310

CHAPITRE 8 - Dans la destruction de Jérusalem

335

CHAPITRE 9 - Souvenirs amers

359

CHAPITRE 10 - Dans les dernières minutes de Pompéi

369

Francisco Cândido Xavier

381



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