Histoire de La MĂŠtairie
Remerciements
Editeur et copyright
Clinique La Métaire
Graphisme
Etienne & Etienne, Carouge
Impression
Achevé d’imprimer en 1000 exemplaires, dont 200 exemplaires numérotés de 1 à 200, le 30 août 2009 sur les presses de l’imprimerie SRO Kundig, Genève
Cert no. XXX-XXX-XXXX
Les auteurs remercient l’ensemble des collaborateurs présents ou passés de La Métairie qui ont bien voulu leur accorder un entretien, ainsi que les différentes personnes ayant transmis leurs archives privées: Mmes Catherine Gremion, Wanda Lee-Jones, Irène Manighetti, Isabelle Moser et M. Charles Burion. Les auteurs remercient également Madame Catherine Colin, Directrice Générale de La Métairie, pour son soutien et sa collaboration à l’élaboration de cette publication, ses relectures et ses contributions aux choix iconographiques.
Histoire de La MĂŠtairie
En Suisse et dans le monde
Quelques repères chronologiques 1839
1900 Ouverture de l’Asile de Bel-Air à Chêne-Bourg
1864 Création de la société des aliénistes suisses (plus tard Société suisse de psychiatrie)
Ouverture de l’Asile des Vernets, à Genève
12 oct. 1857 A La Métairie
1873
Ouverture de l’Asile de Cery, près de Lausanne
1930
1927 1ère session d’examens du personnel infirmier selon le plan d’études élaboré par la Société suisse de psychiatrie
Ouverture de la clinique des Rives de Prangins par Oscar Forel
21 sept. 1860
1893-1897
1918
Admission de la première patiente, Amélie D. née V.
Exploitation de la Colline, annexe de La Métairie dédiée aux soins en hydrothérapie, pour convalescents et malades tranquilles
Renouvellement complet du Conseil d’administration de La Métairie, suite à des difficultés financières
Fondation de la SA Métairie
23 nov. 1858
1914-1918
Début des travaux de construction
1ère guerre mondiale; diminution des entrées et retards dans le paiement des pensions à La Métairie; fermeture provisoire de La Villa et du Chalet pour cause de pénurie de charbon en avril 1917
1950-1960
1980
2004
Mise au point des médicaments neuroleptiques, antidepresseurs et anxiolytiques
Publication du DSM III par l’Association Américaine de Psychiatrie
séquençage complet de l’ADN du génome humain
1950
1960-1970
1996
Fondation de l’Association Mondiale de Psychiatrie (AMP)
Mouvements de l’antipsychiatrie; développement des thérapies systémiques et cognitivocomportementales
AMP: déclararation de Madrid sur les droits des patients
Mai 1938
Les SA de La Métairie et de la Clinique des Rives de Prangins sont réunies
1985
2000
Fin de la SA de La Métairie; la clinique est désormais propriété de groupes internationaux
Ouverture de l’hôpital de jour
2006-2009
1986
2005
Ouverture à La Métairie de la première unité spécialisée, dédiée au traitement des maladies de la dépendance (UMD)
Rachat de La Métairie par le groupe Orpea
Rénovation de l’ensemble des bâtiments, création du centre ambulatoire et du SPA - espace bien-être
Sommaire
1ère partie: de la fondation aux premières années du 21e siècle Marie TAVERA & Vincent BARRAS Institut universitaire d’histoire de la médecine et de la santé publique CHUV/Université de Lausanne
Les débuts La Métairie, première et dernière clinique psychiatrique privée de Suisse romande Du 19è siècle à l’entre-deux guerres Une architecture de soins et de surveillance Des médecins directeurs spécialisés Succession et collégialité Soins infirmiers et intendance La vie des malades S’occuper pour guérir Les bâtiments Les temps agités de la guerre Des années 1920 aux années 1980 Un épisode politique et scientifique: psychopathologie infantile et pupillographie Les relations avec les Rives de Prangins L’ère Semadeni
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La fin du 20è siècle: changement de cap Des dames de compagnie à l’équipe interdisciplinaire Les unités thérapeutiques Promotion régionale
2e partie La Métairie au 21e siècle François FERRERO Directeur scientifique & Nicola GERVASONI Directeur médical Clinique La Métairie
Le 21è siècle: un nouveau rôle Un site préservé Programme général et programmes spécialisés Psychiatrie et psychothérapie Transformation des bâtiments Le nouveau centre ambulatoire La Fondation La Métairie Une mission de formation Sources et bibliographie Remerciements
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Villa la Falaise au bord du lac
Les débuts Lorsque La Métairie ouvre ses portes en septembre 1860, deux «asiles publics d’aliénés» existent déjà, le Champ de l’Air à Lausanne, datant de 1811 et l’Asile des Vernets à Genève, ouvert en 1838, ainsi qu’un établissement privé d’utilité publique, la Maison de santé de Préfargier, ouverte en 1848.
Le Chalet
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A cette époque, le canton de Genève est le théâtre d’importants changements politiques: les élections de 1855 ont donné le pouvoir aux radicaux et l’élite patricienne locale est mise à l’écart. Le Dr Jean-Charles Coindet (1796-1876) doit démissionner de son poste de directeur de l’Asile des Vernets; contacté par Guillaume Prévost et Alexandre-Louis Prévost-Martin, philanthropes et patriciens genevois, il est chargé d’organiser la construction d’un établissement privé qui aura pour but d’éviter aux familles genevoises et vaudoises aisées d’envoyer leurs malades se faire traiter loin de chez elles. Le Dr Coindet porte son choix sur un site offrant l’agrément du paysage, l’avantage de la proximité avec Genève, et aussi de permettre d’échapper à la juridiction du nouveau gouvernement. La Société Anonyme de La Métairie, forte d’un capital de 200 actions de 1’000 francs, est fondée le 12 octobre 1857. Les travaux de construction, commencés en novembre 1858, s’achèvent à la fin de l’été 1860, permettant à la nouvelle «Maison de santé de La Métairie» d’accueillir, dès septembre 1860, un maximum de vingt-deux patients. La Métairie, première et dernière clinique psychiatrique privée de Suisse romande L’histoire des cliniques psychiatriques privées - dont l’essor, lié à celui des sanatoria et du mouvement hygiéniste, débute dans la seconde moitié du 19e siècle - reste largement inexploré, la plupart des archives ayant été dispersées au cours du temps. Ce terrain historique presque vierge est cependant d’un grand intérêt. D’une part, l’enjeu économique lié à l’existence de ces établissements fait ressortir l’évolution des conceptions scientifiques: soumis à la concurrence, ils sont contraints de suivre de près ce qu’à chaque époque on considère comme le meilleur en matière de psychiatrie. Ils constituent ainsi un excellent indicateur de l’acceptation des idées médicales à l’intérieur des élites. D’autre part, leur histoire vient compléter ce que nous apprend déjà celle des asiles publics: la médicalisation de la prise en charge de la maladie mentale, ainsi que les enjeux juridiques, sociaux, et sanitaires qui lui sont liés. En Suisse romande, c’est surtout dès le début du 20e siècle que fleurissent les maisons de santé privées; elles sont situées en bonne partie sur les bords du Léman, dont les paysages attirent une clientèle cosmopolite. La Métairie fait figure de pionnière: première clinique psychiatrique privée de la région, elle est aussi la seule à fonctionner comme telle aujourd’hui encore (les autres établissements similaires encore en activité se trouvent en Suisse allemande ou au Tessin). Par l’histoire de ses succès et de ses aléas, la succession de ses médecins-directeurs, l’évolution de sa clientèle et des traitements prodigués, l’histoire de La Métairie nous offre ainsi un panorama exceptionnel sur l’évolution de la société et de la culture psychiatrique.
