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T\u00E9moins de l'\u00E9volution
Pour mieux comprendre le phénomène de l’évolution, les scientifiques doivent se référer au passé. Heureusement pour eux, la nature a conservé certaines traces de sa longue histoire. En enfermant certains indices dans leurs cœurs, les météorites peuvent nous en apprendre sur la formation de notre planète. Aussi, certaines espèces ont très peu évolué depuis des centaines de millions d’années, en optant pour des stratégies qui leur ont permis de traverser les époques sans modifier leurs traits morphologiques. Ces espèces nous aident à mieux comprendre d’où nous venons ainsi que les forces évolutives qui ont forgé notre environnement.
Des insectes aux capacités impressionnantes
• Par Guillaume Roy
Les arthropodes sont des animaux abondants qui nous entourent dans notre vie de tous les jours. Ils incluent, entre autres, les insectes, les crustacés et les arachnides. Ce groupe est aussi très ancien. En effet, les arthropodes seraient apparus il y a plus de 500 millions d'années. Ensuite, il y a environ 400 millions d'années, les insectes, sans ailes, font leur apparition. Ils ont été parmi les premiers organismes à fouler la terre ferme et à tirer avantage d'une foule de niches écologiques inexploitées.
Le lépisme, aussi connu sous le nom de « poisson d’argent », est un témoin de cette époque. Avec un corps aplati et couvert d’écailles, il est un des plus vieux insectes au monde. Sa grande résilience lui a permis de traverser les âges. La clé du succès du lépisme réside dans son aptitude à survivre de longues périodes sans se nourrir. Et comme il est tout petit, il lui suffit de quelques miettes pour se rassasier !
Il y a 320 millions d’années survient une autre innovation majeure qui permettra aux insectes de proliférer : l’apparition des ailes. Cette avancée évolutive leur donne alors la possibilité d’échapper à leurs prédateurs tout en accédant à davantage de ressources.
Cet avantage incontesté – à l’époque, les insectes étaient les seuls à voler – leur permet de grandir en nombre et en diversité. Les experts ont aujourd’hui recensé plus d’un million d’espèces d’insectes dans le monde, mais ils estiment qu’il y en aurait encore bien plus à découvrir !
Des « fossiles vivants » dans notre quotidien
• Par Guillaume Roy
Fermez les yeux et imaginez de quoi avait l’air la végétation sur la Terre il y a 300 millions d’années, alors que le climat était chaud et humide. Oubliez les plantes à fleurs car, à l’époque, le monde était recouvert de mousses, ainsi que d’énormes fougères arborescentes. Curieusement, certaines des lignées de plantes présentes au carbonifère ont été en mesure de traverser le temps jusqu’à nous en évoluant très peu.
C’est le cas de l’Angiopteris evecta, une fougère qui possède des frondes (feuilles des fougères) pouvant atteindre jusqu’à 9 mètres. Appartenant à une famille apparue il y a plus de 300 millions d’années – soit près de 150 millions d’années avant l’arrivée des plantes à fleurs –, cette fougère géante est un réel témoin du passé.
Comme toutes les fougères, l’angiopteris ne produit ni fleurs, ni fruits, ni graines pour se reproduire. Elle utilise encore un mode de reproduction par spores que l’on considère comme « primitif » puisqu’il dépend de l’eau ! En effet, les cellules reproductrices mâles doivent se déplacer sur un film d’eau pour féconder les cellules reproductrices femelles.
Autre exemple de « fossile vivant », le Ginkgo biloba, cet arbre protégé par les moines bouddhistes dès le XII e siècle, est similaire aux ginkgos qui poussaient à l’époque des derniers dinosaures, il y a 70 millions d’années.
Pouvant atteindre une taille de plus de 25 mètres, le ginkgo résiste bien à la pollution, aux ravageurs et aux maladies, ce qui en fait un excellent arbre urbain. Autre signe de sa résistance, on a constaté qu’un ginkgo avait survécu à l’explosion de la bombe atomique d’Hiroshima même s’il n’était situé qu’à moins d’un kilomètre de l’épicentre !
