Henri GILBERT - La covisada

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Institut d'estudis occitans de París Documents per l'estudi de la lenga occitana N°70

Henri GIlBERT

La covisada

Edicion originala Lyon/Paris, Badiou-Amat/Joseph Gibert 1928 Document dins lo maine public numerizat per archive.org


Documents per l'estudi de la lenga occitana Daus libres de basa numerizats e betats a dispausicion sus un site unique.

Des ouvrages fondamentaux numérisés et mis à disposition sur un site unique.

Mesa en linha per : IEO París http://ieoparis.free.fr


Henri GILBERT

LA COVISADA EN DIALECTE BRIVADOIS Arec une traduction française

et des notes étymologiques

^-Si^ LYON LIBRAIRIE 7,

ANCIENNE

PARIS ) î

BADIOU- AMANT

Rue du Plat,

7

|

librairie 27,

1923 (Tous

di'oits

réservés)

j.

gibert

Quai Saint-Michel, 27


.

PRÉFACE

Le parler de Chilhac

appartient, quant à ses

éléments, à l'un des dialectes

langue

En

purs de la

d'oc.

on y remarque la survidans leur forme ancienne, d'un grand

l'étudiant de près,

vance,

nombre de mots les

les plus

troubadours

téraire

et

:

employés par que la langue lit-

et d'expressions

ce qui établit

langue populaire du

la

n'étaient pas, chez nous,

moyen âge

complètement différentes.

La première ayant un domaine plus étendu, nécessairement cesser,

plus

cependant,

riche

de

se

en

sans

vocables,

confondre

était

avec

la

seconde. Les particularités qui différenciaient les dialectes

n'étaient

l'unité de la

La langue

même

pas

un obstacle

à

langue parlée écrite était loin,

une graphie uniforme, car

il

« elle

est vrai, d'avoir

avait à souffrir 1

.


du caprice des scribes » du moins, les différences qu'on y remarque sont-elles peu importantes; :

comme

encore peut-on les considérer plutôt

comme

signes de prononciation que

des

des signes

graphiques.

Depuis

la

rences n'ont

décadence de notre langue, ces fait

que

diffé-

Peu

croître et se multiplier.

à peu, faute d'oeuvres écrites correctement, on a

perdu de vue

la

«ux-mêmes, ont

forme des mots, puis ces mots été, parfois,

corrompus au point

d'en être méconnaissables.

On

connaît

la

méthode des patoisants

en prenant pour unique guide

même

lorsqu'elle est fautive...

la

prononciation^

Une

dispense, sans doute, d'étudier

telle

les

méthode

règles de la

langue, mais elle ne peut qu'engendrer

décomposition, l'obscurité

sordre, la

au balbutiement, les

félibres

lettrés

et

ni

ne

écrire

:

public

le

elle

;

tend

instruit

sauraient s'en

dé-

ni

accom-

moder. C'est ce

que l'abbé Four explique

fort bien

l'exposé qui précède sa belle édition de

nouze.

Comme lui,

nous avons le souci

dans

Verme-

d' « allier

au respect des formes étymologiques une ample reconnaissance des mutations accomplies

nous pensons, de plus, qu'au

lieu

».

Mais

d'employer


—m— une graphie imitée du généralement,

fait

ainsi qu*on le

français,

est préférable

il

de s'inspirer

des principes, très simples, qui ont régi autrefois

notre langue. Il

n'y a pas lieu d'exposer,

dans leurs détails

(1)

:

ici,

ces principes

quelques remarques sur

phonétique suffiront. L'emploi de

la

en particulier, nous permettra de

la lettre o,

faire

une sé-

rieuse simplification.

La

voyelle 0.

Il

y

a,

en langue

d'oc,

doux

Vo ouvert et Vo fermé.

:

L'o ouvert se prononce

comme dans

français or, clos^sot, trop. Ex.

:

les

mots

hôrt^grôs^pelharôt^

esclép.

L'o fermé se prononce ou

:

trobador, razon^

espinos (pron. troubadou, razou, espinou, mutité la consonne finale). Dans les diminutifs en

de

et

Vn muette

:

on,

Vo est toujours fer-

ainsi chinon, peisson,

poton se

prononcent chinou, peissou, poutou,

La terminaison on des verbes (S""" pers. plur.) a un son nasal un peu plus assourdi que celui du français on. (1)

On pourra

consulter

l'ancien provençal putoiiée

cksieck, 1921).

la

très intéressante

Grammaire de

par Joseph Anolade (Paris, C. Klin-


IV

Tels sont les cas les plus fréquents. D'ailleurs,

dans notre texte Vo ouvert est marqué d'un accent (6)

ainsi, toute

;

La Mais

confusion sera évitée.

voyelle U.

prend

elle

Même

son qu'en français.

son ou lorsqu'elle forme

le

le

dernier élément de l'une des diphtongues «w, eu, iu^ ou,

lesquelles se prononcent àou,

éou, iou,

ôou (en une seule émission de voix, accent sur

premier élément). Cependant, à Ghilhac,

les

le

gens

purement donnent à w de iu un son intermédiaire entre u et eu et terminé par qui parlent le plus

une

sorte d'aspiration

L

et

N

rend par sonalha

A

la

;

mouillées.

(1).

/A, et celui

Le mouillement de

de n iparrih. Ex.

:

/

se

talhar,

lanhar, vergonha.

fin

des mots, Ih est bref

:

malh, gralh,

chavalh.

Abréviations.

— Las,

/os, nos, etc.,

mot précédent, peuvent

le

On

appuyés sur

se réduire à

en trouve de fréquents exemples

is,

ns, etc.

dans

les

écrits des troubadours.

Ce sont, d'ailleurs, nos vieux auteurs qui ont été

(1)

constamment nos guides. Nous avons essayé On donnera

fuaiil

aussi à m le son ou dans

les

fontaine, puant, pont, suan, sommeil.

mots suivants

:


V d'apporter

langue

à

l'œuvre

la

de restauration de notre

œuvre qui nous

modeste contribution. encouru

critique,

Si,

est

chère

parfois,

notre

nous avons

qu'au moins notre bonne

volonté soit notre justification.

Henri Gilbert.


2

LO COVISE

Un

jorn d'esliu, ves Chilhac.

Dins lo cel^ blau, lo solelh raia charreiras

;

li

Los homes sont lis

;

ges de brut pels

bestias charchon l'ombra. fora, elh trabalh.

Sai et

caires fressuros, lo carrel sobre la fauda,

lai, lis

dins

fennas

covison.

Sot lo Gantau son dec coviseiras

la Naneta,

:

la

Finon, la Mieta, la Catonet, la Loison, la Goton, la

Marinon, la Roseta, la Justina, la Marion.

