INFO RIVIÈRE LETTRE D'INFORMATION Dordogne
Numéro Spécial
EPIDOR
Poissons migrateurs
Etablissement Public Territorial du Bassin de la Dordogne
n°15
Novembre 2013
Poissons Numéro Spécial migrateurs EDITO
Au sommaire
Le contrat de rivière Dordogne Atlantique s’est achevé et les derniers débats se sont orientés vers la mise en place d’un Schéma d'Aménagement et de Gestion des Eaux (SAGE). Durant les cinq années du contrat de rivière, la présence des poissons migrateurs a constamment imprégné les débats. C'est en effet un véritable patrimoine que n'ont cessé de souligner tous les membres du comité de rivière et qui a d'ailleurs été un élément essentiel du classement par l'UNESCO du bassin de la Dordogne comme Réserve Mondiale de Biosphère. Les migrateurs sont là, mais ils rencontrent des problèmes nombreux et graves. Chaque espèce a fait l’objet d’efforts et d’actions : protection des habitats, repeuplements pour l'esturgeon et le saumon, suivi des populations... mais hélas pour la majorité, les populations restent en danger. Il nous a semblé important pour clôturer les activités du comité de rivière d'évoquer la situation et les difficultés de toutes ces espèces de poissons migrateurs dont la présence ou l'abondance traduisent évidemment l'état de santé de notre Dordogne et de ses affluents, et qui incarnent en quelque sorte le résultat de toutes nos actions. Cet Info Rivière spécial migrateur fait donc un point d'étape, espèce par espèce, action par action, problème par problème qui permettra nous n'en doutons pas d'imaginer les pistes de travail que la future Commission Locale de l'Eau (CLE) devra évidemment prendre en considération pour construire le futur SAGE de la Dordogne Atlantique.
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L'état des populations
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Le franchissement des barrages du Bergeracois doit s'améliorer
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Le repeuplement : outil de restauration ou outil de survie ?
p8-9
Les éclusées hydroélectriques Questions sur la qualité des milieux Le bouchon vaseux Les PCB en question Les affluents qui souffrent
p9
A la reconquête de la continuité écologique
p10
Le silure, nouvel obstacle à la migration ? Rivière Index anguille sur la Dronne
Robert PROVAIN Conseiller Général, Maire de Sainte-Foy-La-Grande Président du Comité de Rivière Dordogne Atlantique
p11 p12
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La pêche des migrateurs Sous l'aile du dragon
INFO RIVIÈRE Dordogne LETTRE D'INFORMATION Numéro Spécial Poissons migrateurs La Dordogne abrite encore toutes les espèces de poissons migrateurs d'Europe de l'ouest. Mais toutes connaissent aujourd'hui des difficultés.
L'ÉTAT DES POPULATIONS Sauf mention particulière, les graphiques présentent les effectifs des remontées de poissons comptabilisés aux stations de contrôle vidéo de Tuilières et Mauzac (source : MIGADO)
Le saumon Atlantique Le saumon atlantique qui avait disparu du bassin versant après l'édification des barrages du Bergeracois a fait sa réapparition depuis la fin des années 1980, grâce au plan de restauration lancé par le Ministère de l'Environnement. Une population sauvage s'est progressivement réimplantée et un pic de retour a été enregistré entre 2000 et 2002 avec plus de 1 200 saumons comptabilisés à la station de Tuilières. Mais pour l'instant, certains problèmes persistant, notamment sur le franchissement des barrages du Bergeracois et les éclusées hydroélectriques sur les frayères, ne permettent pas au saumon de vivre de façon autonome dans le bassin de la Dordogne. Des opérations de repeuplement doivent donc encore se poursuivre chaque année pour maintenir la population en attendant que les problèmes soient réglés. Des analyses plus fines doivent également être menées, en confrontant les données de la Dordogne à celles des autres bassins versants, pour comprendre certaines évolutions observées depuis plusieurs années, notamment la raréfaction des remontées de castillons (saumons n'ayant passé qu'une seule saison en mer).
L'esturgeon européen
Nombre d’esturgeons adultes observés en migration sur la Dordogne, la Garonne et l’estuaire de la Gironde (déclarations de capture accidentelle)
La lamproie fluviatile
L'alose feinte L'alose feinte est présente sur la Dordogne mais l'état réel de ses populations est assez mal évalué. Objet d'une pêche de loisir assez développée et espèce accessoire de la pêche professionnelle, elle est aujourd'hui interdite de pêche et de consommation pour cause de contamination par les PCB (voir article sur les PCB).
L'esturgeon européen, dont la Dordogne avec la Garonne abrite les derniers spécimens, a bien failli disparaître définitivement. Il ne s'est plus reproduit en milieu naturel depuis 1994, mais un vaste programme de repeuplement, initié in extremis dans les années 1990, dans le cadre notamment du programme Life mené par EPIDOR et le Cemagref (aujourd'hui IRSTEA), a permis de redonner l'espoir d'un retour de l'esturgeon dans la Dordogne. Après plus d'une décennie d'élevage patient à la station de Saint Seurin sur l'Isle, les premiers repeuplements ont démarré depuis 2007. Ils sont menés par MIGADO et l'IRSTEA. Un vaste plan d'information des marins pêcheurs se poursuit car le risque principal semble toujours résider dans la capture accidentelle des esturgeons lors de leur long séjour sur la façade maritime.
La lamproie fluviatile est présente sur la Dordogne mais elle semble avoir fortement diminué par rapport à une situation historique. Les connaissances sur la population et son évolution sont très partielles.
