Libération de Maurepas 1916 2016

Page 1

M M

2

A A

4

a

U U

o

û

t

R R

1

9

C e n te n a i re d e l ' a tta q u e d e l a 7

Le

nom

glorieux

régiment

éternellement

èm e

6

­

P P

2

com p a g n i e d u 6 3

4

èm e

A A

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û

S S

t

2

0

1

6

b a ta i l l on d e ch a sse u rs a l p i n s

1 er

du

d'infanterie

1

E E

restera

attaché

à

la

prise de Maurepas le 24 août 1 91 6, et c'est justice. D'autres unités participèrent à cette attaque. Ce

fut

le

cas

du

63ème

bataillon de chasseurs

1 91 6, l'année des batailles Décembre Italiens,

1 91 5,

Anglais

Russes,

et Français

s'entendent pour mener des offensives après

devant

dix

apporter,

huit

d'impasse,

des

mois victoires

"Ma dernière vision de la Guerre" ­ eau­forte de Léon Broquet (1 869 ­ 1 935)

décisives . . . mais, en février 1 91 6,

c'est

prend

l'initiative

Verdun

l'Allemagne

pour

y

et

qui

attaque

"saigner

à

blanc" les Français.

La Somme L'offensive Somme

alliée

sur

la

avait pour objectifs

de rompre le front allemand en

Picardie

et d'obliger les

Allemands à dégarnir le front de Verdun.

"Orages d'acier" C'est le titre du premier livre d'Ernst

Jünger

Première Ce bien

titre

Guerre à

lui

l'humaine

sur

la

mondiale.

seul

résume

sauvagerie

industrielle qui se déchaînait il y a cent ans sur la Somme.

La si tu a ti on a u 2 4 a oû t 1 9 1 6

La première position allemande, en avant de Bapaume et Péronne, au nord et au sud de la Somme, jalonnée par les points d'appui solidement organisés de Thiepval, Ovillers-la-Boisselle, Fricourt, Mametz, Curlu, Frise, Dompierre, Fay, Soyécourt a été conquise du 1er au 6 juillet par l'offensive franco-britannique. Le 6 juillet commence la seconde phase de la bataille, la phase d'élargissement du terrain. Au nord de la rivière, le premier objectif est le mamelon nord d'Hardecourt, la croupe de Maurepas et sa voisine sud-est. Il est atteint le 20 juillet ; les lignes allemandes ont été

forcées sur un front de cinq kilomètres, depuis la cote 139 (huit cents mètres au nord. d'Hardécourt) jusqu'à la station du "Tortillard" de Combles. Le second objectif devient alors la position Maurepas-Cléry. L'importante redoute, dite de Tatoï, plantée sur une éminence et dirigeant ses feux de mitrailleuses vers le nord, l'ouest et le sud, est emportée le 2 août. L'infanterie française arrive à pied d'oeuvre. Le 12, après une intense préparation d'artillerie, l'attaque générale est déclenchée en liaison avec l'armée britannique ; tous les ouvrages et tranchées de


La s i tu a ti on a u 2 4 a oû t 1 9 1 6 (su i te )

l'ennemi sont enlevés sur une longueur de 6 kilomètres 1/2, une profondeur de 600 à 1 000 mètres. Les Français occupent la moitié de Maurepas et les deux croupes à l'ouest de Cléry jusqu'à la route Maurepas-Cléry. Le nom de ce village : Maurepas, va populariser les exploits français dans la Somme, lui conférant une légitime célébrité. Maurepas était devenu le glorieux et sanglant trophée d'une bataille de cinquante jours. Cinquante jours de travaux, de privations, de souffrances, de peurs et d'héroïsme pour des milliers d'hommes.

M a u re p a s

1

er

j u i l l et

1 7 j u i l l et

1 3 s e p te m b re

3 0 n ove m b re

M AU RE PAS d a n s l e j ou rn a l " Le M i roi r"

P l u s i e u rs a rti cl e s su r M a u re p a s p a ra i s s e n t d a n s ce j ou rn a l i l l u stré .

à droite les pages centrales du 1 0/09/1 91 6

ci­dessous (de gauche à droite) : page 1 2 du 1 7/09/1 91 6 ; la une et page 5 du 08/1 0/1 91 6

Pag e 2

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 1 9 1 6


M a u re p a s , p oi n t d ' a p p u i forti fi é

Les Allemands ont profité de la paix dans laquelle ils ont été laissés dans la Somme depuis 1914 pour y établir la position la plus solide du front Ouest (abris bétonnés, sapes, tranchées couvertes, câbles de téléphone souterrain, réseau de postes de mitrailleuses en surface couvrant tous les angles d'approche, barrières de barbelés). Dans ce dispositif, Maurepas est l'un des points les plus fortifiés de la seconde ligne allemande. Depuis le 12 août, un bataillon du 9ème zouaves tient la moitié du village. Il n'a pu le conquérir en entier. L'adversaire retranché dans la partie Nord-Est oppose une défense opiniâtre. Deux assauts des « zouzous » se sont brisés contre le déchaînement de ses mitrailleuses et le front de combat s'est stabilisé à la rue principale qui passe devant l'église. Maurepas est situé sur un éperon orienté du Sud-Est au Nord-Est. La partie méridionale du village, construite sur la pente descendante, s'offre au tir des canons français, mais la partie Nord se dérobe à leurs vues. Les défenses accumulées par les Allemands sont formidables et savantes : tranchées hérissées de fil de fer, "cages à poules", chausses-trappes, chevaux de frise, ... Chaque maison d'angle est transformée en fortin, flanquée de blockhaus à mitrailleuses. La résistance sera farouche ; ce qui reste de Maurepas devra être emporté retranchement par retranchement, en des corps M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 2 0 1 6

à corps sauvages.

forcenés

et beaucoup à l'effroi du pilonnage d'artillerie. L'obus est un brutal écrasant au Le 19 août commence la hasard, la mitrailleuse, elle, préparation d'artillerie. Les est une artiste qui choisit. batteries grosses et petites Entendre siffler ses balles est, entreprennent un marmitage pour chaque combattant, se méthodique et consciencieux. sentir très personnellement Chaque coin de terrain est désigné, ajusté par la mort. pilonné. Sous ce déluge les Allemands endurent ce que L'assaut est fixé au 24 août les Français ont enduré à à 17h45. Verdun. Le terrain n'est plus qu'une Un assaut d'infanterie est écumoire, les tranchées maintenant plus sombre que ouvertes sont certes ces attaques d'autrefois pour bouleversées mais les lesquelles on déployait le tranchées-abris résistent. Le drapeau et qui prévoyaient village, lui, disparait un peu une place pour la musique, à plus. Toutefois, les obus gauche de l'ordre de bataille. d'artillerie qui ne sont pas L'assaut en 1916 n'est plus encore équipés de une simple question de détonateurs hypersensibles, bravoure et d'élan. C'est une n'explosent qu'en touchant le entreprise à organiser dans sol, les bombardements tous ses détails, aussi visant les barbelés ne font exactement que furent réglés donc que les emmêler un peu pour elle les feux d'artiilerie, plus en barrière les avions, l'horaire des trains infranchissable. de vivres, les convois de Les avions français, eux, camions de munitions, les sillonnent le ciel nettoyé des abris pour les postes de fokkers et aviatiks allemands. secours et les parcs de La mitrailleuse est une arme prisonniers. terrible. Avec sa voix Mais c'est toujours la mort qui radoteuse, elle sait ajouter peut le stopper ! Pag e 3


46

èm e

d i vi si on d ' i n fa n te ri e " b l e u e "

Artillerie de tranchée : C on s ti tu e ́e la

46

èm e

p l a cé e

le

21

d i vi s i on s ou s

m a rs

1 91 6.

d ' i n fa n te ri e

l es

1 01

èm e

b a tte ri e 5 8 /1 5

A

èm e

RAC

est

ord re s

du

du

1 6

fe rré e

j u i l l e t,

d an s

tra n s p ort

la

Parc d'Artillerie:

3 1 /3 6

de

èm e

1 6 /1 1

d ' I n fa n te ri e

A

p a rti r

voi e de

M u n i ti on s

, 1 0 /2

;

èm e

d ' Arti l l e ri e

RAM

du

30

fe rré e

j u i l l e t,

d an s

la

tra n s p ort

re ́g i on

1 8

a ou ̂t

­

7

se p te m b re

M ou ve m e n t ve rs l e fron t.

Compagnies du Génie

E n g a g e ́e

èm e

2 8 /3 d u 2 8

èm e

:

par

d ’ Am i e n s

; re p os.

E q u i p e d e Ré p a ra ti on d e D i vi si on

2 7 /2 d u 1 1

de

i n stru cti on

a u ca m p d e S a ffa i s.

M u n i ti on s

èm e

S e cti on s

par

re ́g i on

Rosi e ̀re s­a u x­S a l i n e s

S e cti on

g é n é ra l G RATI E R

p a rti r

voi e

d an s

la

RG

S om m e ,

BG

l e s 2 4 e t 2 7 a ou ̂t,

ve rs

1 91 6

B a ta i l l e

de

et

M au repas

la :

H em

3 e t 4 se p te m b re ,

a tta q u e s fra n ça i se s. 1 2 /2 5 d u 6

èm e

RG

S e cti on p i on n i e rs d u 3

èm e

RG

D é ta ch e m e n t Té l é g ra p h i ste s/8

Le s

3,

Le

F ores t

4

et

5

se p te m b re ,

et

de

la

p ri se

de

ferm e

de

l ’ H ôp i tal .

èm e

7

­

1 3

fron t

Intendance:

se p te m b re ;

re p os

1 91 6

d an s

– Re tra i t d u

la

re ́g i on

de

1 91 6

Va i re ­sou s­C orb i e . G rou p e d ' E xp l oi ta ti on . 1 3 Trou p e a u d e B é ta i l .

­

21

se p te m b re

M ou ve m e n t ve rs l e fron t.

C on voi Ad m i n i stra ti f 1 2 /6 3 . Ra vi ta i l l e m e n t Sa

com pos i ti on

de

j u i l l et

1 91 6

à

en

Vi a n d e

F ra i ch e

B /4 4

de

j an vi er 1 9 1 7 .

