Le Nouvel Afrique 18

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EDITORIAL

Petit à petit, l’Afrique se forge Editorial

Daouda Emile OUEDRAOGO Depuis Kwamé N’Kruma, Patrice Lumumba, jusqu’aux ténors d’aujourd’hui tels Mouammar Kadhafi, Alpha Omar Konaré, le rêve de l’unité africaine prend forme, petit à petit. L’Afrique n’a jamais été aussi proche de son destin d’être un seul Etat. Le dernier sommet de l’Union africaine à Addis Abeba en Ethiopie situe les Africains sur les mentalités nouvelles qui guident la nouvelle génération des chefs d’Etats africains. La réussite de ce sommet qui a porté à la tête de l’UA, le Président Mutahrika Wa Bingu du Malawi, a donné l’impression au monde entier que l’Afrique a décidé de ne plus dormir sur ses lauriers. La preuve, l’intérêt suscité par les chefs d’Etats par leur présence massive et les différents engagements pris pour donner à l’Afrique les mécanismes utiles à son développement. Il y a longtemps qu’on avait vu le NEPAD(1), les différents programmes de développements faire l’objet d’une grande attention de la part des chefs d’Etats. Il y a longtemps aussi qu’on avait vu une rupture entre les discours et les actes. Le nouveau président de l’Union, Mutharika a surpris l’auditoire en faisant comprendre que l’Afrique a trop parlé, et qu’il faut passer aux actes concrets. Créé en 2002, le parcours de l’Union Africaine pour créer une société plus viable en Afrique, une société où le frère du Soudan regardera son frère du Tchad comme les artisans de l’avènement d’une Afrique unie et prospère, est à saluer. En huit ans, l’Union africaine a parcouru autant de chemin que l’a fait la Communauté des Etats économiques (CEE) avant de devenir l’Union européenne. Il ne s’agit pas ici de se chatouiller pour rire. Il s’agit de reconnaître les avancées notables réalisées dans la construction des «Etats-Unis d’Afrique» ou de la «République fédérale d’Afrique». Le rêve n’est pas impossible. Si les autres l’ont pu pourquoi pas l’Afrique? Ce n’est pas sorcier de bâtir

une Afrique unie avec un seul Etat. Cela a déjà commencé avec les multiples projets de développement inter Etats. La sous-région ouest africaine veut construire une route en sorte de toile qui interconnectera tous les pays de cette région. L’on imagine un tant soit peu les bénéfices de cette réalisation. Elle permettra de faire tomber les barrières frontalières. Le brassage des peuples sera une réalité. Lorsque les pères de l’Afrique, N’Krumah du Ghana en tête lançait l’idée des Etats unis d’Afrique dès l’aube des indépendances, les réalités politiques, les tensions du moment avec la main mise, la quasi monopole et présence des puissances coloniales ont freiné les élans des dirigeants africains. Aujourd’hui, le monde a changé et l’Afrique veut changer. Ce changement naît des mentalités. L’Afrique commence à tenir tête à des politiques drastiques de développement imposées par des multinationales. Des chefs d’Etats africains prônent ouvertement la transformation des produits bruts en produits finis sur le sol africain. L’exemple du cacao en Côte d’Ivoire est une illustration. Le courage politique des dirigeants africains sera la seule arme pour vaincre les adversités en vue de créer les Etats unis d’Afrique. Ce n’est ni une utopie, ni un rêve irréalisable. Il va falloir peut-être cent, deux cents, trois cents ou mille ans, tôt ou tard, l’Afrique devra s’unir si elle veut grandir. Cela a déjà commencé. Dans de multiples fora, l’Afrique parle d’une seule voix grâce à l’Union africaine. C’est le début d’une œuvre de longue haleine car, les plus belles oeuvres ne se construisent que dans la durée, la sueur et souvent au prix du sang.

(1) NEPAD: Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique

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SOMMAIRE EDUCATION

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L’éducation clé de l’avenir Par Yves Makodia Mantseka

POLITIQUE

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Tchad-Soudan Le dégel

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Par Daouda Emile Ouedraogo

Côte d’Ivoire La sortie de crise de nouveau sur les rails Par Alexandre Korbeogo

ACTUALITE

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FRANCE - ALGERIE Je t’aime moi non plus

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Par Cyrille Momote Kabange

Coup d’état au Niger Le retour des vieux démons

18

Par Alexandre Korbeogo

Le quatorzième sommet de l’Union africaine maturité et stabilité Par Cyrille Momote Kabange

MAGHREB

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L’association Art Universel Investir dans les enfants, le meilleur outil pour combattre la pauvreté et l’inégalité Par Jamal Garando et Daouda Emile Ouedraogo

OPINION

22

Que l’homme d’argent est différent de l’homme riche Par Tebi Joachim Able

Directeur de publication:

Mensuel d’informations

Un regard positif sur l’Afrique

Cyrille Momote Kabange Rédacteur en chef: Daouda Emile Ouedraogo

MISSION STATEMENT

Editorialiste:

La direction du magazine Le Nouvel Afrique porte l’Afrique dans son cœur et est

Cyrille Momote Kabange

désireuse de rassembler dans ce mensuel d’informations des nouvelles positives

Comité rédactionnel:

sur l’Afrique. Le Nouvel Afrique se veut une porte d’entrée vers l’Afrique en offrant

Yves Makodia Mantseka, Daouda Emile Ouedraogo, Alexandre Korbeogo, Cyrille

une information responsable et objective sur ce continent. Les sujets (politiques,

Momote Kabange, Jamal Garando, Karol Boudreaux, Ginette Mupanda, Patrick-

sociaux, économiques, sportifs et culturels) abordent des thèmes sensibles, tout

Eric Manpouya, Persyde Doowo, Marc De Vrieze, Saïda Lamouatagh, Art Universel,

en conservant néanmoins, une perspective positive. Le sous-titre du Nouvel Afri-

Vincent Hickman, www.unmondelibre.org

que est ‘Un regard positif sur l’Afrique’.

Photographie: Pierre Holtz, Daniel Gasienica, Focus35, Cedric Favero, David Chantoiseau, Jamal

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Le Nouvel Afrique est fondé le 7 décembre 2006 à Bruxelles (Belgique) par Victor

Garando, Jerry Woody, LNA, 1GOAL, David Blumenkrantz, Yasmina Baggili, Lucie

Olembo Lomami.

Rioland, Daniel Bobadilla

Le NouvelAfrique [n°18] 03 / 2010


DEVELOPPEMENT

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Les femmes peuvent mener la barque Par Karol Boudreaux

Plus d’expansion de Brussels Airlines en Afrique Par Ginette Mupanda

SANTE

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Espoir d’un vaccin efficace pour la première cause de mortalité en Afrique

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Par Patrick-Eric Manpouya

RDC-Belgique Les soins médicaux payés pour les Congolais Par Persyde Doowo

CHRONIQUE

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L’Union africaine à la croisée des chemins Par Cyrille Momote Kabange

SPORT

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1GOAL soutenez la Campagne Mondiale pour l’Education par le football

FRIENDLY FOOT

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Friendly Foot contribue à la campagne 1GOAL Par Marc De Vrieze

CULTURE

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Karim Baggili Sextet Par Saïda Lamouatagh, Art Universel

A la découverte de la sanza rectification

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CUISINE

42

Par Vincent Hickman

Livres Délice du pays de la teranga Poulet Yassa

ADMINISTRATION & PUBLICITE Direction Générale: Le LNA est une publication de l’asbl Friendly Foot www.friendlyfoot.be Directeur adjoint: Christel Kompany Président: Augustin IZEIDI

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EDUCATION Une classe d’écoliers Fes, Maroc © Daniel Gasienica

L’éducation clé de l’avenir Par Yves Makodia Mantseka

L’éducation est une mise en œuvre des moyens propres à assurer la formation et le développement de l’être humain. C’est aussi un outil pour développer la personnalité humaine et renforcer le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

L’éducation est l’action de développer un ensemble de connaissances et de valeurs morales, physiques, intellectuelles, scientifiques considérées comme essentielles pour atteindre le niveau de culture souhaitée. L’absolue nécessité de l’éducation s’avère incontournable pour un pays. Après le pain, l’éducation est le premier besoin du peuple écrivait «Danton»(1). Ce besoin impérieux est aussi un outil pour développer la personnalité humaine et renforcer le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Ainsi investir dans l’éducation, c’est bâtir la paix et le progrès des peuples. L’éducation pour tous, par tous, tout au long de la vie. Tel est le leitmotiv de l’UNESCO(2) pour faire comprendre aux états du monde entier la dimension et l’importance majeure de cette notion dans l’éclosion de la richesse et la croissance d’un continent.

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L’éducation et les champions de la croissance L’Afrique longtemps emprisonnée dans l’antre du sous-développement n’a pas connu ses cinquante dernières années qui ont marqué son accession à l’indépendance le véritable essor qu’impulse l’investissement humain. Son économie en retard au reste des nations dominantes de l’Occident a drainé endettement, crise et pauvreté effroyable. Cette trilogie engloutissant les nations a esseulé et exclu. Ce continent le plus âgé a joué dans le concert mondial orchestré par les nantis qui ont imposé le tempo du marché et le rythme affolant du système fondé sur la concurrence déloyale et le protectionnisme. Que faire pour adopter cette voie et sortir l’Afrique dans la machinerie des possédants et de leur carcan imposé, étouffant cette dernière à trouver une place de choix sur

l’échiquier international défavorable à son actif? Peut-on envisager un modèle singulier pour une Afrique singulière? L’unité africaine demeure la sortie. Et encore il faut que celle-ci trouve l’enracinement dans l’économie d’abord et politique ensuite pour tenir tête aux pays du nord et dire non à leur politique asservissante et dominatrice perpétuant la dépendance. L’Afrique a oublié cette voie de développement qui a fait des nations émergentes d’Asie du sud est et des pays naissant à forte dose de croissance économique comme la Chine, l’Inde et l’actuel Brésil, les meilleurs élèves du Fonds et de la Banque mondiale. Ces champions de la croissance, tirant le monde vers la réussite et le progrès, ont su privilégier l’investissement de la personne humaine. L’éducation physique, sportive et civique destinée à former des citoyens ont grandement été dans ces pays les domaines primordiaux.


La création des écoles de métiers, des formations publiques, privées, des facultés, des sciences de l’éducation avec des méthodes didactiques ou pédagogiques, ont favorisé l’éducation intellectuelle et morale avec la religion dans ces pays à domination de valeurs ancestrales aujourd’hui subissant quelques liftings de modernité au profit du développement. Ce mariage a fait naitre une nouvelle façon de vivre à l’occidental mais tout en gardant précieux les acquis de la tradition ancrée dans les mœurs et coutumes existantes.

fort illustrative de l’intérêt considérable que revêt cet outil essentiel. L’Afrique est pauvre dans ce domaine. Les faibles moyens alloués récoltent des résultats négatifs et montrent à fortiori la situation alarmante d’aujourd’hui: absence de mains d’œuvre qualifiées, pénurie des cadres et fuite des cerveaux. L’intérieur des Etats miné par des politiques non distributives et non ouvertes à l’élite qu’il faut à la place qu’il faut, est le foyer dominant d’une caste au pouvoir accaparant tout et dépensant tout à des fins improductives.

Une future élite

Un meilleur encadrement

Un élève qu’on éduque donne une future élite pour la nation. «Chaque enfant qu’on enseigne est un homme qu’on gagne», disait Victor Hugo(3). Il est le plus important patrimoine à sauvegarder. L’éducation de l’enfant repose sur la famille, l’école, la société, mais aussi sur les lectures personnelles et sur l’usage des médias comme la télévision ou l’internet. La meilleure école, c’est l’école de la maison. C’est cette école de la maison qu’il faut entretenir et amplifier dans nos familles africaines, pour recevoir les germes d’une bonne éducation par l’instruction. C’est sur cette base éducative familiale, de politesse, savoir-vivre, que l’enfant naît, croît, s’élève et se cultive pour devenir quelqu’un à l’image de ses parents. Ce responsable exemplaire façonné avec les valeurs reçues en partage. Passeurs des vertus, ce sont les parents qu’il faut avant tout éduquer pour servir de modèle à leur propre progéniture engendrée. Il faut pour une Afrique à la recherche de ses repères donner à ses enfants perdus, englués dans la violence et les guerres tribales de labourer ces chemins obstrués et de déblayer les feuilles mortes, pour construire les nouvelles pistes et élargir les horizons qui éclaireront les futurs bâtisseurs de demain, ces héritiers du développement intégral, ce développement de l’homme et de tout son être et de tous les autres en symbiose parfaite, ces ardents zélateurs de la mondialisation à visage humain.

Culture nécessaire au développement de la personnalité et à l’intégration sociale de l’individu, l’éducation est absente dans les campagnes et les villages reculés. Les paysans isolés et abandonnés dans ces contrées lointaines meurent incultes et pauvres en connaissances et pratiques utiles à l’essor du labeur quotidien demeuré rudimentaire. Un meilleur encadrement, assistance et conseil de nos villages, entrainera l’Afrique à repenser le développement tiré par la base travailleuse. Le développement participatif redonnera le rôle prépondérant au monde rural dans la croissance des économies. La liberté dans le choix des projets, des programmes et des stratégies de développement dans ces lieux, dynamisera les cultures, la production et la commercialisation des produits de base par l’arrêt de l’exode rural. Le taux d’alphabétisation hier encore fort élevé diminuera et les campagnes de prévention, de sensibilisation orientées par l’éducation sexuelle éradiqueront certains maux et stoppera dans les coins enclavés la pullulation des maladies transmissibles et avec lui la pandémie du SIDA.

Le ministère de l’éducation nationale et de l’enseignement général est fort capital pour asseoir le développement durable et partant la croissance soutenue. La décennie des Nations Unies pour l’éducation en vue du développement durable (2005-2014) est

En négligeant l’investissement humain, l’Afrique déjà patraque de multiples maux de crises intérieures notoires sombre de plus en plus dans un marasme sans perspective. A l’instar des pays émergents, elle doit mettre l’accent sur la priorité de ces moyens et redéployer les efforts colossaux pour endiguer la crise qui cisaille son peuple et l’éloigne indubitablement du concert des nations développées. C’est par ce fait qu’elle pourra se détacher de l’emprise des possédants plus que jamais arc-boutés dans la politique outrancière d’asservissement et non de l’autonomie voire de l’émergence du géant africain.