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La grande alose La grande alose, jusque dans un passé récent, fût très abondante dans la Dordogne et la Garonne. Le nombre d'aloses remontant les fleuves a notamment connu un essor spectaculaire dans les années 1990, attribué à l'installation des passes et ascenseurs à poissons sur les barrages du Bergeracois (Dordogne) et de Golfech (Garonne). En 1996, on estime qu'environ 700 000 poissons ont remonté les deux fleuves. Il s'agissait de loin, de la plus importante population d'Europe. Elle a constitué l'une des principales ressources (avec l'anguille et la lamproie) de la pêcherie professionnelle fluviale girondine et a commencé à devenir l'objet d'une pêche de loisirs à la ligne de renommée internationale.
Durant les années 2000, on a ensuite pu assister à une « dégringolade » régulière, probablement imputable à certains changements encore inexpliqués, accélérée par une exploitation halieutique trop importante qui n’a pas été capable de s'adapter aux difficultés de l'espèce.
Suite aux niveaux alarmants atteints en 2006 et 2007, un moratoire sur la pêche a été instauré en 2008. Des recherches ont été engagées pour comprendre les raisons du crash de la population (surpêche, pollutions, étiage…) et tenter d'y remédier. Mais aucune explication certaine n'a été apportée.
La lamproie marine La lamproie marine apparaît comme la seule espèce dont la population semble se maintenir. Son abondance est néanmoins très variable d'une année à l'autre, avec des effectifs faibles ces dernières années.
La truite de mer La truite de mer, en toute rigueur, n'est pas une espèce à part entière mais la forme migratrice de la truite commune. Quelques individus remontent la Dordogne chaque année mais très peu d'informations permettent d'apprécier l'importance que revêt ce caractère migratoire pour la population de truites du bassin de la Dordogne
Le flet Le flet était autrefois relativement abondant dans les eaux de la Dordogne à l'aval de Bergerac, dans lesquelles il remontait se nourrir. Aujourd'hui, il semble beaucoup plus rare.
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Le mulet Le mulet remonte se nourrir dans la partie basse de la Dordogne. Quelques centaines d'individus peuvent remonter jusqu'au barrage de Tuilières où ils sont comptabilisés. On dispose de peu d'information sur l'évolution de cette population dans la Dordogne.
INFO RIVIÈRE Dordogne LETTRE D'INFORMATION Numéro Spécial Poissons migrateurs L'anguille
L'anguille a très fortement régressé dans toute l'Europe, avec des flux de migration et des densités de poissons pouvant avoir été divisés d'un facteur dix à cent depuis les années 1980. La population d'anguilles des bassins Gironde, Garonne et Dordogne n'a pas échappé à cette réalité comme le montrent les chiffres sur les statistiques de pêche. Mais malgré cette chute de la population, les nouveaux aménagements réalisés sur les barrages du Bergeracois permettent désormais de faire remonter un plus grand nombre d'anguilles vers l'amont du bassin. Tout comme l'alose feinte, l'anguille fait l'objet de mesures sanitaires pour cause de contamination par les PCB. Toutefois, seuls les individus de plus de 50 cm sont interdits à la pêche et à la consommation.
Statistiques des pêches d'anguilles sur la Dordogne, la Garonne et l'estuaire de la Gironde (Source IRSTEA)
Les suivis De nombreuses actions sont menées pour suivre l'évolution des populations des poissons migrateurs de la Dordogne. Des stations de contrôle vidéo, implantées dans les passes à poissons des barrages de Tuilières et Mauzac sur la Dordogne et de Monfourat sur la Dronne, permettent de déterminer chaque année les effectifs de poissons de chaque espèce observés en migration. Ces stations fournissent également des informations sur les périodes et les rythmes de migration, qu'il est possible de relier aux conditions environnementales observées sur les bassins (débits, températures…). Ces stations de contrôle sont gérées par l'association MIGADO. Des suivis annuels de l'activité de reproduction sont réalisés pour certaines espèces : le saumon, la grande alose et la lamproie marine. Ces informations permettent, en complément des données des stations de contrôle, d'estimer le stock reproducteur qui contribue chaque année au renouvellement de la population. Des pêches spécifiques sont réalisées à l'électricité sur la partie haute de la Dordogne et sur certains de ses affluents pour évaluer le succès de la reproduction et de la croissance des jeunes saumons. Ces suivis sont réalisés par l'association MIGADO.
L'association Migrateurs Garonne D o rd o gne, créée en 1989, regroupe 10 fédérations de pêche et les associations de pêcheurs professionnels du bassin. Elle met en œuvre des études et des suivis des populations des poissons migrateurs.
Les déclarations des captures par les pêcheries professionnelles et amateurs aux engins et filets mises en regard des données sur les stocks reproducteurs apportent des informations sur les taux d'exploitation des différentes populations. Ces données sont collectées et gérées par l'administration.
Elle gère notamment les stations de suivi vidéo implantées sur les ouvrages hydroélectriques de Tuilières, Mauzac sur la Dordogne et de Monfourat sur la Dronne. Elle assure la gestion de plusieurs piscicultures et mène des actions de repeuplement en saumons et en esturgeons sur la Dordogne ainsi que de grandes aloses sur le Rhin. Elle assure également une mission d'animation pour le compte de la DREAL Aquitaine, dans le cadre des plans de restauration de l'anguille et de l'esturgeon ainsi que des actions de pédagogie et de sensibilisation. L'équipe technique comporte environ 20 personnes réparties sur la Dordogne et la Garonne.
Dans le cadre du suivi de l'impact de la centrale nucléaire du Blayais, l'IRSTEA effectue des suivis de la faune aquatique et des pêcheries estuariennes qui fournissent des informations utiles à l'interprétation de l'évolution des populations de poissons migrateurs.
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Les poissons migrateurs sont confrontés dans le bergeracois à trois obstacles importants ; les barrages de Bergerac, Tuilières et Mauzac, gérés par EDF.
