Fin 2016, les Ateliers Médicis initient avec le ministère de la Culture et de la Communication et le ministère de l’Éducation Nationale, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, le dispositif «Création en cours» qui vise à soutenir les artistes émergents et à favoriser des résidences en milieu scolaire dans les territoires les plus éloignés de l’offre culturelle. Lauréat, le collectif Indiens Dans La Ville propose alors aux enfants de cycle 3 de l’école élémentaire publique Victor SCHOELCHER de la ville de Guer (56) de travailler sur l’observation et l’analyse de la Ville d’aujourd’hui pour ensuite imaginer et esquisser ce que pourrait-être la «Ville de demain». L’intention de ce projet visait à inverser la manière d’envisager la conception de l’environnement urbain, en donnant la possibilité à des enfants de 10 ans de s’approprier des outils et des méthodes utiles à l’observation et à la compréhension de l’aménagement citadin. Valorisant l’intelligence collective, encourageant la mise en commun autant que la liberté d’expression et de jugement, afin de favoriser auprès des élèves le développement et la prise en compte d’une vision d’ensemble. Cette résidence rythmée de travaux d’écriture, de dessin, de maquette et d’une série de débats, prend sa forme finale à travers cette édition, témoignant de la volonté de ces élèves de participer à l’aménagement de leur environnement présent et futur.
Couverture et quatrième de couverture réalisées à partir du plan de la ville de Guer, dessinée à l’école avec le robot du collectif.
Brainstorming (Introduction à la ville d’aujourd’hui)
État des lieux
(Expédition et étude de terrain)
Prospective (Dessins en groupes)
Mise en volume
(Atelier maquettes blanches)
Débat / réflexion
(Concertation sur la ville)
Mise en œuvre des matériaux (Atelier sur le béton matricé)
Synthèses et perspectives (Dessin écriture en groupes)
Ecoles
Cinémas BUS
Animaux
Architecture Zones commerciales
Ports Panneaux
Salle des fêtes
Centre-ville
Végétation
Graffitis Bibliothèque Magasins Zones industrielles Hôtels Voitures
VILLE
Boulangerie
Égouts Logements
Jardins
Parkings
Bijouteries
Parc
Feux rouges
Routes dans les airs
Piétons
Mairie Transports Médiathèques Arbres
Immeubles Stades
Restaurants
Usines
Police
Quartiers Brainstorming
(Introduction à la ville d’aujourd’hui)
Maisons
État des lieux
(Expédition et étude de terrain)
Rennes
Prospective
(Dessins en groupes)
Mise en volume
(Atelier maquettes blanches)
«Toute la journée, nous allons et venons, dans les formes dessinées par l’architecte, quelqu’un a construit cet escalier et voilà que nous marchons à son rythme, nous faisons les pauses à ses paliers, nous respirons selon sa volonté. En vérité, nous sentons combien de plus en plus notre environnement nous conditionne.»
Réflexion sur l’habitat de demain : Perspectives et réalités La France dans vingt ans, INA.fr, 1965
« Pourquoi les maquettes sont-elle blanches !? » La ville est composée de volumes de différentes tailles, de différentes allures, de différentes couleurs, différentes fonctions. La maquette permet de représenter d’une manière plus globale, elle permet de se rendre compte en forçant les contrastes. Le blanc reflète la lumière et démarque les espaces, les formes, certains détails. De par sa taille réduite, son échelle, les grands volumes sont plus faciles à regarder, de tout les cotés. Maintenant c’est plus clair ! Chacun se saisit alors d'une boite d’emballage repeinte en blanc, tout juste sèche. Puis les premiers volumes sont découpés, assemblés. Des coopérations se créent entre les élèves pendant que d’autres préfèrent établir leurs plans seuls. Les petits détails générés par les ombres portées commencent à mettre en valeur la présence de ces architectures miniatures. Et bientôt une multitude de petites maisons, des immeubles, une mairie, un hôpital, des écoles, des hôtels apparaissent ! Vient ensuite le temps de la mise en commun. Un mètre carré au milieu de la classe vient poser les limites d’un espace à aménager. Se concertant et débattant sur la place que doivent prendre chaque élément, chacun confronte son point de vue afin d’aménager l’ensemble de façon cohérente. Des désaccords surgissent mais progressivement, les compromis laissent place à la conciliation et viennent servir l’intérêt commun. Le mètre carré à disparu pour laisser place à cette maquette, fruit de la réflexion et de l’intelligence collective. Chaque enfant a pu présenter et intégrer sa proposition dans cet espace. Tout le monde s’applaudit, content d’avoir co-construit cette micro-ville et son paysage!
