Hémisphères N°21 – Locales, urbaines, intimes: les proximités

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Un patrimoine musical ancien, au cœur de l’identité populaire valaisanne, fait l’objet d’une étude. Il s’agit notamment pour les chercheur.es d’élucider le mystère entourant les racines de la tradition des fifres et tambours.

Les fifres, une tradition locale venue d’ailleurs TEXTE

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Hanns in der Gand était le pseudonyme de Ladislaus Krupski (1882 – 1947), folkloriste suisse qui a activement répertorié des musiques traditionnelles et folkloriques pendant la période d’entre-deuxguerres. De père polonais et de mère allemande, il aurait utilisé ce pseudonyme afin de gagner plus facilement la confiance de ses informateurs lorsqu’il recherchait des musiques dans des régions rurales.

| Andrée-Marie Dussault

Il est un survivant des instruments médiévaux, un des rares qui n’aient pas évolué. Dépourvu de toute finesse, il consiste simplement en un bout de bois percé de manière régulière, dont la tessiture se limite à deux octaves. C’est le fifre, une flûte dont la pratique est l’une des traditions populaires les plus anciennes du Valais et de la Suisse romande. Professeur d’analyse à l’HEMU – Haute École de Musique – site de Sion – HES-SO, Vincent Arlettaz se propose de démystifier les origines historiques de cet instrument fortement lié à l’identité populaire. Dans le cadre d’un projet de recherche axé sur le Valais, son équipe étudie le fifre dans une perspective à la fois historique, organologique, ethnologique et pédagogique. « La publication aura une rigueur scientifique, mais s’adressera aussi à un public large », indique-t-il. La tradition de jouer du fifre – qui touche à la fois l’identité culturelle de

la région, son histoire sociale et politique, ainsi que ses pratiques culturelles populaires – n’a pas encore fait l’objet d’une publication scientifique approfondie, fait valoir Vincent Arlettaz, luimême hautboïste. Une seule étude sérieuse sur le sujet, menée par le folkloriste suisse Hanns in der Gand 1, est parue dans les années 1920. Elle décrit des coutumes ancestrales qui sont demeurées les mêmes jusqu’à aujourd’hui. Notamment, celle de jouer du fifre dans deux contextes particuliers : lors de la Fête-Dieu (Corpus Domini, soixante jours après Pâques) et du « vignolage » (le travail communautaire dans les vignes, au printemps). En effet, le chercheur souligne que la survie de l’instrument folklorique n’a jamais été en danger et qu’il est toujours bien vivant. On sait aussi que chaque village avait sa clique de flûtistes et que le fifre était joué


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