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LE FRANCHISSEMENT DES BARRAGES DU BERGERACOIS DOIT S'AMÉLIORER
Lors de leur construction au 19ème siècle, les barrages de Mauzac et de Bergerac étaient déjà considérés comme des obstacles. Les pêcheurs regrettaient leur présence et les ingénieurs généraux suggéraient des actions compensatoires comme la mise en place d'échelles à poissons et la création de piscicultures. En 1908, le barrage de Tuilières vint créer un troisième obstacle, encore plus conséquent que les précédents. On peut considérer que le saumon a complètement disparu du bassin de la Dordogne à cette époque. Depuis, les choses ont évolué avec la construction sur chacun des ouvrages, entre 1985 et 1989, de dispositifs tout à fait novateurs pour l'époque, originaux et impressionnants par leurs dimensions. La passe de Bergerac était alors la plus grande passe à poissons d'Europe et l'ascenseur de Tuilières, calqué sur les modèles d'ascenseurs à aloses américains était une des toutes premières installations du genre en Europe. Rapidement ces dispositifs furent empruntés par les poissons et l'on vit revenir les migrateurs sur la moyenne Dordogne. On attribue à ces passes la véritable explosion des populations d'aloses observée dans les années 1990. Mais si les passes à poissons sont des outils difficiles à concevoir, elles sont aussi difficiles à utiliser, par le poisson évidemment mais aussi par les gestionnaires. De ce fait depuis leur création, ces ouvrages ont subi de nombreuses modifications et des adaptations permanentes doivent être menées pour tenter d'optimiser leur fonctionnement et d'en faciliter l'accès par les poissons. Alors ou en sommes-nous ?
A Bergerac des travaux, réalisés sur le barrage à la fin des années 1990 ont provoqué une baisse du niveau de la ligne d'eau de la Dordogne à l'aval du barrage. De ce fait le bassin aval de la passe à poissons se trouvait surélevé, avec des chutes pouvant dépasser 70 cm en étiage. Les fentes du premier bassin ont donc dû être recalibrées pour restaurer les bonnes conditions d'écoulement et des hauteurs de chute adaptées. Des essais sont actuellement en cours pour tenter d'améliorer l'attractivité de la passe en utilisant le clapet de défeuillage situé juste à proximité de l'entrée de la passe. En effet, on a pu constater que lorsque les débits sont élevés et qu'il y a d'importants déversements sur toute la longueur du barrage, les poissons peuvent avoir des difficultés à repérer l'entrée de la passe. Une seconde passe a aussi été implantée sur le barrage en 2010, le long de la rive gauche pour favoriser le passage des petites anguillettes, qui ont des capacités de nage plus faibles que les autres espèces, mais qui ont la possibilité de ramper sur des substrats rugueux. La passe à anguillettes de Bergerac
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Le barrage et la passe à poissons de Bergerac
INFO RIVIÈRE Dordogne LETTRE D'INFORMATION Numéro Spécial Poissons migrateurs A Tuilières le retour d'expérience du fonctionnement de l'ascenseur à poissons a montré qu'il était nécessaire de consacrer une attention soutenue à cet équipement. De la bonne synchronisation de tous les organes dépend la fonctionnalité de l'ensemble (nasse, cuve, treuil, passe à bassin, débit d'attrait complémentaire…). Pour mieux suivre ce fonctionnement, des systèmes d'enregistrement de tous ces paramètres de fonctionnement ont récemment été mis en place. Des observations biologiques ont aussi été développées, avec des suivis de poissons par radiopistage, mettant en avant des difficultés pour certains poissons à repérer ou à emprunter le dispositif. En 2001 une passe à anguilles a été implantée sur la rive gauche. Elle a servi de modèle expérimental pour la mise au point d'un nouveau type de dispositif spécifique aux anguilles dit « rampes à plots ». En 2009, un système de masque-déversoir a été construit pour assurer la dévalaison des smolts. Ce système expérimental a subit une première phase de test qui a révélé une efficacité insuffisante. Des travaux de modification du masque ont été menés en 2013 et une nouvelle phase de test sera réalisée sur deux à trois ans. Un protocole d'arrêt de turbinage a également été mis en place en 2009 pour assurer la dévalaison des anguilles. Il s'agit là aussi d'un dispositif expérimental, dont les études sont encore en cours, qui vise à prévoir les mouvements de dévalaison des anguilles de façon à cibler les arrêts de turbinage sur les périodes propices. Après 4 années d'expérimentations, des liens ont été mis en évidence entre l'évolution des débits et les mouvements de dévalaison des anguilles, mais il reste très difficile d’évaluer l’efficacité du dispositif ; il subsiste notamment beaucoup d’inconnues sur les dévalaisons qui peuvent avoir lieu au p r i n t e m p s o u e n j o u r n é e c a r p e u L'ascenseur à poissons de tuilières d’observations ont été faites à ces moments.
Trois groupes de travail pour imaginer les améliorations du franchissement des barrages Devant la complexité des solutions à mettre en œuvre au niveau des passes à poissons des barrages du Bergeracois, EDF a mis en place en 2012 un groupe de réflexion technique pour travailler au suivi et au perfectionnement des dispositifs. Il rassemble l'Office National de l'Eau et des Milieux Aquatiques (ONEMA), EPIDOR, MIGADO et au niveau d'EDF, les ingénieurs spécialisés et les exploitants des barrages. En outre en 2008, le Préfet de la Dordogne a chargé un comité scientifique particulier de suivre les travaux concernant la dévalaison au barrage de Tuilières. Ce comité regroupe les principaux scientifiques intéressés au niveau de l'ONEMA, d'EDF, d'EPIDOR et de l'IRSTEA. Il a notamment entériné l'insuffisance de l'efficacité du masque de dévalaison construit en 2009 et validé les aspects techniques des modifications réalisées en 2013. Il a également validé les protocoles d'arrêts de turbinage actuellement en œuvre pour les anguilles, mais il a constaté qu'il était impossible d'évaluer de façon fiable l'efficacité globale du système en l'état actuel des données disponibles.