Aco

es plazer de

veire

li

:

li

mans

se desgageon,

dets se coiton de picar lis espioanas ton, viron sobre'ls carrels, lis

coma

sônon

de carcavels

:

;

lis

fuses

li

san-

chambalhas d'escalha quant

gente

brut'cô

fail

que bolegon'n pauc, se levon

E'is coifas blanchas,

pas,

se

comencar

viron pas. la

Coma

d*una tau et d'una tau que'ls

fason'quelis fennas

per

covisada sen chaplar, sen dire quican

pôdon pas

;

sen se planger de

auzir, cotinent?

sis

homes


3

L'ASSEMBLEE

Un jour Dans dans

les

Les

d'été, à Chilhac.

le ciel

rues

;

bleu, le soleil irradie; point de

bruit

bêtes et gens cherchent l'ombre.

hommes

sont dehors, au labeur. Çà et

^es coins ombreux,

le

carreau sur

là,

dans

giron, les fem-

le

mes sont assemblées. la Il y en dix a qui sont réunies sous le « Cantau » Nanette, la Finette, la Miette, laCatherinette, la Loui:

son, la Margoton, la Marinette, la Rosette, la Justine, la

Marion. C'est plaisir de les voir

:

les

mains vont

vite,

les

doigts se hâtent de piquer les épingles les fuseaux sau;

tent, virent

sonnent

sur les carreaux,

comme

des grelots

:

les

quel

garnitures d'écaille joli bruit cela fait

I

Et les coiffes blanches, qui s'agitent un peu, ne se

lèvent pas, ne se virent pas. font-elles

parler

Gomment

ces

femmes

pour commencer la réunion sans jaser, sans

de l'une

et

de l'autre, sans se plaindre de

leurs maris qui ne peuvent les ouïr, présentement ?


— Chascuna, beleu,

vei,

4

enreive,

pessetas blanchas

lis

ques aura quant copara sa dentella aquela mandara quican elh drôlle,ques es sodart; l'autras aura de pan :

per que

sis efants

n'ajon

pasfam

;

una autra

— aquela

achatara

ques es mais cassada sobre son carrel una genta rauba de nôvia

am

sa

ques

drôlla,

es

promeluda... Et

Ji

dets fason mais sautar

lis

fuses, lis

a testa de vire se picon mais viste dins

chambalhas

d'escalba fason'na

lis

mais

espionnas

cartons,

brava

lis

mu-

sica.

Aco

es lo carrel de la

Naneta que sônalo mais clar,

aco es'quelh, amais, ques a

la dentella la

La Naneta, en virant la rôda, La Finon, que l'espia delh fai

mais langea.

cossira'n pauc. caire

Tuelh, Ihi

de

:

«

— Digeas,

«

Que

cossiras ben tant, anueit? paura Finon? N'en chau tant veire,

Naneta,

volés,

per ganhar sa vida «

— Anem,

!

vos mais ses

contas nos quican,

Totas levon la testa «

— Oc, ôc,

a

«

«

E

virada?

ben,

»

:

un conte per nos desvelhar Ges n'en sabe comencas, vos autras Non farem, non farem. Ses nôstr'ainada

comencas «

mau

e oblidarés vostr'ennôja.

1

:

!

!

— Si dise un — Oc, ôc !

»

conte, chascuna contara lo siône

?

:


Chacune, peut-être,

en rêve,

voit,

blanches qu'elle aura quand

elle

piécettes

les

coupera sa dentelle

:

enverra quelque chose au garçon, qui est sol-

celle-ci

dat; l'autre aura du pain pour que ses enfants n'aient

pas faim; une autre sur son carreau, à sa

fille,

celle qui est la plus

courbée

— achètera une gente robe de mariée

qui est promise...

Et les doigts font sauter de plus en plus les fuseaux, les épingles

à tête de verre se piquent plus vite dans

une plus jolie

les cartons, les garnitures d'écaillé font

musique. C'est le carreau de la Nanette qui a le clair

;

c'est

celui,

son

le

plus

qui a la dentelle la plus

aussi,

longue.

La Nanette, en virant la roue, soupire un peu. La Finette, qui la regarde, du coin de l'œil, lui fait «

«

— Dites, Nanette, vous soupirez bien — Que voulez-vous, pauvre Finette?

tant voir

pour gagner sa

— Allons,

«

vie

:

tant, hui ?

en faut

11

I

vous aussi, vous êtes triste? Hé bien,

contez-nous quelque chose, et vous oublierez votre ennui.

»

Toutes lèvent la «

« « « «

tête

:

— Oui, oui, un conte, — Je n'en sais point

pour nous éveiller

:

Non, non, vous êtes

— Si je dis un conte, — Oui, oui I

»

!

commencez vous autres! notre aînée commencez :

chacune contera

I

le sien ?


La Naneta arresta

a

Gealh «

»

:

ben,

sis fuses,

so

dis,

acô vos agrada

_^ Digeas lo

viste,

sabe

?

Naneta

Et la Naneta comenqet

espia son carrci

:

î

»

«

Lo

conte

:

delh


— La Nanette arrête «

— Hé

7

ses fuseaux, regarde son carreau

bien, dit-elle, je sais

cela vous plaît-il ? «

— Dites-le

Et la Nanelte

vite,

Nanette

commença

:

!

»

«

Le

conte

du Coq

»

:

:


8

LO CONTE DELH GEALH

Dinc una bôria, i avia'n boier ques amava melh dormir que trabalhar. Si lo mestre s'en anava de très pas, elh se botava a s'estirar e a badalhar.

Mas'co era

massa

l'estiu

!... Quant la chauchambas flaqidas se

que patissia

venia, Claude sentia sis

podia pas tener dreit

;

:

auria fat pranjeira tota la

liada...

Lo

ser, jazia, nientat.

Son

leit Ihi

agradava melh, de

segur, que la dallia o l'estombel.

Aqui, sonhava qu'avia res a faire, que se laboravon totes solets, li

que

li

blats se

champs médian en

lis

gardegeant...

Quan esmai,

elh matin, quant lo reloge sonava très

horas et que lo mestre, en tustant, per Ihi

gastava son reive

et

son benaise

Claude s'estirava, badalhava,

lo

desvelhar,

1

et...

demorava

elh

leitl

Un

matin, lo granger

lo

paire Jaconet

— badet


9

LE CONTE DU COQ

Il

y avait, dans une ferme, un bouvier qui aimait

mieux dormir que Si le

travailler.

maître s'éloignait de trois pas,

il

se mettait à

s'étirer et à bâiller.

Mais

c'était l'été, surtout, qu'il pâtissait!...

il

ne pouvait pas se tenir droit

fait la sieste

Le

soir,

il

plus, certes,

Là,

il

Quand

Claude sentait ses jambes molles

la canicule venait,

;

aurait volontiers

il

:

toute la demi-journée. s'allait gésir,

que

la

anéanti.

Son

lit

lai plaisait

faux ou l'aiguillon.

rêvait qu'il n'avait rien à faire, que les

champs

se labouraient seuls, que les blés se moissonnaient en •

les regardant...

