La restructuration des espaces commerciaux populaires à Oaxaca de Juarez, Mexique

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MÉMOIRE DE MASTER 2 PRESENTÉ PAR FLORENT MASERO

MAITRE DE STAGE : RAUL CORZO JIMENEZ SOUS LA DIRECTION DE RAFFAELE CATTEDRA

2009


A. B. C.

Un territoire confronté à de nouvelles problématiques urbaines et à un contexte sociopolitique fragile Morphologie urbaine Précisions sur le cadre réglementaire

12 19 25

A. B. C. D.

Définitions entourant l’ambulantage Etat des lieux Projet de relocalisation des vendeurs ambulants émis par la Municipalité Les enjeux d’une politique publique volontariste

31 37 53 56

A. B. C. D.

Histoire du site Etat des lieux Projet de relocalisation de la zone bodegas Projet de requalification du territoire de la Central de Abastos

74 77 88 96

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Mes remerciements vont tout d‟abord à Raffaele Cattedra qui m‟a conforté dans mon souhait de réaliser mon stage au Mexique. J‟ai particulièrement apprécié la pertinence de ses conseils et l‟intérêt qu‟il a porté à mon travail tout au long de la réalisation de ce mémoire. Je suis infiniment reconnaissant à Raúl Corzo Jiménez, responsable de la Coordination du Développement Urbain, Œuvres Publiques et Ecologie de la Municipalité de Oaxaca, pour avoir accepté spontanément ma candidature et pour s‟être assuré du bon déroulement du stage. Mes remerciements s‟adressent ensuite à l‟ensemble de l‟équipe qui m‟a accompagné tout au long de mon stage, avec une pensée particulière pour mes collègues de bureau avec lesquels j‟ai passé quatre mois dans une ambiance très conviviale. Ils m‟ont permis de me familiariser avec mon nouvel environnement et de démystifier le monde professionnel de l‟urbanisme. Je tiens particulièrement à remercier Oscar Salas Fonseca qui m‟a apporté une aide appréciable, notamment sur les questions politiques. Je voudrais également remercier tous les acteurs rencontrés durant mon stage. Ils ont su rendre leurs interventions particulièrement agréables et enrichissantes. Je remercie notamment l‟équipe de chercheurs du CEMCA qui m‟a fourni de précieux documents. Enfin, cette expérience très enrichissante qui clôture mes études universitaires n'aurait pas pu être réalisée sans le soutien quotidien de ma famille et celui de mes amis.

Merci à vous tous.

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Le stage de Master 2 a été effectué au sein du service de la Coordination du Développement Urbain, Œuvres Publiques et Ecologie de la municipalité de Oaxaca de Juárez, Mexique. Cette structure, qui peut être assimilée à un important service municipal de l‟urbanisme, est dirigée depuis 2008 par Raúl Corzo Jiménez. Intégré au sein d‟une équipe constituée de quatre jeunes architectes spécialisés en urbanisme, j‟ai eu pour mission de mener une réflexion sur deux espaces commerciaux populaires de Oaxaca de Juárez : la Calle Las Casas et la Central de Abastos. Ma mission prévoyait la réalisation d‟un diagnostic territorial ainsi que la formulation de propositions concrètes visant à requalifier ces deux espaces urbains dégradés. Les actions proposées devaient aller dans le sens d‟une redynamisation commerciale des deux secteurs étudiés et d‟une revalorisation de l‟image urbaine. L‟originalité du stage réside dans son caractère culturel. En effet, le directeur de mon service d‟intégration m‟a particulièrement encouragé à porter un regard extérieur sur les territoires étudiés. Ces quatre mois de stage ont permis un échange permanent d‟expériences et de regards différents sur les projets urbains et plus largement sur la conception de la ville et sur les manières de « faire la ville » en Amérique et en Europe.

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APPO: Asamblea Popular de los Pueblos de Oaxaca BANOBRAS: Banco Nacional de Obras y Servicios Públicos BRT: Bus Rapid Transit CANACINTRA: Cámara Nacional de la Industria de Transformación CEMCA : Centre d‟Etudes Mexicaines et Centraméricaines CGDUOPE: Coordinación General de Desarrollo Urbano, Obras Públicas y Ecología CONACCA: Confederación Nacional de Agrupaciones de Comerciantes de Centros de Abastos CONAPO: Consejo Nacional de Población DGCH: Delegación General del Centro Histórico FFMIN : Fédération Française des Marchés d‟Intérêt National FOVISSSTE: Fondo de la Vivienda del Instituto de Seguridad y Servicios Sociales de los Trabajadores del Estado ICOMOS: International Council on Monuments and Sites INAFED: Instituto Nacional para el Federalismo y el Desarrollo Municipal INAH: Instituto Nacional de Antropología e Historia INEGI: Instituto Nacional de Estadística, Geografía e Informática INFONAVIT: Instituto del Fondo Nacional de la Vivienda para los Trabajadores LAZCAR: Asociación Civil Lázaro Cárdenas del Río LEMA : Laboratoire d‟Etudes Méthodologiques Architecturales MIN : Marchés d‟Intérêt National PAN: Partido de Acción Nacional PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement PRD: Partido de la Revolución Democrática PRI: Partido Revolucionar Institucional SECOFI: Secretaría de Comercio y Fomento Industrial SEDESOL: Secretaría de Desarrollo Social SEGOB: Secretaría de Gobernación UNAM: Universidad Nacional Autónoma de México UNESCO: United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization

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Comme l‟ont montré Isabelle Berry-Chikhaoui et Agnès Deboulet [2000], tous les citadins façonnent, à leur manière, le paysage urbain. Cette présente étude est centrée sur deux territoires emblématiques et indissociables du paysage urbain de Oaxaca de Juárez : la Calle Las Casas et la Central de Abastos. Sur ces deux espaces dévolus aux activités commerciales, les pratiques qui s‟y déroulent démontrent à quel point l‟espace n‟est pas un objet figé. Au contraire, celui-ci est en perpétuelle recomposition. Le premier territoire d‟étude, la Calle Las Casas, est une rue commerçante où se développe, jusqu‟à son paroxysme, une pratique territoriale originale : l‟ambulantage. Ce néologisme, qui est en fait un mexicanisme1, a été proposé par Jérôme Monnet. Selon cet auteur, l‟ambulantage désigne les activités commerciales qui se déroulent dans les espaces d‟accès public (rue, place, transport collectif, etc.). Il s‟agit donc d‟un service rendu par des vendeurs ambulants à des clients eux-aussi mobiles [Monnet, 2006]. L‟ambulantage est un phénomène qui prend une ampleur considérable dans les centres urbains mexicains ainsi que dans de nombreuses métropoles mondiales (New York, Rio de Janeiro, Paris, Madrid, Barcelone, Istanbul). Toutefois, cette activité demeure marginale et relativement absente du paysage urbain dans la plupart des villes françaises. La ville étudiée présente deux particularités notables : la première est sa richesse patrimoniale tandis que la seconde est son contexte sociopolitique. En 1987, le Centre Historique de Oaxaca a été reconnu Patrimoine Culturel de l‟Humanité par l‟UNESCO. Au-delà de ce titre honorifique, la ville de Oaxaca est la capitale de l‟un des Etats les plus pauvres de la République mexicaine. A l‟intérieur même du municipe, les luttes opposant les segments les plus pauvres aux pouvoirs établis sont permanentes. Cette situation tendue a conduit à une insurrection populaire au cours de l‟année 20062. Ces spécificités notables expliquent la complexité des interventions urbaines à mener sur ce territoire. Le patrimoine culturel de la ville doit être préservé en même temps que les us et coutumes de la population. Et ceci dans un contexte où la population locale observe avec méfiance toute action entreprise par les autorités municipales.

1

Le terme d‟ambulantage est une traduction de l‟espagnol « ambulantaje ». Selon des sources diverses, 26 personnes ont trouvé la mort au cours de ce soulèvement populaire. 2

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Afin d‟élaborer un projet urbain cohérent pour la zone définie, il convient de bien maitriser le corpus réglementaire encadrant l‟urbanisme. De plus, dans ce cas d‟étude particulier, il est important d‟avoir pleinement conscience des valeurs, normes et règles implicites spécifiques à la situation observée. En effet, la vente ambulante est encadrée par une série de règles conventionnelles qui se sont construites au cours de l‟Histoire. Par ailleurs, l‟analyse des acteurs politiques impliqués dans la vente de rue est une étape essentielle préalable à la formulation d‟un projet urbain viable. En ce qui concerne la Calle Las Casas, la Municipalité désire réguler l‟ambulantage. Par ailleurs, rappelons-le, ce projet s‟intègre dans une démarche de revalorisation patrimoniale du Centre Historique. La problématique relative à ce premier espace d‟étude est la suivante : Comment ordonner et réglementer l‟ambulantage dans cette rue tout en tenant compte des usages établis, des intérêts des acteurs impliqués et de la méfiance de la population locale ? Il faut par ailleurs garder à l‟esprit que les vendeurs ambulants ont généralement des revenus faibles et que leur situation pourrait s‟aggraver dans le contexte actuel de crise économique prononcée3. Cette population n‟a souvent pas d‟autres sources de revenus que ceux générés par leur commerce.

En complément de ce premier territoire d‟étude, il s‟est avéré intéressant d‟adjoindre le marché de gros de Oaxaca dénommé Central de Abastos, qui, paradoxalement, s‟apparente davantage à un immense marché traditionnel. Situé dans le prolongement de la Calle Las Casas, de l‟autre côté du périphérique entourant et délimitant le Centre Historique, ce marché jouit actuellement d‟une position péricentrale à l‟intérieur du municipe (cf. figure 1). Construit dans les années 1970, la Central de Abastos a rapidement été phagocytée par l‟extraordinaire croissance urbaine de la ville. Cette localisation, justifiée à l‟origine de sa création, génère aujourd‟hui une multitude de problèmes urbains : congestion routière, prolifération de la vente ambulante, production de nuisances ayant pour effet de déprécier le territoire, etc. Il serait donc opportun d‟envisager sa relocalisation dans un espace plus adapté. Cette situation, cependant, n‟est pas spécifique à Oaxaca de Juárez. Selon Patrice Melé, la relocalisation de ce type de complexe commercial populaire et dégradé est une problématique centrale affectant la plupart des métropoles mexicaines. Les recherches qui seront menées sur ce territoire d‟étude et les solutions proposées devront répondre aux questions suivantes. Est-il légitime de vouloir relocaliser ce marché 3

La crise économique a pris une ampleur considérable au Mexique et on peut noter une dévaluation considérable du peso vis-à-vis des devises internationales (dollar et euro).

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qui jouit d‟une position centrale dans les représentations des habitants de l‟aire métropolitaine ? Sur quels critères doit se fonder une éventuelle relocalisation en périphérie ? Quels projets urbains peuvent être implantés sur les friches héritées ? Afin d‟appuyer notre réflexion sur l‟élaboration d‟un projet urbain palliant les problèmes énoncés, on pourra notamment se baser sur les exemples français. Effectivement, en ce qui concerne la gestion de ses Marchés d‟Intérêt National (MIN), la France jouit d‟une certaine expertise. Toujours en France, on constate que la quasi-totalité des marchés de gros ont été déplacés en périphérie au cours des années 60 et des années 704, processus qui a permis, entre autre, une redynamisation de l‟activité commerciale.

La présente étude renvoie à des problèmes urbains spécifiques au Mexique. Paradoxalement, on constate un manque cruel de recherches scientifiques menées par des auteurs mexicains. En ce qui concerne la communauté scientifique française, celle-ci a largement contribué à la compréhension de phénomènes tels que l‟ambulantage et la reconquête des espaces centraux dégradés. Ces problématiques ont été étudiées en profondeur à la fin des années 1990 et surtout au début des années 2000 par des groupes

de recherche

tels que le

CEMCA

(Centre d‟Etudes Mexicaines

et

Centraméricaines). Notre étude s‟appuiera notamment sur les recherches menées par ce centre d‟études. Par ailleurs, notre travail s‟inspirera de la lecture d‟une grande variété de documents (articles de presse, règlements locaux, documents de planification urbaine) ainsi que des informations collectées auprès des vendeurs ambulants et des responsables des directions municipales.

Notre étude s‟articule en trois chapitres. Dans un premier temps, nous établirons une photographie la plus complète possible de la municipalité de Oaxaca de Juárez (situation géographique, données sociopolitiques, morphologie urbaine). Sans prétention d‟exhaustivité, cette partie se veut avant tout descriptive. Elle doit fournir au lecteur les informations indispensables sur la ville étudiée ainsi que sur le corpus réglementaire en vigueur. Dans la seconde partie, l‟attention sera portée sur la Calle Las Casas. Dans un premier temps, on établira un diagnostic territorial décrivant l‟ampleur de l‟ambulantage ainsi que 4

Données issues du site internet de la Fédération Française des Marchés d‟Intérêt National (FFMIN).

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l‟organisation politique de cet espace. Ensuite seront proposées des orientations visant à réguler ce phénomène. L‟ambulantage étant un phénomène global touchant les grandes métropoles mondiales, plusieurs projets ont été expérimentées afin de réglementer et ordonner cette activité commerciale. Ces exemples internationaux permettront de pressentir les actions possibles qui pourraient être développées à Oaxaca. La troisième partie sera centrée sur la Central de Abastos. Ici encore, l‟étude commencera par un diagnostic territorial pour aboutir sur des propositions concrètes d‟aménagement et de réaménagement des activités commerciales. Notre réflexion se portera avant tout sur l‟éventuelle relocalisation des activités relevant du commerce de gros et sur la reconversion de l‟espace libéré. Nous nous efforcerons dans ces deux dernières parties de ne pas créer de dichotomie entre les deux espaces cités. En effet, bien que ces deux espaces soient étudiés séparément, ils forment un même axe commercial affecté par des problématiques analogues (prolifération de l‟ambulantage, image urbaine dégradée, congestion des voies routières, etc.). Par ailleurs, c‟est le même système d‟acteurs qui a autorité sur ces deux territoires urbains.

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FIGURE 1 : LOCALISATION DU PERIMETRE D’ETUDE

Zone en gris clair : municipalité de Oaxaca de Juárez Zone en gris foncé : périmètre du Centre Historique Zone en rouge : périmètre d‟étude

Source : réalisation personnelle

Zócalo (place centrale) ; Periférico (périphérique encerclant le centre historique) ; Terminal de nde autobuses de 2a clase (gare routière 2 classe) ; * (pont piétonnier reliant la Calle Las Casas à la Central de Abastos) Source : réalisation personnelle

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Le Mexique est une fédération constituée de 31 Etats et d‟un District Fédéral (Mexico)5. Notre étude se situe dans l‟Etat de Oaxaca et plus précisément dans la municipalité de Oaxaca de Juárez, capitale de l‟Etat éponyme6. L‟Etat de Oaxaca se trouve au Sud-est du Mexique. Il est bordé à l‟Ouest par l‟Etat de Guerrero, au Nord par les Etats de Puebla et de Veracruz, à l‟Est par l‟Etat du Chiapas et enfin au Sud par l‟océan Pacifique. La capitale, Oaxaca de Juárez, se situe à 500 kilomètres au Sud-est de Mexico. Fondée à l‟intersection de trois vallées, à 1.555 mètres d‟altitude, elle se localise au centre de l‟Etat qu‟elle représente.

FIGURE 2 : LOCALISATION DE L’ETAT DE OAXACA ET DE SA CAPITALE

Source : réalisation personnelle

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Le nom officiel du Mexique est : Estados Unidos Mexicanos. En 1872, suite au décès de Don Benito Juárez et en son honneur, la municipalité a été rebaptisée Oaxaca de Juárez. Cette toponymie permet de faire la distinction entre l‟Etat de Oaxaca et sa capitale. 6

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L‟Etat de Oaxaca est une zone de haute sismicité7. En 1931, un tremblement de terre d‟une magnitude de 8° sur l‟échelle de Richter a pu y être enregistré. Au cours de l‟histoire, les dégâts occasionnés par les tremblements de terre ont contraint les populations à privilégier un certain type de construction. A Oaxaca de Juárez, les édifices ne dépassent pas les 7 mètres 50 de hauteur (exception faite des édifices religieux) [Hernández Vez, 2008]. La bassesse des constructions donne l‟impression d‟une ville extrêmement étalée.

A Oaxaca de Juárez, la moyenne des précipitations pluviales annuelles est de 727,6 millimètres [INEGI]. Ces précipitations sont concentrées sur la période des pluies s‟étalant de mai à octobre. Alors qu‟autrefois la croissance urbaine s‟effectuait le long des vallées, l‟urbanisation gagne peu à peu les contreforts des montagnes environnantes. Les autorités municipales tentent de limiter ce phénomène mais les populations aux ressources économiques faibles continuent de s‟installer illégalement dans ces zones (cf. photographies 1 et 2). Ces nouvelles constructions sont particulièrement sujettes aux glissements de terrain (conjoncture entre une topographie accidentée, un sol instable et de fortes précipitations). Paradoxalement, malgré l‟illégalité de ces constructions dans ces zones à risques, les autorités municipales sont contraintes de fournir à ces nouvelles populations des services basiques (routes, drainage, réseau d‟eau potable, d‟électricité, etc.). Le financement de ces équipements est particulièrement onéreux en raison des contraintes physiques (gestion hydraulique complexe, sous-sols rocheux, etc.).

7

Cette activité intense résulte du mouvement de subduction entre la plaque de Cocos (plaque plongeante) et la plaque Nord-Américaine (plaque supérieure).

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L‟actuel président de la Municipalité de Oaxaca de Juárez, José Antonio Hernández Fraguas (PRI), a instauré dès sa prise de fonction en 2008 des audiences publiques. Au cours de ces audiences, un certain nombre de services municipaux ainsi que les élus se déplacent et viennent écouter les requêtes des habitants. Les audiences publiques prennent place dans chaque « district », et ceci une fois par an. Les audiences durent en général une demi-journée mais tout dépend de la taille du « district » ainsi que des réclamations des habitants. J‟ai eu l‟occasion de me rendre à une de ces audiences. Celle-ci prenait place sur un terrain de basket-ball qui constituait également la place centrale du « district » de Viguera. Le président de la Municipalité était assis au milieu d‟une longue tribune et faisait face aux habitants qui étaient convoqués à tour de rôle. Entre les habitants et la tribune, sur les côtés, étaient installés les agents des différents services municipaux. Autour de la place centrale, l‟administration municipale avait installé plusieurs stands (centre de médecine préventive, atelier de coiffure, etc.). Fait anecdotique, l‟équipe municipale offrait des arbres à la population locale. L‟audience publique fonctionnait de la façon suivante : dans un premier temps, les habitants étaient convoqués les uns après les autres pour s‟entretenir personnellement avec le président de la Municipalité ; puis, dans un second temps, en fonction de la nature des requêtes, les habitants rejoignaient les services municipaux appropriés pour faire part de leurs réclamations. Installé avec mes collaborateurs de la CGDUOPE Ŕ Coordination Générale du Développement Urbain, Œuvres Publiques et Ecologie de la municipalité de Oaxaca de Juárez - qui avaient fait le déplacement, j‟ai pu constater que la plupart des habitants réclamaient des infrastructures basiques (bétonnage des chemins de terre, installation d‟un système de drainage).

La saison des pluies impose un certain calendrier. Effectivement, la plupart des travaux publics sont réalisés au cours de la saison sèche. Peu de temps avant la saison des pluies, les ruisseaux ainsi que les réseaux d‟évacuation des eaux sont curetés afin de parer aux inondations. Pour finir, il est à préciser que les fortes pluies estivales détériorent grandement le revêtement des chaussées. Cette précision qui peut sembler banale est cependant

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importante dans la mesure où une proportion significative des ressources économiques de la Municipalité est affectée à la réfaction de la voirie publique.

PHOTOGRAPHIE 1 : SAN MARTIN MEXICAPAM, OAXACA DE JUAREZ

Les constructions à flanc de montagne ont été édifiées au cours des années 1980 (partie basse) et 1990 (partie haute). Photographie personnelle

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PHOTOGRAPHIE 2 : LOMAS DE SAN JACINTO, OAXACA DE JUAREZ

Nouvelles

constructions

édifiées dans les années 2000 à proximité du Cerro del Fortín (montagne)

Photographie personnelle

Selon le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), à l‟an 2000, l‟Etat de Oaxaca était l‟un des plus pauvres de la République mexicaine. Sur les 32 Etats constituant la Fédération, Oaxaca se situe en avant dernière position en ce qui concerne le développement humain (IDH8) et le revenu par tête (PIB per capita). L‟Etat du Chiapas est celui qui présente les indices les plus bas, tandis que les Etats frontaliers aux Etats-Unis ainsi que le District Fédéral présentent les indices les plus forts. Si l‟on se focalise sur l‟Indice de Pauvreté Humaine (IPH), l‟Etat de Oaxaca se situe en troisième position derrière les Etats du Chiapas et de Guerrero [CEAGI]. Selon Guillermo Aramburo [05/1994], ces voisins de misère présentent des situations analogues aux Etats voisins d‟Amérique centrale. En ce qui concerne Oaxaca de Juárez, il est à préciser que sur les 265.033 habitants du municipe, 20.109 sont indigènes. 96,5 pour cent d‟entre eux parlent espagnol en complément d‟une langue indigène (zapotèque et mixtèque principalement) et 0,7 pour 8

L'IDH est un indice composite, sans unité, compris entre 0 (exécrable) et 1 (excellent), calculé par la moyenne de trois indices quantifiant respectivement : la santé/longévité, le niveau d‟éducation et le niveau de vie.

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cent ne parlent pas espagnol. Cette population indigène importante est une spécificité de l‟Etat de Oaxaca [Plan de Desarrollo Sustentable 2008-2010]. Ce segment de la population présente un niveau de pauvreté élevé.

L‟année 2006 a été particulièrement agitée au niveau politique. Au Mexique, 2006 fut l‟année d‟une élection présidentielle chaotique. Les résultats officiels ont annoncé, contrairement aux sondages, la victoire de Felipe Calderón Hinojosa (PAN, droite libérale). Son principal opposant, qui devait selon les sondages succéder à la présidence de la République, Manuel López Obrador (PRD, gauche) a dénoncé la fraude électorale et a incité les mexicains à se révolter contre cette atteinte à la démocratie. Finalement, suite à l‟appui du PRI9, Felipe Calderón a été reconnu président de la République, mandat qu‟il exercera jusqu‟en 2012. C‟est sous ce fond de crise politique prononcée qu‟eut lieu, toujours en 2006, le mouvement populaire de Oaxaca. Initialement, le mouvement se résumait à des protestations portées par des travailleurs de l‟éducation qui luttent depuis plus de trente ans pour

obtenir

de meilleures conditions salariales ainsi que des moyens

supplémentaires pour leurs écoles. La gestion de ce conflit par le gouverneur de l‟Etat de Oaxaca, Ulises Ernesto Ruiz Ortiz, a été désastreuse et a conduit à un envenimement du conflit. L‟Assemblée Populaire des Peuples de Oaxaca (APPO) s‟est joint au mouvement, réclamant la démission immédiate du gouverneur d‟Etat. Ainsi, au cours de l‟été 2006, les groupes protestataires ont occupé les mairies, édifices publics, hôtels, stations de radio et de télévision, aéroport, etc. Au total, plus de 1.500 barricades ont été érigées dans la capitale de l‟Etat de Oaxaca. Finalement, le 3 octobre 2006, les forces armées fédérales composées de 20.000 hommes équipés d‟hélicoptères et d‟avions de combat ainsi que de plusieurs tanks sont intervenus pour rétablir la situation. Trois ans après la fin du conflit, la situation sociale reste tendue et le gouverneur Ruiz Ortiz se trouve toujours à la tête de son Etat. Celui-ci est accusé par une grande partie de la population locale d‟avoir commandité l‟assassinat et l‟emprisonnement de nombreux dirigeants sociaux. [Vigna, 11/2006]

9

Le Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI) est un des principaux partis mexicains. Tous les présidents mexicains qui se sont succédés entre 1929 et 2000 étaient affiliés à ce parti. Le PRI est membre de l'Internationaliste socialiste. Le Président de la Municipalité de Oaxaca de Juárez, José Antonio Hernández Fraguas, tout comme le gouverneur de l'Etat de Oaxaca, Ulises Ruiz Ortiz, sont affiliés à ce parti politique.

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Ce mouvement populaire qui a eu une portée internationale n‟est pas un mouvement isolé. Il existe effectivement une myriade de conflits opposant les segments les plus pauvres de la population (paysans, communautés indigènes, travailleurs pauvres) aux pouvoirs

publics/privés

(autorités

étatiques,

fédérales,

promoteurs

immobiliers,

entreprises multinationales) [Gouverneur, 07/2003]. Toutefois, bien que ces conflits méritent une attention particulière, on ne peut pas en faire une présentation étoffée dans cette étude. Néanmoins, il est primordial d‟avoir pleinement conscience du contexte sociopolitique fragile dans lequel se situe Oaxaca de Juárez. Nous verrons ultérieurement à quel point cette considération doit être prise en compte dans la conception des projets urbains.

PHOTOGRAPHIES 3 : LA « COMMUNE » DE OAXACA, AOUT 2006

Source : Pauline Chevalier, 08/2006

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Les informations les plus anciennes, qui datent du début du 15ième siècle, faisaient état de la présence de groupements mixtèques et zapotèques sur l‟actuel site de Oaxaca de Juárez. On ne pouvait cependant pas parler de ville dans la mesure où l‟opposition entre d‟une part la ville et d‟autre part les espaces ruraux n‟existait pas dans le monde précolombien [Bolaños, Fernandez Christlieb, 2001]. En 1456, les aztèques ont pris possession de ce territoire puis, en 1521, la « ville » a été conquise par les espagnols. Le tracé de la ville de Oaxaca de Juárez a été réalisé en 1529 par Alonso García Bravo qui avait antérieurement effectué le tracé des villes de Mexico et de Puebla. Pour ce faire, ce dernier avait calculé le point équidistant entre les deux cours d‟eau qui traversent la vallée (l‟Atoyac et le Jalatlaco). A hauteur de ce point il dessina un carré qui constitue aujourd‟hui encore la place centrale Ŕ ou zócalo. Le tracé de Oaxaca de Juárez est l‟archétype de celui des villes coloniales : une place centrale de forme carrée qui regroupait les bâtiments les plus importants et un quadrillage de rues droites sans aucun rempart. Depuis sa fondation comme ville coloniale jusqu‟au début du 20ième siècle, la croissance de la ville fut modérée. La densification se poursuivait alors à l‟intérieur de son tracé colonial, entité morphologique qui correspond aujourd‟hui à l‟aire du Centre Historique (cf. figure 3 & annexe 1).

FIGURE 3 : PLAN DE OAXACA DE JUÁREZ, 1790

Source : Ruiz Cervantes, Sánchez Silva, 1997

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Le graphique 1 permet de percevoir trois tendances dans l‟évolution de la population. Entre 1818 et 1910, on observe une augmentation progressive de la population. Sur la période 1910-1940, on peut voir une succession de périodes de croissances et de décroissances, ces dernières résultantes des pertes humaines dues à la Révolution mexicaine et aux multiples séismes qui ont poussé les habitants à émigrer vers d‟autres Etats. Au cours de la seconde moitié du 20ième siècle, la population a quintuplé pour atteindre aujourd‟hui 265.000 habitants. Cette extraordinaire croissance démographique, qui s‟est accompagnée d‟un étalement considérable de la ville, est intrinsèquement liée à l‟importance de l‟émigration rurale.

GRAPHIQUE 1 : EVOLUTION DE LA POPULATION DE OAXACA DE JUAREZ, 1818-2005

300000 250000 200000 150000 100000 50000 0 1800

1850

1900

1950

2000

2050

Note : En 1980, l‟ancienne localité de Santa María del Marquesado a perdu le statut politicoadministratif dont elle jouissait auparavant et a été incorporée à la ville de Oaxaca. Pour ne pas fausser la lecture, la population de cette ancienne localité a toujours été ajoutée à celle de Oaxaca pour l‟ensemble de la période. Source : réalisation personnelle, données : Quintana Rojas, 2007

A partir des années 1940, la croissance de la population se poursuivit en dehors du tissu colonial et plus particulièrement dans les anciens peuplements indigènes (El Marquesado, Xochimilco et Jalatlaco). L‟urbanisation n‟a cessé de se poursuivre les décennies suivantes, dépassant les obstacles naturels (montagnes et cours d‟eau) et artificiels (voies routières et ferroviaires). Dans les années 1970 ont été édifiées d‟importantes structures en périphérie (Central de Abastos, gare routière 2nde classe, cité Page | 20


universitaire, Tecnológico10, etc.). L‟étalement urbain a finalement « noyé » ces équipements dans le tissu urbain. Ainsi, la Central de Abastos occupe de nos jours une position péricentrale à l‟intérieur du municipe. La croissance de la ville-capitale a phagocyté les villes périphériques qui font aujourd‟hui parti d‟une même aire urbaine. La figure 4 permet d‟apprécier l‟importance du processus d‟étalement urbain (toujours inachevé) qui s‟est amplifié depuis les années 1950. On peut également voir que cet étalement s‟est poursuivi le long des vallées. Comme nous avons pu le souligner antérieurement, la période actuelle est marquée par l‟urbanisation illégale des zones montagneuses. Cette dynamique peut être expliquée d‟une part par l‟existence d‟une demande importante et d‟autre part par la vente progressive des terres communales et ejidales11. En 2009, le territoire municipal de Oaxaca de Juárez était divisé en 14 districts dénommés agencias - et 253 quartiers - dénommés colonia, barrio ou fraccionamiento.

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Zone universitaire spécialisée dans les formations scientifiques. Un ejido désigne, au Mexique, une propriété collective attribuée à un groupe de paysans pour y effectuer des travaux agricoles. En 1992, sous la présidence de Carlos Salinas de Gortari, la Nueva Ley Agraria a supprimé la disposition qui établissait les ejidos et en autorisa la division et la vente, c'est-à-dire la privatisation des parcelles communautaires. 11

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FIGURE 4 : CROISSANCE URBAINE DE OAXACA DE JUAREZ, 1800 - 2004

Source : Quintana Rojas, 2007

A Oaxaca de Juárez, on peut énumérer plusieurs espaces urbains présentant des morphologies distinctes : le Centre Historique, la ville « moderne », les anciens quartiers traditionnels, la zone résidentielle homogène, les zones résidentielles d‟intérêt social et enfin les zones populaires illégales. En premier lieu, comme cela a été évoqué précédemment, l‟entité morphologique centrale est le Centre Historique. Celui-ci s‟organise autour de la place centrale et présente un tracé en damier. C‟est au cœur de cet espace que se trouvent les principaux édifices à caractère politique et religieux.

12

Afin de cerner et de décrire les différente entités morphologiques présentes dans la ville de Oaxaca de Juárez, cette partie s‟est appuyée sur une étude menée par Emilio Duhau intitulée « Contextes urbains et qualifications juridiques de l‟espace à Mexico » [in Bourdin, Lefeuvre, Melé, 2006].

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La seconde entité morphologique correspond à la ville « moderne ». Celle-ci est née de l‟urbanisme moderne. Plus précisément, il s‟agit d‟un urbanisme qui produisit la ville à partir de l‟espace public et qui organisa le tissu urbain au moyen d‟une hiérarchie de voies publiques, en se référant au rapport entre la largeur des rues et la hauteur des immeubles et privilégiant la concentration d‟activités sur les rues principales. A titre d‟exemple, on peut citer la colonia Reforma qui s‟est construite dans les années 1930 à proximité du Centre Historique. Ces deux espaces, la ville historique et la ville « moderne », intègrent des aires auxquelles on attribue des valeurs historiques et patrimoniales et des zones produites selon le paradigme de la ville moderne. Ce sont des espaces urbains qui ont pour « vocation », selon le jargon de la planification urbaine, d‟abriter des usages du sol mixtes et qui remplissent certains niveaux des fonctions centrales. Il s‟agit d‟un contexte urbain où coexistent aujourd‟hui de façon conflictuelle des logements avec des activités commerciales et des services. La troisième entité morphologique correspond aux anciens villages et aux quartiers traditionnels. Ce sont des espaces qui n‟étaient pas destinés à l‟établissement de fonctions urbaines, qui ne reposaient pas sur l‟expression d‟une certaine idée de l‟urbain, mais qui étaient adaptés au mode de vie communautaire. Le tracé y est irrégulier et la voirie est réduite à des allées étroites. On peut citer à titre d‟exemple les colonias Xochimilco, Jalatlaco ainsi que l‟ancien village de San Felipe del Agua qui est aujourd‟hui intégré au territoire municipal. Selon leur localisation, ces anciens établissements humains évoluent vers un autre contexte urbain. C‟est par exemple le cas de la colonia Jalatlaco qui en raison de son aspect « typique » devient une sorte de « quartier de la tradition recréée ». La quatrième entité morphologique correspond à la zone résidentielle homogène. Il s‟agit de zones d‟habitat édifiées dans la seconde moitié du 20ième siècle. Bien que la fonction résidentielle prédomine, celle-ci n‟y est pas exclusive. Contrairement à certaines banlieues résidentielles mexicaines, les « gated communities13 » sont absentes du paysage urbain de Oaxaca de Juárez. La cinquième entité morphologique correspond aux zones résidentielles d‟intérêt social. A Oaxaca de Juárez, celles-ci sont gérées par des organismes tels que l‟INFONAVIT et le FOVISSSTE. Physiquement, ces espaces urbains prennent la forme 13

Les « gated communities » sont des espaces résidentiels clos et sécurisés. Ceux-ci sont généralisés dans les banlieues des métropoles étatsuniennes mais aussi dans les grandes villes d‟Amérique latine.

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d‟une succession de petites maisons identiques. Ces espaces urbains se localisent dans le péricentre et en périphérie. Enfin, la sixième et ultime entité morphologique est celle des zones populaires illégales. Il s‟agit précisément de quartiers auto-construits. Les habitants de ces quartiers construisent et procèdent à des agrandissements au fur et à mesure qu‟ils ont les ressources nécessaires et selon les besoins et la transformation de leurs familles. Parfois, ils accommodent leur unité d‟habitation en magasin ou atelier. Ils profitent ainsi de l‟espace public adjacent pour développer leurs activités (exposer des marchandises, réparer des voitures). Tout cela, en règle générale, sans avoir à se soucier des limitations découlant des normes de construction et d‟urbanisme. A titre d‟exemple, on peut citer le cas de la colonia Lomas de San Jacinto. « Comme le dit fort bien Jordi Borja, de la municipalité de Barcelone, ces quartiers autoconstruits et illégaux ne sont pas des bidonvilles, bien que seul ce terme soit disponible en français : le symbole de l'habitat populaire, évolutif et bricolé, est le fer à béton qui pointe vers le ciel depuis la modeste dalle de la terrasse : toit pour l'instant, futur plancher d'un nouvel étage dont le pilier sera coulé autour de ce fer à béton. » [Bataillon, 02/1993] (Cf. photographie 2) Dans le cas de Oaxaca de Juárez, de nombreux quartiers illégaux ont fait l‟objet de procédures de régularisation de la propriété (agencia San Martin Mexicapam par exemple ; cf. photographie 1). Dans la majorité des cas, ces espaces urbains restent des territoires où le degré de liberté pour changer les usages du sol et pour bâtir est toujours plus grand que dans les contextes urbains qui ont été produits d‟après des procédures formelles.

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Le Mexique est un Etat fédéral à trois niveaux de gouvernement : la Fédération, les Etats fédérés et les municipalités. Il existe des lois fédérales qui concernent les pouvoirs fédéraux, des lois locales qui régissent des Etats fédérés et des lois dites « générales » qui s‟appliquent aux trois niveaux et distribuent les compétences concurrentes. Ce dernier cas concerne l‟urbanisme. Autrement dit, en ce qui concerne le droit de l‟urbanisme, le système prévalant au Mexique s‟apparente à celui d‟un Etat unitaire comme la France. La première loi générale sur l‟urbanisme (Ley General de Asentamientos Humanos) n‟a été établie qu‟en 1978, suite à la réforme constitutionnelle de 1976. Cette réforme de la Constitution fédérale a introduit trois principes maîtres du droit mexicain de l‟urbanisme : 1) l‟attribution qui permet au gouvernement d‟imposer des limitations à la propriété privée, justifiées par des nécessités urbanistiques ; 2) l‟attribution au pouvoir législatif fédéral de légiférer pour la République entière en matière d‟urbanisme ; 3) la possibilité pour les municipalités de se coordonner pour faire face aux phénomènes de conurbation. Actuellement, c‟est la Ley General de Asentamientos Humanos de 1993 qui encadre l‟urbanisme au Mexique. Les compétences sont réparties de la façon suivante : 

Les autorités fédérales ont une double fonction : elles légifèrent en matière d‟urbanisme et elles élaborent un programme chargé d‟assurer la cohérence du développement urbain national.

Les Etats fédérés peuvent élaborer leurs propres lois de développement urbain selon les nécessités locales issues du contexte géographique, social et économique (sans contredire la loi générale). Par exemple, les Etats fédérés qui se situent dans les zones sismiques ont le pouvoir d‟imposer certaines normes de construction. Par ailleurs, les Etats ont pour fonction principale d‟assurer la cohérence du développement urbain au niveau étatique.

Les municipalités élaborent des programmes encadrant le développement urbain. Plus en profondeur, celles-ci doivent élaborer et faire respecter le plan d‟usage des sols. A côté des plans et des programmes, les municipalités

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établissent des règlements. Dans les chapitres suivants nous étudierons les règlements encadrant les activités commerciales. La réforme de 1993 a cherché à renforcer la participation sociale dans la planification urbaine. Selon Bernardo Bolaños et Federico Fernandez Chrstlieb [2001], dès la mise en application de cette réforme, cet idéal démocratique a été entravé par les pratiques clientélistes et néocorporatistes des élus. Aussi, la quête d‟une large participation sociale, positive en soi, s‟est souvent faite en dépit des décisions du législateur, des avis des urbanistes, de la planification générale et de la cohérence de l‟ensemble. Toujours selon les auteurs précédemment cités, le degré d‟efficacité du droit de l‟urbanisme au Mexique est particulièrement bas. Parmi les causes de cette situation, on observe le caractère facultatif et contractuel de la coordination métropolitaine, le fonctionnement d‟un système corporatiste et la corruption répandue des fonctionnaires municipaux chargés de la délivrance des permis. En ce qui concerne les finances publiques municipales, il est important de souligner l‟importance des apports fédéraux (i.e. gouvernement mexicain). En 2007, 80 pour cent des ressources municipales provenaient des participations fédérales, les 20 pour cent restant correspondent aux ressources propres [Plan de Desarrollo Sustentable 2008-2010].

Pour

les

années

prochaines,

selon

l‟Administration

municipale,

l‟augmentation des participations fédérales et de la fiscalité se répercutera sur le volume des investissements publics. Ce constat tient au fait que lorsque les ressources économiques augmentent, on observe une diminution relative des dépenses courantes au profit des dépenses en investissement. En 2007, la part des ressources globales affectées aux investissements en œuvres publiques s‟évaluait à 17 pour cent [ibid.].

Au Mexique, au cours du 19ième siècle, l‟expansion physique des grandes villes a contribué à la formation de zones métropolitaines. Toutefois, en dépit du caractère ancien du phénomène, ce n‟est que très récemment que les organismes fédéraux (INEGI, SEDESOL, CONAPO) se sont attachés à délimiter physiquement les 56 zones métropolitaines mexicaines. L‟étude de ces ensembles métropolitains doit permettre a posteriori de définir une stratégie nationale de planification territoriale.

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FIGURE 5 : IMAGE SATELLITE DE LA ZONE METROPOLITAINE DE OAXACA14

Source : Plan de Desarrollo Sustentable 2008-2010

Dans une logique de coordination et d‟harmonisation du développement urbain métropolitain, le gouvernement de l‟Etat de Oaxaca a approuvé le 30 mars 2009 la création du « Conseil pour le Développement Métropolitain de la ville de Oaxaca ». Ce nouvel organisme relevant de l‟autorité publique est financé par les Fonds Métropolitains. Ceux-ci ont été instaurés à l‟issue du premier trimestre 2008 suite à l‟adoption d‟une loi votée par les pouvoirs fédéraux. L‟organisme créé peut utiliser ces fonds afin d‟élaborer des études, programmes, projets et exécuter des travaux publics (création d‟infrastructures et d‟équipements). Ces diverses dépenses doivent permettre de : -

stimuler la compétitivité économique de la métropole

-

optimiser ses capacités productives

-

lutter contre l‟amenuisement des ressources naturelles

14

La zone métropolitaine de Oaxaca comprend 20 municipalités : Oaxaca de Juárez, Ánimas Trujano, Santa María Atzompa, San Agustín de las Juntas, San Lorenzo Cacaotepec, Santa María Coyotepec, San Agustín Yatareni, Santo Domingo Tomaltepec, Santa María del Tule, San Andrés Huayápam, San Sebastián Tutla, Tlalixtac de Cabrera, San Antonio de la Cal, Santa Cruz Amilpas, Villa de Zaachila, San Bartolo Coyotepec, Santa Cruz Xoxocotlán, San Pablo Etla, San Jacinto Amilpas et Santa Lucía del Camino

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-

organiser le développement urbain métropolitain tout en considérant les dynamiques démographiques et économiques. Eut égard à la date de la création de cette nouvelle structure, on peut affirmer que

la coordination métropolitaine est encore dans une phase embryonnaire. Les nouvelles problématiques auxquelles sont confrontées les municipalités métropolitaines nous laissent penser que cet échelon territorial est tout à fait pertinent. L‟hypothétique relocalisation du marché de gros de Oaxaca de Juárez, qui fait l‟objet du troisième chapitre, s‟inscrit précisément dans cet échelon territorial.

En 1987, le Centre Historique de Oaxaca ainsi que la zone archéologique de Monte Alban ont été inscrits au Patrimoine Culturel de l‟Humanité par l‟ICOMOS et par l‟UNESCO. Il serait toutefois préjudiciable de nommer ces organismes internationaux sans parler des autorités mexicaines fortement impliquées dans la préservation du patrimoine. Au cours des années 1970, le Mexique a mis en place une ambitieuse politique de délimitation de zones de monuments historiques (secteurs sauvegardés) qui se propose non seulement de protéger les immeubles classés monuments historiques, mais aussi de stopper les évolutions destructrices de l‟ensemble du tissu urbain hérité [Melé in BidouZachariasen, 2003]. Dans cette optique, une zone de monuments historiques a été créée en 1976 dans la ville de Oaxaca. Le périmètre de cette zone ne correspond pas tout à fait au périmètre du Centre Historique (cf. annexe 1). Cette zone monumentale est sous l‟autorité de l‟Institut National d‟Anthropologie et d‟Histoire (INAH). Cet organisme contrôle systématiquement toute nouvelle modification ou construction et ceci quelle que soit la fonction assimilée (activité commerciale, espace public, espace culturel, habitation). L‟intervention de l‟INAH joue ainsi un rôle prépondérant dans la requalification des espaces centraux. A Oaxaca de Juárez, la zone de monuments historiques n‟est pas le seul périmètre à être soumis à un droit urbain spécifique. Effectivement, le Centre Historique (intégrant la zona de monumentos) reçoit également une attention particulière. Toute intervention Ŕ publique ou privée Ŕ projetée sur cet espace requiert l‟autorisation de la Délégation Générale du Centre Historique. Cette délégation, qui dépend de la structure où je réalise mon stage, veille à la préservation du Centre Historique. Quelquefois, j‟ai pu Page | 28


ressentir des « conflits d‟intérêts » entre les acteurs chargés du développement urbain au niveau municipal et les acteurs de la délégation citée. Pour schématiser, le premier groupe s‟inscrit dans une logique de « modernisation » du Centre Historique alors que le second groupe s‟inscrit dans une logique de préservation et de patrimonialisation. En ce sens, la Délégation Générale du Centre Historique désire réguler la vente ambulante (ou vente de rue) particulièrement prononcée dans les espaces centraux. Selon Patrice Melé [ibid.], la normalisation des usages de la rue est présentée comme le complément des politiques d‟image et de protection du patrimoine.

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L‟ambulantage est un néologisme inventé par Jérôme Monnet. Ce terme est dérivé du mexicain ambulantaje qui désigne la vente ambulante de biens et de services prenant place dans les espaces publics. L‟ambulantage ne peut être affilié au colportage (désignant la vente ambulante de documents écrits et/ou d‟idées) [Monnet, 2006]. Le mot colportage apparaît désuet, réductif et particulièrement inadapté aux dynamiques actuelles. De nos jours, l‟ambulantage connaît une forte croissance. Cependant, alors que le phénomène est relativement marginal dans les villes des pays les plus riches, ce type de distribution marchande prend un caractère massif dans les villes des pays pauvres. À l‟instar de Jérôme Monnet, on peut analyser la pérennité de pratiques « d‟ambulantage » comme le résultat d‟une adaptation aux évolutions du monde d‟aujourd‟hui, comme une réponse opportune à des pratiques de consommation devenant impulsives et sans délais. Parmi les évolutions contemporaines, on peut souligner la tendance à la métropolisation et à la multiplication des mobilités. L‟intensification des déplacements génère une demande de biens et de services par les voyageurs du quotidien (information, alimentation, achats opportunistes, etc.). En ce sens, il n‟y a rien d‟étonnant à constater que les vendeurs ambulants se concentrent tout particulièrement au niveau des plates formes multimodales et aux abords des lieux de rupture de charge [Capron, Giglia, Monnet, 2007]. Au-delà des dynamiques de métropolisation et d‟intensification des mobilités, la croissance de l‟ambulantage peut être expliquée par l‟attitude des autorités publiques. Celles-ci paraissent plus ou moins dépassées par les événements : d‟une part parce que la légitimité de l‟intervention publique est remise en question par les entreprises qui voient dans l‟ambulantage un marché potentiel et d‟autre part parce que ce commerce offre à ces vendeurs des emplois qu‟ils ne trouvent pas ailleurs [Monnet, 2007, p.2]. Ainsi, bien que le commerce ambulant soit prohibé dans les règlements municipaux, les autorités ont du mal à contraindre la vente ambulante. Selon Jérôme Monnet, cette économie de services tournée vers une clientèle en mouvement ne peut être étudiée uniquement sous l‟angle de l‟illégalité. On ne peut Page | 31


légitimement se concentrer sur la seule personne du vendeur ambulant illégal tout en rejetant de l‟analyse les acheteurs appréciant cette vente opportune. De nos jours, le caractère illégal de l‟activité est remis en cause par les défenseurs de l‟idéologie néolibérale. Certains économistes de ce courant défendent la thèse selon laquelle l‟origine de ce problème se trouve dans le marché formel et non pas dans l‟informalité [De Soto, 1987 in Cabral Gomes, Réginensi, 2007, p.7].

L‟ambulantage prenant place dans l‟espace public, il paraît important de définir cette dernière terminologie. L‟espace public comprend deux acceptions : la première d‟ordre politique et la seconde d‟ordre urbanistique. Tout d‟abord, au sens de Habermas [1978 in Nguyen, 2006], l‟espace public peut être défini comme un lieu d‟échange à l‟intérieur d‟une collectivité. Les acteurs politiques, sociaux et autres discutent et échanges des idées, des points de vue, des valeurs et des propositions qui reflètent leurs perceptions des problèmes auxquels la communauté est confrontée. Cette acception d‟ordre politique semble éloignée de notre étude. Toutefois, certains vendeurs ambulants évoquent parfois cette dimension afin de remettre en question l‟illégalité du commerce ambulant. En effet, d‟un point de vue politique, au sens de Bernadoua [2004 in Nguyen, 2006], l‟espace public représente avant tout : -

un espace de médiation qui réunit les acteurs appartenant à différentes sphères (société civile, acteurs économiques…) ;

-

un espace ouvert à tous (sans restriction d‟appartenance communautaire ou organisationnelle) ;

-

un espace où la critique peut s‟exercer librement ;

-

un espace d‟échanges symboliques ;

-

un lieu physique où les acteurs agissent, manifestent publiquement leur soutien ou leur contestation des systèmes (politiques ou économiques).

Dans le cadre de notre étude, il semble pertinent de se recentrer sur la définition d‟espace public dans son acception urbanistique. Pour le Laboratoire d‟Études Méthodologiques Architecturales (Université de Liège en Belgique), un espace public est « un espace accessible n’importe quand - c’est-à-dire n’ayant ni heure d’ouverture, ni heure de fermeture, comme les rues et les places publiques par exemple - par n’importe Page | 32


qui, sans aucune discrimination, pour des activités qui ne sont pas nécessairement explicitement déterminées, à condition que celles-ci se conforment à un règlement d’usage, établi par l’autorité publique ». Dans ce prolongement, on peut se demander si la présence d‟un règlement n‟entre pas en contradiction avec la dimension politique de l‟espace public défini par Habermas et Bernadoua [ibid.]. La définition formulée par le laboratoire cité se limite aux espaces publics extérieurs. Selon Korosec-Serfaty [1988 in Nguyen, 2006], « l’absence ou l’existence de limites physiques conduit à distinguer les espaces publics intérieurs des espaces publics extérieurs ». Les espaces publics intérieurs peuvent être par exemple les musées, les transports en communs, etc. Cette définition élargie de l‟espace public semble adaptée à notre étude. Toutefois, la limite entre ce qui relève de l‟espace privé et de l‟espace public est extrêmement floue. Les vendeurs ambulants occupent les places, les rues, les parcs mais s‟aventurent parfois dans des espaces difficilement qualifiable de public ou de privé. Par exemple, sur le lieu du stage, et jusque dans le bureau où je me situe, plusieurs commerçants y entrent pour vendre leurs marchandises. Ces commerçants proposent en général un seul produit destiné aux employés de bureau : des fruits, des pipaces, des empanadas, du pain complet, etc. Bien que la structure dans laquelle je réalise mon stage soit une administration publique, certains services qui peuvent être assimilés à des bureaux d‟étude sont plus ou moins fermés au public.

