Magazine francophone de l’intégration
b i m e s t r i e l
PRIX 2 000 FCFA - EUROPE 3.50€
w w w.a fri q ueu ni o n.n et
Moussa mara
PREMIER MINISTRE DU MALI
« 2015 sera l’année de la relance économique pour le Mali » Présidentielle 2016 au bénin
Le Général GBIAN à la conquête du pouvoir ! FIN DE Règne AU BURKINA FASO
UNE VICTOIRE DES Frustrés congo
la Société des Plaques Accessoires et Multiservices (SPAMS)
Entretien avec
ABDOU DIOUF
Secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie
N° 007 nov/déc 2014
SOMMAIRE N° 07 novembre/décembre 2014
DIAMNIADIO : La Francophonie inaugure une ville nouvelle Francophonie économique : une innovation au chevet de la France ? Amérique : au cœur du monde francophone à New-York Humeur francophone
AFRIQUE UNION, Magazine francophone de l’Intégration africaine N° d’enregistrement : 891/MISD/DC/SG/SCCDU 20/09/2006 Edité par CYRBINE COMMUNICATION Directeur de la Publication Léon Anjorin KOBOUDE Directeur de la Rédaction & Rédacteur en Chef Luc Aimé DANSOU Conseiller Editorial Emmanuelle SODJI Secrétaire de Rédaction Assane SAADA Responsables Développement & Communication Maïmouna DEMBELE Steve HONDJO Rédaction Alex SANOU • Bellarminus KAKPOVI • Christian KONE Gnona AFANGBEDJI • James-William GBAGUIDI Carine ALOUGOU • Mikaïla ISSA • Nanny OBAME • Titi PALE Kardiatou TRAORE • Winner ABBECY • Charm ATA Alain TCHEGNON • Yves-Patrick LOKO • Stévyne NZABA Eustache AGBOTON • Hervé P. HESSOU• Hurcyle GNONHOUE Direction Artistique & Maquettage Romain AHOUADI (+229 97 57 44 48) Codjovi TOSSOU (Agence CREATIVE - France) Tél. +(33) 6 25 80 34 73 Responsable Photos Erick-Christian AHOUNOU Régie Publicitaire CYRBINE COMMUNICATION Cotonou Bénin Manager Général : Cyprien KOBOUDE Cotonou : +229 94 26 06 24–95 57 71 71 Assistants manager général Sedjro ZANNOU - Florent ZEHOUZE Représentation à Paris : (0033) 651154655 E-mail : redactions@afriqueunion.net www.afriqueunion.com
07 Editorial CARNET D’INTEGRATION Fin de règne au Burkina Faso : une victoire des frustrés Afrique de l’ouest : Mohamed Ibn Chambas, nouveau représentant du Secrétaire général de l’ONU Economie : Carlos Lopes « optimiste » pour le développement industriel de l’Afrique Communiqué : Election du prochain président de la BAD Port Autonome de Lomé : cap sur la compétitivité Album photos : Lancement d’Afrique Union à Lomé UEMOA : Un paquet de mesures pour la bancarisation Des jeunes africains à l’école de l’Union africain GRAND ANGLE Gestion des conflits frontaliers : les apatrides du Bénin réclament leur nationalité ENTREPRENDRE Interview avec le DG de SPAMS DOSSIER FRANCOPHONIE Portrait du Président Diouf Interview d’Abdou Diouf Succession d’Abdou Diouf au secrétariat de l’OIF : l’Afrique se met en difficulté Réunions scientifiques : Le Sommet de Dakar, un tournant dans la marche de la Francophonie
POLITIQUE L’INVITÉ : Moussa Mara, Premier ministre du Mali « 2015 sera l’année de la relance économique au Mali » Mali : un handicap qui galvanise Présidentielle 2016 au Bénin : Le Général GBIAN à la conquête du pouvoir ! LA SÉLECTION DE LAD (Brèves sur la musique et les arts d’Afrique) MUSIQUE « Here & now », le nouvel Album de Régis Kolé Stanlux (du Togo) a trouvé la bonne voie Phil Azoumé Jay est de retour Web média : www.ruemusiquetv.com, Le pouvoir à la musique urbaine THÉÂTRE Rencontre avec Moudjibath DaoudaKoudjo, Rédactrice en chef des magazines Planète de Bayard Afrique Portrait : Joël LOKOSSOU, atypique comédien MÉDIAS Aissatou KOUROUMA-KOBOR, Directrice de publication de www.femmeaupluriel.com ITINERAIRE Portrait : Nathalie FANFANT, symbole de la diversité Sport et mode : Mamadou Konaté, créateur de la ligne KMAD LITTERATURE Steeve BODJONA, une excellente plume DIASPORA Diaspora : L’OFAD mobilise les femmes entrepreneuses Point de vue, chronique sur l’intégration africaine
Impression IMPRIMERIE LEONCE DEPREZ Paris-France Tirage : 30.000 exemplaires
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EDITORIAL
Léon Anjorin KOBOUDE
L’Afrique, la contagieuse L’actualité politique brûlante sur le continent ravit parfois la vedette, pour quelques jours, à l’épidémie d’Ébola dans le kaléidoscope des informations sur l’Afrique. Pourtant l’urgence reste pesante avec son lot de chiffres inquiétants. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), à la date du 31 octobre 2014, 13 567 cas étaient recensés et 4 951 décès enregistrés, dont plus de la moitié au Liberia. La Guinée, le Liberia et la Sierra Leone sont les trois pays africains où le virus Ébola est meurtrier. Un cas de décès dû au virus a été signalé à la fin du mois d’octobre au Mali. D’autres cas enregistrés aux États-Unis et en Espagne traduisent la propagation géographique de l’épidémie. En Europe comme aux États-Unis, des mesures drastiques ont été prises pour des contrôles spéciaux sur les passagers en provenance des pays africains touchés. Vue la panique provoquée dans l’opinion publique par la présence des premiers cas suspectés en occident, certains auraient souhaité des dispositions plus radicales. L'Australie et le Canada ont cédé à la panique. Ces deux pays ont décidé de ne plus délivrer de visa aux ressortissants des pays les plus affectés par le virus Ébola, ou aux personnes ayant séjourné récemment dans les États africains concernés. Ces décisions n’ont pas soulevé plus d’indignation
sur le continent africain ou dans le rang des associations de défense des droits de l’homme. Qui pour critiquer la décision de ces pays occidentaux quand on sait que cette attitude de panique aux conséquences économiques graves avait emballé certains pays africains. Le Sénégal avait fermé ses frontières avec la Guinée et la Côte d'Ivoire en a fait de même avec la Guinée et le Liberia. Il est heureux de savoir que l’appel de l’Union Africaine à la réouverture des frontières ait eu un écho favorable auprès des États concernés. Maintenant qu’une relative sérénité a regagné les opinions publiques en Afrique sur l’épidémie, il faudrait miser sur la sensibilisation et surtout le renforcement des équipes médicales pour améliorer la prise en charge des malades. La lutte contre Ébola nécessite de gros moyens financiers. Face à l’appel aux dons des agences onusiennes, les pays du nord et du sud devront respecter leurs engagements pour aider les trois pays les plus touchés en Afrique. Il y a une évidence : Ébola fait plus facilement son lit dans les pays les plus pauvres. Pour stopper la propagation mondiale du virus, c’est dans ces pays qu’il faudrait concentrer les énergies. Agir et accélérer les recherches de vaccin et de traitements efficaces contre le virus. Pour atteindre ce noble objectif, seule la solidarité internationale sera efficace. n° 07 AfriQue Union – 5
CARNET D’INTEGRATION
FIN DE REGNE AU BURKINA FASO
Une victoire des frustrés Des tombeurs de Blaise Compaoré se sont embrassés en pleurant. Ils se sentent spoliés, dépouillés de leur victoire et sevrés d’un pouvoir. › Assane SAADA
I
l a voulu poursuivre sa régence de vingt -sept ans, il s’est vu déboulonné. Le mal de Blaise Compaoré appelait un remède que seul un peuple souverain a su lui administrer. Un médicament d’une efficacité totale contre un déni de démocratie, une thérapeutique saluée comme une merveille politique. Quelle patience il a fallu aux Burkinabé pour en finir avec leur président ! Leur courage a suffi à bouleverser Ouagadougou et à faire plier un roc altier, impassible mais pitoyable dans ce dernier tripatouillage constitutionnel qui lui a valu une déculottée. Le burlesque de la situation : des députés se terrent pour sauver leur peau, un capitaine abdique, un lieutenantcolonel rectifie promptement un général et aligne les gradés de l’armée sur son destin autoproclamé de chef d’État. Au voleur, crie une partie des acteurs politiques par qui tout ce charivari est arrivé. Quelle raison finirait par l’emporter ? Le spectacle est tout de même beau qui rappelle un certain 3 janvier 1966. Ce jourlà, Maurice Yaméogo, 1er président de la Haute-Volta (devenue Burkina-Faso), capitulait face au soulèvement populaire des Voltaïques (aujourd’hui burkinabé). Une contestation fédérée par un front intersyndical soutenu par la chefferie traditionnelle marchait sur l’Assemblée nationale. En tête
de ce cortège qui battait le macadam pour réclamer « du pain, de l’eau et de la démocratie », la jeunesse : des collégiennes du cours Normal et des élèves du lycée Philippe Zinda Kaboré. Les forces de l’ordre auraient alors pactisé avec les manifestants qui réclamèrent la démission du président de la République et appelèrent l’armée à prendre le pouvoir. Et le chef d'état-major de l’armée, le lieutenant-colonel Aboubacar Sangoulé Lamizana, d’assumer la charge de chef de l’État à travers une annonce faite à la radio. Quarante-huit ans après, l’histoire bégaie au Burkina-Faso. La lame de fond qui vient d’emporter Blaise Compaoré est la même qui, le 23 juin 2011, avait stoppé le président sénégalais Abdoulaye Wade dans son élan de modifier la constitution pour briguer un 3e mandat. « Faux ! Pas forcé », lisait-on, entre autres, sur les banderoles du Mouvement du 23 juin (M23). Un slogan de la contestation sénégalaise qui n’aurait pas détonné dans le décor ouagualais du 31 octobre 2014. Un cri de ralliement qui, demain, pourrait retentir au Bénin, au Rwanda, au Congo, en RDC (République démocratique du Congo)… Une résistance citoyenne face aux forfaitures de certains dirigeants qui recourent au tripatouillage constitutionnel, en compli-
cité avec des députés acquis à leur félonie, pour s’éterniser au pouvoir. Même si chaque peuple marche selon son histoire, quand la population en a marre, elle martèle bien que ça suffit en prenant le balai pour nettoyer le pouvoir. Et tout le symbolique est là dans le nom des organisations de société civile nées dans le feu de la contestation (Y a en marre -mouvement de contestation sénégalais-, Balai citoyen mouvement de contestation burkinabé -, etc.). La messe est dite pour Blaise Compaoré que certains de ses tombeurs se sont embrassés en pleurant. Ils se sentent spoliés, dépouillés de leur victoire et sevrés d’un pouvoir qu’ils auraient dû exercer ne seraitce que le temps d’une transition. Certainement qu’ils ne s’étaient pas projetés au-delà d’une simple démission du président de la République du Burkina-Faso. Sans doute aussi que c’est là le mal de l’opposition en Afrique. Le régime en place lui impose souvent des combats qui l’accaparent et ne l’épargnent plus un tant soit peu pour se préparer à ramasser le fruit mûr qui tombe quand elle finit de bien secouer l’arbre, voire le pouvoir chancelant. S’opposer serait aussi prévoir, aller à la conquête du pouvoir et être prêt à l’assumer sans tergiversation aucune. n° 07 AfriQue Union – 7
C A RN E T D’ IN TE G R AT ION
AFRIQUE DE L’OUEST MOHAMED IBN CHAMBAS, NOUVEAU REPRESENTANT DU SECRETAIRE GENERAL DE L’ONU Le diplomate ghanéen Mohamed Ibn Chambas a remplacé en octobre l’Algérien Said Djinnit au poste de représentant spécial et Chef du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest (UNOWA) basé à Dakar au Sénégal.
«
› OUMAR NDIAYE
M. Chambas apporte à ce poste une vaste expérience après une carrière longue et riche au sein des institutions gouvernementales et internationales. Il était encore récemment, depuis le 20 décembre 2012, Représentant spécial conjoint Union africaineONU pour le Darfour et Chef de l’Opération hybride Union africaineNations Unies au Darfour (MINUAD) », mentionne le commu-
dernier à Dakar. Pour Said Djinnit, « dans la foulée de la crise libyenne,
le Bureau a souligné les risques d'instabilité de cette région et a été l'initiateur des efforts qui ont débouché sur l'adoption de la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel ». M. Djinnit a quitté ses fonc-
tions avec un sentiment de mission accomplie. Le nouveau représentant Secrétaire général de l’ONU en Afrique de l’Ouest connaît bien la région. Il niqué émanant du bureau du fut Président de la Commission de Secrétaire général de l’ONU, M. la Communauté Economique des Ban Ki-moon annonçant la nominaÉtats de l’Afrique de l’Ouest tion de Mohamed Ibn Chambas. (CEDEAO), de 2006 à 2009, et L’Afrique de l’ouest est l’une des Secrétaire exécutif de la même zones du continent les plus touinstitution, de 2002 à 2005. De chées par plusieurs crises mili2010 à 2012, M. Chambas a été Mohamed Ibn CHAMBAS, représentant du Secrétaire général de l’ONU taires, politiques et même sanitaire Secrétaire général du Groupe des avec la progression de la pandémie du virus Ebola dans États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP). M. trois pays (la Guinée, le Libéria et la Sierra Léone). La si- Chambas, qui est un ancien membre du Parlement du tuation sécuritaire au nord du Mali, le terrorisme et le Ghana, a aussi été ministre adjoint des affaires étranrisque de modifications de constitution opportunes dans gères du Ghana, en 1987, et ministre adjoint de l’éducacertains pays sont autant de menaces sur la paix en tion chargé de l’enseignement supérieur, de 1997 à Afrique de l’Ouest. 2000. Entre 1991 et 1996, il s’impliqua dans les efforts «Nous avons soutenu la CEDEAO dans ses efforts de médiation de la CEDEAO au Libéria. visant à se doter de stratégies et de plans d'action pour Né en 1950, M. Chambas est titulaire d’une licence en faire face à ces menaces. Dès 2009, le Bureau a alerté la sciences politiques de l’Université du Ghana. Il possède communauté internationale sur la vulnérabilité du Sahel et aussi une maîtrise et un doctorat de la Cornell la nécessité d'agir ensemble pour aider les pays de cette University, ainsi qu’un diplôme de droit de l’Université région», a souligné le prédécesseur de Mohamed Ibn Case Western Reserve, deux institutions se trouvant aux Chambas, lors d’une conférence de presse en octobre États-Unis. 8 – AfriQue Union n° 07
CARNET D’INTEGRATION
ECONOMIE
CARLOS LOPES «OPTIMISTE» POUR LE DEVELOPPEMENT INDUSTRIEL DE L’AFRIQUE Ses déclarations et analyses sont critiques mais potentiellement positives pour l’avenir de l’Afrique. Le Secrétaire Exécutif de la Commission Economique pour l’Afrique (CEA) ne manque pas d’arguments pour le futur industriel du continent. › REMY BOUA
Carlos LOPES, Secrétaire Exécutif de la Commission Economique pour l’Afrique (CEA)
D
sa contribution aux efforts de relance économique en Afrique ». Carlos Lopes
développement en Afrique, qui offre des analyses poussées et des idées innovantes fondées sur des statistiques solides et qui contribue à accélérer les efforts de transformation structurelle et d’industrialisation respectueuse de l’environnement. M. Lopes ne ménage aucun effort pour exposer au monde la vision africaine du développement et apporter sa contribution aux négociations internationales qui ont un impact sur le futur de l’Afrique, qu’elles soient liées aux questions de changement, de commerce ou de la position commune africaine sur l’après-2015. » indique un com-
en faire un centre de réflexion de référence sur les questions de politique de
tières premières présentes dans les monde entier mais n’en profite qu’à hauteur de 400 millions de dollars. Cette
epuis son entrée en fonction à la tête de la Commission Economique pour l’Afrique (CEA), le bissau-guinéen Carlos Lopes a redonné du punch à l’Institution et surtout un brin d’affirmation des grandes causes qu’elle défend. Et ce n’est pas par hasard que certains le surnomment un « afrooptimiste ». Il s’est d’ailleurs vu décerner, le 10 Octobre à Lagos, au Nigéria, le prestigieux Prix, Lifetime Africa Achievement Prize (LAAP), par la Millennium Excellence Foundation « pour fait partie de 16 autres illustres nominés pour l’édition 2014 du prix LAAP, parmi lesquels figurent le président du Nigéria, Goodluck Jonathan et l’ancien premier ministre malien, Cheick Modibo Diarra. « Il a repositionné la Commission pour
muniqué de presse récemment rendu public par l’Institution. Pour Carlos Lopes, le continent doit fonder son industrialisation sur les matières premières dont regorge son soussol. « L’Afrique contrôle 80 % des ma-
réalité est révoltante et mérite d’être corrigée », constate le Secrétaire exécutif
de la Commission Économique pour l’Afrique, s’exprimant lors du quatorzième Forum économique sur l’Afrique. Un forum organisé par le Centre de développement de l’OCDE, à Paris le 06 octobre 2014, en partenariat avec la Commission de l’Union Africaine. Plusieurs personnalités africaines, dont la présidente de la Commission de l’Union Africaine et le fondateur-président de la Fondation Mo Ibrahim ont pris part à cette rencontre qui a mis l'accent sur les réalisations et les limites de la transformation actuelle des économies africaines, l'insertion de l'Afrique dans les chaînes de valeur mondiales et régionales, ainsi que sur les nouveaux défis que représentent le développement territorial et les inégalités entre les milieux ruraux et urbains, en Afrique. Le Secrétaire Exécutif de la CEA conseille un « protectionnisme intelligent » aux pays africains qui sont appelés à mettre en place des politiques industrielles reflétant les réalités locales et les potentialités des atouts ou des opportunités des marchés régionaux. D’où l’importance d’utiliser à bon escient les mécanismes qui promeuvent l’intégration commerciale dans les différentes communautés régionales. Afin d’amorcer le développement industriel sur le continent, Carlos Lopes donne la priorité à l’agro-alimentaire, le textile et les énergies renouvelables. « Je suggère aux pays de miser sur ces
sous-secteurs parce qu’il y a, non seulement, une demande importante, mais aussi des matières premières nécessaires au développement de ceux-ci »,
explique le haut fonctionnaire des Nations Unies. Pour rappel, la CEA a publié en 2013 le Rapport économique sur l’Afrique, intitulé « Tirer le plus grand profit des produits de base africains : l’industrialisation au service de la croissance, de l’emploi et de la transformation économique » et qui a exhorté les décideurs à ajouter de la valeur à leurs produits de base. n° 07 AfriQue Union – 9
C A RN E T D’ IN TE G R AT ION
COMMUNIQUE
election du prochain président de la bad La Banque africaine de développement fonctionne sous la direction du Président, qui est, le représentant légal de la Banque, le Président du Conseil d'administration, et le chef du personnel de la Banque. Le Président gère les affaires courantes de la Banque, sous la direction du Conseil d'administration. Le Président est élu par le Conseil des gouverneurs, pour un mandat de 5 ans, renouvelable une fois. Le Président en exercice, Dr. Donald Kaberuka, de nationalité Rwandaise, a été élu en juillet 2005 et a commencé son premier mandat le 1er septembre 2005. A la suite de sa réélection en mai 2010, il a entamé son second et dernier mandat le 1er septembre 2010. Les Règles de procédures régissant l’élection du Président de la Banque (article 1), telles qu’amendées, disposent que l’élection du Président de la Banque a lieu à l’assemblée annuelle la plus proche du terme du mandat du Président sortant. En conséquence, le Conseil des gouverneurs élira le successeur de Dr. Kaberuka, le 28 mai 2015, durant l’Assemblée annuelle de la Banque, qui se tiendra du 25 au 29 mai 2015 à Abidjan (Côte d’Ivoire). Par la résolution B/BG/2014/06, adoptée par le Conseil des gouverneurs le 22 mai 2014, et après les actions de suivi menées par la Direction, telles qu’autorisées par le Conseil des gouverneurs, le calendrier et les procédures relatifs à l’élection à la fonction de Président ont été fixés comme suit : Calendrier 1- 1er juillet 2014 - Appel à candidatures adressé par la Secrétaire générale de la Banque à tous les Gouverneurs des Etats membres régionaux (pays africains). 10 – AfriQue Union n° 07
2- 30 janvier 2015 à 17 heures au plus tard, heure d’Abidjan - Date et heure de clôture de la réception des candidatures. 3- 10-12 février 2015 - Réunion du Comité directeur à Abidjan pour la vérification et la confirmation des candidatures. 4- 20 février 2015 - Arrêt et publication de la liste des candidats dûment enregistrés. 5- 20 février 2015 - Rappel à tous les candidats qu’ils doivent soumettre une déclaration écrite sur leur vision pour la Banque, en français et en anglais, les deux langues de travail de la Banque. 6- 20 mars 2015 à 17 heures au plus tard, heure d’Abidjan - Date et heure de clôture des soumissions par les candidats des déclarations écrites sur leur vision pour la Banque, en français et en anglais, les deux langues de travail de la Banque. 7- 27 mai 2015, au cours de l’Assemblée annuelle du Conseil des gouverneurs - Dialogue entre les membres du Conseil des gouverneurs et chaque candidat. 8- 28 mai 2015, au cours de l’Assemblée annuelle du Conseil des gouverneurs - Election à la fonction de Président de la Banque. Procédure 1- Chaque candidat à la fonction de Président de la Banque doit avoir le profil prescrit à l’article 36 de l’Accord de la Banque, qui prévoit plus particulièrement qu’il doit être ressortissant d’un Etat membre régional et qu’il est une personne de la plus haute compétence dans les domaines qui concernent les activités, la gestion et l’administration de la Banque. 2- Les candidatures pour la fonction de Président de la Banque sont déposées par le Gouverneur du Pays
membre dont le candidat détient la nationalité, auprès de la Secrétaire générale de la Banque, pour transmission au Comité directeur du Conseil des gouverneurs (le « Comité directeur »). La candidature est présentée par lettre du Gouverneur, ou au moyen du formulaire de candidature ci-joint, dûment rempli et adressé à la Secrétaire générale. La candidature est accompagnée d’un curriculum vitae détaillé du candidat. 3- Les candidatures doivent être parrainées par un ou plusieurs Gouverneurs des Pays membres régionaux. Ce parrainage peut se faire par télécopie au par courrier électronique, adressé à la Secrétaire générale de la Banque, et confirmé par une lettre ou par le formulaire de parrainage dûment rempli à l’attention de la Secrétaire générale. 4- Le Comité directeur vérifie la conformité des candidatures avec les critères d’éligibilité énoncés à l’article 36 de l’Accord de la Banque et les conditions de candidature définies dans les Règles régissant les élections. La liste des candidats est ensuite transmise par le Comité directeur aux Gouverneurs, le 20 février 2015. Toute correspondance concernant l’élection doit être envoyée à l’adresse suivante : Vice-présidence Secrétariat général Ban-que africaine de développement 01 BP 1387, ABIDJAN 01 Côte d’Ivoire Numéro télécopie : (225) 20 32 01 70 Courrier électronique : c.akintomide@afdb.org Toute demande d’information concernant le processus électoral peut être également adressée à l’adresse électronique suivante : prelec@afdb.org
CARNET D’INTEGRATION
PORT AUTONOME DE LOME
CAP SUR LA COMPETITIVITE Avec l’inauguration, le 14 octobre 2014, du troisième quai et des portiques de quai du terminal à conteneurs du Port Autonome de Lomé, le Togo est en passe de devenir l’une des plateformes portuaires les plus compétitives de l’Afrique de l’Ouest. › REMY BOUA
Le président togolais au milieu de ses homologues béninois et nigérien
A
u Togo, c’était un événement et le président togolais, Faure Essozimna Gnassingbé y a convié ses homologues du Bénin et du Niger, Thomas Boni Yayi, et Mahamadou Issoufou. L’inauguration du troisième quai et les portiques de quai du terminal à conteneurs du Port Autonome de Lomé (PAL) méritait bien la célébration parce qu’elle marque une étape importante dans la mise en œuvre du plan de développement d'infrastructures lancé en 2011 par les autorités portuaires pour redonner un puissant souffle à ce poumon de l’économie togolaise. Cette nouvelle infrastructure est l’œuvre de Togo Terminal, filiale de Bolloré Africa Logistics (BAL). Le Président du groupe Bolloré, Vincent Bolloré, qui a fait le déplacement de Lomé, s’est dit fier de participer à la concrétisation des ambitions du PAL. Togo Terminal est aujourd’hui en mesure de recevoir des navires de grande capacité, notamment ceux en provenance d’Asie. Cette productivité et cette compétitivité accrues font du Port Autonome de Lomé l’un des plus performants d’Afrique de l’Ouest.