Pourquoi l’Afrique n’a pas connu le véritable essor? C’est en raison des causes ou problèmes inhérents aux facteurs sociaux, politiques et économiques criards qui ont enlisé l’Afrique dans le bourbier du mal, creusant au fil des ans le fossé du sous développement. Sur le plan sociopolitique, l’on observe la dominance quasi-statique de crises multiformes orchestrées par des guerres civiles, des coups d’état répétés. De plus, on remarque la présence de l’état bureaucratique, l’absence d’institutions solides, d’enseignants, de professeurs. Sur le plan économique, l’on note la pénurie des capitaux, le manque d’initiative privée. Ces maux ont occasionné, par exemple, la fermeture des écoles, des universités, des ateliers, et de ces centres générateurs de formation et de développement de l’éducation. Ils ont sapé l’élan des gouvernements et des partenaires du développement faisant de leurs projets éducatifs des lettres mortes et par conséquent nuisant l’environnement permissif au déclenchement de la croissance économique impulsée par l’investissement du capital humain. Telles sont, en substance, les causes qui expliquent l’absence notable en Afrique d’un véritable essor impulsé par la dynamique de l’investissement humain. Qu’en est-il de cette voie de développement ou stratégie oubliée?

Les stratégies de développement En effet, les stratégies de développement appliquées par l’Afrique au cours des cinquante dernières années n’ont pas privilégié l’investissement du capital humain. Les années soixante et soixante-dix, les politiques furent celles de substitution aux importations et aux exportations négligeant l’éducation au profit de l’industrie. Sans infrastructures adéquates, ni biens d’équipements et main d’œuvre qualifiée, ces voies de sortie de crise en occultant l’investissement humain d’abord ont prêché dans le désert et connu des échecs cuisants. Ces stratégies d’extraversion croissante ont mis la charrue avant les bœufs. Elles n’ont guère construit au préalable les routes ni installé l’électricité

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EDUCATION L’enseignement primaire de base: priorité des priorités

et pis encore donné la primauté à la richesse des cerveaux humains ou matières grises dans cette marche de la modernisation accélérée. Dans cette incurie des autorités locales, l’Afrique subsaharienne est demeurée inerte dans le processus de mécanisation souhaitée par la manifeste absence des experts, des inventeurs, des créateurs ou génies pouvant catalyser l’énergie propice au progrès et au changement attendu. A l’inverse, on a vu apparaître l’émergence des états gendarmes, envahissants, contestataires et souvent sous le joug du communiste rampant. A l’aube des années quatre-vingt et fin quatre-vingt-dix, les programmes d’ajustement structurel pilotés par la Banque mondiale en filiation avec le Fonds monétaire international ont mis en avant les politiques d’austérité. Ouverture des économies et insertion de celles-ci sur le marché mondial. Ces PAS (Programme d’Ajustement Structurel) ont généré des dettes colossales et entrainé des conséquences désastreuses sur les plans politiques et socio-économiques et culturels sans précédent. Le volet éducation a trouvé une place de choix durant ces périodes. Les stratégies et politiques éducatives ont été mises en avant. Les rapports sur le développement ont consacré des études et lancé des programmes sérieux sur ce pilier

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de la croissance économique. L’UNESCO, le PNUD(4) et les bailleurs internationaux ont déployé des efforts et octroyé des fonds substantiels. Des avancées significatives ont été enregistrées ça et là dans les zones reculées de l’Afrique subsaharienne et dans certaines localités ou métropoles. Mais ces investissements n’ont point donné les résultats escomptés. Le défi de l’illettrisme n’a pas été relevé et l’objectif visé d’ici à l’an 2000 a accouché le soleil noir de la désolation et de la tristesse. Chute du taux de scolarisation. A ce propos, les chiffres étayent justement cette situation: Depuis les années 1970, l’éducation en Afrique se porte mal. De 1980 à aujourd’hui, le taux de scolarisation est passé de 69,2 à 71,7 %. Il faut être prudent avec ces chiffres, qui sont manipulés par les pouvoirs publics pour des raisons diverses et variées. Le taux de scolarisation a chuté du fait du déficit de financement du secteur par les gouvernements africains. Malgré tous les discours, dans les faits, l’éducation n’est pas considérée comme une priorité. Le phénomène de privatisation des écoles augmente et seuls ceux qui ont les moyens de payer les charges peuvent y accéder(4).

Une prise de conscience Les années 2000 s’ouvrent sur le son de cloche d’une prise de conscience des échecs de politiques économiques antérieures. En décrétant solennellement le 21eme siècle l’âge du capital humain. Et en prônant les TIC (technologies de l’information et de la communication) pour pallier aux insuffisances d’hier et être dans l’ère de l’information via internet. Comme pour souligner l’importance du développement du capital humain et de ces ingrédients dans la réalisation de l’éducation pour tous. Dans l’augmentation de revenu et des avantages économiques et culturels. Fort propice à la plus grande intégration des populations isolées –rurales en particulier– dans la société et dans la mouvance de l’activité économique. Mais, les insuccès de ces paradigmes illustrent à l’évidence que, le continent africain a oublié l’éducation, ce pilier de développement inéluctable. L’Afrique dans sa course vers le développement économique, politique et social a superbement ignoré cette voie de sortie en focalisant son attention sur d’autres secteurs de développement. En somme, le couple éducation et santé a été sacrifié sur l’autel de la priorité de l’agriculture toujours rudimentaire. Et de l’industrie aveuglée par le miroir opaque des marchés intérieurs demeurés étroits et embryonnaires.


L’Afrique doit accepter l’expérience des autres et développer son propre modèle qui fera d’elle le continent singulier. Chacun s’enrichit des connaissances et du savoir de l’autre. L’autarcie n’est pas une panacée du développement. L’ouverture reste le chemin de conciliation des forces antagonistes et un levier pour atteindre le meilleur issu des valeurs nationales et des talents venus d’ailleurs. Le continent oublié a un besoin essentiel de composer avec ce savoir faire des pays avancés pour construire sa propre industrie. Aujourd’hui doit être le temps de signature des accords de coopérations, commerciaux, d’échanges de main d’œuvre qualifiée et transferts de fonds pour édifier le futur avec la maitrise de la technologie, l’invention et l’innovation qui permettront de créer notre propre richesse. La dépendance préparant l’indépendance, l’Afrique libérée de l’étau d’assistanat, réussira toute seule comme jadis les nations émergentes du présent à se hisser et se développer sur le socle de son modèle authentique: l’exception africaine.

L’Union africaine solidaire Mais il faut une Union africaine à orientation doctrinale «solidaire» et assise sur une démocratie solide et apaisée. Cette démocratie de rassemblement où toutes les forces vives du continent œuvrent à l’unisson des états libres et fraternels qui prônent par-dessus l’intérêt général. A l’idée d’une monnaie unique doit s’ajouter celle d’union politique chère à nos ancêtres. L’Afrique doit marcher avec une seule politique et défendre une seule voix dans la défense des intérêts majeurs de son peuple uni et rassemblé. Ces dirigeants, issus de nations unifiées deviendront, les plaideurs d’un projet commun formulé par la base. Une approche ascendante où les unités de base s’imbriqueront dans le processus de développement redonnera à l’Afrique nouvelle, régénérée, une impulsion de progrès et de développement sans précédent. Chaque nation gardera sa culture et ses valeurs anciennes et son autonomie. L’union fait la force… le continent sortie de lacis sinistre et ségrégationniste fera fi des luttes intestines rampantes et gagnera en maturité la force galvanisatrice de cavalier seul sur le chemin des continents développés et majeurs. Doté d’une économie forte et d’un pouvoir politique proéminent.

Que faire? Il faut replacer l’Investissement humain au cœur du développement. Des portefeuilles économiques des gouvernements des états Africains. Cette place de choix où il doit jouer le rôle prépondérant dans la dynamique de la croissance. Il doit être la priorité des priorités. Ce faisant, il importe de déployer des efforts considérables et allouer des moyens financiers nécessaires dans le domaine de l’éducation de base. A ce niveau, l’enseignement doit être non seulement obligatoire, mais également et surtout accessible à tous et à toutes quelque soit le niveau social. Des budgets spéciaux doivent y être consacrés sans aucun ménagement. Cette base éduquée, mieux formée, servira de tremplin pour asseoir solidement l’enseignement secondaire et supérieur, avec des élèves et étudiants nantis en connaissances et savoirs essentiels. Ce réservoir enrichissant donnera des compétences et des talents certains pour une élite recherchée susceptible de rivaliser avec l’extérieur. Ces cadres doteront l’Afrique en main d’œuvre recherchée capable de diriger et de manager les entreprises locales. Ces firmes taillées à la mesure internationale avec à la pointe une technologie, une créativité et une innovation, participeront librement à la concurrence et à la compétitivité du marché mondial.

C’est par ce biais que l’investissement humain non négligé fera que notre système éducatif prendra solidement corps dans sa spécificité africaine et dans l’ouverture vers le monde. Cette union donnera à l’école africaine de demain une osmose parfaite, en adéquation avec la formation professionnelle et les demandes sans cesse croissantes du monde du travail. L’éducation est la clé du développement de l’Afrique. C’est par l’éducation que le peuple africain obtiendra son autonomie et développera son potentiel. Une nation éduquée est gage d’évolution, de réussite et de victoire. Le futur du continent noir s’assombrira plus avec l’obscurantisme de ses dirigeants claquemurés dans l’ignorance totale engendrant l’indolence et l’incurie généralisée. L’éducation politique couplée avec celle dite scientifique, morale, éthique, religieuse voire spirituelle redonnera à l’élite dirigeante africaine une vision nouvelle et un idéal élevé. Cet homme nouveau et une âme nouvelle feront du gouvernant renaissant un défenseur de l’humanisme intégral africain, celui qui œuvre à bâtir un village global africain sur les valeurs cardinales de nos éternels aïeux, celles qui contribuent au développement.

Une synergie motrice Bien sûr, il faut créer au niveau national et panafricain, une synergie motrice pour que cet outil indispensable qu’est l’éducation de qualité ne soit pas jeté aux oubliettes. Pour cela, il faut mettre en place une commission spéciale à l’échelle panafricaine. Cette chambre de résonnance communautaire, ce bureau d’idées ou foyer de réflexion et de création de projets serviront de relais aux Etats membres de l’Union pour amplifier et faire passer par l’application effective au niveau local des plans ou projets adoptés au sein de la communauté. Cette forme de conglomérat des intérêts éducatifs convergents, réunissant les africains eux–mêmes et aidée par les organismes financiers internationaux et les ONG crédibles par l’élaboration de convention, donneront à l’investissement humain le pouvoir de création de personnels chevronnés et feront naitre des compétences utiles à l’éclosion de la richesse et du développement tant attendus.

Notes (1)Georges Jacques Danton (1759-1794), Discours à l’Assemblée le 13 août en 1793 (2)www.unesco.org (3)Victor Hugo (1802-1885), Recueil: «Les quatre vents de l’esprit» (4)PNUD: Programme des Nations Unies pour le Développement (5)http://www.alaincapochichi.com/webalain/index.php/ leducation-au-benin

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POLITIQUE Enfants du Darfour camp de réfugiés au Tchad © Focus35

Tchad-Soudan Le dégel

Par Daouda Emile Ouedraogo

Le Tchad et le Soudan ont décidé de fumer le calumet de la paix. Idriss Deby Itno, le Président tchadien, et son homologue Omar El Bechir, en signant un accord pour la paix font renaître l’espoir dans un Darfour meurtri.

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Les années d’errances remplacées par les sourires d’un avenir meilleur Enfants du Darfour camp de réfugiés au Tchad © LNA

Aleas jacta est, le sort est jeté comme disent les latins. Le Tchad et le Soudan ont décidé de ne plus se regarder en chien de faïence. Il y a des années de cela, personne n’aurait envisagé que ces deux pays, liés par l’histoire, décideront de faire front pour lutter contre leurs rebellions respectives. L’accord historique signé entre Khartoum et N’Djamena est sans précédent dans la marche des peuples vers la liberté et la paix. Cet accord prévoit que les pays refuseront désormais d’être les bases arrières des groupes rebelles. Mieux, les deux pays contribueront par des échanges d’informations à traquer les rebelles. Le Tchad et le Soudan «se sont donné un délai de deux mois pour prendre chacun les mesures qu’il faut pour mettre un terme à toute présence, tout soutien et à toute action des groupes armés à l’un ou l’autre pays», selon des sources diplomatiques. C’est une avancée notable dans le processus de paix entre ces deux pays dont l’histoire et la géographie sont comme les deux faces d’une même pièce. Un grain de sagesse africaine dit qu’une seule main ne peut pas ramasser la poudre de farine. En s’unissant pour combattre les groupes rebelles, les deux pays témoignent que l’union fait la force. C’est pourquoi le communiqué conjoint est clair sur les intentions des deux pays de mettre un terme aux agissements des différentes rebellions. «Les deux parties encouragent les groupes

armés hostiles à accepter les appels à la paix de leur gouvernement respectif; à défaut, ils feront l’objet de désarmement et de neutralisation. Les Groupes neutralisés et désarmés ont le choix, soit de rentrer dans leur pays d’origine, soit de résider dans le pays d’accueil en qualité de réfugiés, sur la base d’une liste nominative agréée par les gouvernements respectifs des deux pays. Les demandeurs de statut de réfugié non admis sur ladite liste doivent être acheminés vers un pays tiers», précise le communiqué final. Le plus grand bien de cet accord est sans conteste les bénéfices qu’en tireront les populations civiles.

monde entier a les yeux tournés vers le Tchad et le Soudan. Ils sont comptables devant l’histoire de l’application de cet accord. Cette application a déjà commencé. Les deux pays ont déployé depuis le vingt-et-un février dernier les différentes forces à leurs frontières respectives. Mieux le communiqué conjoint, signé par les deux présidents, stipule que «jusqu’à l’application complète du Protocole de sécurisation des frontières et le déploiement complet des Forces, les deux parties doivent, à travers la coordination au sein de la Commission bilatérale conjointe militaro-sécuritaire, veiller à ce qu’aucune activité hostile ne soit menée contre l’un ou l’autre des deux états à partir de leur territoire respectif.»

Une lueur d’espoir pour le Darfour Une véritable bouffée d’oxygène. L’accord du quinze janvier rentre dans l’histoire du fait qu’il est une bouffée d’oxygène pour les peuples du Darfour. Il y a aussi Abéché à la frontière du Tchad mais, ce sont les populations du Darfour, dans le sud du Soudan, qui ont le plus souffert de cette guerre silencieuse. Une guerre silencieuse qui a jeté dans les rues des milliers de populations civiles. L’impression généralisée d’une peur des lendemains sans avenir commence à s’estomper. L’espoir renaît; la paix aussi. Il est vrai qu’une chose est de signer des accords, une autre est de les appliquer. Le

C’est un engagement fort pour la paix et le développement dans cette région de l’Afrique. Depuis le début des différents conflits aux frontières des deux pays, plus de six accords ont été signés entre les deux pays. Mais, il y a une particularité à la dernière: celle de l’union des deux pays contre les groupes rebelles. Ils ont fait front contre l’ennemi. Cette particularité aura la chance de donner plus de relent à cet accord qui, on le sait, a été signé grâce à l’appui et au soutien de la communauté internationale.

