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Sommaire
L’exposition Jacques Le Brusq à la galerie Cécile Loiret page 6
Jacques Le Brusq, la politique des arbres par Vincent Eggericx page 8
Les tableaux de l’exposition page 7 à page 37
Jacques Le Brusq, éléments de biographie page 38 Vincent eggericx, éléments de biographie page 42
Remerciements page 44
Cécile Loiret
L’exposition Jacques Le Brusq à la galerie.
Jacques Le Brusq est un peintre de paysage, des paysages de terres intérieures ou de bord de mer. Le peintre se met au service de l’oeuvre, il veut être dépassé par sa peinture. "Maître d’ouvrage, il n’est pas le maître d’oeuvre », selon Jacques Le Brusq, il n’est là que pour faire ressortir toute l’énergie de l’oeuvre, révéler sa présence, son âme. Ses tableaux soulignent l’essentiel du paysage en passant par une grande variété de vert, clairs, foncés, virant au jaune, au brun, profond, vibrant. Le vert devient la palette du peintre, comme une évidence, huile sur toile ou sur papier, un vert mat parfaitement maîtrisé, pregnant, fascinant, presque magnétique.
L’évènement « Ici et là, ce lointain si proche » souhaite montrer les différentes approches du paysage par Jacques Le Brusq en partant d’abord de l’arbre et des paysages de Beauce pour évoluer vers un vert plus sombre, allant vers des nuances de bruns. Seize tableaux sur les cimaises, huile sur papier ou sur toile pour les plus grands formats ; une exposition épurée pour mieux apprécier la force et la présence de chaque oeuvre.
Au bout du jardin, un arbre huile sur papier
Vincent Eggericx
Jacques Le Brusq, la politique des arbres
Jacques Le Brusq n’existe pas. Ce paradoxe en entraîne un autre : vous-même qui lisez ces lignes et venez de regarder les tableaux de Jacques Le Brusq ou les regarderez bientôt, vous n’existez pas non plus, ou peut-être pas tout à fait, c’est-à-dire pas encore.
Ce qui existe, par contre, c’est la peinture, qui nous reconduit à cette vérité essentielle que quelque chose nous précède et demeure après nous, par lequel nous sommes vivants. C’est cela, je crois, que la peinture de Jacques Le Brusq rend visible à sa manière unique : la vie, c’est-à-dire l’invisible que nous portons en nous sans le voir et auquel nous sommes dès lors reconduits.
Ainsi, la peinture de Jacques Le Brusq déjoue en nous cette évidence de notre existence immédiate pour nous introduire à une existence plus intense, déliée provisoirement des liens par lesquels le monde nous possède à mesure que nous croyons le posséder. Cette intensité procède d’une nouvelle approche du monde et donc de la peinture, qui nous introduit à un autre paradoxe : regarder un tableau de Jacques Le Brusq c’est faire front à ce tableau, non pas qu’il y aurait dans ce tableau quelque chose qui nous menacerait, mais parce que ce tableau nous rappelle que l’existence procède de ce combat silencieux. Passer outre ce combat, regarder le tableau sans le voir, parler pour ne rien dire et accaparer pour
En Beauce, 1995 huile sur papier, 23 x 30 cm
soi ce qui relève du bien commun, c’est la chose la plus facile dans un monde structuré par des évolutions techniques impensées qui, en nous rendant comme maîtres et possesseurs de la nature, nous dépossèdent d’elle. Car c’est notre nature que Jacques Le Brusq nous montre ainsi à contre-jour, rendue à elle-même, c’est-à-dire à cette vibration commune au chêne dans le jardin et au mugissement de la mer, par lequel Leibniz nous disait déjà que, en étant attentifs aux mille perceptions qu’il éveillait en nous, les hommes pourraient s’apercevoir de la manière dont chaque vague formait comme une modulation intégrée harmonieusement dans ce mugissement participant lui-même d’un double point de vue organique et rationnel à un meilleur des mondes possibles.