Il est particulièrement difficile de caractériser le groupe des vendeurs ambulants tant celui-ci est varié. On peut nommer vendeur ambulant toute personne commercialisant des biens ou des services dans les espaces publics. Bien entendu, un vendeur ambulant se caractérise par sa relative mobilité. Ainsi, on peut exclure de ce groupe les vendeurs qui sont installés dans des kiosques fixes (kiosques à journaux par exemple). Egalement, on peut exclure de l‟étude les boutiquiers qui détournent l‟espace public pour faire de la rue une extension de leurs commerces. L‟éventail des biens et services commercialisés par les vendeurs ambulants est extrêmement large (vente de tacos, fruits, vêtements, articles ménagers, jouets, Dvd, presse, fleurs, cirage de chaussure, management du stationnement, etc.). Bien souvent, le type de produit ou du service commercialisé influe sur la sédentarité ou la mobilité du Page | 33


vendeur ambulant ainsi que sur les zones de fréquentation. Par exemple, les vendeurs de vêtements sont relativement sédentaires alors que les vendeurs de glaces sont plus mobiles. Pour ces derniers, l‟itinéraire effectué est en relation avec les flux de clients qu‟ils sont susceptibles de capter. La nature de l‟offre fluctue en fonction des rythmes journaliers, saisonniers, des festivités, etc. Souvent, les vendeurs ambulants relativement sédentaires (comme c‟est le cas pour la plupart des vendeurs installés le long de la Calle Las Casas) utilisent des structures de dimension conséquente alors que les vendeurs itinérants transportent leurs marchandises à la main, sur la tête, ou utilisent des triporteurs, des bicyclettes aménagées ou encore des roulottes tractées à la main ou par une automobile. Les vendeurs itinérants sont souvent équipés de klaxons afin de prévenir de leur présence. Ce signal sonore (qui prend parfois la forme d‟un sifflement atypique) est assimilé à un type de produit afin que l‟acheteur potentiel puisse l‟identifier à distance. Ces dernières années, aux côtés des traditionnels vendeurs ambulants, on peut voir se développer dans les villes mexicaines d‟autres vendeurs itinérants employés par des entreprises multinationales. A titre d‟exemple, on peut citer les vendeurs de cartes téléphoniques prépayés (employés par l‟entreprise de télécommunications Telcel), de glaces Bon Ice (entreprise agroalimentaire Quala). La présence de ces vendeurs, qui portent des uniformes à l‟effigie de l‟entreprise, est condamnée par les autorités municipales qui désapprouvent l‟occupation illégale de l‟espace public [Stamm, 2008b].

Les vendeurs ambulants contemporains sont les héritiers de pratiques commerciales ancestrales. Selon Jorge Ramos de Dios, en Amérique Latine, « la tradition urbaine de la vente ambulante et de la sociabilité sur la voie publique s’est construite à partir de l’héritage indo-américain et des apports de la culture hispano-arabe » [2004, traduction personnelle]. Depuis les temps préhispaniques, en passant par la colonisation et l‟Indépendance, les vendeurs ambulants ont toujours eu une forte présence dans les villes latino-américaines. Lorsque Jorge Ramos de Dios évoque les pratiques commerciales indo-américaines, l‟auteur fait référence au marché traditionnel indigène : le « tianguis15 ». Ce type de 15

Le terme « tianguis » provient du nahuatl (langue aztèque) « tianquiztli » désignant une place ou un marché et de « tiamiqui » signifiant vendre, trafiquer.

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commerce existait bien avant que ne débarquent les colons occidentaux. « Ce marché à ciel ouvert, périodique et mobile constituait un spectaculaire conglomérat de personnes, textiles, couleurs, arômes, cris et saveurs. » [Ibid.] Cette forme de marché, prenant place dans les espaces publics, s‟est perpétuée dans des villes telles que Mexico ou encore Oaxaca de Juárez. En principe, ce marché traditionnel ne requiert pas d‟aménagements spéciaux ; particularité qui vient confirmer le caractère périodique et mobile de ce commerce. A Oaxaca de Juárez, les commerçants tianguis occupent chaque jour de la semaine un lieu distinct. Ainsi, on peut retrouver ces commerçants le mardi à la colonia Reforma (quartier jouxtant la partie Nord du centre historique), le jeudi au Llano (esplanade située dans la partie centrale), etc. Les commerçants qui effectuent cet itinéraire hebdomadaire disposent d‟une licence16. Les marchandises vendues sont des fruits, des légumes, des vêtements, mais aussi des Dvd, etc. Les principes fondamentaux de ce marché traditionnel (itinéraire hebdomadaire, absence de structures…) sont conservés bien que la nature des produits commercialisés a évolué au fil du temps pour s‟adapter à la demande du consommateur. Sur le territoire de la Central de Abastos se situe également une zone affectée aux commerçants tianguis. Celle-ci jouxte un complexe de marchés publics, ce qui vient attester la persistance de pratiques commerciales ancestrales aux côtés de commerces résolument plus modernes.

16

Cette licence peu onéreuse est délivrée par les services municipaux.

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PHOTOGRAPHIE 4: TIANGUIS À SAN CRISTÓBAL LAS CASAS, CHIAPAS

Photographie personnelle

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L‟ambulantage présent sur la Calle Las Casas n‟est pas un phénomène constant. Au contraire, il varie en fonction des temporalités. Dans l‟intention de dresser un état des lieux de l‟ambulantage, un recensement sur le terrain a été effectué le samedi 4 avril 2009 à 12h00. La vente ambulante atteint son paroxysme au cours de cette période (conjonction entre deux temporalités fortes : fin de semaine et heure de pointe). Pour effectuer un recensement optimal, j‟ai parcouru la Calle Las Casas d‟une extrémité à l‟autre (soit 900 mètres). Tout en marchant, je notais la nature des commerces ambulants que je rencontrais. Ce travail est éprouvant car il est difficile de prendre des notes tout en se frayant un passage entre les commerçants, les chalands et les personnes itinérantes. Le trottoir emprunté était extrêmement surchargé. D‟un côté du trottoir étaient implantés les commerces établis tandis que de l‟autre côté se situaient les commerces ambulants. Ces derniers occupaient une étroite bande qui empiétait à la fois sur la chaussée et sur le trottoir. Cette localisation, certes stratégique, avait pour corolaire la congestion du trafic sur les voies circulatoires annexes. (Cf. photographies 5, 6 et 7) Ce recensement a été opéré tout en prenant soin de ne pas attirer l‟attention des commerçants ambulants. Ceux-ci auraient pu voir mon comportement et le sujet de mon activité d‟un regard sceptique.

L‟étude de terrain qui a été réalisée a permis de recenser 155 postes ambulants établis sur toute la longueur de la Calle Las Casas (cf. figure 6). Il convient de préciser que les vendeurs occupaient seulement un côté de la rue. L‟autre côté de la rue était emprunté seulement par quelques piétons. Au cours de cette étude de terrain, trois policiers municipaux ont été rencontrés à mi-hauteur de la Calle Las Casas. Ceux-ci étaient arrêtés et observaient le spectacle qui s‟offrait devant leurs yeux. Les policiers n‟ont engagé aucun contrôle bien que le caractère illégal de l‟ambulantage - surtout dans cette zone centrale - soit incontestable. Par ailleurs, il est apparu clairement que les commerçants ambulants ne craignaient aucunement cette présence des forces de l‟ordre. Au contraire, on peut émettre

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l‟hypothèse que les policiers municipaux participent au bon déroulement de l‟activité en exerçant un pouvoir de dissuasion sur les voleurs éventuels et en régulant les conflits potentiels entre vendeurs ambulants et vendeurs établis ou encore entre vendeurs ambulants. Il s‟agit d‟une hypothèse et il est à préciser qu‟aucune altercation de ce type n‟a été observée sur le territoire d‟étude. Bien que l‟ambulantage paraisse totalement désordonné et chaotique, les commerçants ambulants ont élaboré des codes d‟usages qui sont respectés par tous. Par exemple, l‟emplacement qu‟occupe chaque vendeur ambulant est préservé d‟un jour à l‟autre, d‟une temporalité à une autre. Il paraîtrait que chaque commerçant ambulant, au fil du temps, gagne une certaine légitimité auprès des autres vendeurs et parvient ainsi à maintenir « son » emplacement. A ce sujet, on peut reprendre la réflexion de l‟équipe de chercheurs réunis autour de Jérôme Monnet [2007] sur les espaces urbains de vente ambulante à Mexico. « Ainsi, même lorsque [ces espaces urbains] présentent toutes les apparences d‟espaces chaotiques, il s‟agit d‟espaces hautement organisés et ordonnés, au sens où il s‟y construit de façon permanente un certain type « d‟ordre urbain », entendu comme un « ensemble de normes et règles autant formelles (quand elles relèvent d‟un certain niveau juridique) que conventionnelles. » [Capron, Giglia, Monnet, 2007, p.47]

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FIGURE 6 : LOCALISATION DES VENDEURS AMBULANTS, CALLE LAS CASAS, SAMEDI 4 AVRIL 2009, 12H00

Réalisation personnelle

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FIGURE 7 : AMBULANTAGE SUR LA CALLE LAS CASAS Cette figure offre un panorama de l'ambulantage entre les rues 20 de Noviembre et J. P. Garcia. Bien que la construction de cette image ne puisse se faire sans quelques déformations, on peut aisément percevoir la présence de nombreux postes ambulants. A chaque extrémité, se situent des vendeurs de tacos tandis qu'au centre on peut observer de nombreux postes, de dimensions conséquentes, spécialisés dans "l'habillement de la personne". Source : réalisation personnelle ; photographies prises le jeudi 12 juin 2009 à 18 heures.

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Sur la Calle Las Casas, le terme de poste ambulant peut paraître inapproprié dans la mesure où la plupart des vendeurs sont relativement sédentarisés. Ces derniers montent tous les matins l‟armature dans laquelle ils disposent la marchandise. Chaque soir, la marchandise non-vendue est remballée et l‟armature désarmée. Le lendemain, les mêmes gestes sont répétés. Il est à noter que quelques commerçants laissent l‟armature dans la rue pendant la nuit ce qui permet de conserver le même emplacement d‟un jour à l‟autre17. Laisser l‟armature dans la rue offre également un gain de temps car l‟armement et le désarmement de la structure prend un temps conséquent. La plupart des vendeurs ambulants implantés le long de l‟axe étudié disposent d‟une structure constituée d‟une armature en fer couverte de bâches (cf. photographie 7). Toutefois, d‟autres commerçants ambulants ont adopté d‟autres structures qu‟ils ont parfois construit eux-mêmes. Les vendeurs font preuve de créativité et d‟ingéniosité dans ce domaine. Le socle sur lequel est vendu la marchandise peut être une couverture, une table, ou prendre des formes plus originales notamment lorsqu‟il s‟agit de postes alimentaires (tacos, tortas, fruits). Etant donné la diversité des structures, il est difficile de réaliser une représentation cartographiée de l‟ambulantage en fonction de l‟apparence du point de vente. Cependant, il est important de savoir que les structures implantées le long de l‟axe commercial étudié sont, pour la majeure partie, de dimension conséquente. Ceci permet d‟affirmer que les vendeurs sont relativement sédentarisés. Les vendeurs ambulants réalisant un itinéraire complexe sont minoritaires à cet endroit précis. Tout ceci laisse penser que la Calle Las Casas s‟est au fil du temps transformé en un marché illégal se déployant de façon longitudinale. Aussi, il est important de préciser que l‟ambulantage ne se limite pas à l‟axe étudié mais touche également la plupart des rues adjacentes.

17

A ce sujet, les autorités municipales sont particulièrement strictes et ne tolèrent pas que les structures ne soient pas démontées d‟une journée à l‟autre. Les autorités en charge du trafic sur la voie publique ont, en théorie, le devoir de confisquer les structures immobiles et de sanctionner cette pratique d‟une amende conséquente.

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La figure 6 présente la localisation des vendeurs ambulants ainsi que la nature des commerces implantés. Les résultats font apparaître une certaine spécialisation commerciale : la plupart des produits commercialisés sont tournés vers l‟ « habillement de la personne » (cf. graphique 2). Si l‟on regroupe la catégorie « vêtements et chaussures » ainsi que « maroquinerie, sacs à dos, lunettes et bijoux de pacotille », on s‟aperçoit que les deux tiers des commerces ambulants sont spécialisés dans l‟ « habillement de la personne ».

GRAPHIQUE 2 : NATURE DES COMMERCES PRESSE, TABAC, AUTRES SUCRERIES 6% 3% MULTIMEDIA

ALIMENTATION 18%

7%

MAROQUINERIE, SACS A DOS... 26%

VÊTEMENTS ET CHAUSSURES 40%

Source : réalisation personnelle

L‟analyse détaillée de la répartition de l‟offre commerciale ambulante sur la Calle Las Casas laisse apparaître quelques informations intéressantes. Toutefois, cette analyse ne permet pas de formuler des lois générales permettant d‟expliciter la localisation de chaque type de commerce.

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Si l‟on se centre sur les vendeurs ambulants de produits alimentaires, il apparaît que ceux-ci occupent souvent les angles de rues, c'est-à-dire les carrefours (cf. figure 6). Toutefois à hauteur du cadre 2, se situant entre les rues Flores Magón et 20 de Noviembre, on peut observer des points de vente alimentaires sur tout le pourtour du cadre. Cette exception peut être expliquée par le fait que ce cadre est occupé par le marché Benito Juárez à vocation alimentaire. Les vendeurs de fruits (déjà découpés et prêts à être consommés) sont parfois ambulants dans la mesure où la marchandise est facilement transportable et ne requiert pas nécessairement un emplacement de taille importante. Pour ce qui est des commerçants tournés vers l‟ « habillement de la personne », la figure 6 révèle que ces derniers sont spatialement concentrés (cadre 2 et 3 par exemple). Les vendeurs isolés sont largement minoritaires. Cette information peut paraître utile lors de la formulation d‟un projet de relocalisation de l‟ambulantage. En ce qui concerne les autres types de commerces, ceux-ci apparaissent relativement dispersés.

L‟ambulantage prenant place sur la Calle Las Casas n‟est pas un phénomène homogène. Il varie en fonction des temporalités. En semaine, la fréquentation de la Calle Las Casas est importante. L‟observation du commerce ambulant, et ce à différents moments de la journée, ne permet pas de dire qu‟il y est une (ou des) heure(s) de pointe. L‟ambulantage se développe à l‟heure où les actifs rejoignent leurs lieux de travail et ne désemplie pas jusqu‟à la fin de la soirée, heure où les chalands se font plus rares. Ainsi, les vendeurs ambulants ont pour coutume d‟installer leurs postes vers 7 heures du matin et de les désinstaller vers 21 heures. Certains commerçants, en fonction de la marchandise commercialisée, ont adopté des horaires plus flexibles. Par exemple, on peut voir que les vendeurs de dvd piratés désinstallent leurs commerces plus tardivement que les autres commerçants. Cela leur permet de réaliser quelques ventes supplémentaires auprès de chalands désirant acquérir un film avant de rentrer chez eux. Lors des fins de semaine, l‟ambulantage prend une ampleur considérable. L‟activité atteint son paroxysme le samedi entre la fin de la matinée et le début de l‟après midi. Aussi, c‟est au cours de cette même période que l‟activité générée autour de la Central de Abastos est maximale.

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Si l‟on observe des temporalités beaucoup plus grandes, il est à noter la tenue d‟événements particuliers provoquant une intensification de l‟ambulantage sur le territoire de la Calle Las Casas. Parmi ces événements, on peut citer la fête de l‟Enfant (día del niño – le 30 avril), les fêtes de la Nativité, et enfin celles des Rois Mages (fin décembre / début janvier). A ces différentes occasions, la rue est parfois fermée à la circulation afin que les ambulants puissent y installer leurs postes mobiles. Par exemple, à l‟occasion de la fête de l‟Enfant, de nouveaux vendeurs ambulants s‟installent et commercialisent une multitude de jouets. Ces vendeurs ambulants occasionnels cohabitent avec les vendeurs ambulants « traditionnels ».

Corpus de photographies : L’ambulantage sur la Calle Las Casas, samedi 4 avril 2009, 12h00 (photographies personnelles)

PHOTOGRAPHIE 5 : COMMERCE DE DVD PIRATES

Cette photographie permet de percevoir un

commerce

de

DVD

piratés.

L‟implantation de ce commerce sur la partie gauche du trottoir fonctionne comme un « goulot d‟étranglement » comprimant ainsi la voie piétonne.

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PHOTOGRAPHIE 6 : ZONE D’IMPLANTATION DES VENDEURS AMBULANTS

Les vendeurs ambulants occupent le côté gauche de la rue. Le côté droit est vierge

de

L‟implantation chaussée,

toute des

ainsi

installation.

postes

que

les

sur

la

véhicules

stationnant en double file, restreignent le trafic à une seule voie de circulation (située à droite sur la photo).

PHOTOGRAPHIE 7 : PROXIMITE ENTRE VENDEURS ETABLIS ET VENDEURS AMBULANTS

Au-delà de la proximité entre les vendeurs ambulants et les vendeurs établis (installés respectivement du côté droit et du côté gauche du trottoir), cette photographie

permet

d‟observer

la

structure d‟un poste ambulant. Celle-ci se résume à quelques barres de fers assemblées entre-elles. Les « murs » et le « toit » sont constitués de draps et de bâches.

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Contrairement à ce que l‟on pourrait penser (eu égard à l‟importance de l‟ambulantage), un règlement municipal sur le « Contrôle des Activités Commerciales et des Services sur la Voie Publique » est en application depuis le 8 novembre 1999. En vue de faire valoir ce règlement, un organisme spécialisé a été créé : la Direction du Contrôle du Commerce sur la Voie Publique. En théorie, cette Direction a pour fonction de recenser les commerçants occupant la voie publique ainsi que de contrôler les implantations (ou les itinéraires) et les horaires pratiqués. Cette Direction à également pour mission de créer et de gérer un système de licence (à la charge des ambulants). Le règlement promulgué a établi trois zones distinctes. La zone « 1 » est un espace où le commerce sur la voie publique est totalement prohibé. A l‟intérieur de la zone « 2 », le commerce de rue est restreint et, enfin, dans la zone « 3 », le commerce de rue est autorisé à condition que celui-ci se conforme au règlement. La carte ci-après permet de localiser ces différentes zones. La zone « 3 » couvre l‟intégralité du territoire municipal à l‟exception des zones « 1 » et « 2 ».

FIGURE 8 : SITUATION DE LA CALLE LAS CASAS EU EGARD AU CORPUS REGLEMENTAIRE

Cette carte permet de discerner les zones où le commerce de rue est prohibé (zone 1) et restreint (zone 2). La Calle Las Casas est matérialisée en jaune tandis que les limites du centre historique

sont

matérialisées

en

pointillés noirs. Source : réalisation personnelle

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Le règlement impose de nombreuses règles aux vendeurs de rue afin que ceux-ci puissent commercer légalement. On peut citer ici quelques-unes de ces règles : -

les postes doivent être implantés à une distance respectable des voies de circulation et ne doivent pas être installés à moins de 10 mètres de chaque angle de rue

-

le modèle du poste de vente ainsi que son gabarit doivent être approuvés par la Municipalité

-

le voisinage doit approuver l‟installation du commerce de rue

-

le respect des normes sanitaires doit être certifié

-

les abords des commerces doivent être tenus propres sur un rayon de 20 mètres, etc.

En ce qui concerne l‟obtention des licences, la Direction doit privilégier les personnes qui ont de faibles ressources économiques et qui ne peuvent prétendre à d‟autres types d‟emplois. La Direction a également le devoir de sanctionner les commerçants de rue qui ne respectent pas le règlement. Les sanctions prévues sont de plusieurs types et de degré variable (avertissement, amende, suspension de la licence, fermeture du commerce, retrait de la licence). Cependant, dans les faits, les forces de l‟ordre privilégient le dialogue. C‟est seulement dans le cas où le vendeur averti ne se conforme pas aux recommandations que la sanction est infligée. Bien que ce règlement soit entré en application au cours de l‟année 1999, on peut affirmer qu‟il existe un décalage colossal entre la législation et la réalité. Au niveau de la Calle Las Casas, les règles les plus fondamentales sont bafouées. Les vendeurs de rue n‟ont pas de licence et occupent souvent une partie des voies de circulation. L‟ambulantage qui est pourtant totalement prohibé au sein de la zone « 1 » se développe de la même façon que dans les autres zones. Certains vendeurs y commercialisent des produits totalement prohibés (comme des dvd piratés à caractère pornographique). Les vendeurs sont non-déclarés et le travail des personnes mineures est assez répandu. L‟illégalité étant généralisée, on ne peut établir une liste exhaustive recensant les infractions commises. On peut cependant préciser que la plupart des commerçants ignorent le contenu, voire l‟existence, de ce règlement.

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A Oaxaca de Juárez, comme dans la plupart des villes mexicaines, l‟ambulantage est vivement critiqué par plusieurs types d‟acteurs. Ces critiques, le plus souvent négatives, sont portées par la population locale, les commerçants et par la Municipalité. Bien entendu, il ne s‟agit pas d‟une liste exhaustive et il serait intéressant de recueillir le point de vue d‟autres groupes comme par exemple celui des touristes. Quel regard peut bien porter ce groupe à l‟égard du commerce ambulant ? Il convient de préciser que ce groupe est extrêmement varié et peut-être que certains touristes découvrent ce type de commerce pour la première fois au Mexique. Ces derniers peuvent donc exprimer avec un certain recul les avantages et les inconvénients qu‟offre cette activité. Voient-ils dans le commerce ambulant une dégradation du paysage urbain ou une offre alléchante ? Si nous revenons sur les groupes étudiés, il est indéniable que les critiques émises dépendent des intérêts des acteurs cités. Dans l‟optique de discerner ces différents points de vue, la lecture de la presse peut s‟avérer enrichissante18. Les journaux constituent un support d‟expression pour tous les acteurs étudiés.

Compte tenu de l‟importance du groupe, les avis sont très partagés. Une partie de la population voit dans l‟ambulantage l‟opportunité d‟acquérir des biens courants achetés sur un trajet quelconque et ceci à un prix inférieur à ceux du marché « formel ». Toutefois, comme le souligne Carlos Bustamante Lemus de l‟Institut de Recherches Economiques de l‟Université Nationale Autonome de Mexico (UNAM), il convient de préciser que les biens commercialisés sont souvent de qualité médiocre et n‟ont pas de garantie [UNAM, 25/07/2007]. D‟autres personnes mettent en avant le manque d‟hygiène. A côté de cette fraction de la population appréciant cette vente opportune se situe une plus large population qui déplore la prolifération de l‟ambulantage. Le commerce ambulant est vecteur de nuisances inhérentes à l‟activité (nuisances sonores, olfactives, visuelles…). Au-delà de ces nuisances, certaines personnes mettent en avant la dégradation générale du paysage urbain. Au cours de discussions avec des personnes diverses, certaines m‟ont tout simplement affirmé que l‟ambulantage, qui fait partie

18

Les investigations se sont portées en partie sur le journal El Imparcial Oaxaca. Ce choix est justifié par sa large diffusion. Fondé en 1951, El Imparcial est aujourd‟hui le quotidien le plus consulté dans l‟Etat de Oaxaca. Les idéaux exprimés dans ce périodique sont de tendance libérale.

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intégrante du paysage urbain de Oaxaca, est le signe de la pauvreté du pays et de ses difficultés à entrer dans le « modernisme ». Par ailleurs, il faut noter que la population locale entre en interaction quotidiennement avec les vendeurs ambulants lors des déplacements routiniers effectués à pied, en voiture ou encore en autobus. A ces occasions, la population supporte péniblement la présence des vendeurs qui occupent partiellement la voie publique et en viennent parfois à l‟obstruer (soustraction d‟espaces de circulation, obstruction de l‟accès aux résidences). La gêne occasionnée par cette occupation illégale conduit à la dépréciation de l‟ambulantage. Plutôt que de créer une dichotomie entre ceux qui « apprécient » et ceux qui « déprécient » le commerce ambulant, il serait peut-être plus convenable de dire que ces appréciations sont entremêlées. Peut-on légitimement qualifier l‟ambulantage comme source de désordre tout en niant les avantages du service proposé ? Cette pluralité d‟opinions rend compte de la complexité du débat entourant l‟ambulantage.