Quel chagrin, heures

et

lui gâtait

Claude

que

le

le

matin, quand l'horloge sonnait trois

maître, en frappant, pour l'éveiller,

son rêve s'étirait,

et

son bonheur bâillait,

et

!

....

demeurait

au

lit!

Un

matin,

le

fermier

— lepère Jacquinet — ouvrit la


10

coma

d'aise, entret

si

volia'tapar la maire elh nis, a

Tescureta, et te Ihi faguet petar un parel d'emplasires

:

— AI

«

espelat

!

Te levaras pas

Lo boier se levet en bredolhant «

:

Quana fotuda besonha, qu'aqueli

bon veire qu'un boier

es de

»

!

aco es quauque granger.

los a

pas

reloges

fats

:

fedas

.

escenlas,

lis

li

sonalbas^ni mais

n'en chaunhava,

pensar,

i

Aco

»

Despueis, Claude podia pas auzir, sen

campanas, De vels.

!

de segur,

tipar, lis

lis

carca-

coma

lis

.

Si'cos avia durât, n'auria rebuzat.

Un jorn, ques que

am

faria

trobat

:

era solet, a l'hostau, se demandet de

aquelh coquin de reloge. Aguet leu

badet la caissa

Saguet benaise de pas per desvelhar laissaria lo

dormir

lo

et

desfaguet

li

lo veire arrestat

lo

rodetas. :

aora sonaria

paire Jaconet e aquelh d'aqui

Claudonet ques avia tant de suaû,

matin, belsigne! Et, de

Quant reloge

:

pensar, se botet a badalhar.

i

mestre tornet, essaiet de faire anar

lo

lo

res Ihi faguet.

Aquelh

ser,

lo boier

s'endormiguet, benaise, et

sonhet. Lhi era vejaire qu'aco era lo vespre. Per

l'esti-

vada, darrés la boria, lo pastre sonava son labrit pels

champs,

auzia cridar

:

los autres boiers seguian la regea.

;

Los


11

porte doucement, entra avec précaution, sanslumière, et

fit

résonner sur ses joues une paire de

— Ah

«

mauvais

!

ne

sujet, tu

te

Le bouvier se leva en maugréant

gifles

lèveras pas?

qu'un bouvier ne

assurément,

les a

quelque fermier.

c'est

»

:

— Quelle mauvaise chose que ces horloges

«

aisé de voir

:

I

II

est

pas inventées

:

»

Depuis, Claude ne pouvait ouïr, sans être en colère, les clochea, les sonnettes, les sonnailles, et

comme

les brebis

Un jour, ce

que

cela avait duré,

Si

même

les

Cette seule pensée le laissait sans appétit,

grelots

chaleur incommode...

en aurait perdu l'esprit.

qu'il était seul, à la

ferait bien

qu'il

la

il

vite trouvé

il

:

maison,

il

se

demanda

maudite horloge.

à cette

ouvrit la caisse

et

démonta

Il

les

eut

roua-

ges. fut bien aise de

Il

la voir s'arrêter

:

ore,

elle

ne

sonnerait plus pour éveiller le père Jacquinet, et celui-ci laisserait

sommeil,

le

Et, d'y penser,

Quand l'horloge

le

Ce il

:

Il

il

le

pauvre

se

mit à

maître revint, rien n'y

soir-là,

rêva.

dormir Je petit Claude qui avait tant

matin,

lui

le

il

!

bâiller.

essaya de faire marcher

fît.

bouvier s'endormit, tout heureux, et

semblait que

c'était

à la vesprée. Par le

guéret, derrière la ferme, le pâtre appelait son chien;

par

les

lon.

11

champs,

les

les autres

entendait crier

:

bouviers suivaient

le sil-


12

—A

«

Caliou

Morralhat

!...

Lo vacheiron jetava

li

!...

vachas

Vira

et

!...

vedels qui rape-

li

tavon per la prada. Toti Irabalhavon, dinsla boria, et

Claude dormia!... Dormia, so Aqueste cop, fora lo leit Et, dins

:

lo paire

coma

sabria l'hora?

son reive, se desmaissava de

Tôt per un cop,

— Cacaraca

« -

Aurian

crezia, per la vida!...

Jaconet vendria pas lo traire

dit

!

lo

gealh faguet

rire...

:

»

qu'aquelh fotut gealh sabia qu'era 1res

horas

— Cacaraca

«

!...

Cacaraca

!...

»

Lo paure Claude sentiguet, dins son eime, quican que s'en anava, un chastel de treva que se desrochava...

Badet los uelhs sen saber ont era. Et lo paire Jaconet saguet'qui per lo morralhar de

doas geautadas

et

per lo traire fora

Alaien, lo gealh,

caunhaire

que tornava chantar,

fasia l'es-

:

— Cacaraca

«

lo leit.

!

»

Li doas liadas, lo boier saguet

mais sornos que de

costuma. Era tan ennojat, que pensava gaire elh trabalh

.

Auzia res de sô que

velhat...

a medjorn

Vouguet :

Ihi dizian

faire pranjeira,

:

reivava tôt des-

coma'ls autres,

avia ges desuan. Quant Ihi

demanda von

per ques era tant sornos, dizia res, màs tochava son ase

.

.


— «—

Marche, Blanchet!... Marche, Mourraliat

Tourne Le petit vacher gardait

vaches

Claude dormait

la ferme, et

pour

les

et les

veaux, qui

prairie. Tous étaient au labeur,

s'ébattaient, par la

sait-il,

!...

»

!...

dans

-

13

!.

dormait, pen-

.. Il

la vie...

Cette fois, le père Jacquinet ne viendrait pas le jeter hors

du

lit

comment

:

Theure

saurait-il

?

dans son rêve, il riait à se démonter la mâchoire. Tout à coup, le coq fit « Cacaraca » On aurait dit que ce maudit coq savait qu'il était Et,

:

trois

!

heures

:

— Cacaraca

«

!

.

Cacaraca !.. » dans son esprit, quelque

.

.

Le pauvre Claude

sentit,

chose qui s'évadait, un château de 11

Et

le

père Jacquinet fut

pour

gifles retentissantes et le jetèl*

Là-bas,

le

moqueur

le

«

qui s'écroulait.

fée

ouvrit les yeux sans reconnaître où lui

il

se trouvait.

appliquer deux

hors du

lit.

coq, qui s'était remis à chanter, faisait

:

— Cacaraca

!

»

Toute la journée,

le

bouvier

fut

encore plus sombre

que de coutume.

11

était si

guère au travail.

Il

n'entendait rien de ce qu'on lui

disait

:

comme

il

les autres, à

Quand on ne

rêvaittout éveillé...

lui

disait rien,

midi

:

ennuyé,

Il

le

demandait ce qui mais

il

qu'il

ne pensait

voulut faire

la sieste,

sommeil ne

vint pas.

le

rendait

si triste, il

suivait son idée... s


14

Se botet elh

leit

coma'ls polas jocavon. Crezia po-

der dormir; aco saguet fotut: demoret

lis

uelhs ba-

la cridada delh gealh,

d'aquelh

dats!