Masque de dévalaison des smolts de tuilières
Radiopistage Des études utilisant les techniques de radiotélémétrie ont été mises en oeuvre au niveau des ouvrages de Bergerac, Tuilières et Mauzac. Des saumons (MIGADO, 2008, EPIDOR, 2010) et des grandes aloses (EPIDOR 2012, 2013) ont été équipés de radioémetteurs, rendant possible l’observation détaillée et l’enregistrement de leurs déplacements au pied des barrages. Leur comportement face aux obstacles a pu être reconstitué et analysé, mettant en évidence, sur les trois ouvrages, des difficultés de franchissement plus ou moins importantes. Ces suivis, encore en cours actuellement, permettent de mieux comprendre les problèmes propres à chaque ouvrage et d’envisager des améliorations possibles.
A Mauzac, de nombreuses adaptations ont été apportées au dispositif préexistant pour améliorer le fonctionnement de la passe à poissons qui est implantée au niveau de l’usine hydroélectrique. Une deuxième entrée a été ajoutée en 2004 au pied de l'usine pour compléter l'entrée principale située à 30 mètres en aval. Depuis 2009, le fonctionnement de l'usine a été adapté plusieurs fois, en limitant le fonctionnement de certaines turbines durant les périodes de migration, de façon à éviter de provoquer des remous trop importants qui masquent les jets de courant provenant des entrées de la passe à poissons. Depuis 2011, plusieurs modifications successives ont été apportées au système permettant d'ajouter un débit d'attrait supplémentaire au niveau des entrées de la passe à poissons. En effet, des problèmes de colmatage récurrents ne permettaient pas de fournir les débits nécessaires au bon fonctionnement de la passe. Ces modifications sont toujours en cours de même que la modernisation de la programmation d'une régulation automatique et synchronisée des niveaux d'eau dans les deux entrées de la passe à poissons. Des travaux de réhabilitation d'une ancienne passe à poissons, située au niveau du barrage en rive gauche, ont été réalisés en 2013 car il a été constaté, que celle-ci pouvait contribuer de façon significative aux migrations lorsque les débits étaient suffisamment élevés et qu'une surverse était observée au niveau du barrage. Enfin, la construction d'une troisième passe est envisagée en 2016 au barrage en rive droite ainsi que la mise en place d'un système de dévalaison en 2017. L'aménagement hydroélectrique de Mauzac
Par ailleurs une convention a été établie en 2013 entre EDF, l'Etat et l'Agence de l'Eau Adour Garonne. Elle entérine un programme de travaux prioritaires à réaliser par EDF au niveau du bassin Adour Garonne. La construction d'une passe à poisson supplémentaire à Mauzac figure dans cette convention.
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LE REPEUPLEMENT OUTIL DE RESTAURATION OU OUTIL DE SURVIE ?
Quatre espèces font l'objet de plans de repeuplement : le saumon, l'esturgeon l’alose et l'anguille.
Le repeuplement en saumons a démarré dans les années 1980 dans le but de reconstituer une population sauvage, complètement disparue au début du 20ème siècle, à cause de l'édification des barrages du Bergeracois. Ces repeuplements ont eu lieu à partir de saumons d'origines diverses (Québec, Ecosse, Adour… ) puis à partir de saumons de Loire et d'Allier. Aujourd'hui, 4 à 600 000 alevins sont élevés et mis à l'eau chaque année à partir d'un réseau de piscicultures géré par l'association MIGADO : le Centre de Bergerac, où sont transférés et conservés durant plusieurs années des saumons sauvages de la Dordogne capturés au barrage de Tuilières, la pisciculture de Castels, spécialisée sur l'élevage de saumons de repeuplement ainsi que plusieurs piscicultures privées partenaires. Les alevins sont déversés sur la Dordogne ainsi que sur le bassin versant de la Corrèze. Environ la moitié des saumons remontant la Dordogne sont issus de ces repeuplements. Ils permettent de soutenir une population sauvage qui hélas ne parvient toujours pas à s'autosuffire.
La pisciculture de Castels
L'étude génétique des saumons de la Dordogne Des analyses génétiques sont menées depuis cinq ans pour déterminer les caractéristiques de tous les poissons participant aux reproductions artificielles sur le bassin de la Dordogne. En comparant ces données à des prélèvements réalisés sur les poissons remontant la Dordogne, on peut déterminer si ces derniers sont issus des opérations de repeuplement ou s'il s'agit de poissons sauvages. Les premiers résultats obtenus depuis deux ans montrent qu'environ la moitié des poissons seraient d'origine sauvage. C'est à la fois encourageant, car cela indique que le bassin de la Dordogne est fonctionnel pour les saumons, mais aussi inquiétant car les poissons sauvages ne représentant pas la majorité, cela signifie qu'il reste de gros problèmes à résoudre.
Lâché de jeunes esturgeons dans la Dordogne
Le plan de gestion de l’anguille, élaboré au niveau national, prévoit des actions de repeuplement. Très controversées pour leur efficacité, il s’agit en fait d’opérations de transfert d’anguillettes capturées par les pêcheries professionnelles, de leur lieu de prélèvement vers d’autres cours d’eau. Les transferts réalisés jusqu’à présent visent principalement le transfert d’anguillettes capturées sur la Dordogne, la Garonne et l’estuaire vers les lacs médocains. La maîtrise d’ouvrage de ces opérations est assurée par les pêcheurs professionnels.
