Jardin
i re a f r i Savo S D’ AUT
R E F OI
Un beau jardin où se mêlent fleurs, fruits et légumes est le produit de mille et un petits savoir-faire que chacun accommode à sa façon. Sabine Jeannin nous fait ici partager l’expérience de ses grands-mères. Et elle nous dévoile secrets et astuces glanés ici et là dans d’anciens numéros de l’Hebdo Rustica et autres recueils de jardinage. Elle nous invite à la suivre pour retrouver le goût de la nature au rythme des saisons et faire de notre jardin un lieu d’échanges.
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JARDIN, SAVOIR-FAIRE D’AUTREFOIS
Sabine Jeannin
n i d r a J
e r i a f Savoir EFOIS R D’ AUT
Une mine d’astuces pour réussir son jardin
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Sommaire Avant-propos ........................................................................................ 6
Au jardin d’ornement ..................................................... 9 Fleurs de toujours ........................................................................... 10 Rose, la reine du jardin ................................................................. 19 Sous la tonnelle… ............................................................................ 25 Les arbustes, écrin du jardin ...................................................... 29 Le joli coin des fleurs à couper................................................... 33 Arrière, mauvaises herbes ! ........................................................ 40 L’eau au jardin .................................................................................. 46 Les frimas de l’hiver ....................................................................... 51
Au jardin potager ............................................................. 57 Un potager à l’ancienne ................................................................ 58 Un potager fleuri ............................................................................. 63 Bonnes herbes ................................................................................... 68 Légumes oubliés et variétés anciennes ................................... 72 Suivre les rythmes naturels ........................................................ 77 Les potions magiques .................................................................... 83 Amis et ennemis du jardinier ..................................................... 89 Astuces de vieux jardiniers ......................................................... 95
Au verger .................................................................................. 103 Les baies et les petits fruits ....................................................... 104 À l’ombre de la treille ................................................................... 108 Généreux arbres fruitiers .......................................................... 112
Dans les recoins du jardin ................................... 121 Le bac à compost ............................................................................ 122 La cabane à outils .......................................................................... 127 Au poulailler.................................................................................... 132 Au clapier ......................................................................................... 136 Index ................................................................................................... 140 5
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Avant-propos Dans nos jardins d’enfance Nous avons tous dans le cœur un jardin d’enfance où fleurissent les souvenirs, que ce soit le jardin de nos grands-parents, oncles, tantes ou parrains ; un jardin où nous folâtrions avec une ribambelle de cousins entre les allées de dahlias et de gueules-de-loup, à moins que nous ne jouions à cache-cache derrière les troncs d’arbres fruitiers, la cabane de jardin ou le poulailler (qui était idéal pour semer les petits frères) ! Dans mes souvenirs, il y a deux jardins, celui de ma grand-mère Lucie et celui de ma grand-mère Renée. Lucie vivait en Bourgogne aux étés chauds et aux hivers rudes, Renée bénéficiait de la douceur du Gers. Leurs jardins étaient différents, leurs plantations aussi, bien évidemment, conséquences du climat et de leurs propres goûts. Nous allions, di à l’ t ma sœur et moi, pendant les vacances, d’un jjardin l’autre, ivres d’espace, de liberté et d’odeur de fleurs, gourmandes de fruits juteux dérobés sur les arbres. Nous suivions nos grands-mères au potage potager, portant les paniers, croqua quant dans les tomates bien ro rouges ou bien grognant un pe peu en cueillant les haricots verts et les petits pois ! Par leurs gestes répétés saison après saison, par 6
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lleurs réflexions agacées ou émerveillées sur l’échec ou la réussite de leurs cultures, Renée et Lucie ont cultivé en nous ce jardin d’enfance qui ne nous a plus quittées, cet amour des beaux produits de la terre poussant lentement parmi des débauches de fleurs. Avant même d’intégrer lla rédaction de Rustica, il y a bientôt un quart de siècle, je connaissais ce journal depuis toujours. Lucie y était abonnée née depuis la fin des années 1920. Les numéros s’empilaient dans sa chambre, puis au grenier. Elle les annotait de sa belle écriture penchée, découpait parfois un article qu’elle collait dans un cahier à petits carreaux, « son cahier des Merveilles ». Là, autant que dans son expérience de jardinière, elle puisait les conseils et les astuces qu’elle distribuait généreusement autour d’elle. Ce petit livre rend compte du dialogue de mes grands-mères avec la nature, dans un temps pas si lointain où le parfum des lilas annonçait le retour du printemps et avertissait que le moment était venu de planter les pommes de terre… Il vous emmène sur les ailes du souvenir, à la rencontre de Lucie et de Renée, lorsque le jardin avait un rythme et des rites. Sabine Jeannin
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Jardin Au
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Ceints dans un espace clos, les jardins d’autrefois mêlent dans un joyeux fouillis les plantes faciles à cultiver et le plus souvent odorantes. Ils sentent la rose ou la pivoine, le réséda ou le lilas, le seringat ou la lavande. Mais l’allure sauvage n’est qu’apparente, car les bordures géométriques des massifs de fleurs, le tracé fonctionnel du jardin, l’emplacement des arbustes et la distribution des différents espaces, bien pensés, sont sous la surveillance du maître ou de la maîtresse de maison.