Auzia, enquera,

mauvas gealh que desvelhava

A

lo

se

podia pas

monde ques

avian suan.

chalia qu'aco'chabesse

I

1

Lo reloges avia vougut sonalhar naria pas

;

era parangit

matin, que

taizar, lo

:

lo reloge

i

tor-

!

Et lo gealh...

N'en penset pas mais. Mas se levet, d'un saut, se bestiguet et prenguet son cotel pontut e aguzat delh biais. Davalet,

que l'auziguesson pas, com'un rau-

baire, et s'en anet ves la jocada. Conisssia tant l'en-

que podia

dreit, I

faire sen chalelh.

entret.

Lo

un fotraud de gealhas roge, era la testa esconduda sot son ala: creze ben que sonhava d'una genta poleta gearei dels polas,

dreit sobre

son jocador,

cada ques avia picot芒t de gran a costat des

elh, ras

un plangeon... Claude l'avia tant vist de c么ps, que l'aguet leu trobat, a l'escur.

Lo graupiguet, Ihi torseguet

que cridesse pas,

et Ihi

aponget, dins

lo cuelh,

le

per

corps, son

cotel pontut.

Lo gealh faguet pas'na cridada era mort

pauc

:

Coma

;

s'espousset

un

I

lo

mostre s'en tornava, en portant

lo

corps


— se mit

Il

au

comme les

lit

pouvoir dormir

;

mais ce

15

poules juchaient, croyaat

fut

en vain,

resta les

il

yeux

béants. oyait encore le cri

Il

qui ne pouvait pas se

gens en sommeil

Ah

fallait

il

!

du coq, de ce mauvais coq

taire, le

matin, qui éveillait les

!

que cela

finît

!

L'horloge avait voulu carillonner reviendrait pas

:

elle avait

Fhorloge n'y

;

son compte

Et

le coq...

Il

ne poursuivit pas sa pensée. Mais

!

se leva, d'un

il

saut, se vêtit et prit son couteau pointu et soin.

Il

affilé

descendit en évitant de se faire ouïr,

voleur, et s'en alla vers la juchée.

bien l'endroit, qu'une lumière

Il

avec

un

tel

connaissait

S[

était inutile.

y entra.

Il

Le

roi des poules,

un énorme coq rouge,

était droit

sur son perchoir, la tête cachée sous son aile crois bien qu'il rêvait d'une jolie poulette

:

je

au plumage

marqueté de blanc qui^avait picoté du grain à côté de au pied du pignon... Claude l'avait vu tant de fois, qu'il l'eut vite trou-

lui.,

vé, dans l'obscurité. L'ayant saisi,

pour l'empêcher de

crier, et lui

il

lui tordit le

plongea, dans

le

cou

corps,

son couteau pointu.

Le coq ne jeta pas un

peu

:

il

était

Comme

le

mort

cri

;

il

trembla seulement un

!

monstre s'en retournait, en portan

le


— auziguet

lis

16

fedas que bramavon,

li

vachas

et

li

bious

que morlavon una chuta, esconduda dinc un vielh aurian dit qu'aqueli bestias sauze, alai, goinava ;

:

coma

d'eime et plangian lo mort. Pueis,

avian

volian sonar lo clas, dins tota la bôria

botèron a brandolhar

sis

li

si

bestias se

chadenas, a espoussar

si

sonalhas.

Delh

luan,

lo

reloge de la gleisa sonet medja-

nueit.

D'auzir aqueli bruts, que cranhava tant, Claude, lo Tuaire. trantiolava de paor.

Se botet a corre e anet traire de l'autre costat de la paret lo

corps delh gealh, après que Ihi aguet ran-

chat una pognada de plomas, per faire creire qu'acô era lo reinaud que Favia emportât.

Quant aguet pannat

si

mans, plenas de sang,

lo

boier se tornet jaire. «

— Aora, res gaslara mon suan

»,

se penset.

Mas era cranhos. Vesia ques avia mau desvelhat sei lo matin. Per la

guet

coma

le

fat.

fin, lasse,

Demoret

s'endormi-

jorn anava vener. Et, dins son suan,

aguet un reive que fazia paor. Vezia, davans elh, lo gealh, dinc una nebla rogea. Lo bec de l'aucel era badat et preste a Ihi crebar lis

pontudas eron dreit son cuelh et semanavon planlar. Lo cotel era apongeat dins lo corps delh gealh, e una plueja de sang tombava delh mau. Tota gota que tochava le morre delh

uelhs

;

sis arpias

blava que se

i


— corps,

il

ouït les brebis qui bramaient, les vaches et

bœufs

les

un vieux

(jui

meuglaient.

du sens

comme

victime. Puis,

dans toute

la

ter leurs chaînes, à

Dans

Une

chouette, cachée dans

on aurait

là-bas, ululait:

saule,

ces bêtes avaient

le glas,

17

si

que

elles

ferme

la

avaient voulu sonner

mirent à agi-

les bêtes se

secouer leurs sonnailles. l'horloge de l'église

le lointain,

dit,

et qu'elles plaignaient

sonna minuit.

D'ouïr ces bruits, qui lui causaient tant d'effroi

Claude, l'assassin, chancelait de peur. 11

le

se mit à courir et alla jeter, par-dessus le

mur,

cadavre du coq, après qu'il en eut arraché une poi-

gnée de plumes pour faire croire que

c'était le

renard

qui l'avait emporté.

Après le

qu'il eut

essuyé ses mains, pleines de sang,

bouvier alla se recoucher. «

— Ore,rien ne troublera mon sommeil

Mais

il

de son

était

rempli de crainte

forfait. Il

la fin, brisé

demeura

de fatigue,

allait paraître.

Et,

il

;

il

éveillé

»,

pensa-t-il.

se rendait

compte

jusqu'au matin.

s'endormit

comme

le

A

jour

pendant son sommeil, ifeut un

rêve effrayant. Il

voyait, devant lui, le coq,

Le bec de l'oiseau yeux et

il

était

;

était

dans une nuée rouge.

ouvert et prêt à

lui

crever les

ses griffes acérées étaient dirigées vers son cou

semblait qu'elles allaient s'y planter. Le couteau

enfoncé dans

sang tombait de

le

corps

la blessure.

du coq et une pluie de Chaque goutte qui attei-


18

Claude

i

coma

entrava et lo borlava

de'gotas de

s'acôs era estât

fiôc.

Et lo gealh espoussava sis alas et cridava «

— Tuaire

Lo

Tuaire

!...

:

1... »

tuaire suzava e aganissia de paor. Volia cridar

mas quican

ténia

si

;

maissas sarradas;et lanhava. Se

sentia estavanir...