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POLITIQUE

Côte d’Ivoire La sortie de crise de nouveau sur les rails Par Alexandre Korbeogo

La Côte d’Ivoire semblait amorcer un virage dangereux depuis quelques semaines avec la dissolution du gouvernement et de la Commission électorale indépendante (CEI) par le Président Laurent Gbagbo. Grâce au tact du facilitateur dans la crise ivoirienne, le Président Blaise Compaoré du Burkina Faso, le processus est remis sur les rails avec à la clé la recomposition d’un nouveau gouvernement et d’une nouvelle Commission électorale indépendante qui respectent les accords signés à Linas Marcoussis.

Le mois de février a été particulièrement mouvementé en Côte d’Ivoire. La paix tant espérée semblait se volatiliser au gré des humeurs, consécutives à la dissolution du gouvernement et de la Commission électorale indépendante (CEI) par le Président de la République Laurent Koudou Gbagbo le 12 février 2010. A l’origine, une affaire de suspicion de fraude sur la liste électorale. Selon le camp présidentiel, la Commission électorale indépendante (CEI), pilotée par Robert Beugré Mambé aurait inscrit frauduleusement plus de 429 000 électeurs sur la liste électorale. Le camp présidentiel réclame alors la tête du Président de la CEI. L’opposition radicale, le Rassemblement des Houphouétistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP) se braque. «Pas question que Mambé démissionne» clame-t-il. La machine se grippe. Des magistrats, sous l’instigation du Ministre de l’administration territoriale, Désiré Tagro jette «l’huile sur le feu». Dans certaines villes de la Côte d’Ivoire, ils suppriment des inscrits sur les listes électorales prétextant leur nationalité «douteuse». Des émeutes éclatent avec à la clé des dégâts. Le Premier ministre Guillaume Soro, de concert avec le Président Laurent Gbagbo, décide: «Le contentieux judiciaire en

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cours devant les tribunaux de première instance est suspendu jusqu’à nouvel ordre sur l’ensemble du territoire national à compter de ce jour mercredi 10 février 2010». Le facilitateur, le président du Burkina Faso, Blaise Compaoré, convoque illico presto les protagonistes à Ouagadougou. L’urgence impose de rectifier le tir, là où des élections étaient prévues pour se tenir fin février début mars. Il est clair que cette date n’est plus tenable au vu des réalités du terrain.

Quelles solutions pour ce beau pays? Au vu de l’évolution actuelle des choses, le processus de sortie de crise est de nouveau relancé au bord de la lagune Ebrié. La formation du gouvernement et de la CEI, en respectant les accords de Linas Marcoussis (voir encadré) permet à chaque partie prenante de jouer son rôle dans le processus de sortie de crise. La situation présente en Côte d’Ivoire est d’autant plus délicate que l’intérêt supérieur de la nation doit primer sur les intérêts égoïstes et partisans. Que ce soit dans le camp

présidentiel tout comme dans celui de l’opposition, les intrigues et les crocs en jambes ne permettent pas d’avancer dans la sortie définitive de la crise. Cette situation est d’office une patate chaude aux mains du facilitateur, Blaise Compaoré. A l’analyse de la situation, la recomposition de la CEI et du gouvernement en tenant compte de la réalité socio politique et des forces en présence est la solution pour réconcilier les ivoiriens avec eux-mêmes. Il est clair que cela fera prendre du temps au processus mais c’est l’une des solutions pour aller aux élections de façon sereine. Une autre solution, après la formation de la nouvelle CEI et du nouveau gouvernement est de retirer tout simplement la liste des 429 000 inscrits du circuit (cela a déjà été fait) et prendre des dispositions pour que de telles erreurs ne se produisent plus. La Côte d’Ivoire en a besoin, l’ouest africain en a besoin; l’Afrique en a besoin et le monde entier le désire fortement. Il faut sortir de cette situation de ni paix ni guerre depuis la rébellion armée de 2002. L’urgence s’impose pour sauver l’éléphant d’Afrique (l’emblème de la Côte d’Ivoire est un éléphant).


LA COTE D’IVOIRE (vue sur Abidjan, la capitale) pays jadis qualifié de havre de paix et de stabilité en Afrique sous le règne de son premier Président FELIX HOUPHOUET BOIGNY photo: © Cedric Favero

Résoudre la question cruciale une bonne fois pour toutes

Ce que disent les Accords de Linas Marcoussis à propos de la formation du Gouvernement

Ayant acquis son indépendance en 1960, le pays de l’hospitalité, comme le chante son hymne national, a perdu de sa superbe à la mort de son premier président Felix Houphouët Boigny. Henry Konan Bédié le remplace sur fond de tensions. Pour en rajouter, l’ivoirité fait surface. On ne sait plus qui est ivoirien et qui ne l’est pas. Le pays s’emballe jusqu’au coup d’état du général Robert Gueï. A son tour, il sera trucidé lors des émeutes de 2002, consécutives à l’élection présidentielle chaotique remportée par le Président Laurent Gbagbo. Depuis, plus rien n’a été comme avant en Côte d’Ivoire. De complots en tentatives, de coups d’états en passant par des règlements de compte, le pays s’est saigné et a fait saigner ses fils. Pourquoi? Le problème réel de la Côte d’Ivoire est le problème identitaire. Félix Houphouët Boigny avait su concilier les nordistes et les sudistes en permettant à chacun d’avoir une place à la table du seigneur. A son décès, l’ivoirité montée de toutes pièces et théorisée en idéologie est venue gâcher la fête. Aujourd’hui, une question identitaire a pourri la vie de la nation ivoirienne. Pour venir à bout des crises qui secouent ce pays, jadis eldorado de l’Afrique de l’Ouest, il faut résoudre définitivement la question de l’ivoirité. Les textes existent en la matière, il suffit de les appliquer avec hargne et courage. Sans cela, il sera difficile de placer un plâtre sur une plaie ouverte. A.K.

- Le gouvernement de réconciliation nationale sera dirigé par un Premier ministre de consensus qui restera en place jusqu’à la prochaine élection présidentielle à laquelle il ne pourra se présenter. - Ce gouvernement sera composé de représentants désignés par chacune des délégations ivoiriennes ayant participé à la Table Ronde. L’attribution des ministères sera faite de manière équilibrée entre les parties pendant toute la durée du gouvernement.

La réconciliation des ivoiriens avec euxmêmes passe par la recomposition de la CEI et du gouvernement

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ACTUALITE

FRANCE - ALGERIE «Je t’aime moi non plus» Par Cyrille Momote Kabange

L’actualité des relations franco-algériennes sont de nouveau tendues après un moment d’accalmie. Mais quand est-ce qu’elles ont été au beau fixe?

Entre l’Algérie et la France, il y a une manière de vaudeville que Georges Feydeau ne dédaignerait pas de faire sienne. Quiproquos et intrigues d’où percent les relents de l’amour-haine, ce vocabulaire emprunté à la psychanalyse, ayant été popularisé par Serge Gainsbourg « Je t’aime moi non plus », jalonnent l’histoire des relations entre les deux pays, en une pièce de plusieurs actes. * Premier acte: L’empire français aborde la rive africaine de la Méditerranée à quelques encablures de Marseille. Le maréchal Lyautey est passé par là y déversant ses contingents de l’armée d’Afrique du Nord qui balise la route au peuplement européen en Algérie. L’idéologie assimilationniste fait flores d’autant plus que dans la mentalité en cours à la fin du dix-neuvième siècle, les terres entre le Sud de la France et le bord de la «Mare nostrum» constituent un ensemble indissociable. La Méditerranée occidentale est un «lac français» sur le bord duquel vivront bientôt un million de Français de souche ou prétendus tels. La résistance à l’acculturation est une première source de tensions entre les colons et les autochtones. * Deuxième acte: La France s’installe et fait de l’Algérie le fleuron de ses conquêtes extérieures sous la troisième et la quatrième Républiques. Sous ces régimes politiques, l’Algérie était perçue comme une acquisition dont on ne peut se séparer quitte à perdre tous les autres biens. En effet, pour le million des «Pieds Noirs», l’Algérie est une terre française au même titre que la Corrèze ou l’Auvergne. Avec cette différence que les colons s’y trouvaient en conquérants d’une terre dont ils auront spolié les droits des premiers occupants. * Troisième acte: En 1956, une rébellion éclate sous la houlette du Front de Libération Nationale (FLN), une rébellion armée contre le pouvoir colonial français. Les nationalistes se heurtent à une force militaire d’une redoutable efficacité. Au dé-

but, cette lutte ne mobilise pas tous les Algériens, les Français ayant pu susciter quelques sympathies dans la population arabo-berbère. Une armée d’Algériens acquis à la cause de l’Algérie française est constituée et ses membres portent le nom de Harkis. C’est un épisode qui, paradoxalement, marque ce ballottement sentimental qui tapisse l’inconscient collectif d’un peuple partagé entre la haine de la République française par différents agissements dont celle-ci a pu se rendre coupable aux dépens de ses administrés autochtones et l’attractivité qu’exerce sur les mêmes, depuis des lustres, la France. L’hebdomadaire parisien «Jeune Afrique», dans son numéro du 27 février 2010, cite l’humoriste et comédien algérien Bellay. Ce dernier relève l’ambivalence dans le rapport qui lie ses compatriotes à la France. «Les Algériens ont mené la guerre aux Français pendant sept ans pour les bouter hors d’Algérie mais si la France devait ouvrir ses frontières, 30 millions d’Algériens y débarqueraient aussitôt». * Quatrième acte: Les accords d’Evian conduisent à l’indépendance de l’Algérie sous la présidence d’Hamed Ben-Bella auquel le Général de Gaulle rend hommage en des termes fort élogieux. L’ennemi n°1 de la France prend grâce aux yeux du fondateur de la cinquième république. A son tour, l’ancien de la Wilaya dresse une statue à l’homme du dix-huit juin dont il souligne le courage mais omet de relever la malice de celui qui snobait ses propres compatriotes thuriféraires d’Algérie française par le désormais célèbre «Je vous ai compris». Criminalisation du colonialisme français Depuis, tous les présidents de la République française n’ont eu que des mots gentils à l’égard de leurs homologues algériens. Pourtant, les dirigeants français demeurent réticents aux sollicitations récurrentes des Algériens au sujet des excuses à leur présenter pour les faits graves (tortures,

tueries, crimes économiques) et d’autres méfaits commis pendant la guerre d’Algérie d’un côté comme de l’autre de la Méditerranée. Aujourd’hui, les amabilités proférées pourraient-elles se concevoir comme l’arbre qui cache la forêt? L’avènement de Nicolas Sarkozy y pourvoiraitil en termes d’éclaircies sur les relations diplomatiques aux relents zigzagants Pour le moins, l’on constate que l’actuel chef de l’Etat français s’essaye de trouver un équilibre durable dans ses rapports avec le Président algérien auquel il a rendu visite il y a quelques mois. Mais les résultats se font attendre. Il est vrai que cette fixation sur le devoir de mémoire et l’exigence formulée régulièrement par Alger au sujet de la repentance, sentiment qu’ont les Algériens que rien ne compensera jamais les humiliations subies. En effet, sur le plan économique, l’Algérie ne représente que 1% du commerce extérieur de la France et 5% de ses importations d’hydrocarbures (gaz et pétrole). Devant la déboulée chinoise qui réduit davantage la motivation algérienne sur le fait de coller aux basques de l’ancienne métropole, les ressentiments s’exacerbent. Et c’est le cinquième acte. Il nous revient qu’un député du FLN vient de déposer un projet de loi au Parlement algérien conduisant, s’il est voté, à criminaliser le passé colonial français en Algérie en même temps, à demander des compensations financières à la France. A priori, le Président Sarkozy est opposé à l’idée de la repentance relative aux faits relevant de la colonisation. Mais sera-t-il intraitable cette fois-ci en tenant compte du poids politique de l’Algérie et perdre une place de choix qui s’offre à elle, face à la surenchère chinoise? Au regard de l’élargissement qu’opère l’Algérie aux partenaires économiques les plus offrants, la France de Sarkozy pourrait bien faire les frais (des contrats laissés en plan comme c’est le cas aujourd’hui) de son refus de perdre la face.

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ACTUALITE

Coup d’état au Niger Le retour des vieux démons Par Alexandre Korbeogo

Longtemps susurré dans les arcanes et les salons feutrés des camps militaires du Niger, le coup d’état est devenu réel le 18 février dernier. Le Président Mamadou Tandja a été renversé et le Conseil suprême pour la restauration de la démocratie (CSRD), dirigé par le chef d’escadron Salou Djibo, a pris les commandes. Retour sur les péripéties de ce quatrième coup d’état au pays d’Amani Diori (1) en moins de quarante ans d’existence.

L’Afrique renoue avec ses vieux démons au Niger. Le 18 février courant, un coup d’état a renversé le colonel Mamadou Tandja. Quatrième du genre, le Niger vient de montrer que l’Afrique n’a pas encore tourné le dos aux coups d’état. Un bref rappel historique permet de situer les événements qui ont «motivé» ou «aidé» l’avènement de ce coup d’état. Mamadou Tandja a été élu en 1999 et réelu en 2004. Selon la Loi fondamentale, son mandat prenait fin en décembre 2009. En mai 2009, le Président déchu demande à l’Assemblée nationale de valider un projet de loi relatif à l’organisation d’un référendum pour amender la Constitution en vue de supprimer la limitation du nombre de mandats à deux dans la Constitution. Le Parlement saisit la Cour Constitutionnelle en rejetant la demande du Président Tandja. La Cour Constitutionnelle en fait autant. Le Président Tandja prend sur lui de dissoudre l’Assemblée Nationale, la Cour Constitutionnelle et organise au forceps un référendum. Il sort vainqueur selon les résultats officiels. Une crise secoue alors la classe politique nigérienne. La sixième République est en marche au Niger. La communauté interna-

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tionale appelle les protagonistes à dialoguer et à trouver un terrain d’entente. Pendant ce temps, le Niger est exclu des instances de la CEDEAO (2) et de l’Union Africaine. L’Union européenne s’y met à son tour en coupant l’aide au développement. Face à la crise, le général nigérian, ancien Président de ce pays, est désigné médiateur par la CEDEAO pour trouver une solution définitive. Rien n’y fit. Aux prises avec de multiples obstacles, le général démissionne. La Communauté sousrégionale rebelote. Abdoulaye Wade, le Président sénégalais est appelé à la rescousse lors du 37 ème sommet des chefs d’Etats de la CEDEAO tenu à Abuja au Nigéria dans ce mois de février. Il devient le nouveau médiateur. Or, c’est lors de ce sommet de la dernière chance que tout va s’emballer face à l’intransigeance du camp présidentiel de faire des concessions à l’opposition en formant un gouvernement de consensus. Pour parler en homme politique «un gouvernement de sortie de crise». Avant même qu’il n’entame ses négociations, l’armée est entrée en action. Le 18 février en plein Conseil des ministres vers midi, un commando conduit par Dijibrilla Hima Hamidou dit «Pelé», quaran-

te-cinq ans, commandant de la compagnie d’appui des blindés de Niamey, prend la présidence de la République d’assaut. A dix-huit heures (heure locale, dix-sept heures GMT), le jeu est plié. Les putschistes instaurent le Conseil Suprême pour la Restauration de la Démocratie (CSRD) dirigé par le chef d’escadron Salou Djibo. Bilan: quatre morts, une dizaine de blessés et le Président Mamadou Tandja est arrêté. Il serait détenu aux dernières nouvelles dans une villa juxtaposant le palais présidentiel.