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Fleurs de toujours Les jardins d’antan débordent de fleurs faciles à cultiver, au charme un peu sauvageon et à la floraison généreuse, qui refleurissent toutes seules d’une année à l’autre. Y poussent l’iris, la pivoine, le dahlia, l’ancolie, la violette, la julienne, le lupin, la giroflée, la pâquerette, le muguet, la rose de Noël, etc. Replantons-les pour remonter le temps !
On recherchait les floraisons abondantes Parmi les fleurs dont on ne s’occupait presque pas, mais qui tenaient une place importante au jardin, on aimait : • le myosotis, qui fleurit d’avril à fin juin, qui se plaît en tout sol et qui se ressème abondamment ; • l’œillet de poète, idéal pour les larges bordures, qui se cultive en bisannuel, mais se ressème. En fleur de mai à juillet, il est très florifère ; • la pâquerette, indispensable aux bordures et aux potées, qui a une longue floraison printanière, de mars à juin.
On aimait les fleurs odorantes Dans les jardins d’autrefois, on appréciait les senteurs envoûtantes de la julienne des dames à la floraison courte, mais qui se ressème facilement, 10
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et que l’on plantait près de la maison pour profiter de son parfum plus intense le soir, lors des veillées sur la terrasse. Celles aussi des héliotropes dont on obtenait une floraison plus dense en pinçant les tiges et en supprimant une partie des premières fleurs. Parmi les classiques fleurs de grand-mère parfumées, on trouvait la giroflée ravenelle, qui aime le soleil et les sols bien drainés, les œillets mignardises au parfum poivré, les pois de senteur qui s’enroulent joliment autour des grillages à camoufler…
IT C E QUE FAISARE LUCIE È M A G RA N D - M
On achetait autrefois rarement des graines. Lucie récoltait les graines des végétaux qui avaient bien poussé, donné de belles fleurs ou de beaux fruits, et elle les ressemait l’année suivante. Par souci d’économie et aussi par plaisir de retrouver les fleurs qu’elle avait appréciées. Récoltez les graines sur plusieurs plants, et uniquement sur des pieds sains et vigoureux. Laissez-les sécher au soleil pendant environ 3 jours, puis stockez-les sur une bonne couche de papier journal, dans la cabane de jardin. Rangez-les ensuite dans des enveloppes en papier en n’oubliant pas de noter avec précision la fleur, la variété, la date de récolte, la couleur, etc.
Elles poussent toutes seules ! Nos grands-parents appréciaient fort les fleurs que l’on semait une fois pour toutes et qui se débrouillaient ensuite toutes seules. Parmi ces fleurs indépendantes, vous pouvez choisir la capucine, la bourrache, l’ancolie, la rose trémière*.
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Atout cœur ! Autres fleurs vedettes des jardins d’autrefois que l’on associait souvent avec des fougères et des hostas : les dicentras ou cœurs de Marie. Petits cœurs pendants le long de tiges courbées, ils comptent parmi les plus gracieuses et les plus faciles des fleurs printanières, à condition de les installer dans un sol frais et humifère, mais aussi d’éviter les excès d’eau en hiver et de soleil en été. Accompagnés de tulipes, narcisses ou myosotis, ils habilleront le pied des arbustes au printemps.
Pincez le dahlia ! Le dahlia était roi des jardins à la fin de l’été. Ce qui plaisait beaucoup, c’était d’obtenir, par un simple éboutonnage, des fleurs énormes qui pouvaient atteindre jusqu’à 30 cm de diamètre. Pour favoriser le grossissement du bourgeon terminal, il faut pincer les bourgeons latéraux des dahlias en cours de végétation.