— era très horas —

Tôt per un cop,

I

gealh faguèron doi rais de fîôc guet, et faguet «

lis

uelhs delh

son cuelh se redezi-

una cridada que bronziguet

— Gacaraca

Claude

;

!

:

»

sobresautet dins son

leit,

com'un

pueis,

simple, correguet fora.

Lo paire Jaconet, que

lo

venia desvelhar,

lo

veguet

passar davans elh et se sauvar, a la galopada, pels

champs, en cridant

~

« Is

Mais

me

:

crebara'ls uelhs

uelhs!... Paras me!...

1...

Mais

me

crebara'

»

Lo perdeguèron, quan entret, alai, dins la chassanha et, desempueis, dengun l'a vist... Dison que s'es trais dins l'aiga et que son corps es demorat elh ;

fond de quauque gorg.

Sô que vos pôde fin, et

dire,

acoes ques afah'na mauvasa

qu'aqueli que volon pas trabalhar n'en fazon

pas d'autra.


19

gnait le visage de Claude pénétrait dans les chairs,

comme

et,

Et

des gouttes de feu, les brûlait...

coq agitait ses

le

— Assassin

«

!...

en criant

ailes,

Assassin

!

:

»

L'assassin suait et défaillait de peur. crier

Il

eût voulu

mais une force invisible tenait ses mâchoires

;

serrées; et

il

gémissait faiblement.

se sentait dé-

Il

faillir...

Tout à coup

était

il

trois

coq dardèrent deux rayons de et

il

jeta

«

un

cri retentissant

Cacaraca

!

heures

!

les

yeux du

feu,

son cou se tendit

lit,

puis,

:

»

Claude sursauta,

dans son

comme

fou,

courut dehors.

Le père Jacquinet, qui venait

l'éveiller, le vit

ser devant lui et se sauver, en criant «

yeux

On

!.

me

Il .

le

crèvera les yeux

Protégez-moi

.

perdit de vue,

chassagne

la

prétend est

!

;

et,

!...

Il

me

crèvera les

»

quand

il

entra, là-bas, dans

depuis, personne ne

qu'il s'est jeté

pas-

:

dans

la rivière et

l'a vu...

On

que son corps

demeuré au fond de quelque gouffre.

Tout ce que je puis vous

mauvaise

fin, et

ler n'en font

dire, c'est qu'il a fait

que ceux qui ne veulent pas

point d'autre.

une

travail-


20

UNA QU'AMA PAS

Quant de Finon

la

LIS

FLANHAIRES

Nanela se saguet taizada, aquela chapleira

Ihi

tornet dire

:

«

— Sabés s'era maridat, Claude — Lo conte zo dis pas. — Creze que non iNaneta. — De que n'en sabés, Finon?

«

« « «

fazia,

sabe! Pôde pas creire que, d'autres côps,

fennas saguesson tant bestias faire levar sis

D'un caire «

lo tuaire?

homes, quant eron flanhaires

et

de l'autre,

— Que ses simpla,

Ihi

Finon

!

lis

com'anueit. Devian ».

respondegaèront I

:

a tojorn' gut de pin-

taires, de ribotaires, de flanhaires et n'i aura enquera. Ac6 sera nos autras, pauras fennas, que n'en patirem. « Et de que mais? Pasta ben!.

— — Et que farias? — Que faria? Me plange pas de mon Peire .

« «

Sis efants e

sis avia'n

.

:

ama

ôbra tant que pot; mas vos promete que

Claude, te Ihi pegearia enquera mais d'em-

plastres que lo paire Jaconet. Lhi botaria la picha dins


21

UNE QUI N'AIME PAS LES FLANEURS

Quand

la Nanette eut cessé

de Finette

lui dit

encore

de parler, cette bavarde

:

«

— Savez-vous marié, Claude l'assassin? — Le conte ne dit pas. — Je crois pas, Nanette. ne — Qu'en savez-vous, Finette?

«

—Je

«

« «

était

s'il

le

l'était

qu'il

femmes

le

saisi Je

fussent

si

ne puis croire qu'autrefois

sottes qu'aujourd'hui. Elles devaient

faire lever leurs maris,

De côté «

les

et d'autre,

quand

on

lui

— Que vous êtes naïve,

ils

étaient paresseux

répondit Finette!

Il

».

:

y a toujours eu

des ivrognes, des riboteurs, des fainéants et

il

y en aura

encore. Ce sera nous, pauvres femmes, qui en pâtirons « « «

— Bien sûr!... Et quoi encore?.. — Et que vous? — Ce que je ferais? Je ne me plains

I

feriez-

pas de

mon

œuvre tant qu'il peut; mais je vous promets que, si j'avais un Claude, je lui appliquerais encore plus de gifles que le père JacPierre

:

il

aime ses enfants

et


— la

man,

trica, lo « «

«

«

quan

es elh trabalharia,

menar

elh

champ

— Coma zo dizési...

— am una

ieu deuria,

1

farias pasi

— faria pas? Espias me dins vision — Aquela gampa de Finon Me paor, coma lo

!...

parla

«

22

!

fai

I

— Chauria que saguessiam lotas com'aco. — E ben, Finon, avés tant de morre, contas nos sis

quican. «

— Crezésque

sei

empeitada?Ma menina me

dizia

pro de besonhas, quans ère petiota.

Anem, escoutas celh »

«

Coma

faguet Codaca per entrar elh


23

quinet; je lui bouterais la pioche en main et vaillerait,

au champ «

quand

je devrais, avec

une

trique, le

il

tra-

mener

I

— Comme

vous dites

cela!...

Vous ne

le

feriez

pasi «

Je ne

la prunelle «

comme « «

le

ferais

pas? Regardez-moi bien dans

I

Cette

terrible Finette!...

elle parle

Elle

me

fait

peur,

!

— faudrait que nous fussions toutes ainsi. — Hé bien, Finette, puisque vous êtes hardie, Il

si

contez-nous quelque chose. «

Croyez-vous que je sois embarrassée?

grand mère

me

Ma

disait assez de choses, lorsque j'étais

petite.

Allons, écoutez

au

ciel ».

«

Comment

fit

Coudaca pour entrer


— 24 —

COMA FAGUET GODAGA PER ENTRAR ELH GELH

Un paure home Chau

era mort

un vendre.

que, aquelh jorn, la Camardas avia

creire

que

dalliat trop viste o

lis

esprits fazian pranjeira

:

i

aguet ni ange ni diable per campar son anma.

anma

sabia pas ont anar, per so que

conissia pas mais lo

chamin delh celh qu'aquelh de

Et la paura

l'enfern.

Era aqui que lanhava, quant sent Mechelh, que venia de querre luan,

et,

un

rei,

passet.

Ella lo seguet, de

com'acô, arribetelh celh.

