PAYS : France
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1 juin 2016 - N°363
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Thierry
Marx,
chef étoilé des restaurants
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de l'hôtel
Mandarin oriental, à Paris. Cet homme applique
dans son travail un savoir-être issu des arts martiaux japonais. Il est coauteur de
L'Histoire à la carte by TM
(La Martinière/ France Info), prix des écrivains gastronomes
La voie du samouraï
Calme, en avant, droit...
2016.
C'est par ces trois qualificatifs que le général L'Hotte, 1 e écuyer en chef du Cadre noir , résumait au XIX siècle la doctrine de l'équitation française. Il décrivait ainsi non le cavalier, mais bien le cheval. « Calme » puisque soumis, coopératif et attentif aux ordres de l'écuyer. « En avant » car confiant, attitude loin d'être naturelle pour le cheval, peureux de nature et plutôt porté à attendre la sollicitation de l'éperon. « Droit » parce qu'en équilibre, vertical, avec des allures souples et symétriques. Ces mots sont également parfaitement applicables à la posture idéale de l'homme apte à susciter l'exemplarité : confiant car déterminé, cohérent, honnête avec lui-même et fiable. Obtenir cette parfaite coopération d'un cheval n'est réalisable que grâce à la justesse des directives que donne le cavalier avec sesjambes, ses mains et son assiette, en demeurant en harmonie et en équilibre avec le cheval : quatre-vingts kilos face à six cents, les forces sont déséquilibrées. Devenir un cavalier émérite nécessite avant tout d'acquérir cette assiette qui permet non seulement de rester en selle quoi qu'il arrive,
mais aussi de donner des indications au cheval par d'infimes déplacements du poids du corps. Dans le yabuscime art martial japonais ancestral, le pratiquant tire à l'arc, lancé au galop sur son cheval qu'il ne conduit que de ses jambes et de son poids, tandis que son esprit et ses mains se concentrent sur son tir. Maîtrise extrême de la posture et de la cohésion entre le cavalier et sa monture... Ainsi, lorsque ce samouraï descendait de cheval, son adversaire « ressentait >> sa solidité. Pourquoi certains enseignants n'ont-ils pas à se soucier de la discipline lorsqu'ils entrent dans une classe ? C'est grâce à ce qu'ils inspirent, à ce que leur attitude dégage de rigueur, une sorte de langage du corps. Je fais souvent cette automéditation, face à un miroir : ai-je le visage en adéquation avec ce que je dois faire, avec ce que je dois inspirer aujourd'hui? calme et droit, avec une posture verticale, traduit la compétence, la solidité, l'équilibre, la confiance en soi mais sans prétention, et exprime que l'on est ouvert aux autres tout en conservant sa propre identité, sans accepter de compromission ni se travestir. De même que le cavalier fait corps en douceur avec son cheval, accompagne son mouvement tout en le cadrant et obtient ainsi son entière coopération, avoir un honnête permet de s'exprimer avec Être
cœur
un langage franc qui ne laissera planer aucun doute sur la droiture et les intentions de son auteur. Une attitude verticale reflète un esprit droit et clair et ne doit pas être confondue avec de la raideur, expression souvent d'une certaine psychorigidité. Notre attitude est la première vitrine que nous offrons sur nous-mêmes, et conditionne la suite des événements... Elle est essentielle à soigner car, comme l'écrit l'ingénieur américain David Swanson : « Vous n'aurez jamais une deuxième chance de faire une bonne première impression
»
1.Ensemble des professeurs de l'École nationale
d'équitation.
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