è re

1 3

b ri g a d e

èm e

,

47

de

èm e

ch a sse u rs

B CA

et

1

(7

èm e

Service de Santé : G rou p e

er

èm e

23

,

8

53

62

de

èm e

,

B ra n ca rd i e rs

63

ch a sse u rs

B CA

et

2

(2 2

èm e

èm e

,

B CA

de

èm e

ch a sse u rs

BCA

et

4

(6

èm e

èm e

er

­

24

octob re

fron t e t re p os

m ou ve m e n t

la

ve rs

1 91 6

ve rs

P oi x ;

Au m a l e

et

Am b u l a n ce s 2 /6 5 , 1 /7 5 , 2 /5 8 . 24

octob re

Tra n sp ort

S on

21

e s ca d ron d u 1 2

èm e

H u ssa rd s

parcou rs

de

1

g rou p e 7 5 /2 9

1

g rou p e 7 5 /2 7

1

g rou p e 9 0 /3 2

èm e

èm e

èm e

m a rs

­

O ccu p a ti on

Artillerie de campagne :

1 3

par

n ove m b re ca m i on s

1 91 6

d an s

– la

re ́g i on d e B ra y­su r­S om m e .

de

m ars

à

n ovem b re 1 9 1 6 :

:

­

S e cti on d ' H osp i ta l i sa ti on 1 0 /8 , 2 /5 8 .

P a rti e l l e m e n t 31

octob re ,

S om m e ,

1

et

Ran cou rt

,

B CA

te rri tori a l )

Cavalerie

ve rs

se p te m b re

Re tra i t d u pu i s

S e cti on S a n i ta i re Au tom ob i l e 1 2 .

b ri g a d e

èm e

S om m e

re p os.

te rri tori a l ) èm e

de

B CP D i vi si on n a i re .

b ri g a d e

èm e

21

,

te rri tori a l ) 5

la

ferm e d u P ri ez.

Infanterie : 1

E n g a g e ́e a ̀ n ou ve a u d a n s l a B a ta i l l e

la

1 2

d’un

S ch l u ch t

j u i l l et

1 91 6

se cte u r e n tre l e col

et

le

col

de

S a i n te ­

b oi s

1

er

,

ve rs

de

5,

9

e n g a g e ́e , d an s

la

p a rti r

B a ta i l l e

et

11

la

et

le

S ai l l y­S al l i s el ,

:

S ai n t­P i erre­Vaas t

n ove m b re ,

du

de

Le s

a tta q u e s

fra n ça i se s.

M a ri e .

RAC RAC

1 2 j u i l l e t ­ 1 8 a ou ̂t 1 9 1 6 – Re tra i t d u

1 3 ­ 21

fron t ; re p os ve rs B ru ye ̀re s.

fron t e t re p os ve rs Am i e n s.

n ove m b re 1 9 1 6 – Re tra i t d u

RAM

" U n a i l d a n s l e g i g ot" La

46

èm e

d ' u n i té s

d on t

d i vi si on le

e s se n ti e l l e m e n t F ra n ce , d ' a rm é e , a ve c

ses

d ' Arra s , C a m b ra i .

Pag e 4

du

i n tè g re

S u d ­E st le

l ' a n ci e n ré g i m e n ts de

com p osé e

re cru te m e n t

1

de

de

er

corp s

vi e n t la

C orp s de

Li l l e

D u n ke rq u e ,

Va l e n ci e n n e s

et

de

Ai n si

au x

g a rs

du

d es

S a voya rd s,

d es

D a u p h i n oi s,

N ord d es

d es

se

D i ffé re n te s

d es

u n i té s

d es

Azu ré e n s,

se p te m b re

le

d ' i n fa n te ri e

(G a l

la

se p te m b re

d es

Rou e rg a ts,

par

27

er

45

...

C orp s èm e

Le

4

se ra

d i vi si on

Qu i q u a n d on ),

pu i s

par

la

56

èm e

d i vi si on d e ré se rve (G a l H e l l ot).

Vi va roi s,

d es

re n forcé

le

C é ve n ol s,

La n g u e d oci e n s,

1

j oi g n e n t

P rove n ça u x,

au l es

en

d ' e sp ri t

re n fort

com b a t

l es

b a ta i l l on s

ra tta ch e m e n t

et

d ' ori g i n e ,

m on trè re n t

m êm es de et

q u a l i té s

l eu r

l es

tou te s

C orp s

que de

con tri b u è re n t

l a rg e m e n t à son su ccè s.

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 1 9 1 6


V’ l a l ’ s oi xa n te ­troi s i è m e , n om d e D i e u ! Ç a va b a rd e r !

"V'la l'vingt-troisième, nom de Dieu ! Ça va barder !" est le refrain du 23ème bataillon de chasseurs alpins dont est issu le 63ème qui le reprend. Voici son parcours dans la Guerre : Début août 1914: Mobilisation du 63ème BCA, à Grasse 1914: Vosges (Châtel Nomexy), Picardie (Flaucourt, Péronne), Ile-de-France (Verberie-sur-Oise, Beaumont, Fontenay-en-Parisis, Vémars), Marne (Nanteuil-le-Haudouin, Bouillancy), Aisne (VillersCotterêts, Vic-sur-Aisne, Nouvron-Vingré, Cote 130, Chevillecourt, ferme Confrécourt, Vingré, plateau de Hautebraye), réorganisation du 63ème BCA, Aisne (Crouy, Missy-sur-Aisne, Vassemy, Vailly, Vregny) 1915: Aisne (cote 151, Bucy-leLong, Hautebraye, Chevillecourt), Alsace (Almatt,

Sillackerkopf, Gaschney, Petit Reichakerkopf, Braunkopf, Reichakerkopf, Tête des Faux, Ilienkopf , col de Wettstein, Barrenkopf, Tête des Faux, Lac Noir) 1916: Alsace (Sudelkopf, Goldbach, Barrenkopf, Tête des Faux, Lac Noir), Somme (Maurepas, bois de Ravin, le Forest, cote 121, Rancourt, bois de Saint-Pierre-Waast), Alsace (Hilsenfirst) 1917: Aisne (Muscourt, Ville-enTardenois, Loivre, la Neuville), Chemin des Dames (Plateau de Californie), Italie (MontecchioPrecalcino) 1918: Italie (Monte Tomba, Monte Fenera), Flandres (l’étang de Dickesbush, ferme Godezone, Ridge-Wood), Champagne (Perthes-lesHurlus, Mesnil-les-Hurlus), Picardie (Fescamps, Tilloloy, Beuvraignes, bois de Loges, Avricourt, Beaulieu-lesFontaines, Etreillers), Saint-

Quentin (tunnel du Tronquoy, Lesdins, Remaucourt), Bataille de Guise, Canal de la Sambre, Thiérache (Boué, Nouvion-enThiérache, Fontaine-desPauvres, Fontenelle, Floyon, Plouy, Etroeungt). 1919: Allemagne (Rhénanie). Dissolution en mars 1919. En 1916 c'est un bataillon méridional qui réunit dans ses rangs des anciens réservistes et des jeunes des classes 15 et 16. Depuis la mobilisation, à vrai dire, d'autres recrues se sont amalgamées dans ce bataillon de Grasse. Tous apportent à l'ensemble commun leur parts des vertus foncières de leur région, tous sont fiers d'être des chasseurs formés à la guerre elle-même et glorieusement consacrés dans les combats sur les crêtes vosgiennes, tous unis par ce lien puissant à l'assaut comme dans la vie des tranchées : l'esprit de corps. Officiers 63ème

du BCA

Gérardmer

à en

février 1916 1 er rang assis de gauche

à

Chichet,

droite

:

Mélizan,

Larrieu,

Ville,

Estrangin

E. ,

de

Faucher († 1 91 6), Faraut 2ème

rang

Perrottel, († 1 91 6),

Welsch,

Deslettres, Cabrol, (†

:

Bender

Billot,

Lecomte

1 91 6),

?,

Lagneau 3ème rang : Estrangin G. († 1 91 6), Guys († 1 91 6), Desbief, Davignon († 1 91 6), Tardieu († 1 91 6), Davier, Thibau († 1 91 6), de Coulomb († 1 91 6)

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 2 0 1 6

Pag e 5


Le l i e u d e l ' a tta q u e h i e r e t a u j ou rd ' h u i

Pag e 6

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 1 9 1 6


La p os i ti on d e s u n i té s a va n t l ' a tta q u e

Le s p e rte s (6 3

Tués

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 2 0 1 6

èm e

B CA et 5

Blessés

Disparu

èm e

Tués

B ri g a d e )

Blessés

Disparus

Pag e 7


Le ca p i ta i n e E ti e n n e E stra n g i n e t se s sou s ­offi ci e rs e n m a rs 1 9 1 5 à Va g n e y : 1 . S g t S e yn e t 2 . C a l ­F ou rri e r J a cq u e t, 3 . S g t B on a fou s , 4 . S g t P h i l i p , 5 . S g t D a u m a s , 6 . S g t B a b on , 7 . S g t Re ve l l o, 8 . S g t C h a u m e ry, 9 . S g t B a rb a rou x, 1 0 . S g t P é d oya , 1 1 . S g t P a s tre († 1 9 1 6 ), 1 2 . S g t Au s se n a c († 1 9 1 6 ), 1 3 . S g t G u i d i ce l l i , 1 4 . Ad j Th i b a u († 1 9 1 6 ), 1 5 . Ad c La croi x, 1 6 . C n e E stra n g i n , 1 7 . Ln t B e rn a rd i , 1 8 . S g t­M j r Qu e i rol o

Le capitaine porte à son poignet la montre qui lui donna l'heure de l'attaque

Photo prise avant l'attaque (de gauche à droite) : Lnt Thibau, tué à l'ennemi le 24 août Lnt Bender, tué à l'ennemi le 24 août Cne de Faucher, commandant la 8ème compagnie, mort de ses blessures le 16 septembre S/Lnt Estrangin, mort de ses blessures le 25 août Cne Estrangin, commandant la 7ème compagnie S/Lnt Desbief, officier renseignement (blessé 2 fois, il devient observateur aérien en 1917. Il décèdera à Casablanca en 1923) Lnt Lagneau blessé le 24 août (de retour au bataillon il sera blessé une deuxième fois et finira la guerre en captivité.) Pag e 8

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 1 9 1 6


E ti e n n e E S TRAN G I N (1 8 7 9 ­ 1 9 7 1 ) I ssu

d 'u n e

vi e i l l e

m a rs e i l l a i s e E ti e n n e à

20

au

J os e p h

E S TRAN G I N

s'en g ag ea

an s

23

fa m i l l e

Lou i s

com m e

èm e

ch a s s e u r a l p i n

B a ta i l l on

d e ch a s s e u rs

a l p i n s à G ra s s e . Il

m i l i ta i re

sa

au

d el à

en g ag em en t

et

le

ch a s s e u rs du

23

63

èm e

al pi n s,

èm e

,

il

fu t

à

de

p a rti r

n om m é

b a ta i l l e s

j u sq u 'en

de

la

au x

M a rn e ,

du

S oi s s on n a i s ,

du

C rê te s

Vos g e s ,

d es

S om m e ,

de

Bel g i q u e q u el l es

et

N ord ,

la

Lorra i n e ,

d ' I ta l i e

l es

d es

de

au

e ffe cti fs

de

M ai s

c' e s t

qui

l 'a

le

m a rq u é . ré ci ts , qui

le

Il

en

d an s

­" 20

minuit

en

sape

1 91

combat,

tente,

réserve

bidon,

lune.

de 2

tranchée

à

l’avant­veille

un longs

sous

la de

relever.