Aco era un chastel d'ont que n'en vezian pas

lo

la

chap,

parets era tant langea et

tan auta que n'en

vezian pas la cima. Li justes, et,

tota'ls

que

anges porlavon, entravon sen

fin,

cops que lo portau, qu'espandissia,

se

lis

badava, auzian, en una doussa musica Gloria!

»

:

«

Gloria!


25

COMMENT

COUDACA POUR ENTRER AU CIEL

FIT

Un pauvre homme Il

fauché un peu trop

au

était

mort un vendredi. la Camarde avait

faut croire que, ce jour-là,

repos,

recueillir

car

vite

n'y

il

ou que

les esprits se livraient

eut

ange ni diable pour

ni

son âme.

âme ne

Et la pauvre

savait

se

diriger parce

chemin du

qu'elle ne connaissait pas plus le

ciel

que

celui de l'enfer. Elle se lamentait,

quand

quérir un roi, passa. Elle

saint Michel, qui venait de

de loin,

le suivit,

et, ainsi,

arriva au ciel. C'était

un

castel

dont la muraille

qu'on n'en voyait pas

la

fin

était si

longue

haute qu'on n'en

et si

voyait pas la cime.

Les

élus,

discontinuer,

que et,

les

anges portaient, entraient sans

chaque

fois

que

le portail,

qui res-

plendissait de lumière, s'ouvrait, on entendait en

douce musique

:

«

Gloire

!

Gloire

I

»

une


26

L'anma la gloria

se sentia tirada per l'enveja d'anar chanta r

de l'Autisme.

Tustet pelh portau. clau delh Paradis, espin-

Sent Peire, ?que ten la chet « «

e

1

;

— Que voles so cridet. — Sel Codaca de ves Ghilhac ? »

vene

;

ai

ganhat

lo celh

».

Lo gardaire delh celh respondeguet en

se

re-

gaunhant

— Quau menât « — Vene solet, bon sent Peire. — Ont es ton bon ange « — sabe pas quant sei partit «

t'a

?

«

?

;

d'alaien,

i

avia

dengun per me prener. «

« «

— Et voudrias entrar'qui? — Fotre ben, bon sent Peire — Te voies entornar!... Recebem !

pas la pau-

ralha!... «

— S'ere pauralha coma vos, demandaria res! Voi

nommas

Peire, et ses

pas tant l'harbalant,

mais dur que lapeira

quand

lo

!...

Fazias

gealh chantet très

côps !...». L'apostre n'en demoret com'una feda massolada...

Un pauc

apueis, cridet sent

Thomas.

Aquelh d'aqui, ques avia auzit Codaca, de Fespoussar de «

la

mena

:

— Aco es tu, ques as tant

de morre

?

se

prometia


27

L'âme

se sentait

possédée d'un ardent désir d'aller

chanter la gloire du Très-Haut. Elle heurta au portail.

Saint Pierre, qui tient la clef du Paradis, regarda «

«

— Que veax-tu? cria-t-il. — Je suis Coudaca, de Chilhac;

et j'y

viens

« «

« « il

le ciel

répondit, en faisant la gri-

ciel lui

:

— Qui conduit? — Je viens seul, bon saint Pierre. — Où est ton ange gardien — Je ne sais pas quand je suis parti de là-bas, t'a

?

le

:

n'y avait personne «

— Et

«

— Certes,

«

— Veux-tu —

I

.

oui,

me

pour

tu voudrais

pauvraille «

gagné

».

Le gardien du

mace

j'ai

prendre.

entrer ici?

bon saint

te retirer?...

Pierre.

Nous ne recevons pas

la

.

comme vous, je ne demanVous vous nommez Pierre et vous êtes

Si j'étais pauvraille,

derais rien

!

plus dur que la pierre!... Vous ne faisiez pas tant fier,

:

lorsque

le

coq chanta trois

L'apôtre en resta

comme une

le

foisl... ».

brebis étourdie d'un

coup de massue...

Peu après,

il

appela saint Thomas.

Celui-ci, qui avait ouï le

Coudaca, se promettait de

rabrouer de la belle façon «

— C'est

toi,

qui es

si

:

hardi?


«

mas

28

Bon sent Thomas, demande pas gaire

vole

:

entrar elh celh.

— Pelha de beslia! Desgorgeal

«

sem

martirs,

li

lis

confes,

lis

!...

Sabes pas que

apostres,

li

sents et

qu'aquelh celh es noslre? «

Digeas, sent

maucrezensa

man

vôstra

ja?

et

Thomas,

voi sovenés de vôstra

que Nôstre Signe vos faguet botar

dins son| costat?... N'avés pas bergon-

»

Lo sent

se casset, pueis cridet sant Paul.

Desera, sent Paul badava la bocha per Ihi en dire quatre, quant Codaca faguet «

— Apôstre,

venés contar

sei

sô que faguerias, quant

Estefe, e ont anavias,

per

terra.

Acô mut.

.

.

:

benaise de voi veire

:

beléu,

me

tueron sent

quant un'esparnida vos traguet

»

Ihi faguet

com'una

gimblada

et

demoret

.

Mas

lo

bon Dieu, que sabia que

i

avia quican, ven-

guet veire.

Oodaca n'aguet pas paor de <

— Senhor, so

pelhard, sut,

vos

ai bailat

Ihi parlar

un pas grand

cas;

ai

credut et n'ai dengun tuât. Tota

de

mon pan am

ma

vida,

aquels que n'avian ges, ai

fat

chaufar et jaire aquels qu'avian

sen

leit; et, aora, voi

Paradis.

:

mas un paure serve, un mas vos ai totjorn conis-

diguet, sei

freit et

vene demandar de

me

qu'eron

badar

lo


«

chose

:

Bon je

Thomas,

saint

sommes

les

— Dites,

«

!

Insolent

Tu ne

!

ciel.

sais pas

que nous

martyrs, les confesseurs, les apôtres, les

que ce

saints, et

ne demande pas grand

je

veux seulement entrer au

— Vil manant

«

29

ciel est

saint

nôtre?

Thomas, vous souvenez-vous de

votre mécréance, et que Notre-Seigneur vous ter votre

main dans son

vergogne

? »

Le saint baissa

fît

bou-

côté?... N'en avez-vous pas

la tête, puis

il

appela saint Paul.

bouche pour lui faire un discours bien senti, quand Coudaca fit « Apôtre, je suis enchanté de vous voir peutDéjà, saint Paul ouvrait la

:

être,

:

me

venez-vous conter ce que vous

on martyrisa saint Etienne,

où vous

et

feu du ciel vous jeta à terre...

Ce fut

comme

resta sans

Mais

le

mot

si

on

l'avait

— Seigneur,

dernier des

vous

ai

cinglé au visage et

bon Dieu, qui savait bien

jamais

sonne. Toute

dit-il, je

hommes,

ma

qu'il se

passait

lui

vie, j'ai

parler

:

ne suis qu'un pauvre

mais

rien qui vaille;

renié, j'ai crw

qui n'en avaient point,

partagé j'ai

serf,

je

ne

en vous et n'ai tué per-

mon

pain avec ceux

réchauffé et couché ceux

qui avaient froid et qui étaient sans abri viens vous

il

voir.