Tout est à refaire La communauté internationale, l’Union Africaine et les organisations sous-régionales ont condamné le coup de force intervenu au Niger. Dans le principe, les coups d’états ne participent pas à construire un pays ni à promouvoir son développement. Il est donc capital que l’Afrique tourne définitivement la page. On peut reprocher à Mamadou Tandja son entêtement à tordre le cou à la Constitution en vue de se représenter. Mais, on peut aussi reprocher à la junte d’avoir tué des innocents pour accéder au pouvoir. La force de l’argument doit toujours primer sur l’argument de la force. La junte au pouvoir au Niger n’a pas raison, pour parler vulgairement, Mamadou Tandja, par son entêtement n’a pas eu aussi tort. Aujourd’hui, il faut tourner la page. La junte doit travailler à ne pas se maintenir au pouvoir. On a vu les risques qu’encourent les militaires venus au pouvoir par les armes et qui ont voulu y demeurer. Le cas le plus récent est celui de Moussa Dadis Camara de la Guinée Conakry. Il y a eu aussi Robert Gueï en Côte d’Ivoire et Daouda Malam Wanké au Niger. Après 1974 avec le général Seni Kountché, 1996 avec le général Ibrahim Baré Maïnassara, 1999 avec

Qui est le commandant Salou Djibo? le commandant Daouda Malam Wanké, et le dernier en date avec le commandant Salou Djibo, le Niger a amorcé une nouvelle page de son histoire politique. Il est à souhaiter qu’au plus vite, il retrouve l’ordre constitutionnel normal pour travailler à construire une société moderne.

(1) le premier président de la République (2) CEDEAO: La Communauté Economique Des Etats de l’Afri-

La junte militaire, qui a renversé jeudi 18 février le Président nigérien Mamadou Tandja a pour Président le chef d’escadron Salou Djibo, jusqu’alors peu connu du grand public. Né en 1965, le nouvel homme fort de Niamey, à la tête du Conseil suprême pour la restauration de la démocratie (CSRD, junte), a reçu sa formation militaire en Côte d’Ivoire, en Chine et au Maroc. La 121 ème CCA, la 5ème Compagnie de Commandement et d’Appui et de Sécurité qu’il commande depuis cinq ans, est une unité opérationnelle, une unité de combat qui a «fait le front» et qui n’est pas connue du public. Né en 1965, Salou Djibo n’a été admis à l’école d’officiers qu’à trente ans. C’était à Bouaké, en Côte d’Ivoire. Il fera ensuite son cours d’application en Chine, puis le cours d’état-major à Kenitra, au Maroc. Sa spécialité est l’artillerie. Affecté d’abord au Centre d’Instruction d’Agadez, dans le nord du pays, il revient à Niamey comme chef de peloton, avant de prendre la tête de la CCA. Salou Djibo est originaire du village de Namaro à environ 50 kilomètres de Niamey, sur la rive droite du fleuve Niger. A.K.

que de l’Ouest (CEDEAO) est un regroupement régional de quinze pays créé en 1975.

Source: RFI

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ACTUALITE

Le quatorzième sommet de l’Union africaine maturité et stabilité Par Cyrille Momote Kabange

Après des décennies de durs combats diplomatiques, l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA), devenue Union africaine (UA) entame sa vitesse de croisière. En même temps, l’organisation prend conscience des enjeux dans lesquels elle inscrit le destin d’un continent décrié hier, à tort ou à raison, alors que l’immensité de ses ressources humaines et économiques devrait lui faire jouer un rôle majeur à moyen terme, sur la scène mondiale.

Les décisions prises lors de ce quatorzième sommet tenu du 31 janvier au 2 février 2010 à Addis-Abeba, mettent en évidence la maturité acquise par l’UA qui évite au fil des années de se focaliser sur les conflits entretenus et les déclarations tonitruantes sans lendemain faites du haut des tribunes internationales. Même si, le nouveau coup d’état opéré à Niamey par une junte d’officiers nigériens se pose en porte-à-faux, par exemple, face à la décision prise à ce sommet concernant la prévention des changements anticonstitutionnels de gouvernement et le renforcement des capacités à gérer de telles situations, l’UA saura bien débrouiller l’écheveau de ces machinations.

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Une autre situation délicate concerne la Cour Pénale Internationale dont les décisions sont controversées. Elles mettent en évidence la contradiction entre la signature par le chef d’Etat africain de la charte de cet organisme et les ambiguïtés autour des positions prises par rapport aux procédures certes humiliantes qui affectent les hommes d’Etat africains. Or, l’UA, en obtenant que l’ancien Président Hissen Habré accusé de crime contre l’humanité soit jugé en Afrique (au Sénégal), montrait bien qu’il y a une issue à un certain juridisme discriminant auquel est confrontée la faible Afrique par le biais de la loi dite de compétence universelle.



MAGHREB

Rue de Rabat © David Chantoiseau

L’association Art Universel

Investir dans les enfants, le meilleur outil pour combattre la pauvreté et l’inégalité Par Jamal Garando et Daouda Emile Ouedraogo

Il est au coeur du Maroc pour donner vie à l’humain. Créée en septembre 2005, l’asbl Art Universel mène différentes activités culturelles et cinématographiques ainsi qu’humanitaires. Jamal Garando et Reda Chebchoubi, à travers cette oeuvre qui a pour but de développer la culture et l’éducation, sont soutenus par une équipe dynamique. Ce, pour le bonheur d’un public cible bien défini: ’les enfants’.

Association qui vante l’amitié et la solidarité, l’association Art Universel œuvre à développer la culture et l’éducation. Dans ce cadre, elle organise chaque année et ce, depuis trois ans, des missions humanitaires pour soutenir scolairement, pédagogiquement et sensibiliser pudiquement les jeunes appartenant à une population cible au Maroc. C’est un rendez-vous du donné et du recevoir (échange, partage, convivialité) avec à la clé une découverte du Maroc, le pays aux mille paysages et cultures diverses. Pour joindre l’utile à l’agréable, l’association Art Universel mobilise les uns et les autres autour d’un projet de solidarité internationale dans le cadre du développement communautaire au Maroc. Occasion rêvée de rencontrer des personnes de différentes cultures dans une dynamique de découverte, d’apprentissage et de partage.

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Ecole obligatoire Le développement du Maroc est en bonne voie, grâce aux efforts conjugués de ses dirigeants et de sa société civile. Cependant, il a encore besoin de l’aide de tous ceux qui ont une pierre à apporter à l’édifice. Un Marocain sur deux de plus de dix ans, donc en âge de lire et écrire, est analphabète. C’est le constat qui a amené le souverain marocain, en 2000, à inscrire la lutte contre l’analphabétisme et la promotion de l’éducation non formelle parmi ses principales priorités pour la décennie 2000-2010. En particulier pour la tranche de dix à quarantecinq ans, en mettant la priorité sur les filles, qui sont statistiquement parlant les plus touchées. L’objectif est de réduire le taux d’analphabétisme à zéro pour cent à l’horizon 2015.

Depuis 2002, l’école est obligatoire et gratuite pour tous les enfants de six à quinze ans. Mais les écoles toutes neuves ne profitent pas encore à tous et la situation est plus critique dans certaines régions. Par exemple, selon le gouvernement, les régions de Marrakech-Tensift-al Haouz et Souss-Massa-Draa concentrent à elles seules un million d’analphabètes. Pourquoi? Parce que dans les campagnes, de nombreux obstacles empêchent un enfant d’aller à l’école. Parmi ceux-ci l’éloignement de l’école des domiciles des enfants, le manque de budget pour les fournitures, la nécessité de faire travailler l’enfant pour aider la famille à vivre. Encore aujourd’hui, de nombreux enfants des campagnes ne vont à l’école que par demijournées et travaillent en famille le reste du temps. Seule compensation pour les familles,


L’association Art Universel lors d’une mission humanitaire au Maroc © Jamal Garando

la cantine scolaire, de plus en plus fréquentée. Le problème du coût de la scolarité est également un frein: même si l’école est gratuite, de nombreux parents ne peuvent acheter les fournitures scolaires, trop nombreuses et coûteuses à leurs yeux. Dans de nombreuses écoles, on donne gratuitement des cahiers aux plus démunis. C’est pourquoi, aux efforts de l’Etat pour donner à tous un accès à l’éducation, s’ajoutent ceux de la société civile marocaine et des organismes de solidarité internationale.

Un printemps pour donner le sourire aux enfants L’association Art Universel a pour mission d’aller à la rencontre des enfants où qu’ils se trouvent pour leur apporter le soutien dont ils ont besoin. Au printemps prochain, Art Universel sera dans le sud du Maroc pour apporter aux enfants de cette région une aide en matériels scolaires composés de cahiers, de craies, de gommes, de stylos, de règles, de colles, de jouets et de vêtements.

Tout ce matériel a pu être récolté grâce en partie à la solidarité de certains citoyens belges et de sociétés qui ont soutenu l’association dans cette démarche. Il s’agit par exemple de Fortis Banque, de Beiersdorf (Nivea), de Master Card, d’Eureka (magasin de textile de la rue de Brabant, Bruxelles) et de Mia Trading. Actuellement en contact avec plusieurs associations marocaines, sensible et dévoué à la cause des enfants, l’association veut participer efficacement à l’épanouissement des enfants. Dans cette logique, des associations marocaines ont retenu l’attention de l’association. Le premier cap sera mis sur Agadir. Créée par deux sœurs artistes marocaines, Kalila et Dimna Bounalayat, cette association s’occupe principalement d’enfants de la rue dit vulgairement les «Chemkara». Elle (l’association) abat un travail extraordinaire pour ces enfants dont l’âge parfois ne dépasse pas six ans! Les artistes sont comme des sœurs pour les enfants dans un monde parfois brutal et sans pitié: la rue.

Outre le côté affectif, un travail social est mené par cette association par le suivi administratif, le suivi scolaire et l’organisation d’activité théâtrale. Après Agadir, l’association compte rejoindre la ville de Tata située à quelque 250 km au Sud d’Agadir. Dans cette ville, l’association compte travailler avec plusieurs associations s’occupant principalement d’enfants orphelins et défavorisés. Pour cette action humanitaire l’association sera soutenue par les autorités marocaines. Ce séjour au Maroc sera filmé par les membres de l’association qui a également comme dernier arc à son violon l’audiovisuel.

Asbl Art Universel 14, rue Locquenghien 1000 Bruxelles Belgique artuniversel@yahoo.fr

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OPINION

Dans mon article de LNA 15 du mois de décembre intitulé: «L’erreur de Weber», je me demande si la justice et la paix ne forment pas un seul couple. Pourtant, c’est souvent que l’on oublie cette vérité au profit des intérêts partisans comme a eu à le faire le philosophe et célèbre économiste allemand, Max Weber, qui estime qu’il est plus judicieux que l’on confie le pouvoir politique à un prétendant déjà riche. Dans ce qui suit, je suggère que l’homme d’argent est différent de l’homme riche. Suivez-moi dans mon discours.

Pièce d’or du Sultan MAHMUD II © Jerry Woody

Que l’homme d’argent est différent de l’homme riche Tebi Joachim Able, philosophe, théoricien de la Palabre africaine

La vraie richesse matérielle fait référence à une tradition laborieuse et à une véritable culture d’entreprise, au sens de l’épargne et à son développement. Dans un contexte moderne, elle est liée à l’économie de marché qui doit être le véritable garant de l’essor économique.

La politique ne doit pas être réservée exclusivement à ceux-là qui seraient assis sur des coffres-forts; d’autant que l’homme d’argent est différent de l’homme riche. Si la vraie richesse matérielle est portée par l’idéal de solidarité et de fraternité, l’économie de marché ne peut être que souhaitable d’autant plus qu’elle donne l’occasion à l’homme de présenter les meilleurs fruits de son esprit que le marché rend visible. Et c’est avec l’économie de marché que le partage devient effectif. Dans ces conditions, le coût des échanges doit

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seulement être regardé comme anecdotique, si l’intention des uns n’est pas d’asservir les autres afin d’abuser d’eux.

L’homme d’argent ramasse rapidement, l’homme riche amasse lentement La vraie richesse est appelée à durer dans le temps et à résister à l’épreuve du temps. Le contraire est à définir seulement comme une

course à l’argent, comme un gain, comme du racket. Et c’est justement pour cette raison que je dis toujours ceci: «l’homme d’argent qui amasse rapidement est différent de l’homme riche qui amasse lentement.» L’homme d’argent tient un butin, l’homme riche détient un trésor. Celui qui court pour amasser rapidement ne permet rien à personne d’autre. Celui qui marche pour amasser lentement, laisse le temps aux autres de profiter, eux aussi, du temps et de l’espace économique. Voici ce que j’appellerais la vérité différentielle, celle qui


fonde la bonne économie sociale et politique. Elle est fondamentale. Si le butin appartient à son pirate, le trésor appartient à l’humanité. C’est ce que les historiens de l’art ont compris avec raison et qui justifie le concept de ‘patrimoine de l’humanité’ au sujet des œuvres architecturales et autres. Entendu qu’il tient déjà un butin qui devrait en principe lui suffire, il ne faut jamais porter un homme d’argent au pouvoir. Vous n’arriverez pas à faire l’inventaire de son avoir parce qu’en cas de contrôle, s’appuyant sur sa mauvaise foi, il risque de se moquer de vous en arguant qu’il n’avait pas attendu le pouvoir pour vivre dans l’opulence. Or si vous votez pour un homme qui vous ressemble et qui vit la même condition que vous, à la fin de son mandat, vous pouvez facilement évaluer les biens qu’il aura acquis avec votre concours. Et puis, il est plus logique de laisser un des vôtres défendre vos intérêts au lieu de fournir les armes de votre propre destruction à votre adversaire.