Le plan de repeuplement en esturgeons a démarré dans les années 1990, à l'occasion du programme Life conduit par EPIDOR, pour répondre à la raréfaction du nombre de géniteurs et de reproductions dans le milieu naturel. La dernière reproduction naturelle est intervenue en 1994. Des infrastructures d'élevage spécialisées ont été développées par le Cemagref (aujourd'hui IRSTEA) à la station expérimentale de Saint Seurin sur l'Isle et sont aujourd'hui gérées par l'association MIGADO. Après plusieurs années d'élevage, les jeunes poissons détenus en captivité depuis la fin des années 1990 sont parvenus à la maturité sexuelle en 2007 et permettent depuis cette date de réaliser des reproductions artificielles régulières. Plusieurs dizaines de milliers d'alevins sont mis à l'eau chaque année. Le plan en est encore au démarrage puisque les premiers retours de poissons adultes sont attendus vers 2020.
Des actions de repeuplement sont conduites sur alose pour restaurer l'espèce dans le bassin du Rhin. Elles sont conduites par l'association MIGADO, à partir de la pisciculture de Bruch, en lien avec des partenaires allemands, dans le cadre d'un programme européen LIFE. Des discussions ont actuellement lieu pour savoir si, profitant du programme déjà en place et devant la gravité de l'actuelle situation de l'alose sur Gironde Garonne Dordogne, des repeuplements pourraient être menés dans la Garonne et la Dordogne.
Les piscicultures en quelques chiffres
Espèces Année de démarrage du programme Nombre de géniteurs
Novembre 2013
Castels
Bergerac
Saint Seurin sur l'Isle
Bruch
Saumon
Saumon
Esturgeon
Alose
1984
1989
1994
2008
70 poissons acclimatés
150 à 250 poissons sauvages
Life alose sur le Rhin
Nombre d'alevins
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Le programme de réimplantation des aloses dans le Rhin a été initié par les Régions allemandes de Rhénanie-Nord-Westphalie et de Hessen. Une coopération s'est développée dans le cadre deux programmes européens LIFE 2008-2010 et 2011-2014 pour développer un élevage expérimental en France, alimenté par des aloses prélevées sur la population de Garonne et de Dordogne, et transporter de jeunes aloses, âgées de quelques jours, jusqu'en Allemagne, pour être déversées dans le Rhin. Les opérations ont été menées de façon très concluantes, en attendant le résultat des remontées d'aloses adultes qui devraient intervenir à partir de 2013.
INFO RIVIÈRE Dordogne LETTRE D'INFORMATION Numéro Spécial Poissons migrateurs
LES ECLUSÉES HYDROÉLECTRIQUES La Dordogne subit des variations artificielles de débit en fonction du fonctionnement des usines hydroélectriques de la haute Dordogne. Ces éclusées provoquent l'exondation de frayères de certaines espèces, le piégeage et l'échouage d'alevins. Les barrages écrêtent également toutes les petites crues qui ne permettent plus un remaniement régulier du fond du lit. Au final les grands barrages provoquent des déséquilibres importants de tout l'écosystème aquatique. Depuis 2004, EDF a commencé à modifier l'exploitation de ses barrages en diminuant à certaines périodes l'ampleur ou la vitesse des éclusées. Ces expérimentations ont été menées dans le cadre d'un partenariat avec Epidor, l'Etat et l'Agence de l'Eau. Elles ont produit de véritables améliorations, pour le déroulement de la reproduction du saumon par exemple. Mais de nombreux impacts persistent, d'ailleurs pas tous complètement connus. C'est pourquoi, dans le cadre du renouvellement de la concession hydroélectrique de la haute Dordogne, de nombreux acteurs ont demandé la suppression totale des éclusées à l'aval du dernier barrage de la chaîne de barrages et la reconstitution de débits proches des valeurs
naturelles. Il s'agit également d'une nécessité affichée par les expertises naturalistes menées dans les programmes Natura 2000 de la vallée de la Dordogne.
Débits mesurés à Argentat Débits naturels reconstitués
L'artificialisation des débits provoquée par les grands barrages
QUESTIONS SUR LA QUALITÉ DES MILIEUX Le bouchon vaseux
Les PCB
Depuis plusieurs années, l'évolution du bouchon vaseux est source de préoccupations. Les observations des pêcheurs rapportent qu'il devient plus dense et qu'il remonte désormais plus haut à l'amont de la Dordogne et de la Garonne. Des mesures de la qualité des eaux menées depuis 2005, grâce au réseau de mesure MAGEST, montrent en effet que la situation des eaux estuariennes présentent de grandes variations dans cette zone particulière où les débits du fleuve et de l'onde de marée La station de mesure de la qualité des eaux de Libourne s'affrontent en permanence. Au plus fort de l'étiage, lorsque le bouchon vaseux est le plus fortement concentré et lorsque les températures augmentent, le taux d'oxygène dans l'eau peut alors chuter en dessous des teneurs minimales nécessaires à la vie aquatique. C'est notamment le cas sur la Garonne aux alentours de Bordeaux, où certains étés, cette situation peut durer plusieurs jours d'affilée. Sur la Dordogne, au niveau de la station de mesure de Libourne, il semble que ce type de phénomène extrême n'est jamais atteint. Mais plus à l'aval, vers la confluence entre Garonne et Dordogne, la situation n'est pas bien connue. Ces manques temporaires d'oxygène peuvent-ils influer la remontée des poissons migrateurs, notamment les années où l'on observe des étiages très précoces, en plein pendant les périodes de migration, comme par exemple en 2003 ou en 2011 ? Est-il possible que la dévalaison des alosons, qui intervient en fin d'été, soit également affectée ? Plusieurs questions qui actuellement n'ont pas été complètement explorées.
