Dakar, le 23 Mai 2006
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Monsieur le Ministre d’Etat, Ministre de l’Economie et des Finances
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Monsieur le Ministre chargé de la bonne gouvernance et du NEPAD
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Messieurs les représentants des Institutions financières internationales
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Mesdames et Messieurs, chers collègues administrateurs de sociétés,
Le développement économique est un concept complexe. Une réalité insaisissable derrière laquelle courent les nations d’Afrique depuis les années d’Indépendance. Il fut un espoir devenu mythe. Celui de l’amélioration du niveau de vie des populations africaines. Il fut même parfois espoir fou, puisque celui d’un rattrapage du niveau de vie des pays les plus avancés. S’il est vrai que la colonie était faite pour assurer l’enrichissement de la mère patrie, il était donc normal d’attendre de l’indépendance qu’elle enrichît les peuples devenus libres.
L’Etat s’est alors donné le rôle de promoteur du développement économique et social. Le socialisme servant souvent de support idéologique, puisqu’il avait le plus soutenu les luttes pour la libération de l’Afrique.
Les premiers diagnostics des échecs africains en ont rendu les Etats et les gouvernants responsables, ces derniers se préoccupant plus de s’enrichir ainsi que leurs familles et leurs proches, plutôt que d’améliorer le niveau de vie de leurs peuples. Et cela dure depuis bientôt cinquante années.
Les prétextes du non développement et qui ont longtemps servi à construire une fatalité de l’échec de l’Afrique ont eu pour noms : détérioration des termes de l’échange, sécheresse, insuffisance de personnel qualifié. Fort heureusement, on donne désormais de plus en plus de place à la cause principale du non développement : la mal gouvernance.
Mais quelle lenteur à constater de réels progrès, à reformer les comportements lorsque les régimes en place durent vingt à quarante ans !… Alors, dans notre continent riche de son eau, de son potentiel énergétique, riche de ses terres arables, riche de son soleil, riche de ses mines, et désormais de ses ressources humaines, l’espoir se tourne vers l’entreprise, unité de base du tissu économique et dont la construction, la 2
croissance, le développement portent la croissance et le développement des nations.
Qu’elle soit publique ou privée, petite, moyenne ou grande, c’est elle qui porte la responsabilité de la création de richesse, l’espoir de l’amélioration du niveau de vie des peuples d’Afrique, comme ailleurs dans le monde. Il est donc essentiel que l’on se soucie de son bon fonctionnement et surtout de sa pérennité. Mais en Afrique, le phénomène de contagion ayant joué son rôle, elle est déjà malade de mal gouvernance. Aux mêmes maux le même concept.
QUELQUES REPERES SUR LE CONCEPT DE GOUVERNEMENT D’ENTREPRISE C’est ainsi que le terme de « corporate governance » aurait été employé pour la première fois aux Etats-Unis par un universitaire, Richard Ellis, déjà en 1960, pour qualifier la structure et le fonctionnement de la politique des entreprises par analogie avec le gouvernement des nations, des Etats. Ce n'est pas le terme de « government » qui a été utilisé, mais celui de « governance ». En France, « governance » a été traduit par gouvernement, revenant ainsi à la signification plus large qu'avait ce mot jusqu'au seizième siècle. A cette époque, et pour citer Michel Foucault, le terme gouvernement « ne se référait pas seulement à des structures politiques et à la gestion des Etats, mais il désignait la manière de diriger la conduite d'individus ou de groupes, gouvernements des enfants, des âmes, des communautés, des familles, des malades. Il ne recouvrait pas seulement des formes instituées et légitimes d'assujettissement politique ou économique mais des modes d'action, plus ou moins réfléchis ou calculés, mais tous destinés à agir sur les possibilités d'action d'autres individus. Gouverner, en ce sens, c'est structurer le champ d'actions des autres ».
Le gouvernement d'entreprise doit être compris dans ce sens.
Une expansion rapide et récente du concept
L'idée qui est à la base de la notion de gouvernement d'entreprise remonte au moins à Adam Smith. Lorsqu'il n'y a pas coïncidence entre les propriétaires du capital de l'entreprise et ceux qui la dirigent, il existe un risque potentiel de conflits entre les intérêts des uns et des autres.
