Gianluca Gamberini // Cinecittà • Super vielle // Colección de Silencios Asathal // Churches • Clément // Corps/Espace • Lauriane Pigot
Francisco • Anouck Gérardin // 34’22’’
HBA L e W ebzine
de la
P hotographie A rgentique
n°1, Automne
Photo-Argentique.com
2012
// HBA -Le Webzine de la Photographie argentique
// Edito Un Journal pour l’argentique Face à la fulgurante montée du numérique dans la pratique photographique actuelle, force est de constater que la photographie argentique trouve encore sa place auprès de nombreux artistes et photographes. Dans sa volonté de promotion de la pratique argentique, l’association Atelier Photo Argentique lance ce magazine trimestriel, afin de faire montre de ces approches variées de la photo sur pellicule. À travers des portfolios, dans un premier temps, puis des articles théoriques, des comptes-rendus d’expositions, des interviews... Nous voulons tenter de balayer l’immense champ de ces pratiques diverses liées à l’argentique. Ce webzine ce veut gratuit, collectif et participatif, étant voué à muer et se développer au cours du temps. La règle est simple : chaque personne publiant un portfolio se verra proposer d’écrire un texte sur le travail de quelqu’un d’autre, dans un souci de lier profondément le texte à l’image, tout en créant une réflexion collective autour de celle-ci. Vous pourrez découvrir dans ce numéro plusieurs portfolios de jeunes photographes, issus de divers horizon. HBA est un webzine ouvert, où chacun est le bienvenu afin d’écrire ou d’exposer ses images dans nos pages. Toutes les informations pour nous contacter à la fin de ce magazine.
DavidF & Clément Gérardin
Sommaire : · Edito............................................3 · Gianluca Gamberini // Cineccità..................................5 · Francisco Supervielle // Colección de Silencios...........18 · Anouck Asathal // Churches..................................30 · Clément Gérardin // Corps/Espace..........................44 · Lauriane Pigot // 34’22’’.......................................54
Edité par le site internet Photo-Argentique.com
En couverture : Gianluca Gamberini, Cineccità #55, Rome, 2012. Photographie extraite de la série Cineccità. ©Gianluca Gamberini
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C I N E CITTĂ€
Gia nluca Gambe ri ni 4
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// Exposition - Portfolio
C
’est pendant les Rencontres Internationales de la Photographie que l’on a pu découvrir le travail de l’italien Gianluca Gamberini, jeune photographe de trente trois ans, qui exposait, en marge des Rencontres, sa série Cinecittà.
À travers une sélection d’images très construites, réalisées au moyen-format argentique couleur, Gamberini revisite les hauts-lieux de tournage Italien, les décors du studio de cinéma Cinecittà, à Rome. Ce « Hollywood italien », aujourd’hui pratiquement à l’abandon, représente une immense surface couverte de faux immeubles, ranchs, temples et autres amphithéâtres de carton-pâte, une variété de lieux dont on aura pu déjà voir, à quarante ans de distance, la déliquescence et la faillite précoce, dans le célébrissime Mépris de Godard.
C’est ici un réel « envers du décor » qui est mis à nu. Par l’artifice du cadrage, Gamberini sait à la fois montrer la façade massive d’un temple grécoromain, et les échafaudages qui soutiennent par l’arrière cette structure vide. Il cristalise dans ses photographies une constellation de fausses villes du Far West, de fausses cités antiques et ses amphithéâtres, de fausses façades XIXème, qui se côtoient et se mélangent dans un seul et immense lieu. L’endroit, que la présence humaine a déserté, est également vide de sens, à présent qu’il a perdu toute fonctionnalité.
“L’architecture n’est ici qu’un simple squelette d’échafaudages rouillés”
Réalisée en marge de ses études et de son travail d’assistant-réalisateur pour le cinéma, cette série de Gamberini pose un regard très analytique, très construit, sur ces lieux en déshérence. Il développe un point de vue frontal et complexe du lieu, et joue avec les formes de cette « fausse architecture », dans la lignée des Becher et de l’École de Dusseldorf, dont il se revendique ouvertement.