Plusieurs séries d'analyses menées ces dernières années par les services sanitaires ont révélé que les poissons de la Dordogne présentaient des teneurs en PCB supérieures aux normes sanitaires. Les Polychlorobiphényles, également appelés pyralènes, sont une famille de molécules fortement toxiques. Ces contaminations concernent surtout l'anguille et l'alose feinte, deux espèces dont la chair grasse est propice à l'accumulation des PCB, mais aussi d'autres espèces dites fortement accumulatrices comme la brème, le barbeau ou le silure. Sur les recommandations de l'Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l'Alimentation, de l'Environnement et du travail (ANSES), la consommation de ces espèces est interdite lorsque les individus dépassent une certaine taille, en raison du risque de contamination trop élevé qu'ils présentent. Sur cette base, plusieurs arrêtés préfectoraux d'interdiction de pêche ont été pris dans les départements de la Gironde, de la Dordogne et du Lot. Cette gestion sanitaire est actuellement l'objet de controverses. Les méthodes d'échantillonnage et d'analyses statistiques, pratiquées par l'ANSES sur des lots de poissons très peu nombreux et très hétérogènes, sont notamment critiquées. La gestion sanitaire drastique consistant à interdire complètement au lieu de limiter la consommation, comme cela se fait dans d'autres pays, est également mise en cause puisque les risques sanitaires ne sont avérés qu'en cas de consommation régulière. Enfin, l'absence complète de recherche sur les causes de la contamination est très largement regrettée par tous les acteurs. Par ailleurs, au-delà des questions de santé humaine posées par l'ANSES, et qui ne concernent que les espèces pêchables et susceptibles d'être consommées, on peut aussi se questionner sur l'effet des PCB et des autres contaminants présents notamment dans l'estuaire (cadmium, mercure) sur la santé des poissons, y compris des espèces les plus vulnérables comme le saumon et l'esturgeon. Mais sur ces aspects, on ne dispose actuellement d'aucune réelle connaissance.
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Les affluents qui souffrent Si la bonne qualité des eaux de la Dordogne semble représenter un atout pour les poissons migrateurs qui remontent, la situation est moins rassurante pour ceux qui s'aventurent dans les affluents. Le problème numéro un, c'est d'avoir de l'eau toute l'année. Dans ces petits cours d'eau dont le régime naturel présente des étiages marqués, les aménagements agricoles passés, curages, recalibrages…, ont souvent fragilisé la ressource en eau. Et comme sur la plupart de ces petits ruisseaux, se sont aussi développés des pompages d'irrigation, ils finissent bien souvent à sec bien avant le retour des pluies. Au bilan, 60% des affluents du bassin de la Dordogne connaissent des situations critiques récurrentes. C'est particulièrement le cas sur les affluents de la basse et de la moyenne Dordogne ainsi que ceux de la Dronne.
Les petits affluents disposant encore d'une quantité et d'une qualité d'eau acceptables sont finalement peu nombreux : l'Engranne, l'Eyraud et la Couze sur la Dordogne atlantique, le Céou et quelques émissaires karstiques dans le bassin moyen… Et pour combien de temps encore ? Ces petits systèmes sont importants pour de nombreuses espèces protégées : l'anguille, les lamproies fluviatiles et de planer, le toxostome (ou petit hotu)… et la régression de ces espèces dans le bassin versant est peut-être à relier à la dégradation générale des affluents. Echelles de sensibilisation
Sur ces bassins versants, de nombreux problèmes de qualité des eaux ont été mis en évidence notamment dans les cadres des suivis réalisés par l'Agence de l'Eau et par les Conseils Généraux : taux de nitrates en hausse, pics de concentrations de pesticides, surcharge de matières organiques à l'aval des chais vinicoles… De fait dans de nombreux affluents, les conditions de vie piscicole sont devenues très mauvaises.
A LA RECONQUÊTE DE LA CONTINUITÉ ÉCOLOGIQUE
Plusieurs projets de restauration d'axes migratoires sont lancés sur le bassin de la Dordogne.
Sur les affluents de la Dordogne atlantique, des actions groupées sont engagées, à l'initiative des syndicats locaux, sur l'Engranne, l'EyraudBarailler et sur la Couze. Ces bassins versants ont en effet été identifiés comme les rares à présenter encore des conditions environnementales favorables aux poissons migrateurs. Sur l'Engranne et l'Eyraud-Barailler, les espèces cibles sont l'anguille et les lamproies. La Couze offre également des potentialités pour les salmonidés.
Sur la Dronne, un vaste programme s'instaure pour rétablir la circulation des poissons sur un linéaire de 80 km. Les espèces ciblées sont l'alose et l'anguillette sur la partie aval et, plus à l'amont, la lamproie et l'anguille subadulte. Les besoins des espèces sédentaires seront également pris en compte. Coordonnée par EPIDOR, l'action implique les syndicats rivière ainsi que les 4 fédérations de pêche concernées (33, 14, 24, 16). Quarante et un moulins dont 12 ayant une activité de production hydroélectrique sont concernés par la démarche. Deux études groupées (l'une portée par les hydroélectriciens et l'autre par EPIDOR en lien avec les propriétaires) vont permettre de définir les aménagements à réaliser. Dans le département du Lot, un programme groupé concerne les bassins de la Bave et du Mamoul. Portée par le syndicat mixte du pays de la vallée de la Dordogne, une étude va prochainement proposer des solutions d'aménagement variées, adaptées aux cas de chacun des 13 ouvrages étudiés. Il est notamment prévu de supprimer trois ouvrages sans usages. Le projet concerne les salmonidés, la lamproie marine et l'anguille. En parallèle de ce projet d'aménagement, une étude va se mettre en place à l'initiative de la fédération de pêche du Lot, pour tenter de mesurer l'effet de ces aménagements sur les populations de poissons. Jusqu'ici, ce type d'évaluation n'a jamais été véritablement mené.
