Bénédicte Hubert Darbois
Marie-Françoise Le Saux
Béatrice Nicolas
Josée Theillier
Le collectif Déroutes met en marche une pensée nourrie des pratiques individuelles d’écriture, de production de formes, mais aussi d’expériences intimes partagées.
Ce mouvement impulsé libère une énergie créatrice qui nous porte, nous surprend, nous Déroute. Les questionnements autour de ce terme sont infinis, contradictoires, paradoxaux, à l’image de nos pratiques.
Bénédicte HUBERT DARBOIS
Marcher, tracer, répéter jusqu’à épuisement, inscrire le paysage. Mes recherches interrogent le rapport entre la marche quotidienne et rituelle, la trace et l’écriture. Méditation graphique et picturale. La ligne spontanée n’est plus un contour ni un dessin, elle possède sa propre énergie, libre de toute référence à l’image, ne pas savoir où je vais me libère d’une certaine forme, d’une direction à prendre, laisse toute définition de sens possible.
MÉDITATION GRAPHIQUE ET PICTURALE
RÉCITS MURMURÉS
Marie-Françoise LE SAUX
Longtemps ma mission a été de saisir la pensée créatrice des artistes, reconnaître leur singularité, en réveiller la force pour la donner à comprendre, sentir, aimer. L’interpréter au sens musical du terme. Aujourd’hui, j’expérimente une Dé-route vertigineuse : j’écris ma propre partition. Les mots rencontrent des images cueillies, photographiées au fil de mes promenades : le grain d’une pierre, le reflet irisé de l’eau, la crosse délicate d’une fougère. Mots et images ensemble font surgir des émotions, tissant des récits murmurés.
Béatrice NICOLAS
Des espaces, des lignes, des surfaces, approcher un monde de perception, de mémoire et de subjectivité. Je cherche un paysage complexe, fragile et infini. Dessiner est un débroussaillage, une exploration d’un espace avec tous les sens. Mon travail est lié aux espaces géographiques que je traverse régulièrement.
J’utilise les signes, les événements du paysage qui suggèrent des formes plus ou moins reconnaissables pour le révéler. Dessiner est une danse sur une limite vertigineuse qui engage le corps et la pensée.
Tracer, écrire, effacer, écraser, embellir, déchirer, frotter, orner, marquer, découper, décontextualisater, cut-up, gommer, piquer, percer, reprises, appropriation, ressasser, emprunter, agencer, monter, télescoper, tramer, tisser, broder… — papiers, tissus, carnets, métal, agrafes, fils, aiguilles… — blanc, noir, gris, rouge, transparence, translucidité, surépaisseur – notes, croquis, dessins, brouillons, mots, tracées, lignes, textes, trames, partitions, annotations, plans, cartographies, constellations, atlas… Dans mon processus de création, je me laisse guider par mon inclinaison pour toutes les formes d’ornementation. J’utilise certains de leurs accessoires pour couvrir les marques de violence et d’agression que j’ai créées sur mon support. L’objectif n’est pas d’en atténuer leurs contenus, mais d’interposer un leurre entre l’objet et le regard du spectateur. D’autre part, je conjugue mon expérience du dessin avec celle de l’écriture, de manière à forger des objets où les frontières entre le visible et le lisible se confondent. Les éléments textuels acquièrent une plasticité, tandis que ceux du dessin deviennent déchiffrables. C’est dans les glissements sémantiques que je construis ma propre langue artistique. La ligne étire le monde.
Extraits de carnets
Bénédicte Hubert
Quatre femmes pressées, quatre énergies habitées par l’urgence de dire, de faire, d’être, désireuses de mettre en commun leurs questionnements sur un possible chemin à prendre ensemble.
Issues d’une même génération, elles interrogent le rapport à leur passé, leur appartenance à une classe sociale, à la manière dont l’art fut pour chacune une fuite, une échappatoire, un sauvetage. Elles savent que d’où que l’on vienne, la question identitaire détermine notre construction. Elles mesurent avec étonnement et émotion le chemin parcouru, partageant injustement le sentiment confus de ne pas en faire assez. Leurs réflexions théoriques puisent dans les divers champs de la création, dans le domaine des arts plastiques au premier chef, mais aussi de la musique, de la danse, d’une littérature exigeante, de la philosophie. La marche du monde et les questions de société ne leur sont pas non plus étrangères.
La difficile reconnaissance de leur travail par le milieu de l’art génère un légitime sentiment d’injustice. L’urgence qu’il y aurait à y remédier est, pour une part, fondatrice de leur collectif. Par ce moyen, elles entendent faire valoir avec plus de force leur statut d’artiste, bien que toutes aient exposé, que leurs œuvres figurent dans des collections et aient fait l’objet de publications.
Des consciences féministes, sans déclarations tonitruantes ni slogans, mais une commune détermination à conduire leur vie sur le terrain si délicat des choix : comment concilier vie de famille, activité alimentaire pour s’assurer une autonomie financière, et l’irrépressible besoin de créer ?