Les commerçants établis sont probablement ceux qui critiquent le plus vivement et le plus ouvertement leurs homologues ambulants. Cela ne paraît pas surprenant dans la mesure où ce sont eux qui subissent le plus directement la présence des vendeurs ambulants. Si nous revenons au territoire d‟étude, les commerçants légaux établis dans la Calle Las Casas ont émis plusieurs reproches à l‟égard des vendeurs ambulants qui se sont installés juste devant leurs vitrines. Dans un article intitulé « Les ambulants asphyxient les établis », José Luis Rosas expose les conflits opposant les vendeurs établis et leurs homologues ambulants [06/01/2008]. « Des centaines de postes ont été installés sur la Calle Las Casas, avec pour motif la vente de produits affiliés à la célébration des Rois Mages. Ceux-ci asphyxient littéralement les commerces établis et c‟est pourquoi leurs propriétaires ont exigé aux autorités municipales un ordonnancement de l‟ambulantage. […] Les propriétaires se plaignent de payer des loyers importants, l‟électricité, les impôts, les employés, la Sécurité Sociale, entre autres dépenses. Les ambulants, exempts de ces charges, tirent le meilleur parti de la saison et ceci sous la complaisance des autorités municipales.

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Au cours d‟un détour, il a pu être établi que quelques établissement commerciaux offraient des réductions de 10, 20, 40 voire 50 % afin d‟attirer plus de clients. Sans cela, le manque à gagner serait colossal. Pour les propriétaires, ce sont les autorités municipales qui sont responsables de cette situation. La majorité des commerçants installés dans les rues envahies par l‟ambulantage ont précisé qu‟il est urgent que le Gouvernement de l‟Etat et/ou le Gouvernement Municipal déterminent un lieu approprié pour que les ambulants puissent y être déplacées à court terme afin que les commerçants établis puissent se remettre des pertes économiques engendrées au cours de l‟année. » [José Luis Rosas, 06/01/2008 ; traduction personnelle]

D‟autres acteurs économiques, tel que Adalberto Castillo González, président de la Chambre Nationale de l‟Industrie et de la Transformation (CANACINTRA), s‟inquiètent des répercussions de l‟ambulantage sur l‟attractivité économique de Oaxaca [Torres, 03/01/2008]. « Si nous voulons réellement que Oaxaca soit attractive pour les investisseurs, nous devons commencer par réordonner le commerce ambulant. « Il n‟est pas tolérable que notre ville soit le berceau de l‟anarchie. A chaque coin de rue il y a des commerçants qui ignorent et enfreignent la Loi. » » [Torres, 03/01/2008 ; traduction personnelle]

La consultation des journaux fait apparaître que les commerçants ambulants critiquent parfois ouvertement d‟autres commerçants ambulants. Les critiques portent en général sur l‟emplacement du point de vente ou encore sur la taille ou la nature du commerce. L‟aggravation de la situation sur la Calle Las Casas est telle que quelques commerçants ambulants ont exigé que la Municipalité intervienne pour réguler ce phénomène. [A propos d‟un vendeur ambulant empiétant sur un croisement entre deux axes important…] « Les vendeurs qui occupent les abords immédiats du croisement ont confirmé que le poste obstrue la visibilité. De ce fait, les autres commerces Ŕ parmi eux un commerce de tacos Ŕ qui sont installés sur la même artère sont quasiment invisibles aux yeux des passants et, par conséquent, le propriétaire du commerce de tacos ne fait aucune vente. […] Il n‟est pas acceptable que la Municipalité laisse se développer les postes dans les rues. Le conseiller municipal a annoncé qu‟il allait réordonner l‟ambulantage mais il n‟a pas laissé entendre quand ni comment, ont ajouté les commerçants établis ainsi que quelques

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vendeurs ambulants installés depuis déjà plusieurs années dans cette artère et qui exigent une régulation de cette situation. » [El Imparcial, ?

19

; traduction personnelle]

Au cours d‟une conversation engagée avec un commerçant ambulant vendant des bijoux, des statuettes et des bracelets à proximité du site archéologique de Monte Alban, ce commerçant m‟a souligné le fait que l‟ambulantage, tel qu‟il se manifeste dans la Calle Las Casas, a pris des dimensions considérables et un ordonnancement devrait être opéré par les autorités compétentes. Je lui ai fait part de mon étonnement vis-à-vis de sa réflexion et de ses critiques dirigées vers ses homologues. Celui-ci m‟a rétorqué que l‟ambulantage, tel qu‟il se déploie au niveau de la Calle Las Casas est démesuré et que sa situation personnelle était bien différente de celle des autres vendeurs. En effet, contrairement aux commerçants ambulants qui construisent des points de vente d‟une dimension conséquente, mon interlocuteur disposait seulement de quelques objets dispersés sur une couverture.

La Municipalité et les élus doivent tenir compte des revendications des différents partis (population locale, commerçants…). Outre cela, il faut ajouter que la Municipalité à tout intérêt à réguler ce commerce. Effectivement, comme le souligne Carlos Bustamante Lemus, « le commerce ambulant affecte non seulement les commerçants établis et les consommateurs, mais aussi le gouvernement en ce qui concerne l’utilisation de l’espace, l’occupation des rues et le paiement des impôts » [UNAM, 25/07/2007 ; traduction personnelle]. Aussi, d‟un point de vue légal, la Municipalité ne peut tolérer que les espaces publics se convertissent en un lieu de vente de produits illicites (articles de contrebande, documents piratés, trafic de drogue). La Municipalité est l‟autorité compétente par excellence qui a le pouvoir de réguler l‟ambulantage. Comme le remarque Carlos Bustamante Lemus, c‟est à la Municipalité qu‟incombe la construction des marchés publics. « Assurément, sans marchés publics, la population continuera de chercher des sites illégaux, que ce soit pour vendre ou pour acheter. » [UNAM, 25/07/2007 ; traduction personnelle] 19

L‟intégralité de la source de cette coupure de journal était indisponible.

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Dans le cadre du stage, les membres du service « Développement Urbain, Œuvres Publiques et Ecologie » s‟accordent sur la nécessité de réguler cette pratique. La complexité du débat entourant l‟ambulantage ainsi que le contexte social difficile dans lequel se situe Oaxaca de Juárez font que les demandes de régulation n‟ont pas abouti à la conception et à la réalisation d‟un projet concret. Toutefois, il est important de préciser que cette problématique est bien connue du service dans lequel je suis intégré. L‟abondance des articles de presse traitant de l‟ambulantage confirme l‟importance centrale du sujet ainsi que l‟impérieuse nécessité de mener une réflexion globale et de concevoir des propositions concrètes pour ordonner ce type de commerce. Ce travail de réflexion/proposition doit être en phase avec les réalités et les caractéristiques de Oaxaca de Juárez (importance des ressources financières, contexte social, importance de la maîtrise du paysage urbain). Aussi, il convient de préciser que le phénomène prend de l‟ampleur et l‟on peut émettre l‟hypothèse que la situation ne devrait pas s‟améliorer dans le contexte actuel de crise économique. Celle-ci se manifeste concrètement par une hausse du chômage. Or, en temps de crise, les personnes à la recherche d‟un travail ont tendance à se détourner vers le commerce informel [Meissonnier, 2006, p.6 ; Cabral Gomes, Réginensi, 2007, p.7 ; Hiernaux-Nicolas in Bidou-Zachariasen, 2003, p.208].

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Le président de la Municipalité de Oaxaca de Juárez, José Antonio Hernández Fraguas (PRI), a pris ses fonctions au début de l‟année 2008. Au cours de son mandat, d‟une durée de trois ans, les autorités compétentes devront prendre des dispositions afin de résoudre les problèmes touchant spécifiquement le territoire municipal. Selon Oscar Salas Fonseca20, les deux actions prioritaires sont la réfection des chaussées et la régulation de l‟ambulantage. A ce jour, bien que de nombreuses actions aient été engagées afin de remettre en état une partie du réseau routier de la municipalité, aucune mesure n‟a été prise en ce qui concerne l‟ambulantage. Néanmoins, un groupe d‟architectes (intégré au sein de la CGDUOPE) a émis, au cours de l‟année 2007, un projet visant à relocaliser les vendeurs ambulants installés sur la voie publique. Le projet proposait la création d‟une structure, haute de deux étages, dans laquelle 938 postes de vente auraient pu être installés. Plus précisément, la structure devait comprendre quatre niveaux : un souterrain comprenant 89 places de parkings et trois niveaux destinés à la relocalisation des vendeurs ambulants (rez-de chaussée et deux étages). Cette structure devait être implantée aux abords immédiats de la Calle Las Casas, du périphérique, de la gare routière 2nde classe et du marché de gros (Central de Abastos).

20

Oscar Salas Fonseca dirige le département technique de la « Coordination Générale du Développement Urbain, Œuvres Publiques et Ecologie » (CGDUOPE) de la Municipalité de Oaxaca de Juárez. Il a également pour fonction de contrôler le bon déroulement des actions pilotées par cette même Coordination.

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FIGURE 9 : LOCALISATION DU PROJET

Source : réalisation personnelle

FIGURE 10 : PLANS DE LA STRUCTURE VISANT A RELOCALISER LES VENDEURS AMBULANTS

Vue de la façade principale

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Plan du parking souterrain et du rez-de-chaussée comprenant 304 emplacements commerciaux

er

Plan du 1 et du 2

nd

étage

comprenant chacun d’entre eux 317 emplacements commerciaux

Source : CGDUOPE, 2007

Ce projet présenté aux leaders des associations de vendeurs ambulants n‟a cependant pas été mené à terme. Au-delà des questions de financement, il paraîtrait que ce soit la forme de la structure qui ait fait débat. La relocalisation des vendeurs ambulants sur trois niveaux distincts auraient généré des conflits internes. Effectivement, il va de soit que les commerçants auraient lutté d‟une manière ou d‟une autre pour obtenir les emplacements les plus propices à la vente. La forme même de la structure induit de fait une concurrence déloyale entre les commerçants. Cet aspect nous montre à quel point la forme architecturale peut mettre en valeur ou au contraire déprécier un projet urbain global.

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Selon Raffaele Cattedra et Maurizio Memoli [in Bidou-Zachariasen, 2003, pp.147173], l‟amélioration de l‟image urbaine passe par la normalisation des règles urbanistiques. Cette observation apparaissait dans une étude portant sur « la réappropriation du patrimoine symbolique du centre historique de Naples ». En ce qui concerne Oaxaca de Juárez, comme on a pu le voir précédemment, bien qu‟une législation spécifique soit entrée en vigueur en vue d‟encadrer l‟ambulantage, celle-ci n‟est nullement respectée. Ce non-respect de la réglementation et la prolifération actuelle de l‟ambulantage nous amène à nous interroger sur les actions qui peuvent éventuellement être entreprises par la Municipalité afin de réguler l‟ambulantage et améliorer l‟image urbaine de Oaxaca de Juárez. Afin d‟avoir un aperçu des actions envisageables, il peut être intéressant de se pencher sur les projets qui ont été développés dans d‟autres villes, situées à l‟étranger et au Mexique. Dans cette optique, des leçons sont à tirer des projets entrepris à Istanbul (Turquie), Rio de Janeiro, Recife (Brésil) ou encore à Mexico. Bien que ces municipalités soient géographiquement éloignées de Oaxaca de Juárez, ils n‟empêchent que celles-ci présentaient des situations analogues à notre cas d‟étude. Préalablement à l‟intervention des autorités municipales, toutes ces villes étaient fortement affectées par l‟ambulantage Ŕ surtout dans les zones centrales Ŕ et présentaient une image urbaine dégradée. Autre similarité avec Oaxaca de Juárez, les centres historiques des villes d‟Istanbul, Recife et de Mexico présentent la particularité d‟être reconnus patrimoine culturel de l‟Humanité par l‟UNESCO.

Si l‟on entreprend d‟étudier les projets de régulation de l‟ambulantage expérimentés à l‟étranger, il est tout à fait passionnant de s‟arrêter quelques instants sur les actions menées par la Municipalité du Grand Istanbul. L‟étude dirigée par Joël Meissonnier [2006] sur les marchands de rue à Istanbul laisse percevoir de nombreuses similitudes entre Oaxaca de Juárez et Istanbul. Fortement affectées par l‟ambulantage, 21

Le titre de cette section est tiré de l‟étude de Joël Meissonnier [2006] intitulée « Marchands de Rues à Istanbul : Présence urbaine d‟une offre commerciale en perpétuelle recomposition spatiale » sur laquelle s‟appuie cette sous-partie.

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ces deux villes se sont engagées dans une requalification de l‟image urbaine. Cette requalification s‟inscrit dans une démarche, plus large, de valorisation touristique. « À partir de 2002, sur décret préfectoral, les commerçants ambulants ont dû quitter un certain nombre de lieux, au nom d‟une mystérieuse politique d‟embellissement de l‟environnement. […] À cette époque, la Municipalité du Grand Istanbul dévoile avec succès son projet de « ville monde » qui, toutefois, avait été précédé par plusieurs tentatives moins réussies (1991 ; 1994 ; 1995). […]Dans cette perspective, la disparition des vendeurs de rue entre plus ou moins explicitement dans l‟agenda municipal. C‟est ainsi qu‟au motif d‟un « embellissement » urbain, les vendeurs qui l‟ « entachent » par leur présence, sont priés de disparaître. En dénonçant une criminalité des vendeurs, que seule la roublardise de certains peut expliquer, la municipalité d‟Eminönü est parvenue à vider la place située devant le Bazar Égyptien et la mosquée Yeni Camii. […] Dans la littérature et le cinéma turcs, ainsi que dans la chanson populaire, [ces lieux étaient] pourtant indissociables du grouillement des vendeurs […]. Si l‟espace a été initialement dégagé pour permettre des travaux de rénovation du mobilier urbain (dallage de granit, éclairage de qualité et surveillance sécurisée par caméra vidéo) et de mise en conformité avec les standards esthétiques internationaux, la mise à l‟écart dont les vendeurs avait fait l‟objet fut ensuite entérinée. » [Meissonnier, 2006, pp.31-32]

Ce scénario qui prétend éradiquer l‟ambulantage par le biais de procédures légales et par une forte répression menées par les autorités compétentes apparaît presque caricatural. Toutefois, cette éviction des marchands ambulants du centre de la métropole turque ne fut qu‟éphémère. Conscientes d‟avoir ôté une pratique ancestrale de leurs territoires, les municipalités de Beyoğlu, de Şişli et d‟Eminönü en tête, se sont engagées dans une démarche de folklorisation de l‟activité commerçante des rues. « La Mairie du Grand Istanbul a récemment saisi tout l‟intérêt d‟impliquer certaines catégories de vendeurs de rue dans sa politique de valorisation du patrimoine. Les municipalités des arrondissements de Beyoğlu et d‟Eminönü se sont engagées dans la reconstitution d‟un « décor urbain », celui de l‟ancienne capitale de l‟Empire ottoman, sans craindre l‟anachronisme ou l‟approximation des faits historiques. Qu‟importe ce que fut le passé, les rénovations sont d‟abord des façades destinées à répondre à l‟attente présumée d‟un tourisme de masse en mal d‟images, dont le rapport à l‟histoire repose principalement sur la nostalgie d‟un passé idéalisé. Ainsi, depuis février 2006, les vendeurs stationnés aux emplacements dotés d‟une excellente chalandise tant locale que touristique sont contraints d‟acquérir une charrette

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couverte, reproduction d‟un modèle présenté comme « authentique », de couleur rouge et arborant les armoiries de la municipalité. » [Ibid., pp.32-33]

Au travers de cette citation, il apparaît que quelques municipalités situées au cœur du Grand Istanbul ont « régularisé » une minorité de vendeurs ambulants. A ces derniers, les municipalités ont imposé un type de commerce (vente de pain de sésame par exemple), un costume spécifique ainsi qu‟une charrette qui reste à la charge du vendeur ambulant. Outre les problèmes moraux que pose une telle théâtralisation, il est intéressant de se pencher quelques instants sur la personne du vendeur ambulant folklorisé. Il ressort de l‟étude de Joël Meissonnier que les quelques personnes instrumentalisées sont pour la plupart insatisfaites. Bien qu‟ils ne travaillent plus sous la menace des contrôles policiers, les vendeurs officialisés déplorent le volume de toutes les taxes qu‟ils ont à payer, la rigidité des horaires ainsi que la non-fonctionnalité des charrettes conventionnées par la Municipalité et vendus à un tarif exorbitant. L‟auteur de l‟étude en vient à la conclusion que « l‟embellissement recherché s‟est traduit par la mise à l‟écart d‟une grande majorité de vendeurs et par l‟instrumentalisation d‟une minorité » [ibid., p.34].

Les travaux effectués par Maria de Fatima Cabral Gomes et Caterine Réginensi [2007] sur l‟ambulantage à Rio de Janeiro sont particulièrement intéressants car ils exposent clairement les différentes actions engagées par les autorités publiques. Ces dernières années, la Municipalité de Rio a mené successivement deux politiques distinctes. La première était basée sur la répression tandis que la seconde prévoyait la relocalisation et la sédentarisation des vendeurs ambulants dans des sites aménagés en conséquence. Comme le souligne les auteurs cités, l‟histoire politique du Brésil est marquée par l‟absence de politiques publiques. Depuis quelques années, les autorités pensent mettre un terme aux problèmes structurels que connaît le Brésil en menant une politique fondée sur la répression. Ainsi, les auteurs ont la sensation que la question sociale (le chômage par exemple) qui s‟exprime au travers d‟une augmentation de l‟activité de commerce

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ambulant devient une question de sécurité publique traitée par l‟action répressive de la police. Cette répression augmente significativement chaque fois que la Municipalité approuve un nouveau projet visant à faire de Rio une ville globale, compétitive et attrayante pour un tourisme local et international. Dans ce cadre, les médias (programmes télévisés, journaux) jouent un rôle important en véhiculant une image dégradée du vendeur ambulant. Au côté de cette stratégie répressive, la Municipalité a adopté une autre stratégie qui vise à relocaliser les vendeurs ambulants dans des structures spécifiques. Les deux sites les plus populaires conçus à cet effet sont le Camelódromo22 et le Mercado Popular de Rocinha. Dans l‟enceinte de ces marchés, les vendeurs qui ont obtenu une licence disposent d‟un box en dur dans lequel ils exposent et entreposent leurs marchandises. Ces marchés semblent correspondre aux idéaux de l‟administrateur du quartier de Rocinha : « Il faut qu‟il y est des espaces adéquats pour que les ambulants puissent commercialiser leurs produits sans déranger le droit d‟aller et venir du citoyen et tout en préservant la beauté de la ville. » [Cabral Gomes, Réginensi, 2007, p.21]

Toutefois, comme le précise justement cet administrateur, la ville de Rio n‟a pas d‟espaces pour satisfaire l‟énorme quantité de personnes qui ont trouvé un emploi dans le commerce informel. Au marché populaire de Rocinha, la plupart des demandes ne peuvent être prise en compte faute d‟espaces appropriés. En théorie, les vendeurs qui doivent obtenir en priorité une licence (permettant le droit de vente dans les marchés créés à cet effet) sont les chômeurs, les anciens détenus, les plus démunis et les personnes handicapées. Ce principe de priorisation est toutefois mis à mal par la corruption exercée par divers acteurs (forces de l‟ordre, administration municipale, associations de vendeurs ambulants). Ceux-ci interviennent illégalement dans l‟attribution des licences en prélevant des taxes imposées aux vendeurs désirant se sédentariser dans les marchés populaires. Au-delà de la ville de Rio de Janeiro, d‟autres municipalités brésiliennes se sont lancés dans des démarches similaires. Le Camelódromo de Recife, par exemple, a connu un succès international [Ramos de Dios, 2004]. Ce marché ayant une forme longitudinale 22

Ce terme à pour racine le mot « camelot » qui désigne un vendeur ambulant.

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se situe au cœur d‟une zone où plus de 150.000 personnes transitent chaque jour. Dans son enceinte, plus de 1.600 modules y ont été installés et autant de vendeurs ambulants (aujourd‟hui sédentarisés). Ce projet de haute qualité architecturale est parfaitement intégré au territoire et au paysage urbain de Recife (classé patrimoine culturel de l‟UNESCO).

Depuis

l‟époque

Tenochtitlan, actuellement

préhispanique, dénommée

la

Mexico

capitale ou

encore

mexicaine District

(ancienne

Fédéral)

est

particulièrement affectée par la vente de rue [Exbalín Oberto, Stamm, 2008]. Déjà, à la fin du 18ième siècle, le Royaume de la Nouvelle Espagne avait pris des mesures visant à relocaliser les vendeurs de rue qui occupaient alors la place principale. Afin de parvenir à cet objectif, les autorités au pouvoir avaient procédé à la restructuration de la place, à l‟instauration de lois interdisant la vente de rue et avaient engagé la construction de marchés publics pour relocaliser les vendeurs expulsés. Le commerce de rue s‟est toutefois perpétué et les politiques publiques visant à restreindre le commerce de rue se sont multipliées. Au cours de la seconde moitié du 20ième siècle, deux interventions majeures ont été engagées par deux régents du District Fédéral. Uruchurtu, régent du District Fédéral entre 1953 et 1967, a appliqué dès sa prise de pouvoir une politique visant à éliminer le commerce de rue. Juste après avoir décrété la prohibition de la vente de rue, Uruchurtu a initié une politique de construction de marchés publics. En peu de temps, entre 1953 et 1966, 173 marchés ont été construits (ou reconstruits) dans la capitale. 50,000 commerçants de rue ont pu être relocalisés. Cependant, il est à préciser que les répercussions positives de cette politique interventionniste sont apparues sur le long terme. Aujourd‟hui encore, ces marchés constituent d‟importantes places commerciales au sein de la capitale, voire de la République mexicaine. La crise économique qui eut lieu à la fin des années 1960 s‟est accompagné d‟un accroissement significatif du nombre de vendeurs de rue. A partir de la fin des années 1980, le gouvernement du District Fédéral s‟est engagé dans une politique de patrimonialisation de centre ancien de Mexico. Afin d‟éliminer le commerce de rue, qui constitue une entrave à la politique d‟embellissement, le régent Manuel Camacho Solìs qui prit ses fonctions en 1992 a instauré un nouveau décret interdisant le commerce de rue sur l‟ensemble du périmètre du centre historique. Dans le même temps, le Page | 60


gouvernement du District Fédéral a engagé la construction de 27 places commerciales afin de relocaliser les vendeurs expulsés. Cette politique, comme celle menée par Uruchurtu, est donc basée à la fois sur la répression et sur la création de nouveaux marchés publics offrant une opportunité de relocalisation pour les vendeurs expulsés. Ce type de politique a pour but de formaliser le commerce informel mais surtout de libérer les espaces publics [Stamm, 2008a, p.103]. Toutefois, en dépit de ces politiques de grande ampleur, on pouvait dénombrer en 1999 quelques 100,000 ambulants dans les espaces publics de la capitale [Ramos de Dios, 2004]. Depuis le début des années 2000 et surtout depuis fin 2006, date de l‟élection de Marcelo Ebrard Casaubón en tant que gouverneur du District Fédéral, le gouvernement de cette entité administrative a mené une politique répressive contre les vendeurs ambulants installés dans le centre historique de México. La répression engagée contre les vendeurs ambulants connut son paroxysme au cours de l‟année 2007 [Notimex 21/10/2007]. La répression menée par les forces de l‟ordre, tout d‟abord au niveau du centre historique classé patrimoine culturel de l‟UNESCO, s‟est propagée dans d‟autres secteurs de la capitale. Le délégué de la délégation de Coyoacán23, avec l‟appui du gouverneur du District Fédéral, s‟est engagé dans une entreprise similaire visant à améliorer l‟image urbaine du centre de Coyoacán. Cette démarche, qui sous-tend une délocalisation des vendeurs ambulants, ne s‟est pas déroulée sans heurts. Pour conclure, il apparaît que les politiques visant à contrecarrer le commerce de rue sont très anciennes. Toutefois, depuis les années 2000 des changements sont apparus : alors que les politiques antérieures entreprenaient la construction de nouveaux marchés publics, les politiques contemporaines, fidèles aux principes de l‟idéologie néolibérale, sont résolument répressives. Le retrait de la puissance publique (clé de voute de l‟idéologie néolibérale) amène peu à peu le gouvernement du District Fédéral à se désintéresser des marchés publics. Dans ce contexte, la relocalisation des vendeurs ambulants paraît compromise dans la mesure où aucune offre alternative n‟est proposée au nombre considérable de vendeurs occupant actuellement les rues de la capitale mexicaine.