Les

pleuvent.

La

relever, ­

d es

1 936

à

d es

p a ysa n s

l es

" a n ci e n s"

la

m a j ori té

en g ag ées

d es

d an s

" G ra n d e

té m oi g n a i t :

" Combien

pu

constater leur

une

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 2 0 1 6

les

chez de

souterrain

faite

de

série

de

chemin; devant,

chef

de

parallèle,

P. C.

de

le

un

avec

boche,

plusieurs

chambres profondes. par

Tuyaux

les

l’on

plateau le

dans

champ.

nuit,

l’argile,

Derrière

descend,

P. C.

du

du

dans

nous

une

chat,

crêtes.

le

route,

d’autres

Un

chaos

indescriptible. "Dimanche, mercredi,

la

rebord

la deuxième

diverses

batteries et entend les avions. "A

le

Je

division

d’aération

dans

autres.

le

dans

distingue

boyaux de l’avant, le P. C. du marmites

de

de

craie,

Général

postes

à

ce ci

si è cl e

l es

de

comme

toile

commandement, le Talus, les bataillon

du

trou

bataillon

à

boyaux

Les

aimaient et qui les aimaient" . . .

trous non rejoints. Le P. C. un rentre

corps,

marmité, et

fois

de

vivres

du

"Débarquement chemins

compréhensif à leurs chefs qu'ils

courage calme et leur solidarité

en

tenue

revolvers, 1 couteau, etc.

carrefour

dévouement

N ote s d u C a p i ta i n e E S TRAN G I N

avec

autour

intelligente

leur

ou

la

ai­je

cantonnement,

musette,

al pi n es

com b a ts

de

6

en

l es

l es

août 1 91 6 ­ Départ à du

trou p e s

Il

40

d on t

a va i e n t com p osé

g u e rre " .

j ou rs

leur

et

fu t

P ré si d e n t

Rh ôn e

e n ve rs

p l u s i e u rs

com p l é ta

initiative

heures

C a i sse s Tou t

con s i d é ra i t a voi r con tra cté

p rove n ça u x

1 91 6,

dramatiques,

aux

par

d ’ a g ri cu l tu re

du

intrépidité

1 940.

d e voi rs

a oû t

e tc.

fu t

leur

M u tu e l l e s

an n ées Il

et

com m u n a u x,

a cci d e n ts,

C h a m b re

Il

p rod u cti on

cré d i t,

1 965.

B ou ch e s

Il

fa i t

q u 'i l

limousine de

a

j u sq u ’ à la

ou

dans l'attente de jours meilleurs

d es

».

cré è re n t,

de

p re m i è re s

ses

de

a g ri col e s

qui

de

l ’ U n i on

P rove n ce

S yn d i ca ts

i n ce n d i e

son

com m e

de

d ’ a p p rovi si on n e m e n t,

d es

p rofon d é m e n t

une

s u i vi re n t,

ées dig

24

pl u s

de

C oop é ra ti ve s

cou rs

l ' a tta q u e

M AU RE PAS ,

et

d i za i n e s,

d es

p ou r

fou g u e

g é n é ra l

il

d ' a cti ve

1 91 9

a ve c

ce u x

s ou s

ord re s on t fon d u troi s foi s .

l ' a rm é e

S yn d i ca ts

l oca l e s

1 91 8

de

B a ta i l l on ,

d ' a va n t­g u e rre

Al p e s

de

a oû t 1 9 1 4

B a ta i l l on

«

de

s e p te m b re

re p re n d re

d es

s on p rom u

form é

p a rti ci p a

en

de

ca p i ta i n e e n j a n vi e r 1 9 1 5 Il

d é m i s s i on n a

S e cré ta i re

fu t

Ra p p e l é à l ' a cti vi té e n i n té g ra

Ch ef

form a ti on

l i e u te n a n t d e ré s e rve e n 1 9 0 8 .

il

P rom u

a cti vi té

p ou rs u i vi t

sous le feu, leur longue patience

a n s p l u s ta rd .

réunion

des

lundi,

mardi,

préparation.

creuse,

on

On

dispose,

on

commandants de compagnies

patrouille pour voir ce que l’on

du 62ème et moi ­ retour aux

a

tranchées.

matériel

La

compagnie

devant

­

:

arrive, relève rapide. En face

vivres,

de nous, un plateau avec un

téléphones,

champ d’avoine et un champ

pistolets

de

suppléments

luzerne.

Nous

creusons

deux tranchées, l’une dans la

on

répartit

pièces, on

plante on et de

le

grenades, des affecte couteaux, cartouches.

Notre artillerie prépare,

mûrit Pag e 9


N ote s d u C a p i ta i n e E S TRAN G I N

(su i te )

les défenses allemandes. Les

l’empêcher de travailler. Celle

dispositions

«

qui

fatigantes. Ils n’ont pas dormi

Lourds

»

tirent

dans

le

dessert

mon

secteur

a

vallon en arrière de la crête,

une pièce pointés trop court

le

et toutes les minutes environ,

75

arrose

fureur.

C’est

moments, qui

partout à

certains

une nappe d’obus

passent.

Les

répondent

Allemands

fréquemment,

d’une

façon

désordonnée fusées de

assez

d’ailleurs.

demande

allongez le font

avec

tir;

je

de

suis

obus

arrive

rasant

de la nuit et sont très las.

mon

"Le 75 recommence son tir ­

trou et frappant aux alentours

très dangereux pour nous ­ la

de ma tranchée. Un de mes

première

sergents

est

en

encore

dirigeant

un

Un

blessés.

éventré travail.

Le matin les boches d’en face avaient pu faire par le 1 05 un

« Allongez »

réglage

! Le téléphone

nuit, un quart de l’effectif part

par «

de

en

interpellé

de

vivres,

ravitaillement

en

eau,

en

que

dans

grand

zone

mètres,

de

1 500

complètement

moi,

brigade finit

par

le

tir cesse. repos.

perpétuel

Ce

Cette

danger,

parallèles,

d’ailleurs,

mais

nombreux coups passent

devant

ou

derrière

nos

éléments.

fut un nuit

de

de

"A

heures,

liaison

arrive

mes

l’heure

un

agent

de

m’apportant

boyaux

démolis,

hommes frappés, ou j’ai failli

« H » : 1 7. 45 h .

pentes

glissantes,

barrages

moi­même sur le bord de ma

notre

tranchée,

Lourde ou de campagne font

21 0,

1 50,

hommes

205,

88,

marchent

calibres 77.

Nos

sans

se

plaindre ­ et ce qui m’ahurit ­

trois être enlevé à

hauteur de avait

de

15

voir

de

tous

quelques­uns

mes

boues,

de

d’obus,

par

La

sur

succès

perforés

fréquents

trous

passer ».

obtenir à 7 heures du matin

munitions. Corvées très dures une

reçoit plusieurs

toutes les fusées qui restent :

sans

corvée

:

tir : La

On

fois

lance

»

tué.

tranchée

une

chasseur est

qu’on répare sans cesse finit

en

et

Les là.

fureur par moment.

un

incommodes

taille

été

une

par un très

75,

les

l’heure

Le tir de

est

infernal.

rage. C’est vraiment fou.

fatigue.

"A 1 6 heures je mes

chefs

de

fais revenir

section

pour

"Il a fallu disposer les quatre

répéter avec eux les derniers

inévitables d’orientation dans

vagues

détails,

des

et

d’où

privés de point de repère, la

Cela

nuit.

jour,

terrains

erreurs

artillerie

et

grande

arrivent, malgré les difficultés formidables,

définitive

bourbeux

d’assaut

elles dura

à

l’endroit

déboucheraient. deux

heures.

Au

revoir la direction de

marche. état

Ils

moral.

sont Joie

en et

parfait énergie

tout était néanmoins en

contenues, ils vont à l’attaque

place pour l’attaque du soir. Il

le coeur haut. Je leur serre la

"Le jour « J » arrive. L’heure

ne restait plus qu’à réunir les

main, leur dit de se confier à

« H » sera dans la soirée du

chefs de section et à recevoir

la Providence, je leur dit que

jeudi.

Dernière

l(heure « H ». Au petit jour, je

j’ai pleine confiance en eux et

mise

au

reçois

l’ordre

je les renvoie à leurs postes.

d’attaque,

un plan et l’heure

à

dans

23 des

de

chez

le

62ème .

J’y

point

commandant vais

réunion

du

heures, trous

rencontre,

je

tombe

d’obus,

cherchant

blessés,

l’abbé

détaillé

officielle.

des

ordonnance

bazar.

je

TURGIS,

Mon

Il

reste

plie

mon

encore

30

minutes. "Dans

la

heures,

matinée,

j’appelle

vers

10

mes quatre

"A H moins cinq, tout est prêt,

aumônier divisionnaire tué le

chefs de section.

lendemain par un obus.

en rampant ou en bondissant.

équipement,

Dans le P. C. qui abrite aussi

Dans

bidon de deux litres,

un poste de secours, c’est un

dans le parapet, je les reçois,

de toile de tente, deux sacs à

tohu­bohu.

deux à droite, deux à gauche,

terre, revolver libre dans mon

à genoux ou accroupis dans

étui,

conversation, un dernier coup

le

dans ma poche, un fusil sous

d’oeil sur photos d’avion,

THIBAU,

tout

Les 21 0 frappent

autour.

Une

dernière on

mon

MAZEL.

est,

dernière

creusé

LAGNEAU, HEULHARD,

Nous

causons

une

je

la

suis

enroulé

dans

musette

pistolet

main.

Deux

mon

pleine, rouleau

automatique obus

de

75

arrivent ensemble à quatre ou

de

heure. Je leur donne tous les

cinq

confiance

détails, les mets à même de

sergent,

du commandant H. , et retour

renseigner exactement tout le

en sang vient me dire : « X

à

monde.

n’a

main, la

poignée

fauteuil,

boyau.

prend l’angle de marche 75’

Ils arrivent

"Le 75 fait rage sur nos têtes.

paroles

de

tranchée.

frappent

Pag e 1 0

sur

le

Nos batteries boche

pour

courage,

Ils

travaillent dans

avec des

mètres

plus

de

moi.

HEULARD, de

tête

!

Un

la figure 3

autres

blessés ». Tout est couvert de

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 1 9 1 6


N ote s d u C a p i ta i n e E S TRAN G I N

(su i te )

Croquis de l'attaque de la main du Capitaine Etienne ESTRANGIN kilomètre les capotes sortent

l’un à l’autre les incitant à tuer

Dans le boyau je me mets à

alignées.

tout

genoux

et

sort devant moi,

peu.

prie

poussière

de

Je

qui me

ont

recueille

THIBAU en

ce

trous.

qui

reste

Plusieurs

tête ; déjà plusieurs hommes

balaient

tombent

La

miracle

que

je

mes

petits

première

disparaît

touché.

