PAYS :France
DIFFUSION :32196
PAGE(S) :95
JOURNALISTE :Agnes Léglise
SURFACE :95 % PERIODICITE :Mensuel
1 octobre 2022 - N°662
Livres PAR
AGNES LÉGLISE
Aussimalin que marrant
Les Années New Wave 1978-1983 JD BEAUVALLET GM Editions
VeryGood Trip Une Histoire Intime De La Musique MICHKA ASSAYAS GM Editions Nous serions bien les derniers, ici, à la rédaction, à sous-estimer l’immense importance du rôle des
— à les lire, hein, on ne les connaît pas— semblent l’être, même si, bien sûr, leurs amours respectives se croisent parfois, génération commune oblige.
One, Two, Three, Four The Beatles
“Les Années New Wave” de Beauvalletannoncent donc la couleur, on estjuste après l’explosion punk, les Brits affolent la planète et le jeune JD, “électrocuté par ‘Unknown Pleasures'" (l’album de Joy Division, hein ) va changer de monde, au
CRAIG BROWN
propre comme au figuré, puisqu’il va carrément quitter sa province et son prénom détesté pour un JD plus cool, et surtout pour Manchester où
qui porte le nom du magazine, mais nous n’avons concrètement rien à voir avec, et si jamais on parle de ses livres, vous pouvez être sûr que c’est sincère,
il
Rock&Folk Editions Première fois qu'on écrit ça, mais le disclaimer s’impose : oui, le groupe depresse dont Rock&Folk fait partie a lancérécemment une maison d’édition
débarque juste àtemps pour y vivre les révolutions musicales qui s’y succèdent, et ensuite les partager avec les lecteurs des “Inrocks”. Au cœur de l’action donc, et passionné, “petit con mais en bien”, JDB a
la preuve, on n’a pas parlé des précédents. On a même failli rater celui-là parce que bon, lesBeatles, on en a déjà beaucoup avalé, la bibliographie les concernant
passé les décennies suivantes à chercher, côtoyer et torturer, pardon, interroger — il en a quand
sait déjà presque tout sur eux. Sauf que les Brits, parmi tous leurs talents, ont le don du casting insolite, et c’est
même fait pleurer certains, comme
dans son livre précédent —, les musiciens les plus
donc Craig Brown, un journaliste et humoriste qui avait déjà signé des livres satirico-historiques sur Tony Blair
nous donc, déclenchaient au passage des vocations professionnelles. Parmi ceux-là, les petits Beauvallet et Assayas qui, devenus grands et grands journalistes, publient simultanément les récits de leurs initiations
innovants, les plus intéressants comme les plus dérangeants, et son beau livre rappelle ces riches heures à coups d’extraits d’interviews, de portraits d’époque, de chouettes photos et de notices
ou la princesse Margaret, qui s'attaque là aux Fab Four avec la même faconde et la même cruelle précision. Son approche est kaléidoscopique car c’est par le biais malin des témoignages qu’il dresse le énième, mais
au rock et de leurs cheminements pendant leurs déjà longues carrières. Alors, oui, cette parution nous a fait, nous aussi, réaliser à quel point le rock est maintenant
souvent personnelles. Assayas lui, est, on n’est pas franchement surpris, plus réservé, quoique bien plus disert, limite TMI parfois, mais, interrogé
pourtant original, tableau de l’épopée. Les Beatles ont en effet bouleversé la vie de tous leursconcitoyens, et c’est donc logique que ce soient eux qui ici racontent
l’objet d’une analyse et d’une auto-documentation
par Maud Berthomier dans ce “Very Good Trip”,
in situ et quasi in vivo jamais vue jusqu’à notre ère et où, après les biographies d’artistes par des journalistes rock, lesautobiographies des artistes
sa sincérité sonne juste, tout comme son analyse sur les cheminements de ses multiples racines et influences musicales et des découvertes qu’il en tira, à l’écrit comme à Radio France, dont il fait
finalement l’impactextraordinaire du groupe. Craig Brown dépatouille en cent cinquante chapitres vaguement chronologiques, un flot d’anecdotes méconnues, de faits sous-estimés, dedétails négligés
rock critics dans les initiations et les découvertes musicales. Forcément. Nous tous, journalistes comme lecteurs, avons à un moment ou à un lu
autre de nos jeunesses passionnément les grandes signatures rock qui nous entrouvraient et déchiffraient les mille mondes du genre, voire, pour certains d’entre
eux-mêmes, les autobiographies des journalistes
il
le racontait
maintenant les autobiographies musicales de journalistes rock, suite logique et évidemment plus intéressante que les petits détails
les belles heures depuis belle lurette. Logiquement, vu qu’on a en principe plus envie de lire des trucs sur les groupes qu’on aime, l'appréciation de
sur leur vie privée que certains étalent et qui, on
ces deux univers dépendra beaucoup des goûts
l’avoue, nous passionnent un tantinet moins, et on reste poli. Assayas et Beauvallet parlent bien, eux, de musique, et c’est tant mieux. Leurslivres
musicaux que l’on
rock, on
a donc
a en
commun avec les auteurs
mais, en gros, si, adolescent, vousn’avez pas parlé le désespérante, ou si vous n’aimez pas
est vertigineuse et on peut sincèrement croire qu'on
qui forment un portrait unique et étonnamment instructif du groupe et de son temps. Brown est aussi malin que marrant, et sa magistrale maîtrise de la culture underground lui permet tous lesgrands écarts et toutes les pirouettes. Certes, l’humoriste n’est pas forcément tendre avecles Beatles eux-mêmes et, sans aucun doute, leur musique n’est pas au premier plan de ses préoccupations, mais il réussit là unformidable, inédit
Tous droits de reproduction réservés