Descente de la Dordogne en images Du Puy-de-Sancy où elle prend sa source jusqu’au Bec-d’Ambès en Gironde, la rivière Dordogne anime et irrigue des paysages variés, façonnés au cours des millénaires par les activités humaines et notamment par l’agriculture. Bien que peu visibles en dehors des lieux de traversée ou des points de vue exceptionnels, les paysages révèlent leurs multiples identités au fil de l’eau.
La Dordogne cristalline
Les sources de la Dordogne (63)
© P.Lainé, CPLI
Descente en images de la Dordogne - EPIDOR # 2
Elle se caractérise par l’étroitesse de la vallée : celle-ci est le plus souvent encaissée entre deux versants abrupts et la rivière est isolée du paysage alentour.
Les Sources
La Dordogne prend sa source dans le vaste cirque du Puy-de-Sancy, d’où la vue est infinie vers tous les horizons et surtout vers l’ouest. C’est tout le Massif central qui est visible depuis le Puy-deSancy, avec ses formes volcaniques et le moutonnement sans fin bleuté des forêts et des prairies. La Dore et la Dogne qui se sont rencontrées après un cours argenté forment un petit torrent de montagne qui dévale les rochers au milieu d’une flore riche et colorée : pensées sauvages, gentiane qui laissent émerger au-dessus des prairies leur haute hampe florale jaune.
Le point de rencontre de ces deux ruisseaux rompt cependant cette image bucolique : ils sont canalisés dans deux buses de ciment comme une partie du cours inférieur du torrent nommé désormais Dordogne.
Descente en images de la Dordogne - EPIDOR # 3 © P.Lainé, CPLI
Les gorges d’Avèze (63)
Les gorges d’Avèze La Dordogne est peu visible depuis les plateaux campagnards aux alentours d’Avèze et de Messeix. D’une part parce que l’entaille qu’elle a creusé dans le granite est profonde, d’autre part en raison de la couverture forestière épaisse des versants. Sur les pentes des gorges d’Avèze, les signes d’une occupation plus agricole disparue apparaissent au milieu des friches et des reboisements les plus jeunes : vestiges de prairies et de bâtiments. Au sommet des versants des gorges, sur le plateau, c’est un paysage de campagne pastorale alternant avec les bois qui s’offre au regard : prairies de fauche, haies, murets qui abritent des jardins vivriers ou des vergers, étables aux toits de lauze, composées d’un étage inférieur et d’une grange accessible par une rampe extérieure, maisons d’habitations en pierres.
Descente en images de la Dordogne - EPIDOR # 4 © P.Lainé, CPLI
Monestier-Port-Dieu, site de La Vie (19)
Le lac de Bort-les-Orgues Malgré des versants forestiers, le lac de Bort-les-Orgues offre un paysage qui contraste avec le précédent par son ampleur. Les panoramas nombreux offrent le spectacle des eaux bleues enchâssées dans une entaille de verdure et de rochers. Ce spectacle est vaste, les horizons souvent infinis. La présence de monuments historiques remarquables comme le château de Val et le prieuré de Port-Dieu ajoute un caractère supplémentaire à ce paysage qui pourrait presque passer pour naturel. Les aménagements présents sur les bords du lac confirment la vocation touristique de ce site magnifique.
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Gratte-Bruyère : confluence de la Dordogne et de la Sumène (19)
Les lacs des barrages de Marèges et de l’Aigle La géologie a imposé une fantaisie au cours de la Dordogne qui change de direction, tourne vers le nord-ouest avant de replonger vers le sud lors d’un méandre serré. La rivière reprend d’abord l’aspect de gros torrent de moyenne montagne après Bort-les-Orgues puis redevient lac sous l’effet du barrage de Marèges. Depuis le plateau, la vue passe sans obstacle au-dessus des gorges de la Dordogne. Il faut emprunter des routes sinueuses pour avoir une vue sur la rivière et sur le lac. Le spectacle devient alors grandiose, abrupt, sauvage. Le belvédère de Gratte-Bruyère est propice à la contemplation : la Dordogne devenue un lac enchâssé dans la roche et la forêt de châtaigniers de chênes ou de pins cède parfois la place à une lande de bruyères ou de genêts.
Le lac du barrage de Chastang
Cette unité de paysage reproduit dans une observation rapide, celle du lac du barrage de l’Aigle. L’inaccessibilité aux rives du lac reste la règle où les paysages encore sauvages et sombres en deviennent presque inquiétants. Seuls deux villages, Spontour et Aynes sont installés sur le long de la seule route qui longe, sur quelques kilomètres, la rive du lac.