Les travaux de Togo Terminal, débutés en mars 2011, ont abouti à la construction d’un troisième quai de 450 m de long à -15 m, portant à 920 m la longueur totale des quais. Le terminal à conteneurs, entièrement informatisé,
est désormais équipé de deux portiques de quais de dernière génération. La livraison de trois autres portiques est déjà prévue. Ces équipements s’ajoutent aux six grues mobiles qui permettent d’opérer simultanément quatre navires. Togo Terminal va accroître aussi ses capacités de stockage avec la mise à disposition, dans les semaines à venir, de 38 hectares de terre-pleins. Cette aire sera dotée de portiques de parc (RTG) de dernière génération. Objectif à terme : traiter jusqu’à 1,2 million de conteneurs par an. Pour la réalisation de ces projets, Togo Terminal a mis en place une politique de transfert de compétences et de formations pour ses collaborateurs. Un demi-millier d’emplois ont été créés depuis le début des travaux. Au total, le groupe Bolloré investira plus de 450 millions d’euros sur le terminal à conteneurs du port de Lomé durant toute la durée de la concession. Dans la sous-région, le Port Autonome de Lomé se positionne désormais comme un partenaire privilégié pour les pays dépourvus de façade maritime. Ses concurrents du Bénin, de Côte d’Ivoire, ou encore du Ghana doivent maintenant réaliser que le PAL est résolument tourné vers de grandes ambitions. Avec l’aide de partenaires de premier choix.
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C A RN E T D’ IN TE G R AT ION
ALBUM PHOTO
LANCEMENT D'AFRIQUE UNION A LOME Dans le cadre de son initiative lancement-pays à travers l'Afrique et l'Europe, l'équipe du Magazine AFRIQUE UNION a déposé ses valises dans la capitale togolaise le 12 septembre 2014. Responsables d'institutions, journalistes, opérateurs économiques et passionnés de médias ont été les témoins privilégiés du lancement d'AFRIQUE UNION dans le somptueux cadre de l'hôtel le Merlot à Lomé. Retour sur l’événement. En images.
Le Manager général d'Afrique Union avec Mme Peggy Uffang-Dey de l'Unité Communication et Marketing de la Banque d'Investissement et de Développement de la CEDEAO
Le Manager d’Afrique Union avec Madame Arzouma Kpakpabia Pomong, députée à l'Assemblée Nationale Togolaise
Monsieur Romain Ahouadi, Directeur artistique d'Afrique Union
12 – AfriQue Union n° 07
La journaliste Emmanuelle Sodji, Conseiller éditorial d'Afrique Union, entourée de Luc Aimé Dansou et Cyprien Koboudé, respectivement Directeur de la Rédaction et Manager général du Magazine
Le Manager général d'Afrique Union avec SABI Kasséré Pierre, Président du comité presse écrite à la HACC TOGO
De gauche à droite, Irving Aniambosou, DG de FINAERO, Cyprien Koboudé Manager Général de Cyrbine Communication, agence éditrice d’Afrique Union, Luc Aimé DANSOU Directeur de la Rédaction d’Afrique Union
CARNET D’INTEGRATION
la journaliste Esther Sedjro de la TVT en compagnie de Cyprien Koboudé
Monsieur Hervé Ahounou de la société des plaques au Togo
Monsieur Benjamin de Togo Télécom
Le Manager d'Afrique Union et Gabriel Adomou, président de l'association des radios communautaires du Togo
Le Manager d'Afrique Union en compagnie de Rodrigue Hodé, Directeur Associé de Public Jeune
Un parterre de journalistes togolais
RETROUVEZ
SUR /afriqueunion
@afriqueunion
Www.afriqueunion.net n° 07 AfriQue Union – 13
CARNET D’INTEGRATION
UEMOA UN PAQUET DE MESURES POUR LA BANCARISATION Depuis le 1er octobre de cette année, est entrée en vigueur une série de mesures édictées par la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Un paquet de mesures rendant gratuites pour la clientèle plusieurs opérations bancaires. › ALEX SANOU
« Je préfère, malgré tout, les établis-
sements de microcrédits où les procédures ouvertures de compte et de prêts sont moins compliquées », affirme Amy Ndiaye, une dame rencontrée à l’entrée d’une institution de microcrédit. « Les institutions de mi-
crofinance sont moins protocolaires et
La BCEAO veut encourager la bancarisation
moins rigides dans leurs procédures », renchérit Serges, un expatrié vivant à Dakar. Et ce dernier d’ajouter : « J’ai
fait un prêt dans une banque de la place, et souvent quand je reçois un message de cette banque sur mon portable mon cœur saute plusieurs fois avant de le lire car ce sont souvent des nouvelles du genre ‘tel montant représentant telle prestation vient d’être retiré sur votre compte X». « Je reçois souvent des relevés de mon institution bancaire que j’ai du mal à déchiffrer, et à comprendre », commente aussi Issa Gueye, un quinquagénaire. Les plaintes et lamentations des clients vis-à-vis des banques en Afrique notamment en ce qui concerne les coûts des prestations sont nombreuses et variées.
Le siège de la BCEAO à Dakar 14 – AfriQue Union n° 07
LA BANQUE CENTRALE REND DE NOMBREUX FRAIS GRATUITS Bonne nouvelle pour les usagers des banques de l’espace de l’Union économique et monétaire ouest-africaine. Depuis le 1er octobre de cette année, la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) a publié la liste de plusieurs opérations
bancaires qui seront désormais gratuites. Pour l’institution bancaire régionale, cette mesure vise à renforcer l’inclusion financière des populations, l’accélération de la bancarisation et le financement bancaire des Etats membres de l’UEMOA (...) afin de « parvenir à une réduction et à une
rationalisation graduelle des conditions de banque appliquées à la clientèle », indique le communiqué signé
du Gouverneur de la BCEAO, Tiémoko Meyliet Koné. Sont concernées par cette nouvelle décision, les opérations d’ouverture, fonctionnement et suivi de compte d’une part, les moyens et opérations de paiement et la banque à distance. Selon la Banque centrale, « une se-
conde phase concernera les services à facturer modérément, et qui feront l’objet d’une communication en temps opportun ».
« UNE MIN-REVOLUTION DANS LE SYSTÈME BANCAIRE DE L’UEMOA » L’analyste économique Abubakar Jallo a qualifié la publication de ces mesures, de « révolution dans le système financier de l’UEMOA » qui est un regroupement de huit pays : Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, GuinéeBissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo. Selon lui, la gratuité désormais acquise de plusieurs services « va boos-
CARNET D’INTEGRATION
ter le taux de bancarisation jusqu’à présent trop faible dans la zone l’UEMOA évalué à moins de 10%. » « Il reste néanmoins les facilités de prêts et les rémunérations de prêts, encore trop coûteuses, soit de 8 à 14% selon les institutions, contre 1 ou 2% en Europe », explique-t-il. Dans de nombreux pays anglophones d’Afrique, ces services sont gratuits depuis plus d’une dizaine d’années or « l’usage d’une monnaie commune par
les quelque 100 millions de citoyens de l’UEMOA devrait normalement être un bon outil d’intégration économique plus avancée », soutient encore Bubakar Jallo. « Après que ces frais sont rendus gra-
tuits, il faut que les banques revoient à la baisse leurs taux d’intérêt », re-
commande Elise Sarr, une employée de bureau. « On ne va quand même
pas continuer à enrichir les banques, et mourir pauvres », ajoute-t-elle.
Les taux d’intérêt ne suivent pas la baisse des taux directeurs. Dans la zone Uemoa, les usagers des banques et autres services financiers ont toujours dénoncé le coût élevé des services, particulièrement les taux d’intérêt que leur appliquent les établissements financiers. Le 28 juin 2013, le Conseil des ministres de l’Uemoa a adopté « la loi uniforme portant définition et répression de l’usure » ainsi que «la loi uniforme relative au taux d’intérêt légal » devant entrer en vigueur à compter de janvier 2014. A cette occasion, le Conseil a décidé de faire passer le taux de l’usure applicable aux établissements de crédit de 18% à 15% et celui applicable aux systèmes financiers décentralisés de 27% à 24%. La note de conjoncture économique de mars 2013 de la Direction de la prévision et des statistiques économiques (Dpee) du Ministère de l’économie et des finances (Mef) du Sénégal indique : « Entre octobre 2012 et mars
2013, les taux directeurs ont connu deux baisses de 0,25 points chacune alors que les taux des crédits au secteur productif ont crû de 0,59% ; ceux aux particuliers de 0,35% et ceux aux entreprises individuelles de 1,17 », soit plus de quatre fois la baisse décidée.
LISTE DES SERVICES BANCAIRESA OFFRIR A TITRE PAR LES ETABLISSEMENTS DE CREDIT DE L’UEMOA Ouverture, fonctionnement et suivi de compte - Ouverture de compte ; - Délivrance de livret d’épargne ; - Tenue de compte sur livret d’épargne ; - Transmission de relevé de compte (une fois par mois) ; - Relevé récapitulatif des frais annuels ; - Dépôt d’espèces dans la banque du client quel que soit le guichet (hors acquittement de frais de timbre fiscal) ; - Retrait d’espèces dans la banque du client quel que soit le guichet, à l’exception des opérations par chèques de guichet ; - Domiciliation de salaire ; - Changement d’éléments constitutifs du dossier du client, notamment d’identification ; - Mise en place d’une autorisation de prélèvement (ordre de prélèvement à partir du compte) ou de virement permanent (création du dossier) ;
Il y a deux ans, soit en novembre 2012, le Président Macky Sall du Sénégal, lors de la célébration du cinquantenaire de la BCEAO, a dénoncé « les taux prohibitifs et anormalement élevés en Afrique ». « Seule une mobilisation des usagers
autour d’associations fortes d’usagers
- Clôture de compte. 2- Moyens et opérations de paiement - Retrait auprès d’un guichet automatique (GAB/DAB) de la banque du client ; - Paiement par carte bancaire au sein de l’UMOA ; - Consultation de solde et édition du relevé de solde au GAB/DAB dans la banque du client ; - Virement de compte à compte dans la même banque ; - Encaissement de chèques tirés sur une banque de l’Union ; - Encaissement de virements nationaux, communautaires et internationaux.
3- Banque à distance - Avis de débit et de crédit par voie électronique ; - Consultation et édition du solde et de l’historique du compte à travers le GAB/DAB de la banque du client.
de banques et de services financiers pourra défendre les intérêts des usagers qui aujourd’hui sont laissés à eux -mêmes », affirme dans une contribution, Cheickh Mbacke DIOKHANE, le Secrétaire exécutif de l’Association sénégalaise des usagers de banque et de services financiers. n° 07 AfriQue Union – 15
CARNET D’INTEGRATION
PARTICIPATION
De jeunes africains à l’école de l’Union Africaine C’est un projet initié par un jeune étudiant tunisien, Hamza Ghedamsi, secondé par un autre étudiant ivoirien non voyant, Blamassi Touré. Le projet, qui a démarré en Tunisie, plonge les jeunes dans la vie de l’Union Africaine, à travers une parfaite simulation. › Charm ATA
L
e projet s’appelle « Modèle Union Africaine (MUA) ». Il est apolitique et veut être un creuset d’engagement panafricaniste pour les jeunes du continent. La première démonstration du projet a eu lieu en mai 2014 en Tunisie avec 211 jeunes étudiants de 23 nationalités africaines résidant dans le pays. Ce projet a, en partie, été initié pour montrer à la jeune génération l’importance de cette grande institution et pour lui faire connaître son fonctionnement. Le directeur du projet, Hamza Ghedamsi insiste sur le fait que « les jeunes devaient s’investir
davantage au niveau du continent africain, intégrer le monde politique et diplomatique, et acquérir davantage d’expériences. » Cette simulation leur a permis « non seulement de se mettre à la place des décideurs des différents Etats africains, de se pencher comme des grands responsables sur les problèmes politiques, sociaux, culturels et économiques de notre continent, mais aussi de se connaître davantage les
L'Ivoirien Blamassi Touré, au micro et le Tunisien Hamza Ghedamsie, initiateurs du projet MUA 16 – AfriQue Union n° 07
Les jeunes ont activement participé à la première séance du MUA
uns les autres en faisant tomber cette frontière virtuelle de la méconnaissance, des idées reçues et des aprioris. » Pour bien simuler l’UA, le projet s’illustre à travers six commissions, dont la Conférence panafricaine, celle des présidents africains et dont le thème a été le fameux Agenda 2063, qui, rappelons-le, « vise à
encourager la discussion entre toutes les parties prenantes (…) pour une stratégie globale pour optimiser l'utilisation des ressources de l'Afrique au profit de tous les Africains ». Les autres «commissions» représentent le Conseil de paix et de sécurité extraordinaire, le Conseil de Paix et de Sécurité Ordinaire, le Conseil Exécutif Extraordinaire, le Conseil exécutif ordinaire, et le Conseil de la Jeunesse et de la Culture. La première séance de Tunis a été honorée par la présence d’un groupe de représentants de l’Union Africaine, dont Habiba El Mejri Scheikh, Directrice de l'information et de la communication de l'UA, de Mokhtar Chamakh, conseiller économique auprès du président de la République tunisienne, de Taoufik Jelassi, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et des TIC, qui a exprimé « sa
joie et sa satisfaction de voir une "jeunesse aussi active », soulignant que l’Union Africaine devrait apprendre des « expériences
passées dans les secteurs clés notamment ceux de la Sécurité, des Droits de l’Homme, du Développement, de la Jeunesse et des Sciences », de Hakim Ben Hammouda, ministre de l'Economie et des Finances, Hakim Ben Hammouda, de représentants du ministère des Affaires étrangères, de Pauline Hien Winkoun, ambassadeur du Burkina Faso en Tunisie, d’un représentant de la Banque Africaine de Développement, d’un représentant de l’Association pour le développement de l'éducation en Afrique (ADEA), de deux représentants de l’ambassade des Etats-Unis, de Jean-Luc Tholozan, attaché de Coopération universitaire à l’Institut Français de Tunisie, et d’Elisabeth Braune, représentante résidente de la Fondation Friedrich Ebert Tunisie. Cette fondation a soutenu financièrement l’activité de jeunes décidés à s’informer et se former sur les enjeux de l’intégration en Afrique. Hamza Ghedamsi a déclaré que, durant la première séance de ce projet Modèle de l’Union Africaine, les jeunes ont bien négocié et ont présenté des résolutions qui peuvent être concrétisées, insistant sur le fait que l’Union Africaine a le devoir d’impliquer d’avantage et concrètement la jeunesse africaine dans ses travaux de réflexion, et de la consulter assez souvent.
GESTION DES CONFLITS FRONTALIERS
dES APATRIDES aU BENIN RECLAMENT LEUR NATIONALITE Djoffo Manou, chef d’un des campements les plus peuplés de l’île aux Oiseaux
Une décision la Cour internationale de justice (CIJ) rendue en juillet 2005 a placé plus de 1000 Béninois dans une situation d’apatrides. Pourtant, la législation du pays et les conventions internationales auxquelles le Bénin est partie ont prévu des dispositions simples à appliquer pour mettre fin à cette aberration. › ELIAS BEHANZIN
«
Est-ce parce que nous sommes des peulhs nomades que nous n’avons pas le droit d’être des Béninois ? Les autorités béninoises refuseraient-elles de reconnaître notre nationalité à cause de notre nomadisme », se demande Djoffo Manou, chef d’un des campements les plus peuplés de l’île aux Oiseaux. Comme lui, Aladji Ali et 18 – AfriQue Union n° 07
Massamari Amadou, chefs de deux autres campements, s’interrogent. Leur supplique est celle d’un millier de peulhs vivant sur l’île aux Oiseaux. Un havre de 13 km² situé dans la commune de Karimama à quelque 800 km de Cotonou au nord-est du Bénin et au sud-ouest du Niger. Une île dite aux Oiseaux du fait de la présence de plusieurs espèces ornithologiques en période hivernale. Elle est appelée Kokoro Goungou en langue locale, c’est-à-dire « île du Génie ». La localité a été rattachée à la république du Bénin par un arrêt de la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye en date du 12 juillet 2005. Une décision en règlement d’un contentieux frontalier de plusieurs décennies entre le Niger et le Bénin relatif aux îles Lété (rattachée au Niger) et aux Oiseaux. Depuis, des milliers de personnes se sont retrouvées en territoire béninois sans nationalité. Dans leurs campements, hommes, femmes, enfants, jeunes et vieux cohabitent dans des huttes précaires et dans une promiscuité sans pareille. En bons peulhs, leur seule richesse demeure leur bétail. Une fortune
qui n’apaise pas les cœurs. Ces populations nomades peinent à améliorer leurs conditions de vie. Oubliés par l’État central du fait de leur situation d’apatrides, les peulhs de l’île aux Oiseaux subissent toutes sortes de brimades en transhumant d’un pays à un autre pour faire paître leurs bêtes dans des zones verdoyantes du Bénin, du Togo, du Niger, du Nigeria et même parfois du Burkina Faso. Ils sont soumis au bon vouloir des autorités frontalières malgré le fait qu’ils parlent les langues locales. Pire est le sort de leurs enfants. Non déclarés à l’état civil, ils n’ont pas accès à l’éducation et mènent une vie d’errance. Les parents les amènent avec eux parcourir de longues distances à la recherche de pâturages. Sur l’île aux oiseaux, tout semble absurde. Les peulhs ne sont pas chez eux. Ils sont autorisés à s’y installer sept mois par an et jouissent d’un droit d’usage précaire. En effet, l’île dépend de la commune de Karimama qui a décidé d’en faire un site touristique. En attendant, l’île manque de tout. Pas même un poste de santé. Les femmes accouchent encore à domicile. Les popula-
GRAND ANGLE
Le quotidien sur l'île aux Oiseaux est précaire tions paient la conséquence d’une gestion hasardeuse de situations politicoadministratives. Pourtant, le Bénin et le Niger ont accepté la décision rendue par la CIJ conformément à leurs engagements. Cependant, ces deux pays n’ont pris aucune mesure afin de traiter le sort des habitants des territoires ainsi transférés. Ils se sont contentés de délimiter la frontière sur ce secteur du fleuve Niger dans un délai de dix -huit mois à compter de la publication de la décision.
les traités ou accords internationaux dûment ratifiés (…) s'appliquent même si elles sont contraires aux dispositions de la législation interne (…) ». Il poursuit en expliquant que, dans son article 10, alinéa 2, la Convention de 1961 dispose que « l’État
contractant auquel un territoire est cédé ou qui acquiert autrement un territoire ac-
corde sa nationalité aux individus qui, sans cela, deviendraient apatrides du fait de la cession ou de l’acquisition ». Sur la base de cette disposition, conclut Alioune Seck, le Bénin devrait prendre les mesures idoines afin de régler la question de la nationalité des populations vivant sur l’île aux Oiseaux.
« Le droit international et le droit interne béninois ont prévu des voies de recours juridiques afin de régler cette question », déclare Alioune Seck de l’unité Apatridie de la Représentation régionale du HCR pour l’Afrique de l’Ouest basée à Dakar. « Depuis
décembre 2011, le Bénin est membre de la communauté des États partie à la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie. Le Bénin s’est donc engagé à appliquer, dans son ordre juridique interne, les dispositions de cette convention », ajoute -il. Pour Alioune Seck, l’article 2 de la loi n° 65‐17 du 23/06/65 portant Code de la nationalité dahoméenne applicable aujourd’hui au Bénin pose que « les dispositions
relatives à la nationalité contenues dans
La situation géographique de l’Île aux Oiseaux n° 07 AfriQue Union – 19
GRAND ANGLE
tières. Ce n’est pas ma petite personne du maire de Karimama, mais c’est une réalité des populations de toutes nos frontières. Elles ne sont ni d’ici ni de là -bas. Elles sont dans l’entre deux tout comme nos frères immigrés en France.