Etapes de la psychiatrie en Suisse romande
1848
1876
Ouverture de la Maison de santé de Préfargier (Neuchâtel)
1871
1838
Loi cantonale genevoise sur le régime des aliénés
1873
1848
1900
Ouverture de l’Asile de Cery (Vaud)
1ère loi neuchâteloise sur les aliénés
1864
Création de la Société des aliénistes suisses
Loi cantonale vaudoise sur le régime des aliénés
1895
1er projet de loi fédérale sur le régime des aliénés
1ère loi genevoise sur les aliénés
1901
Création de la Faculté de médecine à Genève
Ouverture de l’Asile de Bel-Air (Genève)
1890
Création de la Faculté de médecine de Lausanne
Du 19e siècle à l’entre-deux guerres L’essor d’une nouvelle spécialité médicale, la psychiatrie, s’accompagne de discussions théoriques multiples (étiologie et classification des maladies mentales, qualités respectives des divers modèles asilaires, compétences exigées des médecins spécialistes, …), ainsi que de débats sociaux portant sur la contention des malades agités, sur l’internement et le placement des aliénés. La Métairie participe de plain pied à cette histoire. Une architecture de soins et de surveillance
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Hall du 1er étage à La Prairie
A l’époque de l’ouverture de La Métairie, la thérapeutique se fonde sur le «traitement moral», qui postule qu’un esprit «aliéné» conserve une part raisonnable sur laquelle le médecin doit s’appuyer pour détourner le malade de ses idées pathologiques et enclencher ainsi le processus de guérison. L’environnement, les habitudes de vie et l’activité du malade jouent un rôle décisif: il importe donc d’extraire le patient de son cadre quotidien, non pas tant pour protéger la société que pour le protéger lui-même, par l’isolement, le repos, les soins et la restructuration de son mode de vie. Dans ce contexte, le lieu d’accueil est capital: il doit offrir un cadre apaisant et organisé, porteur en soi de vertus curatives. L’architecture occupe une place prépondérante dans la réflexion des médecins, comme en témoignent les nombreux débats présidant à la construction des maisons de santé. Aux impératifs habituels (coût, taille, ...) s’ajoutent d’autres critères: le bâtiment doit inspirer calme et sérénité par l’harmonie de ses proportions; il doit permettre une surveillance discrète et continue sans évoquer l’enfermement; il doit enfin répondre à l’impératif de séparation des sexes et des malades selon leur degré d’agitation. Le Dr Coindet et l’architecte Francis Gindroz (1822-1878) mandatés pour la réalisation de la clinique se rendent à Paris pour s’informer sur les dernières nouveautés en matière d’organisation, d’équipements et de doctrines en usage dans les grands asiles de la capitale. La disposition retenue s’ordonne en forme de U allongé, facilitant l’isolement des «malades agités», logés en fonction de leur sexe dans l’un des deux pavillons annexés au bâtiment central, qui accueille quant à lui les «tranquilles» et les convalescents. Le Dr Coindet insiste sur le fait que «ces quatre divisions principales doivent encore admettre des subdivisions», ce qui est rendu possible par l’existence des étages. En ce qui concerne la surveillance et la sécurité des patients, le Dr Coindet souligne que «la disposition des portes et des fenêtres a été l’objet de précautions attentives, il a été fait choix d’un mode de fermeture qui, tout en garantissant la sûreté personnelle, ne réveille pas l’idée de contrainte et ne prête aucune facilité à l’exécution de sinistres desseins [...]. Une enceinte de murailles n’attriste point la vue de nos jardins. Leurs clôtures sont de fortes palissades, hautes de trois mètres, fixées au fond d’un saut-de-loup et bordées d’arbustes; elles ne bornent point les regards.» La construction d’une galerie vitrée reliant les deux pavillons au bâtiment central permet une surveillance efficace, mais aussi confortable. Plan de La Falaise
Une chambre Ă La Prairie
Des médecins-directeurs spécialisés Les fondateurs de La Métairie avaient exigé «le séjour fixe à l’établissement d’un médecin aliéniste de premier ordre, capable de diriger ce traitement et de se concilier par ses qualités morales, autant que par ses lumières et ses talents, l’estime et la confiance des familles». Or, aucun diplôme de spécialiste en psychiatrie n’existe au 19e siècle (en Suisse, la spécialité ne sera reconnue qu’en 1933), c’est l’intérêt personnel et l’expérience professionnelle du médecin qui déterminent sa qualification. Ernest Long, docteur en médecine de la Faculté de Paris, se forme à Préfargier et visite des asiles de France et d’Angleterre, avant de devenir le premier médecin-directeur de La Métairie de 1860 à 1861. Après une année, il est remplacé par l’ancien médecin-adjoint de Préfargier, le Dr Guder, à La Métairie de 1861 à 1877. Les médecins-directeurs successifs acquièrent leurs compétences professionnelles en travaillant dans différents asiles de Suisse: Adrien Rist à La Métairie de 1877 à 1889, a ainsi été le premier médecin-directeur de l’Asile de Cery, près de Lausanne. Rudolf Fetscherin à La Métairie de 1889 à 1892, a officié auparavant à la Waldau de Berne et à St. Urban près de Lucerne. Henry-Auguste Widmer à La Métairie de 1893 à 1897, était assistant à l’Asile des aliénés de Bâle. François Dizard à La Métairie de 1897 à 1899, de 1906 à 1919 et de 1930 à 1932 venait de l’Asile des Vernets. Le parcours de ces praticiens démontre l’émergence d’un réseau professionnel dans le cercle encore restreint de la psychiatrie à la fin du 19e siècle. La «Société des aliénistes suisses», créée en 1864, ne compte alors que douze psychiatres - ils seront plus de trente en 1900.
Les médecins directeurs de La Métairie 1860-1861 Ernest Long (1833-1899) 1861-1877 Dr Guder ou Güder (dates inconnues) 1877-1889 Adrien Rist (1841-1923) 1889-1892 Rudolf Friederich Fetscherin (1829-1892) 1893-1897 Auguste Widmer (1853-1939) 1897-1899 François Dizard (1864-?) 1899-1906 Johannes Martin (1851-1939) 1906-1919 François Dizard (1864-?) 1919-1924 Auguste Callet (dates inconnues) 1924-1929 Oscar Forel (1891-1982) 1930-1932 François Dizard (1864-?) 1932-1937 Marc Guillerey (1895-1954) 1937-1938 William Boven (1887-1970) 1939-1945 Ernest Gonet (1894-1976) 1946-1953 André Melley (1904-1987) 1953-1984 Gustave Waclaw Semadeni (1922-1986) 1985-2003 Georges Gabris 2004-2005 Eric Jeunet 2005-2006 Gustavo Basterrechea 2007-2008 Brigitte Degeilh 2007-
Successions et collégialité En 1893, au moment où le Dr Widmer, secondé par sa femme, prend la direction de l’établissement, les actionnaires de la Société Anonyme de La Métairie, notant la baisse du nombre de malades, relèvent la nécessité d’une gestion stabilisée. La circulation des médecins-directeurs, qui utilisent souvent leur passage à La Métairie comme tremplin vers d’autres horizons, est un problème récurrent. A contrario, certains médecins-directeurs resteront de longues années à leur poste, comme les Drs Guder, de 1861 à 1877, Dizard de 1906 à 1919, Semadeni de 1952 à 1984 ou Gabris de 1985 à 2003. Le Dr Oscar Forel (1891-1982) alors médecin directeur de La Métairie, va créer la clinique des Rives de Prangins qui ouvrira en 1930. Avant et après lui, plusieurs des médecins-directeurs de La Métairie fondent leur propre clinique, nourris par l’expérience - et parfois par la clientèle - acquise à la tête de la clinique nyonnaise. Ainsi le Dr Guder, qui donne sa démission en 1877, ouvre l’année suivante un établissement privé près de Genève. Le Conseil d’administration note en 1878 qu’il lui faudra à l’occasion «faire savoir à M. le Dr Guder que l’ouverture d’une maison de santé à Chêne sous ses auspices n’a pas été vue avec plaisir par le Conseil.». Son successeur, le Dr Adrien Rist, fondera également sa propre maison à Versailles, en France, et le Dr Auguste Widmer utilisera les connaissances acquises à La Métairie, pour fonder les cliniques de La Colline