Le pauvre existe individuellement, certes, mais le riche n’existe pas L’homme d’argent est incontestablement votre adversaire parce qu’il vous pille. Et on n’est pas forcément bon gouvernant parce que l’on dispose d’immenses coffres forts. Détrompez-vous par ailleurs: l’opinion internationale n’est pas favorable à un pays parce qu’il est gouverné par un homme d’argent, mais plutôt pour ce que le pays vaut en lui-même; grâce au travail de tous ses habitants. La coopération internationale ne travaille pas avec des individus, mais avec des Etats; avec l’ensemble des citoyens qui produisent les richesses. Et la richesse est effectivement un patrimoine commun à l’humanité. C’est bien pour cela que le pauvre existe individuellement, certes, mais que le riche n’existe pas. Si le riche n’existe pas, alors le pauvre ne devrait pas exister non plus parce qu’on reconnaît l’un par rapport à l’autre; pourrait-on se dire. Je répondrais à cette question en disant qu’en réalité, le bâtisseur de trésor n’atteint son objectif qu’avec l’effort de toute la société. Prenons l’exemple d’un édifice en construction: chaque matin, nous voyons à l’œuvre le maçon, le plombier, le menuisier, le balayeur, l’électricien ou le peintre. Et le travail ne sera jamais achevé sans le concours des uns et des autres. Eh bien! De cette même manière, le trésor ne s’amasse qu’avec le concours de tous. Et dans le fonc-

tionnement de l’entreprise, il faut que l’ouvrier accepte de se lever avant le petit jour pour aller à son poste; que la standardiste accepte de recueillir messages et commandes, que le comptable soit bien regardant sur les chiffres et que le veilleur de nuit accepte de garder les usines. Pendant ce temps, le premier initiateur du projet économique pourrait s’adonner aux voyages, aux jeux et à la distraction dans les casinos, s’adonner aux différentes sortes de pipes et au tabac, sans presque jamais se mêler à la tâche sur les lieux des activités. Et justement c’est ainsi que les choses se passent dans la plupart des cas.

Les mérites de la société laborieuse Et ce n’est pas tout. Le pompier devra toujours se tenir prêt à intervenir dans les locaux de l’activité en question. Les services fiscaux apportent continuellement leur concours en rappelant au ‘premier initiateur’ ses devoirs dont l’accomplissement lui permet d’avancer tout doucement. S’il avance donc tout doucement, comment arriverait-il à passer devant les autres acteurs de la société, si ceux-ci lui refusaient leur collaboration, leur soutien et leur aide? Voilà pourquoi je dis que le riche, en tant que tel, n’existe pas. Car ne devient riche que celui qui travaille et c’est la société qui devient riche dans le cadre bien précis de l’enrichissement par le travail; avec à sa tête, un animateur de la vie économique que vous appelez ‘patron’. Ici, ‘patron’ ne veut rien dire d’autre que premier initiateur de projets économiques. Mais l’entreprise qu’il aura bâtie grâce à l’effort de la société appartient à la société.

Que rien n’appartienne particulièrement à l’homme En réalité, rien n’appartient en propre à l’homme; pas même sa vie dont il ne saura jamais pourquoi elle se retrouve en lui. Autrement, il pourrait décider d’y mettre fin à tout instant, ce qui n’est souvent pas le cas. On me dira que l’homme a le choix du suicide. Or le suicide n’est justement pas un choix, mais un acte de désespoir. C’est un acte qui s’impose à l’homme en deuxième lieu, après le choix de la vie, après l’appel à la vie. L’homme vit seulement la vie, mais il sait que celle-ci ne lui appartient pas. Si sa vie dont il pouvait légitimement se

prévaloir ne lui appartient pas, je ne vois pas ce qui peut lui rester en propre. Le chef d’entreprise sait très bien qu’il n’est pas l’inventeur de la monnaie qui fait sa force; qu’il n’est pas le créateur des hommes qui produisent sa richesse; du jour et de la nuit qui rythment sa production; de l’espace physique sur lequel est implantée son unité de production et le fait de dépenser un sous pour l’acquérir ne change rien à cette vérité. Cela lui donne seulement un droit d’occupation ou de jouissance, mais il n’est en rien le propriétaire de tout ce qu’il découvre dans la nature à la naissance ou de tout ce qu’il ne peut emporter avec lui dans sa tombe. Voilà qui devrait donc adoucir les appétits de l’homme. S’agissant toujours de l’entrepreneur, s’il est juste de reconnaître son esprit d’entreprise, sa grande capacité à prendre des risques et sa volonté d’assurer la survie et l’avenir économique de son pays; s’il est utile de lui accorder la considération et l’honneur qui lui reviennent, il faut également insister en disant que rien ne lui appartient en propre: en réalité, tout revient à la société laborieuse.

Pour l’avènement d’une vraie justice distributive Je veux donc dire que, dans ces conditions, tout gain doit être redistribué équitablement, dans la mesure du possible. Je suis pour cette politique de redistribution des biens sociaux. Et en Afrique, fils de paysans comme nous sommes tous pour l’instant, le peu que nous avons, doit être redistribué à tous, dans la dignité et la loyauté. Plus qu’une empoignade Gauche-Droite qui pourrait paraître nécessaire à certains parce qu’elle permet, peut-être, aux acteurs de la vie politique de mieux se positionner, il est davantage question de partage et de justice distributive: c’est ce qu’on appelle la justice sociale.

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DEVELOPPEMENT

Les femmes peuvent mener la barque Par Karol Boudreaux

Lors du sommet sur la sécurité alimentaire de Rome en décembre dernier, les dirigeants du monde ont unanimement renouvelé leur engagement à éradiquer la faim. Mais qu’en est-il si ce projet, si admirable soit-il, est en réalité trop compliqué à réaliser? Alors, voici une idée: faire confiance aux femmes.

Lors du sommet sur la sécurité alimentaire de Rome en décembre dernier, les dirigeants du monde ont unanimement renouvelé leur engagement à éradiquer la faim. Le sommet Sud-Sud de Nairobi a ensuite lui encore renouvelé cet engagement dans les objectifs du millénaire pour le développement de l’ONU (OMD), baptisé «projet pour un monde meilleur» par le secrétaire général Ban Ki-Moon. Mais qu’en est-il si ce projet, si admirable soit-il, est en réalité trop compliqué à réaliser? Les pays en développement sont censés atteindre les OMD d’ici 2015. Ces derniers impliquent de réduire de moitié les niveaux de la faim et de la pauvreté, réduire la mortalité infantile et maternelle, améliorer la qualité environnementale, accroître l’autonomie des femmes et l’égalité entre les sexes, réduire les taux d’infection VIH et fournir une éducation universelle. Les progrès ont été lents et, en Afrique subsaharienne en

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particulier, de nombreux objectifs ne seront pas atteints. Alors, voici une idée. Et si l’ONU et ses États membres mettaient au rebut huit des OMD et se concentraient plutôt sur une hypothèse radicale: faire confiance aux femmes? Et si, au lieu de huit OMD, chacun avec de multiples objectifs, les pays se focalisaient sur l’objectif nº3, accroître l’autonomie des femmes, en particulier des femmes pauvres? Cela pourrait en fait accélérer les progrès sur les sept autres OMD.

Quelles preuves étayent cette affirmation? Une étude réalisée en 2000 par l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI) a constaté que les femmes sont la clé de la sécurité alimentaire dans des endroits

comme l’Afrique subsaharienne et certaines parties de l’Asie du Sud. Cette étude a conclu que l’amélioration conjointe de l’accès des femmes à l’éducation et de leur statut social, était responsable de 55% de la réduction totale observée de la malnutrition infantile parmi les familles de l’enquête. Ces facteurs ont été considérablement plus importants que l’augmentation des approvisionnements alimentaires. En 2004, une étude de la Banque mondiale trouvait «d’amples preuves empiriques qu’une meilleure éducation des femmes réduit la mortalité infantile». Comme l’ancien Secrétaire général des Nations unies Kofi Annan l’a déclaré lors d’une célébration de la Journée internationale de la femme en 2003: «Quand les femmes sont pleinement impliquées, les avantages peuvent être immédiatement vus: les familles sont en meilleure santé et mieux nourries; leur revenu, leur épargne et réinvestissement s’accroissent. Et ce qui est vrai des


La journée de la femme africaine, le 10/03/09 avec S.E. l’Ambassadeur M.S.Annadif (UA) à l’extr gauche

familles est également vrai des communautés et, dans le long terme, de pays entiers». Il y a dix ans une étude de la Banque mondiale indiquait que le revenu des femmes a plus de chances d’être utilisé de manière productive, en termes de promotion du bien-être familial et de la santé, que le revenu des hommes. Plus récemment, la très médiatisée Commission pour l’Afrique de Tony Blair est arrivée aux mêmes conclusions. La Commission a constaté que, par rapport aux hommes, les femmes qui ont des ressources économiques investissent davantage dans l’éducation et la santé de leurs enfants. Ces investissements dans la scolarité peuvent avoir un énorme impact positif. L’étude de l’IFPRI inclut une enquête en Égypte, qui a montré que lorsque le niveau d’éducation de la mère passait de zéro ou d’une éducation primaire partielle à un enseignement primaire complet, la proportion de la population vivant au-dessous du seuil

de pauvreté chutait de plus de 30%. Améliorer les compétences des femmes et accroître leurs opportunités économiques se révèle être une stratégie importante pour réduire la pauvreté. L’une des façons de développer les compétences, renforcer les capacités et accroître les possibilités économiques des femmes est d’aider les femmes entrepreneurs. Partout dans le monde en développement, des femmes créent et gèrent des entreprises. La plupart sont de petites et moyennes entreprises qui contribuent à soutenir une famille et peuvent en employer quelques membres, des amis ou associés. Changer l’environnement juridique et social pour rendre plus facile et moins coûteux pour les femmes d’ouvrir une entreprise, d’acquérir et de transférer des titres de propriété, et d’obtenir un crédit, stimule l’entrepreneuriat et l’autonomie des femmes.

Lucia Quachey, présidente de l’Association ghanéenne des femmes entrepreneurs, l’exprime ainsi: «quand une femme a une source régulière de revenus, elle devient très confiante et prend son propre destin en main, elle gagne en estime de soi: c’est l’autonomie (empowerment)» Cette autonomie a de larges effets positifs sur le développement humain. Avec cinq années restant pour réaliser les OMD et des progrès jusqu’ici décevants, il est temps de recentrer les efforts de l’ONU et des pays en développement sur les approches qui fonctionnent. L’autonomie des femmes réduira directement la pauvreté et ses effets, alors allons bâtir sur ce que les études nous enseignent: les femmes peuvent mener la barque.

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DEVELOPPEMENT

Plus d’expansion de Brussels Airlines en Afrique Par Ginette Mupanda

2010 est une année de défi pour la compagnie aérienne belge Brussels Airlines qui veut renforcer sa présence en Afrique avec le lancement de quatre nouvelles lignes dans la côte ouest-africaine et d’une compagnie régionale fiable en République démocratique du Congo cette année, ont annoncé ses dirigeants.

Brussels Airlines a annoncé le vingt-deux février dernier le lancement de quatre nouvelles destinations pour l’Afrique de l’Ouest. Ce qui manquait jusqu’alors au réseau élargi de Brussels Airlines en Afrique lui permettant ainsi de s’orienter vers une clientèle ethnique mais également d’affaires, diplomatique et touristique. Brussels Airlines est la compagnie aérienne qui offre le plus grand choix de vols au départ de Brussels Airport. Ces vols s’opéreront à bord d’un Airbus A330300 qui vient de compléter la flotte long-courrier de la compagnie dont les premiers vols sont planifiés au début du mois de juillet; avec une fréquence de quatre vols par semaine vers Accra au Ghana, deux vols par semaine vers Cotonou au Bénin, deux vols par semaine vers Ouagadougou au Burkina Faso et deux fois par semaine vers Lomé au Togo. Cette expansion lui permettra d’opérer désormais dans dix-huit pays sur le continent africain et desservir pas moins de quatorze aéroports situés dans treize pays. L’Afrique est la deuxième maison de Brussels Airlines et ce nouvel investissement en est à nouveau l’illustration parfaite. L’annonce des nouvelles connexions avec Bruxelles a été accueillie chaleureusement au sein des quatre nouvelles destinations s’ajoutant à notre réseau. Notre volonté n’est pas uniquement d’offrir d’excellentes connexions entre l’Europe et

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ces quatre pays mais également de participer au développement économique de ces régions situées en Afrique de l’Ouest, a expliqué Bernard Gustin, Co-PDG de Brussels Airlines. Brussels Airlines renforce également sa présence africaine dans sa zone «T» dédiée à l’Afrique et située dans la continuité du terminal européen «A» de Brussels Airport. A l’instar des autres destinations africaines, les nouvelles fréquences se connecteront parfaitement au réseau européen, nord-américain, asiatique et moyen-oriental. Le Bénin, le Burkina Faso et le Togo complètent également le réseau élargi de Star Alliance dans le monde. Le réseau de Star Alliance a été créé en 1997 et elle est la première véritable alliance mondiale de compagnie aérienne et la plus importante. Ce réseau présente une offre globale de vol et un service complet et de qualité aux voyageurs internationaux.

Le Projet Korongo Le Korongo est un mot en swahili, symbolisant les grandes migrations des oiseaux «échassiers» présents en Afrique centrale et en Afrique de l’Est. Ce projet prévoit la création d’une nouvelle compagnie aérienne régionale congolaise fiable en RDC. L’objectif est de réaliser ce projet en 2010 étant donné que c’est une année particulière pour la République démocratique

du Congo; celle du cinquantième anniversaire de l’indépendance de la RDC. Bernard Gustin a précisé que la compagnie opérerait dans un premier temps avec un Boeing 737 sur la ligne Lubumbashi-Kinshasa, puis mettrait en service deux avions BAE (British Aerospace). Korongo dont le siège est Lubumbashi chef-lieu de la province du Katanga sera une société de droit congolais avec un capital détenu à 50% par Brussels Airlines et à 50% par le groupe Georges Forrest de l’homme d’affaires belge du même nom, exploitant minier en R.D.Congo. Monsieur Gustin a assuré que cette nouvelle compagnie respecterait l’ensemble des normes de sécurités internationales pour démarrer ses opérations. «Korongo sera une compagnie congolaise qui va travailler en collaboration avec les Lignes Aériennes Congolaises (LAC) c.à.d. elle ne va pas opérer avec la licence de cette dernière», a indiqué Michel Meyfroidt, co-PDG de Brussels Airlines. Pour sa part Herman Carpentier, vice-président en charge des ventes Afrique, souligne que les vols s’effectueront au début avec un AOC belge (Air operator certificate, certificat de transport aérien délivré par les autorités de sécurité aérienne) car s’ils s’opéraient avec un AOC congolais Korongo ils seraient blacklistés. Toutes les compagnies aériennes congolaises sont actuellement sur la liste noire de l’Union européenne.