C’est ici le moment, peut-être, de lever un malentendu qui tendrait à faire de la peinture de Jacques Le Brusq une œuvre purement irrationnelle et apolitique, sous prétexte qu’elle tenterait de faire parler les arbres. En effet, d’après la présentation que Jacques Le Brusq lui-même en fait, c’est un chêne qui lui a « fait signe » sur les landes de Lauvaux, dans le jardin de La Cour de Bovrel, une ancienne seigneurie du XVème siècle, après dix ans de séjour en ces lieux à redonner vie, par ses mains affrontées à la pierre, à ce qui était devenu une ruine. Il faut souligner que cet appel de l’arbre a été
précédé et comme généré par ce processus de participation manuel et technique à cet univers si étrange, commun aux temps archaïques et au plus extrême contemporain, dont l’actualité nous offre aujourd’hui une vision saisissante : celui de la ruine. C’est en prenant soin de cette ruine, c’est-à-dire en redoublant le rapport affectif d’empathie que nous éprouvons en découvrant la beauté de ce qui est « sous le temps », par l’élaboration technique de sa réhabilitation, que Jacques Le Brusq a été reconduit à la peinture, soit à une nouvelle dimension de cet affrontement avec la matière.
Cela a été précédé donc d’une redécouverte d’un mode de participation technique à un monde matériel appelant à sa transformation, participation au fil de laquelle Jacques Le Brusq a découvert cette modulation par laquelle l’homme pouvait, non pas se rendre comme maître et possesseur de la nature, mais mettre en oeuvre dans l’univers grâce au travail de ses mains et de ses outils des points-clefs sur le fond desquels est apparue subito une esthétique picturale. La peinture de Jacques Le Brusq est ainsi l’oeuvre d’une main qui a appris à moduler la matière afin de faire advenir une totalité de fond.
Cette totalité, c’est le dernier point que je voudrais signaler, est « sous le temps » en un deuxième sens : elle cristallise des joies, des inquiétudes et des colères qui sont les nôtres
face à cette pesanteur qui cherche à étouffer ce qui veut naître. Les Grecs avaient inventé pour exprimer cela la légende selon laquelle Ouranos, le Ciel, était longtemps resté vautré sur Gaïa, la Terre, de sorte qu’il empêchait toute naissance, jusqu’à ce que Gaïa donne à l’un de ses fils, Kronos, la serpe qui lui permettrait de châtrer Ouranos et d’enfin venir au monde. Elle ajoute que du sang du sexe d’Ouranos mêlé à l’écume de la mer serait née Aphrodite, la déesse de la beauté.
Voyez ces dernières toiles parfois griffues où le grand espace vert qui auparavant formait comme une clairière semble inexorablement absorbé par la Nuit ; regardez attentivement ce grand évènement crépusculaire qui voyage à notre rencontre, faites-lui front, ainsi que la peinture permet de le faire, en tendant l’oreille à l’appel des arbres, et mettons-nous au travail pour bâtir de nos mains ce monde nouveau qui aspire à naître de nos ruines, ainsi que la peinture de Jacques Le Brusq nous y invite.
Vincent EggericxPeindre c’est nommer les choses, nommer les choses en les donnant à voir. Jacques Le Brusq
Vers Boiry, 2000 huile sur toile, 41 x 33 cm
La peinture est imprévisible. La peinture il faut la faire, mais surtout, il faut la laisser faire …
Quand je peins, je ne cherche pas à savoir ce que je fais. Je dirais que « ça peint » plutôt que « je peins ». Jacques Le Brusq
La peinture nous donne à voir ce qui sans elle se dérobe, ce qui sans elle ne saurait être vu. En précédent le langage elle nous met spontanément en présence du premier matin du monde, là où les mots ne sont pas encore.
Jacques Le BrusqSur le bord du chemin, 1992 huile sur papier, 26 x 35 cm
BRU FO TA VE, opus 1, 2015 huile sur papier, 48 x 63 cm.