La bonne profondeur Nos grands-parents connaissaient parfaitement la profondeur requise par les bulbes (narcisses, jonquilles, tulipes, jacinthes, etc.). Pour bien fleurir, ils doivent être enterrés à une profondeur équivalente à deux fois leur hauteur. En revanche, les lis doivent être enterrés plus profondément, à trois ou quatre fois leur hauteur, excepté le lis de la Madone qui sera mis à fleur de terre.
C E QU E FAISA IT
M A G RA N D - M È R E R E N É E Renée aimait à cacher certaines parties du jardin peu agréables à voir par des tournesols, hauts et décoratifs. Pour masquer leurs tiges dénudées, elle semait, en avant des tournesols, une ligne de cosmos, ce qui donnait un écran de fleurs astucieux et lumineux.
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L’avantage que tout amateur peut tirer de l’arrachage annuel des oignons de tulipes, quand leur végétation aérienne a cessé, c’est la possibilité de multiplier ces plantes florales dans une intéressante proportion. Si l’on en a planté 100 à l’automne, on en trouvera ensuite de 350 à 400 plus ou moins gros. Il faut les séparer les uns des autres et les ranger par catégorie : les gros et les moyens, qui peuvent fleurir, les petits, trop faibles pour fleurir, qui seront à planter en pépinière dans l’extrémité libre d’une planche de potager. Extrait de Rustica, 1946.
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Citation
« Un jardinier […] prépara le sol à recevoir au printemps des pivoines, des rosiers, des lis, des graines de pieds-d’alouette et de volubilis, des boutures d’œillets et de géraniums. » Émile Zola, La Conquête de Plassans.
Muflier par-ci, muflier par-là ! La belle gueule-de-loup, facile à cultiver, fleurit abondamment de juillet à octobre. On la laissait se ressemer toute seule en la laissant aller à graines. Même si les nouvelles fleurs n’avaient pas toujours le même aspect ni la même couleur que la plante mère, c’étaient toujours de jolies fleurs obtenues économiquement, qui plaisaient soit en vase pour les variétés hautes, soit dans les massifs, les bordures et les jardinières pour les variétés demi-naines ou naines.
Humbles violettes La violette était la fleur préférée de ma grand-mère Renée. Elle avait réservé un coin du jardin à sa fleur fétiche. Elle en cueillait souvent un petit bouquet qu’elle entourait de deux feuilles d’hortensia et qu’elle disposait sur la commode de sa chambre. Elle nous disait qu’« il faut vaporiser les fleurs, car la violette ne boit pas par la tige ». 13
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Le muguet poussait dans les plates-bandes, au nord de la maison, ombragé par les hortensias. On ddivisait les touffes en automne pour obtenir plus de brins fleuris au printemps suivant, et on apportait du compost sur le pied qui disparaît complètement à la mauvaise saison. Les anciens disaient que lorsque le muguet est en fleur, on peut mettre en place les plants de tomates au potager.
Les iris rient du temps Une variété d’iris qui plaisait était multipliée à l’infini. Cela ne coûtait rien : il suffisait de les diviser. On agissait de même lorsqu’ils fleurissaient moins, car c’était le signe qu’ils avaient épuisé les éléments nutritifs du sol et nécessitaient d’être régénérés (environ tous les 3 ou 4 ans). Le plein été, jusqu’à la fin août, est la bonne période pour les rajeunir, car la terre est chaude, ce qui est idéal pour ces plantes à rhizome qui craignent par-dessus tout les excès d’humidité.
Caprices de pivoines C’est une des stars du jardin, mais elle a toujours eu la réputation d’être une plante difficile. Une fois installée, la pivoine déteste être déplacée, au risque de ne plus fleurir. Maintenez un paillis permanent de fumier bien décomposé ou de compost à son pied. À savoir : les pivoines redoutent les sols trop humides, aussi vous devez disposer, au fond du trou de plantation, un lit de graviers ou de tuiles concassées. 14
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Le quatuor de l’été Dahlias, roses d’Inde, zinnias et tagètes sont des vedettes robustes et florifères du jardin d’autrefois. Ces fleurs exotiques formaient un parterre accueillant à l’entrée de l’enclos familial. Les roses d’Inde doivent être largement espacées (au moins 60 cm) pour leur permettre d’atteindre la forme et l’aspect d’un bel arbuste. Les zinnias, de culture facile, se placent à 0,50 cm les uns des autres pour former un séduisant petit massif. Quant aux vigoureux tagètes, ils offrent la particularité, grâce à leur réseau très serré de fines racines formant une motte compacte, de pouvoir être déplacés, transplantés en toute période, même celle de leur floraison !
