Un saule ne dessine pas j’attends veut aussi dire j’espère comme un pommier
Un projet de recherche et de création sur le vent et le paysage // rémi duthoit
novembre 2012
Même les vents les plus violent sont invisibles. Ce n’est que par leurs effets ou leurs traces qu’on les voit, qu’on les sent ou que l’on s’en souvient. Dans un tgv en descente de la grande vallée, à hauteur de Montélimard, je sais que passé cette crête marquée de peupliers je vais les voir. Dans ce paysage emblématique du sud du défilé de Donzère, cinq éoliennes en mouvement. Qu’elles tournent ou pas, elles nous racontent le vent. Passé, présent, à venir. Elles montrent les effets et sont les traces : conséquences de vent visible ou mémoire de mouvements. Effets et traces structurent ma réflexion sur le vent, et au delà, sur le paysage et nos perceptions. On regarde le vent à travers le mouvement d’une herbe. Instantané. On regarde le paysage à travers le filtre de notre histoire. Mémoire.
j’attends veut aussi dire j’espère Rémi Duthoit, paysagiste
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septembre 2012
Les effets sont le résultat visible et instantané d’une action mécanique de l’air sur un support : brindille ou humain
qui se courbent, déplacement de graines (anémochore), envol de terre (déflations), (dé)formation de nuages, pressions diverses que le gauchissement d’une surface peut transformer en rotation (éoliennes, cerfs volants, samares...).
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septembre 2012
Les traces
Pariétaire (Parietaria officinalis)
sont la mémoire des effets. Lœss, dunes, taffonis, et autres érosions sur les murs des villes ou sur le sable, adaptation végétale progressive par la fréquence répétée des forces, courbe d’une branche, forme d’un arbre. L’expression du temps.
Oyat (Ammophila arenaria)
Sable plage du Nord. R.FAVORIT j’attends veut aussi dire j’espère Rémi Duthoit, paysagiste
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septembre 2012
Et les arbres ?
Ils portent en eux les effets et les traces. Ils ont fait de l’air en mouvement un médium pour parer à leur immobilité*. Se déplacer et se reproduire. Graines anémochores, pollens et souplesse du bois sont alliés du vent. Il faut les regarder. Rester assis et apprendre à s’émerveiller d’un mouvement de tremble, du son de l’air dans les feuillages, des spires planées d’une samare. Je cherche à faire percevoir l’air, proposer de regarder autrement cette matière qui nous entoure, qui nous fait respirer, qui se déplace et nous déplace parfois. Je pense que c’est là que se tient une part importante de ce qui est précieux. Regarder une brindille qui se courbe, un envol de pissenlit. Considérer que c’est incroyable peut paraître futile, naïf ; mais dans cette attention se niche une attitude porteuse de la conscience essentielle d’être là, simple passager responsable. « Jardinier planétaire** » à la présence aussi brève et importante qu’un souffle. Depuis plus de dix ans que cet air m’anime, j’ai fabriqué de nombreuses machines pour capter les traces du vent, sur divers supports, avec des techniques variées, souvent réalisées avec ce que je trouvais sur place. La foi dans la rencontre : tous mes projets sont des connivences.
* Francis Hallé « Éloge de la plante» Seuil 1999 * * Gilles Clément, le jardin planétaire Albin Michel 2004.
Taraxacum ; TiO
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septembre 2012
Le résultat, la trace, si elle peut être graphique et séduisante, n’a pas beaucoup de sens si elle est seule.
C’est un dessin, résultat visible d’un aléa. J’ai donc toujours cherché à montrer le processus, l’effet et la trace. L’instantané et la mémoire. Comme un paysage*. Je n’interviens que dans la part technique de la machine. Comme un jardin où il faut trouver un équilibre entre concevoir et laisser faire. Depuis peu, je cherche un moyen d’intervenir pendant la fabrication du dessin. Me situer, exacerber cette connivence que je cherche à montrer. Raconter à travers les dessins du vent, la relation entre l’homme et la nature que l’on retrouve dans certains paysages, agricoles surtout. Une politesse dans l’équilibre des formes, une entente sur le partage des surfaces et des pentes. C’est là que j’en suis. Et il y a les arbres, car toujours leur support à été source d’inattendu. La souplesse des branches permet des dessins plus amples et spécifiques à l’essence : un saule ne dessine pas comme un pommier. Et si je dessine l’arbre qui dessine, je fabrique une trace de l’instant. Je me situe.
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* Dans le regard porté sur un paysage, l’instant interfère avec notre mémoire du lieu, pour ce qu’il est ou ce qu’il nous rapelle. j’attends veut aussi dire j’espère Rémi Duthoit, paysagiste
septembre 2012
Le projet : X
arbres sont choisi dans un site.
1 jour de dessin par arbre : des essais, et puis quelques productions sur châssis entoilés. Pendant ce temps là, il se passe des choses. Le paysage change, je me fais oublier, j’observe, je dessine l’installation tranquillement sur un support identique. Des visiteurs, des jardiniers passent, me questionnent peut être, me racontent des histoire sur l’arbre, sur l’air. J’attends veut aussi dire j’espère. Je ne suis pas inquiet, il se passera des choses. J’aime ces affûts. Une chasse aux trésors. Je note.