Passe à bassins sur la Couze
La Vézère, qui a connu un programme de construction de passes à poissons dans les années 1990, est actuellement l'objet d'une opération groupée, principalement ciblée sur la mise en place de dispositifs de dévalaison au niveau des centrales hydroélectriques (grilles fines + exutoires). Des améliorations de certaines passes à poissons sont également envisagées sur les sites où des insuffisances ou des problèmes récurrents ont été constatés. Les espèces principalement visées sont les salmonidés et la lamproie marine.
Des aménagements sont en cours sur la Maronne à l'aval de l'ouvrage hydroélectrique de Hautefage. EDF a démarré des travaux pour restaurer la qualité écologique du tronçon court-circuité existant entre le barrage et l'usine de Hautefage. Ce projet, devant se développer sur plusieurs années, comprend l'augmentation des débits minimums délivrés, l'apport de matériaux graveleux pour recréation de zones de frayères et l'amélioration du franchissement du seuil de la Broquerie.
Mise en place de grilles fines pour la dévalaison à Aubas
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INFO RIVIÈRE Dordogne LETTRE D'INFORMATION Numéro Spécial Poissons migrateurs
LE SILURE, NOUVEL OBSTACLE À LA MIGRATION ? Le silure, dont le développement spectaculaire dans la Dordogne est constaté depuis plusieurs années, peut-il constituer un obstacle supplémentaire au niveau des barrages ? C'est certainement le cas si l'on en croit les constats rapportés sur d'autres grands ouvrages hydroélectriques. Par exemple, à Golfech sur la Garonne, des silures ont littéralement pu coloniser la passe à poissons et y établir un territoire de chasse privilégié. Des rassemblements très importants ont aussi été constatés à l'aval des ouvrages, à certaines périodes particulières de l'année. Des poissons migrateurs ont également été retrouvés dans les estomacs de silures. Mais quelle importance ces phénomènes peuvent-ils avoir sur les populations de poissons migrateurs ? Sont-ils importants au point de remettre en cause les populations de migrateurs ? Peut-on agir de façon efficace ? Pour disposer d'arguments plus solides sur ces questions, EPIDOR développe une vaste étude, en coordination avec la pêche professionnelle, les fédérations de pêche et les équipes scientifiques de l'Université de Toulouse. Des pêches scientifiques sont menées, à la ligne et au filet, en vue de procéder à des prélèvements, à des marquages (marques externes spaghetti, marques magnétiques) et à des suivis de radio pistage. Au-delà des applications concrètes que ces études auront sur la Dordogne, les résultats, attendus dans les mois à venir, alimenteront également les travaux d'un groupe national d'étude sur le silure animé par l'ONEMA.
Marquage de silures sur la Dordogne
RIVIÈRE INDEX ANGUILLE SUR LA DRONNE Depuis deux années, un réseau de trois pêcheries scientifiques a été mis en place sur la rivière Dronne pour surveiller la dévalaison des anguilles. Ce dispositif, coordonné par EPIDOR est développé dans le cadre national des rivières Index, avec l'appui de l'Office National de l'Eau et des Milieux Aquatiques (ONEMA) et avec la participation des syndicats de rivière de la Dronne. Ces pêcheries, installées au niveau de moulins, reprennent pour partie d'anciennes installations de pêche traditionnelle. Après deux premières saisons de fonctionnement, on commence à disposer d'informations sur l'état des populations et sur les rythmes de migration des anguilles. On constate notamment que l'espèce colonise toujours la Dronne jusque très en amont, sur plus de 80 km à partir de sa confluence avec l’Isle, que les quantités présentes ont énormément diminué par rapport aux références historiques, au moins divisées par dix, que certains évènements hydrologiques (montées d'eau) concentrent d'importants mouvements de population, mais que des dévalaisons peuvent aussi intervenir presque toute l'année, surtout de nuit, mais aussi de jour quand les eaux sont troubles. On dispose également d'informations sur les caractéristiques des anguilles dévalant sur la Dronne, particulièrement utiles pour le dimensionnement des grilles fines destinées à empêcher le passage vers les turbines hydroélectriques.
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Marquage et mesure d'anguilles argentées sur la Dronne
EPIDOR Etablissement Public Territorial du Bassin de la Dordogne n°15
Autrefois ressource majeure de nombreuses pêcheries, les poissons migrateurs représentent désormais une maigre ressource.
Novembre 2013
LA PÊCHE DES MIGRATEURS
L'esturgeon, espèce strictement protégée est interdit à la pêche depuis 1981. La pêche du saumon est elle aussi interdite depuis le lancement du plan de restauration en 1978. Les niveaux de population actuels ne permettent pas d'en imaginer une exploitation halieutique prochaine. L'alose dont la population s'est effondrée est interdite à la pêche depuis 2008. La pêche de l'anguille est fortement réglementée, à la fois pour des raisons de protection de l'espèce (plan national anguille) et pour des raisons sanitaires (contamination par les PCB). L'alose feinte est interdite pour cause de contamination trop importante par les PCB. En conséquence, la pêche professionnelle, qui sur la partie aval du bassin vit presque exclusivement des espèces migratrices, connaît actuellement une grave crise. Les seules véritables ressources exploitées sont : la lamproie marine, qui conserve des niveaux de population relativement abondants et l'anguille aux plus jeunes stades (civelles et anguillettes), une partie des pêches de cette dernière étant destinée au repeuplement. Pour la pêche de loisir, les migrateurs ne représentent pratiquement plus aucun intérêt halieutique, alors qu'une activité significative de pêche à la grande alose avait pu se développer suite aux fortes abondances des années 1990, que les remontées de saumons des années 2000 laissaient entrevoir pour certains de futures opportunités de pêche et que la pêche de loisir de la civelle est désormais terminée.