Coudaca n'eut pas peur de le

»

dire...

quelque chose, vint

«

quand quand le

fîtes,

alliez,

demander de m'ouvrir

le

;

et, ore,

Paradis. 3

je


— —

«

Aco

Dieu. Te

30

es parlât delh biais,

sabes parar

et

Peire, bada, et tu, entrai

respondeguet

ton plaidejat

lo

bon

m'agrada.

»

Aqueste côp, chaiiguet que

lo

portau se badesse, ei

Codaca entret elh Paradis. Aquels sents son li senhors d'autres cops, ques avian tôt lo benaise, et Codaca lo paure monde ques a tant rambalhat per en aver un pauc.


«

te

— C'est bien parlé,

31

répondit

le

bon Dieu. Tu

sais

défendre et ton plaidoyer m'agrée. Pierre, ouvre

et toi, entre

Cette fois,

!

!

» il

fallut bien

que

le

portail s'ouvrît, et

Coudaca entra au Paradis. Ces saints sont les seigneurs de jadis, qui avaient tout le bien-être, et Coudaca, le pauvre peuple qui a tant peiné

pour en obtenir un peu.


32

D'AUTRES COPS

Aquelh conte agradet pro am'ls fennas, boteron a chaplar daparteira

La Mieta. besonhas

Au Finon

1

et totas se

:

Mas sabés de gentas

I

La Catonet. embolhada.

..

L'avés auzida

?

N'a pas la gorgea

un curât dins

Parla com'

sa cha-

deira...

— Sabe sô

La Finon. La Loison.

ques

ai après.

kco es pas de messongeas, sô que

a elh chap de vostre conte

i

?

— De que? — Acô dels paures et dels senhors.

La Finon. La Loison. La Finon. La Roseta.

— El pardina

li

libres,

!

— Tenés, la Goton, ques a estudiat dins

nos zo contara.

— — —

M' en sovene gaire, aora. La Goton. Digeas nos zo La Marinon. Aco es ben vrai, vezés. Fazia pas de La Goton. bon viure, d'autres cops. Tota villa, tôt vialage avia !

son senhor. Aquelh d'aqui vesqia dins son chastel, a


— 33 —

AUTREFOIS

Ce conte plut beaucoup aux femmes, leurs réflexions à tour de rôle

Là Miette choses

.

— Hé, Finette

!

et elles firent

:

Mais vous savez de belles

!

La Catherinette. le gosier

— L*avez-vous ouïe? Elle n'a pas

embarrassé... Elle parle

comme un

curé en

chaire...

— Je sais ce que — Ce ne sont pas

La Finette. La Louison.

j'ai

qui vient à la

fin

de votre conte

La Finette.

— Quoi donc?

La Louison.

— Ce

appris.

des mensonges, ce

?

qui concerne les pauvres et les

seigneurs.

La Finette. La Rosette. dans

— Hé pourquoi? — Tenez, la Marguerite,

les livres,

1

La Marguerite. La Marinette. La Marguerite. faisait

— Je ne m'en souviens guère, orc. — Dites-le-nous — C'est la vérité, voyez-vous ne I

pas bon vivre, autrefois. Chaque

village avait

qui a étudié

nous l'expliquera.

!

son seigneur. Celui-ci vivait

Il

chaque dans son

ville,


34

l'abriga, darres si grossas torres.

covidava d'autres chastelans,

Quant s'ennojava, amies, et

sis

am

toti,

un tropel de chins, anavon chassar. Quant totaquelh mondes aviant passât, chalia veire cevadas,

li

Lo

lis

ordis,

blats dralhats,

li

trapegeats.

mas

paure serve vezia chatir sa racorda et podia

gardegear... Si leu fat

:

s'

era vougut virar, acô séria estai

un liam elh cuelh e una brancha d'abre

gralhs avian per espartinar

La Marinon.

Li

1

!

Lis podian pas botar en prison,

aquels mauvas senhors?

La Goton

— Quau

Eron li mesbotavon' Is autres. Et chalia Aco eras els que pas faire grand cas, vezésben, per anar dins' quelis tres.

los auria botats?

i

i

escondalhas escuras ont

li

fazian

rats

lo diable

a

quatre.

— Et pôble, cossi vesqia? — Lo pôbles era de planger. Mangeava — sedats era per senhor —

La Roseta. La Goton; de pan nègre

lo

lo

lo

,

et

marchava, mais d'un cop, ped deschaus. Pueis, quant s'era esquintât elh trabalh,lhi prenian

un bon pauc de son tôt so

Si lo

dava

vin,

de son blat, de sa fruta, de

ques avia campât.

li

senhor volia

faire bastir

un

chastel,

coman-

serves, et per res! Si s'en anava a la guerra'

a la crosada,

si

fazia de diutes, si

maridava sa

filha,

Ihi chalia bailar d'argent.

Et la nueit, quant

li

garnolhas coassavon, dins

li


35

castel, à l'abri, derrière ses grosses tours.

nuyait,

il

accompagnés d'une meute de chiens,

Quand tous !

s'en-

il

allaient chasser.

ces gens avaient passé,

les avoines, les orges, les blés

pieds

Quand

conviait d'autres châtelains, ses amis, et, tous,

couchés

il

fallait voir

et foulés

aux

Le pauvre serf voyait détruire sa récolte sans

pouvoir protester. été vite fait

un

:

eût voulu se plaindre,

S'il

lien

au

col et

Les corbeaux avaient de quoi

c'eût

une branche d'arbre faire leurs

I

repas L..

La Marinette. Ne pouvait-on pas les bouter en prison, 'ces méchants seigneurs? Qui les y aurait boutés? Ils La Marguerite. étaient les maîtres. C'étaient autres. Et

il

ne

fallait

pas

eux qui y boutaient les grand chose, voyez-

faire

vous, pour aller dans ces sombres oubliettes où les rats faisaient le sabbat.

La Rosette. Et le peuple, comment vivait-il? La Marguerite. Ah le peuple était à plaindre II* mangeait du pain noir" le plus fin était pour le seigneur —, et il marchait, bien souvent, pieds déchaus. Puis, quand il s'était épuisé au labeur, on lui prenait une bonne partie de son vin, de son blé, de sa cueil-

!

lette

de

fruits,

en un mot de tout ce

Si le seigneur voulait faire bâtir

qu'il avait récolté

un

castel,

il

dispo-

sait des serfs et sans rétribution. S'il allait à la guerre,

à

la

croisade,

s'il

fille, il fallait lui

Et, la nuit,

faisait

des dettes,

s'il

mariait sa

bailler de l'argent.

quand

les grenouilles coassaient,

dans


36

li serves anavon batre l'aiga per que lo mestre poguesse dormir. La Marion. E ben, belsigne! Lo chalia pas cros-

rasas delh chastel,

sar?