À travers ces images, le photographe convoque une certaine nostalgie, qui n’est pas sans rappeler le romantisme du XIXème siècle, les vues du Louvre en ruine, et ces « fausses ruines romaines » dont la bourgeoisie agrémentait les parcs de ses grandes propriétés. L’architecture n’est ici qu’un simple squelette d’échafaudages rouillés, sur lesquels une mince peau d’apparat dissimule mal le vide qu’elle est sensée cacher. Les images se font dès lors métaphore d’une société occidentale qui, à travers ses différentes époques condensées à Cinecittà, n’est bâtie que sur le paraître, un décor de carton-pâte derrière lequel on ne trouve que de frêles poutrelles rouillées, et le vide... Clément Gérardin
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Gianluca Gamberini
expose Cinecittà du 29 Octobre 2012 au 19 Janvier 2013 du Lundi au Samedi - 12h/19h au STUDIO DU PATIO-OPÉRA, 5 rue Meyerbeer 75009 Paris Plus d’info sur : www.gianlucagamberini.com contact : info@gianlucagamberini.com toutes les photos ©Gianluca Gamberini
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// Portfolio
C ol e cc i ón d e S i l e n ci os Fra nc is c o Super vi e l l e
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ne « Collection de Silences ». C’est bien là ce que met en jeu Francisco Supervielle, photographe d’origine uruguayenne, étudiant au « 75 » de Bruxelles.
L
Images urbaines, villes aux façades pesantes, quasi désertes, mais dans lesquelles le spectateur ressent un fort sentiment d’espace et d’ouverture, se mêlent à des portraits intimes, ou l’individu assis et immobile, est à la fois dans une posture d’attente et de désœuvrement. Le « Silence » est donc bien ici spatial, physique. Supervielle saisi l’instant flottant, il collectionne les intervalles vides d’une société qui se veut toujours en mouvement, toujours en fonction. La ville est chez lui la même que celle d’Atget, à la fois vide et habitée, ou le corps, bien loin dans l’image, n’est pas réellement à sa place.
“Le silence est ici spatial, physique.”
’éloignement nous oblige à laisser derrière nous des relations, des lieux, et nous gardons des sentiments et des images qui deviendront partie de nos souvenirs. Ces photographies ne documentent pas un pays ou une ville, mais une partie très intime qui appartient à chaque individu. Parfois cette intimité, renvoie à un lieu précis.
Ceci est une histoire d’aller-retours qui nous amène à redécouvrir un milieu à peine oublié. L’éloignement nous éclaire, et permet d’aboutir à une sorte de vision plus personnelle de ce qui a marqué notre passé. Francisco SUPERVIELLE
Ces images évoquent également le travail de Gabriele Basilico, dans cette intense sentiment d’ouverture et de vide haptique de l’espace urbain, où la proximité entre les lieux se construit par des porosités formelles, et non plus géographiques. Mais ici, les choses baignent dans une sorte de quiétude surréelle, un instant statique et silencieux, où l’être et le lieu ont perdu toute fonction. Clément GERARDIN
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Francisco Supervielle
expose à la Maison de l’Amérique du 7 au 21 février 2013 Latine, 27 Rue du Collège 1050 Bruxelles. Vernissage le 7 février à 19h www.franciscosupervielle.com toutes les photographies ©Francisco Supervielle
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// Portfolio
C H U RC H E S Anouck Asath a l