Descente en images de la Dordogne - EPIDOR # 6 © P.Lainé, CPLI
Le port d’Argentat (19)
Le lac du barrage de Sablier, vers la Dordogne quercynoise
Si l’amont de ce lac beaucoup, moins long dans son cours, reste proche de l’ambiance des lacs supérieurs de par ses caractères paysagers, l’aval annonce un paysage plus ouvert et moins sauvage, où la présence humaine l’emporte sur la nature apparente. A l’amont, le lac est encore enchâssé entre deux versants abrupts, couverts principalement de forêt, avec cependant parfois quelques signes d’une activité agricole déclinante, tandis que la transition vers la Dordogne quercynoise s’amorce subtilement. Quelques noyers font leur apparition.
A l’aval, la transition est plus nette : le lac est plus large, les versants s’affaissent, la lumière est plus intense et l’activité agricole est plus présente. Jardins et vergers de noyers bordent le lac tandis qu’émergent les premiers complexes touristiques.
D’Argentat à Beaulieu, la Dordogne entre Massif Central et Quercy
La véritable transition entre la Dordogne cristalline du Massif Central et le Quercy est là. La vallée est toujours caractérisée par des versant pentus et élevés, mais ses formes sont désormais beaucoup plus marquées, proches de celles que la rivière a ménagées dans le calcaire quercynois : les faces concaves des méandres sont des falaises qui tombent dans la Dordogne, les faces convexes laissent apparaître des terrasses occupées par des cultures et des prairies. L’activité se fait plus dense. Près d’Argentat, l’extraction de sable et graviers a ouvert un vaste chantier sur la terrasse de la Dordogne. Ailleurs, c’est l’exploitation forestière, avec des coupes ou des plantations récentes tandis que l’urbanisation s’intensifie, surtout près d’Argentat et de Beaulieu. Ces deux bourgs traditionnels font figure de portes d’entrée amont et aval dans la vallée. Argentat aux toits de lauze s’organise soigneusement le long de la Dordogne, avec ses quais pavés en rive droite et ses belles maisons tournées vers la rivière. C’est son architecture qui marque la véritable transition entre la Dordogne cristalline du Massif Central et le Quercy : maisons trapues et massives, toits à double pente, clochetons à section carrée. Ce sont aussi, d’Argentat à Beaulieu, les prairies qui éclaircissent, çà et là, la forêt ou qui descendent jusque sur les terrasses des méandres de la Dordogne.
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© F.Ehrhardt, EPIDOR
Beaulieu-sur-Dordogne et la chapelle des pénitents (19)
La Dordogne quercynoise et périgourdine
Lacave : confluence de l'Ouysse vue du château de Belcastel (46)
© P.Lainé, CPLI
Descente en images de la Dordogne - EPIDOR # 8
La vallée de la Dordogne est dissymétrique : les vues vers le nord sont étendues, lointaines, se perdant dans des horizons de collines dont l’altitude croît avec l’éloignement. Au sud, la rive de la Dordogne est caractérisée par un coteau beaucoup plus marqué, devenant parfois falaise baignée par les eaux ou quelquefois en retrait, surplombant une pente assez raide au-dessus de la rivière. L’agriculture alterne entre vergers de noyers, cultures de fraises sous serre, maïs et tabac. L’habitat est caractéristique du Quercy.
De Biars-sur-Cère à Saint-Denis-lès-Martels et Floirac, la Dordogne quercynoise A partir de Biars-sur-Cère, la Dordogne qui suivait un cours orienté vers le sud se tourne vers l’Atlantique. C’est le moment où le calcaire des Causses imprime aux paysages une configuration particulière, où les falaises grises ou jaunâtres surplombent la rivière, où l’architecture définit un modèle reconnu au-delà des frontières françaises, où la densité des châteaux et des grands sites fournit à la vallée ses caractéristiques emblématiques.
Descente en images de la Dordogne - EPIDOR # 9 © P.Lainé, CPLI
Belvédère de Copeyre (46)
De Saint-Denis-lès-Martels à Cazoulès, un vis-à-vis alterné de cingles rocheux et de terrasses agricoles, prémices de la Dordogne périgourdine Le paysage comporte une succession de cingles bien formés, aux falaises abruptes de calcaire, et de terrasses alluviales en collines entre lesquelles la Dordogne serpente, parfois en plusieurs bras, donnant quelquefois l’impression de disparaître du décor. L’habitat s’est souvent installé en villages plus ou moins diffus sur les terrasses, en retrait de la Dordogne, à l’abri des inondations. Des avant-postes existent sur la Dordogne qui permettaient les échanges locaux et les apports de marchandises d’origine plus lointaine par les gabares. Les châteaux et demeures imposantes aux détails de construction soignés affirment la transition entre le Quercy et le Périgord.