Conquête essentielle, l’atelier est un inépuisable sujet de commentaires, sa taille, sa configuration et surtout sa place dans la
maison. Chacune à sa manière a dû s’autoriser cet espace « volé » à la demeure familiale, un lieu protégé de l’autre, même bienveillant, un lieu où on frappe avant d’entrer. L’atelier est aussi l’espace où se déploie le temps non contraint, totalement libre, fait de rêveries, de lecture, de labeur, de fulgurances créatives qui donnent le puissant sentiment d’être vivant. L’art est à ce prix.
Leurs champs communs sont nombreux. Parmi eux la nature tient une place particulière, vitale. Elle est l’espace de la marche, du souffle qui réveille le corps. La nature est aussi l’ancrage à la terre : creuser, planter, tailler, s’épuiser dans une souffrance qui toujours nourrit le geste créateur.
Le paysage, et plus précisément la campagne avec ses champs cultivés et changeants au gré des saisons, traverse le travail de chacune.
Des arbres, fleurs, algues, jaillissent le trait, la ligne, la matière, la couleur d’une écriture plastique qui ne représente pas mais donne à sentir, à ressentir, tout en fragilité, impermanence, complexité.
Des individualités affirmées qui se retrouvent autour d’une commune sensibilité au papier, au dessin, à l’écriture poétique ou asémique (qui fait abstraction du sens au profit de la graphie). La trame, le tricotage de lignes, la couture, voire la suture les occupent. Ouvrage de dame, diront certains, et pourquoi pas !
Ces outils peuvent mener sur des chemins de traverse inattendus qu’entend bien explorer le collectif « Déroutes ». Cet étendard sera leur axe de réflexion et de création, ce qui conduit ailleurs.
Des forces et autant de faiblesses qui se conjuguent pour se mettre en mouvement avec énergie, audace, et une tacite obligation à avancer.
Une responsabilité s’installe, une légitimité aussi. Le collectif est une personne singulière, entière, nommée.
Le collectif est confiant, complice, joyeux. Le collectif est une femme puissante.
Bénédicte HUBERT DARBOIS
Née en 1951 dans les Ardennes
Vit et travaille à Arradon à l’Atelier de Truhélin en Morbihan.
_EXPOSITIONS PERSONNELLES
2015 Galerie d’art contemporain, Passage Sainte-Croix, Nantes
2015 Centre Culturel, Pouilly sur Loire
2015 Musée des Beaux-arts de la Cohue, Vannes
2014 Galerie Olivier Nouvellet, Paris
2012 Centres Culturels d’Arradon, Séné et Guidel
2011 Galerie de l’IUFM, Vannes
2008 « Le Cube », Paris 9ème
2006 Théâtre des Jacobins, Dinan
2005 Galerie Art 77, Paris
2004 Centres Culturels, Lamballe et Saint Brieuc
2003 Palais des Arts, Vannes
2002 Galerie Tal Coat, Hennebont
1994 « Le Grand Huit », Rennes
1994 Chapelle d’Arradon
1986 Musée des Beaux-arts de la Cohue, Vannes
_EXPOSITIONS COLLECTIVES
2023 Et nous dans tout ça, Atelier du Hézo, Saint-Armel
2020 Poésie et Peinture, F. Jeune et les éditions de la canopée, Ateliers du Hézo, St Armel
2019 Pause, Atelier du Hézo – F. Jeune
2018 Toute la peinture que j’aime, Atelier du Hézo - F. Jeune
2005 Conservatoire du Littoral, Rennes
2004 Galerie d’Estienne, Pont-Scorff
1999 D’Anvers aux Abesses, Paris
1997 17ème salon d’art cont.,Marne la Vallée
1996 Chapelle du Saint Esprit, Auray
1995 Galerie municipale des Halles, Quimper
1993 10 ans de photographie, Palais des Arts, Vannes
1991 Humain paysage, Centre d’Art cont., Saint-Brieuc
89-91 Mai Photographies Hôtel de ville, Quimper
83-84 Rencontres photographiques en Bretagne, Lorient
_COLLECTIONS PUBLIQUES
2015 Musée des Beaux-Arts de la Cohue, Vannes
2002 Artothèque de la Galerie Tal Coat, Hennebont
1998 Musée des Beaux-Arts de la Cohue, Vannes
_ÉDITIONS
2022 Bénédicte éditions le Bel Été, D. Picard
Le livret Bleu, B. Hubert Darbois /D. Picard
2021 Le carnet bleu, Dessins, textes de M-F Le Saux, éditions de la canopée
2020 L’entretien de la peinture, édition de la canopée, F. Jeune
2019 Revue N°23 , édition de la Canopée, T. Le Saëc/B. Hubert Darbois
2017 « L’écriture végétale » de Bénédicte Hubert
Darbois - G. Plazy, écrivain et critique d’art
2017 Portrait d’artiste dans l’atelier, éditions
Le bel été, D. Picard, écrivain
2006 Entre deux - D. Ponneau, directeur de l’École du Louvre
2006 Entretien avec L. Crémière, écrivain
1994 Bénédicte Hubert Darbois, Latence
Y. Jousse, peintre et critique d’art
b.hubertdarbois@orange.fr
www.benedictehubertdarbois.blogspot.com