Les

deux

succès

sur

le

parapet.

vague

le

dans

les

mitrailleuses

force

pour

besoin

un

La première vague

la

pour le

l’attaque,

dont

tourbillonne.

plateau. ne

C’est

sois

pas

chefs

de

et

moi­

derrière la crête, la deuxième

section (3ème et 4ème vagues)

qui

vont

suit. Je sors de mon trou avec

arrivent. Ils n’ont presque plus

mon ordonnance et ma liaison

personne autour d’eux. Je les

et m’arrête dans la première

oriente,

plus

tranchée. La deuxième vague

à

rien à faire ; je m’agenouille à

dépasse la crête et disparaît.

pente, une mitrailleuse et des

nouveau.

Je me porte au devant.

fusils balaient le chemin 557

chefs

de

même,

section

pour

ceux

tomber. "«

H »

deux

moins deux.

minutes.

Je

Je

Encore

n’ai

m’abandonne

Des

l’un en avant,

droite.

l’autre

Au changement de

entre les mains de Dieu. Les

boches sortent de leurs trous.

et

trois dernières minutes, le feu

Une

progresse. Je saute dans un

des

batteries

notre

doit

être

de

intensité, en «

campagne

plus

puis faire

avant courir

de la

et

nous

après

les

grande

un

bond

devons obus

»,

selon les ordres.

dizaine

descend

point

de

J’aperçois que

vers

départ.

des trous au

arrêtent

grand

trou

tout de

ce

qui

tirailleurs

boches où sont deux de mes

ras du sol, qui sont disposés

sous­officiers.

dans

liaison viennent me demander

l’avoine,

certains

ont

retiré sur les vagues qui ont

des

dépassé.

d’eux

Les

nettoyeurs l’autre,

Un

parlemente

L’un

signaleur

d’un

hésitent

à

un

groupe qui nous fait signe de

des tranchées sur plus d’un

gros quart d’heure, je vais de

se rendre. Il veut les amener.

Pendant

debout

tombe.

courent

tuer.

à

renseignements.

"« H ». A droite et à gauche

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 2 0 1 6

trou

Les agents de

avec

un

Pag e 1 1


N ote s d u C a p i ta i n e E S TRAN G I N Un cri et il s’affaisse avec une

L’un

balle dans le côté. Plus tard il

heurté, sans explosion, par un

descend

obus

dans

le

trou,

puis

d’eux,

plus

dans

sa

s’écrase

part à l’arrière à la nuit.

dans

tourbillon

d’avions que

plus

choses

les

impressionnantes

naturellement,

tranchées,

plus

tard au

corse,

nettoyeur noir,

décharge

son

acharnement.

En

"Le lapin qui, d’un galop fou,

derrière

les

deux

longe

je

croise

ma

moment

du

tant

de

horrible,

grimaçant va de trou en trou et

calme.

et

des rencontres

sont inévitables. "Un

reviennent que

plusieurs

l’atmosphère

passent et se succèdent tout des détails ne

et

Il y a tant d’obus

"Le cinéma de la bataille. Un les

est

course

en

morceaux. où

loin,

parallèle

au

vagues,

départ

de

mes

sergents

fusil

avec

passant premières deux

blessés

de qui

l’attaque, un de mes sergent

rampent

qui tire en l’air. Je regarde un

Plusieurs

petit avion

crachent souvent tout autour

qui nous

survole

l’arrière. mitrailleuses

très bas et nous tire dessus

de

avec

sort de son trou, je l’ajuste, il

sa

mitrailleuse.

Une

nos

vers

groupes. net.

Un

Un

(su i te )

boche

nuée d’avions français à 4 ou

tombe

500 mètres évolue sur nous.

venant vers moi, tombe tué.

"En

arrivant

tranchée pente

à

la

deuxième

conquise,

sur

la

descendante,

tout

le

panorama positions déploie.

des

nouvelles

allemandes Il

est

écrasé

se sous

nos obus gros et petits. C’est une poussière et une fumée intense. ce

La nuit descend sur

vacarme.

partent de

Les

fusées

chez les boches,

nerveusement.

Des

plaintes

montent des trous d’obus où sont les

blessés

français

et

allemands.

Ma septième était liquidée. "

compagnie

sergent,

S a ci ta ti on à l ' ord re d e l ' Arm é e

Le général FAYOLLE, ème Commandant le VI Armée, cite à l'ordre de l'Armée n°398 le Capitaine ESTRANGIN Louis Joseph Etienne du 63ème Bataillon de Chasseurs Motif de la citation : "Commandant de compagnie hors de pair, d'une haute tenue morale. A su imprimer à son unité un sentiment très élevé du devoir. Pendant l'attaque du 24 août 1916, après une sérieuse avance a pu maintenir ses hommes au combat corps à corps, auquel il a participé luimême, jusqu'à ce qu'il restât plus qu'une poignée de braves avec lesquels il s'est cramponné sur le terrain conquis"

Pag e 1 2

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 1 9 1 6


4 1 95

en

ées dig

N ote s d u C om m a n d a n t E S TRAN G I N

L'attaque était menée par la

brancardiers

46ème

d'infanterie

étant montés me rejoindre, je

composée

passe la plus grande partie de

division

"Division

Bleue",

de 1 2 bataillons de chasseurs

la

alpins. Le combat se situe au

étoiles,

sud

hommes.

de

(Somme).

MAUREPAS Ce

attaqué

et

occupé

par

village

déjà

dont

attaquaient, étant en

les

de

mes

1 00

sur le

tués

terrain.

régiment

râle, une balle dans la tête, le

63ème

du

la

mienne

deux

réserve.

des

reconnaître Plus

sont allongés

sergent

Deux compagnies

à

lumière

Mon cher lieutenant THIBAU

d'infanterie de Lille. BCA,

sous la

bataillon

partie

en

1 er

le

était

nuit,

du

autres

Nos

compagnies

d'attaque

que

compagnie

AUSS,

fracassée

la

ne

machoire

veut

laisser relever.

pas

se

J'ordonne

de

l'enlever. . . Il ne me l'a jamais

deux

pardonné.

J'évacue

le

ainsi

lieutenant LAGNEAU perforé

du

à la ceinture par une balle (Je

62ème BCA étaient sous les

l'ai retrouvé plus tard, père de

ordres

10

deux du

commandant

HUOT du 62ème .

enfants,

agent

dans

des

l'Ardèche,

organisations

agricoles du Sud­Est. ) Le combat avait duré de 20 à

Ce travail se poursuit, difficile,

25

pendant de

minutes

au

compagnie

plus.

était

Ma

presque

sous

me

mitrailleuses

trouvais alors à la hauteur de

rasent le sol.

entièrement

détruite.

Je

mes derniers hommes, mon

fidèle

longues

les

heures,

rafales d'en

de

face

qui

A

ma

droite,

le

creux",

d'obus

viennent

organisé a absorbé et détruit

rejoindre

mes

quatre

agents

le

mon

fourrier

bataillon,

de

liaison,

guépier

"chemin

GIREUD d'Allos, dans un trou me

peloton

fortement

des éclaireurs du spécialement

FERRERO(décédé en février

entrainé pour les coups durs

1 950,

qui

travaillait

et

dans

une

usine

Capelette)

et

BROUILLET 1 936

et

encore de

mon

(qui

La

clairon

sauta

disparu

en

pulvérisé

son

chef,

le

lieutenant

BENDER,

vieux dur à

alsacien,

ancien

chef

la

de

auparavant

cuire

adjudant­

Légion,

sous

mais

officier

de

dans une grave explosion à la

ulhans qui se plaisait à injurier

poudrerie

le

de

j'assistais comme

Saint­Chamas,

aux

obsèques

président

Chambre

de

la

d'Agriculture)

secteur

d'en

allemand,

de

face sa

en voix

tonitruante. Je ne m'aventure pas

dans

ce

chemin

creux

Quelques

chasseurs

nous

d'où partent encore quelques

rejoignent

dans

trous

balles allemandes.

les

Au lever du jour, je retrouve le La nuit tombée, notre groupe

commandant

­

commandant,

au

position atteinte tenue,

total

de

­

rejoint

VILLE,

mon

qui s'est porté

la

ligne

au poste de commandement

pouvant

être

HUOT. Il m'embrasse, me fait

ligne

ses excuses pour les officiers

départ,

ne

la

et toute

la

1 ère

allemande ayant été détruite

de

par nous, la 2ème se trouvant

estimés. Il rédige une citation

à

et me propose pour la croix

quelques

centaines

de

qu'il

avait

sous­

de guerre. Qu'avais­je fait de

mètres. Aussitôt

réserve

que

possible,

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 2 0 1 6

les

devant

se

jette

moi,

à

genoux

les

poignets

joints par son chapelet : "Pitié françouze, pitié françouze", je détourne mon revolver qui n'a pas

quitté

de

la

nuit,

chien

armé, ma main droite. "Fous moi le

camp

bas" en

montrant

l'arrièr

disparaît,

pendant

que

lui il je

continue à examier un à un les corps étendus. La même attaque, avec pour objectif, côté

les lignes de

du

jours

ravin

après

63ème .

est

par

compagnies

l'autre

reprise nos

de

2

deux

réserve

Tous

du

ceux

qui

dépassent une certaine ligne sont frappés à la hauteur de la

taille

par

FAUCHER

les

balles

de

compagnie

de

est

plus que mon devoir ?

tué

net.

est traversé

séminariste, lui aussi.

le

Je

lendemain

une sape à l'arrière, refermé

Le

Georges

ESTRANGIN, retrouve

8ème

la

lieutenant

sur

le

le

dans

un trou

ventre,

une

blessure en entonnoir grande comme la main dans le dos. Il fut

enterré

après, côté

peu

derrière de

vicaire

la

de

les

jours

lignes,

à

l'abbé

TURGIS,

Paris,

aumônier

à

dans

division,

tué

en

accomplissant sa mission de charité. Quelques

voisins.

13

allemand

mitrailleuses. Le capitaine de

avec

ordonnance

En fin de nuit, au petit jour, un

mois

plus

tard,

revenu de convalescence, un de mes chasseurs m'apporte dans sa d'une

musette,

mitrailleuse

détruite vagues. troupier

par Que qui

la

hausse

allemande 2èmes

nos dire

de

ramène

sur

ce le

champ de bataille un souvenir à son capitaine, au péril de sa vie

et

mois

qui,

après

d'hôpital,

plusieurs

vient

le

lui

offrir?