L’agriculture se concentre en fond de vallée et sur les terrasses, alors que les coteaux se couvrent de boisements denses soumis à l’activité forestière ; vastes coupes ou reboisements sont facilement repérables sur les pentes.
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Bras mort de Calviac (24)
De Cazoulès à Groléjac, une végétation rivulaire dense Entre Cazoulès et Groléjac, la structure géologique impose un lit rectiligne et régulier où la Dordogne tente quelques velléités de divagation, qui ont laissé des traces assez nombreuses : des bras morts (appelés couasnes localement) aux rives envahies par une végétation très diverse, vestiges d’un ancien méandre de la Dordogne. Ils constituent des lieux importants pour la reproduction des poissons.
De Groléjac à Beynac, la Dordogne des grands cingles La courbe empruntée par la Dordogne après Groléjac engage la rivière dans un paysage emblématique de la vallée : celle des grands cingles majestueux. L’occupation humaine y a été diverse, mais elle a exploité les qualités d’exposition qu’offre ces sites façonnés par la rivière : le promontoire, par sa situation stratégique, est réservé au château, la falaise à un habitat médiéval de village plus ou moins troglodytique, la plaine à l’activité agricole et la rivière à la navigation.
La configuration du cingle trouve son expression la plus claire à Montfort : vaste espace dominé par le château, où la rivière dessine avec précision une courbe harmonieuse et où la plaine est réservée aux plantations de noyers et à l’élevage des oies et des canards. Depuis le château de Castelnaud-la-Chapelle, la vue sur la vallée permet une lecture vertigineuse du paysage. Les versants, couverts de forêts dominées par le chêne vert, sont parfois troués de clairières où l’habitat s’est installé. Le fond de vallée est occupé par les cultures et les noyeraies, ainsi que quelques étangs. Le passé marchand de la Dordogne a laissé de nombreux quais et cales qui jalonnent encore ses rives, fréquentés jadis par les gabares. Des châteaux aux silhouettes imposantes occupent les crêtes, les buttes ou les flancs de versant. A leur pied, on remarque un habitat traditionnel fait de maisons trapues aux toits à double pente et de séchoirs à tabac avec leurs traditionnelles planches noircies.
De Saint-Vincent-de-Cosse au Buisson-de-Cadouin Peu après Beynac en allant sur l’aval, la vallée change brusquement : l’arrêt momentané des grands cingles ouvre les versants, la vallée est plus large, les falaises sont absentes ou moins marquées qu’auparavant. La Dordogne s’écoule en méandres peu serrés. Cette unité est caractérisée notamment par le développement de l’urbanisation qui a parfois pris d’assaut les coteaux les mieux exposés d’où l’agriculture s’est retirée pour se concentrer en fond de vallée sous une forme plus intensive. Sur les autres versants, les forêts ont reconquis du terrain et quelques friches laissent apparaître des vestiges de parcellaire.
Descente en images de la Dordogne - EPIDOR # 11
© P.Lainé, CPLI
La Dordogne vue du fort troglodyte de Laroque Gageac (24)
Descente en images de la Dordogne - EPIDOR # 12 © P.Lainé, CPLI
La Dordogne à Trémolat (24)
Les cingles de Limeuil et de Trémolat ou la leçon de géographie Les deux boucles que dessinent la Dordogne à Limeuil et Trémolat forment deux grands cingles presque parfaitement symétriques. L’agriculture occupe les terres basses et alluviales enrichies par les divagations de la Dordogne. L’habitat traditionnel est à l’abri des inondations sur les vestiges des falaises internes aux méandres. Les plages et le grand bassin d’eau calme que forme le barrage de Mauzac offrent un vaste espace de loisirs et de baignade.
De Mauzac au Fleix, transition avec la Dordogne girondine Peu A l’aval de Mauzac, la rivière commence un cours beaucoup plus rectiligne dans une vallée qui se rétrécit entre des coteaux peu élevés. L’urbanisation se diffuse partout dans l’espace où la vigne occupe, surtout à partir de Bergerac, une place importante. Pourtant l’habitat présente encore une forme caractéristique du modèle périgourdin. En amont de cette unité, la vallée ressemble davantage à un couloir délimité par les coteaux boisés entre lesquels s’alignent, parallèles, la voie ferrée, le canal de Lalinde, la route et la rivière.