La Lumière. Le fondement même de l’image photographique. C’est bien là que réside tout l’art d’Anouck Asathal qui, à travers sa série « Churches », fait surgir de l’ombre statues et architectures religieuses, libérées un instant de leur prison nocturne et capturées par les grains d’argent de la pellicule. Par l’infinie subtilité du clair-obscur, évocation inévitable de la peinture d’un Caravage ou d’un de La Tour, Asathal fait jaillir la lumière des statues elles-mêmes, dans un intense halo de lumière. Et derrière l’évidente clarté des vierges et des tuyaux d’orgue, se dévoile peu à peu une myriade de détails, de dorures et d’encorbellements, qui peu à peu se diluent dans l’inéluctabilité de l’ombre. C’est la lumière encore qui accentue la douceur des statues, les visages ronds et les drapés délicats, les brillances et les reflets, dans un contraste définitif avec la rigidité titanesque de leur écrin architectural. Anouck Asathal transfigure ces églises éminemment Baroques par son regard Classique, au sens pictural du terme. Cette influence de la peinture classique ne s’arrête pas là. Il laisse également ses marques dans le travail de composition de l’image. Contre-plongée systématique et cadrage centré magnifient les statues et l’architecture, brouillant les repères et les échelles. Une puissance formelle renforcée par l’usage du noir et blanc. Le regard d’Anouck Asathal se distingue également par l’approche fragmentée qu’il propose de ces églises. Si les photographies trouvent ensemble leur pleine cohérence, elles ne visent aucunement à représenter spatialement le lieu de culte. Elle prélèvent bien au contraire un ensemble d’éléments religieux signifiant, tout en les extrayant de leur contexte. Et ces éléments ne sont pas anodins. Asathal se concentre essentiellement sur les objets votifs, vierges et autres statuettes saintes qui, envisagés dans leur singularité, acquièrent une individualité forte, les faisant ressortir du marasme ornemental dont elles ne sont originellement qu’un composant. Mais si le foisonnant décor cultuel glisse au second plan, il n’est pas pour autant exclu de la photographie.Après un premier coup d’oeil à la statue éclatante de lumière, le regard du spectateur va se perdre imperceptiblement dans les demi-ombres, qui recèlent quantité de détails, et que le choix du moyen-format argentique permet à merveille de conserver. Clément Gérardin
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Anouck Asathal
prochaine exposition prévue dans le cadre de Marseille-Provence, Capitale de la Culture 2013, en décembre 2013 en collaboration avec l’INSERM. plus d’info : anouckasathal.ultra-book.com contact : bartsch73@yahoo.fr toutes les photographies ©Anouck Asathal
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Corps / Espace Clément Gérardin
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// Portfolio
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abord, il faut marcher. Partir d’un centre, bifurquer, emprunter une voie de chemin de fer. Se laisser guider par un itinéraire apparemment connu. Le trépied pèse lourd. Le corps est tendu, à la recherche d’un juste point d’équilibre entre le poids de l’appareil sur le dos et la lassitude des jambes. Passer sous une autoroute. Les graviers crépitent et raclent sous les semelles. Arrivée.
Nous sommes dans ce que nous appelons une Z.A. Zone d’Activités, zone industrielle, zone essentiellement inhabitable. Que se passe-t’il quand il n’y a plus d’activités ? Nous sommes un dimanche, on pourrait être un autre jour. Une semaine ne semble pas suffisante pour remplir ces lieux. Rejetés en marge de la cité, ces espaces – ces zones - sont des îlots de migrations temporaires. Parpaings, plaques de tôle, constructions pré-fabriquées, sans doute dans une autre zone d’activité, un peu plus loin. Ces lieux portent toutes les traces de l’urbanisme moderne. Si les bâtiments marquent la promesse d’une fonctionnalité extrêmement rationnalisée – pensée pour l’activité humaine, donc – ils restent hermétiques. Sans possibilité de s’y projeter, le paysage reste illisible. Désert humain. Faute de contenu imaginable, les constructions deviennent des enveloppes. Soit des formes, des sculptures émergeant de la friche, « zone blanche » qui les entourent.