Prof. François Ferrero Directeur scientifique
2008-
Nicola Gervasoni
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puis de Valmont près de Montreux. Enfin, le Dr Marc Guillerey (1895-1954) directeur de La Métairie entre 1932 et 1938 ouvrira la clinique des Berges du Léman à Vevey. Soins infirmiers et intendance
Une équipe d’infirmiers devant Le Léman
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Essai de masque à gaz pendant la guerre
A la fin du 19e siècle dans toute l’Europe, le personnel infirmier est compté comme «subalterne». Le rôle des infirmiers reste longtemps celui d’un personnel de gardiennage et d’encadrement hôtelier, simple garant de l’observation des consignes médicales. Le «personnel des employés supérieurs» comprend l’équipe médicale et administrative, ainsi que les «demoiselles de compagnie». Le statut des «demoiselles de compagnie» est quant à lui valorisé: elles constituent d’une certaine manière les auxiliaires des médecins en matière de traitement moral. Il leur incombe d’accompagner le patient dans sa cure; elles assument en réalité un rôle plus directement thérapeutique que celui des infirmières et infirmiers. De façon générale, le statut de ces derniers ne s’affirmera qu’au cours du 20e siècle: de simples «gardemalades», ils acquerront, grâce notamment à la mise en place d’une formation ad hoc, des compétences professionnelles spécifiques. Quant à la gestion de l’établissement, elle est longtemps l’apanage des épouses des médecins-directeurs. Cela pose parfois problème, comme au moment de l’engagement en 1897 du Dr Dizard, célibataire, qui sera secondé par l’ancienne directrice de La Colline, un établissement annexe. Ce n’est qu’une cinquantaine d’années plus tard que des administrateurs-directeurs non médecins, au bénéfice de formations complètes de gestion sanitaire, font leur entrée à La Métairie comme dans tous les établissements de santé. Le fonctionnement de La Métairie implique la collaboration de nombreuses personnes, dont l’évolution des fonctions fait ressotir certains enjeux culturels et sociaux. Dès l’origine, l’entretien du parc occupe plusieurs jardiniers: l’agrément du domaine constitue un atout publicitaire de poids. De 1860 à nos jours, les vertus apaisantes de l’environnement naturel sont systématiquement invoquées dans les brochures publiées par l’établissement. La tâche des jardiniers comprend aussi la culture des légumes, consommés jusque dans les années 1960 par les pensionnaires et employés, tandis que la culture des fleurs est pratiquée jusque dans les années 1980: le jardinier peut ainsi confectionner chaque semaine les bouquets destinés aux chambres des patients. L’importance de la cuisine n’est jamais sous-estimée. La qualité de la nourriture compte beaucoup dans la satisfaction des patients, dont les séjours en clinique peuvent se prolonger durant de longs mois. Dans les premières décennies, on continue d’attribuer à l’alimentation certaines vertus thérapeutiques agissant directement sur la santé mentale. Enfin, l’aspect économique est continuellement présent: l’utilisation des ressources propres au domaine (exploitation agricole, ferme) s’avère longtemps rentable, mais disparaît progressivement au cours de la seconde moitié du 20e siècle, jusqu’à la fermeture de l’exploitation animale de La Métairie en 1970.
Du 19è siècle à l’entre deux-guerres
La Colline
A
uguste Widmer (18531939) prend ses fonctions de médecin-directeur le 15 janvier 1893 Très intéressé par l’hydrothérapie, qu’il a pratiquée aux Bains de Schoenbrunn dans le canton de Zoug ainsi qu’en Autriche, il propose au Conseil d’administration l’ouverture d’une «maison ouverte où les convalescents, sortant de La Métairie, puissent passer quelques semaines, avant de rentrer dans la vie publique, et où les personnes nerveuses et fatiguées puissent se reposer, sans avoir le contact des aliénés et sans être astreintes à des formalités pénibles». C’est le début d’un épisode particulier dans l’histoire de la clinique, qui
passe une convention de location avec le Dr Oltramare, propriétaire d’une villa voisine, afin de pouvoir exploiter celle-ci en tant que lieu de soins à la fois indépendant et relié à la maison-mère: «Cette maison a son administration distincte de La Métairie, tout en restant naturellement sous la direction et le contrôle de Mr le Dr Widmer. Elle comprend une Directrice, une masseuse doucheuse, l’hydrothérapie jouant un rôle important dans le traitement, une cuisinière, une femme de chambre et un jeune garçon. La Colline est reliée téléphoniquement, nuit et jour, à la maison centrale, ce qui est un gage de sécurité». Dotée de six chambres, elle reçoit rapidement ses
premiers pensionnaires. En 1894, 23 malades y sont traités, «la plupart neurasthéniques, hystériques ou hypocondriaques», et la convention établie avec le propriétaire est reconduite pour une année. Malgré les bénéfices, cet épisode reste sans suite, car trop étroitement lié à la personnalité de Widmer. Son successeur, le Dr Dizard, ne poursuit pas l’expérience, tandis que Widmer fonde sa propre maison de santé à Montfleury sur Territet, puis un nouvel établissement, la clinique Valmont. La Colline de La Métairie aura ainsi été une sorte de laboratoire pour ce passionné des soins en hydrothérapie.
La vie des malades Lors de son ouverture, La Métairie est avant tout destinée à une clientèle locale, vaudoise et genevoise. Toutefois, les premiers registres d’entrées de la clinique, conservés jusqu’au début du 20e siècle, montrent que sont régulièrement admis quelques patients venus des cantons de Zürich, Berne ou St-Gall, ou même d’Italie, d’Allemagne, de Hongrie, voire de Russie. L’éventail des affections mentales indiquées selon la nosologie de l’époque nous fait entrer de plain pied dans l’effort de classification mené par la science psychiatrique d’alors. S’occuper pour guérir
Atelier d’ergothérapie à La Prairie (années 30)
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En 1861, le Dr Coindet rédige à l’attention du public et de ses confères un bref article destiné à faire connaître le nouvel établissement, dans lequel «les personnes souffrant d’affections nerveuses ou mentales trouveront réunis, par des soins prévoyants, les éléments d’une cure méthodique et les sédatives influences d’une excellente hygiène et d’une vie de famille doucement variée». Soixantecinq ans plus tard, le Dr Forel rappelle qu’à La Métairie, la «tradition constante a toujours été de procurer [aux] pensionnaires une véritable vie de famille. Cette vie est rythmée par les soins médicaux au sens strict du terme (médications diverses, balnéothérapie, entretiens, repos surveillé, …), mais aussi par une grande variété d’occupations. L’organisation de l’emploi du temps constitue en effet un élément primordial de la thérapeutique: il importe de diriger leur esprit et leurs mains vers des réalisations constructives, afin de les distraire de leurs idées malsaines.» La thérapeutique par le travail, si importante dans les asiles publics, se comprend dans ce contexte. Elle consiste à ré-immerger le patient dans une ambiance de vie active, rythmée par un labeur quotidien et productif. Mais le Dr Coindet est conscient qu’une telle proposition est délicate en ce qui concerne les patients issus des classes aisées. «Si une heureuse diversion se reproduit avec une fréquence et une persistance croissante, elle peut, à elle seule, dans quelques cas simples, opérer la cure. Quoi qu’il en soit, elle est une partie indispensable du traitement. Vous entrevoyez, Messieurs, l’importance du chapitre des distractions. Sous ce rapport, les meilleures, sans contredit, se tirent des professions qui s’exercent en plein air, le travail des champs, les métiers mécaniques, parce qu’elles amènent à leur suite, avec une certaine fatigue, de l’appétit et du sommeil, c’est-à-dire de la force et du calme.»