Pag e 1 3


N ote s d u C om m a n d a n t E S TRAN G I N Inutile

de

dire

principal de VERDUN.

quel fut mon

(fi n )

Simple épisode d'une longue lutte au cours de laquelle les

témoignage devant le Conseil J'allais oublier le dévouement

effectifs sous mes ordres ont

quelques mois plus tard, pour

sans

fondu trois fois.

avoir quitté le bataillon,

ordonnance

de

Guerre

il

fut

traduit d'un

limites

coup de cafard, pour voir ce

qui ne

que

faisait

femme

à

dont

Marius

me

quitta

GIREUD

pas

d'une

la

Marne,

du

il

de

allemand qui me visait, celui,

Vosges,

de

Champagne,

du

sans doute, qui tomba avant

Nord,

de

Lorraine,

de

que j'ai pressé ma gachette.

Belgique et d'Italie.

ces

un

de

semelle

penser de

abattit

Batailles

sa

avait

et

mon

Marseille

regrettables nouvelles. Que

de

Soissonnais,

des crêtes des

Mines, obus de tous calibres,

troupes

animées d'un esprit de devoir

Il faudrait des pages pour tout

rafales

et

relater.

nappes de balles et de gaz,

de

faille,

sacrifice, et

cela

sans

une

pendant

trois

périodes

semblables,

autre

que

but

de

ces

dégager

Quels créé

pendant

sur la

des

Somme,

mois,

et

pourquoi,

terribles

à

face

et

mon

Dieu, suis­je sorti indemne de

sans

Verdun en obligeant le Boche faire

mitrailleuses,

bombes d'avions, crapouillots Comment

successives

d'attaques

de

bagarres

devoirs

ne

m'a

cette

demi !

? pas

singulière

protection.

à

. . . Et cela dura quatre ans et

Oui, comment en sorti et pourquoi ?

suis­je

dégarnir de troupes le secteur

" D a n s l a p oi g n é e d e b ra ve s "

Il

fa i t

p a rti

du

ch a sse u rs

d e rn i e r

ca rré

su rvi va n ts

de

d es

1 3

Il

l ' a tta q u e

e st

ci té

b ri g a d e

re g rou p é s a u tou r d e l e u r ca p i ta i n e :

su i va n t :

H e n ri

"A

M I C O U LE T

Ard é ch oi s 1 9

qui

se p te m b re

S om m e . 1 91 4,

a

un

se s

su i va n t

I n cop oré

il

é té

se p te m b re d eu x

e st

fê te ra

en

n om m é

1 91 5

se m a i n e s

et

an s

d an s

ch a sse u rs

de

la

a ve c

5

le

èm e

m oti f

fait preuve constamment du plus

beau

la

sang­froid en particulier à l'attaque

courage

et

du

plus

grand

du 24 août à plusieurs reprises, s'est

en

offert

pour

l'exécution

missions dangereuses,

se rg e n t

l ' a tta q u e

l ' ord re

le

d é ce m b re ca p ora l

p a sse ra

a p rè s

j eu n e

21

de

à

il a

il

de

assuré

la liaison avec le plus grand zèle. "

du

2 4 a oû t.

Le

com m a n d a n t

ch a s s e u rs d u 6 2

Pau l

èm e

H U OT

et d u 63

(1 8 7 8

èm e

­

1 91 6)

qui

d i ri g e a i t

l ' a tta q u e

d es

l e 2 4 a oû t, tom b e ra a u ch a m p d ' h on n e u r l e

5 n ove m b re 1 9 1 6 à S a i l l i s e l (S om m e ). O ffi ci e r

Sai n t

C yri e n ,

il

a va i t

s e rvi

au

1

er

ré g i m e n t

é tra n g e r

M a roc e t a u S a h a ra d e 1 9 0 4 à 1 9 0 9 a va n t d e re j oi n d re l e 2 2 ch a s s e u rs p u i s l e 6 2

èm e

en

èm e

Al g é ri e ,

au

b a ta i l l on d e

e n 1 9 1 4 d on t i l p re n d ra l e com m a n d e m e n t.

D e u x foi s b l e s s é a u x con fi n s a l g é ro­m a roca i n s e n 1 9 0 8 e t troi s foi s a u cou rs de le

la

g u e rre

23

a oû t

de

1 9 1 4 ­1 9 1 8 ,

1 91 6,

il

a va i t

il

é ta i t ti tu l a i re

con s e rvé

s on

de

n om b re u se s ci ta ti on s.

com m a n d e m e n t

p ou r

B l e ssé

m en er

l es

a tta q u e s d u 2 4 a oû t e t d u 3 s e p te m b re .

Pag e 1 4

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 1 9 1 6


Ab b é E d ou a rd TU RG I S (1 8 7 3 ­ 1 9 1 6 )

L'abbé Edouard TURGIS, vicaire de la Madeleine à Paris, aumônier volontaire de la 46ème Division d'infanterie, est mort le 26 août des suites d'éclats d'obus reçus le 25 à son poste d'honneur et de dévouement. C'est au poste de ème commandement du 63 chasseurs que, blessé, il est accueilli par le commandant VILLE qui lui dit son espoir de le voir revenir bientôt au bataillon, et il ajoute : "Permettez moi de vous remercier de tout ce que vous avez fait pour mes chasseurs." L'abbé fait alors un

S ai n t Lou i s

d'un

d'une bravoure et

dévouement

bornes,

a

été

sans

blessé

grièvement dans

la

très

nuit du

25 août 1 91 6, en prodiguant ses

soins

sous

bombardement. "

un

violent

(C i ta ti on

à

l ' ord re d e l a D i vi s i on )

L' a b b é

TU RG I S

d an s

le

d ' E ti n e h e m ,

p rè s

fu t

e n te rré

ci m e ti è re

re p osa i t

d 'u n

m i l l i er

d éj à

de

com b a tta n ts .

Le 1 3 j u i n

m orte l l e

con d u i te

1 921 ,

s a d é p ou i l l e

e xh u m é e

au

fu t

ci m e ti è re

F on te n a y­a u x­Rose s

M. Emile DEVAUX, officier à la 4ème section d'infirmiers militaires à laquelle appartenait l'abbé, écrit : "Le brave Abbé TURGIS est mort en héros... Souffrant horriblement de sa blessure, il ne s'est pas plaint un seul instant. -" Je ne regrette qu'une chose, disait-il, c'est de ne pouvoir continuer la mission que je m'étais assignée..." Il avait quarante-trois ans.

L'abbé TURGIS avait été successivement professeur au Petit-Séminaire de Notre-Damedes-Champs, vicaire au Kremlin-Bicêtre, à Saint-Michel et enfin à Sainte-Madeleine. C'est là qu'il avait créé l’œuvre des midinettes (la dinette de midi) pour accueillir les jeunes femmes employées dans les importants magasins et ateliers de haute couture du quartier du Faubourg Saint Honoré et de la rue Royale et leur permettre de faire réchauffer leur gamelle sur des poêles à charbon. Aujourd'hui, le Foyer de la Madeleine perpétue toujours son "oeuvre du midi".

S e s d e u x d e rn i è re s l e ttre s

2 5 aoû t :

" Aumônier

effort pour se soulever et dit : " Je sens que je vais mourir ; je donne ma vie pour la France et mes chers Alpins."

de

sa

fa m i l l e p os s é d a i t u n ca ve a u .

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 2 0 1 6

"Aux Armées, le 24 août.

"Aux Armées, le 25 août 1916.

"Merci de vos bonnes prières ; oui saint Louis va nous protéger. Le canon continue sans relâche. Je confesse dans les trous, dans toutes les positions. Quelle vie ! Nous espérons bien avancer ces jours-ci, mais que cela coûte cher ! "Nos soldats sont logés dans de petits trous comme les chiens dans une niche. Ils sont accroupis et bien résignés à leur sort..."

"C'est la grande bataille grandiose et terrible ; temps splendide, 25 avions en l'air, 20 ballons captifs. Des canons en nombre infini. Un bruit d'enfer. Prisonniers nombreux. Nos hommes ont été très braves, mais il y a eu des morts et des blessés ; c'est terrible. Le Bon Dieu me protège toujours, merci de vos prières à tous. "J'ai vu un avion tomber, il était tout en flammes ; quand je suis arrivé, les deux aviateurs étaient morts. C'est une grande peine de voir ces braves mourir ainsi. "Le moral est bon, j'ai encore confessé en marchant. Nous avons pris des tranchées ennemies. Au revoir. "Oui que saint Louis nous protège. "Edouard"

Pag e 1 5


S ou ve n i rs d u C om m a n d a n t E S TRAN G I N

1 .

S on

béret

ch asseu r

al pi n ,

ad optée

par

en

et

1 891

de

(coi ffu re

l es

Al pi n s

su rn om m ée

l a "tarte").

2.

Sa

"cape"

(ad optée

en

1 892 sou s l e n om

de

"m an teau à capu ch on ").

3.

Sa

"son n ai l l e"

Vosg es,

vach e

d es

cl och e

en

fer

de

bl an c,

q u 'i l

d i sposai t à l 'en trée d e sa

cag n a.

4.

U n cai sson m étal l i q u e

à m u n i ti on s.

5.

Sa

l am pe

réal i sée

d an s

à

pétrol e

une

boi te

d e con serve

6

S on

g obel et

verseu r

à

bec

u ti l i sé

rem pl i r

la

pétrol e

pou r

l am pe

et

à

réal i sée

com m e cel l e­ci .

7. S a pi pe

8.

Sa

m on tre

q u 'i l

de

portai t

poi g n et

avec

d écl en ch a

g u erre

à

son

l aq u el l e

l 'attaq u e

il

de

sa com pag n i e l e 2 4 aoû t

1 91 6 à 1 7h 45.

9.

Sa

avec

croi x

d eu x

l 'ord re

1 91 6

à

g u erre

ci tati on s

de

et

de

l 'Arm ée

l 'ord re

en

de

la

B ri g ad e en 1 91 5)

1 0.

le

S es croq u i s (l a rel ève d es u n i tés

20

aoû t

1 91 6

et

l 'attaq u e

du

24

S on

1 882

sabre

qui

d 'i n fan teri e

éq u i pai t

l es

M od èl e

offi ci ers

H au sse

al l em an d e

Pag e 1 6

JR

d 'u n e

M. G.

m i trai l l eu se

08

1 34

en

g arn i son

la

7

qui

èm e

par

à

l 'u n

ses

1 0.

portan t

est

d es

à

El l e

ch asseu rs

la

ran g s

le

I n fan teri e

créé en 1 881

Pl au en ).

com pag n i e

d éci m ai t

08)

(J . R. 1 34

S äch sen

Reg i m en t – N r. 1 34",

arrach ée

d 'i n fan teri e d e l a g u erre 1 4­1 8.

1 2.

l 'i n scri pti on

"Kön i g l i ch er

aoû t 1 91 6)

11 .