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Restitution : dessin de l’arbre et du vent, croquis de l’installation, annoté ou un texte à côté qui raconte ce qui s’est passé ; le nom de l’arbre, son emplacement dans le jardin, 1texte de restitution de l’instant, des rencontres, des pensées. Ça, fois
X arbres.
Le lieu d’exposition est à déterminer, mais il me semble qu’il est intéressant d’avoir un dépliant/catalogue qui propose aussi une autre manière d’aller déambuler dans les sites, à la rencontre des co-auteurs, de s’asseoir auprès d’eux, savourer leur ombre, écouter leur souffle. Ce temps peut se situer à l’occasion du festival, ou lors d’un autre événement, accueillir un public scolaire une heure ou deux par jour.
Cette trame de d’expérimentation est indicative de ma démarche. Le projet s’adaptera à chaque site.
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septembre 2012
Rémi Duthoit, paysagiste&plasticien né en 1969.
Diplômé ENSP Versailles 1996. Installé en libéral depuis le 01-01-2001. Paysagiste conseil de l’Etat (Hautes-Alpes), enseignant vacataire à l’ENSP Versailles-Marseille. Je vis à Forcalquier et travaille où le vent et les rencontres me mènent, en ce moment : • J’étudie la mise en œuvre d’une opération Grand Site dans le massif des ocres du bassin d’Apt (Vaucluse). • Des jardins privés à Marseille (13), une place publique à Forcalquier (04), des cours de récré à Barbentanne (13). • Le paysage de la colline de Notre Dame de La Garde à Marseille, avec Marie Pierre Grégoire. • avec Christophe Le Blay, danseur, nous menons une recherche sur l’air et le corps (Anémochore :résidences Ilotopie 2010 et KLAP marseille 2012). • J’accompagne des étudiants des écoles du paysage de Versailles/Marseille et des Beaux Arts de la Réunion lors d’atelier pédagogiques. Une fois par mois, je vais à Gap (05) faire du conseil en paysage pour l’État, et jardine un jour par semaine, les mains dans la terre pour penser. J’aime croiser les regards et partager les projets. En voici quelques traces : • • • • • •
Diverses installations/performances éoliennes avec TiO depuis 1998 (festiventu /Calvi, Paris Plage 2007…) Jardins d’eau suspendue du toit de la Friche La Belle de Mai avec le Groupe Dune. http://groupedunes.net/ Les jardins du Pont Flavien (Saint-Chamas 13, avec Marie Pierre Grégoire et Guillaume Perdereau, 2012) Le square de la Joliette (Marseille 2004, avec Chiche&Dussol/Boyer) La place Arvieux (Marseille 2005) Le nid des Déesses MAPPA, 11éme festival des jardins de Chaumont (2002) avec Eric Barbier, plasticien.
Rémi Duthoit 12 av. des lavandes, 04300 Forcalquier http://rduthoit.blogspot.fr/ remi.duthoit@gmail.com
06 87 14 57 60
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septembre 2012
Installation de 10 chassis sous un platane/ Petit art petit/ Marseille lezarapart 2009/ 7h; feutre sur toile.
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septembre 2012
Installation rotring, La friche la belle de Mai 2001. 2h.
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septembre 2012
déesses mappa, Chaumont 2002
Massif des Ocres/ Rustrel, Vallée des mille couleurs
manches à air, Monampteuil (effets)
systèmes de prises d’empreintes du vent (traces)/Anémochore/Ilotopie.
square Joliette, Marseille
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La friche la belle de Mai 2001. 3 minutes.
10 septembre 2012
Textes résumés : le projet
Paysagiste dplg, Rémi Duthoit dessine des arbres. Parfois avec l’aide du vent, il les fait dessiner. Il nous propose une restitution d’expériences graphiques sur des arbres choisis dans le jardin. «Un saule ne dessine pas comme un pommier» est un travail sur le temps et les formes, sur l’instant et la mémoire. Les dessins du vent définissent une relation entre l’homme et la nature, une manière de se situer semblable à celle que l’on retrouve dans certains paysages, une politesse dans l’équilibre des formes, une entente sur le partage des surfaces : l’expression d’une connivence avec ce qui est là. Les expérimentations auront lieu au cours du mois de mai, l’exposition des pièces, en juin et juillet. Les visiteurs pourront, après la visite des œuvres, retourner au jardin rendre visite aux arbres. Les regarder à nouveau, d’une autre manière sans doute.
mon chemin
Jardinier, paysagiste diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure du Paysage de Versailles, plasticien, depuis mon arrivée dans le Sud en 2000, j’ai conçu des jardins et mené des études d’espaces publics et de territoires. La grande variété de mes modes d’interventions se situe à la croisée des chemins (Sciences, Arts, Jardinage...) et des échelles, sans hiérarchie de valeur. Mes réalisations expérimentales explorent l’utilisation des végétaux dans des scénographies qui mettent en valeur le vivant et ses dynamiques, dans la recherche d’une réponse se situant dans la mise en valeur du lieu. Mes collaborations avec des plasticiens (Eric Barbier, TiO, Groupe Dune…), m’ont permis d’explorer des nouvelles manières de penser et de diffuser une culture du paysage. Enfin, mes implications dans des missions de conseil (paysagiste conseil
j’attends veut aussi dire j’espère Rémi Duthoit, paysagiste
11 septembre 2012