BRU RO TA VE, opus 2, 2015 huile sur papier, 48 x 63 cm.
Ma fascination : la présence
Une peinture a-t-elle une présence ?
Bien sûr, il ne s’agit pas de sa présence d’objet, ni de sa présence décorative, même si parfois elle peut y participer, ni de la présence figurée, « représentée », l’image d’un sujet peint. Non, il s’agit de sa présence d’être. C’est là le mystère de la peinture. Elle rend visible. Elle donne à voir ce qui sans elle ne saurait être vu. Regarder réellement une peinture c’est voir avec elle, grâce à elle, ce « quelque chose », au delà et endeçà d’elle-même…
Jacques Le BrusqJacques Le Brusq
Jacques Le Brusq réinvente la peinture comme pratique immémoriale, au-delà de l’historicisme et de l’esthétisme. Il en fait une pratique analogue au tir à l’arc zen où il n’y a ni arc, ni cible, ni tireur, le pur rien.
Richard CrevierVE GRA MA, opus 1, 2019 huile sur toile, 132 x 162 cm.
Il est éminemment figuratif et totalement abstrait Jean-Pierre Delarge
dictionnaire des arts plastiques modernes et contemporains, éditions Gründ.
PH GUS, 2018 huile sur papier, 48 x 63 cm.
Rhuys, vers Kerners, 2015 huile sur papier, 28 x 32 cm.
BRU RO TA VE, opus 3, 2018 huile sur papier, 48 x 63 cm.
Dévoiler le monde, le révéler, le rendre visible, c’est là le pouvoir et la magie de l’art.
Jacques Le Brusq
Terre noire, 1998 huile sur toile, 30 x 30 cm.
Il faut arriver au stade où c’est la peinture qui se fait elle-même, elle a seulement besoin de notre accompagnement. Alors faisant de la peinture, la peinture me fait.
Jacques Le Brusq
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Jacques Le Brusq, éléments de biographie
Né en 1938 à Rennes. Entre 1970 et 1977, Jacques Le Brusq crée et anime un centre d’art dans le Morbihan, La Cour de Bovrel, à Saint Guyomard. Il enseigne également à l’école des Beaux-arts de Rennes de 1973 à 2000. Il vit et travaille à Nantes depuis 1990.
Expositions personnelles ou collectives (sélection) :
• 2021 Novembre “Le présent du monde”, Galerie Gaïa commissariat Elisabeth Givre
• 2021 Mai-Septembre, Fougères Musée de la Villéon “ Paysages, Paysages “ Commissariat Samuel Linard
• 2021 Juillet, « Le Rayon vert, Jacques Le Brusq et Rémy Thoirain, galerie Cécile Loiret, Vannes.
• 2020 Juin-Décembre Musée Robert Tatin “Du Morbihan à la Frénouse, aux abords du pays où la lumière ne fait point d’ombre” - commissariat Bruno Godivier - édition d’un catalogue
• 2020 Juillet Novembre Vannes Musée des Beaux-Arts La Cohue “ Terres et Landes , Paysages de Bretagne “ - ( peintres des 19e, 2Oe , 21e siècles ) - commissariat Françoise Berretrot, Marie Annie Avril
• 2019 Le Mans Musée de Tessé “ Paysages “ ( Des primitifs italiens aux peintres contemporains ) commissariat Carole Hirardot
• 2019 Cossé le Vivien Musée Robert Tatin “ Ô temps de Tatin “commissariat Bruno Godivier
•
2018 Vannes Musée des Beaux-Arts La Cohue “ En présence des arbres “, Jacques Le Brusq, Béatrice Bescon, commissariat Françoise Berretrot & MarieAnnie Avril.