(M asch i n en g eweh r

et

1 3.

Ph oto

de la 7

èm e

d es

cad res

sou s­offi ci ers

com pag n i e en tou ran t l eu r

capi tai n e

fu t

1 4.

de

com pag n i e

m i trai l l eu se

et

com m e troph ée à son capi tai n e.

S on

fan i on

du

63

de èm e

la

7

batai l l on

èm e

de

ch asseu rs

rapportée

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 1 9 1 6


C a rte d e M a u re p a s a ve c l e tra cé d e s tra n ch é e s a l l e m a n d e s e n b l e u à l a d a te d u 20 j u i n 1 91 6

Le re l i e f : u n é l é m e n t­cl é

Voici le profil du terrain de l'attaque suivant la ligne pointillée rouge sur la carte. La double flèche noire situe à la fois le site de l'attaque de la 7ème compagnie le 24 août 1916 sur la carte et sur le profil Cette coupe montre les difficultés d'une attaque sur une pente cachée par le relief aux tirs directs d'appui et de couverture des amis, mais exposée aux tirs directs de l'ennemi ! .

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 2 0 1 6

F ra n ça i s

Al l e m a n d s

Pag e 1 7


La l e ttre d u S ou s ­l i e u te n a n t M a rce l LAG N E AU

Cette lettre est la réponse adressée par le lieutenant Marcel Lagneau à Madame Gabrielle Barral veuve Nougarède. Elle a été conservé par Madame Roselyne Dugand, petite-fille de la veuve du sergent Hippolyte Nougarède, qui a gentiment autorisé sa publication.

Ce 8 Décembre 1916 Madame, Veuillez m'excuser de n'avoir pas répondu plus tôt à votre lettre. Elle m'arrive aujourd'hui seulement dans ma famille où je suis en convalescence. Le sergent Nougarède était en effet à mes côtés quand il est tombé pour la France. Il a été sur le champ de bataille comme je l'avais connu partout, aux tranchées comme à l'exercice, aux jours mauvais comme au repos, un soldat exemplaire. L'assaut avait été donné à 5h40 du soir ; ma section était en troisième vague. Nous avions fait trois ou quatre bonds sans encombres sérieux et nous soufflions un moment dans un trou d'obus quand, au moment de repartir nous aperçumes en face et à côté de nous un parti de boches qui nous avait cernés en nous prenant de flanc. Nous déchargeons nos armes et nous terrons à nouveau. Mais les boches nous attaquent alors à coup de grenades. Nous continuons de tirer, et c'est en visant un boche que votre mari reçoit une balle au menton. Il eut à peine le temps de dire trois mots : "Ah ! que j'ai mal" et il tomba. Il venait de verser son sang pour la France. Une minute après je tombais à mon tour. Excusez-moi, madame, de vous donner tous ces détails qui aviveront peut-être votre douleur, mais vous-même m'avez demandé de ne rien vous cacher. Vous le voyez, madame, votre mari est mort en brave. Courageux soldat, il était de plus un vaillant chrétien et avait plus d'une fois à ce sujet excité mon admiration. Ce doit être un autre sujet d'apaisement pour vous, madame, puisqu'il a la récompense des martyrs du devoir. C'est une perte pour le bataillon et pour moi plus particulièrement. Je l'estimais beaucoup et ses hommes l'aimaient. Permettez-moi donc, madame, de vous exprimer la grande part que je prends à votre deuil, et veuillez croire à l'assurance de mes sentiments douloureusement dévoués signé : Marcel LAGNEAU En convalescence à Frayol par le Teil (Ardèche)

Pag e 1 8

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 1 9 1 6


P a rm i l e s ci ta ti on s

TH I B AU

(J os e p h

m od è l e

de

Lou i s),

s a n g ­froi d ,

b ra vou re ré fl é ch i e ; de

la

au

ca m p a g n e

m a i n te s

foi s

l ’ a tta q u e

du

par 24

l ’ a ss a u t

d’une

e n l e vé

d eu x

e n tra în e r a va n t » .

sou s­l i e u te n a n t

a oû t

de

fron t d e p u i s l e d é b u t

s’ é ta i t sa

fa i t

re m a rq u e r

b ri l l a n te 1 91 6,

bal l e

à

la

h om m e s

q u el q u es

con d u i te .

b l e ssé tê te

tra n ch é e s,

ses Tu é

d ’ é n e rg i e ,

:

a

en

A

pen d an t

a p rè s

i n sta n ts

63

èm e

b a ta i l l on

e xce l l e n t Trè s un

:

à

«

a p rè s

En

d’une

d e u xi è m e b a l l e d a n s l a tê te .

e n tra i n ,

se rg e n t

BEN DER 63

èm e

d 'u n e

bel l e

é n e rg i e

et

:

d 'u n e

P e n d a n t l ' a ssa u t d u

la

d roi te

b rû l é e ,

5

bal l e

q u 'i l

m u s e tte

;

m a l g ré

ce tte

à

e n tra i n e r

m an i an t

s on

sa

,

m om e n t où

une

m ai n

bal l e

g a u ch e

le

d é sa rm a .

p ou r

d é ta ch é

offi ci e r

b ra vou re

vol on ta i re et

l es

D ési g n é

de

et

l es

d e ve n u

s on

a u d a ce

m i s s i on s

cou p s p ou r

g re n a d i e rs à

ses

d ’ é n e rg i e

tê te

un

l es

m ai n

l es

org a n i se r

de

un

d ’ é l i te ,

a va i t

su

ch a s s e u rs

ses

ra re s

d ’ a u d a ce .

Atta q u a n t

cre u x

à

forte m e n t

et

a rrê té

d ès

s on

d é b ou ch é

par

g a u ch e

d an s

B l e ssé

et

ch e m i n

en

fe u

vi ol e n t

de

m i tra i l l e u s e s ,

s’ y

e st

j e té

l ' a va n t­ a ve c q u e l q u e s

b ra s

sa

:

a

un j u sq u ' a u

ch a s s e u rs

au

a va i t d a n s

b l e ssu re

la

de

l i e u te n a n t

a ya n t

d e m i ­se cti on

de

F é l i x),

b ri g a d e

par

h a rd i s .

org a n i s é fu si l

a ve c l e 24

a eu

l eu r con ti n u é

p orta n t vi l l a g e ,

p é ri l l e u s e s

q u a l i té s sa

cou ra g e u x.

se

èm e

com m u n i q u e r e n fl a m m é d e s p ots Ru g g i e ri

:

g ra n d e

2 4 a oû t,

une

en

al pi n s

à l ’ a tta q u e d ’ u n

b a ta i l l on

g rou p e m ai n

bl essé

et

au

sou s ­

pl u s b ra vou re .

ch a s s e u rs d é vou é

(Rob e rt

é cl a i re u r

pl u s offi ci e r

de

ch a s se u r

a oû t 1 9 1 6 .

l é g i on n a i re

(Lou i s­M a rce l l i n ),

E rn e s t),

ch a s s e u r,

g ri è ve m e n t

bel

tou j ou rs P E D O YA

(Ros i n

a voi r

con ti n u é

cri a n t

M AS S E G LI A

au

s u rvi va n ts

de

s on

g rou p e

et

d ébu t e s t tom b é g l ori e u s e m e n t fra p p é e n s ’ é cri a n t

d e l a ca m p a g n e e t d é j à ci té . : « E n a va n t q u a n d m ê m e » . AU S S E N AC

(Am é d é e ),

se rg e n t

offi ci e r d ’ u n cou ra g e sa n s p a re i l . à

l ’ assau t

a ve c

un

cou ra g e

G l ori e u s e m e n t

tom b é

e n l e va n t

m i tra i l l e u se

une

p rog re s s i on

de

la

en

:

S ou s ­

S ’ e st p orté

re m a rq u a b l e .

a tta q u a n t qui

com p a g n i e ,

et

en

g ên ai t

la

le

24

a oû t

1 9 1 6 . A é té ci té

ARTI LLAN (Lou i s), ch a sse u r : b on ch a ss e u r cou ra g e u x

et

re m a rq u e r

par

M ort a oû t

d é vou é , sa

g l ori e u s e m e n t 1 91 6,

à

bel l e p ou r

M a u re p a s

qui

s’ e st

con d u i te la

au

F ra n ce ,

(S om m e ).

fa i t fe u .

le

25

C roi x

de

g u e rre a ve c é toi l e d e b ron ze .

G I RE U D a ssu ré

(M a ri u s

la

l i a i s on

com p a g n i e son

et

ca p i ta i n e

M od è l e

de

a

H ya ci n th e ), e n tre

l es

p roté g é

pen d an t

ch a sse u r

se cti on s

sa n s

l ' a cti on

d é vou e m e n t

et

du

24

à

a sa lui

a oû t.

d ' a b n é g a ti on .

C roi x d e g u e rre a ve c é toi l e d e b ron ze

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 2 0 1 6

de

p e n se r

:

le Lieutenant Robert Félix BENDER (Gérardmer - février 1916) Pag e 1 9


e fu r Ils tra

2 1 9 nt

nc

o à s

le es

rti r

de

ao 24

s

ût

Le s p e rte s d e l a 7

èm e

com p a g n i e

Tu és à l ' en n em i :

S ou s ­l i e u te n a n t J ose p h TH I B AU , 2 5 a n s , M a rs e i l l e (1 3 ), e m p l oyé d e b u re a u S e rg e n t F ra n çoi s LAC RO I X, 2 5 a n s, La C h a rm é e (7 1 ), cu l ti va te u r, re n g a g é S e rg e n t M a ri u s S AVO YE , 3 6 a n s, G a p (0 5 ), cu l ti va te u r S e rg e n t Am é d é e AU S S E N AC , 3 0 a n s, M a rs e i l l e (1 3 ), com m i s d ' é con om a t. . . . . . . . . . . . . . . . . . † n ° 5 1 8 C a p ora l F l ore n ti n F O RTO U L, 3 5 a n s, M é a i l l e s (0 4 ), cu l ti va te u r C h a s se u r M a xi m i n M E I LLAN , 2 9 a n s, M on tcl a r (0 4 ), b ou l a n g e r à M a rs e i l l e C h a s se u r Lé on B LAYAS S I , 2 9 a n s, M i l l a u (1 2 ), cu l ti va te u r C h a s se u r F i rm i n VI RE N QU E , 2 8 a n s, Arq u e s (1 2 ), cu l ti va te u r. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . † n ° 6 2 8

D i s paru s :

