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Visite privée : Maison Belle ÉpoquePerrier-Jouët

MAISON BELLE ÉPOQUE PERRIER-JOUËT

Construite au XIXe siècle, à Épernay, elle renferme une collection Art nouveau unique en Europe. Elle rend ainsi un vibrant hommage à la nature, dans le sillage de ce que le champagne du même nom défend depuis 1811.

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REPORTAGE SERGE GLEIZES. PHOTOS CLAUDE WEBER.

La façade côté jardin de La Maison Belle Époque avec son parc paysager. Page de gauche, cuvées historiques Perrier-Jouët Belle Époque.

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1. La salle à manger avec ses boiseries murales en poirier habillées de cuir de Cordoue. Chaises Majorelle tapissées de cuir.

2. Embrasse retenant un damas de chez Prelle, Ateliers Philippe Coudray. 3. Le bar, avec son plafond décoré d’une œuvre en verre de Murano, All’Ombra della Luce, de Ritsue Mishima (2015). Sur le bar, présentoir en forme d’arbre, HyperNature, de Bethan Laura Wood (2018).

L’un des petits salons a été séparé du hall par l’élégante porte vitrée en poirier d’Hector Guimard. Chaises et fauteuil, Georges de Feure. Tapis, design Gaël Lunven, Tai Ping. T ous les lundis, les bouquets de fl eurs fraîches sont changés et font écho aux spectaculaires orchidées qui affichent leur délicatesse lactée. Dès l’entrée, la nature est omniprésente, accompagnée par un délicat parfum d’ambiance fl oral. Séparées par une enfi lade de portes côté jardin, clin d’œil au XVIIIe siècle, les salles se succèdent, spacieuses et lumineuses, déclinées dans des tonalités poudrées et pastel, meublées de merveilles Art nouveau posées sur de grands tapis aux dessins végétaux. La demeure Belle Époque des champagnes Perrier-Jouët possède une collection unique en Europe, soit 200 pièces de mobilier, arts de la table, luminaires, sculptures… signées Gallé, Majorelle, Lalique, Guimard… Sur ces pièces exceptionnelles, la nature apparaît dans le galbe d’un meuble, dans la frise d’une corniche, la ciselure d’une boiserie. On la retrouve pleinement évoquée dans une statue en bronze de Louis-Ernest Barrias, La Nature se dévoilant devant la science, dans un vase de François-Rupert Carabin posé sur la cheminée, dans les affiches d’Alfons Mucha, dans une sculpture d’Auguste Rodin offerte en 1911 à Henri Gallice, directeur de Perrier-Jouët, par son personnel pour fêter les cent ans de la maison. Collection exceptionnelle qui ne fait pas du lieu un musée mais qui offre au contraire de vivre pleinement l’expérience de l’Art nouveau. Le lien indéfectible que la Maison entretient avec l’Art nouveau date de 1902 alors qu’Émile Gallé dessine pour la bouteille de champagne le motif de l’anémone du Japon, devenu ainsi l’emblème de la Maison. Mais ici, l’Art nouveau fl irte avec l’avenir. Ce que démontrent l’œuvre en verre All’Ombra della Luce, de Ritsue Mishima illuminant le plafond du bar, mais surtout la table « Ephemerã » du duo Mischer’ Traxler ...

Faire dialoguer l’Art nouveau avec la vision artistique du XXIe siècle.

installée dans l’entrée, une commande de 2014 exposée à la Miami Design Fair, avec laquelle la maison est partenaire depuis 2012. Œuvre ludique et pétillante, forcément, on est dans une grande maison de champagne…

