4 minute read

Entrevue PHILIPPE THIRODE GENTLEMAN BÂTISSEUR

Next Article
Elisabeth Murino

Elisabeth Murino

L’homme en impose par son calme et sa gentillesse. Mais en découvrant son histoire, on réalise qu’il a fallu un brin de folie, un soupçon d’audace et une bonne dose de ténacité pour que la vue soit si belle depuis Les Balcons.

Les fondations

« Étant originaire du Jura, mon père s’est occupé du ski-club de Poligny avec quelques copains au début des années 50. C’est lui qui conduisait le bus, ils allaient aux Rousses. Ma mère avait été nommée professeur à Poligny et elle participait aux dimanches de ski, c’est comme ça qu’ils se sont rencontrés. Le ski a toujours été dans l’ADN de la famille ! »

Parcours d’un combattant

« J’ai obtenu mon diplôme de pharmacien en juin 1979 et en août je partais faire mon service militaire à Ajaccio, dans le service de santé des nageurs de combat. Pour intégrer cette unité, il a fallu que je me fasse breveter parachutiste et plongeur de bord. Ça a été une grande aventure, de se confronter à l’autorité, de travailler avec des personnes hyper entraînées et carrées. Une très bonne expérience pour affronter par la suite la vie professionnelle. »

De la blouse au casque de chantier

« Je suis resté une dizaine d’années dans la pharmacie avec mon épouse, mais j’avais déjà ce goût d’entreprendre. Très vite, on a acheté le pas de porte à côté, on a multiplié la surface de la pharmacie par quatre, puis les projets immobiliers sur Lons se sont enchaînés et j’ai commencé à embaucher des artisans à l’année pour rénover les appartements et les louer. Quand on m’a proposé la surélévation du Val Chavière en 1992, j’avais donc déjà une petite expérience du bâtiment, j’ai progressivement démystifié toutes les étapes, de la maîtrise d’ouvrage à la construction en passant par la maîtrise d’œuvre, même si c’était un grand pas vers l’avant. »

Le succès de la première réalisation fait déjà des émules. Il en résulte les premières résidences Les Balcons à Val Thorens -qui seront 18 ans plus tard composées de 7 chalets-, puis une résidence et un premier hôtel à Belle Plagne. Assez vite, Philippe Thirode développe le groupe, crée une société de construction avec des équipes chantier qualifiées et s’entoure de collaborateurs fidèles, tant au siège à Lons-Le-Saunier qu’en station.

Les opportunités se présentent au fur et à mesure que Les Balcons se forgent une réputation : Val Cenis, avec 12 bâtiments dont une résidence 5 étoiles, et La Rosière qui accueillera 9 chalets et un hôtel 4 étoiles d’exception. 30 ans de projets toujours plus audacieux dans des lieux exceptionnels, donnant lieu à des rencontres inoubliables.

Quelles sont les clés de la réussite des Balcons ?

Le bon moment au bon endroit !

« Nous sommes arrivés à la bonne période. Il y avait la guerre du Golfe, le conflit avait stoppé l’économie de la promotion immobilière. Ça a laissé le champ libre à de nouveaux investisseurs en montagne. Le fait que nous ayons commencé à Val Thorens, station branchée de haute altitude avec une clientèle étrangère qui permet une exploitation pendant une longue saison d’hiver nous a également permis de démarrer rapidement. »

Les bons partenaires

« Les banques m’ont immédiatement soutenu, pourtant un pharmacien qui investissait à la montagne, ce n’était pas évident ! Ils voyaient ce qu’on faisait, les grands appartements, l’originalité, le fait que cela soit dans la station la plus haute d’Europe… Tous les facteurs étaient réunis pour permettre à cette économie de se mettre en place.

Et puis assez rapidement j’ai lié des partenariats de confiance avec des maîtres d’œuvre, des entreprises… Dans les affaires, il faut être droit et juste, c’est important. Mais il faut l’être aussi avec son personnel. Mon épouse a été une précieuse alliée et un soutien indispensable tout au long de ces années. »

Du cran !

« Il faut aussi avoir bien sûr une vision, de la pugnacité, du courage, ça n’a pas toujours été facile. Je me suis fait des cheveux blancs plus tôt que si j’étais resté pharmacien. »

Quels ont été les plus gros défis de ces 30 années ?

« L’humain est très important, de temps en temps des collaborateurs nous quittent, on ne voudrait pas les voir partir, mais globalement on arrive à bien le gérer, on a une vraie structure qui fonctionne, avec un produit attractif. Par exemple, on loge tout notre personnel, c’est un point très important. C’est un peu plus compliqué sur la partie travaux. Les lycées professionnels se sont vidés depuis 15 ans, même si aujourd’hui il semble que ça revient. Il en résulte une perte de compétences, de savoir-faire… Beaucoup de métiers du bâtiment sont en tension. »

Il y a 30 ans, l’âge du groupe

Les Balcons, Philippe Thirode et ses deux fils déjà attirés par les sommets

Quelles valeurs fondent

Les Balcons ?

« Je pense que ce sont avant tout des valeurs d’humanité. Une expérience humaine. Le plus important à mon sens, c’est d’être à la hauteur de ses employés, de leur donner l’envie de vous accompagner, de participer au projet, leur faire sentir qu’ils en font partie. Ces valeurs, elles se ressentent auprès des clients, des intervenants.

Une autre valeur au travers de ce que l’on a construit, c’est la qualité du travail, avec le temps cela semble de plus en plus important. Je pense que c’est un sentiment humain assez général, mais quand c’est bien réalisé, que l’on n’est pas obligés de réintervenir, c’est une grande satisfaction.

En ce qui concerne le développement durable, je l’ai tout de suite intégré dans les fondements de l’entreprise. J’ai eu la chance de vivre dans une petite ville avec un grand terrain à la campagne, mes racines sont liées à la terre. J’ai acheté une ancienne maison vigneronne et replanté quelques vignes, j’élève aussi des moutons, j’ai un rucher. C’est du travail, mais ça permet de se poser, de relativiser, de prendre du recul. »

30 ans… et après ?

« Ce qui m’a conforté, c’est que dès 2006 mes fils m’ont rejoint. Ils ont fait des études d’ingénieurs, adaptées aux métiers que l’on a dans l’entreprise, que ce soit la construction ou l’exploitation. Cela a été une énorme satisfaction d’avoir pu transmettre ce métier de passion, puisque c’est véritablement de cela qu’il s’agit. Dès leur plus jeune âge, ils travaillaient un mois l’été avec nous. Ils venaient souvent aussi sur les fins de chantiers avant Noël pour nous aider à finaliser, ranger, nettoyer… J’étais fier d’eux, ils y mettaient beaucoup d’énergie, à l’époque où les employés du chantier commençaient à être fatigués. Depuis 2020, Pauline nous a rejoint dans l’entreprise, avec toutes ses compétences, ses qualités de communicante et son esprit de famille.

C’est une grande fierté d’avoir mes 3 enfants à mes côtés, qui me permettent de me retirer progressivement de l’opérationnel et de savoir que l’avenir des Balcons est assuré. »

This article is from: