Blaise Pascal, un compagnon pour cet été Littérature Dans la série « Un été avec », cap sur l’éblouissant auteur des «Pensées » Ses pensées parsèment la mémoire collective au point d’oublier qu’il en est l’auteur. « Qui fait l’ange fait la bête ». Ou « le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point ». Le « roseau pensant », « les deux infinis », c’est lui. Ce « roi sans divertissement » que reprit Giono, c’est encore lui. Blaise Pascal (1623-1662) est de nos grands classiques l’un des plus divers et le plus déroutant. Si proche aussi : confinés, nous songions au « malheur des hommes qui est de ne savoir demeurer en repos dans une chambre ». Les plus inquiets se rappelaient son « effroi face au silence éternel des espaces infinis ». Il est l’exigeant épigone de Montaigne dont il ad-
mire le style naturel mais dont il critique durement la nonchalance. Sociable et reclus, scientifique qui voit la vanité de la science et ne rêve que de se confier à la tendresse de Dieu, aussi persuadé de la misère de l’homme que de sa grandeur, l’auteur des « Pensées » est notre frère en raison de ses contradictions mais capable d’éblouissantes synthèses. Une dialectique redoutable L’homme Pascal, sa méthode, sa métaphysique : en 40 chapitres brefs qui furent autant d’émissions de radio, Antoine Compagnon, professeur au Collège de France, nous mène sur ses pas et nous adjure de ne pas nous lais-
ser intimider. Pascal ferraille sur des sujets dont certains nous paraissent lointains, ainsi ses subtiles et féroces disputes des « Provinciales » avec les jésuites sur la grâce. Mais c’est sans compter sur sa langue simple et percutante, la force de ses images, sa redoutable dialectique qui en imposait même aux marxistes. Expérimentateur, mathématicien, théologien, visionnaire lors de sa « nuit de feu », ce sage tourmenté dont les pensées ont la richesse d’un traité sertie dans la brièveté d’un aphorisme, est un contemporain indispensable. Et donc un excellent compagnon pour notre été de lecture. Christophe Lucet
★★★★★ « Un été avec Pascal », d’Antoine
Compagnon, éd. Equateurs/France inter, 230 p., 14€.