« LA SITUATION DES APATRIDES FAIT DE LA PEINE » Médecin de formation et ethnopsychiatre consultant pour les hôpitaux de Paris, l’actuel maire de la Commune de Karimama, Moussa Bello Maman, ancien apatride chez lui au Bénin explique. › PROPOS
RECUEILLIS
PAR
E. BEHANZIN
Qu’est-ce que ça vous fait de savoir que des milliers de personnes vivant sur le territoire de votre commune sont des apatrides ? Ça me fait de la peine de rencontrer des personnes qui ne sont de nulle part. Parce que dans le monde d’aujourd’hui, quand on n’a pas un papier d’identité on est comme un animal qui bat la campagne. Ça me fait de la peine parce que moi aussi j’ai vécu la situation. Oui, j’ai été apatride. Je suis venu au monde dans l’île aux Oiseaux. Et dans l’île aux Oiseaux, à l’époque, on était ni du Bénin ni du Niger. On était des apatrides nous aussi. Quand je suis au Bénin on me traite de Nigérien et quand je suis au Niger, on me dit que je suis Béninois. Et du coup je ne savais pas qui j’étais vraiment. Il a fallu attendre l’année 2005 au cours de laquelle, la Cour internationale de justice a dit que l’île aux Oiseaux est une propriété béninoise. Là j’ai dit :
« Ah enfin, désormais donc, je suis quelqu’un. »
Qu’est-ce que cette décision de la Cour internationale de Justice a changé 20 – AfriQue Union n° 07
pour vous et pour votre famille ? Auriez-vous pu être maire de Karimama sans cette décision qui confirme votre citoyenneté béninoise ? Cela me fait plaisir de savoir qui je suis. Quand on est dans une problématique de double identité ou de sans identité réelle, ça pèse. Cela pèse sur la psychologie de la personne ; ça pèse du fait des regards des autres. Mais cela est aussi un poids moral et social important dans la mesure où j’étais quotidiennement torturé par la question du « que dire à mes enfants ? Ils sont d’où, de quel pays ? » Mes enfants sont qui ? Quoi ? Voici autant de questions qu’on se pose quand on est apatride. Quant à mon élection au poste de maire (hésitation) ! C’est possible que je sois maire de Karimama en essayant de choisir d’être Béninois. Là n’est pas le problème. Cela ne suffit pas. Il faut que cela soit officiel, reconnu par tous. C’est important que je sache qu’il y a quelque chose qui fait légalement de moi un Béninois au vu et au su de tous. Et vu ainsi, cette problématique devient la réalité de toutes les fron-
Vous-même et votre administration les évaluez à combien ? Avez-vous connaissance de pistes ou procédures par lesquelles ces gens peuvent devenir Béninois ? Quand on prend le petit hameau Sabongari que nous avons créé et pour le nombre de personnes réellement recensées, on a pu compter 59 ménages d’au moins 7 membres chacun soit un total d’au moins 413 personnes. Je précise que ce sont les personnes réellement recensées. Parce qu’il y a d’autres qui ne figurent pas dans nos statistiques, qui ont rejoint le premier groupe par vagues successives. Ils sont encore plus nombreux que les autres. Donc si on reprend le décompte aujourd’hui, ils doivent être plus de 800 personnes apatrides. Quant aux peulhs nomades transhumants vivant sur l’île aux Oiseaux et cherchant à devenir Béninois, ils sont autour de 900 à 1 000 personnes. Je ne peux pas vous en dire plus parce que les peulhs sont des peulhs et des nomades c'est-à-dire que vous pouvez les évaluer à 1 000 aujourd’hui et demain quand vous revenez ils ne seront plus que 700 ou 800 personnes. Pour ce qui est de leur désir de devenir des Béninois, je pense qu’avec la politique du gouvernement, il existe des dispositions qui disent que quand on fait un certain nombre d’années au Bénin on peut demander à devenir Béninois. Je pense donc que ces gens peuvent devenir Béninois. Ils ont prouvé qu’ils peuvent devenir Béninois. Il y a longtemps qu’ils font ce va-et-vient annuel. Je pense qu’il faut nous aider à leur donner des papiers d’identité. C’est tout à fait logique. Il y a des enfants qui sont nés sur cette île et qui n’ont pas été enregistrés à l’état civil et qui de ce fait, ne sont ni béninois, ni nigériens, ni nigérians. C’est un devoir national, un devoir de nous tous qui s’inscrit, je crois, dans les politiques de citoyenneté prônées par le docteur Thomas Boni Yayi. Ils en ont le droit.
ENTREPRENDRE
ENTR ETI E N AV EC
Richard OKISSI LA
P RÉSIDENT D IRECTEUR G ÉNÉRAL DE S OCIÉTÉ DES P LAQUES A CCESSOIRES ET M ULTI -S ERVICES (SPAMS)
Les performances de l'entreprise du PDG OKISSI sont saluées par les plus hautes autorités congolaises.
« NOUS PARTICIPONS A L’AMELIORATION DE LA GESTION DES VEHICULES IMPORTES AU CONGO » En moins de trois années, la Société des Plaques Accessoires et Multi-Services (SPAMS) a démontré le sérieux de son expertise dans la filière d’importation de véhicules d’occasion au Congo à travers un système d’immatriculation provisoire efficace. Dans cet entretien, le Président Directeur général de la SPAMS, Richard OKISSI, revient sur les opérations de son entreprise et ses perspectives. › PROPOS
RECUEILLIS
PAR
CYPRIEN KOBOUDE
D
epuis décembre 2011, la Société des Plaques Accessoires et Multi-Services (SPAMS) est chargée de l’activité de gravure des plaques d’immatriculation en série provisoire «ZZ» des véhicules automobiles importés et débarqués au Port Autonome de Pointe-Noire (PAPN). Comment votre entreprise contribue-t-elle à l’amélioration de la gestion de la filière d’importation de véhicules d’occasion au Congo ? Notre activité répond clairement à une réforme portant sur la réglementation de l’immatriculation des véhicules automobiles, permettant désormais, de procéder à l’identification et à l’encodage au débarquement, des navires au Port autonome de Pointe-Noire, de tout véhicule importé par l’attribution d’une immatriculation provisoire en série «ZZ» pour leur mise en circulation, après toutes les formalités d’enlèvement portuaire et douanier. Cette disposition a comblé un vide qui 22 – AfriQue Union n° 07
faisait défaut à la sécurité routière et répond aux exigences d’Interpol et du code international pour la sécurité des navires et des installations portuaires (code ISPS), dans la mesure où elle permet de débusquer le réseau des véhicules volés en bande organisée et exportés vers l’Afrique à cause de la perméabilité des frontières. Ce dispositif a contribué à donner au Gouvernement les outils nécessaires pour lutter efficacement contre la criminalité liée aux véhicules volés. De ce fait, nous participons à l’émergence de la transparence dans la chaîne d’importation de véhicules. Nous sommes un partenaire privilégié du Port Autonome de Pointe-Noire dans sa détermination d’améliorer ses performances et sa réputation au niveau national et régional. Nous travaillons également en étroite collaboration avec la Police Nationale, la Douane, la Direction Générale des Transports Terrestres et le BCN Interpol pour les recherches consistant à répertorier les véhicules
importés volés. De manière concrète, comment se déroule votre activité ? La SPAMS garantit l’identification, le repérage et la traçabilité de tout véhicule qui débarque au Port Autonome de Pointe-Noire. 72 heures avant que le navire n’accoste, la SPAMS est à mesure de faire son constat d’usage: -La première phase d’identification s’effectue à la rampe/quai, dès l’arrivée du navire ; -La deuxième phase d’identification a lieu à l’entrée des parcs de stockage des véhicules débarqués du navire. Elle s’effectue de manière concomitante avec la première. En addition des informations relatives aux caractéristiques des véhicules, les opérations d’identification consistent également à relever le numéro de voyage et le nom du navire transportant les véhicules, la période et le
ENTREPRENDRE nombre de véhicules débarqués au Port de Pointe-Noire. Les statistiques résultant des opérations d’identification sont également transmises aux services de sureté portuaires par la SPAMS pour tout usage éventuel. L’instauration de l’immatriculation «ZZ» est venue mettre un terme à l’usage des véhicules circulant sans immatriculation ou avec des immatriculations étrangères. Quel est le motif de votre inspiration ? Nous avons dit tantôt qu’il y avait un vide juridique au niveau de la sécurité routière s’agissant des immatriculations et que plusieurs véhicules récemment importés circulaient sans immatriculation ou avec des immatriculations étrangères. Nous avons été également inspirés par des résultats satisfaisants donnés par l’expérience de certains pays africains qui nous ont précédés dans cette réforme. Il s’agit notamment du Bénin, du Togo, de la Côte d’Ivoire et du Cameroun. A ce jour, combien de véhicules ont été immatriculés par la SPAMS ? Sur 92 138 véhicules identifiés par la SPAMS entre janvier 2012 et septembre 2014, 900 véhicules se sont avérés enregistrés dans la base de données des véhicules volés d’Interpol. De plus, il convient de porter à votre connaissance que l’efficacité de notre système a permis de mettre en évidence un nouveau phénomène dit « doublon ». Il s’agit de deux véhicules de même type, même marque, portant le numéro de châssis identique. Le mois dernier (octobre 2014), le Bureau Régional Interpol pour l’Afrique Centrale a organisé une session de formation à l’intention de vos équipes. En quoi cette formation pourra améliorer vos prestations ? Cette formation a permis de renforcer les capacités de nos services en matière de recherches de véhicules volés de surcroit notre partenariat avec Interpol notamment autour du système de communication I-24/7 qui est la base de données de recherches d'Interpol sur tous les sujets (véhicules, homme, papiers administratifs etc.). Il demeure entendu qu’avant d’immatriculer un véhicule importé, nos services doivent s’assurer que ce véhicule n’est pas re-
cherché par Interpol. La 14ème réunion du Comité des Chef de Police d’Afrique Centrale (CCPAC), qui a eu lieu l’année dernière à Kinshasa, avait justement encouragé l’extension du système I-24/7. C’est pourquoi je suis heureux de vous annoncer que nous avons bien mis en œuvre cette recommandation qui a permis de rapprocher le système I-24/7 de nos services afin de diligenter les consultations. C’est une bonne nouvelle et nous ne pouvons que remercier les hautes autorités congolaises pour leur soutien multiforme qui contribue à l’amélioration de nos prestations. Comment les autorités apprécient-elles le travail de votre société ? En effet, grâce aux avancées significatives obtenues par le partenariat SPAMS-BCN Interpol Brazzaville, le Congo a été congratulé par Monsieur Ronald K. NOBLE, Secrétaire Général de l’Organisation Internationale de la Police Criminelle (O.I.P.C – Interpol) de passage à Brazzaville le 9 février 2013, lorsqu’il a félicité le Congo pour son engagement aux côtés d’Interpol dans la lutte contre la criminalité transfrontalière et reconnu que l’une des avancées dans ce domaine est le partenariat que le BCN Interpol Brazzaville a instauré avec la SPAMS pour lutter efficacement contre la criminalité liée aux véhicules volés. Le Congo est sur les 8 pays de l’Afrique Centrale, le premier utilisateur de la base de données répertoriant les véhicules déclarés volés. Le Ministre de l’Intérieur, de la décentralisation de la République du Congo et le Général Jean François NDENGUE, Directeur Général de la Police, dans leurs communications aux 14ème et 15ème session ordinaire du Comité des Chefs de Police d’Afrique Centrale, tenue respectivement à Kinshasa du 07 au 11 octobre 2013 et à Pointe-Noire du 13 au 17 octobre 2014, ont chacun en ce qui le concerne apprécié avec satisfaction le travail réalisé par le partenariat SPAMS – Interpol dans la recherche des véhicules volés et la constitution d’une banque de données au service de la Police.
sollicitation par les autres pays de l'Afrique Centrale et nous avions déjà à cet effet effectué des voyages d’études à Libreville et à Kinshasa sur invitation des autorités en charge de la sécurité et les démarches se poursuivent. Quelles sont les perspectives ? Fort de l’expérience accumulée dans le domaine d’identification des véhicules importés, nous avons proposé au Gouvernement un projet de mise en place d’un Fichier National des Immatriculations des véhicules (FNI) et d’un parc tampon. Le FNI sera une base de données centrale et unique de tous les véhicules circulant sur le territoire national et un outil technologique au service du Ministère de l’Intérieur et celui en charge des transports routiers, capable de fournir en temps réel et à tout moment des informations sur les véhicules ainsi que celles de leurs propriétaires. Le parc tampon quant à lui sera destiné à recevoir tous les véhicules importés de manière générale et regrouper tous les services privés et publics intervenant dans la chaîne d’importation des véhicules. Ainsi, notre société pourra consacrer un investissement poussé afin d’envisager de nombreux résultats notamment, l’amélioration et la sécurisation des recettes de l’Etat par une collecte intégrale et la perception effective des taxes douanières, la réduction substantielle du temps d’accomplissement des formalités, la localisation des véhicules en un seul lieu et l’éradication du phénomène de vol des accessoires automobiles et tout autre éventuel colis pouvant s’y trouvé. Le parc ainsi envisagé, pourra en outre faciliter l’élucidation des enquêtes par les services compétents en raison de ce que celui-ci aura permis l’installation provisoire des véhicules présumés volés. Quel est votre mot de la fin ?
L’expertise de la SPAMS étant reconnue et saluée, avez-vous l’ambition d’étendre vos activités dans d’autres ports de l’Afrique Centrale? Effectivement, nous faisons l'objet de
compétentes. n° 07 AfriQue Union – 23
DOSSIER FRANCOPHONIE
Crédit photos : OIF n° 07 AfriQue Union – 25
DOSSIER FRANCOPHONIE
XVe SOMMET DE LA FRANCOPHONIE
Une révérence avec des mots de Diouf Après trois mandats successifs, Abdou Diouf, secrétaire général sortant de l’Organisation internationale de la Francophonie souhaite ne plus « assurer de fonction publique ». › Assane SAADA
logue fécond entre les cultures. En cela, notre Francophonie, tournée résolument vers l’avenir, est un humanisme, comme Senghor aimait à la qualifier – Senghor, le visionnaire, un des pères fondateurs de la Francophonie dont il disait : « la Francophonie
C’est un autre clap de fin qui se re-
son discours d’hommage du 26 juin
joue à Dakar quatorze ans après une
2014, « il n’y a pas d’avenir possible
défaite honorable, symbole d’une al-
gouvernement, il pourrait ainsi faire
sans passé assumé ». Pour le secrétaire sortant de l’OIF, « se rappeler ce que l’on doit à chacun et rendre à chacun l’hommage qu’il mérite, c’est en dernier ressort faire sienne l’idée que l’accomplissement d’un grand dessein est toujours une œuvre collective ». Et Abdou Diouf discourait encore : « Un grand dessein, si ambitieux, si lumineux, si généreux soit-il ne peut se concrétiser et prospérer que s’il est porté par des femmes et des hommes de bonne volonté, par des femmes et des hommes de conviction qui, successivement, l’enrichissent de leur personnalité, de leurs compétences et de leur engagement. »
sa révérence à son prédécesseur : « Si
Au IXe sommet de l’OIF (octobre 2002
nous pouvons regarder avec fierté, aujourd’hui, ce que nous avons fait du grand dessein et du legs que nous ont transmis les pères fondateurs de la Francophonie, c’est parce que vous avez hautement contribué au franchissement de ces différentes étapes ». En effet, ces mots d’Abdou
à Beyrouth au Liban), dans son 1er
dire que, si la Francophonie a besoin de continuité, de consolidation des acquis, elle a aussi besoin de se remettre en cause, de progresser, de se renouveler pour être fidèle à nos idéaux de justice, de démocratie et de solidarité, pour être fidèle à nos pères fondateurs, pour faire rêver les jeunes. »
discours de secrétaire général de la
Au demeurant, à l’âge de 79 ans, Ab-
Francophonie, Abdou Diouf martelait
dou Diouf ne rêve plus. « La fin de
à son auditoire : « (…) je voudrais dire
mon mandat à la tête de la Francophonie coïncidera avec la fin de ma vie publique », confie-t-il à notre ma-
Diouf rendant hommage, le 26 juin
kar, lorsqu’il entendra pareille, une
2014, aux anciens secrétaires géné-
page sera tournée sans que la Franco-
raux et administrateur général de
phonie ne change de cap. En effet,
l’Agence de coopération culturelle et
quelle que soit l’orientation tracée par
technique (ACCT) et de l’Agence in-
le Sommet de Dakar, le discours de
ternationale de la francophonie (AIF)
Diouf reste d’actualité : « Comme le
pourraient lui être retournés en té-
souligne la Déclaration de Cotonou, la Francophonie n’est pas l’uniformisation du monde, au contraire elle l’enrichit de ses différences par un dia-
ternance démocratique partout chantée. C’était en 2000. Abdou Diouf quittait la présidence de la République du Sénégal après un règne de vingt ans. La manière le propulsait sur une autre sphère : la planète Francophonie où il officie depuis douze ans comme secrétaire général. Une mission qui arrive à terme. Et, à la clôture du XVe sommet de l’Organisation internationale de la Francophonie (du 29 au 30 novembre à Dakar), lorsque son successeur prendra la parole à l’invitation du président de la conférence des chefs d’État et de
moignage de ses trois mandats
au
secrétariat général de l’OIF. Comme le disait Abdou Diouf dans 26 – AfriQue Union n° 07
à notre cher Boutros Boutros-Ghali, secrétaire général sortant, combien je suis fier d’être son successeur (…). » À la clôture du XVe sommet de Da-
est une volonté humaine sans cesse tendue vers une synthèse et toujours en dépassement d’elle-même pour mieux s’adapter à la situation et au monde en perpétuel devenir » - . C’est
gazine Afrique Union. Et d’ajouter :
« (…) Je ne souhaite plus assurer de fonctions publiques. Vous savez, j’ai commencé ma carrière à 25 ans au Sénégal et n’ai pas arrêté depuis. Je n’ai presque pas eu de jeunesse. Je mérite bien un peu de repos aux côtés de mon épouse et de mes proches, non ? » (Voir interview) Comme pour dire : vous m’avez volé ma jeunesse, laissez-moi profiter de ma vieillesse !