Il m’indique où me positionner, me conseille une série de mouvements. D’essayer. Mon pull est orange. Pour qu’il contraste avec le paysage, j’ai enlevé mon manteau ; le vent me glace. Il y a peu de lumières, le mistral fait bouger la végétation : je dois me figer quand les bourrasques cessent. Comme ses autres modèles, il m’a placé loin dans le champ ; je me tords pour essayer de l’entendre, mais les mots sont avalés par les courants d’air. J’ai laissé mon portable dans mon manteau. Nous finissons par communiquer par gestes.
“Le corps réactive ici sa propre conscience de l’espace par le geste” Peut-on habiter un tel espace ? Utiliser son corps pour tenter de le couvrir ? Le recoloniser ? Il y a une incompatibilité corps/espace lors de la prise de vue. Il y en a aussi une dans l’image. Le corps mime, se colle, mais se maintient malgré tout dans un entredeux. Il réactive sa propre conscience de l’espace par le geste. Il continue l’architecture, la végétation. Mais, pourtant, en essayant de s’y fondre, il s’en détache irrévocablement. Comme les bâtiments construits en bordure de la ville, l’homme reste à l’écart. Finalement, ces photographies nous mettent face à un échec : celui du dialogue entre l’humain et l’environnement qu’il s’est créé. Dans la solitude de ces images, nous sommes des arpenteurs de notre propre désert. Lauriane Pigot
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Clément Gérardin
galerie Internet : http://bit.ly/UpVart contact : gerardin.clement@gmail.com toutes les photographies ©Clément Gérardin
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Lauri ane Pi got
« Le plus grand est l’espace : il reçoit toutes choses, Le plus prompt est l’esprit : il court à travers tout. » Thalès de Millet
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’une des forces de la photographie est d’accorder une place toute particulière à l’illumination des objets du monde et d’enregistrer durablement la manière dont lumière et matière se complètent à la vue d’une manière presque mystiquement performative.
avaient été minutieusement gommées : sur la pellicule. Ainsi matérialisée, la mémoire du trajet devient factuelle. Stratifiée, l’image fixe rend compte d’un déplacement dans l’espace en étant envisagée comme moyen d’enregistrer chimiquement des données physiques sur l’espace, le temps et la lumière. Minimaliste, presque « objectivisante », la démarche de Lauriane Pigot apparait surtout essentialiste en considération du rapport qu’entretiennent lumière et médium photographique. Il y a dans « 34’22’’ » une proximité et un éloignement de la lumière par rapport au sujet et au spectateur, desquels découlent intrinsèquement autant de détails que d’imprécisions mais aussi de lenteurs que de rapidités. C’est là le merveilleux revers scientifique de toute appréhension artistique du monde.
“Espace. Temps. Lumière.”
Dans « 34’22’’ » Lauriane Pigot enregistre la lumière perçue lors d’un trajet pédestre et nocturne pour la restituer sous forme d’une frise dont l’abstraction n’est pas sans rappeler celle d’un électro gramme : à la fois résultante d’un ensemble d’actions et de réactions identifiables mais dont les tracés contiennent finement toute une poétique non figurative. Ici la nuit engouffre les derniers signes d’un espace urbanisé. Au fond de tout il ne semble demeurer qu’une trame noire dont la douceur est semblable à celle que l’on ressent dans l’infinité de ce que perçoivent les yeux lorsqu’ils sont clos. Seul persiste alors le déploiement des lumières, virevoltantes, chaudes, là où forme et matière
Anouck Asathal
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Lauriane Pigot
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// Directeur de publication : DavidF / Association Atelier Photo Argentique // Directeur de rédaction : Clément Gérardin // Redaction : Lauriane Pigot, Anouck Asathal, Francisco Supervielle, DavidF, Clément Gérardin // Mise en page : Lauriane Pigot, Clément Gérardin // Gestion du site internet : DavidF // ISSN : En cours // Depot légal : En cours // Periodicité : Trimestriel // Nous contacter : contact@hba-photo.com
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