Pêche de la lamproie au filet sur la basse Dordogne
Ponton de pêche à Libourne
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INFO RIVIÈRE Dordogne LETTRE D'INFORMATION Numéro Spécial Poissons migrateurs
EPIDOR Etablissement Public Territorial du Bassin de la Dordogne
LETTRE D'INFORMATION
n°15
Lamproie fluviatile Lampetra fluviatilis
Anguille européenne Anguilla anguilla
Grande alose Alosa alosa
Lamproie marine Petromyzon marinus
Ÿ En
Ÿ Le Coulobre se réjouit d'une nouvelle chanson,
« Tuilières ! Le barrage masqué ! Ohé ! Ohé ! » Pour éviter aux jeunes saumons le passage dans les turbines du barrage de Tuilières, EDF a installé un écran en amont de l'usine pour masquer l'entrée des turbines. Mais les smolts, manquant franchement de bonne volonté, continuent à vouloir passer dans les turbines au risque avéré d'y laisser leurs écailles.
Saumon atlantique Salmo salar
alose feinte Alosa fallax
Esturgeon européen Acipenser sturio
Ÿ Une convention a été signée entre EDF, l'Etat et l'Agence de l'Eau, définissant des priorités d'intervention à l'échelle du bassin Adour Garonne. En ce qui concerne la Dordogne, trois priorités ont été identifiées : le barrage de Mauzac, le barrage de Mauzac et le barrage de Mauzac. Le Coulobre espère sincèrement qu'on réussira au moins à atteindre une de ces trois priorités.
Flet Platichthys flesus
Mulet Liza ramada
Truite de mer Salmo trutta
Sous l'aile du dragon
Octobre 2013
1995, les scientifiques décrivaient l'alose comme un poisson très prolifique, dont les populations pouvaient se reconstituer de façon spectaculaire à partir d'un petit nombre d'individus. En 2008, certains travaux de recherche concluaient aussi que l'alose de la Dordogne n'avait rien à craindre du changement climatique, car celui-ci renforcerait les populations dans cette partie de l'Europe. Aujourd'hui que l'espèce est exsangue on évoque maintenant les arguments inverses. Le Coulobre ne sait plus qui croire !
Ÿ La polémique continue de faire rage concernant l'impact des barrages sur les flux d'objets flottants dans la Dordogne : les usagers de l'aval, notamment les bateliers, sont peu convaincus par le discours d'EDF qui assure que les barrages sont transparents vis-à-vis des flottants. Le Coulobre regrette que les barrages laissent passer les déchets et malheureusement retiennent les poissons. La vie est décidément compliquée ! Ÿ Le Coulobre s'interroge : la lamproie adulte se cuisine avec le vin Bordelais ; mais les larves de lamproies ne supportent pas les effluents vinicoles rejetés dans les rivières. Faut-il supprimer le vin de Bordeaux ou risquer de ne plus avoir de lamproies pour manger avec ? Ÿ Les études menées par l'Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l'Alimentation de l'Environnement et du Travail déclarent que les poissons dits « fortement accumulateurs » sont impropres à la consommation si leur taille dépasse 50 cm. Le Coulobre déconseille la consommation des vairons qui atteindraient cette taille, car ils appartiennent à cette catégorie !
EPIDOR EPIDOR Etablissement Public Territorial du Bassin de la Dordogne Place de la Laïcité, 24250 Castelnaud-la-Chapelle 05 53 29 17 65 / epidor@eptb-dordogne.fr
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Antenne Haute Dordogne MAURIAC (Cantal) 04 71 68 01 94 Antenne Dordogne Atlantique ST-DENIS-DE-PILE (Gironde) 05 57 25 10 98
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Ÿ Des études génétiques sont menées sur les saumons de la Dordogne. Le Coulobre s'inquiète des conséquences d'éventuelles sélections ou manipulations génétiques : des saumons trop gros pourraient boucher les passes à poissons. Il y a déjà suffisamment de problèmes comme ça ! Ÿ Les dents de la rivière. Le silure est accusé de menacer les saumons et les aloses. Les esturgeons, qui sont déversés dans les zones profondes de la Dordogne aval, envisagent une action syndicale pour faire reconnaître les risques auxquels ils sont aussi exposés. Ÿ Qui fait la police ? Les poissons sont désormais surveillés par les agents de l'Office National de la Chasse. Pour être mieux protégés, le Coulobre recommande aux poissons de la Dordogne de se laisser pousser des plumes ou de porter des bois sur la tête. Ÿ Les statisticiens constatent que les populations de poissons diminuent en même temps que les études et les suivis augmentent. Faut-il établir un quota sur les études biologiques pour protéger les poissons ? Ÿ Des repeuplements de saumons ont lieu depuis 1985, des repeuplements d'esturgeons depuis 2007, des repeuplements d'aloses sont envisagés pour les prochaines années… Vu l'effet limité de ces solutions, le Coulobre suggère directement le repeuplement des pêcheurs. Ÿ Au titre de Natura 2000, les biologistes sont sommés par l'administration de produire des études d'incidence des pêches scientifiques qu'ils mènent en vue de protéger les poissons migrateurs. Le Coulobre regrette qu'une telle rigueur d'application des textes ne soit pas adoptée dans tous les domaines !