Atelier d’ergothérapie à La Prairie (années 60)
Registres d’entrées de La Métairie
ILLUSTRATION: registre
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Premier registre des patients hommes (1860) Voir illustration pages 18 et 19
L
es premiers registres d’entrées de La Métairie témoignent du vaste projet classificatoire qui anime la psychiatrie dès le 19e siècle. L’enjeu en est la légitimité de la prise en charge médicale et l’établissement d’une statistique devant permettre l’ajustement des structures d’accueil et des mesures de prévention. Le séjour des quelques 500 premiers patients séjournant à La Métairie entre le 1er septembre 1860 (date d’entrée de la première patiente AD) et 1904 est ainsi donné à lire à travers la mention de leurs sexe, âge, profession, état civil, culte, origine et genre de maladie. Une courte anamnèse est parfois retracée, ainsi que le prix de la pension et l’état de sortie du malade. Conformément
aux vœux de ses fondateurs, La Métairie reçoit essentiellement des patients vaudois et genevois, rentiers, représentants de diverses professions libérales, étudiants et, pour les femmes, ménagères, institutrices ou cuisinières. Mélancolie, démence, diverses manies (chronique, périodique, aigüe, religieuse, hystérique, morale, lucide, voire puerpérale pour les femmes), épilepsie, hallucinations, folie circulaire, comptent parmi les diagnostics les plus souvent invoqués. On distingue entre causes «prédisposantes» et «déterminantes», chaque catégorie étant elle-même subdivisée entre causes morales et physiques. En dépit de cette volonté de précision, la perméabilité entre
catégories est grande, un même élément («fatigue», «masturbation», «abus de boisson») passant fréquemment de l’une à l’autre. On constate aussi que le contexte économique et politique («affaires commerciales», «déception dans la révolution», «travail exagéré») détermine les pathologies masculines, et la sphère privées les pathologies féminines («accouchement avec émotions», «ennui domestique», «inconduite du père», «âge critique»). Enfin, le mode de vie («vie irrégulière», «ivrognerie» ou «éducation fausse») est régulièrement incriminé, dessinant les cibles du mouvement hygiéniste alors en plein développement.
Aussi les occupations proposées aux patients de La Métairie relèvent-elles plutôt de la catégorie des loisirs et divertissements culturels. Le parc et la proximité du lac constituent un atout indéniable: promenades, jeux de plein air ou canotage occupent les malades. «Par le beau temps, on s’exercera en plein air, et lorsqu’il fera vilain, dans une grande salle plus spécialement destinée aux exercices, de la gymnastique de chambre que vous avez vue à la ferme. Il est presque superflu d’ajouter qu’outre ces jeux, nous avons un billard, un piano, une bibliothèque, et que nous tâcherons de faire naître pour la culture des fl eurs un goût qui trouverait chez nous un intarissable aliment.» Des tâches de nature plus productive sont néanmoins développées, comme en témoigne le texte de la brochure publicitaire de 1926 rédigée par le Dr Forel, qui mentionne «les jardins, les serres, l’exploitation agricole et des ateliers», où les malades peuvent s’exercer à la reliure ou à la couture. Enfin, on ne néglige jamais le divertissement procuré par les activités artistiques. Le dossier d’un artiste de renom traité à La Métairie signale ainsi qu’il «donne des leçons de piano à un débutant halluciné, et tout ceci avec un dévouement remarquable.» A l’occasion de la visite d’une amie cantatrice, ce même artiste prend la partie de piano, le Dr Forel sort son violon, et le trio improvisé offre deux concerts aux patients installés dans le salon. Les bâtiments Dès les premières années, on projette divers agrandissements. Il faut toutefois attendre le début du 20e siècle pour les voir aboutir avec l’extension des pavillons et la construction d’un nouveau bâtiment, La Villa (nommée plus tard La Prairie). Entre temps, La Métairie a beaucoup évolué: le Dr Guder a construit Le Chalet, le Dr Rist, son successeur, a meublé deux chambres de la ferme pour y loger les parents de malades, et le Dr Widmer a entièrement rénové l’intérieur de la clinique, réorganisant aussi la buanderie, désormais confiée au personnel de La Métairie et non plus à des ouvrières de Nyon. A la fi n du 19e siècle, un égout collecteur est réalisé, on remplace les anciennes grilles de fenêtres, «qui rappelaient trop celles des prisons», le téléphone est installé, et l’ensemble des bâtiments est pourvu de lumière électrique dès 1905.
L’ancien parc au bord du lac
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La physionomie actuelle de l’établissement est donc établie dès le début du 20e siècle, avec le bâtiment d’origine et ses deux pavillons agrandis, à côté desquels on dispose désormais du Chalet et de La Villa. La Ferme, un peu plus éloignée, est réaménagée pour loger les malades tranquilles au moment de la création d’un court de tennis, en 1906. Le médecin-directeur et sa famille disposent d’un appartement dans le bâtiment central, du moins jusqu’à la construction de La Falaise, près du lac, construite en 1925 sous l’ère du Dr Forel. C’est là que logeront désormais les médecins-directeurs successifs jusqu’au Dr Semadeni compris. Quant aux chambres des employés, leur nombre évolue au fil des réaménagements, mais elles sont dès le début réparties dans l’ensemble des bâtiments, afin de permettre une surveillance optimale des patients. Les serres
Les temps agités de la guerre
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Après un début de siècle relativement faste, les rapports du Conseil d’administration soulignent régulièrement l’augmentation du nombre des patients agités. Afin d’y remédier, on aménage en 1913 des chambres de sécurité. A peine un an plus tard, le Conseil s’inquiète déjà de devoir refuser des admissions à cause du manque de ce type d’équipement. Puis, la déclaration de guerre engendre une forte hausse des coûts d’exploitation, notamment de chauffage. Le personnel se fait rare, ainsi que les malades, en outre, plusieurs d’entre eux voient leurs avoirs confisqués ou inaccessibles et les retards s’accumulent dans le paiement des pensions. En 1917, les malades séjournant au Chalet et à La Villa sont rapatriés au bâtiment central afin d’économiser le charbon. On parle de fermer l’établissement. Le Dr Dizard présente sa démission en 1918 pour permettre à la SA de modifier les conditions de l’engagement du directeur, mais le Conseil lui demande finalement de conserver son poste. L’année suivante, il cède sa place au Dr Auguste Callet, médecin-assistant à La Métairie depuis 1913. L’ensemble des actionnaires et des membres du Conseil se renouvelle entre-temps et la guerre se termine.
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Groupe de patientes sur la plage de La Falaise
Des années 1920 aux années 1980 Dès les années 1920, l’éventail des thérapeutiques disponibles en psychiatrie s’étoffe considérablement: nouvelles médications, techniques psychothérapeutiques variées, cures de sommeil, insulinothérapie, malariathérapie, convulsivothérapies. La spécialisation en psychiatrie est reconnue en 1933 par la Fédération des Médecins Suisses, et un cursus de formation des infirmiers en psychiatrie se met en place. Nommé à la direction de La Métairie en 1924, le Dr Forel poursuit ses publications et son enseignement à l’Université de Genève. Le Dr Guillerey, qui prend la relève en 1932, pratique une forme de psychothérapie alliant suggestion et rêve éveillé. Réussissant à guérir une patiente jusque-là rebelle à tout traitement, il l’embauche comme assistante; leur association se poursuivra à la clinique des Berges du Léman à Vevey. Un épisode politique et scientifique: psychopathologie infantile et pupillographie
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Annonce publicitaire
En 1933 s’ouvre à La Métairie un institut médico-psychologique, «annexe pour enfants anormaux telle qu’il n’en existe pas encore en Suisse» ainsi qu’un institut de diagnostic expérimental, tous deux confiés à la direction du Dr Otto Loewenstein (1889-1965). Jusque-là titulaire d’une chaire de neurologie et de psychiatrie à l’Université de Bonn, où il dirige l’Institut pathopsychologique de l’Université et l’Institut rhénan pour enfants anormaux, le Dr Loewenstein doit émigrer en Suisse à la suite de l’arrivée des nazis au pouvoir. Les Drs Guillerey, Boven et Gonet, qui se succèdent à la tête de La Métairie, se félicitent de cette collaboration «qui nous permet d’atteindre une clientèle étrangère qui sans lui ne serait pas touchée» et interviennent à plusieurs reprises auprès du Canton de Vaud pour faire prolonger le permis de séjour du Dr Loewenstein. Très intéressé par l’étude de la condition et des mouvements de la pupille de l’œil en fonction des états émotionnels et psychologiques, ce dernier s’adjoint les compétences de techniciens et ingénieurs qualifiés, afin de pouvoir maîtriser un équipement technique complexe et poursuivre ses recherches en diagnostic expérimental. Cette période scientifique marquante à La Métairie se clôt avec le départ du Dr Loewenstein pour New-York en 1939.