Il aura fallu toutefois attendre les travaux de Jensen et Meckling en 1976 pour que soit théorisée la notion de gouvernement d'entreprise. Ces travaux ont appliqué la théorie de l'agence à l'entreprise, considérée comme le lieu d'un faisceau de contrats, et ont élaboré le modèle des coûts d'agence. Le dirigeant est considéré comme le mandataire des actionnaires 3
et d'un ensemble de parties, créditeurs, fournisseurs, clients, employés, avec lesquelles il contracte au nom de l'entreprise. Le conseil d'administration et les auditeurs externes agissent comme des représentants de ces parties ou des intermédiaires. L'objectif était de renforcer les outils par lesquels les fournisseurs de capital peuvent s'assurer de la rentabilité de leur investissement ou, dans une conception plus large, des moyens par lesquels l'intérêt de l'ensemble des parties prenantes est retenu. La question de savoir à quel point le gouvernement d'entreprise est représentatif et qui il représente, les actionnaires " shareholders " strictement ou l'ensemble des parties prenantes " stakeholders ", n'est pas épuisée et fait toujours débat, notamment au regard d'une acception orientée vers la shareholder-value aux Etats-Unis et d'une conception de l'entreprise prenant en compte des intérêts plus larges en Europe.
Evolution récente S'ajoutant à l'effondrement de la bulle spéculative sur les marchés actions et contribuant à la perte de confiance des investisseurs, l'affaire Enron et celles qui ont suivi aux Etats-Unis, (Tyco, Worldcom, etc.) comme en Europe (PARMALAT, Royal Ahold), non seulement traduisent des comportements frauduleux de dirigeants ou des erreurs stratégiques lourdes de conséquences, mais encore mettent en évidence les dysfonctionnements, d'une part, de Conseils d'administration et, d'autre part, des « gatekeepers » c'est à dire d'auditeurs externes, d'analystes et de banques d'affaires comme des agences de notations. Ces faits ont mis à mal l'idée que le gouvernement d'entreprise puisse résulter de la seule autorégulation puisque, aux Etats-Unis même, le système a failli.
Aux Etats unis, la réaction du gouvernement fédéral sera rapide avec l'adoption de la loi Sarbanes-Oxley en juillet 2002 et de nouvelles règles pour les entreprises cotées. Celles-ci imposent une plus grande présence d'administrateurs indépendants dans les conseils d'administration, l'inclusion d'un expert financier au moins dans les comités d'audit et la revue par ceux ci, avec une fréquence trimestrielle, des états financiers certifiés par le directeur général et le directeur financier. Enfin, les administrateurs indépendants sont invités à se réunir indépendamment de la direction exécutive de manière régulière. En France, la réaction s'est traduite par l'initiative conjointe du MEDEF et de l'AFEP-AGREF de constituer un nouveau groupe de travail présidé par Daniel Bouton, son objectif étant la réévaluation d'un certain nombre de principes relatifs au gouvernement d'entreprise, à l'information et à la communication financières ainsi qu'à la pertinence des règles comptables. Le rapport a été rendu public en septembre 2002 et les recommandations émises ont été en partie reprises par la Commission des opérations de bourse.
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Dans l'Union Européenne, une note portant sur les conséquences de l'affaire Enron a été communiquée au Conseil Ecofin d'Oviedo de mars 2002, conduisant à élargir au gouvernement d'entreprise le mandat sur l'harmonisation du droit des sociétés confié à un groupe d'experts de haut niveau présidé par M. J Winter. Le rapport de ce groupe a été rendu public en novembre 2002. A la différence des Etats-Unis, les gouvernements dans l'Union Européenne comme la Commission ne paraissent pas vouloir légiférer sur le gouvernement d'entreprise.
Si l'exigence s'est renforcée, l'évolution est encore celle d'une autorégulation caractérisée de manière croissante par l'obligation de respecter les codes nationaux de gouvernement d'entreprise ou d'expliquer les raisons pour lesquelles l'entreprise ne souhaite pas y satisfaire.
Ainsi, de simple concept né outre-atlantique il y a moins de trente ans, le gouvernement d'entreprise s'est d'abord imposé aux grandes sociétés cotées qui en ont adopté les règles sous la pression des investisseurs et des marchés. Cette autorégulation a été mise à mal aux Etats-Unis par les conséquences de l'affaire Enron qui a conduit le gouvernement fédéral à légiférer et la SEC à réglementer. Dans l'Union Européenne, si l'exigence de gouvernement d'entreprise s'est renforcée, l'orientation est plutôt de compter sur les forces de marché.