Débat / réflexion
(Concertation sur la ville)
-
Les gares - Le bruit Beaucoup de personnes - Les voitures Les commerces - La pollution Les loisirs / équipements sportifs - Les usines Les équipements culturels - La qualité de l’air / les odeurs Les parcs / espaces vert - Les bâtiments abandonnés Les dessins sur les murs - Pas assez d’espaces de camping Les transports en commun - Manque de commerces de proximité Les jardins partagés - Les quartiers défavorisés L’histoire de la ville - Pas suffisamment de pistes cyclables Les services / les hôpitaux - Trop de commerces en centre-ville Les voies vertes - Les personnes sans domicile fixe Les écoles - Trop de feux rouges Les transports souterrains - Les déchets Les rues piétonnes - La destruction des espaces naturels Les cours d’eau - Pas suffisamment de nature en ville Le tri des déchets - Trop d’immeubles Les transports doux - La délinquance
RECHERCHE DE SOLUTIONS : Les odeurs : -
Les aspirer Les capter Éloigner les usines des villes Mettre du parfum dans les usines
Les déchets :
- Favoriser le tri - Mettre plus de bacs de compostage - Limiter les emballages
Se nourrir :
- Consommer des produits locaux - Favoriser les jardins partagés - Encourager l’agriculture dans les villes
Le changement climatique : -
Favoriser les énergies naturelles (vertes) Favoriser les transport doux et les transports en commun Plus de végétation pour améliorer l’air ambiant Utiliser la pollution pour faire de l’énergie ou des choses
La pauvreté :
- Rénover les bâtiments abandonnés pour les sans domicile fixe - Aider les gens à créer leur entreprises
Les espaces verts : -
Moins de béton et plus d’herbe et d’arbres Plus de parcs pour jouer et se détendre Des parcs suspendus sur le toit des immeubles Construire des maisons dans les arbres au lieu de couper les arbres Construire des voies vertes connectées aux gares
Les commerces :
- Construire plus de commerces de proximité et moins de supermarchés
La construction et l’aménagement : -
Construire moins haut Alterner les maisons et les immeubles Aménager des camps du voyage Favoriser la mixité sociale Aménager des espaces de camping sauvage
La mobilité : -
Encourager les déplacements à vélo et la marche à pied Utiliser le toit des bâtiment pour se déplacer Faire des parkings sous les magasins et faire des forêts à la place Utiliser les usines abandonnées à l’extérieur des villes pour faire des parkings - Pas de parking dans le centre des villes - Empiler les étages de parking en souterrain - Moins de place pour se garer pour plus de transports en commun
La citoyenneté :
- Consulter et plus prendre en compte l’avis des habitants - Lutter contre l’individualisme - Encourager et sensibiliser les gens à faire plus de choses ensemble
Mise en œuvre des matériaux (Atelier sur le béton matricé)
Sable et graviers + Ciment + Eau
=
BÉTON Au 20ème siècle, les urbanistes et les architectes qui conçoivent les places et les bâtiments des villes choisissent souvent le béton de ciment comme matériau car il a de très bonnes performances techniques et son coût de production est « relativement » bas. Mais depuis toujours, les hommes ont utilisé différents bétons pour concevoir leur habitat ou pour répondre à différents besoins. Les sculpteurs ou les tailleurs de pierre par exemple, ont eux aussi depuis longtemps déjà appréhendé et travaillé le béton et ses propriétés afin de réaliser des choses plus personnelles. Son utilisation énergivore est source de multiples dégradations de l’environnement. L’utilisation du sable, nécessaire à sa fabrication, a conduit à la surexploitation de 75 % des plages de la planète, détruisant nombre d’écosystèmes littoraux. Cependant, le béton de ciment est, à l’heure actuelle, l’un des matériaux de construction le plus utilisé au monde puisque deux tiers des choses construites sur la planète le sont en bétons de ciment. C’est aussi le deuxième matériau minéral le plus utilisé par l’homme après l’eau potable.
Matériaux observés, comparés et utilisés lors de l’atelier sur le béton matricé.