23

Le District Fédéral est composé de 16 délégations dont celle de Coyoacán. Cette dernière délégation, relativement éloignée du centre-ville de Mexico, est connu comme étant le quartier des artistes et des philosophes.

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Les politiques publiques expérimentées à l‟étranger sont riches d‟enseignement. Cependant, notre logique n‟est en aucune façon d‟importer à Oaxaca les soit disant « bonnes pratiques » tout en rejetant de l‟analyse les spécificités de notre lieu d‟étude. On peut voir que les politiques expérimentées à l‟étranger et au Mexique ont tour à tour été basées sur la répression et sur la recherche de solutions alternatives en vue de relocaliser les vendeurs de rue. En ce qui concerne Oaxaca de Juárez, le chapitre premier a montré que le territoire municipal se caractérise par une situation sociopolitique particulièrement fragile. Dans ce cadre, il paraît indéniable qu‟une politique centrée sur la répression massive des vendeurs ambulants pourrait provoquer un envenimement de la situation et une dépréciation de l‟autorité municipale.

Jusqu‟à aujourd‟hui, les élus municipaux de Oaxaca ne se sont pas réellement préoccupés de la problématique de l‟ambulantage. Pour les élus locaux, la relocalisation des vendeurs ambulants est une action qui nécessite courage et force politique. Cela peut s‟expliquer par les coûts économiques, sociaux et politiques non-négligeables de ce type d‟intervention. Ainsi, on peut comprendre pourquoi les élus ont tendance à porter peu d‟intérêts à l‟ambulantage, problématique néanmoins centrale dans de nombreuses villes mexicaines. Il convient toutefois de nuancer cette position qui revient à dire que les politiques interventionnistes sont vouées à un échec certain. Effectivement, lorsqu‟une politique repose sur un projet longuement étudié qui s‟intègre parfaitement au contexte local, des résultats positifs peuvent apparaître à court terme. La récupération des espaces publics est généralement acclamée à la fois par les citoyens et les journalistes [Exbalín Oberto, Stamm, 2008].

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Précédemment, nous avons pu voir que la plupart des vendeurs de rue du municipe travaillent dans l‟illégalité. Toutefois, il est important de préciser que la plupart de ces vendeurs sont affiliés à des associations civiles. Sur le territoire de Oaxaca de Juárez, l‟association qui regroupe le plus grand nombre de vendeurs ambulants est l‟association civile Lázaro Cárdenas del Río. Ce type d‟association est d‟un point de vue juridique tout à fait légal bien qu‟elle ait pour fonction de défendre les intérêts de travailleurs illégaux. Sur le territoire municipal chaque association civile « contrôle » un territoire spécifique. Selon Oscar Salas Fonseca, la très grande majorité des vendeurs ambulants sont affiliés à ces associations civiles. Ces associations, contrôlées par des leadeurs, organisent la vente ambulante. Les horaires ainsi que les emplacements sont strictement contrôlés. Bien que la vente ambulante paraisse totalement chaotique, une analyse approfondie révèle l‟existence d‟une organisation minutieuse. Ces associations, représentées par leurs leadeurs, sont souvent consultées par l‟autorité municipale. Cependant, il ne faut pas croire que la Municipalité dispose d‟un pouvoir absolu sur ces associations. Effectivement, les associations civiles sont puissantes dans la mesure où elles regroupent un grand nombre de vendeurs de rue. Plus une association regroupe de membres, plus celle-ci est en position de force vis-à-vis de l‟autorité municipale. Selon Oscar Salas Fonseca, les relations associations-Municipalité sont des relations de connivence. Afin d‟illustrer comment s‟opère la gouvernance, nous pouvons relater l‟anecdote suivante. Récemment, les vendeurs ambulants s‟étaient accaparés de la place centrale (le zócalo). La Municipalité, qui souhaitait récupérer cet espace central afin de valoriser l‟image urbaine du centre historique, a consulté les associations civiles. Les leadeurs associatifs et la Municipalité sont parvenus à l‟accord suivant : les vendeurs ambulants quitteront la place centrale mais pourront occuper la place Aldama situait à une centaine de mètres du zócalo. Ainsi, la Municipalité concède certains privilèges aux vendeurs ambulants à condition que les leadeurs associatifs respectent Ŕ et fassent respecter - certaines règles précises. Bien entendu, pour les élus municipaux, il est indéniable que concéder certains privilèges est aussi un moyen de satisfaire les électeurs. De ce point de vue, il paraît intéressant de rappeler que les vendeurs ambulants peuvent être un intermédiaire privilégié entre la population et les acteurs municipaux étant donné qu‟ils occupent quotidiennement Page | 63


l‟espace public (espace politique par excellence selon Habermas, op. cit.). Dans ce prolongement, sans toutefois exagérer les interrelations entre les vendeurs de rue et la sphère politique, on peut noter que certaines personnalités sont intégrées dans ces deux milieux. C‟est par exemple le cas de la famille Aquino Santiago dont les deux frères occupent des positions stratégiques. Le premier est président de la municipalité de Santa Cruz Xoxocotlán24 ; le second est secrétaire général de l‟association civile « Nueva Sociedad Siglo XXI ». Les deux frères associent leurs intérêts et en tirent des avantages financiers et politiques conséquents. [Beltrán, 18/04/2009]

Dans l‟optique de formuler un projet urbain visant à relocaliser les vendeurs ambulants, il est important de saisir quels sont les acteurs fondamentaux, leurs intérêts et de quelle façon s‟organise la gouvernance. Etant donné la nature des relations entre la Municipalité et les associations de vendeurs ambulants, il paraît important de souligner que la production d‟un « bon » projet urbain repose à la fois sur un bon diagnostic et sur le maximum de dialogue possible. Le dialogue est fondamental afin que les différentes parties prenantes parviennent à planifier des actions concrètes qui seraient en quelque sorte un compromis entre les différents intérêts (souvent antinomiques) des acteurs impliqués. Au cours de la phase de planification d‟un projet de régulation de la vente ambulante, une grande diversité d‟acteurs appartenant à différents champs disciplinaires doivent participer au débat. En effet, la question de l‟ambulantage dépasse largement la question urbaine. Comme nous l‟avons montré précédemment, les actuels vendeurs ambulants sont dans l‟illégalité, ne payent pas de taxes, occupent des espaces dont ils ne sont ni locataires ni propriétaires, ne cotisent pas, n‟ont pas de couverture sociale, etc. Afin de formaliser la vente de rue, des économistes, des sociologues, mais aussi des juristes doivent participer au débat. Les projets de relocalisation sont en général accompagnés de politiques socioéconomiques visant à faciliter l‟accession à la propriété des locaux commerciaux par l‟intermédiaire du paiement de taxes allégées, de prêts bancaires à faible taux d‟intérêts, de création de zones franches, etc. La Municipalité ainsi que certains acteurs publics et privés disposent d‟un certain nombre de leviers afin d‟initier une formalisation progressive de cette activité commerciale. Il convient néanmoins de 24

La municipalité de Santa Cruz Xoxocotlán fait partie intégrante de l‟agglomération de Oaxaca de Juárez. Localisée au sud de la capitale, Santa Cruz Xoxocotlán est la cinquième plus grande ville de l‟Etat de Oaxaca.

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rappeler qu‟il existe une grande diversité de vendeurs ambulants et de situations. Un long dialogue entre une grande variété d‟acteurs doit donc être privilégié afin d‟élaborer une stratégie de formalisation effective.

Précédemment, nous avons constaté qu‟une politique répressive contre les vendeurs de rue serait particulièrement inappropriée et préjudiciable. Il paraît donc logique de conclure que l‟interdiction effective du commerce sur les espaces publics doit être accompagnée d‟un projet visant à relocaliser les vendeurs ambulants dans une structure adéquate. La construction d‟une nouvelle structure (comme le prévoyait le projet non-abouti émis par la Municipalité et présenté précédemment ; chapitre 2, partie C) Ŕ ou bien la réhabilitation de structures existantes Ŕ doit être d‟une dimension conséquente en raison du nombre important de vendeurs ambulants installés sur notre axe d‟étude (Calle Las Casas – Central de Abastos). Dans cette optique, il convient de préciser que le centre de Oaxaca de Juárez offre bien peu de possibilités de construction. En effet, la zone centrale est urbanisée et, logiquement, l‟offre de terrain vacant est réduite. De ce fait, il paraît pertinent d‟envisager l‟édification d‟une structure sur Ŕ ou à proximité Ŕ de la Central de Abastos qui se situe à la limite du centre historique. Cette réflexion s‟appuie sur le fait que la Central de Abastos présente un fonctionnement chaotique et qu‟il semble tout à fait légitime de restructurer intégralement cet espace urbain péricentral.

En dépit des dysfonctionnements urbains générés par la Central de Abastos, on ne peut réfuter le fait que ce territoire présente de précieux atouts. Géographiquement, ainsi que dans les représentations des habitants de l‟agglomération, cet espace dispose d‟une position centrale. Aussi, cette zone marchande présente l‟avantage de se localiser aux abords immédiats d‟importantes infrastructures de transport (gare routière seconde classe, périphérique). Dans le troisième chapitre, nous verrons que l‟intervention des autorités municipales est particulièrement complexe sur ce territoire ; la Central de Abastos pouvant être assimilée à une zone de non-droit. L‟organisation politique de ce territoire constitue un obstacle conséquent à tout projet visant à requalifier cet espace urbain

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dégradé. Néanmoins, l‟implantation d‟une structure commerciale sur ce territoire et plus précisément sur la parcelle sur laquelle reposait le projet émis par la Municipalité (cf. figure 9), semble tout à fait intéressant.

PHOTOGRAPHIE 8 : TERRAIN DE PROJET

Photographie personnelle

La parcelle évoquée appartient à la Municipalité de Oaxaca de Juárez. Néanmoins, selon Oscar Salas Fonseca, le propriétaire de la parcelle adjacente (sur laquelle se situe un centre commercial) conteste ce titre de propriété. Il est à préciser que ce dernier tire profit du terrain municipal où il a établi un parking payant (cf. photographie 8). Au regard du Plan d‟Usage des Sols, document central dans la planification urbaine au Mexique, la parcelle est classée « CS2-3* » (commerces et services d‟intensité moyenne et haute). De ce fait, la relocalisation des vendeurs ambulants dans une structure appropriée qui se situerait sur la parcelle énoncée est tout à fait compatible avec le corpus réglementaire en vigueur.

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FIGURE 11 : PLAN D’USAGE DES SOLS AUTOUR DE LA CENTRAL DE ABASTOS

Source : CGDUOPE ; arrangements personnels

Relocaliser les vendeurs ambulants dans une structure fixe revient à sédentariser ces commerçants. Dans cette optique, il semble capital d‟implanter la structure dans un lieu où la circulation piétonne est importante. Cette localisation permettrait, en théorie, aux vendeurs sédentarisés de capter des clients mobiles. Si l‟on considère le territoire de la Central de Abastos, le secteur Nord (intégrant la parcelle énoncée) paraît tout à fait intéressant. Situé dans le prolongement de la Calle Las Casas, ce secteur se situe entre le périphérique et la gare routière. Contrairement à ce que l‟on pourrait penser, la circulation est essentiellement piétonne entre ces deux infrastructures routières. Il semble important de préciser que l‟édification d‟une structure destinée à relocaliser les vendeurs ambulants peut être envisagée sur ce site à condition que celle-ci s‟inscrive dans son environnement urbain présent et futur. A ce sujet, il est probable que ce vaste secteur péricentral connaisse de profondes transformations dans un avenir proche. La réflexion sur la construction hypothétique d‟une structure commerciale sur ce site doit donc s‟inscrire dans une dynamique de restructuration globale de la Central de Abastos. Page | 67


Le projet émis par la Municipalité25 a montré à quel point l‟architecture pouvait apprécier ou au contraire déprécier un projet urbain. Afin d‟optimiser l‟attraction d‟une zone commerciale destinée aux vendeurs ambulants relocalisés, il semble pertinent d‟édifier une structure résolument ouverte vers l‟extérieur. Une telle structure permettrait aux clients potentiels d‟entrer plus facilement dans « l‟enceinte » commerciale. En ce qui concerne notre étude et l‟emplacement cité, il pourrait être pertinent d‟ouvrir la structure sur les axes périphériques (Avenida Juàrez Maza et Prolongación de Valerio Trujano) ainsi que sur la gare routière.

FIGURE 12 : REPRESENTATION DES CIRCULATIONS PIETONNES ENTRE LA STRUCTURE ET SON ENVIRONNEMENT

Source : réalisation personnelle

Une structure présentant une relative ouverture vers l‟extérieur a été édifiée à Mexico. L‟édifice construit dans l‟intention de relocaliser quelques vendeurs ambulants présente une forte attractivité. Selon Caroline Stamm, le succès de cette place commerciale Ŕ dénommée Pino Suárez26 - est lié à son excellente situation géographique.

25

Cf. Chapitre 2, partie C. La place commerciale populaire Pino Suárez a été inaugurée en 1993. Située à proximité du centre historique de Mexico et du zócalo (délégation), la place commerciale se localise au-dessus de la station de métro Pino Suárez. Cette structure commerciale s‟inscrit dans une vaste zone commerciale qui a pu être édifiée sur un espace qui résultait vacant depuis le tremblement de terre de 1985. 26

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Dans un entretien mené par Caroline Stamm, l‟architecte de la place commerciale Pino Suárez, Felix Sánchez, a expliqué que, selon lui, la réussite d‟un projet est empirique, il n‟y a pas de modèle pour ainsi dire. « L‟architecture des centres populaires, contrairement à celle des centres commerciaux, ne cherche pas à créer un flux entre les magasins mais plutôt un flux entre deux rues ou entre deux nœuds de transports. Felix Sánchez a évoqué trois critères nécessaires au fonctionnement d‟un centre commercial populaire : 1) la localisation, 2) l‟accessibilité et 3) une organisation de commerçants efficace, la « cerise sur le gâteau » étant l‟architecture. » [Stamm, 2005]

Au cours de sa carrière, Felix Sánchez a surtout travaillé sur des projets émanant de l‟autorité publique. Cet architecte fait généralement usage de matériaux modernes, économiques, visibles et durables. Les structures construites sont harmonieuses, légères, plaisantes… [Pacheco Colìn, 27/02/2007]. Felix Sánchez a élaboré des structures résolument fonctionnelles, laissant de côté les considérations esthétiques. Sa réflexion se porte à l‟échelle de la ville.

PHOTOGRAPHIE 9 : PLACE COMMERCIALE POPULAIRE PINO SUAREZ, DISTRICT FEDERAL

Source : Stamm, 2005, p.60

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Sur l‟emplacement situé au Nord de la Central de Abastos, on peut éventuellement imaginer l‟édification d‟une structure comprenant trois niveaux : un parking souterrain et deux niveaux supérieurs (rez-de-chaussée et étage) dans lesquels seraient installés les commerçants relocalisés. Si l‟on se conforme à l‟étude conduite par la Municipalité, la superficie disponible (environ 2.500 m²) permettrait de relocaliser plus de 600 postes commerciaux. La structure doit être résolument fonctionnelle (localisation des commerces, gestion des marchandises, des déchets, etc.). Tenant compte des carences du projet établi par la Municipalité27, on peut imaginer une structure métallique ouverte sur l‟environnement dans laquelle elle s‟inscrit. Afin de ne pas léser les commerçants installés au niveau supérieur, il conviendrait d‟édifier des rampes piétonnes qui auraient pour fonction de faciliter l‟accès entre les rues périphériques et le premier étage. La structure ne doit pas avoir l‟apparence d‟un édifice fermé restreignant la circulation piétonne. Au contraire, la structure doit encourager la mobilité afin que les vendeurs relocalisés et sédentarisés puissent capter une clientèle mobile. Il est important d‟insister sur ce point étant donné que la réussite d‟un projet de ce type dépend de l‟importance des mouvements circulatoires. Ce critère central sera nécessairement discuté lors de la présentation du projet aux associations de vendeurs ambulants.

Précédemment, nous avons pu voir que les deux tiers des vendeurs de rue occupant la Calle Las Casas sont spécialisés dans la vente de produits liés à « l‟habillement de la personne ». La structure commerciale qui serait édifiée pourrait se spécialiser dans ce type de commerce. Cette structure regrouperait une majorité des vendeurs de rue occupant la Calle Las Casas ainsi que les autres rues du centre historique où la vente ambulante provoque une dégradation de l‟image urbaine. Si l‟on se conforme au diagnostic établi par la Délégation Générale du Centre Historique (cf. annexe 1), la zone dégradée où prolifère la vente ambulante correspond à la partie occidentale du centre historique (zone orangée). La délégation citée souhaite requalifier l‟image urbaine de ce territoire afin de créer une homogénéité urbaine. A ce jour, il existe un contraste fort entre la zone occidentale et la zone septentrionale du centre historique. La zone septentrionale, qui s‟articule autour du corridor touristique Macedonio Alcalá, a été aménagée de façon à répondre aux attentes des touristes nationaux et internationaux.

27

Cf. Chapitre 2, Partie C.

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Au-delà des vendeurs de rue du centre historique, une partie des vendeurs ambulants occupant le territoire de la Central de Abastos pourrait également être relocalisés dans cette structure commerciale tournée vers « l‟habillement de la personne ». Une dynamique de spécialisation commerciale peut avoir pour corollaire le développement d‟externalités positives. « Le niveau de spécialisation d‟une place commerciale définit son aire d‟influence. Plus une place est spécialisée, plus la zone d‟influence est vaste et plus la centralité créée est importante. Cela signifie que les clients viennent de plus loin. Les places commerciales spécialisées attirent aussi de nouveaux commerçants qui viennent participer au développement de l‟activité commerciale. » [Stamm, 2004, p.6 ; traduction personnelle]

La spécialisation semble donc porteuse d‟externalités positives. En ce qui concerne le cas précis de Oaxaca de Juárez, on peut penser que la spécialisation permettra d‟optimiser l‟attractivité de la structure commerciale. La spécialisation peut avoir des effets positifs sur le fonctionnement interne. Les vendeurs regroupés peuvent élaborer des stratégies afin d‟optimiser l‟approvisionnement des produits, les réseaux de distribution, etc. Egalement, une spécialisation plus fine entre chaque commerce peut se mettre en place. Cette dynamique permettrait de stimuler l‟activité commerciale en instaurant, de fait, une certaine complémentarité entre les commerçants. Au-delà de ces pratiques qui se construisent au cours du temps, il convient de préciser que des formations peuvent être proposées aux commerçants. Cette initiative, expérimentée au centre commercial populaire Pino Suárez de Mexico, a été couronnée de succès [Stamm, 2005]. L‟organisation politique interne d‟une place commerciale est également à prendre en considération. Celle-ci peut s‟avérer déterminante dans la réussite d‟un projet. Bien entendu, il n‟existe pas de gouvernance « modèle » et il est important de rappeler que la question est empirique. Il serait préjudiciable de penser qu‟une seule structure commerciale pourrait regrouper la totalité des vendeurs ambulants occupant la partie centrale du municipe. De plus, des études menées à Istanbul [Meissonnier, 2006] ainsi que dans d‟autres villes d‟Amérique Latine [Stamm, 2008a] ont montré que certains vendeurs ambulants ont été incités par les autorités municipales à maintenir leurs activités. Il s‟agit principalement des vendeurs dont les activités ne créent de conflits ni avec les usages de l‟espace public, ni avec la vocation culturelle, touristique et récréative du centre. Ces commerçants vendent essentiellement des journaux, des aliments traditionnels, des boissons et sucreries, etc. Page | 71


Sur le terrain, il est difficile de faire une typologie distinguant clairement les activités appréciables des activités nuisibles.

Au cours de cette étude, il est apparu que la problématique de l‟ambulantage renvoie à une multitude de questions relatives à l‟occupation des espaces publics, la relocalisation des vendeurs ambulants et la formalisation d‟une activité illégale. Au-delà de ces questions auxquelles doivent répondre les pouvoirs publics, une question morale doit être posée : Est-ce que la relocalisation de la vente ambulante ne conduit pas à terme à une perte de l‟identité du Centre Historique et plus largement de la citadinité ?

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Dès la fondation de la ville et jusqu‟à la moitié du 17ième siècle, le marché le plus important se tenait sur la place centrale. Suite à un incendie28, les autorités ont ordonné d‟éloigner le marché des édifices publics et des administrations d‟Etat [Honorable Ayuntamiento de Oaxaca de Juárez, 2004]. Dès lors et jusqu‟à la fin des années 1970, plusieurs marchés pouvaient être recensés au sein de l‟actuel centre historique. L‟offre commerciale était alors diffuse et on pouvait affirmer que la totalité du centre historique constituait un vaste marché. Toutefois, à l‟intérieur de ce vaste secteur, l‟activité commerciale était particulièrement intense dans les marchés Benito Juárez Maza et 20 de Noviembre ; activité qui débordait sur les rues adjacentes. Ces deux marchés, situés l‟un à côté de l‟autre, se situent à seulement un cadre29 du zócalo.

Si l‟on entreprend d‟étudier dans quel contexte fut édifiée la Central de Abastos, il apparaît pertinent de se pencher sur la littérature mettant en exergue l‟histoire urbaine de la ville de Oaxaca. « A la fin des années 1960 Ŕ époque caractérisée par des problèmes politiques et étudiants Ŕ quelques projets urbains majeurs ont été planifiés et exécutés : la création de la Central de Abastos, la construction du périphérique et la création de la Calzada de la República. La Central de Abastos a été construite sur un terrain péricentral qui présentait la taille suffisante pour remplacer les marchés traditionnels centraux [Benito Juárez Maza et 20 de Noviembre] ainsi que pour abriter des aires de stationnement et des entrepôts. Afin de mener à bien ce projet, les terrains appartenant au quartier nommé El Pueblito ont été acquis par la Municipalité. Cette zone située aux abords du Río Atoyac était fréquemment inondée. Les habitants d‟El Pueblito ont été relocalisés sur l‟autre rive dans le quartier Lázaro Cárdenas planifié et construit à cet effet. Ce projet permettait de réactiver économiquement une zone problématique et de la convertir en un lieu

28

Au 17ième siècle, la vente de poudre à canon s‟effectuait sur la place principale. La tradition voulait alors que le vendeur teste dans sa main la poudre avant de conclure une vente. C‟est ainsi qu‟un jour une commerçante a involontairement provoqué un incendie qui conduisit à la mort de quelques personnes et à la destruction de nombreuses marchandises. 29 Etant donné que le centre historique de Oaxaca a hérité d‟un plan en damier (ou en échiquier), le „cadre‟ constitue une unité de mesure que l‟on retrouve à la fois dans les textes académiques et dans les discours quotidiens.

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d‟échanges commerciaux. » [López Salgado in Van Doesburg, 2007, Tome II Ŕ p.124 ; traduction personnelle]

Certaines informations révèlent que la construction de la Central de Abastos a été impulsée par les commerçants établis qui désiraient éliminer la concurrence exercée par les vendeurs ambulants et les vendeurs tianguis en les déplaçant en périphérie. « Les plans pour [la Central de Abastos] ont été concrétisés en 1970 et sa construction fût achevée quatre années plus tard. Cependant, cette nouvelle structure demeura inoccupée quatre ans de plus ; situation qui peut être expliquée par la réticence des petits commerçants relocalisés. Pour ne pas prendre de décisions compromettantes, les autorités prétextèrent que les nouvelles installations ne répondaient pas aux normes de sécurité. […] En 1978, les forces publiques ont transféré les vendeurs ambulants du centre dans le nouveau marché. » [H. Ayuntamiento de Oaxaca de Juárez, 2004, pp.113-115 ; traduction personnelle]

Au grand regret des commerçants établis qui désiraient capter la demande des vendeurs déplacés, la Central de Abastos s‟est rapidement convertie en une centralité touristique majeure. En théorie, la Central de Abastos devait jouer le rôle d‟un marché de gros alimentant en produits basiques l‟ensemble de l‟aire métropolitaine30. Toutefois, dès sa création, la Central s‟est convertie en un marché traditionnel où se trouvait une étonnante diversité de produits (artisanat de Oaxaca, fruits et légumes, volailles, etc.). Le caractère traditionnel du marché ainsi que la présence d‟une aire pour le commerce tianguis (pratique commerciale héritée des cultures indigènes) expliquaient en grande partie l‟attrait touristique de la zone. Conformément à la volonté des commerçants établis, la création de la Central de Abastos a permis l‟expulsion et la relocalisation des vendeurs ambulants qui commercialisaient des produits artisanaux à proximité du zócalo. « Dans le courant des années 1980, ces vendeurs ambulants ont été expulsés et leur nombre diminua considérablement quand les autorités confisquèrent leurs marchandises. Toutefois, aujourd‟hui encore, les vendeurs et les forces de l‟ordre jouent au jeu du chat et de la souris et le commerce ambulant se maintient dans la partie centrale. » [H. Ayuntamiento de Oaxaca de Juárez, 2004, pp.113-115 ; traduction personnelle]

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Aujourd‟hui, seule une section de la Central de Abastos concentre les activités liées au commerce de gros : la zone des bodegas. Cf. Chapitre 3, partie B.