LU DANS RUSTICA Lorsque pâlissent les “ roses, après le déclin des dahlias ou des œillets, apparaissent les merveilleux chrysanthèmes pour fermer un cortège si timidement préludé avec la violette et les primevères, dix mois plus tôt. Rustica, mai 1945.
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Deux interventions sont indispensables pour obtenir ces grosses fleurs échevelées qui font la fierté du jardinier : la suppression des pousses qui se développent à la base de chaque feuille et l’esseulage du bourgeon terminal (supprimez tous les boutons floraux à l’exception du plus gros ; si vous voulez avoir deux fleurs, moins grosses, conservez deux boutons).
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Graines de capucine au vinaigre Dès que les fleurs allaient s’effeuiller, Lucie prélevait les graines avant qu’elles ne soient trop dures. Comme ma grand-mère, mettez les graines dans un récipient (de verre ou de grès), et couvrez-les de bon vinaigre d’alcool bouillant. Salez légèrement, recouvrez d’un couvercle, et laissez macérer 24 heures. Le lendemain, égouttez les graines, et tassez-les dans des petits pots. Portez à nouveau à ébullition le vinaigre recueilli, et faites-le réduire. Laissez-le refroidir et versez-le sur les graines. Fermez et conservez deux mois avant de consommer vos câpres « fantaisie ». Pour un résultat plus fin et plus délicat, procédez de la même manière en utilisant des bourgeons ou des boutons de capucines, encore petits et fermés.
Les feux des capucines Lucie semait des capucines naines dans les pots qui ornaient sa terrasse. Elle aimait accueillir ainsi ses visiteurs. Elle avait trouvé une astuce pour éviter de lutter contre les mauvaises herbes dans un coin du jardin : elle avait semé, en couvre-sol, des capucines grimpantes dont le feuillage exubérant éliminait impitoyablement les mauvaises herbes.
Couleurs d’anémones C’est entre septembre et avril qu’il faut planter les anémones. Avant de planter les bulbes à l’aspect fripé, faitesles tremper au minimum 2 heures dans de l’eau afin de les réhydrater. Creusez sur 8 cm environ, et mettez au fond du trou une couche de terreau. Orientez le bulbe de préférence la partie la plus creuse vers le haut.
À la sauge ! Ma grand-mère Lucie avait un petit faible pour les sauges. Elle nous répétait souvent ce dicton, « Qui a de la sauge dans son jardin, n’a pas besoin de médecin », en nous servant des tisanes de cette plante. Toutes les sauges sont de 16
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belles plantes à massif, et les espèces vivaces sont idéales pour les lieux secs et très ensoleillés, de préférence en situation abritée (beaucoup sont sensibles au froid). Les annuelles sont irremplaçables, dans les plates-bandes, pour leurs coloris soutenus et la longue durée de leur floraison. La sauge sclarée et la sauge officinale, cultivées par ailleurs comme plantes aromatiques, sont décoratives dans les jardins sauvages.
La division des lavandes Il n’y avait pas de lavande chez notre grand-mère du Gers. Ni chez celle de Bourgogne. Mais lorsque Renée nous emmenait chez Mado, sa meilleure amie, qui avait une maison près de Grignan (Drôme), nous courions dans un jardin ourlé de lavandes. Parfois, nous étions là, à la fin de l’été, lorsque Mado divisait les touffes, après la taille. Pour séparer les tiges lignifiées, elle utilisait un sécateur et pralinait les racines pour favoriser la reprise. Elle replantait en espaçant les plants de 40 à 50 cm et arrosait régulièrement jusqu’aux premiers signes de redémarrage de la végétation.
L’hiver en fleurs Il n’était pas question que le jardin soit nu entre novembre et mars ! Aussi de nombreux petits arbustes bas persistants (skimmias, mahonias, viornes, etc.) et des vivaces étaient
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Au pied des phlox, Lucie versait des cendres de bois blanc qu’elle enfouissait dans la terre. Elle nous disait toujours que les cendres avaient la faculté d’accentuer le coloris des fleurs. Petit inconvénient des cendres de bois : leur richesse en potasse favorise également la germination de mauvaises herbes dont le mouron. Il faut donc veiller et les arracher !
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