La philosophie Art nouveau au quotidien

L’autre grand privilège du lieu est de visiter les caves situées sous la demeure, et sur lesquelles plane un silence mystique. Dix kilomètres de couloirs voûtés et frais aux murs de calcaire, auxquels on accède en descendant un escalier majestueux, qui abrite des milliers de bouteilles rangées comme des allumettes, attendant que le temps, sept ans, œuvre pour que les bulles arrivent à maturation. Dans le dédale d’un couloir apparaît Lost Time, du studio Glithero, œuvre d’art contemporain féerique et aérienne, fl ottant sur l’eau, contribuant au mystère… C’est en 2015 que débute la restauration du lieu grâce au travail d’Axelle de Buffévent, directrice du style depuis 2011, responsable des collections de mobilier et des œuvres d’art mais également de la rénovation de la demeure et des relations avec les artistes contemporains. Pour mener ce travail passionnant et délicat, elle s’est entourée de l’historien d’art, Benjamin Loyauté, et de l’architecte d’intérieur Gaël Lunven, afi n de redonner à cette demeure Directoire son allure d’autrefois. « Côté architecture intérieure, on a réorchestré les deux niveaux en recréant les grandes galeries qui avaient disparu, explique-t-elle, et souligné le lien fort qui existe entre la maison, le vin et la cave, d’où la création d’un bar. Il s’agissait ensuite de mettre en beauté les collections, de montrer combien la philosophie Art nouveau, c’est-à-dire le travail de la main, la réaction à l’industrialisation, l’art de distiller du beau dans le quotidien, la réunion des arts… est actuelle et surtout fait écho au champagne Perrier-Jouët. » ■

1. La salle à manger avec son mobilier signé Louis Majorelle. Dans le vaisselier, porcelaine Bernardaud redessinée par Tord Boontje. la carte est signée du chef Sébastien Morellon. Lustre Art Nouveau. Murs tapissés de tissu et rideaux, Prelle, Ateliers Philippe Coudray. 2. Bureau et chaise, Louis Majorelle. Lampe en bronze, représentant la danseuse Loïe Fuller, François-Raoul Larche. Au mur, peinture sur céramique représentant La Goulue de ToulouseLautrec. Rideaux, Prelle, Ateliers Philippe Coudray. Au premier étage, la bibliothèque avec ses fauteuils Chesterfi eld en cuir. Sur la table basse, Cuvée Blanc de Blancs. Tapis dessiné par Gaël Lunven, réalisé par Tai Ping.

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Dans l’une des salles, aérienne comme des bulles de Champagne, la suspension en boucles de chaînes de perles, Lost Time de Glithero (2014). 1. Magnums Perrier-Jouët Belle Époque sur pupitres de remuage.

2. Phase de vieillissement sur lies pour les bouteilles Perrier-Jouët Belle Époque Rosé, ornées des fameuses anémones japonaises de Gallé.

LA MAISON BELLE ÉPOQUE EN QUELQUES DATES

Inscrite sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco, La Maison Belle Époque abrite l’histoire d’un champagne qui a vu le jour en 1811, grâce à Pierre-Nicolas Perrier, vigneron et botaniste, et Rose-Adélaïde Jouët, passionnés tous deux de nature. En 1850, la demeure est acquise par Eugène Gallice, beau-frère et associé de Charles Perrier, fi ls des fondateurs. Ce dernier, également botaniste, reprend l’année suivante les rênes de la société. En 1902, Perrier-Jouët est dirigé par Henri et Octave Gallice, neveux de Charles Perrier, disparu en 1878. Henri Gallice habitera le château Perrier, la demeure adjacente, son frère Octave vivra dans La Maison Belle Époque. C’est ce dernier qui, partageant sa vie entre Paris et Épernay, passionné d’art et de nature, fera la connaissance d’Émile Gallé et débutera les collections d’Art nouveau. En 1921, Henri Gallice rachète La Maison Belle Époque et en fait défi nitivement l’essence de Perrier-Jouët. Depuis 2005, le champagne Perrier-Jouët fait partie du groupe Pernod Ricard.

La Maison Belle Époque 11, avenue de Champagne, 51200 Épernay. Déjeuners gastronomiques les vendredis et samedis sur réservation uniquement au 06 74 27 05 88. perrier-jouet.com

Cellier Belle Époque 26, avenue de Champagne, 51200 Épernay.Tél. : 06 02 07 81 15 et @belleepoquesociety. Mercredi à dimanche, de 11 h à 21 h, à partir d’avril 2022.

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