A la hauteur de Lalinde, la Dordogne était difficile à naviguer et les meilleurs bateliers redoutaient les rapides sournois de la Gratusse. Elle a donné naissance à la légende du Coulobre, un dragon qui vivait caché dans les entrailles de la falaise et qui menaçait les bateaux. Il aurait été terrassé par Saint Front, évangélisateur du Périgord, à qui une chapelle a été dédiée sur le versant opposé à Lalinde. Le canal de Lalinde construit pour aider au franchissement de ce malpas marque l’espace sur 15 km, mais son manque d’entretien ne contribue pas à le valoriser. La présence de pêcheurs, l’eau ruisselante et claire de la Dordogne renforcent la douceur du paysage depuis la rivière. Entre Lalinde et Bergerac, le paysage est marqué par une urbanisation diffuse et des établissements artisanaux et industriels nombreux le long de la route. Quant aux rives, leur caractère change et donne au lieu moins d’intimité. Tantôt d’aspect sauvage par les arbres qui les couvrent, tantôt « industrialisé » par la présence d’usines et leurs remblais annonçant la ville de Bergerac. L’agriculture maraîchère, et surtout céréalière, se développe sur les terres les plus riches et les plus accessibles, tandis que la Dordogne a pratiquement disparu de la vision offerte depuis les axes de communication les plus utilisés. La ville de Bergerac marque le début des grands quais qui, dès lors ponctueront la Dordogne jusqu’au Bec-d’Ambès, rappelant au souvenir l’histoire de la navigation.
Après Bergerac, le paysage entre dans un autre ensemble, caractérisé par une nouvelle architecture. C’est la fin du Périgord annoncée par l’essor de la vigne, signe de transition avec la Dordogne girondine.
Descente en images de la Dordogne - EPIDOR # 13
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La Dordogne depuis la gabare à Bergerac (24)
La Dordogne girondine La vallée élargie permet à la rivière de suivre un cours sinueux. Elle est marquée par les nombreuses traces d’anciens marais dans les lobes des méandres. Le style architectural est modifié, les
Belvédère sur la Dordogne à Pessac-sur-Dordogne (33)
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Descente en images de la Dordogne - EPIDOR # 14
châteaux deviennent viticoles, l’urbanisation sur les coteaux s’intensifie.
De Sainte-Foy à l’aval de Castillon, vergers et vignobles La présence très marquée d’une agriculture intensive, avec des vignes, des vergers et parfois des champs de maïs, structure désormais le paysage et les coteaux entre lesquels serpente la Dordogne, sans grands méandres. Sainte-Foy-la-Grande, bastide bien conservée, insérée dans le vignoble, présente un patrimoine architectural exceptionnel avec ses maisons basses alignées le long des quais, mémoire d’une activité fluviale intense dont la pêche ou la navigation de loisir sont un témoignage en pleine renaissance.
De Castillon au pont de Cubzac, les traces d’un bocage construit sur les palus La vallée s’est fortement élargie et a pris une ampleur dont elle ne se départira pas jusqu’à l’estuaire en Gironde. La rivière y dessine de larges méandres dans des terres basses et planes, où ses divagations antérieures ont donné à ces espaces un caractère humide de marais. Ces « palus », terres insalubres, ont d’ailleurs été aménagés depuis le Moyen-âge par un réseau dense de canaux de drainage, de fossés réguliers qui sillonnent ces espaces bas. Si ce « bocage » paludéen a sans doute subi d’importantes transformations en raison de rationalisation de l’agriculture et de l’extension des cultures, il n’en subsiste pas moins des traces, nombreuses : plantations alignées de chênes et de frênes, aujourd'hui envahies par une strate arbustive. Cependant, ce paysage de bocage frais et humide n’est pas majoritaire dans la vallée. A partir de Castillon, la vigne prend une extension qu’elle n’a jamais eue jusque-là, les rangées de ceps laissant parfois l’impression d’une marée verte qui dévalent les pentes des coteaux.
De Cubzac-les-Ponts au Bec d’Ambès, la Dordogne de l’estuaire
A partir de Bourg, les coteaux à vigne tombent rapidement dans la Dordogne qui est devenue très large donnant une ambiance très maritime tant par la lumière intense que par les bateaux ou les structures des ports. En rive droite le regard est arrêté par les châteaux de Tayac et d’Eyquem, représentants prestigieux des châteaux viticoles.
En rive gauche, l’influence de la marée et la proximité de l’océan sont plus que jamais ressenties et renforcées par les installations industrielles du Bec-d’Ambès qui émergent de cet espace plat d’anciens marais asséchés. D’égales largeurs, la Dordogne rejoint à Ambès la Garonne et forment l’un des plus grands estuaires d’Europe, celui de la Gironde.
Descente en images de la Dordogne - EPIDOR # 15
© P.Lainé, CPLI
Bec-d’Ambès : confluence de la Dordogne et de la Garonne (33)