La vie des malades
L’inspection des cliniques privées en 1938
D
ès le début du 20e siècle, de nombreux entrepreneurs, médecins ou hôteliers, ouvrent des établissements privés cliniques, maisons de santé, pensions familiales destinée au soin de troubles physiques ou psychiques les plus divers - au bord du Lac Léman. Le Service sanitaire du Canton de Vaud se charge de vérifier l’hygiène, les autorisations et la qualité du personnel soignant. En 1938, les Drs Heim et Eperon, chargés de cette tâche, soulignent à ce propos: «Nous avons été très tolérants et souvent passé comme chat sur braise. L’an prochain, nous donnerons un tour
de vis.» Les commentaires sont généralement positifs: «en ordre», «hygiénique», «un modèle à tous égards», mais signalent aussi des défaillances, comme, cette même année, à la Clinique du Signal, à Lausanne, où «l’annexe qui abrite les idiots est dans un état de délabrement indescriptible». La loi cantonale exige en outre que soit fournie la liste exhaustive des malades internés ainsi que des malades libres. Aux Rives de Prangins, le Dr Forel estime «qu’il y aurait un très gros inconvénient à l’obliger à signaler dans tous les cas au Service
Sanitaire tous les pensionnaires libres […]. Il s’agit le plus souvent de personnes très connues dans le monde international et qui tiennent avant tout à ce que la discrétion la plus complète soit gardée à leur égard». A La Métairie, le Dr Gonet souligne quant à lui «l’injustice qu’il y aurait à obliger une maison comme La Métairie à annoncer des pensionnaires libres, alors que ces mêmes personnes pourraient tout aussi bien aller à la Lignière, où semblable obligation n’existe pas». Discrétion et concurrence sont des enjeux récurrents dans le monde des établissements psychiatriques privés.
Les relations avec les Rives de Prangins
Le parc
Entre-temps s’est ouverte une longue période de relations parfois difficiles à démêler, faite à la fois de concurrence et de collaboration, avec les Rives de Prangins. On se souvient que le Dr Forel avait quitté la direction de La Métairie pour fonder cet établissement en 1930 et en 1938 La Métairie est rachetée par les Rives de Prangins. Dès lors, un seul Conseil d’administration prendra les décisions importantes pour les deux établissements conjointement. De ce fait, le Dr Forel demeure un acteur incontournable de La Métairie. Il est directement impliqué dans l’engagement des médecins et du personnel soignant, et c’est généralement à lui que le Département de l’Intérieur s’adresse pour les démarches relatives au contrôle sanitaire ou aux permis de pratique des employés. En 1949, alors que les affaires ne sont pas florissantes, il expose au Professeur Hans Steck, directeur de l’hôpital de Cery, les avantages qu’il y aurait à racheter La Métairie pour en faire un hospice, vu le manque d’établissements de ce type en Suisse romande; sa proposition ne sera toutefois pas retenue. En 1953, c’est lui encore qui assure l’intérim entre les Drs Melley et Semadeni. En 1982, alors que La Métairie célèbre ses 125 ans, le Dr Forel préside toujours le Conseil d’administration.
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L’ère Semadeni Les années 1950 marquent un tournant dans l’histoire de la psychiatrie, avec la mise au point des neuroleptiques et des antidépresseurs, qui révolutionneront les pratiques thérapeutiques. A La Métairie, cette révolution coïncide avec l’arrivée de Gustave Waclaw Semadeni, qui dirigera l’établissement jusqu’en 1984. D’une famille d’origine grisonne, installée en Pologne, il vient en Suisse en 1951 et est engagé comme médecin-adjoint de La Métairie avant d’en devenir le directeur en 1953. Le Dr Semadeni fait largement usage des nouvelles possibilités de la chimiothérapie: en atteste l’évolution des proportions de la pharmacie, qui occupe d’abord deux armoires, puis une pièce et enfin tout le sous-sol de la clinique, aux côtés du laboratoire d’analyses. Grâce à l’équipement électroencéphalographique de son établissement et de celui des Rives de Prangins, il poursuit diverses recherches, publiant par exemple en 1954 un article sur les «stimulations à contenu psycho-sensoriel en électro-encéphalographie», en collaboration avec les Drs François Martin et Jean Baumann de l’Hôpital cantonal de Genève.
Dr Oscar Forel et Dr Gustave Semadeni
La Villa (aujourd’hui La Prairie) avec le tennis
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Sous la direction du Dr Semadeni, la clientèle est majoritairement étrangère: français, italiens, belges ou luxembourgeois, de nombreux patients ont leurs habitudes à La Métairie. Ils viennent y suivre un traitement, mais aussi se ressourcer dans un environnement magnifique et dans une ambiance raffinée: c’est encore l’époque où les malades déposent chaque soir leurs chaussures devant la porte de leur chambre afin que les femmes de ménage les cirent. Les couverts sont en argent, on mange à midi avec les dames de compagnie, le soir avec le médecin, les horaires sont libres et les activités facultatives. Le maître de sport organise des sorties, et les patients les plus fortunés sont reçus dans les luxueuses chambres de La Prairie. Celle-ci possède un statut particulier: les malades n’y suivent pas nécessairement un traitement psychiatrique mais viennent pour un séjour de repos, à la suite d’un accouchement par exemple. Outre un patient qui y demeure pendant plus de trente ans, Le Chalet accueille les familles de malades et la direction administrative. Le bâtiment principal reste dévolu à la psychiatrie générale, tandis que les deux pavillons, toujours appelés «Dames» et «Mess» (pour Messieurs), sont occupés par les unités fermées, réservées aux patients agités et internés. Au début des années 1960, le personnel migre à La Ferme, qui conserve cette affectation jusqu’en 2004, lors du départ des derniers employés logeant encore dans l’établissement même. Une nouvelle salle de gymnastique est construite en 1971: ce nouvel équipement, complété par un atelier d’ergothérapie, élargit l’éventail des activités proposées aux patients. En 1983, la brochure publicitaire de la clinique mentionne la chimiothérapie, les cures de sommeil et de désintoxication, l’hydrothérapie, la physiothérapie, la psychothérapie et les traitements biologiques.Les années d’après-guerre sont aussi celles où, du fait d’une diminution globale des hospitalisations en établissement privé, de nombreuses cliniques disparaissent ou sont rachetées par l’Etat, comme les Rives de Prangins que l’Etat de Vaud acquiert en 1967 et transforme en Hôpital psychiatrique du secteur ouest vaudois. A cette occasion, la plupart des patients privés des Rives de Prangins sont accueillis à La Métairie. A partir de 1980, une clientèle arabe fait son apparition à La Métairie, réservant plusieurs chambres à la fois pour loger son personnel. L’établissement tente aussi d’attirer une nouvelle clientèle suisse, au bénéficie d’une assurance privée. Des dames de compagnie à l’équipe interdisciplinaire
La Prairie
La fin du 20e siècle: changement de cap Succédant au Dr Semadeni, le Dr Georges Gabris, formé en Suisse et en Allemagne, a fait plusieurs voyages d’étude aux Etats-Unis, ce qui inspirera sa politique médicale. Auparavant médecin à l’hôpital psychiatrique de Cery, il s’investit pleinement dans ses nouvelles fonctions et remodèle profondément le visage de La Métairie. Des dames de compagnie à l’équipe interdisciplinaire
Vue de Nyon
L’ancienne Société Anonyme, fondée en 1857, disparaît en 1985 avec la vente de La Métairie au groupe américain Charters Medical. Spécialisé dans la gestion hospitalière et déjà propriétaire de cinquanteneuf établissements (dont quarantehuit cliniques psychiatriques), le groupe est intéressé par le prestige historique et la situation géographique de l’établissement. Propriété d’un grand groupe international, dirigée par un médecin centrant son activité sur l’insertion régionale, La Métairie entre dans l’ère de la modernité administrative et médicale.