DOSSIER FRANCOPHONIE
INTERVIEW ABDOU DIOUF
’’
Secrétaire général de l’Organisation Internationale de la Francophonie
Les chefs d’État vont se donner un outil pour articuler et valoriser le potentiel économique
’’
La Francophonie économique serait l’aboutissement logique d’un processus arrivé à maturation. Abdou Diouf l’explique en procédant aux articulations qui donnent du liant et assurent la cohésion d’une démarche initiée depuis le VIIe sommet de Hanoï en 1997 ou la 1re conférence des ministres de l’Économie et des Finances de la Francophonie en 1999 à Monaco. Le secrétaire général parle des différents aspects de la Francophonie à travers des actes clefs comme la Déclaration de Bamako sur la démocratie, le combat pour le genre… › PROPOS
RECUEILLIS
PAR
Assane SAADA (Crédit photos : OIF)
Monsieur le Président, vous avez apporté une caution considérable à l’image de la Francophonie. Au moment de quitter vos fonctions de secrétaire général, avez-vous l’impression d’avoir mieux positionné le français comme une langue de communication internationale ? Le français est, de fait, une langue de communication internationale : c’est la seule, avec la langue anglaise, à être parlé sur les 5 continents ! Et je n’ai rien à voir avec ce fait historique… Par contre, j’espère avoir contribué à un réveil des consciences : nous francophones, avons la chance de parler une grande langue de communication internationale et nous devons le revendiquer ! Je me suis également attaché, conformément à la Politique intégrée de promotion de la langue française adoptée au Sommet de Kinshasa en 2012, à faire en sorte que la Francophonie agisse comme aiguillon pour
la mobilisation des États et des gouvernements en faveur de l’usage de la langue française sur toutes les tribunes, dans tous les domaines et cela sur les cinq continents. Plus généralement, notre combat pour le multilinguisme à l’échelle internationale a sans doute fait « bouger les lignes » et permis à une ambition plus large, celle de la diversité culturelle et linguistique, de rencontrer un réel écho dans les espaces où se déploie la communication internationale. Ce combat a été mené à travers les alliances étroites que nous avons nouées depuis plusieurs années avec les autres grandes aires linguistiques que sont la Lusophonie, l’Hispanophonie, l’Arabophonie, ou le Commonwealth. Sous votre mandature, les valeurs de la démocratie et du respect des droits de l’homme ont été réaffirmées par l’OIF. Quels sont les acquis concrets de la Franco-
phonie dans ce domaine et que faire pour les consolider ? Avec le soutien des États et gouvernements, des institutions nationales organisées en réseaux et de la société civile, nous avons renforcé les espaces de dialogue et de solidarité pour faire en sorte qu’au quotidien, dans tout notre espace, les valeurs de la démocratie, des droits de l’Homme et de l’État de droit irriguent la volonté commune de progresser ensemble vers les objectifs de paix et de développement économique et social. Depuis 2003, l’OIF a apporté son assistance aux États pour la consolidation des institutions de l’État de droit ; elle a soutenu les initiatives nationales en matière de respect et de promotion des droits de l’Homme, accompagné les États francophones afin qu’ils répondent à leurs obligations internationales notamment dans le cadre de l’Examen périodique universel mis n° 07 AfriQue Union – 27
DOSSIER FRANCOPHONIE en œuvre par le Conseil des droits de l’Homme ; elle a également contribué à la tenue d’élections libres, fiables et transparentes et a mené un programme d’accompagnement des processus de transition dans les pays en sortie de crise. Certes de nombreux défis continuent à peser sur certains processus qui restent encore fragiles, notamment dans ce contexte international marqué par des menaces permanentes à la paix et à la sécurité. C’est pourquoi nous devons rester vigilants et approfondir notre solidarité pour consolider les acquis. Il faut notamment poursuivre et encourager le dialogue et les concertations entre les acteurs politiques et sociaux afin de rechercher un consensus sur les grands enjeux nationaux. Les capacités des institutions nationales doivent aussi être consolidées au même titre que les mesures de transparence dans la gestion des affaires publiques dans les États francophones en vue de renforcer l’adhésion des populations aux valeurs de démocratie et des droits de l’Homme. Je suis convaincu que la Francophonie sera en mesure de relever avec efficacité ces défis. L’OIF a souvent suspendu les pays qui se soustraient du processus démocratique. Estce une façon d’imposer une Francophonie plus politique ? Comme vous le savez, la Déclaration de Bamako adoptée en novembre 2000 par les États et Gouvernements membres de la Francophonie est le texte de référence sur lequel prend appui l’ensemble des mécanismes de promotion et de protection de la démocratie, des droits et des libertés dans l’espace francophone. C’est le socle de l’engagement de la Francophonie en matière démocratique. Nos États et Gouvernements membres y tiennent fermement dans la mesure où ils se sont engagés à faire prospérer de manière rigoureuse leur projet démocratique à partir de ce socle qui suppose la promotion des valeurs, le respect des principes, et l’application des règles communément agréées. Au cœur de ce projet de construction et de renforcement de la démocratie, les notions de légalité et de légitimité occupent une place essentielle. C’est pourquoi toute prise de pouvoir qui procède de la violence ou du détournement ou non-respect de la légalité constitutionnelle constitue une violation des principes démocratiques et un manquement au respect des droits de l’Homme. C’est donc dans ces cas bien spécifiés dans la Déclaration de Bamako qu’une suspension peut être décidée par le Conseil 28 – AfriQue Union n° 07
permanent de la Francophonie. Il est important de préciser que sur la base du principe de solidarité qui caractérise notre projet démocratique, notre objectif est moins de sanctionner que d’aider l’État concerné à retrouver rapidement sa place au sein de nos instances. La décision de suspension est toujours assortie d’une recommandation d’accompagnement de l’OIF en vue du retour de l’État suspendu à la légalité constitutionnelle. Cet accompagnement se traduit par des actions de soutien politique et technique nécessaires pour le fonctionnement efficace des institutions de la transition et pour la tenue d’élections marquant le retour d’un pouvoir légalement et légitimement établi. C’est vous dire qu’il ne s’agit pas d’imposer une Francophonie politique, mais de contribuer à l’approfondissement et à la consolidation du chantier démocratique des États et gouvernements de notre espace. La Francophonie politique a semblé mieux s’affirmer ; en revanche l’économie n’est pas suffisamment au centre des débats francophones malgré le potentiel en la matière. Que faire pour mettre en valeur le potentiel économique de l’espace francophone ? Il est vrai que la réalité de la Francophonie a été culturelle avant d’être économique et politique. Mais depuis 1997 et le Sommet de Hanoï, depuis 1999 et la réunion des ministres de l’Économie et des Finances francophones à Monaco, nous avons travaillé sur
deux plans : faire reconnaître la Francophonie comme un lieu de dialogue et de plaidoyer pour un monde mieux régulé, plus équitable et plus transparent en matière économique, financière et commerciale ; favoriser l’amélioration du climat des affaires, les rencontres et les partenariats entre entreprises effectivement francophones et le rôle facilitateur du français dans les domaines scientifiques, techniques, économiques, juridiques et financiers. En adoptant une Stratégie économique pour la Francophonie lors du prochain Sommet à Dakar, les chefs d’État vont se donner un outil pour mieux articuler ces deux plans et valoriser de façon plus systématique le potentiel économique de l’espace francophone. En 2013, vous avez installé le Réseau francophone pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Qu’est-ce qui motive cet intérêt pour la promotion du genre dans l’espace francophone ? Vous savez, cela fait 20 ans que l’OIF s’engage, de manière résolue, en faveur de la promotion et de la protection des droits des femmes, de leur autonomisation et de la réduction des disparités entre les sexes. Toutes ces années nous ont permis de dessiner les contours d’une véritable stratégie francophone en matière de renforcement du pouvoir d’action des femmes et d’égalité entre les sexes. Et je me suis personnelle-
La personnalité et l'influence du président Abdou Diouf sont saluées par les dirigeants du monde entier.
Abdou Diouf avec le Pape François
DOSSIER FRANCOPHONIE
ment investi à faire de l’objectif de l’égalité entre les femmes et les hommes une ligne directrice de l’ensemble de nos actions et initiatives en Francophonie. Nous avons concentré nos efforts en faveur de la consolidation du statut des femmes et de l’égalité entre les sexes, ainsi que de la lutte contre toutes les formes de discrimination et de violence à l’égard des femmes et des filles. De plus, l’OIF œuvre pour faire de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF) une priorité politique de ses 77 États et gouvernements membres. L’OIF a aussi été l’une des premières organisations internationales à œuvrer pour la mise en place d’un Accord-cadre de coopération avec ONU Femmes, afin de mener des actions conjointes dans des domaines où il reste de nombreux défis à relever : la lutte contre les violences faites aux femmes, mais aussi la participation des femmes à la prise de décision politique, ou encore le plaidoyer en faveur de l’égalité femmes-hommes devant la loi et en pratique, ainsi que dans le programme de développement pour l'après 2015. Il nous semblait donc important de pouvoir travailler en étroite coopération, dans ce domaine comme dans d’autres, avec la société civile.
Abdou Diouf avec le Président Macky Sall
Notre Magazine se définit comme un Magazine francophone d’intégration ; et au vue de votre riche parcours d’homme d’État, nous souhaiterions avoir votre appréciation sur les processus d’intégration en Afrique conduits par les communautés régionales ? La Francophonie vient de participer au 14e Forum économique international sur l’Afrique organisé conjointement par l’OCDE et la Commission de l’Union Africaine, pour la première fois. Et cette question des intégrations régionales, porteuses de diversification, d’industrialisation et d’inclusion dans la chaîne des valeurs mondiale, a été largement évoquée. Il est clair aujourd’hui qu’il existe plusieurs niveaux d’intégration régionale en Afrique ; tous les observateurs soulignent le dynamisme des régions Afrique de l’Ouest et Afrique de l’Est, qui ont une longue tradition d’échange et de complémentarité. Dans d’autres cas, cette tradition n’existe pas et la mise en place de circuits économiques modernes, fondés sur l’exportation vers les pays développés et maintenant émergents, n’a pas favorisé l’intégration. Mais dans le document : « 2063 : l’Afrique que nous voulons », l’Union Africaine a clai-
Abdou Diouf avec le Président François Hollande
rement affirmé que l’intégration continentale demeure son ambition : pour y parvenir, les intégrations régionales demeurent le chemin le plus sûr et le plus efficace et tout sera mis en œuvre pour que les différentes communautés économiques parviennent au même stade. Vingt-ans comme président de la République du Sénégal et douze années à la tête de la Francophonie. Quel sera votre prochain lieu d’engagement au service de
la communauté ? La fin de mon mandat à la tête de la Francophonie coïncidera avec la fin de ma vie publique. Je resterai toujours à l’écoute de la vie internationale et de mon continent mais je ne souhaite plus assurer de fonctions publiques. Vous savez, j’ai commencé ma carrière à 25 ans au Sénégal et n’ai pas arrêté depuis. Je n’ai presque pas eu de jeunesse. Je mérite bien un peu de repos aux côtés de mon épouse et de mes proches, non ? n° 07 AfriQue Union – 29
DOSSIER FRANCOPHONIE
SUCCESSION D’ABDOU DIOUF AU POSTE DE SECRETAIRE GENERAL DE LA FRANCOPHONIE
L’Afrique se met en difficulté › Rémy A
«
Si l’Afrique ne se rassemble pas autour d’une candidature unique, elle perdra le poste du secrétaire général de la Franco-
de la Commission de l'Océan indien et
chances. Pendant ce temps, la canadienne
l'Equato-Guinéen Augustin Nze Nfumu,
Michaëlle Jean gagne l’estime de quelques
âgé de 63 ans. Augustin Nze Nfum est ac-
présidents et diplomates africains lors de
tuellement sénateur. Il a été récemment
ses déplacements de campagne sur le conti-
phonie », nous confiait, le mois dernier, un
ambassadeur de Guinée équatoriale en
nent. L’ancienne journaliste sait séduire
haut diplomate d’un pays occidental à Pa-
Angleterre. Il a également occupé en 1992,
ses interlocuteurs de par sa maîtrise des
ris. En effet, l’envergure de la candidature
le poste de ministre délégué des Affaires
défis et des enjeux actuels de la Francopho-
de Michaëlle Jean, ex-gouverneure géné-
extérieures chargé de la francophonie. En
nie. Ses origines haïtiennes la rapprochent
rale du Canada compliquera la tâche à
1993, il a été nommé ministre de la Cul-
du continent africain.
l’Afrique qui n’a pas encore une voix
ture, du Tourisme et de la Francophonie.
A quelques jours du Sommet de Dakar pré-
unique dans cette compétition. Quatre afri-
La Guinée équatoriale est, par ailleurs,
vu les 29 et 30 novembre, les discussions se
cains ont clairement déclaré leur candida-
membre de la Francophonie depuis 1989 et
font plus discrètes sur le choix du succes-
ture : Pierre Buyoya, actuel haut représen-
a adopté le Français comme deuxième
seur d’Abdou Diouf au poste de secrétaire
tant de l’Union africaine pour le Mali et le
langue officielle, après l'espagnol, en 1998.
général de la Francophonie. Quelle que soit
Sahel et ancien président du Burundi
Pour l’instant, aucun des candidats afri-
l’option que prendront à huis clos les chefs
(1987-1993, 1996-2003); l’écrivain congolais
cains ne s’impose dans les analyses. Le
d’Etat et de gouvernement, la succession
et ambassadeur du Congo à Paris, Henri
travail de médiateur du Burundais Pierre
d’Abdou Diouf fera l’objet de toutes les at-
Lopes qui a été déjà une fois candidat au
Buyoya séduit certains officiels africains,
tentions car l’ex-président sénégalais a su
poste; l'ex-Premier ministre mauricien,
mais son passé d'ancien putschiste refait
redonner à l’institution une aura et une
Jean-Claude De Lestrac, secrétaire général
rapidement surface et réduit ainsi ses
efficacité saluée au plan international.
Michaëlle Jean (Canada)
Henri Lopes (Congo) 30 – AfriQue Union n° 07
Pierre Buyoya (Burundi)
Jean-Claude De Lestrac (Maurice)
Augustin Nze Nfumu (Guinée équatoriale)
DOSSIER FRANCOPHONIE
REUNIONS SCIENTIFIQUES
Le Sommet de Dakar, un tournant dans la marche de la Francophonie Le colloque international sur le thème « La Francophonie : De l’inspiration originelle aux défis actuels et futurs », qui a eu lieu à Dakar du 29 au 31 octobre 2014, a recommandé des pistes qui pourraient contribuer au repositionnement de l’organisation sur la scène internationale. Le colloque a été organisé par le Comité scientifique du XVe Sommet de la Francophonie. › BEN KOUASSI
L
Photo de famille de l'installation officielle du Comité scientifique par le Président de la République au Palais, en décembre 2013
a préparation intellectuelle du Sommet de Dakar est l’une des préoccupations majeures du président du Sénégal, Macky Sall. Ce volet des préparatifs du Sommet a été confié à un Comité scientifique présidé par El Hadj Hamidou Kassé, Conseiller spécial du Chef de l’Etat. Après son installation en décembre 2013, le Comité s’est évertué à organiser une série de rencontres (voir encadré) en collaboration avec plusieurs partenaires. Le colloque international sur le thème « La Francophonie : De l’inspiration originelle aux défis actuels et futurs » a rassemblé des intellectuels et des acteurs de divers secteurs de la vie sociale et cultu32 – AfriQue Union n° 07
relle. Les participants ont cerné et approfondi les données du présent de la Francophonie, d’une part, et interrogé ses orientations futures, d’autre part. Ils ont apprécié la portée et l’influence du message et de l’action de la Francophonie sur la communauté francophone et internationale depuis les origines, aux fins de dessiner, de manière prospective, la Francophonie de demain. En remontant l’histoire de la langue française et l’histoire de la Francophonie, et aussi en suggérant, entre autres interventions de nouvelles solidarités, l’offre francophone de formation destinée aux femmes et aux jeunes, les intervenants
ont introduit le débat. En proposant de nouveaux modes d’habiter et de nouvelles manières d’apparaître, ils ont placé la nouvelle vision de la Francophonie au cœur d’un jeu social et politique mondial encadré par les valeurs humanistes qui ont inspiré sa création. Le colloque s’est déroulé en cinq sessions couvrant des thématiques aussi diverses que l’action des pères fondateurs ; la diversité culturelle, linguistique et l’éducation ; la démocratie, les droits de l’homme, la paix et les relations internationales ; la mondialisation et le développement durable ; le rôle des femmes et des jeunes face au futur.
DOSSIER FRANCOPHONIE
Les recommandations du colloque international « La Francophonie : De l’inspiration originelle aux défis actuels et futurs » 1- Redynamiser la Francophonie et refuser sa politisation excessive ; 2- Mettre l’accent sur les droits de l’Homme et la paix en faisant appliquer les principes de transparence et de redevabilité ; 3- Faire en sorte que le Sommet de Dakar 2014 soit un tournant économique pour l’accès des femmes, des jeunes et des enfants aux techniques modernes grâce à la mise en place de programmes de formation qui tiennent compte de la diversité culturelle ; 4- Adopter les conclusions du colloque : « Femmes et jeunes » face aux défis de l’employabilité, de l’entreprenariat collectif urbain ou rural, de la santé, du sport, du défi numérique et de la mobilité dans l’espace francophone ; 5- Promouvoir les enseignements scientifiques et techniques par le développement de pôles universitaires et de pôles de recherche ; 6- Prendre en compte la question des langues nationales ; 7- Soutenir les réseaux numériques francophones ; 8- Favoriser la création et la créativité par la promotion des textes oraux conformément à la Déclaration universelle des droits linguistiques ; 9- Rendre la Francophonie désirable par des actions novatrices et par la porosité intergénérationnelle ; 10- Faire en sorte que le Sommet de Dakar 2014 travaille pour le respect des engagements de Bamako et pour une meilleure prise en charge de la coexistence dynamique, équitable ou égalitaire entre le français et les langues nationales.
Liste des rencontres organisées par le Comité scientifique du XVe Sommet de la Francophonie Partenaires du Comité scientifique Ministère des affaires étrangères et des sénégalais de l'extérieur
Activités
Dates
Forum "le Sénégal dans la Francophonie"
19-20 mai 2014
Séminaire préparatoire du colloque international "femmes et jeunes, forces montantes: enjeux, défis et perspectives francophones"
20-21 juin 2014
Ministère de la femme, de la Journée de lancement des activités famille et de l'enfance, Cadre de et d’installation du Comité ad hoc concertation des organisations chargé d’appuyer la participation des de la société civile pour le XVe femmes au XVème Sommet de la Sommet Francophonie Centre d'Étude et de Coopération Internationale
Colloque international "femmes et jeunes, forces montantes: enjeux, 17-19 septembre 2014 défis et perspectives francophones"
IPAR (Initiative Prospective Agricole et Rurale), Conférence des Ministres de la Jeunesse et des Sports de la Francophonie, Forum international "jeunes en franConseil National de la Jeucophonie, l'avenir en face" nesse,Conseil National de Concertation et de Coopération des Ruraux Académie Nationale des Sciences et Techniques du Sénégal
5 août 2014
Colloque international "l'offfre francophone de formation"
9-10 octobre 2014
23-24 octobre 2014
Colloque international ″La FrancophoCentre d'Étude et de Coopéranie: de l'inspiration originelle aux défis 29 au 31 octobre 2014 tion Internationale actuels et futurs" Panel de haut niveau " Nouvel Agenda pour le Développement dans Programme des Nations Unies l'Espace Francophone: Quelles Stratépour le Développement gies pour l'inclusiton et la participation des jeunes et des femmes"
12-nov-14
Panel de haut niveau " Nouvel Agenda pour le Développement dans Programme des Nations Unies l'Espace Francophone: Quelles Stratépour le Développement gies pour l'inclusiton et la participation des jeunes et des femmes?"
12-nov-14
Observatoire National de la Parité
De gauche à droite : Mme Catherine Brechignac ( secrétaire perpétuelle Académie des Sciences de Paris ), M. Mary Tew Niane (Ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche- Sénégal) , Son Excellence M Mahammed Dionne (Premier Ministre du Sénégal) et M El Hadj Hamidou Kasse ( Président du Comité Scientifique). Colloque international L'offre de formation francophone: état des lieux et perspectives. 23-24 octobre 2014
Atelier de mise en réseau des Observatoires publics de l'Égalité de Genre et des institutions spécialisées francophones
19 au 21 novemvre 2014
De gauche à droite : Mme Mame Sow Diouf (Présidente de groupe de travail - Comité scientifique) , M Mouhamadou Makhtar Cissé (Directeur de Cabinet du Président de la République -Sénégal) et M El Hadj Hamidou Kasse ( Président du comité scientifique). Colloque international sur "femmes et jeunes, forces montantes: enjeux, défis et perspectives francophones" du17 au 19 septembre 2014.
Vue partielle des participants au colloque international sur le thème « La Francophonie : De l’inspiration originelle aux défis actuels et futurs », qui a eu lieu à Dakar du 29 au 31 octobre 2014
n° 07 AfriQue Union – 33
DOSSIER FRANCOPHONIE Vue partielle du Centre international de conférences de Diamniadio (CICD)
DIAMNIADIO : La Francophonie inaugure une ville nouvelle À l'occasion de la tenue du XVe sommet de la Francophonie, Dakar a en partie été transformée . › Rémy A (Crédit photos : Erick AHOUNOU)
D
iamniadio, nouveau pôle urbain de Dakar. À quelque 30 km du centreville, une nouvelle cité sort de terre et se prête au banquet du « donné et du recevoir ». Elle accueille le XVe sommet de la Francophonie. Plus de cinq mille participants venus des cinq continents, Près de sept cents journalistes pour couvrir la conférence des chefs d’État et de gouvernement de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Pour l’occasion, Diamniadio étrenne son Centre international de conférences. Un joyau architectural qui s’étend sur 20 000 m² dont
près de 12 000 m² de surface bâtie. L’édifice dispose d’un amphithéâtre de 1500 places et de plusieurs salles de réunions. « Un
bâtiment à la pointe de la modernité, point d’émergence d’une nouvelle ville tournée vers l’intérieur du pays tout en restant ouverte à la capitale, faisant appel aux technologies de dernières générations », ex-
Jacques-Habib Sy, délégué général pour l'organisation du XVe Sommet
plique Jacquesde la Francophonie (à gauche) et Ousmane Paye, Conseiller spécial du Secrétaire général de la Francophonie ont supervisé plusieurs missions Habib Sy, délégué préparatoires de l'événement à Dakar général pour l'organisation du XVe Sommet de la Francophonie. Quid des retombées de cet investissement ? Construit en quel-ques mois seulement, le Selon le délégué général pour l'organisation du Centre international de conférences de DiamXVe Sommet de la Francophonie, des secteurs niadio (CICD) a coûté « 40 milliards de francs tels que l’hôtellerie, les transports, le comavec un concours de la partie turque sous merce, les télécommunications, le tourisme, forme de prêt à hauteur de 25 milliards de etc., seront fortement sollicités. Pour lui, « fort francs CFA », précise Jacques-Habib Sy. Il de la position stratégique de Dakar, ce centre ajoute : « Pour ce qui est de l’organisation du va booster l’offre en termes de grands rendez-
El Hadj Kassé, président du Comité scientifique préparatoire du Sommet 34 – AfriQue Union n° 07
sommet, nous avons consenti des efforts substantiels sur l’ensemble de nos dépenses car le chef de l’État désire organiser un sommet en phase avec les possibilités financières de notre pays. C’est ainsi que nous avons abouti à un budget de 10 milliards de Francs CFA (…) L’essentiel de cet argent servira à la rémunération de plusieurs centaines de prestataires de services qui interviennent dans l’organisation du sommet. »
vous sur le développement économique et social en Afrique et donc par ricochet promouvoir le tourisme d’affaires ». Le CICD serait le point de départ d’une nouvelle politique de désengorgement de Dakar. Des infrastructures hôtelières et sportives, un pôle administratif, plus de vingt mille logements sociaux, la 2e université de Dakar, etc., autant de projets en vue pour que le nouveau Diamniadio soit.
DOSSIER FRANCOPHONIE
FRANCOPHONIE ECONOMIQUE
Une innovation au chevet de la France ? Le XVe sommet de la Francophonie a pour thème : « Femmes et Jeunes en Francophonie : vecteurs de paix, acteurs de développement ». Mais un autre enjeu sera également au cœur du sommet qui se tiendra les 29 et 30 novembre à Dakar. L'Organisation internationale de la Francophonie veut devenir un nouveau moteur de croissance dont Paris espère tirer profit. › Assanatou BALDE
sion économique. L'objectif : être un nouveau vecteur de croissance. La France, engluée dans la récession, espère tirer profit d’un dynamisme économique de la Francophonie. « La France peut et doit s’appuyer
sur son atout linguistique pour retrouver un chemin de croissance durable », souligne le rapport Attali sur la francophonie. En effet « le potentiel économique de la franco-
Crédits photos : Erick Ahounou
phonie est énorme et insuffisamment exploité par la France ».
L'historienne Penda Mbow, Représentante personnelle du chef d'État sénégalais Macky Sall au sein de l'OIF
L
'Organisation internationale de la Francophonie (OIF) est à une période cruciale de son histoire. L’institution devrait faire peau neuve à l'occasion de son XVe sommet qui réunira, à Dakar, plusieurs dizaines de chefs d'État et de gouvernement. Ces derniers désigneront, à huis clos, le successeur de l'actuel secrétaire général, Abdou Diouf, ex-président du Sénégal, qui cédera son fauteuil, après douze ans à la tête de l’OIF. Son remplaçant devrait affronter de nombreux défis pour donner un nouveau cap à l'organisation souvent critiquée pour ses longs discours, rarement transformés en actes concrets.