Synthèses et perspectives
(Dessins et écriture en groupes) LA VILLE DE DEMAIN
La ville de demain est sans voitures mais avec des bus, des trains, des vélos, des skates, des métros... À la place des routes, il y a aujourd’hui des fleurs. On peut se déplacer sur les toits car ils sont équipés de barrières pour ne pas tomber. Il y a des voitures volantes, des bus volants et bien plus de transports électriques qui marchent à l’énergie solaire pour moins polluer. Dans la ville de demain, on peut aussi se balader dans l’eau ou dans des tuyaux. Aujourd’hui les fusées sont écologiques, elles recrachent de l’oxygène pour que les habitants puissent respirer. Il n’y a pas de personnes sans-abris et tout le monde a une maison et à manger. Pour manger, les gens cultivent leur nourriture et il existe aussi une usine de produits bio. Il y a beaucoup de champs dans la ville et maintenant les champs filtrent l’eau pour se laver ou faire la vaisselle. Il y a des places réservées uniquement aux marchés, car ils sont ouverts tout les jours. Les marchés quotidiens permettent aux gens d’avoir des produits locaux. On fait des potagers et pousser des arbres fruitiers pour les marchés. Il y a des ruches pour le miel (bio). Les abeilles sont gentilles, elles sont traitées gentiment et donnent du meilleur miel (bio), elles ont chacune un prénom. La ville est constituée de commerces, d’écoles, de parcs, de logements, mais aussi de magasins pour se nourrir et s’habiller. Il y a des murs à tags pour taguer, les jeunes peuvent s’exprimer. Il y a une plage pour se baigner, deux ports de pêche et un port pour les habitants. Les cheminées des usines ont un filtre qui change la fumée en air respirable, car la ville est non-polluante et écologique, ces filtres transforment la pollution en air pur à 99,99%. Sur certaines usines il y a parfois une sorte de bulle pour ne pas que la pollution s’échappe, l’air pollué est emmené sous l’usine où il est transformé en air respirable.
Les maisons sont faites en terre et en sable parce qu’on utilise moins de matériaux et de grosses machines pour moins polluer. Les maisons s’ouvrent au soleil parce qu’elles ont besoin de lumière et de chaleur. Une girouette est placée devant chaque maison pour nous indiquer d’où vient le vent et sa force pour nous prévenir des intempéries. On peut aussi habiter dans des maisons en forme de bulles transparentes pour avoir plus de lumière. Une partie de la ville est suspendue parce que nous voulons laisser de la place pour les animaux, mais il est quand même possible d’habiter au sol, et même sous la terre. Il y a maintenant plus d’animaux parce que nous voulons les laisser vivre avec nous. Les maisons et les usines ont des jardins et des champs sur leurs toits. Il y a de la végétation pour embellir la ville, mais toute cette nature fait aussi de l’oxygène. Il y a également un village derrière une chute d’eau et des cabanes dans un sapin pour encore une fois laisser de l’espace aux animaux. Dans la forêt une belle petite ville se cache, il y a un grand arbre où l’on vit afin d’être dans la nature. Les citadins peuvent aller aussi chercher de l’eau facilement car les maisons et les immeubles sont à côté des cours d’eau, et l’eau y est potable. Il y a des champs flottants sur les cours d’eau, sans les voitures nous pouvons maintenant entendre le bruit de l’eau et sentir la nature. Nous avons mis des morceaux de soleil dans des ampoules très résistantes, elles volent dans la ville et s’allument automatiquement lorsque quelqu’un passe. Nous avons aussi des panneaux solaires parce que nous avons encore besoin d’électricité. Justin, Emilien, Pierre, Noé, Ethan J., Enola, Ewen, Cauline, Emma, Vanina, Maiwenn, Ethan P., Fanch, Théo, Noam, Jessy, Sacha, Tehen, Ugo, Hélie, Titoine, Eva, Thalia, Maëllie, Lorna, Lana …
«Une
ville agréable pour les enfants est probablement une ville idéale pour les adultes.» Thierry Paquot (Philosophe de l’urbain)
Riche en événements et en rencontres, la ville offre aux enfants la possibilité de suivre de près l’étendue des activités quotidiennes des adultes vers lesquelles ils tendent spontanément. Mais, le rythme effréné de la ville et les sollicitations omnipotentes de la société de consommation rendent difficile l’adoption du regard nécessaire sur ce qu’est la ville et le monde qui les entoure. L’urbanisme, continuellement orienté en fonction de critères dépendant de logiques économiques et politiques, uniformise l’habitat contemporain, sature les espaces et fait peu à peu disparaître les zones en friche, inorganisées, naturelles. Pourtant chacun a besoin d’un espace-temps diversifié qui lui est propre, laissant de la place à l’imagination afin de développer sa sensorialité et sa curiosité pour devenir un individu épanoui autant qu’un citoyen éclairé, apte au vivre-ensemble et capable de s’approprier son environnement. Alors que l’acte d’habiter, reflet des modes de vie incarnant à travers les époques et les cultures, la diversité de la condition humaine, est aujourd’hui menacé, il est nécessaire que chaque personne en interaction avec son environnement considère qu’elle est potentiellement ellemême facteur de changement.
Un grand merci à tous les enfants ainsi qu’aux enseignants de l’école élémentaire publique Victor SCHOELCHER de la ville de Guer (56), de nous avoir si bien accueillis afin de partager cette réflexion ensemble.