Deux ans de travaux permettent de rénover l’ensemble des bâtiments, les pavillons sont rebaptisés en Léman et Jura, tournant symboliquement la page d’une époque considérée comme dépassée. Le Dr Gabris met en place des services distincts selon les pathologies, dans lesquels des traitements différenciés sont proposés, et réoriente les patients chroniques ou relevant de la gériatrie vers d’autres établissements. Insistant sur la prédominance de la fonction soignante sur la fonction hôtelière, il renouvelle l’équipe infirmière en engageant du personnel formé spécifiquement en psychiatrie, ainsi que des psychologues cliniciens, et instaure un colloque interdisciplinaire hebdomadaire. Les dames de compagnie, incarnant jusque-là l’encadrement soignant, n’ont dès lors plus de fonction à La Métairie. Cette petite révolution crée quelques remous, mais stimule également les collaborateurs. Ergothérapeutes, art-thérapeutes, physiothérapeutes et autres intervenants non médicaux étoffent le suivi des patients, désormais engagés dans un processus thérapeutique qui nécessite un investissement personnel fort, rythmé par un planning d’activités conçues comme des composantes à part entière du programme de soins et non plus comme un éventail d’offres facultatives à la disposition des malades. Les unités thérapeutiques Le Dr Gabris est parmi les premiers à importer en Suisse romande de nouvelles approches dans le traitement de l’alcoolisme et autres addictions. En 1986, il ouvre à La Métairie une unité de 10 lits destinée au traitement des maladies de la dépendance (UMD), dans laquelle est appliqué le programme du Minnesota, fondé sur l’idée que l’alcoolisme est une maladie et que le sevrage n’est qu’une étape du traitement. Le programme - pour lequel La Métairie collabore avec les Alcooliques Anonymes - se déroule en deux phases, la première en clinique et la seconde comprenant un suivi post-cure avec rencontres hebdomadaires; l’ensemble est basé sur le travail en groupes de patients, parallèlement au suivi individuel. Interviennent en tandem le personnel médical et des thérapeutes ayant eux-mêmes été alcooliques, ce qui, au début, n’est pas sans susciter quelques réticences. Le succès de cette approche entraîne l’ouverture d’une seconde unité spécialisée de huit lits, l’Unité
des troubles de l’humeur (UTH), dans laquelle le programme thérapeutique est également basé sur un travail de groupe. Les techniques de thérapie cognitivo-comportementale sont introduites. La troisième unité, ouverte en 1992 et destinée aux patients souffrant de troubles du comportement alimentaire (UTA), occupe dix lits au Chalet. Une unité de crise fermée est créée au Léman, pendant que le bâtiment central continue d’accueillir les autres pensionnaires, la capacité totale de La Métairie étant de soixante-quinze lits en 1999. Enfin, un hôpital de jour est ouvert en 2000, permettant d’accueillir douze patients en traitement ambulatoire. Promotion régionale Souhaitant réinstaurer l’insertion régionale de La Métairie telle qu’elle existait à l’ouverture de La Métairie, le Dr Gabris sollicite largement les réseaux professionnels romands. En 1981, 65% des patients étaient étrangers, ils ne sont plus que 45% en 1987 et 15% en 1999. Dans le contexte d’ouverture qui caractérise la psychiatrie des dernières décennies du 20e siècle, une politique de communication active est mise en place, visant tant la communauté scientifique que la société en général. Des symposiums scientifi ques internationaux se tiennent dès 1988, des encarts publicitaires paraissent dans la presse régionale, des délégués de l’établissement informent régulièrement les médecins des régions voisines (Vaud, Valais, France) des nouvelles approches thérapeutiques de La Métairie. La fréquentation remonte nettement. Au début du 21e siècle, La Métairie connaît une nouvelle phase de changement: le groupe Charters Medical, souhaitant recentrer ses activités sur le territoire américain, revend l’établissement au groupe suédois Capio en 2000. Le Dr Gabris quitte la clinique en 2003 et trois médecins-directeurs et autant de directeurs administratifs se succèdent en moins de trois ans. Le groupe Capio vend La Falaise, La Ferme et les serres. À la fi n 2005, l’établissement change à nouveau de mains. Clinea, filiale spécialisée dans la gestion de cliniques psychiatriques privées et elle-même rattachée au groupe français Orpea, acquiert La Métairie et entreprend la rénovation des locaux. Une nouvelle équipe administrative et médicale prend les rênes: à la tête d’un établissement au cœur des bouleversements sociaux, culturels et scientifi ques de la psychiatrie pendant 150 ans, elle est aujourd’hui au défi de lui définir un nouveau rôle qui, tout en tenant compte du passé, sache s’adapter aux reconfigurations incessantes dans le domaine des sciences neuro-psychiatriques, aux nouveaux rapports entre public et privé qui s’instaurent dans le domaine de la santé, et plus largement à l’évolution économique et culturelle de notre société.
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La Métairie au 21 siècle
La Métairie au 21e siècle: un nouveau rôle Un site préservé
Le bâtiment central côté parc
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Comme il y a 150 ans, la clinique La Métairie forme un ensemble architectural harmonieux, proche des rives du Lac Léman, aux portes de la ville de Nyon dans le canton de Vaud. Cette situation géographique la rend facilement accessible à une clientèle régionale et internationale. Les différents bâtiments sont répartis sur un vaste domaine de 7 hectares qui représente en lui-même une source d’apaisement et de détente. Depuis son rachat par le Groupe Clinea, la clinique La Métairie a entrepris d’importantes rénovations qui ont permis de la remettre à un haut niveau d’accueil et de confort hôtelier et de développer l’offre de soins. La Métairie est aussi réputée pour proposer des séjours hospitaliers et des soins ambulatoires en garantissant un maximum de discrétion et de confidentialité. La clinique occupe une place unique dans le réseau de soins particulièrement dense de la Suisse romande. Les critères d’admission ont été définis dans un esprit visant à faciliter au maximum l’accès aux soins aux patients et à leur médecin traitant. L’une des mesures emblématiques prise récemment est représentée par l’accueil des patients 24h/24 quelque soit le type de pathologie psychique. Par ailleurs, afin de répondre à l’attente d’une clientèle internationale, les consultations sont proposées en français, anglais, allemand et espagnol. Les soins intègrent les approches biologiques, pharmacologiques et corporelles tout en valorisant la dimension psychothérapeutique. Cette intégration est facilitée par une caractéristique de la formation des psychiatres suisses qui comporte, depuis près d’un demi-siècle (1960), une double formation en psychiatrie et psychothérapie (Ferrero, 2004).