« Nous allons, à partir du sommet, connaître un tournant de l'organisation et l'émergence de ce qu'on peut appeler la francophonie économique », explique l'historienne Penda Mbow, représentante personnelle du chef d'État sénégalais Macky
Sall au sein de l'OIF. A l’issue du XVe sommet de la Francophonie, le Sénégal organisera le 1er Forum économique de la Francophonie (FEF) les 1er et 2 décembre 2014 à Dakar. L’institution est consciente qu'elle ne peut pas parler de culture sans développement. Sa raison d'être a jusqu'à présent été de promouvoir le rayonnement de la langue et de la culture française au service de la solidarité, du développement et du rapprochement des peuples par le dialogue permanent des civilisations. Une philosophie incarnée par les fondateurs de l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT), ancêtre de la Francophonie créée en mars 1970 par les présidents sénégalais, Léopold Sédar Senghor, tunisien, Habib Bourguiba, nigérien, Hamani Diori, ainsi que le prince Norodom Sihanouk du Cambodge. Désormais l’OIF veut renforcer sa dimen-
Vecteur de croissance ? Comment faire de la Francophonie un vecteur de croissance économique ? Plusieurs experts ont été appelés à la rescousse dont l'économiste français Jacques Attali, exconseiller de François Mitterrand. Dans un rapport de plus de 200 pages remis le 26 août au président français François Hollande, il explique comment dynamiser l'espace francophone. Il plaide pour une
« union économique francophone potentiellement aussi forte et intégrée que l'Union européenne afin de renforcer la coopération sur des secteurs économiques essentiels dans les domaines de la santé, de la technologie, de l’enseignement, de la culture, de la recherche/développement, ou encore des infrastructures ». Pourquoi une Francophonie économique ?
« La francophonie doit être un outil de développement pour les pays francophones du Sud. L’accélération du développement économique de ces pays est dans l’intérêt de la France ». Croissance alléchante des pays de l'Afrique de l'Ouest Selon le rapport Attali, l’ensemble des pays francophones représentent 16 % du PIB mondial et connaissent un taux de croissance de 7 %. « Deux pays partageant des
liens linguistiques tendent à échanger environ 65 % de plus que s’ils n’en avaient pas. n° 07 AfriQue Union – 35
DOSSIER FRANCOPHONIE Il existe donc bien une corrélation entre le taux de pénétration du français dans un pays et la part des exportations françaises dans ce pays », soutient le rapport. L'Afrique subsaharienne est le continent où l'on apprend le plus de français. Sans compter que la langue française est la quatrième langue la plus parlée dans le monde, avec un nombre de locuteurs estimé à 230 millions de personnes en 2014, soit 4 % de la population mondiale. Ils pourraient être 770 millions en 2050. « Plus de la moitié de
ces francophones vivent en Afrique, et plus d’un tiers en Europe », indique le rapport Attali. Un vivier d'emplois pour la France Grâce au nouveau projet économique de la Francophonie, Paris pourrait créer ou maintenir 360 000 emplois en France et bien plus, autour d’un million, en 2050. Ce qui serait possible, selon Jacques Attali, à condition de mettre en œuvre une politique économique active tournée vers les pays francophones. Une ambition soutenue par le Premier ministre français Manuel Valls.
« La France a un formidable atout dans le monde, c'est la Francophonie », déclare-t-il à l'ouverture du IIIe Forum de l’économie positive au Havre, les 23 et 26 septembre, révélant ainsi l'ambition de Paris. Toutefois, Jacques Attali prévient que la France aurait aussi beaucoup à perdre avec la concurrence des autres grandes langues internationales, telles que l'anglais, ou des langues locales. Sans compter les difficultés de certains pays africains francophones à
« assurer l'accès à l'éducation de leurs populations en situation d'explosion démographique », entraînant « la destruction de 120 000 emplois en France dès 2020, soit 0,5 point de chômage en plus, et un demimillion en 2050, soit 1,5 point de chômage en plus ». La Chine, un sérieux concurrent La France ne cache plus sa préoccupation face à l'expansion chinoise sur le continent africain. En dehors de la Chine, de nombreux pays africains se tournent de plus en plus vers les pays du Golfe comme en témoigne le sommet de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) aux Émirats arabes Unis, en septembre dernier, où plusieurs chefs d'État de l'organisation ont recueilli plusieurs milliards de francs CFA pour financer des projets d’infrastructures dans leur pays. Et si aucune mesure concrète n'est prise, la zone francophone compterait, en 2050, moins de francophones qu'actuellement, préviennent les experts de 36 – AfriQue Union n° 07
Jacques Attali a remis son rapport le 26 août 2014 au président français François Hollande l’institution. Surtout que l'idée longtemps émise de créer une langue commune africaine, telle que le swahili, ou encore le bambara, trotte toujours dans la tête des pana-
fricanistes chevronnés… Une manière de valoriser les langues africaines parfois délaissées au profit de celles des anciennes puissances coloniales.
PARIS PERDANT Plus de 5 000 entreprises françaises exportatrices au Sénégal, en Côte d’Ivoire et au Gabon contre près de 2 000 au Nigéria, voire quelque 4 000 en Afrique du Sud. 78 % de part de marché français dans seulement quatre pays d’Afrique francophone (Gabon, Sénégal, Cameroun, Côte d’Ivoire). La raison : « Il existe bien
une corrélation entre le taux de pénétration du français dans un pays et la part des exportations françaises dans ce pays ». Toutefois, Paris joue les perdants. « La France est seule à douter que la langue française soit un atout économique fondamental », souligne le rapport Attali sur la francophonie. Et c’est là un handicap assez lourd pour L’Hexagone dans ce dessein de rayonner économiquement à travers l’espace « francophone et francophile ». Un ensemble hétéroclite de quelque 78 pays à travers les cinq continents.
« Les pays francophones et francophiles représentent près de 16 % du PIB mondial, avec un taux de croissance moyen de 7 %, et près de 14 % des réserves mondiales de ressources naturelles ». Un marché de plus 1,5 milliards d’habitants soit 22 % de la population mondiale. Il est ainsi défini : « L’espace géolinguistique économique de la francophonie va au-delà des frontières institutionnelles de la francophonie et recouvre les cinq continents. Il inclut les pays francophones non membres de l’OIF (Algérie) ; les pays où une proportion de la population parle le français (Israël) ; les pays dits ici « francophiles » qui ont un intérêt économique à apprendre le français (Nigeria). Il inclut les diasporas francophones, les réseaux d’anciens élèves de l’enseignement français. À cela s’ajoutent les 50 millions d’apprenants du français comme langue étrangère à travers le monde, ainsi qu’une élite de plusieurs milliers d’"influenceurs francophilophones" qui occupent des postes économiques, culturels et politiques stratégiques dans des pays non francophones. La francophilophonie regroupe donc les pays francophones, les pays francophiles et les francophones et francophiles du reste du monde. »
DOSSIER FRANCOPHONIE
AMERIQUE Au cœur du monde francophone de New-York New York, la ville cosmopolite accueille sur son territoire des millions de citoyens du monde parmi lesquels des francophones (africains, canadiens, français ou encore haïtiens, etc.). On retrouve à New York la vitalité de la langue française dans les institutions internationales, les missions diplomatiques et consulaires, les nations unies, les medias, les boutiques et les écoles. › Alain Comlan TCHEGNON, New York, USA prend de l’ampleur dans cette ville. Il est fréquent de rencontrer des jeunes francophones et américains utiliser la langue de Molière comme instrument de communication. Une pratique que Marie le Blé trouve intéressante : « L'enseignement
du français aux américains est très bon et créé un engouement pour la France ».
D
Marie le Blé, journaliste française basée à New York
’après le site Business Insider qui a exploité les données recueillies lors de l’American Community Survey de 2012, il ressort que le français après l’espagnol est la langue estrangère la plus répandue à New York. Ainsi, le français domine à Midtown East / Murray Hill. A noter aussi que le créole s’impose à Flatbush, dans le sud-ouest de Brooklyn, en raison de la forte présence haïtienne qui elle aussi a une parfaite connaissance de la langue de Molière. Même constance dans l’Upper East Side, l’Upper West Side, Morningside Heights (nord-ouest de Central Park) et surtout à Harlem où l’on rencontre une forte communauté d’africains francophones. Le français a une bonne image au pays de l’oncle Sam. Selon Fabrice Jaumont,
Attaché à l’éducation à l’Ambassade de France aux Etats Unis : « La culture francophone est très bien perçue et toujours très appréciée des américains. On retrouve très souvent des livres, films, articles faisant référence à la gastronomie, à la mode, à l’histoire de France, entre autres ». Même son de cloche avec Marie Le Blé qui est journaliste française résidente depuis quelques mois aux Etats -Unis. « Ce n’est pas une légende de voir
quelqu’un parler le français à New York car les américains entretiennent une réelle passion pour la langue française et même ceux qui la parlent très peu font toujours beaucoup d'efforts pour la pratiquer », remarque Marie Le Blé. L’apprentissage de la langue française dans les écoles et lycées New Yorkais
Selon Fabrice Jaumont, le programme de français attire un très grand nombre d’étudiants chaque semestre bien plus que les autres langues du programme (l’anglais, l’espagnol, l’arabe, le chinois, le russe). D’où l’instauration d’une campagne de promotion du français intitulée « The World Speaks French ». Depuis 2005, de nouveaux programmes en langue française se sont consolidés dans les écoles publiques sous l’impulsion de plusieurs partenaires français, francophones et francophiles. Le dispositif scolaire ainsi mis en place prend plusieurs formes : des classes bilingues, des classes « après l’école », des classes de français langue d’héritage et des préparations au GED en français, un examen permettant l’entrée à l’université. Au Lycée français de New York situé en plein cœur de Manhattan, les élèves sont immergés dans un environnement ouvert à une diversité culturelle et bilingue et où ils peuvent effectuer toute leur scolarité sous la direction des enseignants dévoués à la tâche. Ici, les élèves sont préparés à faire preuve d’autonomie de jugement et surtout à donner plus tard le meilleur d’eux-mêmes. Francophonie et culture Dans le cadre de la célébration chaque année de la journée de la Francophonie, la Mission Permanente de la Francophonie à New York en collaboration avec l’Alliance Française organise tout au long du mois de mars plusieurs activités culturelles et intellectuelles. Le clou de la n° 07 AfriQue Union – 37
DOSSIER FRANCOPHONIE
manifestation est souvent une soirée culturelle à travers laquelle plusieurs acteurs du monde francophone sont honorés pour leur engagement pour la promotion de la langue française. L’Edition de 2014 a connu la participation de l’artiste Manu Dibango, saxophoniste camerounais de renom qui a reçu l’un des prix de la Francophonie 2014 au même titre que Hervé Ladsous, vice-secrétaire général des Nations Unies. Les prix spéciaux de la Francophonie ont été remis à l’Ambassadeur représentant permanent de la Roumanie à New York, Madame SimonaMirela Mileculescu et à Nelson Messone, Ambassadeur représentant permanent du Gabon à New York et promu depuis quelques mois ministre de la forêt, de l’environnement, de la protection des Ressources Naturelles au Gabon. Francis Cabrel a reçu le prix de la diversité culturelle tandis que le New York French American Charter School et le Bronx High School of Sciences ont respectivement reçu une distinction spéciale lors de cette soirée. Immersion de francophones dans la culture américaine « Arrivée aux Etats-Unis il y a dix-huit
mois, je dois dire que la tâche n'a pas été mince car vivre et travailler dans un pays anglophone nécessite beaucoup d'efforts d'adaptation pour une francophone même si on parle anglais », confie Marie le Blé. Comme cette journaliste, les immigrants francophones installés à New York font face à ce qu’on peut considérer comme étant une barrière linguistique. «
Daniel Ahodegnon, étudiant béninois à New York Centre de la Presse Francophone de New York Informer les journalistes Francophones basés aux Etats Unis et accompagner ceux qui y sont de passage dans la perspective de faciliter leur tâche en leur permettant de rencontrer des personnes ressources, tels sont les objectifs du Centre de la Presse Francophone de New York dont les activités ont démarré en Septembre 2012. Le journaliste camerounais Christian Ngalle est le directeur du Centre de la Presse Francophone. « Le Centre de la
Presse Francophone de New York est
destiné à informer les journalistes francophones basés aux Etats-Unis et accompagner ceux de passage. L'objectif est de faciliter leur travail en leur permettant de rencontrer des personnes ressources. Le Centre de la Presse Francophone de New York organise des conférences de presse données par des personnalités sur tous les sujets d'actualité. Les intervenants sont aussi bien les décideurs du monde politique et économique que des personnalités de la société civile, des dirigeants d'ONG, des créateurs ou des écrivains, que des analystes, observateurs ou experts de haut niveau », explique Christian Ngalle.
Les difficultés sont importantes au départ car en tant que journaliste, mon métier consiste à me tenir informée en permanence, lire la presse, écouter la radio, suivre les chaînes d'infos pour décrypter l'information et prendre la température du pays... L'objectif a été pour moi de jouer l'immersion pour m'adapter et comprendre le fonctionnement de ce pays par sa langue », ajoute-t-elle. Daniel Ahodegnon, jeune étudiant béninois en Master Développement International à l’université de Colombie à New York, explique en ce qui le concerne que l’utilisation du français est importante dans le rapport entre les francophones et les anglophones en ce sens qu’il constitue un outil de communication. Il ajoute : « le
début de l’intégration aux Etats Unis pour tout francophone est un peu difficile. Il apparait évident qu’il se pose une barrière linguistique d’intégration. Car les francophones sont en face d’un défi de convertir leurs connaissances dans la langue anglaise ». 38 – AfriQue Union n° 07
Lancement du Centre de la Presse Francophone de New York en septembre 2012
DOSSIER FRANCOPHONIE
HUMEUR FRANCOPHONE
A l’Onu, le français a sa place, mais cherche encore sa « voix » ! › Par Irené Herman HOUNGBO*(New York , USA)
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a langue de Molière est la deuxième des six langues de travail du secrétariat des Nations Unies juste derrière l’anglais depuis la création de l’organisation en 1945. Aussi la plupart des documents
officiels de l'organisation sont-ils systématiquement traduits en français pour satisfaire les nombreux pays membres de l’Organisation : États francophones d'Afrique, d'Europe et d'Amérique du Nord qui l'utilisent pour
communiquer avec le Secrétariat de l’Onu. Selon Vaninna Maestracci du Bureau du Porte-parole du Secrétaire General des Nations Unies Ban Ki Moon, il est évident que l’organisation ne pourrait fonctionner sans la langue française puisqu’elle fait partie depuis lors des habitudes de travail du personnel de son Secrétariat. “ Le francais est indéniablement présent ici “, renchérit –elle avant de poursuivre avec une illustration des offres d’emplois de l’Onu qui sont disponibles sur son site web, prioritairement en anglais puis en français. Plusieurs responsables du Secrétariat, bien que n'étant pas francophones, se retrouvent parfois dans l’obligation de s’exprimer en français surtout devant la presse francophone. L’Onu, dans sa dynamique de promouvoir le multilinguisme, a même fait adopter en 2013 par son Assemblée Générale, la résolution A/667/L.74 qui vient renforcer davantage l’usage à part égale des six langues officielles de l’organisation que sont l'anglais, le français, l'arabe, le chinois, l'espagnol et le russe. Dans les faits, le français est plutôt marginalisé. Selon le rapport d’une étude réalisée par l’organisation même et portant surtout sur le recrutement des fonctionnaires, « même si l’anglais et le français sont les deux langues de travail du Secrétariat, la première est exigée dans 87% des cas et la seconde 7% ». Ainsi, au mépris des textes, le multilinguisme perd toute son essence au sein de l’organisation. La diversité culturelle y disparaît au profit d'une monoculture désormais omniprésente. Les fonctionnaires français, sensés défendre la langue de Molière, semblent prendre plutôt du plaisir à démontrer leurs compétences en anglais pour contenter le "maître" américain. Si l’Observateur permanent de la Francophonie près l’Onu pouvait se le permettre, il parlerait anglais. Une parfaite illustration de la toute puissance de l’anglais qui supplante toutes les autres langues dites de communication internationale.
*Irené Herman Houngbo est journaliste béninois basé à New-York depuis 2006. Accrédité aux Nations Unies, il est le correspondant de LC2 TV et de BBC AFRIQUE. n° 07 AfriQue Union – 39
POLITIQUE
L’INVITE MOUSSA
MARA PREMIER MINISTRE DU MALI
« 2015 SERA L’ANNEE DE LA RELANCE ECONOMIQUE AU MALI » Âgé de 39 ans, Moussa Mara, Premier ministre du Mali, est un homme pressé. Face aux urgences de son pays et à certaines critiques, son gouvernement, sous la direction du président de la République Ibrahim Boubacar Keïta, travaille pour redonner au Mali son honneur, sa démocratie et son économie naguère compétitive. › PROPOS
RECUEILLIS
PAR
LÉON AJORIN KOBOUDE
Quatorze mois après l’arrivée au pouvoir du président Ibrahim Boubacar Keïta, le quotidien des Maliens a-t-il changé ? La situation était presque chaotique quand le président Ibrahima Boubacar Keïta a pris fonction, même si on sortait d’un processus de transition démocratique. Il y a eu des événements qui nous ont fait craindre le pire dans le pays. Les institutions républicaines étaient mises à mal ; la chaîne de commandement au sein de l’armée était quasi-inexistante ; les relations du Mali avec les bailleurs de fonds battaient de l’aile, etc. Le moral du pays était en berne quand le président Keïta est arrivé au pouvoir. C’était une situation exceptionnelle. Il fallait reconstruire et réformer plusieurs pans du système économique, social, militaire et politique de notre pays. La première priorité du chef de l’État, c’était d’abord, comme mentionné dans son projet présidentiel, faire fonctionner les institutions sous l’égide d’un État 40 – AfriQue Union n° 07
dont l’autorité est restaurée et respectée. Il était important, ensuite, de rendre audible la voix du Mali auprès de ses partenaires techniques et financiers. Voilà les deux priorités majeures de la première année au pouvoir du président Keïta. À ce jour, il est difficile de parler de relance économique à proprement parler. Nous sommes en train de créer toutes les conditions qui guideront la relance économique. Quelles sont ces conditions dont vous parlez ? Aujourd’hui, je peux vous confirmer que le Mali est au cœur de l’agenda international. Les partenaires techniques et financiers accélèrent le décaissement des fonds engagés dans le cadre du processus de Bruxelles. Ils se sont également engagés à financer le prochain accord de paix en négociation dans la région nord de notre pays. Cet accord de paix nécessitera un financement de centaines de mil-
liards de francs CFA parce qu’il devra se traduire par la construction d’infrastructures, la rénovation des outils de défense et de sécurité, les réformes institutionnelles, la mise en place d’un certain nombre de structures de développement socio-économique. Nous venons également de rencontrer le (Organisation de coopération et de développement économique) au sein duquel il y a certains partenaires stratégiques. Nous les avons invités à nous accompagner dans la dynamique de la relance économique et de certaines réformes. Comment l’économie réelle pourra-t-elle bénéficier de cette relance ? Je suis persuadé que les mois à venir seront des moments de relance économique au Mali. Nous avons une forte dette intérieure envers les entreprises que nous devons régler. Nous décaisserons 66 milliards de francs Cfa pour rem-
POLITIQUE une gouvernance irréprochable au sommet de l’État. J’invite les acteurs politiques de mon pays à ne pas s’engluer dans les débats qui ne nous honorent pas. Les défis qui attendent notre pays sont immenses. Au fond, l’opposition d’aujourd’hui est la majorité de demain… Les animateurs de cette opposition seront amenés à utiliser le même avion dont ils critiquent l’acquisition aujourd’hui.
Léon Anjorin Koboudé après l'interview avec le Premier ministre
Certains de vos opposants critiquent ouvertement le train de vie de l’État, notamment l’achat de l’avion présidentiel, objet de toutes les polémiques. Qu’en dites-vous ? Concernant le train de vie de l’État, je vais vous donner quelques informations banales mais qui illustrent la volonté du président de la République et du gouvernement à faire un bon usage des ressources de l’État. À l’heure où je vous parle, le président Keïta vit dans sa rési-
dence personnelle qui n’est pas à la charge de l’État. Au même moment, il y a des anciens présidents dont les résidences sont prises en charge par l’État. Honnêtement, on ne peut pas accuser le président Keïta de légèreté ou de favoritisme dans la gestion des deniers publics, surtout quand il s’agit de la prise en charge des personnalités politiques et étatiques de sa majorité. Ce qui retient l’attention de nos opposants, comme vous le dites si bien, c’est l’achat d’un avion pour le Mali. L’avion n’appartient pas personnellement au président Keïta. Il est un outil de travail au service de l’État malien, du peuple malien, car quand nous faisons des déplacements, c’est bien sûr dans le cadre des activités officielles. Je ne comprends pas les critiques qui se focalisent sur cet avion dont l’acquisition a été auditée par les services de contrôle de l’État du Mali. L’audit n’a révélé aucune irrégularité. Les acquisitions d’avion dans le passé n’ont pas été auditées. C’est vous dire que le président Ibrahim Boubacar Keïta
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bourser cette dette. Ce sera un bol d’air non négligeable pour les entreprises qui pourront renforcer leurs activités, investir et embaucher de nouveaux salariés. Nous apporterons un soutien aux revenus des couches les plus défavorisées. Nous reverrons les conditions de rémunérations des agents de l’État, dans le cadre des négociations avec les partenaires sociaux, notamment les syndicats. Tout ceci se fera dans un cadre de dialogue social où tous les acteurs concernés auront leur mot à dire. En plus de ces actions que j’ai citées, l’Etat malien encourage fortement les investissements privés au Mali. La meilleure façon de relancer l’économie, c’est de favoriser les investissements en facilitant la mise en place d’un cadre légal et fiscal au profit du secteur privé. Il faudra aussi financer les grands travaux qui créeront des emplois. Le quotidien des Maliens connaîtra des débuts d’amélioration à partir de l’année prochaine. Le fonctionnement normal des institutions permet de mettre en œuvre un vrai programme économique et social profitable aux Maliens.
J’invite les acteurs politiques de mon pays à ne pas s’engluer dans les débats qui ne nous honorent pas.