S e rg e n t H i p p ol yte N O U G ARE D E , 3 8 a n s , B l a n d a s (3 0 ), l i q u ori s te à Le Vi g a n (3 0 ). . . . . . † n ° 8 2 7 C a p ora l An d ré B RU N , 3 6 a n s, F on tvi e i l l e (1 3 ), ca rri e r C a p ora l Al b e rt G U I TO N , 2 9 a n s, Ai x­e n ­P rove n ce (1 3 ), cu l ti va te u r C a p ora l B e rtra n d B O U F FARTI G U E , 2 3 a n s , B a ch a s (3 1 ), cu l ti va te u r à Te rre b a s s e C a p ora l Lé on TE RRAS , 3 2 a n s, S a i n t Vi n ce n t­d e ­D u rfort (0 7 ), cu l ti va te u r à O l l i è re s C a p ora l Th é op h i l e H E B RARD , 2 2 a n s, F i a c (8 1 ). cu l ti va te u r. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . † n ° 5 6 3 C a p ora l P a u l B O U D I E RE , 3 7 a n s, La B ou rg on ce (8 8 ), cu l ti va te u r. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . † n ° 6 2 9 C h a s se u r M a ri u s U N AL, 2 7 a n s, Ag u e ss a c (1 2 ), cu l ti va te u r C h a s se u r Vi ctori n H E N RY, 3 9 a n s, F orca l q u i e r (0 4 ), cu l ti va te u r C h a s se u r G e rm a i n M ATH O N , 2 4 a n s, S a i n t­M on ta n t (0 7 ), cu l ti va te u r C h a s se u r F ra n çoi s G E RM AI N , 3 2 a n s, Vi e u g y (7 4 ), cord on n i e r. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . † n ° 3 0 6 C h a s se u r C yp ri e n B O G I RAU D , 4 0 a n s, S a i n t S yl ve s tre (0 7 ), cu l ti va te u r C h a s se u r An d ré RI B AU D O , 2 1

a n s, N i ce (0 6 ), cu l ti va te u r

C h a s se u r Lou i s ARTI LLAN , 3 8 a n s, S a i n t Rom a i n ­e n ­Vi e n n oi s (8 4 ), ca n ton n i e r à Va i s on C h a s se u r Ab e l VI N C E N T, 3 1

a n s, P e yrou s s e (0 5 ), ve rn i s s e u r à M a rs e i l l e

C h a s se u r Ai m é VI LLAU M E , 3 7 a n s, Ta i n tru x (8 8 ), cu l ti va te u r C h a s se u r Ad ri e n VI LLARE T, 2 2 a n s, S a i n t J e a n d e Ve d a s (3 4 ), cu l ti va te u r C h a s se u r P i e rre C ARRI E RE , 2 1

a n s, P i e rre fi ch e (1 2 ), cu l ti va te u r

C h a s se u r Lou i s C AM B O U LI VE S , 2 1

a n s , Arvi e u (1 2 ), cu l ti va te u r. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . † n ° 3 0 7

C h a s se u r J e a n ­B a p ti ste C O LLO M P, 3 0 a n s , Vi l l a rs B ra n d i s (0 4 ), cu l ti va te u r C h a s se u r D e n i s P E LI S S I E R, 3 0 a n s, Rob i on (0 4 ), cu l ti va te u r. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . † n ° 7 2 5 C h a s se u r E d ou a rd B O U RJ AC , 2 9 a n s, Au p s (8 3 ), cu l ti va te u r à S a l e rn e s C h a s se u r Lu ci e n LAC RO I X, 2 8 a n s, M on tl u çon (0 3 ), b ou l a n g e r à M a rs e i l l e C h a s se u r J os e p h M ALLE T, 3 5 a n s, I sol a (0 6 ), fe rb l a n ti e r à G ra s s e C h a s se u r F ré d é ri c B O U TO N N E T, 2 1

a n s , F l a vi n (1 2 ), cu l ti va te u r

C h a s se u r P i e rre TU AL, 3 7 a n s, P a ri s (1 4 e ), d om e s ti q u e . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . † n ° 3 0 8 C h a s se u r M a rce a u RI C H AU D , 3 2 a n s, Va l e n s ol e (0 4 ), cu l ti va te u r. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . † n ° 1 7 5 0 C h a s se u r E l i e G ALLU Y, 3 0 a n s, M on tp e za t (0 4 ), b e rg e r à S a i n t­J u l i e n ­l e ­M on ta g n i e r C h a s se u r P a u l C RO U ZE T C h a s se u r J os e p h C AZE N AVE C h a s se u r G u s ta ve (n om i l l i si b l e )

† : i n h u m é d a n s l a n é crop ol e d e M a u re p a s s u i vi d u n u m é ro d e l a tom b e

Pag e 20

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 1 9 1 6


a u cou rs d e l ' a tta q u e d u 2 4 a oû t 1 9 1 6

D écéd és d es s u i tes d e l eu rs b l es s u res :

S e rg e n t Lu ci e n D U C RO S , 3 6 a n s, M a rs e i l l e (1 3 ), p orte fa i x, † l e 2 4 a oû t p a r j u g e m e n t C a p ora l H e n ri C AS TE LAS , 3 1

a n s, P é l i s s a n n e (1 3 ), com m i s a u x é cri tu re s , † l e 2 9 a oû t

C a p ora l Al b e rt RO U G E O N , 3 3 a n s, S a i n t E ti e n n e ­l a ­C i g og n e (7 9 ), cu l ti va te u r, † l e 2 6 a oû t C h a s s e u r Re m y S E G ALA, 3 9 a n s, S t G e rm a i n ­d u ­Te i l (4 8 ), cu l ti va te u r, † l e 2 5 a oû t C h a s s e u r Ros i n M AS S E G LI A, 2 9 a n s, C l a n s (0 6 ), cu l ti va te u r, † l e 2 octob re 1 9 1 6 C h a s s e u r An toi n e D E N ARY, 2 9 a n s, Vi l l e n e u ve ­Lou b e t (0 6 ), cu l ti va te u r, † l e 2 8 a oû t

B l es s és :

C h a s s e u r E m i l e B O U ZAU QU E T

S ou s ­l i e u te n a n t M a rce l LAG N E AU

C h a s s e u r M a rce l J O U QU E T

S e rg e n t M a rti n P H I LI P

C h a s s e u r Lou i s LAU C O N

S e rg e n t P i e rre C AP P I N

C h a s s e u r H e n ri RO LLAN D

S e rg e n t Lou i s QU E I RO LO

C h a s s e u r B a p ti s te B O U RRE T

S e rg e n t M a ri u s B ARRAL

C h a s s e u r E rn e s t G AU TH I E R

S e rg e n t Lou i s P E D O YA

C h a s s e u r P i e rre B RU C H O N

S e rg e n t M a ri u s RAP O N

C h a s s e u r F ré d é ri c C H AB AU D

S e rg e n t Arth u r H E U LH ARD

C h a s s e u r P i e rre AVI T

C a p ora l J os e p h PAU LE AU

C h a s s e u r J os e p h RE M Y

C a p ora l F ortu n é B ARG E T

C h a s s e u r Au g u s te J O U VE

C a p ora l F é l i x O TTAVI AN I

C h a s s e u r Au g u s te AZAM

C a p ora l J os e p h G AS S E U D

C h a s s e u r M a ri u s E S C ALI E R

C a p ora l J e a n ­B a p ti ste N O VARE S E

C h a s s e u r J os e p h S ATTI

C h a s s e u r Lé on D E LO RD

C h a s s e u r J e a n S AP PA

C h a s s e u r M a rc B O U S QU E T

C h a s s e u r F ra n çoi s LI AU TAU D

C h a s s e u r Lou i s B O N N E TO

C h a s s e u r E d ou a rd G O G U E Y

C h a s s e u r Al p h on se ARN AL

C h a s s e u r P a u l B RO U I LLE T

C h a s s e u r Lu ci e n F LE U RY

C h a s s e u r C h a rl e s B LAN C

C h a s s e u r E rn e st FAB RE

C h a s s e u r Lé on RE B O U L

C h a s s e u r Au g u ste VE RN H E T

C h a s s e u r J é ré m i e P O U LE N ARD

C h a s s e u r Al fre d RE YN I E R

C h a s s e u r B a rth é l é m y RO U X,

C h a s s e u r E m i l e TI C H E T

C h a s s e u rs M a rc LE G RAL

C h a s s e u r J e a n n i n B O YE R

C h a s s e u r F ra n çoi s G AM B ARE LLI

C h a s s e u r H e n ri RO C H E

C h a s s e u r Ad ol p h e M I S TRE

C h a s s e u r D a n i e l AN TE RI O N

C h a s s e u r G u s ta ve D O LE RI S

C h a s s e u r Lou i s M ARTE LLE T

C h a s s e u r J u l e s D U P RE

C h a s s e u r M i ch e l M AN S O U RA

C h a s s e u r J os e p h TH I VI N

C h a s s e u r P a u l G U E RI N

C h a s s e u r J e a n B O U ZO M

C h a s s e u r F é l i ci e n M AU RE L

C h a s s e u r An toi n e O LI VA

Ch asseu r Pau l B ON

C h a s s e u r P i e rre C H AI X

C h a s s e u r F ortu n é M AU S O N

4 4 m orts e t d i sp a ru s ­ 6 3 b l e ssé s

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 2 0 1 6

Pag e 21


Le " C h e m i n cre u x"

Le ch a m p d e b a ta i l l e

D e va n t M a u re p a s

La tra n ch é e a l l e m a n d e " M ossou l "

Vi s i te d e C l é m e n ce a u à M a u re p a s Vi l l a g e d e M a u re p a s (1 0 octob re 1 9 1 6 )

Pag e 22

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 1 9 1 6


M a u re p a s L'église

Le village

u n " vi l l a g e e ffon d ré "

"Je dépliais ma carte et fis le point : je me trouvais au sudouest de Maurepas, dans le ravin du Tortillard. J'étais fixé ; je pouvais analyser le paysage. Il était effrayant. La dévastation, dont j'avais noté quelques détails autour de moi, s'étendait sur tout le terrain à perte de vue, et répandait sur ce coin de France une désolation intense qui étreignait le cœur. Partout le chaos ; partout le sol fouillé, retourné, constellé d'innombrables cratères. Ce sol qui autrefois, à pareille époque, était revêtu d'une belle verdure, était couvert d'un manteau blanc, d'un blanc douloureux, lugubre, désolant. Çà et là des débris informes gisaient, qui relevaient encore cette tristesse poignante : des rails fracassés se tordaient vers le ciel ; là-bas, à quelque 400 mètres, à l'emplacement de la halte, deux wagons en détresse, bousculés, éventrés ; de la halte elle-même, plus rien, pas même un monceau de briques ; plus près, des caissons boches démolis, des abris effondrés d'où M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 2 0 1 6

surgissaient des poutres fracassées et qui exhalaient l'odeur répugnante de cadavres. Et lorsque je levai les yeux du fond du ravin pour porter le regard au loin, la même désolation s'appesantit, encore plus lourde. En face, le Bois Neuf, ou plutôt ses débris : des troncs ébranchés qui se dressaient nus comme des cierges, des arbres fracassés, dont la partie supérieure pendait vers le sol, en lanière de fouet ; sur le sol, un amas inextricable de menus branchages ; et, sur cette destruction, pas une feuille! A gauche, dans le lointain, sur le flanc d'un mamelon, étaient accumulées les ruines du village d'Hardecourt : plus un toit, plus un pan de mur. Seul, un bouquet de « cierges » désolés attestait qu'autrefois un village riant avait égayé cette morne solitude. Vers l'est, coupée à mi-côte par des tranchées où mon bataillon se tenait en réserve, une hauteur puissante barrait l'horizon : c'était le plateau de Maurepas, de tragique mémoire! Pour le moment, j'ignorais encore la terrible réalité et je cherchais des silhouettes de maisons.