Une équipe de collaborateurs devant l’entrée principale
Programme général et programmes spécialisés Depuis les années 50, et grâce à certaines découvertes pharmacologiques qui ont révolutionné les soins psychiatriques, telles que les neuroleptiques, les antidépresseurs et les anxiolytiques, les modes de pratique de la psychiatrie n’ont cessé d’évoluer. Le mouvement général de désinstitutionalisation qui a touché tous les pays développés a entrainé le développement de la pratique ambulatoire. Le nombre de psychiatres-psychothérapeutes a dès lors fortement augmenté et la place dévolue aux soins hospitaliers en a été profondément modifiée. Les séjours hospitaliers sont ainsi devenus toujours plus brefs, ce qui a nécessité de développer des approches dites «de crise», visant à aider les patients à retrouver le plus rapidement possible leur capacité à mener une vie autonome. Parallèlement, la nosologie psychiatrique a également été constamment remaniée, comme en témoigne la 5ème édition de la classification de l’Association américaine de psychiatrie (DSM-V) ou la 11ème révision de la classification de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). A La Métairie, les médecins sont secondés par des psychologues qui suivent également en traitement les patients soit en individuel soit dans le cadre d’activités thérapeutiques de groupe. Les soins sont assurés par une équipe pluridisciplinaire
Psychiatrie et psychothérapie
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a création du titre de spécialiste en 1931 a instauré, contrairement à ce qui s’est passé dans la plupart des autres pays, une séparation entre la psychiatrie et la neurologie. Quant à l’importance prise par la psychothérapie dans la psychiatrie, elle remonte au début du 20ème siècle et à quelques personnalités exceptionnelles qui ont marqué la psychiatrie suisse telles que Bleuler et Jung, parmi d’autres. Une première rencontre des psychothérapeutes suisses a été organisée à Zürich en 1935. Alors qu’aujourd’hui une telle assemblée réunirait sans doute plusieurs centaines de participants d’orientation avant tout psychanalytique, systémique et cognitive-comportementale, les 33 psychothérapeutes réunis à cette occasion se définissaient comme freudien, jungien, adlérien ou existentiel. A cette occasion, le psychiatre Walter Morgenthaler a proposé de créer une commission de psychothérapie rattachée à la Société suisse de psychiatrie afin d’éviter que psychiatrie et psychothérapie «ne suivent des voies différentes capables de mener à des désaccords et à des divisions». De son côté, Carl Gustav Jung a défendu la création d’une société autonome, convaincu que les divergences d’intérêts entre psychothérapeutes et psychiatres étaient bien trop importantes pour mener à une collaboration fructueuse. Il en résulta la constitution de deux associations, la
commission susmentionnée et la Société suisse de psychologie pratique sous la présidence de Jung. Comme on pouvait s’y attendre, les collègues qui suivirent Morgenthaler développèrent des liens privilégiés avec les psychiatres alors que les «jungiens» s’attachèrent à collaborer avec les non-médecins. Cet épisode significatif de l’histoire de la psychiatrie suisse n’est pas sans lien avec La Métairie puisque Oscar Forel a été le premier président de la commission de psychothérapie médicale qui allait devenir, en 1948, la Société médicale suisse de psychothérapie (Fussinger, 2005). Par la suite, la psychiatrie d’adulte et la psychiatrie d’enfant et d’adolescent vont se séparer en deux spécialisations distinctes et inclure officiellement dès 1960 la psychothérapie dans leur cursus de formation. Dans un tel contexte, les médecins prescripteurs comme les patients s’attendent, dans leur grande majorité, à bénéficier d’une approche prenant en compte à la fois la dimension biologique de leur trouble et la dimension psychologique renvoyant à une histoire personnelle. Afin de répondre à ce défi, tous les médecins psychiatres ont suivi une formation psychothérapeutique et ont des connaissances dans les trois principaux modèles de psychothérapie, psychodynamique, familiale-systémique et cognitivo-comportementale.
Une chambre au Chalet
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Une chambre à La Prairie
composée de psychiatres, interniste, psychologues qui proposent des approches individuelles ou de groupe, infirmières et infirmiers spécialisés, ergothérapeutes, art-thérapeute, physiothérapeutes, massothérapeute… Transformation des bâtiments Aujourd’hui, les 75 lits de La Métairie sont répartis sur 5 unités assurant chacune des soins de psychiatrie générale tout en offrant un programme spécifique. Salon au Chalet
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Dans le bâtiment central, Le Jura héberge depuis plus de 20 ans l’unité des maladies de la dépendance. Il a bénéficié d’une rénovation complète et de l’adjonction d’un nouveau salon et accueille les patients souffrant de toute forme de dépendance, à l’alcool ou à d’autres toxiques, qu’ils présentent ou non une pathologie psychiatrique associée. Dès son origine, cette unité a intégré à l’addictologie classique les concepts issus du modèle de traitement mis au point aux Etats-Unis et appelé Minnesota. Ce modèle considère la dépendance comme une maladie chronique, progressive et mortelle si elle n’est pas traitée. L’objectif est l’abstinence aux substances. La prise en charge intensive comprend des activités groupales, la participation aux groupes d’entraides alcooliques anonymes (AA) et narcotiques anonymes (NA) et un suivi individuel médical et psychothérapeutique. Une spécificité est la présence dans l’équipe de soins de conseillers en addiction, qui sont d’anciens patients ayant au minimum cinq ans d’abstinence. Après le séjour hospitalier, une post-cure de 11 mois à raison d’un rendez vous par semaine permet aux patients de continuer à consolider leur abstinence. Une fête appelée la Fête du Jura réunit une fois par année toutes les personnes qui ont suivi le programme afin de partager un moment convivial à La Métairie. Le Centre a également été rénové, avec la création de salles de bains individuelles et son équipe s’est engagée dans la mise en place d’un programme spécialisé pour les troubles de la personnalité. Ce type de problématique complexe où s’intriquent souvent histoire de vie douloureuse, moments de crise et comorbidités psychiatriques nécessite des compétences particulières que la clinique va développer dans les mois à venir. Le Léman a également fait l’objet d’une réfection et d’un réaménagement de ses chambres individuelles et l’équipe a développé des compétences spécifiques dans le traitement des troubles de l’humeur. Ces troubles, à savoir les états dépressifs et les troubles bipolaires, bénéficient d’une prise en charge faisant appel à la pharmacologie, la psychothérapie groupale et individuelle principalement, mais
Le grand salon au Centre
Un site exceptionnel préservé depuis un siècle et demi
pas exclusivement, selon le modèle cognitivo-comportemental ainsi que la psychoéducation et la prise en compte des proches dans le processus de soin. Le modèle intégratif mis en place dans cette unité permet également d’accueillir des patients à risque suicidaire élevé ou présentant des symptômes d’hypomanie et de manie. Dans le parc, La Prairie, une unité particulièrement confortable, a bénéficié d’importants travaux de rénovation et de l’installation d’un ascenseur qui lui permet d’accueillir désormais dans de bonnes conditions de confort et de sécurité un programme spécialisé de psychiatrie de l’âgé. Ce programme a développé une spécificité avec des groupes concernant les stress de cette tranche de vie (retraite, perte du conjoint), et la possibilité d’investiguer et de diagnostiquer des démences débutantes. Finalement les troubles accompagnant une démence avancée y bénéficient aussi d’une prise en charge faisant appel à une équipe pluridisciplinaire. Le Chalet dispose de 5 chambres doubles entièrement réaménagées pour accueillir dans une atmosphère chaleureuse et conviviale les patients souffrant de troubles du comportement alimentaire. Ce programme existe de longue date à la clinique et accueille des patients (les jeunes femmes sont plus souvent touchées que les hommes) à l’aide d’une équipe pluridisciplinaire (psychiatre, psychologue, diététicienne, psychomotricienne, équipe infirmière). Le cadre et les objectifs du traitement sont discutés au préalable afi n d’offrir une prise en charge via un suivi individuel personnalisé complété par des activités groupales dès que la prise pondérale le permet. Le nouveau centre ambulatoire Afi n de répondre à une importante demande à laquelle les établissements publics de la région ne répondent pas, ainsi qu’aux attentes des patients et des médecins prescripteurs, la clinique a développé un centre ambulatoire sous la forme d’un hôpital de jour ouvert 5 jours sur 7. Ce centre offre des soins ambulatoires intensifs pour les patients en suivi d’hospitalisation ainsi que pour les patients en situation de crise suivis par des médecins privés. La prise en charge est principalement axée sur l’activité groupale (affi rmation de soi, gestion des émotions, psychoéducation), l’ergothérapie, la mobilisation corporelle et la psychomotricité. Il offre également une consultation spécialisée permettant des évaluations et des bilans médico-psychologiques. Elle permet aux médecins de la région d’avoir un
Salle à manger
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accès rapide à des spécialistes afin de les aider dans des questions diagnostiques ou thérapeutiques. Une unité spécialisée dans l’évaluation et la prise en soin du burn-out a été récemment ouverte. Elle permet de faire un bilan afin d’évaluer la présence d’un burn-out, sa sévérité et les ressources que le patient pourrait mobiliser afin d’y faire face. Un travail de coordination avec l’employeur permet également de faciliter la réintégration dans le milieu professionnel. Un suivi ambulatoire groupal et individuel est également offert pour ce type de problématique très spécifique. Le nouveau complexe de balnéothérapie (SPA) vient enrichir cette offre de soins en permettant d’intégrer encore mieux la dimension corporelle. Un salon au Jura
La Fondation La Métairie La fondation a été créée en 2008 afin de rendre La Métairie accessible à des patients n’étant pas au bénéfice d’une assurance privée ou semi privée: 4 lits lui sont réservés.