Nul besoin de remonter le temps pour admirer ces ambassadeurs du passé. Venez voir l’angiopteris dans la serre des fougères et le ginkgo dans l’Arboretum lors de votre prochaine visite au Jardin botanique de Montréal.
Une fenêtre sur les premiers instants du Système solaire
• Par André Grandchamps
L’étude des météorites a permis aux astrophysiciens de dresser un scénario de la naissance des planètes. Ces roches venues de l’espace nous ont même livré des indices étonnants !
Lors de la formation du Système solaire, la quasi-totalité de la matière s’est concentrée au centre d’un immense nuage pour former le Soleil. Celui-ci était entouré d’un disque de poussières microscopiques et de gaz.
En se heurtant, les poussières ont grossi pour créer des agrégats d’à peine quelques millimètres. Cette agglomération s’est poursuivie jusqu’à créer d’une part les astéroïdes dont sont issues la très grande majorité des météorites que nous recueillons aujourd’hui sur Terre et, d’autre part, les planètes.
Les astrophysiciens ont découvert dans les météorites primitives de petites billes de silicates nommées chondres, ainsi que des inclusions réfractaires, soit les premiers objets à se former dans notre Système solaire. C’est en les analysant qu’ils ont pu mieux comprendre comment le processus que l’on vient de décrire s’est passé.
Mais il y a plus. À la fin du processus de formation planétaire, un grand nombre de corps célestes bombarderont les planètes naissantes, couvrant la surface de la Terre d’une couche de matériaux variés. Les astronomes se questionnent aujourd’hui sur l’influence que cela a pu avoir, notamment sur l’apparition de la vie.
En effet, l’analyse de certaines météorites a montré que la signature atomique de l’eau qu’elles contiennent est assez semblable à celle que l’on trouve sur Terre : les météorites seraient-elles la source de l’eau que nous buvons ?
Autre fait intéressant, la météorite Murchison, que vous pouvez observer dans la collection du Planétarium Rio Tinto Alcan, contient plus de 70 variétés d’acides aminés. Or, les acides aminés sont les molécules fondamentales de la vie sur Terre. Autant d’indices qui retiennent l’attention des chercheurs en quête d’une meilleure compréhension de l’explication de l’apparition de la vie sur notre planète.
Une armure pour traverser les époques
• Par Guillaume Roy
La meilleure façon de survivre pendant des centaines de millions d’années est parfois de se doter d’une bonne armure pour se protéger des prédateurs. C’est du moins ce que l’on peut observer avec plusieurs « fossiles vivants », des espèces qui existent depuis des millions d’années et qui ont peu évolué depuis.
Un des meilleurs exemples est l’oursin vert, apparu il y a 450 millions d’années. Munie d’un exosquelette et d’épines urticantes, cette espèce a toujours su combattre la prédation tout en conservant un mode de reproduction archaïque avec la dissémination de ses gamètes dans l’eau.
Autre exemple : les tortues. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, elles ne descendent pas des ancêtres des serpents et des lézards. Elles ont plutôt un aïeul commun avec le crocodile et les oiseaux, qui vivait il y a environ 200 millions d’années. Depuis cette époque, sa carapace lui procure une protection fort efficace et plusieurs espèces ont survécu aux extinctions massives du passé. Les tortues marines géantes et les tortues munies de dents ont toutefois disparu et plusieurs espèces sont aujourd’hui en danger.
En ce qui a trait aux poissons, l’arowana est l’un des plus primitifs. L’anatomie de l’espèce n’a que très peu évolué depuis son apparition, il y a 145 millions d’années. Muni de grosses écailles en forme de plaque, il est en mesure de respirer l’air ambiant, ce qui lui permet de survivre dans les milieux pauvres en oxygène. Fait étrange, c’est le mâle qui incube et protège les œufs dans sa bouche, un trait évolutif considéré comme récent.
Comme quoi toutes les espèces doivent évoluer même si elles conservent d’importantes reliques du passé. Il sera possible d’observer ces espèces au Biodôme de Montréal, dès sa réouverture. Gardez l’œil ouvert !