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Dans l‟optique de formuler un projet de requalification de l‟actuelle Central de Abastos, il est important d‟avoir pleinement conscience du rôle fondamental du marché traditionnel dans l‟économie régionale et dans la culture oaxaqueña. Les traditions commerciales héritées de l‟époque précolombienne (tianguis) et coloniale se sont maintenues jusqu‟à aujourd‟hui. La persistance des pratiques marchandes ancestrales explique en partie l‟échec de la Central de Abastos en tant que structure commerciale grossiste d‟importance régionale. Actuellement, les marchandises commercialisées à l‟intérieur de la Central de Abastos sont destinées à une multitude d‟acteurs (du grossiste au particulier). Au fil du temps, cette structure s‟est convertie en une centralité majeure de l‟aire métropolitaine mais aussi de l‟Etat de Oaxaca. Sa position péricentrale ainsi que la multitude d‟activités commerciales qu‟elle concentre pose une série de problèmes urbains conséquents.

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Initialement, il est à préciser qu‟il est particulièrement difficile de dresser un état des lieux de la Central de Abastos. La concentration d‟une multitude d‟activités commerciales dont la répartition ne semble répondre à première vue à aucune planification ou organisation logique rend difficile la lecture de ce paysage urbain. Toutefois, des déplacements répétés sur le terrain ont permis d‟établir une certaine typologie distinguant les différentes activités commerciales. Ainsi, sur ce territoire, on peut distinguer cinq zones commerciales : les marchés centraux, les commerces établis, le marché d‟artisanat, la zone tianguis et enfin la zone bodegas (cf. figure 13).

Au cœur de la Central de Abastos se situent trois marchés publics qui prennent la forme d‟édifices couverts. Toutefois, ces marchés distincts ne peuvent être appréhendés individuellement dans la mesure où l‟ensemble de la zone est envahie par des commerces ambulants qui occupent tous les espaces intermédiaires. La concentration commerciale est telle que les clients ne peuvent délimiter physiquement chaque marché. Les produits vendus sont de nature diverse bien que la vente de produits alimentaires prédomine (fruits, légumes, boulangerie, produits carnés…). Au-delà des produits comestibles et périssables, on peut trouver dans ce complexe marchand des sections destinées à la vente de vêtements, de fleurs, d‟outils, de volailles… La zone des marchés centraux correspond au sous-territoire autrefois fréquenté par les touristes. Aujourd‟hui, la Central de Abastos ne peut être considérée comme une centralité touristique majeure. Effectivement, en raison de problèmes d‟insécurité et d‟insalubrité, les touristes nationaux et internationaux évitent ce territoire qui présente cependant certains atouts. La grande diversité de produits commercialisés, certains d‟entre eux étant spécifiques à la région de Oaxaca, peut constituer le fondement d‟une éventuelle re-valorisation touristique.

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Sur les marges orientales et occidentales du complexe marchand central, on peut percevoir la présence de commerces établis. Plus précisément il s‟agit de commerces franchisés de nature diverse (pharmacie Ahorro, banque Azteca, Caja popular mexicana, commerces spécialisés dans la vente de produits manufacturés, volailles…). Tout comme la zone marchande centrale, cette aire commerciale accueille de nombreux vendeurs ambulants occupant les espaces circulatoires.

Cette zone se situe dans la partie Sud de la Central de Abastos. Il s‟agit à la fois d‟un lieu de fabrication et de vente de produits faits à la main (poteries, meubles…). En raison de son caractère traditionnel, cette zone légèrement excentrée pourrait être valorisée à des fins touristiques. Par ailleurs, il est à préciser que les produits artisanaux de Oaxaca sont réputés internationalement pour plusieurs raisons : savoir-faire hérité des cultures indigènes, présence de bois précieux, d‟argile noire.

Comme nous l‟avons précisé précédemment, le tianguis est une pratique commerciale périodique et mobile. Sur le territoire de la Central de Abastos, le lundi soir et la journée du mardi ainsi que le jeudi soir et la journée du vendredi sont vendus les fruits et légumes, le jeudi est consacré à la vente de vêtements et le samedi prend place un tianguis d‟importance régionale (día de plaza). Lors de ces temporalités, le tianguis s‟installe sur les voies circulatoires encerclant la Central de Abastos (cf. figure 13). Une telle localisation affecte particulièrement la circulation des camions (qui ont besoin d‟une marge de manœuvre importante) et des taxis métropolitains31. Cette zone marchande est à la fois fréquentée par les petits commerçants et par les particuliers. En raison de son caractère traditionnel (pratique héritée des cultures mésoaméricaines), la zone tianguis peut également être valorisée à des fins touristiques.

31

Sur la Diagonal de los Mercaderes délimitant la partie orientale de la Central de Abastos, l‟installation périodique du tianguis sur la chaussée comprime la circulation des taxis métropolitains sur une seule voie, causant ainsi une forte congestion.

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La zone bodegas correspond à l‟aire destinée au commerce de gros qui est sensé sustenter en produits alimentaires l‟ensemble de l‟aire métropolitaine. Située dans la partie occidentale de la Central de Abastos, cet espace comprend plusieurs halles où sont entreposées les marchandises destinées à la vente de gros. Ultérieurement, nous verrons que cette zone est sous équipée (absence d‟espaces de chargement/déchargement, de chambres pour la maturation des fruits, d‟aires de stationnement pour les camions…) et qu‟une relocalisation en périphérie des activités grossistes s‟avère tout à fait pertinente.

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Le terme de „zona bodegas’ peut être traduit en français par „zone des entrepôts’. L‟usage de la terminologie espagnole semble préférable étant donné que la terminologie française renvoie cognitivement à une autre réalité.

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FIGURE 13 : DISTRIBUTION DES ACTIVITES COMMERCIALES, CENTRAL DE ABASTOS

Source : réalisation personnelle

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Selon Oscar Salas Fonseca, le complexe de la Central de Abastos a été dans l‟ensemble bien pensé si l‟on se réfère à l‟organisation interne du marché (forme des structures, localisation et distribution des différents points de ventes). Du fait de sa position péricentrale, la Central de Abastos attire de nombreux vendeurs ambulants qui envahissent les rues (adjacentes aux différents marchés) et les couloirs (à l‟intérieur des marchés couverts). Cette sur-occupation des voies circulatoires pose de nombreux problèmes. Tout d‟abord, la surconcentration de personnes engendre de l‟insécurité. Celle-ci renvoie non seulement aux actes de violence mais aussi à la vulnérabilité des personnes et des équipements vis-à-vis des risques majeurs. A ce sujet, il convient de préciser qu‟un incendie a eu lieu dans les abords immédiats de la Central de Abastos le 18 novembre 2007. Cet incendie, provoqué par un court-circuit électrique33 a causé la mort d‟un vendeur ambulant ainsi que la destruction de plusieurs postes ambulants [Notimex en Oaxaca, 18/11/2007]. Par ailleurs, les vendeurs ambulants encombrant les couloirs des marchés obstruent les sorties, situation qui pourrait avoir des conséquences dramatiques si un nouvel accident venait à se déclarer. Outre l‟obstruction des flux de personnes, la sur-occupation provoque des problèmes hygiéniques. Effectivement, en raison de la chaleur ambiante et de la surconcentration de personnes, les denrées périssables ont besoin d‟être ventilées en permanence. Or, l‟obstruction des voies circulatoires empêchent une ventilation suffisante des produits commercialisés. De ce fait, les aliments se détériorent rapidement, produisant des nuisances olfactives. La forte densité de personnes et d‟activités est un obstacle conséquent au bon fonctionnement de la Central de Abastos. Les structures commerciales ont été originellement bien pensées mais la surconcentration d‟activités dans des endroits où elle n‟est légalement pas permise a rendu le système commercial caduc.

33

Ce court circuit électrique peut s‟expliquer par l‟anarchie régnant dans la distribution de l‟électricité.

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PHOTOGRAPHIE 10 : COMMERCES AMBULANTS INSTALLES FACE A L’ENTREE D’UN MARCHE

Source : CGDUOPE, 2006

Autour et au cœur de la Central de Abastos, la circulation routière est extrêmement perturbée. Comme nous l‟avons déjà précisé, la Central de Abastos occupe une position péricentrale et se trouve à proximité d‟infrastructures viaires importantes (gare routière, périphérique) ainsi qu‟aux abords d‟espaces créant de fortes centralités (centre ville, marchés de gros, université scientifique Ŕ Instituto Tecnológico de Oaxaca). (Cf. annexe 1) A l‟intérieur même de la Central de Abastos, la circulation routière mais aussi piétonne est chaotique. On constate qu‟il n‟existe aucune hiérarchisation des voies de circulation et des espaces de stationnement. De ce fait, camions, pickups, taxis métropolitains, autobus urbains, manutentionnaires et piétons partagent dans la plupart des cas les mêmes espaces. Au sujet du stationnement, il semble important de hiérarchiser l‟offre en fonction des usages. A ce jour, l‟offre de stationnement étant limitée, les clients de la Central de Page | 82


Abastos stationnent aux abords des principales voies circulatoires ainsi que sur la voie médiane du périphérique (cf. photographies 11). En ce qui concerne les taxis métropolitains, il semble urgent de réserver un espace permettant leur stationnement temporaire. L‟offre actuelle étant réduite et déstructurée. De même, il n‟existe aucune structure appropriée permettant le chargement et le déchargement des camions transportant les denrées alimentaires. Dans la grande majorité des cas, les camions stationnent sur la voie publique le temps du chargement ou du déchargement. Au-delà de l‟obstruction des voies circulatoires, l‟absence de structure adaptée provoque une détérioration des aliments transportés. La congestion extrême que présente la Central de Abastos provoque la congestion du périphérique encerclant le centre historique de Oaxaca. Si l‟on observe la circulation routière au niveau de l‟aire métropolitaine, c‟est indéniablement autour de la Central de Abastos que les flux routiers sont les plus perturbés.

PHOTOGRAPHIES 11 : CONGESTION DES VOIES CIRCULATOIRES

Ci-dessus : embouteillages sur le périphérique. On peut voir que la voie médiane est occupée par une ancienne voie ferrée sur laquelle stationnent des véhicules.

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Ci-dessus : diversité des modes de circulation au cœur de la Central de Abastos Photographies personnelles

Sur le territoire d‟étude, les équipements permettant le stockage et la collecte des ordures sont largement insuffisants. En conséquence, les déchets s‟entassent sur la voie publique dans des endroits spécifiques (cf. photographies 12). Quotidiennement, les agents municipaux34 équipés d‟une mini-pelle mécanique transfèrent les déchets dans un camion qui les expédie à une unité de transfert située dans le district voisin de San Martín Mexicapam.

PHOTOGRAPHIES 12 : MONTICULES DE DECHETS

Photographies personnelles 34

Notons qu‟à côté des agents municipaux, des personnes travaillant indépendamment proposent des services de nettoyage aux commerçants moyennant un pourboire.

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Comme nous l‟avons indiqué antérieurement, les marchés dans lesquels sont entreposés les marchandises périssables (fruits, légumes, produits carnés, poissons) ne disposent d‟aucun équipement assurant la conservation des aliments. Ainsi, les produits commercialisés se dégradent rapidement, causant des nuisances olfactives voire des problèmes de santé publique.

Bien qu‟à ce jour il n‟existe aucune carte criminologique appuyant les propos suivants, on peut dire que la Central de Abastos est un des lieux les plus dangereux de la ville de Oaxaca. Selon le directeur du service municipal des marchés publics, l‟insécurité est le principal problème de la Central de Abastos (auquel s‟ensuit le problème de l‟insalubrité et enfin les problèmes liés aux infrastructures de transport). La Central de Abastos constitue à ce jour une centralité métropolitaine en ce qui concerne le trafic de drogue et la prostitution. Sur la Diagonal de Mercadores, se trouvent au moins deux édifices (qui prennent l‟apparence de fonds de commerce) dans lesquels se prostituent des jeunes filles ; activité illégale qui s‟exerce jour et nuit. A côté de ces pratiques délictueuses, un grand nombre d‟infractions mineures sont commises quotidiennement. Toujours selon le directeur du service municipal des marchés publics, seule une infime minorité de ces infractions font l‟objet de procédures judiciaires. L‟insécurité semble intrinsèquement liée aux spécificités de la Central de Abastos. En tant que marché de gros d‟importance régionale, ce territoire attire des populations en mouvement (paysans écoulant leurs productions, consommateurs aux bas revenus). La Central constitue ainsi un espace de transit pour des populations aux ressources économiques faibles, parfois marginalisées. Ce territoire fréquenté par des individus ayant une faible attache territoriale s‟est ainsi converti en un refuge d‟activités illicites.

Comme nous l‟avons évoqué précédemment, les vendeurs ambulants sont organisés en association civile représentée par un leader. Selon la direction municipale des marchés publics, 59 organisations de commerçants ont autorité sur le territoire de la Central de Abastos. Ces organisations qui regroupent à la fois des vendeurs ambulants et des commerçants établis sont de dimension variable. Les organisations les plus petites Page | 85


regroupent une dizaine de commerçants alors que les plus importantes rassemblent plus de cinq cent commerçants. L‟association civile la plus importante et donc la plus puissante est l‟association Lázaro Cárdenas del Río, communément nommée « Lazcar ». Celle-ci, représentée par son secrétaire général Israel Ramíre, a autorité non seulement sur la Central de Abastos mais aussi sur la Calle Las Casas ainsi que dans d‟autres territoires urbains du municipe. Les associations civiles ont pour fonction de défendre les intérêts économiques et politiques de ses membres. Ces organisations sont dans la plupart des cas affiliés à un parti politique. Les représentants de ces associations civiles entretiennent des relations privilégiés avec les partis politiques dans l‟intention d‟affirmer leur popularité et par la suite obtenir une place importante au sein du Conseil Municipal. Cette stratégie politique a été mise en évidence par Patrice Melé dans une analyse portant sur l‟ambulantage et le système politique local à Puebla. « Les vendeurs « ambulants » se sont convertis en pièces clés de l‟échiquier politique local et en un élément fondamental des stratégies de carrière de certains membres de l‟Administration ou du PRI. Les vendeurs « ambulants » constituent une clientèle toujours disponible pour démontrer les racines « populaires » d‟un leader du parti […]. Plusieurs groupes de commerçants ont opté pour une affiliation au PRI afin d‟obtenir une position de force ou des traitements préférentiels. » [Melé, 2006, p.341 ; traduction personnelle]

Comme le précise justement Patrice Melé, certaines associations civiles affiliés à des partis politiques abusent de leurs appuis politiques afin d‟occuper certains territoires urbains. A Oaxaca de Juárez, l‟évolution du commerce ambulant est intrinsèquement liée aux stratégies politiques des leadeurs associatifs. Ainsi, récemment, de nouvelles zones ont été conquises par les vendeurs ambulants et des nouvelles affiliations avec des partis politiques variés ont été réalisées35. Ces remaniements s‟opèrent généralement à l‟approche ou à l‟issue d‟une élection locale (élection du président municipal, des députés locaux…). Si l‟on se recentre sur le mode de gouvernance opérant sur le territoire de la Central de Abastos, on peut reprendre les propos énoncés par Blanca Padilla. Au-delà de la description concise de l‟organisation politique de cet espace, l‟extrait ci-dessous offre un état des lieux critique de l‟ordre Ŕ ou du désordre Ŕ établi sur notre territoire d‟étude.

35

Cf. article de Hermógenes Beltrán en date du 18/04/2009.

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Ainsi, la mal-nommée Central de Abastos

36

- parce qu‟il s‟agit seulement d‟un énorme

marché traditionnel dans lequel seule une petite section est affectée au commerce grossiste [zone bodegas] - souffre des maux d‟un corps qui a crû démesurément et sous des intérêts mesquins. C‟est un corps obèse et en décomposition dont ses extracteurs et ses mauvaises odeurs déprécient l‟image de Oaxaca. Le Marché de Abastos qui a été édifié dans les années 1970 afin de remédier à l‟anarchie qui régnait alors dans les marchés Benito Juárez et 20 de Noviembre, est aujourd„hui un lieu malade, un non-lieu dans lequel n‟importe quelle personne avec suffisamment de pouvoir peut se faire une place. 37

Les dirigeants de ce marché, environ 11 , ont fait de celui-ci un Etat à l‟intérieur de l‟Etat. Jusqu‟à présent, toute tentative visant à réordonner cet espace a échouée. Ici, tout est régit selon des règles propres et bien distinctes de celles prévalant dans les autres territoires du municipe. Ici gouverne la loi du plus fort, du plus corrompu, de celui qui dispose du plus de pouvoir pour tromper, intimider ou manipuler le plus grand nombre de vendeurs établis ou ambulants. [Padilla, 30/03/2009 ; traduction personnelle]

La Central de Abastos constitue un espace extrêmement politisé qui à première impression semble fonctionner comme un espace de non-droit. La compréhension politique de cet espace est essentielle afin de mettre en place un projet de réorganisation des activités commerciales.

36

Le terme espagnol Central de Abastos peut être traduit en français par « marché de gros ». L‟auteur fait allusion aux 11 associations civiles les plus puissantes parmi les 59 organisations existantes. 37

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Les propos précédents ont montré que la localisation péricentrale de la Central de Abastos de Oaxaca pose de nombreux problèmes. Cette situation intenable nous amène à nous interroger sur l‟éventuelle construction d‟un lieu d‟échange en périphérie. Plus exactement, cette partie se focalise sur la relocalisation de l‟actuelle zone bodegas, seule unité de la Central de Abastos fonctionnant comme un marché grossiste. En France, la quasi-totalité des marchés de gros métropolitains ont été déplacés en périphérie au cours des années 1960 et 1970. La France jouit d‟une certaine expertise dans la gestion de ses Marchés d‟Intérêt National (MIN) et Rungis38 constitue un modèle assez suivi à l‟étranger. Etant donné que cette problématique urbaine est un peu ancienne dans le cas français, on peut affirmer avec un certain recul que le déplacement des marchés de gros en périphérie est tout à fait pertinent [Chemla, 29/10/2003]. Dans les métropoles françaises, la relocalisation des marchés de gros a permis de redynamiser l‟activité commerciale, accroître la transparence de l‟activité économique et, enfin, a permis la requalification des espaces centraux hérités (construction de sites culturels39, implantation d‟équipements structurants…). A Mexico, le marché de gros qui jouissait autrefois d‟une position centrale a été déplacé en « périphérie40 » au début des années 1980. L‟ancien marché de gros de la capitale, dénommé Mercado de la Merced, a été modernisé. Les activités qui étaient liées au commerce de gros ont été transférées au nouveau marché édifié dans la délégation de Iztapalapa tandis que les autres types de commerce tournés vers le consommateur ont été maintenus au sein du Mercado de la Merced.

38

Le transfert du marché de gros à Rungis a été annoncé en 1962. Avant cela, les Halles de Paris assuraient la fonction de marché de gros. L‟activité générée par les Halles provoquait alors la paralysie d‟une grande partie du centre de Paris. La décision du transfert à Rungis fût prise après plusieurs siècles de débats politiques houleux [Chemla, 29/10/2003]. 39 Création du Centre Beaubourg sur l‟emplacement des anciennes Halles parisiennes, installation de la Cité des Sciences et de l‟Industrie sur le site des anciens abattoirs de La Villette, etc. 40 Le terme de “périphérie” doit ici être relativisé. L‟actuel marché de gros de Mexico se situe en périphérie du centre historique de Mexico mais se trouve tout de même en plein cœur du District Fédéral et de l‟agglomération de Mexico s‟étalant sur plusieurs Etats. Ainsi, le marché de gros de Mexico, qui est le plus grand au monde, se trouve au centre d‟une immense zone urbaine.

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PHOTOGRAPHIE 13 : LE PLUS GRAND MARCHE DE GROS DU MONDE, MEXICO, DELEGATION IZTAPALAPA

Source : http://www.imagenesaereasdemexico.com/

Cette dynamique urbaine ancienne et contemporaine qui vise à déplacer les marchés de gros en périphérie présentent des avantages incontestables. Au-delà des avantages liés à la libération de vastes espaces centraux et à la suppression des nuisances générées par les marchés de gros (pollution, trafic diurne et nocturne, insécurité,

etc.),

la

construction

d‟outils

d‟échange

en

périphérie

favorise

le

développement d‟externalités positives. La création d‟une structure appropriée située à une distance optimale entre les lieux de production et de consommation permet de réduire les risques d‟échec. Ceux-ci, liés à des infrastructures

inadéquates

(infrastructures

de

transports

inadaptées,

vétustes,

encombrées ; bâtiments peu fonctionnels ; etc.), engendrent des surcoûts et une dégradation de la qualité des produits. Au contraire, des infrastructures performantes permettent une amélioration qualitative des produits alimentaires commercialisés (hygiène, fraîcheur, qualité). Ces considérations prennent une importance considérable dans le contexte actuel de crise sanitaire. Effectivement, la pandémie de grippe porcine qui s‟est développée en avril 2009 au cœur du Mexique nous amène à nous interroger sur la qualité des produits commercialisés et sur la performance des réseaux de distribution.

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Un réseau de distribution performant doit permettre une réduction des coûts et donc une réduction des prix de vente. Par opposition, on peut soutenir la thèse selon laquelle un réseau de distribution totalement obsolète (comme préfigure la Central de Abasto de Oaxaca) ayant atteint un certain seuil critique devient économiquement contre-productif en raison d‟un certain nombre de facteurs (non-fonctionnalité du marché de gros, des réseaux routiers). Cette réflexion nous amène à penser que l‟amélioration du système commercial global est intrinsèquement liée à l‟optimisation de la logistique. Effectivement, une logistique bien paramétrée doit permettre une mise en relation optimale entre les producteurs et les commerçants ainsi qu‟entre les producteurs et les centrales d‟achat. Comme le précise justement Guy Chemla [29/10/2003], il ne faut pas voir de contradiction entre la grande distribution et les marchés de gros. Ces derniers disposent d‟une grande variété de produits qui peuvent intéresser les grands groupes commerciaux. La relation entre ces deux dernières entités semblent donc basée sur la complémentarité plus que sur la concurrence. Aussi, d‟un point de vue fonctionnel et économique, il est important de préciser qu‟au sein d‟un marché de gros, les prix sont déterminés en fonction de l‟offre et de la demande ; processus qui conduit à la formation d‟un prix de détail unique. Actuellement, dans le cas de la Central de Abastos de Oaxaca, les prix sont fixés individuellement par les producteurs. Ils varient donc sensiblement d‟un producteur à l‟autre, même si la concurrence entre les opérateurs tend à limiter les fortes variations de prix. Au Mexique, afin de rationnaliser les réseaux de distribution et moderniser les marchés de gros, la CONACCA41 a été créée le 20 juin 1977. Cette organisation nationale regroupe les commerçants grossistes implantés dans les marchés de gros du pays. La mission de cette organisation est de redéfinir et de réaffirmer le rôle des marchés de gros et d‟améliorer l‟articulation entre les marchés et les régions productrices de façon efficace et rentable. Ce système idéal que promeut la CONACCA doit bénéficier à tous les acteurs de ce circuit économique. Il convient de préciser que l‟agriculture est une activité fortement développée au Mexique bien que depuis quelques décennies la proportion de la population mexicaine travaillant dans ce secteur tend à décroître.

41

Confederación Nacional de Agrupaciones de Comerciantes de Centros de Abastos

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Précédemment, nous avons pu constater qu‟une localisation inadéquate de ce type d‟unité dans un environnement urbain peut favoriser la concentration à outrance de véhicules, commerçants et produits, générant un processus de dégradation urbaine. Afin d‟éviter cette situation, la SEDESOL et la SECOFI ont émis un corpus normatif relatif à la localisation des marchés de gros (cf. annexe 2). Les normes émises par la SEDESOL et la SECOFI s‟attachent tout particulièrement à montrer dans quels espaces urbains les marchés de gros peuvent être implantés. Il est tout à fait recommandé d‟installer les marchés de gros en périphérie des centres urbains densément peuplés. Cependant, ce type de structure a tout à fait sa place en périphérie, à côté des zones commerciales et industrielles42. La lecture du plan d‟usage des sols, document central dans la planification urbaine au Mexique, permet de donner un aperçu des sites potentiels (i.e. les espaces où l‟implantation d‟un marché de gros est compatible avec l‟environnement urbain existant). Le document 3 situé en Annexe analyse la compatibilité entre les différents équipements urbains. Si l‟on se réfère à ce document, il apparaît que les marchés de gros (Unidad de Abasto Mayorista) ne peuvent pas être implantés à proximité de la plupart des équipements urbains. Toutefois, si certaines conditions sont respectées, les marchés de gros peuvent être installés aux abords d‟autres marchés, d‟équipements postiers, de gares routières, de plateformes logistiques, de stations services, de salles d‟exposition, etc. Etant donné le fait qu‟il existe un lien intrinsèque entre les marchés de gros et la logistique (transport rationnel des marchandises), il paraît opportun d‟implanter ce type de marché à proximité d‟importantes infrastructures routières. Celles-ci doivent être correctement connectée

à

l‟ensemble

du

maillage

routier

régional/national

afin

d‟optimiser

l‟acheminement des marchandises entre les lieux de production et de consommation. De même, l‟implantation d‟un marché de gros dépend, dans une certaine mesure, de la présence de services basiques : eau potable, énergie électrique, drainage, accès routier.