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Une mission de formation L’une des premières mesures prises par les nouveaux responsables médicaux a été d’entreprendre les démarches menant à la reconnaissance de La Métairie comme lieu de formation en psychiatrie et psychothérapie. Compte tenu de la qualité de la formation et de l’encadrement, cette reconnaissance a été acquise sans difficulté et permet d’accueillir à La Métairie des médecins se spécialisant en psychiatrie et psychothérapie. L’offre de formation particulièrement riche proposée dans les deux centres universitaires de Genève et de Lausanne ne peut qu’inciter à positionner La Métairie de façon originale. Grâce à la création d’une association, l’ADEFOR, association pour la formation et la recherche à La Métairie, nous pouvons accueillir huit fois par année des conférenciers réputés dans le cadre d’un cycle de conférences dit les «Jeudis de La Métairie». Ces conférences, reconnues comme activité de formation continue et attestées par des crédits de formation, sont suivies par un public fidèle. Depuis 2008, plusieurs conférences à l’intention du grand public sur des thèmes s’éloignant parfois de la psychiatrie et de la santé mentale ont aussi été proposées. L’association a également permis la mise en place d’une formation continue interne afin de favoriser les échanges entre les différents corps de métier de la clinique.
Diversité des approches «Il existe beaucoup de façons et de moyens de pratiquer la psychothérapie et tous ceux qui aboutissent à la guérison sont bons…Je ne rejette aucune de ces méthodes et en ferais usage si quelque occasion favorable se présentait. C’est pour des motifs purement subjectifs que je me suis réellement consacré à une seule forme de traitement, celle que Breuer a appelé «cathartique» et que je préfère, pour ma part, qualifier d’analytique…» Freud. De la psychothérapie (1904)
Vers les neurosciences «Nous devons nous souvenir que toutes nos idées provisoires en psychologie seront probablement un jour basées sur une infrastructure organique» Freud. Pour introduire le narcissisme (1914)
Sources et bibliographie
Par souci de lisibilité, nous n’avons pas indiqué dans le texte l’origine des citations qui y sont contenues. Elles sont toutes extraites des diverses sources mentionnées ci-après. Entretiens avec • Claude Bonard, Christian Bryois, François Ferrero, Jean Forestier, Georges Gabris, Nicola Gervasoni, Jeanine Hugues, Rachel Maniglio, Eliane May, Mireille Moro, Mme Semadeni
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Archives cantonales Vaudoises • ACV S 73 1383 • ACV SB 124 257 • ATS Guillerey Marc • ATS Widmer-Curtat Auguste
• Registre officiel des entrées et des sorties, manuscrit, 1860-1904 • Registre particulier des entrées et des sorties, manuscrit, 1860-1890 • Album du centenaire de La Métairie 1857-1957, s.l., s.d. • Archives des Rives de Prangins • Les Rives de Prangins, s.d., introduction de O.-L. FOREL, Luscher, photographe, Nyon, gravure et impression ATAR, Genève • Brêve histoire de l’Hôpital de Prangins et du secteur psychiatrique ouest, feuillet de présentation, s.d. (années 2000) • Cartons «Homes d’enfants, maisons d’éducation, hôtels, pensions, stations 1946-54»; «A.A. 1928-30»; «Archives malades 1929-31»; «Correspondance médecins 1930-40»; «1938-52»
Archives communales de la ville de Nyon • Dossier des mises à l’enquête Métairie • Dossier de presse Métairie Archives de la clinique de La Métairie • Procès-verbaux des assemblées générales de la SA La Métairie, 2 vol. manuscrits, 1894-1930 et 1931-1952 • Procès verbaux des séances du Conseil d’administration de La Métairie, 3 vol. manuscrits, 1857-1872, 1872-1879, 1900-1918
Archives du musée d’histoire des sciences de Genève • Jean-Charles COINDET, Rapport présenté aux actionnaires de la société anonyme La Métairie sur les circonstances qui ont provoqué leur convocation en assemblée générale extraordinaire à Genève pour le samedi 14 décembre 1872, Genève, 1872 • Compte rendu du Conseil d’administration de la société anonyme de La Métairie à l’assemblée générale
des actionnaires tenue à La Métairie sur Nyon, le 2 août 1860, Genève, 1860
licence, Faculté de psychologie et des Sciences de l’éducation, Genève, 1984
• Lettre du Dr Coindet au Dr Lombard, touchant l’influence de l’ivrognerie sur la production de l’aliénation mentale dans le canton de Genève, Genève, 1841
• BONARD Claude, Un médecin genevois ayant marqué son époque: Jean-Charles Coindet (1796-1876), hygiéniste et aliéniste, in Gesnerus 49: 359-366, 1991
• Documents relatifs à la destitution du Dr Coindet, Frédéric RILLIET, La Métairie, Genève, s.d.
• BONARD Claude et CAPT Ghislaine, A travers les 125 ans de La Métairie. L’évolution de la psychiatrie, in L’hôpital suisse, organe officiel de l’Association suisse des établissements hospitaliers (VESKA) 46, 1982
Autres sources • Bureau fédéral de la statistique • Les établissements pour malades en Suisse de 1936 à 1942, Berne, 1945 • BERSOT Henri, Que fait-on en Suisse pour les malades nerveux et mentaux?: les établissements psychiatriques, les malades, les soins et traitements, le personnel, assistance extra-hospitalière et prophylaxie, préface du Pr LADAME, in Contributions à l’étude des problèmes hospitaliers, cahier n° 9, Berne, 1936 • BERSOT Henri, Destins de la psychiatrie suisse: d’autrefois à aujourd’hui et à demain, préface du Pr LADAME et du Dr REPOND, in Contributions à l’étude des problèmes hospitaliers, cahier n°18, Berne, 1946 • BONARD Claude, Aliénistes et maladies mentales à Genève: un prolongement méconnu de la révolution de mil huit cent quarante six: «L’affaire Coindet», Mémoire de
• COINDET Jean-Charles, Nouvelle maison de santé sur les bords du lac de Genève nommée La Métairie fondée pour les malades des classes aisées souffrant d’affections nerveuses et mentales, Genève, 1861 • FETSCHERIN Rudolf Friederich, Les asiles d’aliénés en Suisse, Berne, 1879 • FOREL Oscar, La Métairie, Nyon, 1926 • FOREL Oscar, La mémoire du chêne, Lausanne, 1980 • FUSSINGER Catherine & TEVAEARAI Deodaat, Lieux de folie, monuments de raison: architecture et psychiatrie en Suisse romande, 1830-1930, Lausanne, 1998 • FUSSINGER Catherine, Formation des psychiatres et psychothérapie: regards croisés sur les situations suisse et française, PSN 3: 193-206, 2005 • Les services psychiatriques de Genève 1900-1975, Genève, 1975
Remerciements Exemplaire 1
Editeur et copyright
Clinique La Métaire
Graphisme
Etienne & Etienne, Carouge
Impression
Achevé d’imprimer en 1000 exemplaires, dont 200 exemplaires numérotés de 1 à 200, le 30 août 2009 sur les presses de l’imprimerie SRO Kundig, Genève
Cert no. XXX-XXX-XXXX
Les auteurs remercient l’ensemble des collaborateurs présents ou passés de La Métairie qui ont bien voulu leur accorder un entretien, ainsi que les différentes personnes ayant transmis leurs archives privées: Mmes Catherine Gremion, Wanda Lee-Jones, Irène Manighetti, Isabelle Moser et M. Charles Burion. Les auteurs remercient également Madame Catherine Colin, Directrice Générale de La Métairie, pour son soutien et sa collaboration à l’élaboration de cette publication, ses relectures et ses contributions aux choix iconographiques.
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