SANTE

Espoir d’un vaccin efficace

pour la première cause de mortalité en Afrique Par Patrick-Eric Manpouya Cette bonne nouvelle est contenue dans une étude publiée le dix février dernier aux Etats Unis, par un groupe de chercheurs internationaux. Le vaccin qui pourrait éviter des millions de morts par an s’appelle FMP2.1/AS02A. Les tests effectués sur les enfants maliens se sont montrés sans danger et efficaces pour ces derniers.

L’âge de ces enfants ressortissants d’un village malien va de un à six ans. Un choix basé sur le hasard. Certains ont reçu une à trois doses alors que d’autres ont été vaccinés au vaccin antirabique. Cette triple dose a provoqué une forte réponse immunitaire qui a duré au moins un an. Le vaccin est basé sur une seule couche du parasite plasmodium. Un parasite responsable de la forme la plus fréquente et la plus mortelle du paludisme. Il est transmis par une piqure de moustique appelé anophèle femelle. Le vaccin FMP2.1/AS02A cible le paludisme au moment où le parasite entre dans le sang de la victime et commence à se multiplier, précise l’étude. « Les résultats de cet essai clinique pourraient signifier que nous avons peut-être réussi à produire un vaccin qui, pour la première fois, reproduit l’immunité naturelle contre le parasite », relève le Dr Christopher Plowe, professeur de médecine à l’Université du Maryland. « Développer naturellement une telle immunité prend normalement de nombreuses années d’exposition au paludisme », ajoutet-il. Cette prouesse médicale est l’œuvre d’un groupe de chercheurs internationaux qui regroupent des chercheurs américains de la faculté de médecine du Maryland des Etats Unis, des médecins de l’université de Bamako au Mali et des chercheurs des pays européens. La même équipe internationale et des européens

ont décidé d’élargir le test à un groupe de quatre cents enfants malien. Ce sera la phase II de cette recherche qui rentre dans le cadre de la coopération entre l’institut de recherche de l’armée américaine Walter Reed et GSK. Le vaccin qui n’a pas encore été testé sur des personnes adultes est donc un espoir pour la lutte contre le paludisme qui est la première cause de mortalité en Afrique.

Pour info: Le paludisme tue plus d’un million de personnes par an dans le monde, surtout des enfants de moins de cinq ans et des femmes enceintes, en grande majorité en Afrique subsaharienne où un enfant meurt toutes les 30 secondes de la maladie. 27


SANTE Hopital d’Ankoro RDC © David Blumenkrantz

RDC-Belgique Les soins médicaux payés pour les Congolais Persyde Doowo http://mut206kin.be/

La détérioration des structures sociales en République Démocratique du Congo (RDC) n’est plus d’actualité. Il est difficile pour des familles de pouvoir nouer les deux bouts du mois. C’est donc une chance inouie d’avoir un membre actif en occident. Mais pour ces immigrés, ce n’est pas toujours facile, la vie outre atlantique étant remplie d’exigences que personne au pays n’imagine. La Mutualité Neutre de Belgique a ouvert son cœur aux Congolais de l’Europe en soutenant un projet pour les Congolais à Kinshasa.

Depuis juillet 2009, Camille D’Hulst, Directeur Général de la Mutualité Neutre de Belgique, a ouvert son cœur aux Congolais de l’Europe en acceptant d’intégrer dans son institution la section ‘Afrique’ via un projet introduit par Boomba Ekofo Louison, belge d’origine congolaise, et de Remy Nkanu, congolais. En s’inscrivant à la Mutualité Neutre en Belgique, les affiliés congolais devront payer la somme de 56,50 euros par mois dont 45 euros seront destinés aux soins médicaux de sept personnes qu’ils auront choisies à Kinshasa. Les 11,50 euros restants sont à verser à la cotisation mensuelle de la famille résidant en Belgique. Les personnes déclarées doivent se présenter physiquement dans les agences de la Mutualité Neutre de Kinshasa (MNK) pour se faire enregistrer, photographier et encoder. Tenant compte des difficultés de déplacement à Kinshasa, la MNK a résolu d’affecter chaque membre, selon sa localisation géographique, à un centre médical proche de son lieu d’habitation. La MNK travaille en collaboration avec plusieurs hôpitaux de la capitale

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dont la Clinique Ngaliema à Gombe, le Centre Monkole à Mont-Ngafula, l’Hopital Saint-Joseph, Bondeko à Limete et l’Armée du Salut à Maluku. La ville est donc bien quadrillée par la mutualité qui veut aider les populations de Kinshasa. Kinshasa est la première capitale africaine à bénéficier de cette initiative mais sans doute pas la dernière car la Mutualité Neutre de Belgique compte élargir son champ d’action en provinces et pourquoi pas dans d’autres villes de l’Afrique subsaharienne. Voulez-vous en savoir plus? Lisez cette interview.

# Quel a été le but de votre mission à Kinshasa? Mutualité Neutre de la Belgique (MNB): Nous sommes allés poursuivre les formations de nos délégués (représentants). Ils doivent être capables d’utiliser le logiciel que nous exploitons ici en Belgique et de faire l’assurabilité: c’est-à-dire entrer dans le logiciel pour savoir si la personne qui se présente est en règle, avant bien sûr de lui délivrer l’attestation pour des soins médicaux. A la fin de la formation, nous avons organisé un test à l’issue duquel une trentaine de personnes a été sélectionnée.

«Nous détenons une expérience en la matière»

# A quand les prochaines formations? MNB: Les formations sont terminées. Lors du prochain voyage, nous allons débuter l’identification des bénéficiaires. Dès notre arrivée, une grande réunion sera organisée, au cours de laquelle nous allons les photographier et à la même occasion leur remettre les cartes de membres. ZTS, l’entreprise qui imprime les


cartes d’identités et les cartes SIS belges, a effectué une partie du travail. La suite de l’impression sera faite à Kinshasa. Le matériel est déjà sur place. Il faut dire que nous avons eu du retard dans l’avancement du projet à cause notamment de la lenteur de l’administration à Kinshasa. # Que vise la mutualité en collaborant avec le Ministère de l’Enseignement Primaire, Secondaire et Professionnel (MEPSP)? MNB: Le Ministre de tutelle, Maker Muangu, avait sollicité la mutualité afin de l’aider à mettre sur pied une mutuelle des enseignants. C’est dans ce cadre qu’a eu lieu le partenariat. Nous avions organisé des séances de formation. Une équipe est venue en Belgique pour parfaire l’apprentissage. Nous avions également apporté la logistique nécessaire pour mener à bien ce programme. Nous restons le conseiller externe parce que le parrainage a pris fin. Mais nos bureaux se trouvent dans l’enceinte de l’EPSP. # Donc les enseignants congolais ont leur mutuelle qui n’a rien avoir avec la Mutualité Neutre? MNB: Nous avons juste orienté et aidé parce que nous détenons une expérience en la matière. La Mutualité Neutre de Kinshasa est une extension de celle de la Belgique. Elle n’a rien à voir avec la mutuelle des enseignants. Nous sommes une autre institution et nous n’avons pas signé les mêmes conventions avec les hôpitaux. Les enseignants cotisent dix dollars américains par mois pour leurs familles. Nos affiliés par contre paient l’équivalent de cinquante-six euros. Il est évident que leurs soins hospitaliers sont limités. J’estime que c’est une bonne chose pour les enseignants. J’ai appris lors de mon dernier séjour à Kinshasa que c’était l’une des revendications faites par les professeurs lors de la Conférence nationale souveraine de 1992. # Actuellement vous êtes plus investi à la Mutualité Neutre de Kinshasa plutôt qu’à la sensibilisation de la diaspora. MNB: Oui. C’est normal que l’on soit plus à Kinshasa parce que tout va se passer là bas. Il a fallu installer le siège, former les délégués, entrer en contact avec les hôpitaux, installer la connexion Internet pour faciliter le travail entre le siège et les hôpitaux. Bref, il y avait beaucoup à faire. Maintenant que tout est en place, nous allons distribuer des cartes aux

bénéficiaires de Kinshasa. Et nous nous étendrons tout doucement dans les provinces. Une équipe s’est déjà rendue à Goma et à Bukavu pour faire un état de lieu. # Les dons prévus pour les hôpitaux sont-ils déjà acheminés à Kinshasa ? MNB: Une bonne partie. En décembre dernier, la mutualité avait amené cinq mille glucomètres. Ils sont destinés aux bénéficiaires diagnostiqués diabétiques. Ces derniers devront présenter une attestation du médecin pour recevoir gratuitement les appareils. Concernant d’autres matériels, il y a toute une procédure à respecter, des autorisations à avoir mais tout est près pour être acheminé à Kinshasa. # Comment comptez-vous pallier la différence de standing qui existe entre les hôpitaux à Kinshasa? MNB: Le standing de divers hôpitaux n’a pas autant d’importance. Il y a un certain nombre des critères de base auxquels nous tenons. Dès lors que l’institution hospitalière les remplit, elle signe avec nous. La convention est la même pour tous. Il est vrai qu’il existe des hôpitaux mieux équipés que d’autres, l’essentiel c’est le même traitement de qualité pour tous. Nous avons trouvé à Kinshasa un système de compensation entre les cliniques. Dès qu’un centre n’est pas en mesure de procurer tous les soins adéquats, il transfert son patient vers un autre centre pour de meilleurs résultats. Il sera de même pour nos bénéficiaires. # Ne pensez-vous pas être débordé dans les hôpitaux et que les cotisations paraissent insuffisantes? MNB: Honnêtement, nous n’avons peur de rien. Une personne en bonne santé n’ira pas perdre son temps à l’hôpital sachant qu’elle peut l’exploiter pour de bonnes fins. Il faut savoir aussi que nous ne payons pas les hôpitaux par prestations. Nous avons négocié un forfait. Au début, les gens vont peut être affluer mais nous pensons qu’avec le temps ça va se calmer. # Pensez-vous que la Mutualité Neutre aide les institutions hospitalières à Kinshasa à mieux s’équiper ou les obligent-elles à se mettre à niveau? MNB: Il est vrai que nous obligeons d’une certaine façon les hôpitaux à se mettre à niveau car ils ont des cahiers de charge à respecter. Avant même d’être admis et de signer

la convention avec nous, ils doivent réunir certaines conditions. Le bon côté des choses c’est que les matériels que nous apportons est offert sous forme de dons. Il est important de souligner que notre aide ne se limite pas seulement aux bénéficiaires de la mutuelle mais aussi à tous les malades qui se feront soigner dans ces centres hospitaliers parce qu’il vont profiter de ces matériels. # Qu’en est-il de ceux qui n’ont pas d’attache en Belgique? MNB: C’est malheureux mais pour l’instant nous ne pouvons rien faire. Nous réfléchissons à cette problématique. C’est pareil pour la diaspora qui ne vit pas en Belgique, elle n’a pas le droit de s’y affilier. Il faut savoir que même en Belgique, nous n’assistons pas les non-affiliés. Adhérer à une mutuelle est certes une contrainte légale mais la loi interdit d’octroyer des services à ceux qui ne sont pas membres. Il existe un autre problème, le monopole de la Sonas, la seule entreprise publique qui s’occupe des assurances. Il faudra négocier avec elle pour trouver une ouverture. # Pensez-vous négocier avec l’état pour régler ce problème? MNB: Nous comptons nous rendre chez l’administrateur-délégué général de la Sonas pour voir dans quelle mesure négocier. Il faut savoir que la Sonas est une entreprise comme toute autre. Elle a pour but de faire des bénéfices tandis qu’une mutuelle a pour objectif de facilité l’accès aux soins de qualité. Donc nous ne sommes pas dans la logique d’une quelconque concurrence. # Quelle assurance donnez-vous pour la pérennité de ce projet? MNB: Nous travaillons avec la Mutualité Neutre parce que c’est une structure qui existe depuis plus de cent ans. Cette ancienneté dans le domaine inspire une crédibilité. Je pense que si cela n’est pas une garantie, je ne sais quoi dire d’autre. # Quel est votre calendrier pour 2010? MNB: Comme la mise en place est terminée, les soins vont débuter à Kinshasa. Nous pouvons commencer la publicité de ce projet pour toucher un large public. Entretemps, nous toucherons tout doucement les provinces. Je vous ai dit qu’une équipe était déjà à Goma et à Bukavu.

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CHRONIQUE

L’Union africaine

à la croisée des chemins Par Cyrille Momote Kabange

A sa création en 1963 dans la foulée de la décolonisation du continent, l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA), s’est donnée comme objectifs l’accession à l’indépendance des pays encore sous le joug colonial, et la réalisation de l’Unité africaine, c’est-à-dire l’idéal panafricaniste des pères fondateurs tels Nkwame Nkruma ou Dubois.

Plusieurs commissions ont fonctionné sous la supervision du Secrétaire Général lequel ne disposait pas de beaucoup de marges de manœuvre. L’exécutif de l’OUA n’avait pas les coudées franches pour affronter les questions où la souveraineté des états prenait le pas sur la nécessité de réaliser les objectifs communs tant la volonté politique n’était pas souvent au rendez-vous. Non seulement elle avait permis, par une énergique action diplomatique de sa commission ad hoc, que les mouvements de libération des territoires portugais aboutissent, sans pour autant minimiser l’appui donné à la lutte armée, aux indépendances de l’Angola, du Mozambique, de la Guinée Bissau, de Sao-Tomé et Principe et les Iles du Cap-Vert. L’Organisation de l’Unité Africaine a donné

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un tour de vis décisif à certains conflits inter-états. Exemple, la guerre entre l’Ethiopie et l’Erythrée qui a été jugulée sous l’égide de l’OUA. C’est par une manipulation de l’extérieur que l’équilibre géopolitique de la région a été rompu. L’OUA est également un moment pendant lequel ont été élaborées des structures de fonctionnement qui lui ont assuré de manière inégale, faut-il le dire, quelque efficience en matière d’intégration régionale et de résolution des conflits de voisinage. Citons le cas de la Région des Grands Lacs. Il fut un temps où la Communauté économique des Pays des Grands Lacs (CEPGL) servait de référence par rapport à l’esprit de la Charte de Lagos pour cette raison que cet organisme a permis une meilleure articulation entre pôles de dévelop-

pement au bénéfice des petits tels le Rwanda et le Burundi. La CEPGL a canalisé jusqu’il y a quinze ans, tout l’influx pacificateur entre les trois pays qui la composaient (RDC, Rwanda et Burundi). La paix a régné pendant plusieurs décennies et c’est une fois encore à cause d’une pernicieuse manipulation de l’extérieur que l’équilibre géopolitique de la région a été rompu. Néanmoins une certaine léthargie a gagné les instances de l’organisation expliquée essentiellement par l’hétérogénéité des conditions socio-économiques et une désorientation des idéaux politiques qui auraient pu alimenter en l’unité fondamentale de la culture africaine même si elle est distribuée en autant de sous-cultures selon leur insertion dans une histoire particulière.