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est conscient de la nécessité d’instaurer
Il y a eu récemment l’annulation de contrats de fourniture d’armement. Est-ce la preuve que le gouvernement est obligé de se rattraper sur certains actes de mauvaise gouvernance ? Chaque fois qu’il a eu des erreurs dans des procédures de passation de marchés, comme ce fut le cas pour la fourniture d’armements, l’État prend ses responsabilités. Des contrats d’achat d’armements à hauteur de près de 70 milliards de francs Cfa ont été annulés par l’État. C’est encore là la preuve de notre souci de transparence. L’État a ordonné l’audit des dépenses liées au budget de la dépense. C’est une première dans l’histoire de notre pays depuis 1960. Si l’armée avait été auditée ces dix dernières années, j’ignore ce que les résultats auraient été. Je voudrais clairement dire que le pouvoir actuel est un pouvoir courageux qui n’hésite pas à diligenter des audits sur sa propre gestion et celle des équipes précédentes. C’est ce qui mérite d’être dit à l’opinion nationale et internationale. Nous sommes droits dans nos bottes. Nous travaillons, sous la haute direction du chef de l’État, pour rendre au Mali son honneur. Où en est le gouvernement malien dans le cycle des négociations avec les groupes rebelles qui sont dans le nord du pays ? Le dialogue est bien relancé. La dernière phase du processus d’Alger a repris depuis le 18 octobre et débouchera normalement sur un accord de paix qui favorisera, je l’espère, le développement. Mais nous devons également travailler pour désamorcer toutes les menaces au processus de paix parce qu’il y en a qui n’ont pas intérêt à ce que la paix revienne au Mali. n° 07 AfriQue Union – 41
POLITIQUE
MALI : UN HANDICAP QUI GALVANISE › ASSANE SAADA
Les défis du président IBK sont nombreux
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ouverner avec un handicap serait-il un exercice stimulant ? La réponse semble positive pour des politiques qui sont comme dopés par leurs ambitions. Ils se sont sans doute assis sur leur fierté pour gouverner un État à la souveraineté raccourcie et au territoire rapetissé. Une situation qui démultiplie leurs tâches et les condamne à agir au galop mais avec souplesse et précision. Et le Mali constitue un cas d’école. L’énergie qui le porte vers l’avenir, il le tire de l’irrévérence qui lui a été faite par quelques-uns de ses garnements qu’il ne saurait bannir. Le pays est toujours ampu42 – AfriQue Union n° 07
té. Certaines parties du territoire ne sont toujours pas contrôlées par l’État malien mais par les groupes armés. L’inquiétude reste donc partagée chez des populations qui n’ont pas fini de métaboliser leur traumatisme né des infiltrations djihadistes de 2012 dans le nord du Mali. Les rebelles touaregs du Mnla (Mouvement national pour la libération de l’Azawad) contrôlent encore Ménaka et Djebock dans la région de Gao où, au mois d’octobre, une embuscade contre un convoi de ravitaillement a coûté la vie à neuf soldats de la Mission des Nations unies au Mali (Minusma). Les positions de la Minusma à Kidal ont été atta-
quées au mois de septembre causant la mort de dix casques bleus… Forte de plus de 8 500 casques bleus, la Minusma devrait monter en puissance et porter ses effectifs à 11 000 hommes. En plus du millier de soldats français des forces spéciales intégré au dispositif « Barkhane » pour la lutte contre le djihadisme au sahel. Ils ne suffisent pas à calmer les velléités des djihadistes. Et trop de morts pour rien ? Et le territoire est si vaste qu’il est difficile à couvrir. La Minusma a augmenté ses patrouilles et a étendu ses surveillances de façon temporaire à des endroits où elle n’allait pas auparavant. Ce n’est certes pas suffisant. C’est sans doute mieux que rien. En attendant que le Mali retrouve toute la plénitude de sa souveraineté, que son armée guérisse de sa débâcle face aux djihadistes, se pare à nouveau de cette superbe qui fait le Mali et brandisse l’étendard du pays partout où il se doit. Les négociations en cours entre les autorités maliennes et les groupes armés du Nord du pays vont peut-être accoucher d’un Mali apaisé, un Mali à jamais sorti de toute menace djihadiste ? Un Mali où souffle enfin le vent de la paix et de la réconciliation.
POLITIQUE
PRESIDENTIELLE AU BENIN Le général Robert Gbian à la conquête du pouvoir ! A seize mois de l’élection présidentielle de 2016, le discret général à la retraite Robert Gbian est sous les projecteurs. Malgré lui. Le militaire, en passe de devenir homme politique, consulte et goupille sa stratégie avant de déclarer officiellement sa candidature
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› LÉON ANJORIN K OBOUDE
...quand je parcours les villes et les villages de mon pays, je vois une adhésion autour de ma personne et de mes idées...
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L
a poignée de mains est ferme. Le regard bienveillant et le physique avenant. Le général à la retraite met la touche conviviale dans les premiers mots lorsqu’il est en face de ses interlocuteurs. Ce lundi en fin de matinée, ce n’est pas la grisaille à Paris. C’est la veille de l’autonome. Robert Gbian nous reçoit dans un appartement cossu situé au cœur d’un arrondissement chic de la capitale française. Sans détour, nous demandons la confirmation de ses ambitions présidentielles. Sera-t-il candidat à l’élection prévue en 2016 ? « Je serai sincère avec vous :
quand je parcours les villes et les villages de mon pays, je vois une adhésion autour
de ma personne et de mes idées. Puis-je déjà conclure que c’est un soutien populaire ? 2016 est encore loin, je pense. », répond-il avec un brin de malice. Peut-être la prudence du militaire. Même s’il n’a pas encore officiellement déclaré sa candidature, cet officier à la retraite est au centre de toutes les supputations et manœuvres politiques dans la perspective de la présidentielle de 2016. Ce natif d’Ina dans la commune de Bembèrèkè, dans le département du Borgou engrange des soutiens politiques discrets ou avoués dans cette partie septentrionale du Bénin. « Il quadrille progressivement le
terrain politique au nord. Il est sympan° 07 AfriQue Union – 43
POLITIQUE
Le général Gbian va à la rencontre de ses compatriotes thique et reste sensible à la pauvreté des gens ordinaires. Au fond, Robert Gbian n’a pas changé ; il a toujours été un homme du social. Il donne maintenant peut-être un accent politique à ses actions sociales », commente un observateur de la vie politique béninoise. Malgré la discrétion de ses actions, GGR (Général Gbian Robert), comme l’appellent ses sympathisants, semble créer des ennuis à la majorité présidentielle avec son ambition politique naissante. Illustration de cet agacement de la majorité et de son chef, le président Boni Yayi : le départ du gouvernement de Jonas Gbian, frère cadet du général lors du remaniement ministériel intervenu en août dernier. Jonas Gbian avait en charge le Ministre de l'Economie et des Finances et des Programmes de Dénationalisation, portefeuille désormais détenu par Komi Koutché, originaire de la même aire culturelle Nagot que Boni Yayi. Le ministère de la défense est confié à Théophile Yarou, issu de la commune de Bembèrèkè. Une certaine lecture politique du dernier remaniement de Yayi verrait bien une intention de contrecarrer Robert Gbian dans son élan pour 2016. Se démarquer de Yayi La distanciation des relations entre l’actuel locataire du palais de la Marina et le général Gbian étonne plus d’un à Cotonou. En effet, après quelques années au poste d’intendant des Armées, il avait été nommé directeur de cabinet militaire de Boni Yayi fraichement élu 44 – AfriQue Union n° 07
président de la République du Bénin en 2006. Les deux hommes avaient toujours entretenu des rapports cordiaux. Camarades de promotion au lycée Mathieu Bouké de Parakou (nord), ils partagent quelques souvenirs de jeunesse. Elevé au grade de général de Brigade en juillet 2007, Robert Gbian faisait figure d’homme de confiance de Boni Yayi avant son départ à la retraite en 2012. Aujourd’hui, le général reconverti en homme politique ne critique pas publiquement le président Yayi mais les Mouvements de soutiens qui se réclament de lui sont à l’œuvre. Ils ne manquent aucune occasion pour critiquer à coup de communiqués acerbes les ratés de la gouvernance du pouvoir en place. Les couteaux sont presque tirés entre les deux camps. Selon certaines indiscrétions, le refus de Robert Gbian d’apporter sa caution au projet de révision de la Constitution serait à la base de la brouille entre les deux hommes. Cette initiative de modification de la loi fondamentale semble être rangée au placard à cause de l’effritement de la majorité parlementaire. Et si cela n’a pas suffit pour
ramener la sérénité dans l’axe Yayi et Gbian, c’est parce que l’ambition du second est visiblement forte et assumée. Il veut s’affranchir de l’ombre de son ancien patron pour proposer un nouveau projet aux Béninois. Avant de descendre dans l’arène politique, Robert Gbian consulte, écoute et voyage beaucoup. Les mouvements de soutiens en sa faveur se multiplient dans les communes béninoises comme dans la diaspora. Pour une première compétition électorale, l’officier vise haut. Une aventure qui n’est pas sans risque. Ses concurrents sont nombreux et ne manquent pas de parcours. L’ancien Premier ministre Pascal Irenée Koupaki ; l’ex président de la Banque ouest-africaine de développement Abdoulaye Bio-Tchané ; le président du Comité Afrique de l’Internationale socialiste, le député Emmanuel Golou et son homologue de l’alliance l’Union Fait la Nation (UN), Eric Houndété ; Léhady Soglo ; l’ancien ministre Victor Topanou ainsi que Fernand Amoussou, un autre général à la retraite... sont annoncés sur la ligne de départ.
Dans chaque parution du Magazine Afrique Union, Luc Aimé Dansou (plus connu sous le nom médiatique de « Lad ») partage avec les lecteurs l’actualité de certaines figures du monde de la musique, du théâtre, du cinéma et d’autres arts du continent ou de sa diaspora. Il fait sa sélection.
LEONORA MIANO PRIX FEMINA 2013
Grâce à l’Institut français du Bénin, j’ai partagé une soirée avec Léonora Miano. La franco camerounaise qui, l’an dernier a reçu le prix Fémina pour son roman « La saison de l’ombre » (Grasset). Ce n’était pas en tête à tête. Hélas ! Pour elle. Il y avait autour d’elle des enseignants des universités du Bénin triés sur le volet, des écrivains, des professionnels du théâtre et des personnalités du très sélect milieu des arts de Cotonou. Tout le monde n’était pas convié à cette soirée plutôt privée chez M. Luc Fabre, le directeur de l’institut français du Bénin. Mme Fabre s’est donnée le bon plaisir d’accueillir les invités dans une tradition pas totalement française et c’est tant mieux. L’ambassadeur de France et son époux étaient de la partie. Léonora Miano elle, était heureuse. Visiblement. Mais elle a refusé de gratifier les invités d’une chanson lorsque l’écrivain béninois Florent Couao Zotti a révélé qu’elle est une bonne chanteuse. Plutôt timide, cette dame née à Douala en 1973 et qui a déjà signé sept romans. Léonora Miano avait déjà reçu en 2011 le Grand Prix littéraire d’Afrique noire avec « Blues pour Elise » et « Ces âmes chagrines ». En 2006, elle a publié « Contours du jour qui vient », en 2007 « Tels des astres éteints ». En 2012, « Ecrits pour la parole » et « Habiter la frontière ». Comme disait la mère d’une écrivaine sénégalaise, « c’est à partir de ton troisième livre que tu peux dire que tu es écrivain.» Sous cet angle, il y a longtemps que Léonora Miano est écrivaine, alors que son premier roman « L’intérieur de la nuit » est publié en 2005. Il y a seulement neuf ans.
ZEYNAB ELLE LEVE LE VOILE SUR LE 4EME Le prochain album de l’artiste béninoise Zeynab est annoncé pour 2015. Pour l’instant, le produit se peaufine entre le Bénin, la Côte d’ivoire, l’Afrique du Sud, le Nigéria et la France. Fidèle à son style de préparation du public à l’accueil du nouvel album, le staff de l’artiste vient de mettre sur le marché un Best Of. Le disque fait un condensé de certains succès de l’artiste à travers ses trois albums. « Intori » en 2002, « D’un endroit à un autre » en 2004 et « Olukêmi » en 2011. Le Best Of comporte deux titres qui vont figurer sur le quatrième album en préparation. Au total 18 titres dont deux inédits que Zeynab offre aux mélomanes. On retrouve sur ce best of des titres comme « Enfant », dédié à l’enfance et qui a permis à l’artiste de gagner le trophée KORA de la meilleure artiste féminine de l’Afrique de l’ouest en 2005. Trophée qui lui avait été remis à Durban en Afrique du sud. Sur ce Best Of 2014, on retrouve également « Intori », « Ovi », et « Syeléwayo », un titre chanté en langue Cotocoli et qui est souvent demandé par le public togolais. Sur ce nouveau produit, Zeynab chante « Je m’enfuierai » (2002) pour dénoncer le mariage forcé. Si le support donne l’occasion au public de revisiter un répertoire très apprécié de l’artiste, il lève un coin de voile sur le quatrième album de Zeynab. On sait qu’il y a une « salsa » en Nagot ( la langue maternelle de Zeynab, très proche du Yoruba) mais on ne trouve pas ce titre sur le Best Of. Par contre, on découvre en exclusivité « tes je t’aime ». Dans ce titre, Zeynab s’en prend aux hommes qui ont tendance à « regarder dehors ». Ceux qui répètent à leur compagne, à leur épouse « je t’aime, je t’adore » et qui se révèlent être des coureurs de jupon. La seconde exclusivité que l’artiste livre est « Sweet combine ». Un hommage au maestro Gnonnas Pédro. Enorme artiste béninois, aujourd’hui disparu. 46 – AfriQue Union n° 07
JOHN ARCADIUS DES NOUVELLES DE L’ARTISTE Comlan Arcadius Avaligbé ? Connais pas. Mais, John Arcadius, oui. L’artiste. De lui, disons d’emblée: il est un bon chanteur. Un guitariste talentueux. Précédemment basé en Belgique dans les années 90, John Arcadius est de retour au bercail. Au Bénin, son pays natal, il tient à Cotonou un studio d’enregistrement dénommé VOD Record et copréside et organise avec la Suissesse Silvana Moï-Virchaux le « Festival Cotonou couleurs Jazz » qui est à sa troisième édition cette année. Son nouvel album, dont le lancement est plusieurs fois annoncé et reporté est désormais disponible. « OUIDAH BLUES ». Au total 10 titres. Dix mélodies. Dix musicalités. Dix messages. Mais la même voix. Le même timbre de voix reconnaissable dès les premières notes. Du John Arcadius avec des envolées qui tirent leur essence dans les couvents vodou. Attention, l’artiste donne l’impression d’entrer en transe. « Ouidah blues », le titre qui a donné son nom à l’album dénonce le sort qui est réservé aux pythons dans la cité historique de Ouidah. Une ville réputée touristique dans laquelle le python est « vénéré » est victime d’un commerce qui dépeuple la ville de ses serpents respectés. L’artiste chante « Akli », pour appeler à la solidarité autour du « CNHU ». Le centre national hospitalier universitaire de Cotonou où il manque quelques fois le petit matériel pour sauver des vies humaines. L’artiste rend hommage à son oncle défunt dans « Abomey ». On retrouve un artiste très incisif avec le titre « Lègba ». A travers une fable, John Arcadius s’adresse aux hommes. Leçon d’humilité. La grande question que repose cet album reste le rapport de l’artiste à la langue fongbé, sa langue maternelle. Ou bien john Arcadius parle mal la langue ou alors il fait trop de fantaisie quand il s’en sert pour chanter qu’il faut être initié pour comprendre ce qu’il dit. Exemple : « Leko ». Le quatrième titre sur « Ouidah blues ». C’est tout simplement artistique. Pas besoin de comprendre ce que dit l’oiseau pour aimer son chant.
STANLEY NELSON FREEDOM SUMMER, POUR L’HISTOIRE… A 63 ans, ce réalisateur africain-américain vient de livrer « Freedom summer » (L’été de la liberté). Un documentaire qui revient sur un fait d’histoire : l’implication des étudiants dans le combat pour la conquête du droit de vote des africains-américains dans l’Etat du Mississipi. Nous sommes aux Etats unis et le fait remonte à 1964. 50 ans après, l’histoire est encore vive dans la mémoire des témoins. Stanley Nelson affirme récemment dans la presse qu’il veut faire savoir au Blancs et aux Noirs des choses qu’ils ignorent mais dont ils doivent prendre connaissance. On se souvient de son film « Two dollars and a dream » qui raconte le parcours de la première femme noire devenue millionnaire aux Etats-Unis. Cette fois-ci avec Freedom summer, Stanley Nelson retourne dans le Mississipi des années 60. Un des Etats les plus racistes des Etats Unis de l’époque. Véritable Etat policier, en ce temps là, le Mississipi qui comptait 50% de Noirs vivait une ségrégation clairement affichée avec l’inquiétude des Blancs de voir les Noirs avoir les mêmes droits qu’eux. C’est dans cette ambiance qu’un groupe de jeunes gens, des étudiants pour la plupart s’organise. Il reçoit le soutien de milliers d’autres américains y compris des Blancs. Objectif affiché ? Arracher le droit de vote au profit des Noirs dans le Mississsipi. Face à la génération Facebook, MP3, MP4, le réalisateur noir américain estime qu’il faut rappeler l’histoire et dire aux jeunes gens que les situations actuelles ont des origines lointaines. Stanley Nelson est résolument engagé dans la réalisation de films documentaires. Il préfère évoquer des faits réels plutôt que de rêver ou de faire rêver. n° 07 AfriQue Union – 47
MUSIQUE
REGIS KOLE
MUSIQUE
"Here & Now", le nouvel album de Régis Kole Six titres meublent le nouveau disque de Régis Kole sorti le 03 novembre 2014. Enregistré entre Paris et New York, "Here & Now" ressemble à son auteur : passionnément ouvert sur les musiques du monde. Un concentré de soul, du funk, du blues et du reggae. › LÉON A. KOBOUDE
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e nouvel album s’ouvre sur un ton quelque peu engagé avec une musique pop entrainante. Le titre «My whole world is changing» est interprété en duo avec la star congolaise Lokua Kanza. Régis Kole y « dénonce la course infernale aux richesses et regrette la perte des valeurs qu’elle engendre. Une ode aux guerriers de la paix et de la liberté. » Le ton pop revient dans les cinq autres titres de cet album où se côtoient le soul, le funk, le blues, le reggae. "Here & Now" est un résumé de la carrière de ce chanteur passionné et profondément généreux autant sur scène que dans ses chansons. C’est aussi une synthèse de ses influences musicales. Régis Kole, originaire du Bénin a grandi entre le contient africain et l’occident. Son Bénin natal transparaît dans l’album et notamment à travers des titres comme « Agbafafa », « Koklozin » et « Dagbé ». De belles balades musicales enroulées dans la voix chaude de l’artiste qui chante en anglais, et en goun (langue du Bénin). « Régis Kole est un véritable show man. Un artiste habité, qui joue avec passion de tous les codes scéniques. Ses spectacles ne laissent personne indifférent. Quant à ses textes riches et féconds, aux sonorités péné-
trantes, ils célèbrent avec enthousiasme le dialogue des cultures, tour à tour en anglais, et en goun (langue du Bénin) », indique le document de présentation du disque. La sortie du nouvel album est un carrefour dans la carrière de Régis Kolé, chanteur bien connu dans le milieu afroparisien musical. Talentueux, affable et ouvert aux musiques du monde, l’artiste a fait de précieuses collaborations sur ce disque avec Lokua Kanza, Manu Dibango, Patrick Ruffino, et Dominic James, le guitariste virtuose d’Angélique Kidjo. Une prestigieuse palette d’invités qui atteste du sérieux du chanteur. Le parcours de Régis n’est pas singulier mais il est parsemé de succès et de beaux rendez-vous artistiques. Ancien sociétaire du quatuor vocal dénommé Esteem Akapella qui sortit l’album « Akapella Airlines » en 2007, il a entamé une carrière solo qui est marquée par la sortie du disque « Optimistic Soul » en 2009. S’ensuivent des scènes marquantes. « Afrique en Scène », au Bataclan à Paris en 2011 ; Festival Couleurs Jazz de Cotonou en 2013 sur la même affiche que Angélique Kidjo, Baaba Maal, Ibeyi, Henri Dikongué… La promotion de "Here & Now" a déjà pris son envol. Le 12 novembre dernier, Régis était sur la scène du Centre Musical Fleury Goutte D'or Barbara à Paris pour présenter son album. Un concert réussi et qui promet un bel avenir au nouveau disque.
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MUSIQUE
Stanlux a trouvé la bonne voie Artiste chanteur togolais, Stanlux a choisi la musique tradi-moderne pour exprimer son talent. Un choix qui porte déjà ses fruits et convainc les critiques du disque sur le continent africain.
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ans le flot de musiques qui inondent l’Afrique, il faudrait bien avoir un génie pour se faire une place dans les hit-parades. Stanlux a déjà trouvé sa ligne dans le monde musical africain avec une option plutôt osée et assumée. Sa musique met en valeur les sonorités traditionnelles du Togo et d’autres pays de la sousrégion ouest-africaine., « Personne d'autre
ne viendra nous valoriser notre propre culture », se défend l’artiste avec un brin d’engagement militant en faveur de la culture togolaise et africaine. Bien qu’étant une jeune pousse, Stanlux a décroché le trophée du « Meilleur Artiste Traditionnel Africain » à la plus grande cérémonie des récompenses de musiques africaines dénommée KORA AWARDS. C’était le 31 décembre 2012 à Abidjan. Un prix qui a placé la carrière de l’artiste sous la lumière. Il enchaîne désormais des prestations et des featurings dans son pays. De belles occasions pour valoriser son talent. Si sur son premier album intitulé «Espérance » sorti en 2007, une bonne place avait été faite à la variété, son second disque dénommé « Bléwu » disponible, depuis l’année dernière, confirme l’option tradi -moderne de cet artiste. Il est admirateur de la star togolaise King Mensah. « J’adore
beaucoup ce que fait King Mensah car il est vraiment créatif. A la base c’est un reggae50 – AfriQue Union n° 07
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› RÉMY B.
touché par l’épidémie. « Je suis nommé am-
Personne d'autre ne viendra nous valoriser notre propre culture
bassadeur des Kora Awards au Togo. Nous sommes au total 54 ambassadeurs dans 54 pays d’Afrique. Notre mission est d’approcher et d’encourager les structures, les médias et le gouvernement en place, en occurrence le chef de l’Etat à apporter leur aide à travers des dons pour soutenir Médecins sans frontière… Il est tant qu’on agisse nous-mêmes africains ! », explique l’artiste engagé.