Sur le fond, il y a toute raison de considérer que le gouvernement d'entreprise ne relève pas d'une simple mode mais d'un phénomène durable.
Dès lors que le gouvernement d'entreprise est pris en compte par les Pouvoirs Publics, les régulateurs, les organisations supranationales et qu'il s'impose comme une nouvelle exigence du droit, dès lors qu'il repose essentiellement sur le rôle et les responsabilités des administrateurs, dont les administrateurs indépendants, dès lors qu'ils conduisent sinon à une professionnalisation des administrateurs qui n'est pas nécessairement souhaitable mais à un exercice professionnel de leur fonction, il est apparu utile et nécessaire de se doter d'organisations réunissant les administrateurs et répondant à la diversité de leurs besoins. PRESENTATION DE L’ISA C’est dans le contexte que nous venons de décrire, que l'accent a été mis sur l'importance du rôle des conseils d'administration et des responsabilités des administrateurs, qui se doivent d'être les garants d'un gouvernement d'entreprise fiable et durable.
En Afrique noire francophone, la mise en place de l’OHADA par les autorités et l’entrée 5
en vigueur des Actes uniformes qui en sont les instruments à partir de l’année 1998 ont marqué un tournant dans l’affirmation de la nécessité de clarifier et renforcer le rôle des organes dirigeants des sociétés.
Ainsi donc, à un moment où leurs responsabilités s'élargissent, où le niveau d'exigence vis-à-vis des conseils se renforce, le besoin d'un lieu d'échanges, d'expression et d'appui qui donne
aux
administrateurs
les
moyens
d'exercer
leurs
fonctions
avec
diligence
et
professionnalisme s’est fait vivement ressentir .
C'est à ce besoin qu'ambitionne de répondre l'ISA, Institut Sénégalais des Administrateurs
Il y a un an, dans le but de promouvoir les pratiques vertueuses en matière de gouvernement d’entreprise et contribuer à l’amélioration de l’environnement des affaires, des administrateurs de sociétés et chefs d’entreprises ont pris l’initiative de fédérer leurs idées avec celles d’ institutions représentatives du secteur privé (Chambre de Commerce, CNES, CNP), mais aussi des administrations en charge de la gestion des participations de l’Etat (Cellule de gestion du portefeuille de l’Etat et Contrôle Financier de la Présidence).
Les membres fondateurs ont alors exprimé leur ambition de faire de l’ISA une association de référence et un centre de ressources pour les administrateurs sénégalais ou exerçant au Sénégal et, plus généralement en Afrique de l’Ouest.
Ainsi donc, l’ISA est née, enfantée par un an de travail, d’échanges et de réflexions, avec une grande ambition que nous souhaitons partager avec tous les administrateurs de sociétés pour le plus grand bien de notre économie, et en servant d’exemple en Afrique de l’Ouest.
C’est aujourd’hui que l’ISA pose son premier acte en organisant la présente manifestation baptisée « Forum de l’Administrateur », événement exceptionnel dans notre pays, par la qualité des participants et la diversité des expériences qui y seront partagées, le tout devant profiter aux administrateurs de sociétés, à nos entreprises et à notre économie.
La pertinence de cette manifestation et des sujets qui y seront débattus est malheureusement confortée par l’actualité économique récente dans notre pays, et les difficultés traversées par certaines grandes entreprises qui soulèvent des problèmes liés au bon fonctionnement de leur système de gouvernement.
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L'Institut Sénégalais des Administrateurs (ISA) se veut un véritable outil au service de la Place financière de Dakar et, plus généralement de l’espace économique que nous partageons avec sept autres Etats, l’UEMOA. Il sera doté d’un Comité d’éthique composé personnalités de référence dans notre pays.
Notre institut s'adresse à l'ensemble des administrateurs de sociétés, privées ou à participation publique.
Son objet est de leur offrir : -
un lieu d'échange et d'expression collective
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et de leur apporter conseil et appui dans l'exercice de leur fonction.
C'est ainsi que seront proposées des prestations en matière d'information, de formation, d'accès à des services de conseil, d'assurance et de logistique.