Hélas, du village, comme de celui d'Hardecourt, il ne restait plus que des bouquets de "cierges", dressés sur un désert. Le long de la lisière, courait un énorme talus, coupé aux deux bouts par un plan incliné. "Une redoute boche !" murmurai-je, l'esprit assailli par le souvenir de la résistance désespérée de l'ennemi. "Mais non, regardez bien", me dit un camarade mieux renseigné. J'inspectai à la jumelle et demeurai interdit : le talus n'était qu'un immense amas de décombres ; c'était le village effondré." Témoignage extrait de l'article "Mon régiment

dans

la

bataille

de

la

Somme" paru dans la revue Etudes (1 91 7/01 ­ 1 91 7/03)

Maurepas Photographie allemande prise en 1 91 5

Pag e 23


La re con stru cti on

E n 1 9 1 9 , l e s h a b i ta n ts d e M a u re p a s d é cou vre n t l e u rs h a b i ta ti on s ra m e n é e s a u n i ve a u du

s ol .

Le u r vi l l a g e fa i t p a rti e d e s 1 0 4 vi l l a g e s ra s é s p a rm i l e s 3 8 1

l a S om m e . re fa i re , par

La

375

ou vra g e s

l 'en n em i

n a ti on a l e ou

vi l l a g e s d é tru i ts d e

zon e rou g e d e s com b a t e s t te l l e m e n t d é va s té e (8 2 8 8 km

d an s un

d ' a rt à

son

re con s tru i re ,

re p l i ,

...)

sa n ctu a i re d u

que

50

ce rta i n s

sou ve n i r.

000

a rb re s

fru i ti e rs

e n vi s a g e n t

L' e ffi ca ce l oi

du

m êm e

1 7 a vri l

s ci é s d 'en

d e rou te s à

ou

fa i re

d yn a m i té s une

forê t

1 9 1 9 fi n i ra p a r rè g l e r

l ' é n orm e m a sse d e s d ossi e rs d e s d om m a g e s d e g u e rre . Au d é p a rt i l y a u ra u n e é n orm e va g u e d e s ol i d a ri té m a i s e l l e s ' e s s ou ffl e ra ra p i d e m e n t. Fi n al em en t i l et

re m e ttre

fa u d ra en

pl u s

cu l tu re ,

de 1 0

1 0

an s

an s

p ou r d é s ob u s e r,

de

vi e

en

d é b l a ye r,

p rovi s oi re

et

te rra s s e r,

s ou ve n t

en

re con s tru i re l u tte

con tre

l ' Ad m i n i s tra ti on !

Pag e 24

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 1 9 1 6


Le s p é l e ri n a g e s a u x ré g i on s d é va sté e s À

l ’ i ssu e

du

con fl i t,

p è l e ri n a g e s d é va s té e s

au x se

d e vi e n n e n t

m u l ti p l i e n t de

re m è d e s

d es

ré g i on s et

vé ri ta b l e s

con tre

tra u m a ti s m e

col l e cti f

p roch e s

s ol d a ts

d es

ce p ou r

l es

d é cé d é s,

ce l l e s d e l ’ E s t e t d u N ord .

é tra n g e rs

A

ra va g e s

p a rti r

un «

B a ta i l l e

de

l es

m a rd i s,

a l l e r­re tou r

a u ss i d es

d es

h om m e s

fe m m e s

" tou ri s te s ci rcu i ts son t à

de

et

voya g e s

et

ch e m i n

d eu x

g u e rre " .

Des

pl u s

d es

en

d es d es de

s é j ou rs

F ra n ce

l ’ é tra n g e r,

a ssoci a ti on s ,

de

d es

m êm e

de

com m e

cu ri e u x,

org a n i s é s ,

p a rti r

m ai s

par

et

d es

a g e n ce s

de

com p a g n i e s fe r,

d on t

con ce rn é e s

l es son t

bi l l et

1 91 9, i n ti tu l é

S om m e

Ils

et

p a rti r

pl u s

coû te

l 'am pl eu r la

d es

F ra n ce

a

su bi s.

» l es du

que

l es

M on td i d i e r,

P é ron n e , en

de que

p a rcou re n t

P a ri s ,

Ch au l n es, M a u re p a s

à

1 91 9

d i m a n ch e s .

1 921 ,

la

pu i s

octob re

d é cl a ré

en

juin

d i m a n ch e s

p ou r q u i u n voya g e p a r a n e st g ra tu i t

1 5

p è l e ri n a g e

ci rcu l e

9

du

dix

C l é ry,

h e u re s .

e n tre

1 8

Le et

3 5 F ra n cs . Ces

ci rcu i ts

tou ri s ti q u e s

l e s ré g i on s d é va s té e s e n et

p rol on g é s

von t

en

e xe rce r

i n fl u e n ce

su r

F ra n ça i s

m ai s

d an s tra i n

a u tom ob i l e

une

g ra n d e

l ’ op i n i on au ssi

d es d es

U n té m oi g n a g e d e l a b a ta i l l e : l e re l i e f

a va n t 1 9 1 4

Maurepas en 1 911

Le terrain a été "raboté" par endroit de 6 mètres (à l'image de ce calvaire passé de 99 m à 93 m d'altitude !) a p rè s 1 9 1 8

Maurepas en 201 6

M a u re p a s ­ 2 4 a oû t 2 0 1 6

Pag e 25


SOM M E (. . . )

La re con n a i s s a n ce d ' u n ch e f Lors

du

ra p p ort

As s e m b l é e

p ré s e n té

g é n é ra l e

à

s on

du

28

d é ce m b re

1 91 9,

E ti e n n e

E s tra n g i n ,

d e ve n u

s e cré ta i re

g é n é ra l

de

syn d i ca ts de

l ' U n i on

a g ri col e s

P rove n ce ,

l ' i n te n ti on

pen sai t

d e s Al p e s

d é cl a ra i t

de

a ffi rm a i e n t

d es

à

ce u x

que

le

q u 'à

qui

p a ys a n

s on

et

ne

i n té rê t

Vieux territoriaux, réservistes, jeunes

classes,

toutes

les

régions

confondus

dans

sentiment ;

non

enthousiasme récits

de

remplis,

dans

cet

factice

dont

les

journaux bien

étaient dans

Vous

connaissez

les

statistiques des mobilisés. Elles

France

Ces

admirables

armées.

belles

un

soit figures

de

si simples,

dans

leur

et je ne puis accepter que l'on

singulière.

désespère

Parmi

ceux

qui

de

montré

elle ? On trouvait 70, 80, 90 %

les plus tragiques,

de

sens,

terriens,

dans

les

unités

dans

ceux

"tenaient les lignes", quelle est­

Quand il fallait remuer le

sol

morale

d'instinct

lourdement

général.

chargé,

faire

tant

qui

pour se fortifier, quand il fallait, d'interminables relèves dans la

les

Le s b a tte ri e s a b oi e n t. Le s p roj e cti l e s sci e n t l ' a i r, M i a u l e n t, p a sse n t e n si ffl a n t.

qui

fait

E xp l ose n t e n l on g , e n l a rg e . C ou ch é s d a n s l e ch e m i n

ont

cre u x, d e s sol d a ts b l a sé s,

circonstances

é re i n té s.

tant de bon

d'intelligence,

d'initiative,

combattantes.

tre m b l e . D e p u i s d e s b oi s

accomplissement silencieux du

proportion s'accroît d'une façon

l'Avant,

Tou t b ou i l l on n e e t tou t

si

devoir, je les salue avec respect

vers

à g a u ch e .

pas

la

poussez

e xp l osi on s, i n n om b ra b l e s. S u r d e s ki l om è tre s, à d roi te ,

p i l on n é s, ch a u ve s.

paysans­soldats,

vous

fu m é e , sa l e té . Ç à e t l à d e rou g e oya n te s

écrasée.

parlent de 55 % de ruraux aux Mais si, parmi ces mobilisés,

ne

La te rre j a i l l i t. Tou t n ' e st q u e

On se

battait parce qu'il fallait tenir et la

re g a rd ,

même

pas

mais

Au ssi l oi n q u e p orte l e

de

étaient

un

esprit de devoir foncier.

que (. . . )

paysans

parce qu'il fallait se battre, pour

p e rs on n e l :

­

La p l a i n e s' e n rou l e .

de le

profond

d'esprit l'autorité chef, du

C ou ve rts d e cra sse . B l e u i s, d é com p osé s,

tant bien

Te n a n t d a n s l e u rs m a i n s a m a i g ri e s, j a u n i e s,

(. . . )"

Le s a rm e s rou i l l é e s, sou s l e

boue, dans les gaz, sous les tirs de

barrages,

le

paysan,

plus

p ot g ri s, l e ca sq u e d ' a ci e r, Ag on i sa n ts, re g a rd e n t e n

que tout autre était là ; quand il fallait

tenir

des

semaines,

jours

et

sous

des les

a rri è re , d ' où i l s vi e n n e n t. (. . . ) Wi l h e l m KLE M M

bombardements, quand il fallait

(G e sa m m e l te Ve rse )

briser les attaques allemandes ; quand

il

fallait

surtout,

la

baïonnette haute ou la grenade à

la

main,

"sortir" grande

...

sauter c'était

majorité,

le

parapet,

encore, des

en

paysans

qui étaient là pour attaquer. Tenacité, simplicité hardiesse, froid ;

des

travail

dans coup

le

acharné, courage,

d'oeil,

milliers

sang­

d'exemples

de ces belles qualités militaires pourraient être cités.

Ce document a été réalisé grâce à Bernard et Marc ESTRANGIN (fi l s

d ' E ti e n n e

et

Père Bruno HORAIST La

M ad el ei n e

à

Roselyne DUGAND de

p e ti t­fi l s

E S TRAN G I N ),

G a b ri e l l e

de

P a ri s),

à

(p e ti te ­fi l l e

B ARRAL

ve u ve

d ' H i p p ol yte

N O U G ARE D E )

Nicolas

GRAFF

d ' H e n ri M I C O U LE T)

au

(cu ré

et

à

(p e ti t­fi l s


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