Reminiscence

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RĂŠminiscence Takuji Shimmura



RĂŠminiscence


Photographies : Takuji Shimmura Textes : ValĂŠrie Douniaux All Rights Reserved Remerciements Ă Fabienne Caroni pour son accueil


Préface

S’arrêtant une première fois en pays «chti», nul n’échappe au saisissant spectacle des murs de briques qui bordent nos rues et ceinturent la place de nos centres-villes. Un simple clic ne suffit pas à enregistrer l’émotion qui gagne le visiteur. Une stratégie photographique s’avère nécessaire. Takuji Shimmura, artiste japonais en la matière, sillonne la France depuis plus d’une décade, en quête d’architectures, sa spécialité. Venu dans le Nord, invité par l’association Hélio pour présenter une exposition, il découvre Roubaix et Tourcoing. De cette rencontre fortuite est né « Réminiscence », recueil d’images, à l’écart de tout cliché entendu, traduction de cette fascination initiale. Une prise de vue volontairement sous-exposée lui offre une saturation des tons et le rendu opaque, voire fantomatique, des silhouettes à l’ombre, d’où émerge çà et là, énigmatique, aux contours affirmés, quelque artéfact isolé, objet de méditations inspirées chères à notre ami. D’une vue à l’autre, avec attention, lentement, parcourez l’alignements de façades aux couleurs sang séché, noircies par la fumée du charbon dont les fabriques d’antan, rasées à présent, puisaient vie ! Vous pouvez alors tendre l’oreille. Le claquement cadencé des navettes fouettant nos métiers à tisser à jamais disparus couvrira bientôt le bourdon assourdissant du moteur des camions envahisseurs.

Jean-Pierre Salomon Président de l’association HELIO Mai, 2012


Perspectives septentrionales Sous l’oeil du photographe, des lieux oubliés par la course du temps voient resurgir les ombres d’un passé enfoui, révélé par la lumière.

Des ombres semblent naître de la terre pour gagner petit à petit tout l’espace. Mais ces ombres ne sont pas forcément inquiétantes. Elles sont comme des nappes de souvenirs, des « réminiscences » issues des strates de l’histoire, celle des hommes qui ont construit et fait vivre la ville photographiée, celle d’un passé industriel qui se réinvente une nouvelle existence. Les architectures voient leurs formes magnifiées, baignées par la lumière du Nord si appréciée des artistes. Les couleurs, bleus intenses, rouges brique profonds, rappellent l’atmosphère des diapositives et la richesse du Cibachrome, qu’on ne voit plus que rarement aujourd’hui. Takuji Shimmura affirme d’ailleurs avoir été fortement attiré par la New Color Photography américaine à ses débuts. Ces couleurs nous présentent aussi les métropoles du Nord sous un jour nouveau, loin des clichés habituels misérabilistes et gris colportés habituellement à leur sujet. Certes, les photos présentent des paysages industriels témoins d’une époque révolue, mais loin de condamner cette époque, elles l’évoquent avec subtilité et annoncent le temps du renouveau, en un flux ininterrompu dans le courant de l’histoire, au milieu duquel elles résistent… Ces images sont la vision d’un photographe japonais, à la culture profondément autre mais qui a su aussi assimiler celle de la France, où il réside depuis dix ans. Ce flâneur aux fines capacités d’observation mène ses pas vers les confins des métropoles européennes, préférant les périphéries anonymes aux centres historiques renommés. Au fil de ses pérégrinations, ici dans la métropole lilloise et en particulier à Tourcoing, Roubaix et Croix, ses photographies créent une cartographie des grandes villes et de leurs banlieues, d’espaces mal aimés ou méconnus, dont il sait mettre en avant les points communs et les particularités.


Les images portent indéniablement la marque de Takuji Shimmura, sa façon très personnelle de travailler les paysages en superpositions de surfaces planes et de lignes, spectaculaires perspectives des alignements de maisons, audacieuse avancée d’une habitation à l’angle de deux voies ... jusqu’aux jeux de fils électriques qui semblent participer de la composition d’ensemble. Constructions sobres et silencieuses que vient cependant réveiller l’apparition d’un élément incongru comme une voiture, ou un élément naturel qui réaffirme ses droits sur l’urbanisation imposée par l’homme. Pas de présence humaine dans ces photographies, ou alors lointaine et incorporée comme n’importe quel autre élément constructif au paysage urbain. Cependant, la trace de l’homme est partout, dans ces architectures élevées au service du développement industriel pour être ensuite laissées à leur sort, dans les voitures qui entrent sans crier gare dans l’image, dans les graffiti qui parsèment les surfaces murales ou dans les rebuts de la société de consommation acquérant à travers l’œil du photographe une cruelle beauté, témoins des effets du temps, ironiques paraboles du gâchis et de l’utile devenu inutile.