Objectifs et missions
L'ISA est un projet de la Place financière de Dakar et, comme tel, son objet est de : •
Conduire directement, ou en partenariat, toute action d'information, de formation, de recherche, d'assistance et de conseil vis-à-vis des administrateurs de sociétés ;
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Promouvoir le recours à des administrateurs indépendants, dans la mesure où ceux-ci seront le vecteur essentiel d'un sain gouvernement des entreprises, particulièrement dans certaines entités d’intérêt public ;
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Contribuer, plus généralement, à la promotion des bonnes pratiques en matière de gouvernement d'entreprise, par son action en faveur de l'exercice professionnel de la fonction d'administrateur ;
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Etre, enfin, l'association de référence des administrateurs au Sénégal et en Afrique de l’Ouest.
Les Missions de l'Institut consistent à •
Fournir des prestations d'information : L'Institut se propose d’offrir une information de qualité sur l'ensemble des questions intéressant les administrateurs. Ainsi, seront proposés un espace documentaire, des dossiers thématiques et un service express d'information réglementaire,
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Proposer des formations : Deux produits de formation seront mis en place à partir de Juin 2006 : 7
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des formations courtes de perfectionnement d'une durée d’une demi-journée à un jour, voire deux,
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des formations personnalisées intra-entreprises sur site,
Des « petits déjeuners de l’ISA » seront organisés autour de thèmes d'actualités, pour pouvoir informer et donner des avis sur des situations ponctuelles ou s’exprimer sur des tendances observées.
Dans ce cadre, l’ISA a déjà engagé les démarches pour nouer des relations de partenariat avec les institutions de formation de la place, notamment la Faculté de Droit de l’Université Cheikh Anta Diop, l’ISM et le CESAG.
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Faciliter l'accès à des services d'expertise, de logistique et d'assurance : L'Institut organise également l'accès à des services fournis par des prestataires extérieurs spécialisés et membres (cabinets d'avocats, juristes et fiscalistes, auditeurs, spécialistes en analyse financière, services logistiques aussi bien qu'en assurance).
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Favoriser le partage d'expérience : L'Institut facilite le partage d'expérience entre les membres de l'Institut eux-mêmes, mais aussi avec les membres d'associations ayant le même objet à l'étranger. Dans cet esprit, l’ISA entend promouvoir sa démarche dans les pays de l’UEMOA ayant déjà en partage une Bourse des valeurs.
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Organiser l'expression collective des administrateurs : L'une des principales missions de l'Institut est de fédérer les administrateurs de manière à organiser les travaux de réflexion collective et le partage d'expériences sur les thèmes liés à l'exercice de leur fonction, au rôle des conseils d'administration et au gouvernement d'entreprise.
Monsieur le Ministre d’Etat,
A l’issue de la présente manifestation, seront dressés les « actes du Forum de l’Administrateur », recueil destiné à dresser un état des lieux sur les pratiques en matière de gouvernement d’entreprise dans notre pays.
Ce document vous sera soumis, ainsi qu’à toutes les autorités de notre pays.
L’ISA s’engage, conformément à ses ambitions, à aider à l’amélioration de ces pratiques et à constituer un organe de veille au service de notre économie. 8
Monsieur le Ministre d’Etat, Au nom de l’ensemble des membres de l’ISA je tiens à vous dire que nous sommes particulièrement sensibles à votre présence à nos côtés le jour où notre association organise sa première manifestation publique. Je le dis parce qu’en plusieurs occasions j’ai eu à constater personnellement à quel point le Ministère de l’Economie et des Finances tenait à l’exercice d’une bonne gouvernance au sein d’entreprises du secteur public, et au-delà.
J’ai vu, sans trahir de secrets, votre ministère lutter, dans la limite de ses moyens, contre les méfaits annoncés d’une mauvaise gouvernance. Je l’ai également vu s’efforcer d’en limiter les effets.
Vous avoir aujourd’hui à nos côtés contribue fortement à fonder notre espoir en de jours meilleurs pour l’entreprise sénégalaise, et partant pour la croissance économique de notre pays.
Nous savons que l’ISA pourra toujours compter sur votre soutien pour permettre aux administrateurs de sociétés de travailler en se conformant aux bonnes pratiques qui doivent être les leurs, c’est à dire en mettant en avant et avant tout l’intérêt des entreprises.
Monsieur le Ministre d’Etat, chers collègues administrateurs de sociétés, Il en va de notre crédibilité que les pratiques vertueuses en matière de gouvernement d’entreprise fassent partie des éléments d’attrait de notre économie et de sa capacité à séduire les investisseurs.
L’ISA a l’ambition d’être votre instrument pour y parvenir. Je vous remercie.
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