42

Les marchés de gros peuvent être installés à proximité d‟industries à la seule condition que celles-ci ne créent pas de nuisances pouvant affectées la qualité des produits ou bien nuire au bon fonctionnement de l‟activité commerciale.

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Afin d‟assurer le transfert des marchandises, dont la plupart sont des produits périssables, plusieurs équipements sont indispensables : -

aire de manœuvre et de stationnement pour les véhicules de charge,

-

aire de stationnement pour les véhicules particuliers

-

espaces pour la circulation piétonne,

-

entrepôts permettant la gestion et le conditionnement des produits,

-

chambres froides et chambres pour la maturation des fruits

-

locaux administratifs

-

services connexes (bascule pour la pesée des produits…),

-

services complémentaires (banques, services postaux, stations essences, services liés au transport et à la réparation des véhicules…)

-

espaces vacants pour une hypothétique extension du marché de gros.

La liste des équipements n‟est pas exhaustive. D‟autres équipements non mentionnés ont tout à fait leur place à proximité des marchés de gros. C‟est par exemple le cas de certains commerces agroalimentaires fournissant des semences et des outils agricoles aux producteurs

régionaux [SEGOB-INAFED].

Une telle localisation s‟avèrerait

stratégique dans la mesure où les producteurs-agriculteurs tireraient profit de la concentration de services spécifiques liés à leur activité professionnelle.

Compte tenu des normes et des recommandations formulées par les autorités fédérales (SEDESOL, SECOFI, SEGOB-INAFED), il paraît pertinent de relocaliser les activités liées au commerce de gros (actuellement concentrées dans la zone bodegas de la Central de Abastos de Oaxaca) dans une structure appropriée localisée dans une municipalité périphérique. Dans cette optique, le Plan de Ordenamiento de la Zona Conurbada de la Ciudad de Oaxaca, élaboré par les autorités étatiques (i.e. Etat de Oaxaca), prévoit la relocalisation dans le district de Trinidad de la Viguera et dans la municipalité de San Pablo Etla des équipements suivants : gare routière 2nde classe, gare ferroviaire de marchandise, Central de Abastos. Enfin, ce plan envisage la construction de nouveaux équipements métropolitains (à vocation culturelle, touristique, ludique) sur les espaces

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centraux libérés [Plan Maestro de Desarrollo Urbano Municipal de Oaxaca de Juárez, 2001]. A première vue, l‟hypothétique relocalisation du marché de gros dans la municipalité de San Pablo Etla peut sembler intéressante. Effectivement, cette municipalité périurbaine présente l‟intérêt de se localiser aux abords immédiats de la voie autoroutière Oaxaca-Mexico (section de l‟autoroute Panaméricaine). Cette localisation pourrait s‟avérer stratégique dans la mesure où une proportion conséquente des productions agricoles de l‟Etat de Oaxaca est exportée et consommée dans l‟agglomération de Mexico. Toutefois, si nous menons des recherches plus approfondies, la relative proximité entre San Pablo Etla et Oaxaca de Juárez peut s‟avérer problématique. Comme nous avons pu le voir précédemment, la croissance démographique et territoriale de Oaxaca de Juárez est particulièrement forte et on peut pressentir que l‟expansion urbaine phagocytera la municipalité de San Pablo Etla dans un futur proche. Cette situation serait bien contraignante dans la mesure où les marchés de gros doivent se situer à une distance respectable des noyaux urbains. En ce qui concerne la forte croissance de la capitale régionale, il doit être rappelé que les autorités municipales ont bien du mal à contraindre l‟étalement urbain. Ceci peut s‟expliquer à la fois par l‟importance des constructions illégales et par le caractère embryonnaire de la coopération intermunicipale.

Une autre étude, conduite par Rogelio Hernández Vez [2008], mentionne deux municipalités qui pourraient éventuellement accueillir un nouveau marché de gros d‟importance régionale : San Lorenzo Cacaotepec et Magdalena Apasco. En ce qui concerne la municipalité de San Lorenzo Cacaotepec, celle-ci présente les mêmes caractéristiques que San Pablo Etla. En effet, ces deux municipalités se situent à environ 10 kilomètres du centre de Oaxaca et se localisent de part et d‟autre de la Panaméricaine (cf. figure 14). Compte tenu du caractère imprévisible de la croissance urbaine de Oaxaca de Juárez, la municipalité de Magdalena Apasco présente une localisation intéressante. Relativement éloignée de la métropole régionale (à 20 kilomètres de Oaxaca de Juárez), Magdalena Apasco se localise également aux abords immédiats de la Panaméricaine. A cette hauteur là, cette infrastructure autoroutière est globalement fonctionnelle. Plus au Sud, en se rapprochant de l‟aire métropolitaine de Oaxaca, le trafic est bien plus dense. La Page | 93


municipalité de Oaxaca de Juárez mène actuellement des travaux d‟élargissement de cette section autoroutière. Comme le précise Oscar Salas Fonseca, ces travaux permettront une amélioration éphémère ; la croissance continue de la métropole impose des agrandissements permanents des réseaux viaires. L‟éloignement de Magdalena Apasco est un atout certain. Sur ce territoire, la performance des infrastructures viaires semble durable. Tout ceci nous laisse penser que l‟implantation d‟un marché de gros sur ce territoire semble pertinente. Une analyse approfondie du plan d‟usage des sols de cette municipalité doit être effectuée afin de recenser les hypothétiques terrains de projet.

FIGURE 14 : LES EVENTUELS SITES DE RELOCALISATION

Source : réalisation personnelle

La relocalisation du marché de gros de Oaxaca peut être discutée au cours des Comités Municipales de Abasto. Ces comités s‟opèrent dans le cadre des Comités Estatales de Abasto, eux-mêmes intégrés au sein du Comité de Planeación para el Desarrollo del Estado.

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Dans les Comités Municipales de Abasto peuvent participer plusieurs groupes d‟acteurs : élus et acteurs municipaux, représentants du gouvernement (Etat fédéré), représentants et acteurs des institutions fédérales, représentants des producteurs, chambres de commerce, organisations de transporteurs et associations de consommateurs [SEGOBINAFED]. Au travers de ces comités, les autorités municipales peuvent coordonner leurs actions avec le gouvernement de l‟Etat et de la Fédération et peuvent espérer des enveloppes financières pour la construction et le fonctionnement du marché de gros. Des fonds peuvent également être obtenus auprès du « Conseil pour le Développement Métropolitain de la ville de Oaxaca ». Ce nouvel organisme intermunicipal a précisément pour fonction de projeter et financer le développement cohérent de l‟aire métropolitaine43. En ce qui concerne le financement des équipements nécessaires (chambres froides, modules

pour

le

chargement/déchargement

des

marchandises…)

les

autorités

municipales peuvent concéder des emprunts intéressants auprès de la BANOBRAS (taux d‟intérêt préférentiels, modalités de remboursement). Aussi, les autorités municipales ont le choix d‟administrer directement le marché de gros ou bien déléguer leurs responsabilités à d‟autres acteurs (création d‟un partenariat publicprivé ou concession du marché de gros aux acteurs intéressés). L‟administration directe est la plus onéreuse (autofinancement) tandis que la collaboration voire la concession permet de réduire considérablement les participations financières municipales.

43

Cf. chapitre 1, partie C, 2.

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Au Mexique, dans une logique de requalification des centres historiques, de nombreux équipements urbains créant de fortes centralités ont été déplacés en périphérie au cours des années 1980. Parmi ces équipements figurent les centres commerciaux populaires. « Le centre commercial populaire est formé par la prolifération des commerçants de rue autour des marchés centraux qui jouèrent pendant longtemps le rôle de marché de gros pour l‟ensemble de la ville, auxquels viennent s‟ajouter petites industries, artisanat et services pour les couches populaires et les gares routières. La conjonction d‟un mode d‟habitat (la vecindad), de nombreuses possibilités d‟emploi dans le secteur informel, d‟une grande densité de résidents, et la présence constante de la foule, crée un milieu urbain spécifique, désigné comme l‟espace de dégradation, de la crise urbaine, de la congestion, mais qui dans de nombreuses villes formait, encore récemment, pour la majorité de la population le véritable centre fonctionnel de la ville. » [Melé in Bidou-Zachariasen, 2003, p.180]

Cette citation pointe clairement des espaces tels que la Central de Abastos de Oaxaca. Cependant, alors que la présence des centres commerciaux populaires appartient au passé dans la plupart des métropoles mexicaines, cette situation est tout à fait contemporaine dans le cas de Oaxaca de Juárez. Plusieurs enseignements sont à tirer de cette dynamique visant à relocaliser les fonctions centrales en périphérie. « [Dans la plupart des capitales des Etats mexicains], les marchés de gros, terminaux d‟autocar et gares perdent leurs localisations centrales ou péricentrales. Les friches urbaines ainsi créées sont converties soit en espaces administratifs ou culturels, soit en places, jardins ou espaces piétonniers. L‟objectif principal fixé à ces délocalisations n‟est pas l‟aménagement des espaces libérés, mais bien la réorganisation des flux d‟échange, de trafic et d‟approvisionnement à l‟échelle de l‟agglomération. En l‟absence de projets publics, la délocalisation n‟impulse pas une revalorisation mais accroît la paupérisation et la dégradation des quartiers touchés, d‟abord par la création d‟une friche urbaine au cœur ou en périphérie immédiate du centre, qui devient le refuge d‟activités illicites, ensuite par le maintien dans la zone d‟une partie des activités greffées sur l‟ancien marché, la gare ou le terminal de bus. » [Melé in Bidou-Zachariasen, 2003]

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Ce mouvement de dégradation postérieur à la relocalisation a pu être observé à Mexico et à Puebla. Dans ces deux villes, les marchés de gros centraux (La Merced pour Mexico et La Victoria pour Puebla) ont été déplacés au début des années 1980 suite à la création en périphérie de marché de gros modernes. Avant d‟être relocalisé, le marché de gros central de Puebla présentait une situation qui n‟est pas sans rappeler la Central de Abastos de Oaxaca. « La presse et les élus municipaux décrivaient le marché Victoria comme une des causes de la prolifération de la vente ambulante, ainsi qu‟une source de contamination qui générait la présence de rats, déchets, jeux clandestins, prostituées et hôtels de passe. […] Jorge Murad Macluf signalait dans un rapport d‟activité de 1985 : « Le marché s‟étend comme une tumeur ». » [Melé, 2006, p.329 ; traduction personnelle]

La relocalisation du marché de Puebla ne s‟est pas faite sans heurts. Dès la fermeture du marché Victoria, les forces de police sont intervenues afin d‟empêcher le retour des commerçants. Dans un premier temps, les autorités publiques, appuyées par une fondation privée, ont annoncé la conversion du marché en un site culturel devant favoriser l‟attrait touristique du centre. Après une longue période d‟inaction qui peut être expliquée par l‟absence de projet public, le terrain a été cédé à la fondation privée qui a converti l‟ancien marché public en un centre commercial privé. La dimension culturelle évoquée dans les débuts a été ignorée par la suite. Selon Patrice Melé [2006], la restauration et la requalification du marché Victoria révèle en quelque sorte les débuts chaotiques de la reprise en main des centres historiques sous l‟égide des pouvoirs publics. Il est intéressant de noter que la réorganisation des fonctions centrales s‟inscrit dans un contexte de revalorisation patrimoniale des centres historiques. Tout comme Oaxaca de Juárez, les centres historiques de Mexico et de Puebla sont reconnus patrimoine culturel de l‟humanité par l‟UNESCO.

Afin d‟éviter une dégradation et une paupérisation de l‟actuelle Central de Abastos de Oaxaca, il semble important de tenir compte des carences des actions publiques engagées dans les métropoles mexicaines. Dans cette optique, la relocalisation du commerce grossiste (actuellement située dans la zone bodegas) doit être pensée conjointement à la requalification de l‟ensemble du territoire de la Central. Cette Page | 97


démarche s‟avère nécessaire afin que les espaces ainsi libérés ne se dégradent, dynamique qui pourrait conduire à une dépréciation marquée de la Central et des territoires annexes. La conversion de l‟actuelle Central de Abastos en un espace administratif ou culturel, une place ou encore en jardin public ne semble pas pertinent. Au contraire, il semble tout à fait légitime de conserver la fonction marchande dans la mesure où le marché traditionnel jouit d‟une place privilégiée dans la culture locale. Certains marchés traditionnels créant de fortes centralités ont tout à fait leurs places au sein des centres historiques des métropoles mondiales. C‟est par exemple le cas de la Boquería à Barcelone ; marché emblématique qui constitue une forte centralité touristique. L‟histoire de ce marché est intrinsèquement liée à l‟histoire de Barcelone et à la culture catalane. A ce jour, bien plus qu‟un simple marché traditionnel, cette structure sustente en produits basiques de nombreux commerçants. Ces dernières années, la Boquería s‟est convertie en un point de vente de produits alimentaires provenant d‟Amérique Latine. Ce marché constitue ainsi un marché de gros d‟importance métropolitaine pour certains produits spécifiques. Si nous revenons à notre territoire d‟étude, la démarche que nous souhaitons adopter s‟oriente vers la requalification du commerce « minoriste » qui prend place dans les espaces suivants : marchés centraux, marché artisanal, commerces établis, zone tianguis. Une telle démarche de requalification s‟inscrit également dans une logique de valorisation touristique. Cette double action qui vise d‟une part à relocaliser le commerce de gros et d‟autre part à requalifier la Central de Abastos est approuvée par les pouvoirs municipaux. Ces derniers souhaitent convertir cette importante zone marchande en un marché de quartier. Cette démarche s‟avère toutefois compromise dans la mesure où un certain nombre d‟activités concentrés dans la Central ne peuvent être réduite à l‟échelle du quartier (tianguis et marché artisanal notamment). De plus, la Central s‟insère dans un territoire où la fonction résidentielle est quasiment absente. Cependant, nous retiendrons qu‟il semble tout à fait légitime de requalifier les différentes unités commerciales « minoristes » intégrés au sein de la Central de Abastos. Afin d‟engendrer une telle dynamique, un panel d‟actions peut être envisagé.

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Une série d‟actions peut être envisagée afin de requalifier ce territoire dégradé. Une telle requalification pourrait produire à terme d‟une part une réactivation de l‟activité commerciale et d‟autre part une valorisation touristique. Les actions envisageables peuvent être regroupées en quatre thématiques : réorganisation des réseaux de transports, requalification des espaces hérités, amélioration de la sécurité et intégration d‟espaces publics.

Sur notre territoire d‟étude, la réorganisation des réseaux de transport constitue une priorité. A l‟échelle métropolitaine, les autorités municipales concernées développent actuellement un projet visant à intégrer un système de transport en commun performant destiné à une large population. Entre 2004 et 2005, la ville de Oaxaca de Juárez a eu le privilège de recevoir 44 Jaime Lerner, architecte-urbaniste brésilien de renommée internationale. Au cours de sa carrière, il a été élu trois fois Maire de Curitiba ainsi que Gouverneur de l‟Etat de Paraná (Brésil). Jaime Lerner est notamment connu pour avoir implanté un système de transport en commun dénommé Bus Rapid Transit (BRT) pour la ville de Curitiba. Ce système a par la suite été implanté dans de nombreuses métropoles mondiales (Bogota, Mexico…). Ce système de transport se compose d‟une voie maîtresse sur laquelle circule exclusivement des autobus articulés de grande capacité. Cette voie « en site propre » desservant les principales centralités urbaines est judicieusement connectée à un réseau de transport en commun secondaire irriguant les zones urbaines plus reculés et moins dense. Autrement dit, la performance de ce système repose sur une hiérarchisation des modes de transport. A hauteur du centre historique de Oaxaca, la voie maîtresse suivrait le tracé du périphérique. Plus exactement, la ligne BRT suivrait le tracé de l‟ancienne voie ferrée qui n‟a été que partiellement démantelée. Dans le projet émis par Jaime Lerner, une station a été prévue aux abords de la Central de Abastos. 44

Jaime Lerner a été invité par la Casa de la Ciudad de Oaxaca avec l‟appui financier du Gouvernement de l‟Etat de Oaxaca. En qualité de consultant, Jaime Lerner a mené une réflexion sur la réorganisation des transports et sur l‟urbanisation future de la ville-capitale.

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FIGURE 15 : PROJET D’IMPLANTATION D’UN SYSTEME BUS RAPID TRANSIT A PROXIMITE DE LA CENTRAL DE ABASTOS Station BRT

Voie BRT

Central de Abastos réhabilité

Note : Ce dessin donne un aperçu du BRT qui prendrait place sur la voie médiane de l‟actuel périphérique ainsi qu‟une esquisse de la Central de Abastos réhabilité. Source : Lerner, 2006

Un réseau de transport en commun bien structuré devrait engendrer une réduction du trafic automobile sur le périphérique et améliorer la desserte de notre territoire d‟étude. Aussi, la Central de Abastos présente l‟avantage de se situer aux abords de deux axes routiers importants qui peuvent avoir des fonctions distinctes. Situé à la limite du centre historique, le périphérique constitue un axe sur lequel les transports en commun peuvent être valorisés. Une partie du trafic automobile ainsi que les véhicules de livraisons peuvent être détournés sur l‟axe bordant la partie occidentale de la Central de Abastos (rive gauche du Río Atoyac – cf. figure 11).

Afin de résoudre le problème du stationnement, la reconversion de l‟actuelle gare routière seconde classe en un vaste parking ne serait pas dénuée d‟intérêts. La concurrence exercée par la gare routière première classe et les multiples compagnies ayant leur siège à l‟intérieur du centre historique a peu à peu engendré le déclin de la gare routière 2nde classe. La destruction ou la relocalisation de cet équipement pourrait avoir un impact notable sur le fonctionnement des espaces centraux et péricentraux (réduction des embouteillages, diminution de la pollution, des nuisances sonores…). Des Page | 100


études plus approfondies doivent être menées au sujet d‟une éventuelle relocalisation. Une telle démarche doit tenir compte du projet BRT décrit précédemment. Aussi, la réflexion sur la construction d‟une gare routière en périphérie doit être couplée à une réflexion sur l‟ambulantage. En effet, comme le souligne Patrice Melé [2006], les espaces périphériques des gares routières relocalisées en périphérie des villes mexicaines au cours des années 1980 et 1990 ont rapidement été envahis par les vendeurs ambulants faute d‟une planification approfondie. Le terrain libéré, d‟une superficie d‟environ 3 hectares, pourrait accueillir deux parkings distincts pour les particuliers et pour les taxis métropolitains. Des études doivent être effectuées afin de calculer le nombre de places nécessaires, le type de structure (parking à étage, sous-terrain…) ainsi que le coût du projet. Par ailleurs, il n‟existe aucune contradiction entre l‟éventuelle reconversion de la gare routière en parkings et le projet de construction d‟un marché destiné aux vendeurs ambulants relocalisés (qui se situerait sur la parcelle contigüe Ŕ cf. figure 9). Au contraire, on peut penser que la zone de parking proposée constituerait un équipement central générant des flux piétons et donc une clientèle pour le marché adjacent.

L‟actuelle zone bodega, d‟une superficie de 2 hectares, pourrait accueillir le tianguis suite à la relocalisation des activités grossistes. Actuellement, le tianguis prend place sur les voies circulatoires, occasionnant des embouteillages. Le déplacement de ce commerce périodique dans un espace approprié permettrait indubitablement d‟améliorer la fonctionnalité des transports et de déconcentrer les activités commerciales. Si l‟on se réfère aux normes émises par les organismes fédéraux, les tianguis doivent prendre place sur des espaces revêtus comprenant réseau d‟eau potable, drainage et électricité [SEDESOL, SECOFI, 1999, pp.15-16]. Dans la plupart des cas, les tianguis se situent à proximité d‟un marché public. D‟un point de vue juridique, le commerce tianguis n‟est pas spontané et incontrôlé. Tout comme les vendeurs établis dans les marchés publics, les commerçants tianguis doivent se conformer au règlement des marchés publics45 précisant les droits et les devoirs de chacun.

45

Dans notre cas précis, le commerce tianguis doit se conformer au règlement des marchés publics de la municipalité de Oaxaca entré en vigueur le 9 novembre 1984.

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Selon la SEDESOL et la SECOFI, les tianguis peuvent se localiser dans des zones densément urbanisées à condition qu‟il n‟y ait pas d‟incompatibilité entre le tianguis et les équipements voisins préexistants. En ce qui concerne notre territoire d‟étude, l‟implantation d‟une zone tianguis sur l‟actuelle zone bodega ne satisfait pas toutes les conditions requises. En effet, le tianguis se situerait à proximité d‟un axe routier important (axe bordant la rive gauche du Río Atoyac), d‟une gare routière et d‟une clinique (cf. annexe 346). Toutefois, les normes émises par la SECOFI et la SEDESOL prennent la forme de recommandations et ne constituent pas une entrave à la reconversion du site. En dépit de la présence de ces équipements jugés nuisibles, une telle relocalisation permettrait de conserver et de valoriser un espace qui constitue d‟ores et déjà une centralité pour les habitants de la métropole. Le tianguis est actuellement fréquenté par une grande variété d‟acteurs : petits commerçants et restaurateurs, population aux ressources économiques limitées, clients recherchant des produits frais, touristes. Ce dernier groupe apprécie particulièrement la dimension historique du tianguis et la grande variété de produits commercialisés (fruits et légumes, équipements domestiques, vêtements, bétail, objets anciens). En conséquence, l‟aménagement d‟une aire tianguis peut s‟inscrire dans une démarche de valorisation touristique.

Afin d‟améliorer la sécurité sur le territoire de la Central de Abastos, la municipalité de Oaxaca de Juárez a récemment augmenté l‟effectif policier opérant sur ce territoire. Au début des années 1990, un local de la police municipale a été implanté au cœur de ce territoire. Au cours d‟une discussion avec deux policiers rencontrés dans ce local, ceux-ci m‟ont précisé que l‟effectif avait récemment augmenté, évoluant de 25 à 53 personnes en avril 2009. En théorie, le doublement de l‟effectif devrait engendrer une diminution des infractions commises. Cette mesure étant récente, nous ne pouvons affirmer si l‟accroissement de l‟effectif a provoqué les résultats espérés. Aussi, nous pouvons émettre l‟hypothèse que la déconcentration des activités commerciales peut avoir des répercussions sur la sécurité. Actuellement, l‟atmosphère de la Central de Abastos (présence permanente de la foule, passages étroits) est 46

Dans le document référencé en annexe, la zone tianguis correspond à la section “plaza de usos múltiples”.

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particulièrement propice à l‟accomplissement de pratiques délictueuses (vols à la tire, échange de produits illicites…). La relocalisation des activités grossistes en périphérie de la métropole et la conversion de cet espace en une aire tianguis permettrait d‟impulser une première phase de déconcentration des activités commerciales et un assainissement de l‟atmosphère régnant actuellement.

Au-delà de l‟insécurité liée aux comportements délictueux, il semble primordial d‟assurer la sécurité des biens et des personnes vis-à-vis des risques majeurs (risque incendie par exemple). Par ailleurs, il est important de rappeler que la concentration d‟activités et de personnes accroît la vulnérabilité des usagers. La CGDUOPE a récemment émis un projet de construction d‟une unité de protection civile qui prendrait place sur une fraction d‟une parcelle municipale47 située au Sud du polygone formé par la Central de Abastos (cf. figure 16). Une telle structure pourrait jouer un rôle essentiellement préventif en informant les usagers de la Central de Abastos sur les risques encourus48. Par ailleurs, il est à préciser qu‟en cas d‟incident, la Protection Civile dispose de certains moyens d‟interventions et pourrait exposer les procédures à suivre. Au-delà de la fonction même jouée par une unité de protection civile, l‟édification d‟une telle structure symboliserait en quelque sorte le retour de la puissance publique sur un espace dégradé qui s‟apparente à une zone de non-droit. Tout ceci laisse penser que le projet émis par la Municipalité semble tout à fait légitime.