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man mais regardez comment il a donné un autre ton traditionnel à sa musique et ça tout le monde ne peut qu’apprécier » témoigne le chanteur dont les débuts dans la musique ont été influencés par les grands de la musique togolaise et africaine Bella Below, Agbotsi Yao, Fifi Rafiatou, King Mensah, Miriam Makeba, Lokua Kanza, Angélique Kidjo. Entre plusieurs dates pour la promotion de son album « Bléwu », Stanlux, de son vrai nom Komi Afélété Bada, se consacre aussi à son nouvel engagement en faveur de la lutte contre Ebola même si son pays n’est pas
Stanlux et MEIWAY
Stanlux et King Mensah n° 07 AfriQue Union – 59
MUSIQUE
Phil Azoumé Jay est de retour
Avec son album « HOUNTO », le chanteur et guitariste ivoirien Phil Azoumé Jay fait un retour gagnant dans le milieu discographique.
vel album de Phil Azoumé Jay a été enregistré dans la capitale ivoirienne et finalisé à Paris. Avec ce disque, Phil retrouve son public ivoirien et africain. Plusieurs concerts sont déjà prévus à Abidjan sous le concept dénommé AZOUME LIVE qui se veut être «un moment de partage de convivialité et une occasion de célébrer la musique dans une ambiance de rock fusion jazz ». Certains titres du disque tournent déjà en boucle sur certaines radios africaines et parisiennes. Phil Azoumé Jay, dans sa jeunesse, a côtoyé son compatriote Alpha Blondy, pionnier du reggae en Afrique. Les deux ont même partagé la passion pour le rock. Le jeune Phil a enchainé plusieurs orchestres d’Abidjan dans lesquels il a bénéficié de l’expérience de Boncana Maïga, Amédée Pierre, Ernesto Djedje, Manu Dibango. Ancien membre du groupe OUA (Orchestre de l'Université d'Abidjan), Phil Azoumé Jay fait une musique qui rassemble différentes générations de mélomanes.
› RÉMY B.
Phil Azoumé Jay est comme un vieux routier qui malgré le succès engrangé dans le passé a encore d’autres ambitions musicales. Au début des années 90, son groupe connu sous le nom de WOODY a fait danser les passionnés de pop-rock en Côte d’Ivoire et dans toute l’Afrique ! Le groupe a su marquer son territoire. Le disque «HOUNTO » est dans la même tendance musicale, mais avec en plus tout le résultat des rencontres artistiques faites par l’artiste qui a fondé en 2002 à Clermont Ferrand en France un autre groupe appelé « AZUME ». Un groupe composé de 5 musiciens et qui est un espace du donner et du recevoir. Ici, Phil Azoumé Jay, tout en découvrant d’autres sonorités, fait vivre ce qu’on peut ranger sous le vocable de « rock africain ». Le rock et le reggae sont les principales influences qui emballent les 12 titres de l’album « HOUNTO » où l’on apprécie les talents de chanteur et de guitariste de Phil Azoumé. Produit par DKM Production basé à Abidjan, ce noun° 07 AfriQue Union – 51
MUSIQUE
WEB MEDIA www.ruemusique.tv,
le pouvoir à la musique urbaine Rue Musique Tv se veut moderne. Accessible sur des appareils mobiles (smartphones, tablettes, ordinateurs…), la chaîne de musique en ligne est une vitrine pour des musiques urbaines ivoiriennes, africaines et caribéennes. › OUMAR NDIAYE
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e fondateur de Rue Musique Tv est l’Ivoirien Daniel Bahi -Zogbo, un diplômé de l’Ecole Française des Attachés de Presse. Passionné de musique et de l’événementiel, il a voulu donner une visibilité supplémentaire aux productions de musique sur le continent. « La chaîne a pour mission première, la confirmation et la révélation de talents de Côte d’Ivoire, d'Afrique et des Caraïbes. Ce média s’engage aussi à être ce tremplin qui aide les talents méconnus à être diffusés dans les grands médias (télévisions et radios nationales, radios commerciales, chaines internationales) », explique Daniel Bahi-Zogbo. La chaîne de télévision diffuse des clips vidéo exclusifs d’artistes de musiques urbaines (Coupé décalé, Zouglou, Rap, Reggae, Variété, Afrobeat, Zouk...) par un classement permanent et interactif (votes des internautes via réseaux sociaux et bientôt par sms). Selon le Fondateur de la chaîne musicale, l’inscription dans la playlist sur www.ruemusique.tv est gratuite. « En clair si vous voulez passer votre clip sur Rue 52 – AfriQue Union n° 07
L’ivoirien Daniel Bahi-Zogbo, fondateur de Rue Musique Tv
Musique TV vous ne payez pas un rond. Mais nous avons conçu des espaces publicitaires qui permettent à l’artiste de mieux se mettre en avant et de réaliser une bonne campagne promotionnelle quand il sort un single ou un album. A partir de 10 000 FCFA (15 Euros) on peut déjà commencer sa promo sur Rue Musique TV», mentionne-til. Rue Musique Tv revendique plus de 20.000 internautes assidus. La jeune chaîne de télévision en ligne est également connectée aux réseaux sociaux sur Internet. Le marketing et la communication autour de cette plateforme s’intensifient. Le développement de Rue Musique Tv est assuré par une équipe motivée. « Très prochainement, nous lancerons à côté de la diffusion en streaming que nous faisons, une diffusion en live de nos programmes, accompagnées de nouvelles émissions », annonce le fondateur de Rue Musique Tv.
THÉÂTRE
Rencontre avec Moudjibath Daouda-Koudjo Rédactrice en chef des magazines Planète de Bayard Afrique
« En Afrique, la culture a besoin d’être financée, nourrie et soutenue » Rédactrice en chef des magazines Planète de Bayard Afrique, Moudjibath Daouda-Koudjo est aussi une femme du monde théâtral au Bénin. Depuis Ouagadougou où elle remplit sa fonction, elle répond aux questions liées à son travail, à l’espace théâtral de son pays et à l’animation de la vie artistique burkinabè. › PROPOS
RECUEILLIS
PAR
HURCYLE GNONHOUE (www.benincultures.com)
Vous vivez, depuis plusieurs années, l’aventure avec les magazines Planète de Bayard Afrique Edition. Depuis presque deux ans, vous en êtes la rédactrice en chef. C’est un autre niveau d’implication certainement ? J’ai connu le magazine Planète Jeune quand il est né en 1993. Et cinq années après, quand Planète Enfant devait venir au monde, j’ai été amenée à travailler avec eux. Et depuis 1998, je suis dans la barque des Planètes qui sont trois aujourd’hui. L’intérêt de l’histoire est qu’au cours de toutes ces années, je n’ai pas occupé les mêmes postes. Ce qui fait que j’ai été rédactrice, j’ai été chargée de communication des magazines, chargée de la recherche de financement et des relations avec les institutions, responsable du bureau sous-régional Afrique (Afrique de l’ouest-Afrique centrale). Et maintenant, je suis rédactrice en chef de Planète Jeune, Planète Enfant et Planète J’aime lire qui est le dernier né. La sortie de Planète J’aime lire est prévu justement pour le 1er novembre prochain. Qu’est-ce qui fait sa spécificité par rapport aux autres revues ? C’est déjà la cible à laquelle ce magazine est destiné ! C’est une cible beaucoup plus jeune que ses ainés. C’est donc pour les enfants de 5 à 8 ans. Ce sont les enfants qui commencent seulement à apprendre à lire, qui commencent à déchiffrer et à qui on propose dès le bas âge de s’approprier le plaisir de la lecture. Pas de façon sco-
laire, mais de façon beaucoup plus ludique, plus plaisante, au sein de la famille ; en accompagnement par lien de fraternité et de partage avec les aînés. Donc un contenu éditorial spécifique à leur intention ? Bien sûr. C’est d’abord un mag-roman. Et c’est exprès parce que nous avons déjà le genre magazine simple avec les autres publications. Nous l’appelons mag-roman puisque effectivement, nous proposons une lecture plus soutenue, une initiation à la lecture plus longue. Donc, il y a du roman, mais il y a aussi de la bande dessinée. Quand on ne sait pas lire, l’image est la première façon d’entrer, la meilleure porte pour entrer dans l’univers des mots, dans l’univers de l’écrit. Au total, on retrouve trois bandes dessinées dans cette nouvelle publication de 44 pages, à peu près le double des pages de Planète Enfants, par exemple. Evidemment, il y a des jeux. Mais pas que des jeux en réflexion, il y est aussi développé des jeux en action. Nous avons d’un autre côté une approche de proposition de connaissances des cultures endogènes. Aussi bien les romans que nous proposons sont ouverts sur toutes les cultures du monde, aussi bien nous proposons d’approcher les cultures africaines par le biais de ce que les anciens nous ont laissé. Des savoirs qui permettent aux lecteurs d’avoir à l’idée, dès le plus jeune âge, que dans toutes les cultures y compris la sienne qui n’est pas beaucoup axée sur
l’écrit, il y a de la richesse à découvrir. C’est juste des pistes de ce genre, ce n’est pas une école, c’est le plaisir ; mais le plaisir sur une base solide, ancrée dans la tradition et ouverte sur le monde. Dans quelle configuration cet ensemble se présente-t-il au jeune lecteur ? S’il faut suivre l’ordre de feuilletage du magazine, la première rubrique s’appelle « Dis-le dans ma langue ». En cinq mots, cette rubrique permet une entrée dans différentes langues du monde. En français, on dit par exemple – bonjour, et dans une langue donnée, voici comment on écrit, on prononce. A la suite de cela, une image propose quelque chose de la culture d’où émane cette langue. Après, vient une bande dessinée humoristique intitulée « Anatole Latuile ». C’est une BD publiée en France mais dont Bayard Afrique a racheté les droits, comme sur d’autre rubriques. Deux pages d’humour, une pause et suit juste derrière« Bouge tes mains » où l’enfant est invité soit à finir un dessin qui est entamé, soit à mener une activité qui lui impose de bouger ou de toucher du papier et des crayons de couleurs ou un stylo. Ce n’est qu’après cela qu’il y a le roman. 26 pages ! C’est l’élément le plus important du magazine. Très illustré, divisé en chapitres avec un résumé qui reprend à chaque fois l’épisode précédant. Maintenant les jeux, une fois le roman fini. On y trouve des jeux scientifiques, littéraires, d’observation, de concentration. Différents n° 07 AfriQue Union – 53
THÉÂTRE
types de jeux qui changent à chaque fois en fait. Ensuite, il y a « Dis papa » qui alterne avec « Dis maman ». Cette rubrique est une question d’un enfant adressée à un parent. Ce ne sont pas des questions techniques, c’est davantage des questions de compréhension simple de la vie de tous les jours.« Pourquoi je suis né ? », « Pourquoi je ne ressemble pas à mon père ? », « Pourquoi mon voisin est-il albinos ? ». Ce sont des interrogations de ce genre. Et c’est vraiment des parents qui y répondent. Cette partie vient aussi en alternance avec une rubrique qui s’appelle « Le sage a dit ». C’est l’instant proverbe où on prend un proverbe d’une culture du monde qui est illustré et expliqué, en relation avec l’univers enfantin ou bien le contenu du roman pour garder une unité dans la lecture. Vient maintenant le dictionnaire « Zoé t’explique » qui est aussi une rubrique illustrée directement en lien avec le roman. C’est pour donner, dès le début de la pratique de la lecture, l’habitude de chercher des mots, le réflexe de ne pas se bloquer sur un mot dont on ne connait pas le sens. Zoé est un personnage de la 3e BD qu’on retrouve en quatrième de couverture du Planète J’aime Lire. Pour bien apprécier cette dernière bande dessinée, il faut pouvoir la lire à haute voix puisqu’il s’y trouve beaucoup d’allitérations, de rimes, de rythmes dans les mots. C’est pour faire comprendre que les mots, ce n’est pas seulement du sens, et le sens qui parle, il n’est pas seulement écrit, il est aussi dans le son, il est aussi dans la tonalité. D’un autre côté, vous êtes aussi acteur culturel, notamment dans le domaine du théâtre. Quand vous rapprochez l’animation de la vie théâtrale du Burkina Faso où vous résidez maintenant à celle du Bénin, quel constat faites-vous ? Ce n’est pas une question facile parce que je suis ici au Burkina Faso pour assumer un rôle qui m’occupe entièrement et qui me prend tout mon temps. Du coup, au théâtre, je me suis réappropriée le rôle de spectatrice et je ne fais que cela. Soit à l’Espace Gambidi, soit au CITO, à l’Institut Français dès que je suis disponible. Je peux dire qu’il y a une chose identique à nos pays, c’est la difficulté. La difficulté qu’ont les passionnés de théâtre professionnel, ayant des initiatives, des idées d’institutionnalisation du métier qu’ils exercent, à avoir du financement pour réaliser cette part de leur rêve qui est aussi un métier. Nulle part au monde, la culture, même si elle a beau nourrir son homme, ne se suffit pas à elle-même. Elle a besoin d’être financée, nourrie et soutenue. Et la responsabilité revient en pre54 – AfriQue Union n° 07
mier à nos Etats. Mais aussi bien au Bénin qu’au Burkina Faso, tous les acteurs regrettent de ne pas être aussi bien soutenus qu’ils l’auraient souhaité. Ils le sont, mais il aurait fallu un peu plus car, c’est ce plus qui leur aurait été essentiel et indispensable puisque l’action retour de la culture nourrit d’autres facettes de l’économie de manière importante. Seulement, les gens ne font pas assez attention à cela, peutêtre. Ça, c’est identique au deux pays. Il y a pourtant une chose qui singularise Ouagadougou. Ce sont ces petites salles qui se sont organisées, qui ne sont pas grandes comme le Carrefour International de Théâtre de Ouagadougou – CITO – dont nous sortons. Il existe, depuis plusieurs années, et fonctionne sous une forme associative et on peut y voir du spectacle cinq jours sur sept sur dix mois de l’année. Les spectacles sont à l’affiche trois à six semaines durant. Certes, ce n’est pas toujours plein, mais il s’y est créé une habitude au sein de la population de sorte qu’il n’y a pas de classe qui soit fidélisée. C’est tout le monde qui y vient. L’exemple semble ne pas être singulier dans cette ville Absolument ! Là, je cite le CITO mais il y en a d’autres, trois où quatre qui ont des programmations qui ne se chevauchent pas. Ils font attention à ne pas s’emmêler les pattes pour que tout le monde puisse circuler. Malheureusement, nous ne sommes pas encore tout à fait dans cet élan au Bénin. Il y a l’Espace Mayton ; je ne cite pas l’Institut français parce que c’est un classique, c’est ancien, c’est là depuis 50 ans ; il y a aussi chez Ousmane Aledji, Artisttik Africa… le studio de l’Ecole Internationale de Théâtre du Bénin avec Alougbine Dine. Il faut aller à PortoNovo pour avoir Ouadada et puis, un peu plus loin dans le pays quelques initiatives pas toujours viables. Donc, ce n’est pas beaucoup, c’est difficile pour chacun des responsables de ces centres de tenir le coup. Je l’imagine terrible et épuisant pour eux, ajouté au fait qu’il n’y a pas le dynamisme constaté ici. La spectatrice que vous êtes désormais voit-elle quantité de spectacles béninois dans ces espaces burkinabés ? Des metteurs en scène viennent. Il y a Alougbine Dine qui a assuré par exemple une formation aux étudiants en théâtre à l’Espace Gambidi cette année. Formation soldée par une création qui a été donnée dans ce même lieu. Là, il revient avec son école à lui à travers sa tournée Migration. Je dirais que parmi les metteurs en scène connus au Bénin, c’est celui que j’ai vu depuis que je suis là, il y a environ un an
et demi. En dehors de cela, les comédiens de manière personnelle viennent fréquemment et sont inclus dans des spectacles ou dans des formations. Des gens comme Hermas Gbaguidi, Mariam Dara et bien d’autres encore sont en visites incessantes de formation au profit des acteurs ici. Au dernier Festival International de Théâtre et de Marionnettes de Ouagadougou – FITMO –, il y avait en dehors des étudiants de l’EITB, un spectacle de Hermas Gbaguidi et celui d’un autre béninois. Donc, le lien existe, la transmission se fait de part et d’autre à ce sujet. Moudjibath Daouda-Koudjo, c’est également l’ancienne Présidente du Conseil d’Administration du FITHEB dont la 12eédition de la biennale se prépare. Quels sont les échos qui vous en parviennent ? J’ai du mal à en parler pour deux raisons. La première est que je me suis effectivement et complètement éloignée du théâtre en tant que critique ou personne impliquée. Je me suis entièrement occupée de ce pourquoi je suis ici à Ouaga. Donc, je n’ai pas eu beaucoup d’informations sur le FITHEB. Par contre, je suis rentrée un mois cet été à Cotonou et j’ai été mise au courant de la nouvelle situation du FITHEB, la nomination du nouveau directeur par intérim, les préparatifs, le changement de date de cette édition. Ce que j’ignore, et qui est très important, a rapport au financement. Est-ce qu’il a eu le financement dont il a besoin ? Parce qu’encore une fois, on se retrouve en face de la question évoquée précédemment, la question du financement de l’action culturelle. Justement à ce titre, entre injonction de l’Etat, principal financier et guéguerre des acteurs culturels, le FITHEB a-t-il toujours une âme artistique et professionnelle ? Je pense que oui ! Sinon, honnêtement, il y a longtemps que tout le monde aurait laissé tomber. C’est parce que le FITHEB a toujours eu une âme et que cette âme survit encore que les gens continuent de se battre. Il y a ceux qui se battent pour, il y a ceux qui se battent contre. Il y a ceux qui se battent pour que ça persiste, pour que ça survive, pour que ça dure longtemps ; et il y a ceux qui se battent pour en tirer le maximum ici et maintenant. Et s’il n’avait pas d’âme, il y a longtemps qu’il serait mort de tous ces combats. Donc, je ne suis pas inquiète. Je suis seulement triste et désolée pour le FITHEB, pour tout ce qui se passe. Je ne suis pas inquiète. De mon temps ou après moi, le FITHEB survivra ! C’est quelque chose de beau dont nous avons besoin, qui nous appartient à tous et il faut qu’on le laisse à ceux qui viendront.
THÉÂTRE
PORTRAIT
Joël Lokossou, atypique comédien ! Au collège, il fut un brillant élève en mathématique. Normal. Il entreprit des études de maths à l'université, mais ne va pas au bout. Joël Lokossou est aussi passionné de lecture et d'écriture. Il aime le football. Et s'il ne pratique pas ce sport, il en est un bon chroniqueur. Un inconditionnel des matches de haut niveau. Il vit du théâtre et... pour le théâtre. Il parcourt l'Afrique et désormais l'Europe. › YVES-PATRICK LOKO (CRÉDIT PHOTO : EMILE ZEIZIG)
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’état-civil renseigne que Joël Lokossou a vu le jour le vendredi 21 mai 1971. C’est Cotonou, la Capitale économique du Bénin qui a vu naître ce comédien. Une ville où il a d’ailleurs découvert le théâtre. Depuis l'école. Et Joël est resté fidèle au quatrième art. Victime collatérale de sa passion débordante pour le théâtre : ses études de mathématiques entreprises à l'Université nationale du Bénin. Celui qui aura tenu en haleine le public de l’Institut français de Cotonou, il y a quelques mois, est un « fou » du théâtre joué par un seul comédien. Il s’est par le passé prêté au jeu et est revenu ré-
cemment à la paillote de l’ex Ccf de Cotonou avec « Cahier d’un retour au pays natal » d’Aimé Césaire. Une représentation qui marque son entrée définitive dans la cour des grands. On dit dans le milieu amical de Joël Lokossou, qu’il sait que « dans la vie, rien n’est jamais définitivement acquis ». C’est pourquoi, l’homme ne cesse de se battre chaque jour pour mériter sa place dans le cercle restreint de ceux qui réussissent. Amoureux des mathématiques, ce qui lui a valu le surnom de « Thalès », Joël Hounhouènou est titulaire
Joel Lokossou jouant la pièce "Cahier d'un retour au pays natal" d'Aimé Césaire. C'était en janvier 2013 au Théâtre des Marronniers à Lyon
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THÉÂTRE
d’un baccalauréat série C. Il est également nanti d’un certificat d’aptitude pédagogique et a été instituteur un temps. Puis chroniqueur. « Joël est un homme extrêmement généreux,
franc et honnête. Fidèle en amitié et très collant aussi. Passionné, il va jusqu’au bout de ses engagements. » dit de Joël, Sophie Mêtin-
Indépendant et ne supporte pas les contraintes et peut être très rebelle parfois.
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Joel Lokossou jouant la pièce "Cahier d'un retour au pays natal" d'Aimé Césaire. C'était en janvier 2013 au Théâtre des Marronniers à Lyon
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houé Dansou. Elle est comédienne et coordonnatrice de la Ligue africaine des professionnels du théâtre – section Bénin. Avec Sophie, le comédien Joël a évolué dans le spectacle « le dernier pas ». Elle avec qui le comédien a notamment monté l’Organisation non gouvernementale Solidarité pour occidentaux en péril (Sbop), pense de Joël, qu’ « il est atypique, car il refuse de rentrer dans les codes ». La française Madeleine Thomas qui a séjourné récemment au Bénin trouve que son ami Joël en tant qu’acteur « a une très grande présence sur scène ». La bientôt septuagénaire pense que Joël est très différencié, qu’il a de la sensibilité et a le contact facile et qu’on peut discuter de tout avec lui. Sophie Mêtinhoué restera dans la même logique et dira que le comédien est très « indépendant et ne supporte pas les
contraintes et peut être très rebelle parfois ». Celui que ses amis qualifient d’« éternel voyageur qui ne supporte pas de rester sur place » est un gros amoureux de la lecture qui trouve dans les poches de son manteau, de la place à ses bouquins au cours de ses voyages. Joël qui vit exclusivement de l’art, continue ses pérégrinations et donne ses spectacles aussi bien au Bénin, en France que dans de nombreux pays.