Nouveau drapeau de l’Union Africaine voté ce 31 janvier 2010 à Addis Abeba © UA

La manipulation des coups d’Etats et l’absence d’une vision politique commune: qui, face à la conduite des Etats bien que souverains dans leur prise des décisions nationales, aurait dû se plier à une éthique, une attitude de gestion conforme à cette transcendance, en est l’illustration. Le changement de dénomination en Union africaine, une proximité euphonique avec l’Union européenne, ne sont pas éloignés de ce constat de carence. D’une part, l’émergence de Kadhafi qui va mobiliser l’organisation et l’opinion africaine sur le thème de l’unification rapide du continent. Cette stratégie élaborée par Tripoli a bénéficié d’une grosse mise en milliards de dollars mais le résultat escompté à moyen terme ne peut être envisagé car l’idée a suscité des divisions entre les souverainistes et autres thuriféraires.

D’autre part, l’Union africaine (UA) a apporté des modifications de structure notamment en ce qui concerne le remplacement du Secrétaire Général par la Présidence de la Commission, faisant en sorte que l’UA a désormais un visage. L’exécutif est mieux étoffé et bénéficie du nouvel environnement international auquel, depuis la fin de la guerre froide, l’Afrique doit une sorte d’aggiornamento politique. La tendance est désormais fixée: le pouvoir ne se prend plus par les armes mais par la voie des urnes. Les quelques baroudeurs qui se sont essayés à rompre cette loi d’airain (les cas de la Mauritanie et de la Guinée) ont été marqués aux fers rouges avec l’appui de la Communauté Internationale. Sur le plan du développement des relations avec des tiers

dans le cadre bilatéral ou multilatéral, l’Afrique parle progressivement d’une seule voix. L’exemple le plus clair a été fourni lors du dernier sommet de Copenhague. Les Africains sont parvenus à leurs fins du moins dans les limites des promesses de fonds dégageables à court terme faites par les pays du G20. En tout état de cause, l’Union africaine qui aux dires de Mr Jean Ping, Président de la Commission, n’a pas de remèdes à tout, apporte néanmoins, quelques gages pour l’avenir. Notamment le fait que les Africains sont capables de se déterminer dès lors qu’ils agissent avec sagesse. Les Afro-pessimistes n’ont qu’à bien se tenir.

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SPORT

1GOAL soutenez la Campagne Mondiale pour l’Education par le football

L’éducation est plus forte que la pauvreté mais soixante-douze millions d’enfants partout dans le monde restent non scolarisés. Les dirigeants du monde peuvent changer ceci. Si vous devenez membre de 1GOAL, vous demandez aux dirigeants du monde de parvenir à un résultat durable: l’éducation pour tout un chacun. Comme chaque année, la Campagne Mondiale pour l’Education (CME) organise la Semaine Mondiale d’Action (19-25 avril) pour promouvoir le droit à l’enseignement pour tous. Parce qu’elles sont les meilleures représentantes de l’importance d’une éducation de qualité, les écoles du monde entier sont également invitées à participer à «1GOAL: Une Leçon pour Tous» le 20 avril, où des milliers d’enfants rappelleront aux adultes, politiciens, sportifs, et autres, ce qu’est leur droit à l’éducation. Leur représentant officiel en Belgique est l’association IDAY, qui coalise une trentaine d’associations et organisations pour renforcer leur capacité de dialogue avec leurs dirigeants.

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SPORT

Qu’est-ce que 1GOAL? La Coupe du Monde 2010, c’était du football bien sûr, mais aussi un engagement social et solidaire. Pour son premier passage sur la terre africaine, la FIFA a en effet choisi de s’associer à la Campagne Mondiale pour l’Education, dans une opération baptisée «1 GOAL: Education Pour Tous». Son objectif ? Laisser l’éducation en héritage de son passage en Afrique. 1GOAL collecte les noms et le soutien du public, de footballeurs et de célébrités pour lancer tous ensemble un appel à tous les gouvernements afin qu’ils se donnent les moyens d’atteindre leurs objectifs de «L’Education pour tous». 1GOAL est donc une vaste pétition de la société sportive et civile à l’adresse des gouvernants du monde. Il leur faut 30 millions de signatures d’ici fin juillet 2010. La FIFA invite tous les clubs sportifs à propager l’appel, qu’ils soient ou non sélectionnés pour le Mondial, et toutes disciplines sportives confondues. En tant que représentant officiel en Belgique de la Campagne Mondiale pour l’Education (CME), l’association IDAY relaye cet appel avec une trentaine d’autres associations et invite les fédérations et clubs sportifs à participer. L’association implique aussi le plus d’écoles possible pour réaliser «la plus Grande Leçon du Monde» où des milliers d’enfants rappelleront aux adultes, politiciens, sportifs, et autres, ce qu’est leur droit à l’éducation. Savoir lire, écrire, compter, c’est avoir accès à l’information, à la culture, accroître ses chances sur le marché du travail, et être mieux équipé

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pour participer à la vie politique. L’éducation nous donne les moyens de connaître et défendre nos droits, et de vaincre la pauvreté. Or plus de soixante-quinze millions d’enfants n’ont toujours pas accès à un enseignement de base de qualité, près de la moitié d’entre eux en Afrique. Ce chiffre est même probablement plus élevé si l’on prend en compte tous ces enfants et jeunes oubliés des statistiques officielles (enfants des rues, enfants domestiques, et autres).

réalité. En Afrique également. Il est plus concret de batailler pour une loi que d’offrir quelques briques ou même toute une école. C’est le plaidoyer que conduit IDAY, qui a choisi de miser sur la formidable vitalité de la société civile africaine en coalisant des organisations pour renforcer leur capacité de dialogue avec leurs dirigeants.

Pourtant, l’enseignement est un droit fondamental de l’enfant. Déjà en 1948, il était inscrit dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. En 2000, les Etats se sont engagés à Dakar à donner à tous les enfants du monde un enseignement primaire, gratuit et obligatoire d’ici 2015. Ils en ont même fait le deuxième Objectif du Millénaire pour le Développement. Les Etats du Nord en ont promis le financement à tous les pays du Sud qui prendront les décisions appropriées en la matière. L’échéance approche, et cet objectif est encore loin d’être atteint. L’aide internationale n’est que très partiellement libérée, et un nombre important de pays n’ont pas encore pris les décisions requises.

L’équipe de 1GOAL grandit chaque jour. Parmi ses membres, on peut compter Zinedine Zidane, Rio Ferdinand, Thierry Henry, Robinho, Michael Essien, Aaron Mokoena, Nwankwo Kanu, Nicolas Anelka, Mikael Silvestre, David James, Kolo Touré, Javier Zanetti, Michael Owen, Mia Hamm, Marcel Desailly, Sir Bobby Charlton, Gary Lineker. L’équipe ne se limite pas à des footballeurs et en font aussi partie la reine Rania de Jordanie, le président de la FIFA Sepp Blatter, Jessica Alba, Clive Owen, Kevin Spacey, Bono, Bob Geldof et Kelly Rowland. Parmi les supporters de 1GOAL, on trouve aussi des entreprises privées et des organisations caritatives internationales. Mais les chefs d’Etat et les gouvernements soutiennent également 1GOAL.

La population a le pouvoir d’inciter ses représentants politiques à promouvoir et faire respecter ses droits. Souvenez-vous de la marche blanche et de la réforme des polices. Souvenez-vous aussi: En 1882, les mouvements sociaux arrachent à l’Assemblée Nationale Française la loi du 28 mars rendant obligatoire et gratuit l’enseignement primaire. Il est donc indispensable que le peuple interpelle ses dirigeants pour réaliser l’éducation pour tous. Seules des lois exigées par le peuple permettront de faire de cet objectif une

Au début du mois de février 2010, les chefs d’Etat et de gouvernement réunis au Sommet africain ont adopté à l’unanimité une résolution de soutien à la campagne «1GOAL: L’éducation Pour Tous» suite à une proposition du Président de la République de Sierra Leone Ernest Bai Koroma. Le soutien des Chefs d’Etat et de gouvernement ouvre la voie à une résolution spécifique sur le droit à l’Education Pour Tous qui sera adoptée avec les autres grandes résolutions et décisions de la 14ème assemblée ordinaire de l’Union Afri-

Qui soutient 1GOAL?


caine. «En permettant à tous les enfants d’aller à l’école, nous amènerons des sourires sur de nombreux visages; en permettant à tous les enfants d’aller à l’école, nous offrons à nos peuples les connaissances, les compétences et l’assurance qui les aideront à faire des choix informés, à soutenir notre développement et à assurer l’avenir de ce continent. Permettre à nos enfants d’aller à l’école est un impératif moral et un facteur indispensable à notre développement. Cet objectif doit être atteint. Il peut être atteint. Il va être atteint», a affirmé avec force le président Koroma.

Qu’est-ce que «L’éducation Pour Tous»? «L’Education Pour Tous» est un engagement international qu’ont pris les dirigeants du monde, de fournir une éducation publique de bonne qualité pour tous les enfants et tous les adultes d’ici 2015. L’engagement prévoit de donner la priorité à ceux qui sont actuellement exclus de toute éducation, afin de les ramener à l’école, et d’assurer qu’ils aient la possibilité d’apprendre, avec des professeurs qualifiés. Il prévoit aussi de donner aux adultes qui n’ont pu aller à l’école, une opportunité d’apprendre à lire et à écrire.

Pourquoi l’éducation pour tous? À l’heure actuelle, soixante-douze millions d’enfants sont privés de l’opportunité d’aller à l’école. Ces enfants pourraient être les dirigeants, les stars du sport, les médecins et les enseignants de la prochaine génération. Mais, sans éducation, ils sont condamnés à une vie de misère. Ils aimeraient bien faire leurs devoirs, mais les frais de scolarité, les conflits armés, le travail à l’usine et à la ferme, le décès de leurs parents pour cause de maladie, le prix de l’uniforme scolaire ou parfois le simple fait d’être une fille les empêche d’aller à l’école. Quel que soit leur milieu social, orphelins, réfugiés, pauvres, handicapés, enfants soldats, enfants travailleurs, enfants issus de milieux défavorisés, le résultat est le même: privés de l’opportunité d’étudier ils ne pourront jamais exploiter pleinement leurs capacités. L’éducation combat la pauvreté et donne aux gens des outils pour s’aider eux-mêmes. L’éducation est essentielle pour briser le cycle de pauvreté des familles, des communautés et de pays entiers. Elle entraîne la croissance économique,

la démocratie et un avenir plus stable. L’éducation est également le meilleur outil à notre disposition pour venir à bout de la pauvreté, et c’est le seul investissement qui rapporte tellement qu’il finit par s’autofinancer: un enfant éduqué finira par gagner davantage et pourra mieux subvenir aux besoins de sa famille. Un enfant scolarisé gagnera 10% de plus par année passée à étudier et le risque d’infection par le VIH/SIDA sera réduit de 50% s’il termine l’école primaire. L’Éducation Pour Tous est requise d’urgence pour venir à bout de la pauvreté, les problèmes de santé et la faim. L’éducation peut offrir de l’espoir et un avenir aux enfants des pays en voie de développement qui ont terriblement besoin d’avoir une chance de réussir dans leur vie.

Comment participer à 1GOAL? Vous rejoignez le site www.join1goal.org/fr Vous signez la pétition pour s’assurer que chacun puisse recevoir une éducation. 1GOAL remettra ces millions de noms aux gouvernements avant la prochaine réunion de l’ONU sur «les Objectifs du Millénaire pour le développement» en septembre 2010, en leur demandant que les objectifs de l’éducation soient bien atteints pour l’échéance 2015. Et puis, vous pouvez participer aussi avec votre école ou votre club de foot. Dites-nous que vous êtes prêts, dédiez un de vos matches à cette cause et organisez une séance de témoignage de soutien à votre école! Visitez http://gce-belgium.skynetblogs.be et organisez votre participation.

à vos agendas La «Semaine Mondiale d’Action» du 19 au 25 avril 2010 «1GOAL: Une Leçon pour Tous» le 20 avril 2010 La «Journée Internationale de l’Enfant Africain» le 16 juin 2010 Organisée par IDAY International, en souvenir du massacre de Soweto où périrent des centaines de jeunes réclamant le droit à l’enseignement. Contact : IDAY-Belgium Michel Ducamp

Sofia Je m’appelle Sofia et je suis de Tanzanie. J’ai 13 ans. J’aimerais vraiment aller à l’école un jour et être comme les autres filles qui portent des uniformes. Je sais que si je vais à l’école, un jour je pourrai aider ma famille, parce que j’aurai un bon emploi bien rémunéré. Je passais mes journées à garder les vaches et les chèvres de mon père mais la plupart d’entre elles sont mortes à cause de la sécheresse. En ce moment, mon père est très malade et ils l’ont emmené dans un hôpital éloigné pour être soigné, si seulement je pouvais faire quelque chose pour l’aider. En ce moment j’aide ma mère à vendre des fruits au marché et à faire les tâches ménagères à la maison. Et quand ma mère tombe malade; je dois aller au marché seule pour acheter la nourriture et d’autres choses dont on a besoin.

Pedro C’est moi, Pedro. Je vis dans un camp de réfugiés appelé El Triunfo au Guatemala. Je suis né ici. Jusqu’à il y a quelques années il y avait une guerre très longue et très sanglante dans mon pays. À cette époque, la vie était très dangereuse là où mes parents vivaient et ils ont été obligés de quitter leur village et venir ici au camp pour être en sécurité. Ils m’ont dit qu’après leur départ du village, leur maison, l’école et tout le village ont été détruits. Bien que le camp ne soit pas comme un village, nous faisons de notre mieux pour le rendre agréable à vivre. Le matin, j’aide ma mère à faire la tortilla et ensuite je vais m’occuper des animaux avec mon père. Le meilleur moment c’est l’après-midi parce que je vais à l’école. Pendant longtemps il n’y avait pas d’école ici, mais maintenant j’y vais tous les jours. C’est très important pour moi parce que je voudrais être médecin quand je serai grand, pour m’occuper des gens là où nous vivons.

micky.ducamp@yahoo.fr Mobile: 00 32 495 261 024

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FRIENDLY FOOT

Friendly Foot contribue à la campagne 1GOAL Par Marc De Vrieze

En 2000, les états se sont engagés à Dakar à donner à tous les enfants du monde un enseignement primaire, gratuit et obligatoire d’ici 2015. Friendly Foot a jugé nécessaire de participer activement à cette campagne.