47

La parcelle mentionnée appartient actuellement au Gouvernement de l‟Etat de Oaxaca. Cependant, un accord prévoyant le transfert de cette propriété a récemment été signé entre l‟Etat et la municipalité de Oaxaca de Juárez. 48 Au cours du premier semestre 2009, suite à l‟épidémie de grippe porcine mais aussi suite à l‟explosion d‟un conduit de gaz dans le municipe de Oaxaca de Juárez, les organismes publics ont émis de nombreuses inquiétudes. Les marchés publics sont particulièrement vulnérables contre ces deux risques majeurs. La forte fréquentation ainsi que la ventilation insuffisante surexposent les usagers au risque épidémiologique tandis que le stockage anarchique du gaz et des autres produits combustibles surexposent les marchés publics aux risques d‟explosion et d‟incendie.

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FIGURE 16 : LOCALISATION DE LA PARCELLE MUNICIPALE

Note : La CGDUOPE a émis trois projets prenant place sur cette réserve foncière : création d‟un marché pour les vendeurs ambulants, aménagement d‟une rampe pour la collecte des déchets et enfin installation d‟une unité de protection civile. Si le dernier projet a attiré notre attention, il n‟en va pas de même pour les deux premiers. La situation géographique du marché ainsi que l‟accessibilité du site ne semblent pas adéquates et l‟on peut, à juste titre, émettre des doutes sur la réussite d‟un tel projet. La Municipalité ayant récemment annoncé le déplacement de l‟unité de transfert de San Martìn Mexicapam, il est probable que le projet d‟aménagement d‟une rampe pour la collecte des déchets ne voit jamais le jour. Source : réalisation personnelle

Le territoire d‟étude (délimité, rappelons-le, à l‟Ouest par le Río Atoyac et à l‟Est par le périphérique) ne comporte aucune place publique. L‟autorité municipale, consciente de cette carence, désire implanter de nouveaux espaces publics incluant des zones vertes de haute qualité environnementale et paysagiste [Plan Maestro de Desarrollo Urbano Municipal de Oaxaca de Juárez, 2001]. Dans ce sens, le terrain situé aux abords du périphérique et de l‟avenue Juárez Maza, sur lequel se dresse actuellement un parking (cf. figure 13), pourrait être converti en une place publique arborée. La libération de cet espace permettrait d‟améliorer l‟accès

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aux marchés centraux de la Central de Abastos pour les clients en provenance du centre historique. Toutefois, il est important de rappeler que l‟intégralité du territoire de la Central de Abastos est particulièrement envahi par l‟ambulantage. La municipalité se trouve ainsi dans une impasse : l‟intégration de nouveaux espaces publics est indispensable mais, si ces nouveaux espaces étaient créés, ils seraient probablement envahis par de nouveaux vendeurs ambulants sans que l‟autorité municipale puisse s‟y opposer de façon effective.

En dépit de l‟existence d‟un pont piéton reliant le centre historique à la Central de Abastos, les usagers effectuent cette liaison en slalomant entre les voitures prises dans les embouteillages permanents à cette hauteur du périphérique. Le projet de requalification du périphérique par l‟intermédiaire de la création d‟une ligne BRT devrait améliorer la fluidité du trafic. Dans ce cadre, le remplacement de l‟actuel pont par un nouveau pont piéton paraît nécessaire. L‟actuel pont piéton présente un état dégradé : les déchets s‟entassent sur la partie supérieure et la sécurité des usagers est compromise dans la mesure où les rampes et les grillages de sécurité sont particulièrement détériorés. Afin d‟optimiser l‟attrait du nouveau pont, il pourrait être intéressant de travailler sur l‟architecture voire sur l‟intégration de réalisations artistiques. Comme le souligne justement Oscar Salas Fonseca, bien que la population soit particulièrement demandeuse de ponts piétons, les passants les empruntent rarement. Pour gagner du temps, ceux-ci préfèrent traverser la chaussée en évitant les voitures. Travailler sur l‟originalité du pont peut, dans une certaine mesure, encourager les passants à utiliser le pont piéton et ainsi assurer leur sécurité.

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PHOTOGRAPHIE 14 : PONT PIETON ASSURANT LA LIAISON ENTRE LE CENTRE HISTORIQUE ET LA CENTRAL DE ABASTOS

Photographie personnelle

Le Plan Maestro de Desarrollo Urbano Municipal de Oaxaca de Juárez de 2001 envisage la reconversion des rives du Río Atoyac en un parc linéaire. Toutefois, quelques remarques doivent être formulées à ce sujet. Le projet d‟embellissement des rives du Río Atoyac doit considérer les territoires annexes. Actuellement, de part et d‟autres du cours d‟eau se situent des entrepôts et des industries (Central de Abasto, ancienne Fábrica de Triplay, scierie…) dépréciant l‟environnement naturel. Aussi, en raison de son caractère excentré, on peut émettre des réserves sur la fréquentation du parc linéaire. Afin de maximiser sa fréquentation, il conviendrait d‟assurer une articulation entre le futur parc et le district voisin de San Martìn Mexicapam. Les habitants de ce district résidentiel seraient indubitablement les principaux usagers de ce parc.

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PHOTOGRAPHIE 15 : LE RIO ATOYAC A HAUTEUR DE LA CENTRAL DE ABASTOS

Note : La photographie a été prise en période d‟étiage. Lors de la saison des pluies, le cours d‟eau s‟étend davantage. Toutefois, depuis une décennie environ, les changements climatiques et l‟accroissement de la demande en eau (liée en partie à l‟accroissement démographique) ont provoqué une diminution conséquente du débit du Río Atoyac. De part et d‟autre de l‟Atoyac, on peut distinguer la présence d‟industries et d‟entrepôts. Au loin, à flanc de montagne, on peut distinguer le district de San Martín Mexicapam. Photographie personnelle

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Antérieurement, nous avons pu voir que l‟organisation politique de ce territoire est particulièrement complexe. Les relations entre les organisations de commerçants et l‟Administration municipale s‟inscrivent dans un espace où le Droit mexicain ne semble pas s‟appliquer. Selon le directeur du service municipal des marchés publics, l‟autorité municipale a largement investi sur ce territoire mais les retours sur ces investissements ont été minimes. La plupart des interventions réalisées ont failli face à l‟inertie des pratiques locales. Notre réflexion sur la requalification de la Central de Abastos s‟est basée sur deux projets principaux. Le premier prévoie la relocalisation en périphérie du commerce de gros tandis que le second prévoie une série d‟action visant à requalifier l‟actuel site. Le second projet est intimement lié au premier dans la mesure où une partie des actions proposées repose sur la reconversion des friches héritées. Le transfert des activités grossistes en périphérie permettant d‟engager un processus de déconcentration des activités commerciales existantes. Le projet de relocalisation/requalification qui a fait l‟objet de ce dernier chapitre semble adapté au contexte dans lequel il s‟inscrit. Par ailleurs, ce projet va dans le sens d‟une réactivation commerciale : objectif auquel l‟Administration municipale et les commerçants peuvent justement consentir. A priori, il n‟existerait donc pas d‟intérêts antinomiques entre les deux acteurs cités en ce qui concerne le projet émis. Cependant, si les effets positifs sur le long terme sont presque indiscutables, il n‟en va pas de même sur le court et le moyen terme. Certains projets qui induisent des transformations profondes pourraient porter préjudice à certains groupes d‟acteurs. Par exemple, la mise en service d‟un marché de gros en périphérie pourrait porter atteinte aux producteurs agricoles qui avaient jusqu‟à présent l‟habitude d‟écouler leurs productions à l‟intérieur de la zone bodegas. Ces acteurs économiques qui seraient contraint d‟écouler leurs productions au sein de la nouvelle unité grossiste pourraient être affectés par la lenteur de la mise en marche de la nouvelle structure. Effectivement, la reconfiguration progressive de la logistique ainsi que la réorganisation de la demande prend du temps. Aussi, il est impératif que les autorités publiques mettent en place des mesures transitoires afin d‟éviter une paupérisation des acteurs impliqués dans la filière. L‟intervention de la puissance publique paraît nécessaire dans ce type de projet. Toutefois, si sa présence est indispensable dans un premier temps, l‟autorité publique Page | 108


peut s‟effacer dans un second temps, le relais devant être pris par des acteurs privés. La puissance publique apparaît donc comme l‟acteur privilégié chargé de transformer profondément les espaces centraux tout en accompagnant les personnes affectées par ces transformations. Pour parachever cette étude, il convient de préciser que rare sont les projets urbains qui s‟inscrivent sur le court terme. Le long diagnostic territorial présenté antérieurement a souligné la dégradation progressive qu‟a connue le site depuis sa construction. Actuellement, ce système commercial populaire est devenu totalement obsolète, rendant plus que légitime une entreprise de requalification urbaine et commerciale. Enfin, il convient de préciser que le processus de redynamisation commerciale envisagé peut en partie s‟appuyer sur la valorisation touristique du site et plus particulièrement de la zone tianguis et du marché artisanal. Ces deux activités économiques populaires et ancestrales ont un potentiel touristique considérable largement sous exploité.

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La ville sur laquelle s‟est centrée notre étude, Oaxaca de Juárez, présente deux spécificités notables. D‟une part, son Centre Historique est classé Patrimoine Culturel de l‟Humanité par l‟UNESCO, ce qui rend toute opération d‟urbanisme particulièrement complexe. D‟autre part, au regard des autres métropoles mexicaines, la capitale de l‟Etat de Oaxaca se distingue par un contexte sociopolitique extrêmement fragile. Ces deux particularités doivent être prises en compte dans notre projet de restructuration des espaces commerciaux populaires.

Le premier territoire d‟étude, la calle Las Casas, est localisé dans la partie occidentale du Centre Historique, laquelle présente une image urbaine dégradée. Cet axe commercial est particulièrement affecté par l‟ambulantage. Bien que cette pratique largement répandue dans les villes mexicaines soit ancestrale, cette activité a pris une ampleur considérable ces dernières décennies. Actuellement, la généralisation de l‟ambulantage est stigmatisée comme la principale manifestation de la crise urbaine du centre. Dans l‟intention d‟embellir la calle Las Casas et les territoires annexes, l‟autorité municipale souhaite réguler la vente ambulante. Compte tenu du contexte sociopolitique fragile de la ville, il nous est paru indispensable de relocaliser les vendeurs ambulants dans une structure adéquate. En effet, une politique centrée sur la répression des vendeurs illégaux pourrait conduire à un envenimement de la situation. En ce sens, la construction d‟un marché pour les vendeurs ambulants à proximité du Centre Historique nous paraît pertinente. Néanmoins, si l‟on tient compte des considérations politiques, on peut émettre des doutes sur la réalisation d‟un tel projet. En effet, les enjeux politiques et sociaux de ce type d‟action peuvent dissuader les élus de s‟engager dans la régulation de la vente ambulante. De plus, les résultats espérés sont très rarement à la hauteur des investissements nécessaires. Dans la plupart des cas, la construction de marchés pour les vendeurs ambulants permet de libérer les espaces publics, mais seulement de Page | 110


manière temporaire. En effet, les vendeurs ambulants cherchent toujours à revenir dans la rue où la présence de la foule multiplie les opportunités de vente. En outre, la vente ambulante est intrinsèquement liée à la sphère politique, ce qui constitue un obstacle considérable à la réalisation d‟un projet concret et définitif. En effet, dans la mesure où les leadeurs des associations de vendeurs ambulants entretiennent des relations privilégiées avec les partis politiques et les élus locaux, la carte municipale du commerce ambulant est en perpétuelle recomposition. A cet égard, on constate que les espaces de vente ambulante connaissent de profonds changements à l‟approche ou à l‟issue d‟élections locales. Malgré tout, cette étude tente de proposer une solution rationnelle au problème de l‟ambulantage pour le territoire d‟étude. Compte tenu des observations faites, il est probable que la construction d‟une structure commerciale spécialisée ne permettra pas d‟offrir une solution définitive au problème de l‟ambulantage ne serait ce que sur la calle Las Casas. Toutefois, le projet proposé a le mérite d‟aller dans le sens d‟un accroissement de l‟offre commerciale en centre-ville. En dépit du contexte actuel de retrait de l‟autorité publique, il est recommandable que les pouvoirs publics se réengagent dans la construction de marchés publics. Assurément, sans marchés publics, la population continuera de chercher des sites illégaux que ce soit pour vendre ou pour acheter.

Le second territoire d‟étude, la Central de Abastos, est un immense espace commercial populaire. En raison de sa localisation péricentrale, ce territoire génère une série de problèmes urbains qui nous ont amené à nous interroger sur une éventuelle reconversion de cet espace. Etant donné l‟importance du marché traditionnel dans la culture locale, notre démarche s‟est orientée vers la revalorisation et la réorganisation des différentes activités commerciales. La première proposition envisage la relocalisation des activités liées au commerce de gros en périphérie. Cette dynamique permettrait d‟engager un processus de redynamisation de l‟activité commerciale ainsi qu‟un accroissement de la transparence de l‟activité économique. Sur le site de la Central de Abastos, le transfert des activités grossistes permettrait la libération d‟un espace conséquent ainsi que la suppression des Page | 111


nuisances causées. L‟étude des normes émises par les organismes fédéraux nous ont amené à envisager la construction d‟un marché de gros dans la ville de Magdalena Apasco située aux abords de la Panaméricaine. Afin de requalifier l‟actuel site de la Central de Abastos, une série d‟action est proposée. Elles

vont

dans

le

sens

d‟une

résolution

des

problèmes

majeurs

de

ce

territoire (congestion routière, insécurité, insalubrité, absence d‟espaces publics, etc.). L‟ensemble du projet s‟inscrit dans une démarche volontariste de déconcentration commerciale. Cette dynamique s‟avère indispensable dans la mesure où la plupart des dysfonctionnements urbains générés par la Central de Abastos résultent de la concentration à outrance de personnes et d‟activités. Par ailleurs, les propositions émises laissent entrevoir une revalorisation touristique du territoire d‟étude. Sur le plan politique, le projet proposé semble concilier les intérêts des commerçants (regroupés en associations civiles) et ceux de la Municipalité. En effet, les propositions émises vont dans le sens d‟une réactivation commerciale et une reprise en main de ce secteur dégradé par les pouvoirs publics. Toutefois, la corruption généralisée sur ce territoire constitue indubitablement un obstacle à la conduite d‟une politique résolument interventionniste.

La régulation de l‟ambulantage et la réorganisation des activités commerciales centrales sont des problématiques urbaines auxquelles sont confrontées la plupart des grandes villes mexicaines. Ces problèmes urbains ne peuvent pas être résolus seulement par les aménageurs du territoire. En effet, ces problématiques renvoient à une multitude de disciplines. Ainsi, le problème de l‟ambulantage Ŕ qui se manifeste par l‟occupation d‟espaces publics Ŕ trouve son origine dans les défaillances de l‟économie formelle mais résulte également de la persistance de pratiques hérités des cultures mésoaméricaines. L‟ambulantage est donc une question transversale qui doit être traitée de façon pluridisciplinaire. De même, la réorganisation de la Central de Abastos, vaste structure commerciale inadaptée, mais chère au cœur des oaxaqueños, demande un traitement politique du problème, mais aussi sociétal et économique, ménageant les intérêts de tous les acteurs concernés.

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ANNEXE 1 : SYNTHESE DU DIAGNOSTIC TERRITORIAL, CENTRE HISTORIQUE DE OAXACA DE JUAREZ

Source : Délégation Générale du Centre Historique, Municipalité de Oaxaca de Juárez

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ANNEXE 2 : NORMES RELATIVES A L’IMPLANTATION D’UN MARCHE DE GROS Source : SEDESOL, SECOFI, 1999

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ANNEXE 3 : COMPATIBILITE ENTRE LES MARCHES DE GROS, ZONE TIANGUIS ET LES AUTRES TYPES D’EQUIPEMENTS URBAINS

Source : SEDESOL, SECOFI, 1999

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Integral

(CEAGI):

http://www.ceagi.org Fédération Française des Marchés d‟Intérêt National (FFMIN) : http://www.ffmin.fr Imágenes Aéreas de México: http://www.imagenesaereasdemexico.com/ Instituto Nacional de Estadística, Geografía e Informática (INEGI): http://www.inegi.org.mx Municipalité de Oaxaca de Juárez: http://www.municipiodeoaxaca.gob.mx

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FIGURE 1 : LOCALISATION DU PERIMETRE D’ETUDE 10 FIGURE 2 : LOCALISATION DE L’ETAT DE OAXACA ET DE SA CAPITALE 12 FIGURE 3 : PLAN DE OAXACA DE JUÁREZ, 1790 19 FIGURE 4 : CROISSANCE URBAINE DE OAXACA DE JUAREZ, 1800 - 2004 22 FIGURE 5 : IMAGE SATELLITE DE LA ZONE METROPOLITAINE DE OAXACA 27 FIGURE 6 : LOCALISATION DES VENDEURS AMBULANTS, CALLE LAS CASAS, SAMEDI 4 AVRIL 2009, 12H00 39 FIGURE 7 : AMBULANTAGE SUR LA CALLE LAS CASAS 40 FIGURE 8 : SITUATION DE LA CALLE LAS CASAS EU EGARD AU CORPUS REGLEMENTAIRE 46 FIGURE 9 : LOCALISATION DU PROJET 54 FIGURE 10 : PLANS DE LA STRUCTURE VISANT A RELOCALISER LES VENDEURS AMBULANTS 54 FIGURE 11 : PLAN D’USAGE DES SOLS AUTOUR DE LA CENTRAL DE ABASTOS 67 FIGURE 12 : REPRESENTATION DES CIRCULATIONS PIETONNES ENTRE LA STRUCTURE ET SON ENVIRONNEMENT 68 FIGURE 13 : DISTRIBUTION DES ACTIVITES COMMERCIALES, CENTRAL DE ABASTOS 80 FIGURE 14 : LES EVENTUELS SITES DE RELOCALISATION 94 FIGURE 15 : PROJET D’IMPLANTATION D’UN SYSTEME BUS RAPID TRANSIT A PROXIMITE DE LA CENTRAL DE ABASTOS 100 FIGURE 16 : LOCALISATION DE LA PARCELLE MUNICIPALE 104

PHOTOGRAPHIE 1 : SAN MARTIN MEXICAPAM, OAXACA DE JUAREZ 15 PHOTOGRAPHIE 2 : LOMAS DE SAN JACINTO, OAXACA DE JUAREZ 16 PHOTOGRAPHIES 3 : LA « COMMUNE » DE OAXACA, AOUT 2006 18 PHOTOGRAPHIE 4: TIANGUIS A SAN CRISTOBAL LAS CASAS, CHIAPAS 36 PHOTOGRAPHIE 5 : COMMERCE DE DVD PIRATES 44 PHOTOGRAPHIE 6 : ZONE D’IMPLANTATION DES VENDEURS AMBULANTS 45 PHOTOGRAPHIE 7 : PROXIMITE ENTRE VENDEURS ETABLIS ET VENDEURS AMBULANTS 45 PHOTOGRAPHIE 8 : TERRAIN DE PROJET 66 PHOTOGRAPHIE 9 : PLACE COMMERCIALE POPULAIRE PINO SUAREZ, DISTRICT FEDERAL 69 PHOTOGRAPHIE 10 : COMMERCES AMBULANTS INSTALLES FACE A L’ENTREE D’UN MARCHE 82 PHOTOGRAPHIES 11 : CONGESTION DES VOIES CIRCULATOIRES 83 PHOTOGRAPHIES 12 : MONTICULES DE DECHETS 84 PHOTOGRAPHIE 13 : LE PLUS GRAND MARCHE DE GROS DU MONDE, MEXICO, DELEGATION IZTAPALAPA 89 PHOTOGRAPHIE 14 : PONT PIETON ASSURANT LA LIAISON ENTRE LE CENTRE HISTORIQUE ET LA CENTRAL DE ABASTOS 106 PHOTOGRAPHIE 15 : LE RIO ATOYAC A HAUTEUR DE LA CENTRAL DE ABASTOS 107

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GRAPHIQUE 1 : EVOLUTION DE LA POPULATION DE OAXACA DE JUAREZ, 1818-2005 GRAPHIQUE 2 : NATURE DES COMMERCES

20 42

ANNEXE 1 : SYNTHESE DU DIAGNOSTIC TERRITORIAL, CENTRE HISTORIQUE DE OAXACA DE JUAREZ ANNEXE 2 : NORMES RELATIVES A L’IMPLANTATION D’UN MARCHE DE GROS ANNEXE 3 : COMPATIBILITE ENTRE LES MARCHES DE GROS, ZONE TIANGUIS ET LES AUTRES TYPES D’EQUIPEMENTS URBAINS

114 115 120

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A.

Un territoire confronté à de nouvelles problématiques urbaines et à un contexte sociopolitique fragile 1. Localisation 2. Les principales contraintes physiques Sismicité et adéquation urbanistique Précipitations pluviales et émergence de nouvelles problématiques urbaines 3. Un territoire marqué par une situation socioéconomique, culturelle et politique fragile Précisions sur le mouvement populaire de 2006

B. 1. 2.

Morphologie urbaine Evolution de la morphologie urbaine de Oaxaca de Juárez Les différentes entités morphologiques

19 19 22

1. 2. 3.

Précisions sur le cadre réglementaire La répartition des compétences en matière d’urbanisme au Mexique Une coordination métropolitaine embryonnaire Un centre historique classé soumis à des acteurs et à des législations spécifiques

25 25 26 28

C.

A.

12 12 13 13 13 16 17

Définitions entourant l’ambulantage Une activité illégale qui s’accommode des nouvelles dynamiques urbaines et de la fébrilité de l’économie 2. Définitions de l’espace public 3. Diversité des vendeurs ambulants 4. Origines du commerce ambulant

31

Etat des lieux 1. Description du phénomène a. De l’ambulantage au commerce sédentaire b. Nature des commerces c. Localisation détaillée des différentes « corporations » d. Les différentes temporalités 2. Une contestation croissante ? a. Législation encadrant l’ambulantage à Oaxaca de Juárez b. Une contestation portée par la population locale, les commerçants et la Municipalité

37 37 41 42 42 43 46 46 48

1.

B.

31 32 33 34

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La population locale Les commerçants La Municipalité C. D.

Projet de relocalisation des vendeurs ambulants émis par la Municipalité

B.

56 56 56 58 60

Histoire du site Construction de la Central de Abastos

74 74

Etat des lieux Localisation des différentes activités commerciales à l’intérieur de la Central de Abastos Les marchés publics centraux Les commerces établis Marché d’artisanat Zone tianguis Zone bodegas 2. Problèmes rencontrés dans la Central de Abastos a. Problématique de l’ambulantage b. Congestion des flux routiers adjacents. c. Insalubrité d. Insécurité 3. Organisation politique de la Central de Abastos

77 77 77 78 78 78 79 81 81 82 84 85 85

Projet de relocalisation de la zone bodegas Avantages inhérents à une relocalisation périphérique Normes relatives à l’implantation d’un marché de gros Equipements intégrés et afférents au marché de gros 3. Sites potentiels pour la relocalisation des activités grossistes 4. Système d’acteurs et financement

88 88 91 92 92 94

Projet de requalification du territoire de la Central de Abastos

96

L’expulsion des fonctions centrales dans les villes mexicaines Prémices d’une réflexion sur la requalification de la Central de Abastos de Oaxaca Actions possibles visant à requalifier le territoire de la Central de Abastos a. Réorganisation des réseaux de transport

96 97 99 99

1.

C.

53

Les enjeux d’une politique publique volontariste Les projets expérimentés à l’étranger et au Mexique a. Istanbul : « Une volonté d’éradication qui se change en une folklorisation contrôlée » b. Les projets d’institutionnalisation de l’ambulantage expérimentés au Brésil c. L’évolution des politiques publiques à Mexico 2. Quelles stratégies et quelles actions peuvent être entreprises par la Municipalité de Oaxaca de Juárez ? a. Les jeux d’acteurs Des politiques interventionnistes risquées qui expliquent la frilosité des politiciens Vendeurs ambulants, acteurs municipaux : intérêts antinomiques et relations de connivence Projet de relocalisation et mode de gouvernance b. L’opportunité de la requalification de la Central de Abastos Orientations urbanistiques et architecturales Spécialisation commerciale 1.

A.

48 49 51

1. 2.

D. 1. 2. 3.

62 62 62 63 64 65 68 70

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Implantation d’un réseau de transport public performant Reconversion de la gare routière seconde classe b. Requalification de la zone bodega c. Amélioration de la sécurité d. Insertion d’espaces publics Création de places publiques et ambulantage Requalification du pont piéton Valorisation des rives du Río Atoyac 4. Vers un projet de modernisation intégré aux spécificités locales

99 100 101 102 104 104 105 106 108

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