MÉDIA
AISSATOU KOUROUMA-KOBOR, DIRECTRICE DE PUBLICATION DE WWW.FEMMESAUPLURIEL.COM
« Notre magazine n’est pas dans le concurrentiel, mais dans l’innovation » Cofondatrice du magazine en ligne www.femmesaupluriel.com, Aïssatou Kourouma-Kobor parle du rendez-vous des femmes du monde à travers ce nouveau média lancé en juin 2014. Un nouveau défi pour cette consultante en communication et marketing direct depuis plus de 25 ans, par ailleurs productrice et animatrice d’émissions radio. Durant sept ans, elle a été secrétaire générale de la radio Trait d’Union à Lyon. Dans cette ville, elle a contribué à la création du magazine dédié au tourisme en Afrique, Souffle d’Afrique, dont elle fut rédactrice en chef adjointe. Aïssatou Kourouma-Kobor est aussi présidente de l’association Éveil Djongomas/AFSED, une association regroupant des Sénégalaises de Lyon. › PROPOS
RECUEILLIS
très élargi de collaborateurs : éditrices, journalistes, artistes, Aissatou KOUROUMA-KOBOR Directrice de publication de www.femmesaupluriel.com webmaster, spécialiste en astrologie, conseillère À qui s’adresse le magazine en ligne en image, médecin esthétique, spéciaFemmes au Pluriel ? liste en développement personnel… Comme son nom l’indique, Femmes au Notre volonté est de traiter de sujets Pluriel parle à toutes les femmes, luso- qui touchent toutes les femmes en leur phones, francophones, anglophones… apportant des témoignages et des réféC’est une tribune ouverte tournée vers rences vraies. Parmi les personnes conle monde, vers les autres. Il est le reflet nues qui nous épaulent, nous pouvons des femmes d’aujourd’hui, celles qui citer, entre autres, le docteur Khady Sy voyagent de plus en plus et sont cu- Bizet, la journaliste Claire Renée Menrieuses de tout (cf. « À propos »). Une dy, le caméraman et réalisateur BruEuropéenne, une Africaine, une Asia- neau Leuta. tique ou une Américaine pourra y trouver sa « jumelle » à l’autre bout de la Que trouve-t-on de différent dans ce planète au travers de nos articles. Notre nouveau média en ligne ? désir est de mettre en avant tous les Femmes au Pluriel n’est pas dans le talents féminins, au-delà des conti- concurrentiel, mais dans l’innovation. nents, des communautarismes, des pré- Nous préférons donner à débattre de jugés. « tout ce qui nous rapproche » plutôt que de pointer les choses qui divisent. Qui sont les principaux animateurs de Comme tout magazine, nous traitons de ce magazine en ligne ? sujets classiques et variés, mais en y L’aventure Femmes au Pluriel a débuté apportant un regard culturel et une avec six personnes dont cinq femmes. autre forme rédactionnelle. En quelques semaines, l’équipe s’est Nous avons inclus une rubrique spéciétoffée et dispose désormais d’un panel fique sur le développement personnel
PAR
OUMAR NDIAYE
qui accompagne nos lectrices (mais également nos lecteurs) à explorer des nouvelles pistes pour évoluer dans notre société actuelle qui est en pleine mutation. Hors de toute forme de prosélytisme, nous traitons également de la spiritualité avec un angle d’approche particulier, et qui laisse à chacun la possibilité de faire jouer son librearbitre. Notre rubrique astrologie est traitée avec humour et de façon décalée par Sirius. Elle a vraiment sa propre écriture et son style. Femmes au Pluriel est un magazine fluide, accessible et très lisible par un subtil mélange de textes, photos et vidéos informant nos lectrices de façon conviviale. Une nouveauté pour cette rentrée ? Ce sont justement les vidéos que nous produirons de plus en plus en partenariat avec l’équipe de Mosaïque Afro. Depuis le mois de septembre, Femmes au Pluriel propose une interview vidéo par semaine, réalisée exclusivement pour notre magazine. Vous trouverez également de plus en plus de clips vidéos de pays différents, car les internautes en raffolent, mais aussi de teasers de films, etc. n° 07 AfriQue Union – 57
ITINERAIRE PORTRAIT Nathalie Fanfant, symbole de la diversité La politique couvait en elle et le déclic l’a propulsée au secrétariat national de l’UMP. Élue conseillère de Paris, Nathalie Fanfant vogue bien dans les eaux parisiennes grâce à son engagement et sa vision pour la France. › STÉVYNE N’ZABA
U
ne tête rasée, un visage jovial, le sourire vrai. Nathalie Fanfant, âgée de 43 ans, conseillère de Paris. Une belle reconnaissance pour l’ultramarine qui se dit fière et honorée de tout cette considération que les Antillais et Africains lui vouent pour son parcours. Sans doute parce que le legs du père a fini par se manifester chez cette élue du 20e arrondissement. La politique couvait dans les gènes de la fille de Léon Sainte-Rose (un des initiateurs de l’Organisation de la jeunesse anticolonialiste martiniquaise) et l’éruption provoquée par sa rencontre, en 2006, avec Jean-Jacques Giannesini, patron de l’UMP du 19e Arrondissement de Paris. La coulée de militantisme est encore contenue dans les limites de la droite où, selon Madame la conseillère, son plus beau souvenir reste celui de sa rencontre avec Nicolas Sarkozy, lors du meeting au gymnase de Jappy (10 février 2014) pour la campagne des dernières municipales. Nicolas Sarkozy aurait lui-même demandé à s’assoir à ses côtés ! Nathalie Sainte-Rose (de son nom de jeunefille) a rejoint la métropole en 1989 pour y poursuivre ses études et ne la quittera plus jamais. Elle y fait sa vie, se marie avec Thierry Fanfant, un musicien de renom, et met au monde ses trois enfants. Diplômée en communication politique et publique, elle travaille dans le secteur du tourisme, jusqu’en 2006. Sa rencontre avec Jean Jacques Giannesini modifie son destin. Elle a de suite le déclic et se dit qu’elle doit s’engager en politique pour donner un avenir meilleur à ses enfants ! C’est sans aucune difficulté, qu’elle se fraie un chemin dans le sillon de droite, affirmant 58 – AfriQue Union n° 07
n’avoir jamais rencontré le moindre problème de discrimination, avoir été bien accueillie et soutenue, que ce soit par Jean-François Copé qui, en 2011, l’a nommée secrétaire nationale, ou par Nathalie Kosciusco-Morizet qui lui donne toute sa confiance lors des élections municipales. Au demeurant, Nathalie Fanfant est en perpétuelle recherche de savoir. Elle a repris depuis peu les chemins de l’une des plus grandes écoles de commerce : ESSEC Business School. Son engagement est aussi social ! Parallèlement à la politique, Nathalie Fanfant s’investit aussi dans le secteur associatif. Elle est membre du conseil d’administration de la section parisienne « Tous créoles ! » Une association qui « entend œuvrer afin de per-
mettre à celles et ceux qui composent cette communauté d’apprendre à mieux se connaître et à se respecter, et ce dans leurs différentes singularités. (…) « Tous Créoles ! » entend contribuer de façon vigilante et par tous les moyens à la défense des droits de l’Homme, à la lutte contre toute expression ou manifestation de racisme, de xénophobie ou de discrimination de tous ordres ». Dès lors, son engagement ne peut que se traduire en actes tendant à la réalisation de son souhait le plus cher : voir une France solidaire, un Hexagone rayonnant, conquérant et surtout respecté. En effet, Nathalie a sa vision de la France :
« Il me semble que la France, 5e puissance mondiale, mérite de garder son rang dont le gouvernement actuel semble vouloir faire tomber. Il n’est pas acceptable qu’aujourd’hui les créateurs d’entreprises soient quasiment dégoutés de mener à bien leurs projets sur le
sol Français et fassent le choix de partir à l’étranger. Il est inacceptable qu’à la fin de leurs études, les jeunes fassent le choix de s’expatrier parce que l’avenir qui leur est proposé leur semble trop sombre. Il est inacceptable que les Français ne puissent se soigner correctement. Il est inacceptable que nous soyons aujourd’hui écrasés d’impôts et qu’il faille soit demander un étalement des
paiements, soit faire un prêt ou vendre des biens pour payer ses impôts ». Selon elle, Nicolas Sarkozy voulait changer la donne lors de son deuxième mandat et permettre aux Français d’être épanouis professionnellement, leur donner le droit d’entreprendre, de vivre en sécurité, de pouvoir se loger ou d’être propriétaire. Vivement alors le retour de Nicolas. En effet, pour Nathalie avec son come-back, Sarkozy apportera le soulagement, l’apaisement, qui manquent tant dans les rangs de L’UMP. « Son retour
permet également à la droite d’être de nouveau audible. Son autorité naturelle, son expérience, son énergie, redonneront aux français de l’espoir en l’avenir ».
ITINERAIRE
SPORT & MODE Konaté Mamadou, créateur de la marque « K’MAD » Installé à Marseille en France, Konaté Mamadou a lancé la marque de vêtements « K’MAD ». C’est une marque de sport qui a un avenir prometteur. › OUMAR NDIAYE
A
32 ans, le jeune Mamadou a réalisé son rêve. Mais il garde toujours une forte ambition : développer sa marque estampillée « K’MAD » (diminutifs de son nom et prénom : Konaté Mamadou).
Créée sous le concept du « Moding Sport », cette marque offre une variété de vêtements de sport bien taillés. C’est une sorte de parfaite symbiose entre la mode et le sport. L’originalité des créations de Mamadou est bien là. Le lancement de la Mamadou présentant ses créations marque est la concrétisation d’un rêve du créateur qui avait toujours voulu inventer une ligne de vête- du groupe ivoirien Magic System dont les ment qui rassemble des consommateurs de membres portent fièrement les créations de plusieurs catégories sociales. « K’MAD est Mamadou. Un coup de pouce qui produit une marque de sport avec des produits pour déjà ses effets sur le plan publicitaire. le grand public. Des vêtements qui valoriAvant de poser, à Marseille en 2006, ses sent le style sport. Mon objectif, c’est de valises remplies de modèles et de ciseaux, toucher le grand public (sportifs de haut Mamadou a été à l’école de la mode. D’abord niveau comme de simples consommateurs à Abidjan où il apprit les notions élémenfans de sport », explique Mamadou. A trataires vers sa boutique en ligne de la couture. Il enchaîna ensuite des stages (www.kmadshop.com), il touche sa cible de formation en Tunisie et en Chine en 2004 principalement basée en France. Les caret 2005. Des formations et surtout des rennets de commandes se remplissent bien et le contres qui façonnent les créations du stycréateur-entrepreneur a l’ambition de conliste. Avec sa détermination, Mamadou quérir le marché africain grâce une stratépose les fondations de l’empire « K’MAD gie qu’il n’a pas encore dévoilée. » dont on entendra sûrement parler avec Pour sa promotion, la marque « K’MAD plus d’échos sur le continent africain et en » bénéficie de la lumière et de la popularité Europe dans les années à venir. n° 07 AfriQue Union – 59
LITTERATURE
Steve BODJONA une excellente plume
Diplômé en droit public et ambassadeur du Togo au Japon depuis 2010, son Excellence Steve Bodjona est aussi auteur de plusieurs ouvrages littéraires. Dans ses œuvres, on y retrouve la finesse et ce sens de la subtilité, deux qualités également célébrées en diplomatie, sa passion professionnelle. › FOUSSÉNI SAIBOU
S
teve A. D. Aklesso BODJONA est né le 21 septembre 1982 à Aného, ville côtière du Togo, d’où est originaire sa mère. Il est natif du canton de Kouméa dans la préfecture de la Kozah, localité située à plus de 400 kilomètres au Nord de Lomé. Il est la preuve vivante, que les systèmes éducatifs africains peuvent produire des cadres de très bonne qualité. Steve Bodjona est en effet, un pur produit du système éducatif togolais. Après son Baccalauréat en 2001, il s’inscrit à l’Université de Lomé et obtient sa maîtrise en droit public. Sésame qui, en 2005 lui a ouvert les portes de l’Ecole nationale d’administration du Togo. Après deux ans d’études de diplomatie, il entame une carrière professionnelle au ministère des affaires étrangères du Togo. Depuis octobre 2010, date d’ouverture de l’ambassade du Togo au japon, il assume les fonctions de représentant du Togo auprès de ce pays asiatique. Passionné de littérature, il souligne que ces premiers pas dans le monde de l’écriture remontent à ses années de collège. A l’époque, le collégien Steve était un inconditionnel des activités culturelles. Aujour60 – AfriQue Union n° 07
d’hui, malgré les multiples charges que lui impose sa mission, l’écrivain-poète togolais, trouve du temps pour écrire. Il a, à son actif, 10 ouvrages dont 7 recueils de poèmes. « Il est vrai que la profession est très prenante surtout lorsqu’il s’agit de diriger une mission diplomatique, mais lorsque vous êtes attaché à une chose, vous vous laissez facilement brûler par le feu de la passion qui vit en vous. », confie le diplomateécrivain. Sa passion pour la mission à lui confiée au Japon, trouve son équilibre dans la joie que lui apporte l’écriture. Il se laisse le plus souvent bercer par les faits de vie, les faits de société. C’est en partant de ses réflexions sur tout ce qui l’entoure que ses écrits prennent forme. Les réalités sociales de son pays et de l’Afrique se ressentent dans nombre de ses parutions. Son dernière livre est intitulé « Les ronces de l’amour » et publié en août 2014. Il s’agit d’une nouvelle de 88 pages subdivisée en deux parties. Le récit tourne autour du personnage nommé Jonas, un riche homme d’affaire et de son épouse infidèle, à l’esprit matérialiste trop poussé, Mira. Cette dernière tente, par empoisonnement d’ôter la vie à son mari. Malgré l’éloignement, le divorce et l’assouvissement de sa vengeance, Jonas n’arrive pas à oublier cette Mira qui réapparait dans sa vie quelques années plus tard à un moment où il renouait avec Rassilda, son premier amour à qui il avait tourné le dos pour sa désormais ex-épouse. Vont alors se succéder plusieurs évènements et retournements de situations que partage Jeannine, sœur de Jonas et
narratrice dans la deuxième partie de l’œuvre jusqu’au dénouement final de l’histoire. Au nombre de ses recueils, « La vase de diplomates ». Avec cet ouvrage, Steve a voulu produire du tout en un, en faisant converger ses deux passions que sont, la diplomatie et l’écriture, notamment la poésie. Poème après poème, un vers à la suite de l’autre, il explique en s’appuyant sur l’art poétique, les différents contours de la diplomatie qui tient parfois du sacerdoce, alors que nombre de personnes en ont trop souvent, une conception plutôt glamoureuse. Sa passion pour le japonais l’a poussé à écrire dans cette langue. D’ailleurs, deux de ses œuvres sont en japonais. Son choix de publier en japonais tient à deux raisons. D’abord parce qu’à travers « Kibou no beru » ou voile d’espoir et « Mousou » ou rêverie, il s’adresse exclusivement au public japonais. Ensuite parce que ces œuvres ont été publiées en soutien à sa mission de promotion du Togo au Japon et de renforcement des bonnes relations qui existent entre les deux pays. Maitre Joseph Kokou Koffigoh, ancien premier ministre de transition du Togo, luimême écrivain-poète, a vu juste lorsqu’il déclara au sujet du jeune auteur : « Steve
Bodjona fait partie de la nouvelle génération de poètes africains partagée entre la désillusion d’un continent encore à la traine, malgré son jubilé d’or, et l’espérance qu’un soleil nouveau et plus prometteur viendra remplacer le soleil des indépendances. ».
DIASPORA
L’Ofad mobilise les femmes entrepreneures
Suzanne Bellnoun - Présidente Femmes Africaines de la Diapora
L’Organisation des Femmes africaines de la diaspora (Ofad) s’investit dans la promotion de l’entreprenariat féminin. La cause mobilise les partenaires de cette association qui est déterminée à faire entendre sa cause › BEN KOUASSI
L
a Camerounaise Suzanne Bellnoun vit en France depuis de nombreuses années. Ancienne employée dans le secteur hôtelier, elle s’active maintenant dans la formation en entreprenariat des femmes issues de l’immigration africaine. « Il ya du
potentiel, mais il est important de créer les conditions idoines pour libérer ce potentiel, le fructifier. Créer les conditions revient à former les femmes issues de l’immigration afin qu’elles soient des entrepreneures avisées qui puissent bénéficier de la confiance des partenaires importants et des banques », indique Suzanne Bellnoun, présidente de l’Organisation des femmes africaines de la diaspora (Ofad).
Selon l’Ofad, l’image de l’entreprenariat féminin n’est pas valorisée alors que son dynamisme peut être source de création de richesses, dans ce contexte de difficultés économiques en France. «Les femmes afri-
caines de la diaspora représentent environ 50 % des migrants. Elles transfèrent autant d’argent que les hommes et même plus que les hommes dans certains pays. Elles représentent 40% le nombre de celles qui ont essayé de créer une activité dans le pays d’origine et 75% ont connu un échec mais 80% voudraient encore essayer l’aventure. Malgré ces chiffres, elles sont peu visibles avec un potentiel ignoré et donc inexploité », note un document publié par l’Organi-
sation des femmes africaines de la diaspora. Déterminés à faire bouger les lignes, l’Ofad et le Club des africaines entrepreneures d’Europe (Claee) se mobilisent pour la valorisation des compétences de leurs membres. Les deux associations ont organisé, avec l’appui de plusieurs partenaires, la première édition du Forum Economique et Entrepreneurial des Femmes Africaines de la Diaspora. C’était du 30 septembre au 1er octobre 2014 dans les locaux de l’Ecole Nationale d’Administration (ENA) de Paris. Des femmes d’affaires et des milieux associatifs, aussi bien d’Afrique que d’Europe et des représentants de plusieurs organismes de soutien à l’entreprenariat ont participé au forum. « Les difficultés liées aux recherches de financements pour des projets ont amené les participantes à formuler des recommandations qui concourront à la visibilité des compétences des femmes africaines de la diaspora. La formation en montage de projet, le plaidoyer auprès des institutions de financement et surtout l’élaboration d’un annuaire des femmes africaines de la diaspora précisant leurs compétences sont entre autres initiatives prévues dans les années à venir. », résume la présidente de l’Ofad qui a annoncé une réunion de restitution des recommandations du forum prévue pour novembre 2014. Des responsables de plusieurs institutions (ministère français des Affaires Etrangères, l’Agence française de développement, …) et représentations diplomatiques africaines à Paris seront les principaux participants à cette réunion de restitution. L’Ofad compte une vingtaine d’associations. Elle a l’ambition d’étendre ses actions dans les pays d’origine des femmes de la diaspora. « Il faut noter que les pays africains
n’offrent pas suffisamment de facilités aux femmes de la diaspora qui ont des projets de développement sur le continent. Elles ont l’ambition de participer au développement de leur pays mais leur déception est souvent grande quand elles constatent tous les obstacles… Nous avons prévu donc d’aller sensibiliser les autorités africaines sur cette réalité qui bloque certaines parmi nous », a annoncé la présidente de l’Ofad. n° 07 AfriQue Union – 61
POINT DE VUE Dans cette rubrique, nous publions une Tribune critique sur le processus d'intégration en Afrique conduit par les Institutions
L’Union africaine et le syndrome du Titanic Par FRANCIS LALOUPO, Journaliste, éditorialiste et enseignant en géopolitique
L
’affaire se murmure, et
africain sur le continent. Et
Pire que rien, cette présidence
c’est à voix basse que les
après ? Rien. Après s’être en-
se révèle comme l’absence de
commentaires sont distil-
tourée, à la manière d’une ad-
toute chose. Nkosazana Dlami-
lés, partagés, parfois refoulés.
ministration
d’une
ni-Zuma est-elle dépassée ?
Jusqu’ici, depuis l’élection en
garde rapprochée de fonction-
Incompétente ? Fantasque ?
2012 de Madame Nkosazana
naires sud-africains, Nkosazana
Les qualificatifs fusent, se multi-
Dlamini-Zuma à la présidence
Dlamini-Zuma est devenue la
plient,
de la Commission de l’UA, nul
présidente la plus invisible et la
l’inquiétude enfle au siège de
n’a encore osé, au sein de l’ins-
plus détachée des dossiers que
l’Union. On est bien loin des cri-
titution,
la Maison de l’Afrique ait jamais
tiques porteuses d’une salutaire
ment le lent glissement de la
connue…
dynamique
Maison de l’Afrique
vers le
Abonnée aux discours préten-
adressées à l’UA. Aujourd’hui,
l’inquiétude
dument anti-impérialistes d’un
c’est au sein même de l’organi-
est palpable dans les couloirs
autre âge et qui n’engagent
sation panafricaine que l’on
du siège de l’UA à Addis Abe-
que ceux qui les écoutent, plus
s’interroge sur sa raison d’être
ba, et aussi chez les respon-
soucieuse des « honneurs dus à
et son avenir. A mesure que se
sables politiques de divers pays
son rang » qu’aux résultats de
déroule l’étrange mandat de
membres effarés par cette «
sa mission, artiste sans éclat de
Nkosazana
non-présidence ». Même les
l’affichage et de la représenta-
syndrome du Titanic s’empare
autorités sud-africaines se font
tion lors les rencontres interna-
des membres et des fonction-
discrètes, à propos de cette
tionales, la nouvelle présidente
naires de l’UA. Juchée sur le
présidence, après avoir organi-
de la Commission de l’UA est
pont avant du vaisseau, la pré-
sé des années durant, au profit
parvenue, en l’espace de deux
sidente adoubée par l’Afrique
de leur compatriote, la con-
ans, à réduire cette fonction à
du Sud continue de diriger ce
quête de ce poste symbolisant,
une étourdissante démonstra-
qui reste de l’orchestre. Jusqu’à
à leurs yeux, le leadership sud-
tion du vide et de l’abstraction.
quand ?
néant.
dénoncer
Pourtant,
62 – AfriQue Union n° 07
publique-
parallèle,
s’entrechoquent.
Et
traditionnellement
Dlamini-Zuma,
le