Valérie Douniaux Docteur en histoire de l’art Mai, 2012


Septentrional perspectives Revealed by light, the shadows of a buried past resurface in urban spaces forgotten by the run of time.

Shadows seem to rise from the earth, to invade the surrounding space. But these shadows are not necessarily threatening. They are like clouds of remembrance, “reminiscences” evaded from strata of history, the history of the men who built and animated the photographed city, the history of an industrial past reinventing a new existence. The architectural forms are magnified, bathed by the northern light so cherished by artists. Colours, intense blues, deep brick reds, remind us of the atmosphere of slides or of the richness of Cibachrome. We can still feel here the attraction of Takuji Shimmura for American New Color Photography when he was a student. These colors bring a new light on the cities of the North of France, far from the usual miserabilist and grey “clichés” often related to these places. The pictures may present industrial landscapes which are witnesses of a bygone era, but they are far from condemning this past, they evoke it with subtlety and announce a time of rebirth, in a never-ending flux in the flow of history. These pictures are the vision of a Japanese photographer, whose background is distinctly different but who has also assimilated to the culture of France, where he has been living for ten years. This acute wanderer directs his steps towards the confines of European cities, preferring the anonymous peripheries rather than the renowned historic centers. His photographs, taken here in Lille Metropole (and particularly in the city of Tourcoing), create a cartography of the important European cities and their surburbs, of underrated and underappreciated spaces, of which he underlines the common characteristics and particularities.


The images undeniably bear the signature of Takuji Shimmura, his very personal way of constructing the landscapes by superposing plane surfaces and lines, spectacular perspectives of rows of houses, audacious protrusions of dwellings at the angle of two streets‌ even the electric wires seem to participate in the overall composition. Sober and silent constructions, sometimes awakened by the apparition of an incongruous element, like a car, or a natural material which reaffirms its rights on the urbanisation imposed by men. No human presence can be detected in these pictures, or only distant and incorporated like any other constructive element to the urban landscape. But the traces of human activity are everywhere, in the architectures erected for the purpose of industrial development and then left on their own, in the cars which suddenly creep in to the pictures, in the graffiti which scatter the murals, or in the leftovers from our society of consumption, wastes that acquire a cruel beauty when seen through the eyes of the photographer, which serve as witnesses of the effects of time, ironic parables of the once useful turned useless.

ValĂŠrie Douniaux PhD. in History of Art 2012, May


























Takuji Shimmura Né en 1966 à Osaka (Japon), vit et travaille à Paris Études et Formation 2007 - 2008 École Nationale Supérieur des Arts Décoratifs (ENSAD), Paris 2001 – 2004 École de Communication Visuelle à Paris (EFET) 1998 – 2001 Ritsumeikan University, Japanische Literatur, Kyoto Distinctions 2011 Sélectionné Bourse du Talent #48 2010 Bourse de la Fondation Nomura 2009 Résidence à la Cité Internationale des Arts, Paris 2008 Prix Lucien Hervé et Rodolf Hervé 2008 2004 Sélectionné Bourse du Talent #26 Expositions (Extrait) Personnelles 2011 Mairie de la Ville de Bailleul, France Japanisch-Deutsches Zentrum Berlin, Allemagne 2010 Gallery Ginza Ichôme, Tokyo Galerie Nadar, Médiathèque André-Malraux, Tourcoing, France Musée Historique de la Ville d’Erevan, Arménie 2009 Centre Culturel d’Alex Manoogian, Paris 2008 Centre Culturel Sahak-Mesrop, Marseille L’Institut franco-japonais de Tokyo École Spéciale d’Architecture, Paris 2007 Armenian Center for Contemporary Experimental Art, Arménie 2006 L’Institut franco-japonais de Tokyo 2005 Galerie G77, Sankt Petersburg Collectives (Extrait) 2012 Galerie Camera Obscura, Paris 2011 Transphotographiques de Lille, France 2010 Yokohama Creative City Center Bercy Village, Paris Biwako Biennale, Shiga, Japan 2008 Maison de la Culture du Japon à Paris Festival de Films Asiatique de Deauville, France hpgrp gallery New York, USA 2006 National Gallery of Armenia



Avec le soutien du Conseil régional Nord - Pas de Calais, du Conseil général du Nord et de la Ville de Tourcoing

Association Helio

Centre de Promotion et de Création Photographique

15 €

ISBN 978-2-9533087-1-6

JAUNE MAGENTA

assohelio@gmail.com heliophotographie.blogspot.com

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