• 2018 Nantes- Galerie RDV- “ Ce presque rien “Noémie Chauvet Jacques Le Brusq-
•
2016 Paris- Galerie Jean Fournier “ 25 ans de l’art dans les chapelles “
• 2016 Pontivy - Les Bains-Douches “ 25 ans de l’art dans les chapelles “
• 2015 Un chemin en peinture, Atelier Raspail, Paris (commissariat Charles Bimbenet)
• 2013 Sur le motif, Domaine de Kerguehennec, Bignan, Jacques Le Brusq, Ricardo Cavallo, Jean-Jacques Dournom (commissariat Olivier Delavallade)
• 2013 Corée - Suwon - art center « International exchange
• 2003 Nantes - Galerie le Ring
• 2001 Nantes - Musée de l’imprimerie « Nuit de l’art contemporain
• 1998 Espace Sophie Barrouyer, Paris
• 1997 FIAC - Espace du Quai Branly, Paris
• 1997 Galerie Plessis, Nantes
• 1996 Du paysage au dépaysement, Musée des Beauxarts, Chartres (commissariat Maïthé Valles-Bled)
• 1992 Galerie Akié Arrichi, Paris
• 1991 Musée de Tessé - Collégiale Saint-Pierre-LaCour, Le Mans (commissariat Serge Nikitine)
• 1988 Espace l’Orient, Lorient.
•
1986 Le Grand Huit - Maison de la Culture, Rennes (commissariat Jean-Yves Louédec) 1973 Musée de Tessé, Le Mans (commissariat Raymond Blanc)
• 1972 Centre social, Redon
• 1971 La Cour de Bovrel, Saint Guyomard
• 1970 Saint-Brieuc, centre d’action culturelle
• 1970 Fougères, atelier des Prés
• 1970 Laval, Laval actualités
• 1969 Vannes, galerie Meyer.
• 1968 Vannes, galerie Meyer
• 1965 Sulniac, L’art sous le préau
• 1965 Galerie des Beaux-Arts, Rennes
• 1965 Foyer des artistes - Montparnasse - Galerie Marc Vaux, Paris.
• 1965 Paris - galerie Katia Granoff
• 1964 Paris - Salon de l’art libre, musée National d’Art Moderne
« Le Brusq est plus qu’un peintre de paysage. il est un homme dans le paysage, un homme dans le monde, un homme dans la lumière, dans la couleur, dans le vert, “sous le temps”. Sa peinture est l’intérieur de sa peau, de sa pensée, de son univers. Le paysage qu’il voit, n’est pas tant celui qui se trouve devant ses yeux que celui qui lui traverse le corps. »
Christophe Cesbron, extrait de Peindre sous le temps, Jacques Le Brusq, éditions Domaine de Kerguéhennec, octobre 2013
Jacques Le Brusq ©Karen Lavot-Bouscarle
Vincent Eggericx, éléments de biographie
Vincent Eggericx est né en 1970 à Paris. Après des études de lettres, il exerce divers métiers, de veilleur de nuit à marin. En 1998, il publie l’Hôtel de la Méduse (Verticales), en 2004, Le Village des idiots (Denoël). Il écrit périodiquement de brefs essais et des nouvelles pour différentes revues, comme l’Atelier du roman, la Revue littéraire. En 2006 paraît les Procédures (Léo Scheer), préfacé par Bruce Benderson. Lauréat de la Villa Kujoyama en 2007, Vincent Eggericx s’installe au Japon, à Kyoto, pour apprendre le tir à l’arc japonais. Il publie en 2010 L’Art du contresens (Verdier). De retour en France en 2012, il fait paraitre Peau d’ogre (Verdier), puis Mémoires d’un atome (Verdier). Il est actuellement professeur de philosophie en banlieue parisienne.
Remerciements :
à Jacques Le Brusq pour sa confiance et sa participation active à l’exposition, à Vincent Eggericx pour son écrit et son regard sur l’oeuvre de Jacques.
crédits photographiques : Karen Lavot-Bouscarle Christian Leray Julie Berkovicz Catalogue Cécile Loiret
978-2-9584068-1-3