Lors d’une réunion de concertation avec IDAY Belgique et de nombreuses autres associations, Friendly Foot, représenté par Mahamat Haroun (Vice-président) et Christel Kompany (Coordinatrice), a jugé nécessaire de participer activement à la campagne 1GOAL: «une leçon pour tous». Cette réunion avait pour but d’élaborer ensemble le déroulement d’une importante campagne qui est «L’Education Pour Tous». Friendly Foot reste persuadé que le sport est un vecteur essentiel de motivation pour les enfants dans le monde entier. Prendre le football pour sensibiliser et conscientiser plus de 14.000.000 personnes (2008) dans

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le monde, Friendly Foot se doit de participer, mettre toute son expérience et connaissance au service de cette grande cause, qui est «L’Education Pour Tous». Friendly Foot veut également soutenir et rassembler les asbl ayant les mêmes objectifs dans des actions communes. Il est important de médiatiser avec tous les moyens cette journée «Une leçon pour tous» du 20 avril 2010. Car nous ne devons pas attendre des catastrophes pour agir, l’instruction permet le développement, l’épanouissement et souvent l’autogestion.

Nous souhaitons la participation de tous nos membres, amis, familles et les nombreuses personnalités politiques, diplomatiques, sportives et autres pour le droit à l’éducation pour tous. En signant la pétition et en participant activement à la journée du 20 avril 2010, vous donnez la chance aux enfants de bénéficier d’une éducation et vous obligez les états a tenir leur promesse.



CULTURE / MUSIQUE © Yasmina Baggili

Karim Baggili Sextet Par Saïda Lamouatagh, Art Universel

Après de nombreuses performances solo, duo, trio, quartet, quintet, Karim Baggili, jeune compositeur et musicienguitariste atypique sort son quatrième CD ‘Lea & Kash’. Une panacée aux arrangements subtils et riches en instrumentation: bombo argentin, cuatro du Vénézuela, flûte traversière, saxophone soprano, violoncelle, guitares, oud, cajons et pandeiro.

Cet artiste d’origine jordano-yougoslave se raconte à travers un univers musical multidimensionnel, dans lequel il compose une série de mesures inspirées du flamenco, des motifs rythmiques sud-américains, des sonorités empruntées du jazz, de la musique arabe et balkanique. Il joue avec brio accompagné de musiciens hétéroclites et passionnés. Ensemble ils forment le Karim Baggili Sextet: karim Baggili (guitare flamenca, oud, chant), Karoline de La Serna (chant bombo), Kathy Adam (violoncelle), Patricia Hernandez Van Cauwenberge (percussions), Osvaldo Hernandez Napoles (percussions, cuatro) et Philippe Laloy (flûte traversière, saxophone soprano, clavier). L’importance qu’attache le Sextet au brassage des sons et des couleurs, crée un environnement sonore équilibré, à la fois chimérique et haletant. Au fur et à mesure, la magie opère, précisément, grâce à l’amalgame des voix, habitées, de Karoline de la Serna et de Karim Baggili, mais grâce aussi à la quintessence du violoncelle et du luth arabe, à l’alternance des langages et de passages scandés et aériens. ‘Lea & Kash’ est une mosaïque d’audaces harmoniques uniques et mélodiques. Un pur moment délectable et envoûtant. www.karimbaggili.be www.myspace.com/atonlua Karim Baggili est aussi présent sur Facebook

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Prochains concerts du Karim Baggili Sextet ‘Lea & Kash’: - 19 mars 2010, 20h au Théâtre Molière à 1050 Bruxelles.   Info & réserv. 02/217.26.00 - info@musiekpublique.be - 24 avril 2010, 20h30 à l’Espace Magh à 1000 Bruxelles.   Info & réserv. 02/274.05.10 - info@espacemagh.be - Showcases dans les magasins FNAC:   Bruxelles: 08/05 à 11h45   Liège: 08/05 à 17h30   Gand: 15/05 à 14h   Anvers: 29/05 à 14h   Louvain-La-Neuve: 05/06 à 17h   Bruges: 12/06 à 14h

Discographie: Cuatro con cuatro (2005, Homerecords, AMG, L’Autre Distribution) Douar guitar and oud (2005, Acoustic Music Record, Homerecords) Karim Baggili & l’Ochestre de Chambre de Néthen (Communiq’ Action asbl)


A la découverte de la sanza Par Vincent Hickman www.lezardsnoirs.org

Rectification

Suite à l’article «A la découverte de la sanza», publié dans Le Nouvel Afrique n° 17, la rédaction a reçu quelques modifications importantes de la part de l’auteur, Vincent Hickman. «Le texte de cet article est en grande partie extrait de panneaux d’expositions sur le thème des sanzas que j’ai réalisées en 2005», dit Vincent Hickman. «J’apporte quelques modifications suite à des remarques que m’ont faites récemment des collègues ethnomusicologues à propos de deux inexactitudes. La première se trouvant dans la formulation: ‘Les sanzas seraient les seuls instruments de musique typiquement africains; même si, dans une histoire récente, ils se sont répandus dans d’autres régions du monde.‘ Pour être exact, il faut dire que les sanzas font partie des instruments de musique typiquement africains (mais ne sont pas les seuls). La seconde inexactitude se trouve dans les hypothèses concernant l’origine des sanzas sur le continent africain même. Il semble plus juste en se référant aux travaux de G.Kubik et H.Tracey d’avancer l’idée que le foisonnement des sanzas pourrait avoir comme point de départ une région couvrant le Zimbabwe, une partie de la Zambie et du Mozambique, où d’importants centres métallurgiques existaient dès la fin du premier âge de fer (5è au 10è siècle). Aujourd’hui, les sanzas sont principalement jouées par des populations bantoues, elles se trouvent surtout en Afrique centrale et en Afrique australe, en particulier dans le bassin du Congo et dans celui du Zambèze. Les lamellophones sont apparus plus récemment dans certaines régions d’Afrique de l’Ouest. Aux Antilles et sur le continent sudaméricain, ils ont été fabriqués et joués selon des traditions héritées des esclaves noirs africains, mais ne se rencontrent aujourd’hui plus que dans certaines îles des Caraïbes. Les sanzas ont, tout autant, des rôles de divertissement que des fonctions centrales dans certaines cérémonies religieuses africaines comme chez les Shonas du Zimbabwe.»

L’auteur Vincent Hickman Vincent Hickman est titulaire d’un DEA d’anthropologie sociale et ethnologie (EHESS), titré La Mbira au Zimbabwe: d’une pratique traditionnelle à son renouveau (dir. Jean-Paul Colleyn), soutenu en octobre 2002. Il a également appris la mbira traditionnelle auprès de maîtres au Zimbabwe et en Europe. En 2000, il a fondé l’Association Lézards Noirs qui propose des expositions, des ateliers pédagogiques et des spectacles autour de la découverte des musiques africaines et en particulier des sanzas. Parmi les expositions proposées, «Voyage au Cœur de la Sanza» est consacré en particulier aux lamellophones. Vincent Hickman est aujourd’hui en charge de la direction, de la coordination et de l’animation d’une partie des interventions de ce collectif. Il intervient également régulièrement au Musée du Quai Branly, à la Cité de la musique de Paris et travaille auprès d’enfants handicapés. Il anime par ailleurs des stages de sanza du Zimbabwe pour tout public. Il se produit auprès de la chanteuse zimbabwéenne Chengetai. Il est membre de la Société Française d’Ethnomusicologie (SFE).

en haut: kalimba dans son résonateur

www.lezardsnoirs.org vincent.hickman@lezardsnoirs.org

en dessous: kalimba sans résonateur ©Lucie Rioland

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CULTURE / LIVRES

8 mars: la journée mondiale de la femme En ce mois de mars entièrement consacré à la femme, voici quelques-unes des contributions féminines au monde du livre. Il n’existe pas de livres féminins ou de livres masculins. Il n’existe que des œuvres intéressantes. Profitons-en pour explorer contes, poèmes, romans et histoires donnant le rôle principale à la femme.

Hatubou, Salim

Condé, Maryse

24p, 2004, relié, illustrations en couleur,

351p, 2003, pocket,

éditions L’Harmattan, 8.5 €

éditions Mercure de France, 7.85 €

Conte bilingue français-comorien. Chifchif vivait paisiblement avec son père et son bouc Assoumane-el-bique. Tout bascula le jour où son père se remaria. Une fabuleuse histoire transmise à l’auteur par sa grand-mère maternelle, gardienne de la Mémoire à Milépvani aux Comores.

Est-ce que vous n’allez pas retourner chez vous? Chez moi? Si seulement je savais où c’est. Oui, le hasard m’a fait naître à la Guadeloupe. Mais, dans ma famille, personne ne veut de moi. À part cela, j’ai vécu en France. Un homme m’a emmenée puis larguée dans un pays d’Afrique. De là, un autre m’a emmenée aux États-Unis, puis ramenée en Afrique pour m’y larguer à présent, lui aussi, au Cap. Ah, j’oubliais, j’ai aussi vécu au Japon. Cela fait une belle charade, pas vrai? Non, mon seul pays, c’était Stephen. Là où il est, je reste. La disparition de Stephen, assassiné dans une rue du Cap, est le dernier coup du sort pour Rosélie Thibaudin. Un drame qui la frappe de plein fouet, mettant un terme brutal à vingt ans d’un bonheur apparemment tranquille. En effet, exilée, étrangère dans tous les pays, Rosélie cumule toutes les «tares»: elle a quitté son île pour «l’Afrique marâtre» et a formé un couple mixte avec un Blanc «même pas métropolitain». Dans une Afrique du Sud berceau de tous les racismes, Rosélie devra réapprendre à vivre seule.

Chifchif et la reine des diables

Condé, Diaty

Hérémakono 88p, 2008, relié, éditions L’Harmattan, 12.5 €

Au couchant, non loin d’un vaste cours d’eau qui s’appelle là-bas le fleuve Milo, il y avait un village du nom de Hérémakono, un village englouti dans la savane montagneuse, complètement isolé et dont le reste du monde ignorait l’existence. C’est aussi l’histoire du jeune Maya, qui s’est évadé après son recrutement dans l’armée coloniale.

Akakpo, Gustave

La mère trop tôt

Histoire de la femme cannibale

47p, 2004, livre de poche, éditions Lansman, 8 €

Recham, Ali,

La mère trop tôt, bouleversante petite Mère Courage de treize ans, conduit sa bande d’enfants perdus à travers une guerre qui n’en finit pas. Enfants-soldats, enfances violées, dictateurs cyniques, enjeux économiques et peuples dépecés. Sur un ton singulier de poésie et de cruauté, parfois même avec un soupçon d’humour, l’auteur nous invite à suivre ses personnages pathétiques dans leur errance hallucinée.

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Linza

85p, 2001, broché, éditions L’Harmattan, 7.5 €

Poèmes berbères au langue berbère/ tamazight. Linza est un recueil aussi contradictoire qu’inachevé, il n’a pas pour objectif d’étancher la soif du lecteur, bien au contraire, il attise ses interrogations afin de le rendre lucide face à la fatuité trompeuse.


www.blacklabel.be est une librairie par correspondance et la maison de culture du livre africain. Chez Blacklabel, vous trouverez des livres en néerlandais, en français et en anglais à propos de l’Afrique. Vous pourrez même en commander certains en langue africaine. La plupart des livres que nous offrons sur ce site est difficile à trouver en librairie. www.blacklabel.be offre 10% de réduction aux lecteurs de Le Nouvel Afrique (adresse postale en Belgique). Contactez info@blacklabel.be pour toute information.

Sissoko, Aboubacar Eros

Mariama Kaba du Mali. Un destin tragique

Traore, Saratta

59p, 2007, récit, relié , illustrations noirs/

Les femmes de Bondoukuy au Burkina Faso. Pilier économique de l’agriculture

blancs, éditions L’Harmattan, 11 €

240p, 20100, collection Terrain, récits & fictions, éditions L’Harmattan, 22 €

Nandy voulait un fils. Elle accoucha d’une fille. Quand Mariama Kaba eut sept ans, Nandy refusa obstinément de se séparer de sa fille pour que celle-ci subisse l’épreuve initiatique de l’excision. Ce récit adapté par l’auteur met en évidence la barbarie de l’excision dont la pratique perdure malgré son interdiction légale.

Traore, Saratta

Femmes bwaba du Burkina Faso. Les contraintes sociales 208p, 2010, collection Terrain, récits & fictions, éditions L’Harmattan, 20 €

Pratiquant l’agriculture itinérante sur brûlis les Bwaba du sud-ouest du Burkina Faso avaient une stricte division du travail par genre: aux femmes la cueillette et le ménage, aux hommes l’agriculture. Cette étude sur le genre féminin expose à partir d’une observation participante ethnographique la mise au travail récente des femmes dans toutes les phases de l’agriculture. Mais pour construire une véritable stratégie économique qui les rendrait indépendantes, se posent aux femmes trois problèmes de base: accès à la terre, accès au crédit, accès à un véritable statut d’agricultrice.

Cet ouvrage expose les contraintes sociales dans lesquelles les femmes bwaba sont enserrées et les marges de liberté qu’elles acquièrent. Il signale la fragilisation des femmes dans les nouveaux couples, l’extension de la polygamie comme option ‘économique’ aux dépens d’investissements en matériels. Une large part de l’analyse est consacrée aux difficiles relations entre coépouses, même si, dans certains ménages polygames, la situation peut être harmonieuse.

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CUISINE Poulet Yassa © Daniel Bobadilla

Délice du pays de la teranga Ce mois-ci, le NouvelAfrique s’est arrêté au Sénégal pour déguster un bon POULET YASSA

Ingrédients pour 6 personnes: - un gros poulet fermier - 8 oignons - 4 gousses d’ail - 6 citrons verts - 6 cuillères à soupe d’huile - 2 cuillères à soupe de moutarde forte - 2 cubes de bouillon de volaille - 1 à 2 piments séchés - sel, poivre, thym et laurier

Préparation: Préparer une marinade avec le jus des 6 citrons, la moutarde, les 2 cubes de bouillon écrasés, le sel, le poivre et la moitié de l’huile. Couper le poulet en morceaux, ajouter la marinade ainsi que les oignons émincés et les gousse d’ail écrasées; laisser reposer pendant 4 heures. Au bout des 4 heures, sortir les morceaux de poulet et les faire revenir dans une sauteuse où vous aurez préalablement fait chauffer de l’huile. Dans une autre sauteuse, faites sauter les oignons à feu doux pendant dix minutes. Dès que les oignons commencent à s’attendrir, rajouter les morceaux de poulet, les 2 piments et couvrir d’un peu d’eau. Mélanger et laisser cuire à feu moyen 45 minutes en remuant de temps en temps. Vérifier l’assaisonnement et rectifier si nécessaire. Ce plat de l’Afrique de l’Ouest peut s’accompagner de riz ou de patates douces cuites à la vapeur. Il ne nous reste plus qu’à vous souhaiter : «Na ress ak diam» (Bon appétit).

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