La Catonet. nhors

N'

i

a,

anueit,

d'

aquels

se-

?

La Goton.

Ges.

I

a un folraud de temps que lo

chastel de Chilhac es desrochat et qu' aquels que

demoravon

son... sabe

— Ont era,

La Justina.

La Goton.

i

pas ont... lo chastel

de Chilhac?

Delh costat de la gleisa. Era bastiten

aut delh roc.

La Marion. — Quau vos a dit tôt acô ? La Goton. Mon paure pairin, ques es. mort l'annada passada, a quatre vint dech ans (que lo bon

Dieu

La

et la

bôna Viergea ajon son anma Et com' an fat per que i

Loison.

!)

aje ni senhors

ni serves?

La Goton. fin, se viret.

Lo pobles avia tant patit que, per la Mas per qu' acô' chabesse, n'en chauguet,

de centenadas

La

!

—E

enquera anueit, lis pelhards pâtisson pro. Me sovene que, quant ère petiôta, mangeaviam gaire de pan blanc ni de part, a l'hostau. FipîoN.

N' aviam

mas per Sant

quant de côps

Joan, la festa de Chilhac. Et

ma mamas

a prestit sa pasta

racet

La Catonet.

— Aquelh temps

es passât.

am

de


— les fossés

que

le

du

37

castel, les serfs allaient battre

Teau, afin

maître pût dormir.

La Marion.

— Le pauvre homme

*

Ne

fallait-il

pas»

aussi, le bercer ?

—Y

La Gatherinette.

en

a-t-il,

hui, de ces sei-

gneurs?

La Marguerite.

temps que le que ses habitants

Point. Voilà beau

castel de Chilhac est en ruines et sont... je ne sais où..

La Justine. Où était-il, le castel de Chilhac? Du côté de l'église. Il surplomLa Marguerite.

blait le roc.

Qui vous a dit tout cela? La Marion. Mon défunt parrain, qui est mort La Marguerite. l'an passé, à quatre-vingt-dix ans (que le bon Dieu et

la

bonne Vierge La Louison.

âme comment

aient son

Et

!)

a-t-on

fait

pour

qu'il

pâti,

qu'à

n'y ait plus ni seigneurs ni serfs?

La Marguerite. la fin

il

que cela

— Le peuple avait

se révolta. Mais prît fin

La Finette.

il

tant

en fallut des siècles, pour

!

— De

assez à pâtir. Je

nos jours encore, les pauvres ont

me

toute jeune, nous ne

souviens que,

lorsque j'étais

mangions guère de pain blanc,

ni de viande, à la maison.

Nous en avions seulement

à la Saint-Jean, la fête de Chilhac. Et combien de fois

ma mère a

mis du son dans sa pâte

La Catherinette.

!

— Ce temps est passé.


— pauc de chapelet

La Finon.

— Dizés, vos autras fennas,

La Mieta.

temps a

38

si

diziam

un

?

— Laissas

la velhada.

m'

estar' cô

!

Aurem pro de

Contas quican mais.

— Iganauda de Finon — Au Mieta! Lojorndelh Soparon, nos

La Mieta. La Naneta.

!

avés contât

:

tornarés dire

?

La Mieta.

«

Lo

S'

acô vos agrada, vole ben. Escoutas

lop que s'es fat

monge

»

;

nos zo

:


-

La Miette.

Dites,

39

vous autres femmes,

disions un bout de chapelet

si

nous

?

— Laissez donc cela

La Finette. d^ temps à

!

Nous aurons assez

Contez plutôt autre chose.

la veillée.

— Impie de Finette! — Holà, Miette Le jour du Réveillon,

La Miette. La Nanette.

vous nous avez conté

vous nous

le

La Miette. Ecoutez

:

redirez

!

:

«

Le loup qui

s'est fait

moine

»

?

— Puisque cela vous agrée, je veux bien

;


—

LO LOP QUE

D'aquelh temps,

Un

li

40

S'ES

FAT MONGE

bestias parlavon.

mais d'una par-

lobas, ques avia espaoralhat

geada, tombet malaute

:

la

ronha

Ihi

mangeava

la pel.

Plen de dolor et de languizon, elh pensava morir end

sa cavorna. Preget guet,

si

lo

bon Dieu de garir son

mau

et

promele"

tornava aver la sandat, de se passar de part

d'aquelh jorn en

lai et

de se faire

monge end lo covent

de Sent Julian, de Breude.

Quant miracle! L'endeman, saguetgarit! fat lo vot vouguet faire la penitensa.

Avia

:

S'en anet ves Breude.

Pelh chamin, cle,

de

lis

chins, que sabian res delh mira-

avian pro enveja de Ihi esfatar la pel, els

Ihi la

traucar a cops de forchas;

mas

homes

era tant con-

^ni que denganlhi faguet res. Lo monde, amais, lo pre-

nian

per quauqu'anma

quo patissia

et

se

signa-

von..

Nostre lop arribet elh covent. Lo portier Ihi badet et lo

menet ves

l'abat.


41

LE LOUP QUI S'EST FAIT MOINE

En

ce temps-là, les bêtes parlaient.

Un

vieux loup, qui avait porté l'épouvante en plus

d'un parc, tomba malade Ja rogne lui rongeait

la

peau.

croyait bien

mou-

:

Plein de douleur et de tristesse,

il

en sa caverne.

rir

11

pria

le

bon Dieu de guérir son mal

recouvrait la santé, de renoncer, pour

s'il

ses jours, à se

et promit, le

reste de

nourrir de chair et de se faire moine

au couvent de saint Julien, de Brioude. Quel miracle

Ayant Il

fait le

s'en alla

En chemin, cle,

!

I

donc à Brioude. les chiens,

qui ne savaient rien dumira-

avaient bien envie de lui déchirer la peau, et les

hommes était si

gens

Le lendemain, il fut guéri vœu, il voulut faire la pénitence.

le

de la lui percer à coups de fourches.; mais contrit

que personne ne

prenaient

même pour

lui

fit

de

il

mal. Les

quelque âme en peine

et se signaient.

Notre loup arriva au couvent. Le portier et le

présenta à l'abbé.

lui ouvrit


— «

Aco es

me

Julian «

tu,

42

fa^uet aquelh, que sent

fraire,

fazia veire,

quant sonhave, aquesta nueit?

T'espeitave, sabes.

« Lo sent, per la volontat de Dieu, m'a dit que ses un grand pechador fai penitensa, fraire, fai penitensa Que la bôna gracia tombe, coma l'aiganha, sobre :

!

ton

anma

»

1

Et tant l'abat n'avia geau, tant pau mais l'auria

potonat!

Adonca, lo mangea feda

doneron

lo

pietos de

rauba, Ihi

bidar.,. Et pueis,

lis

mais

lo

chantavaben un pauc

la gleisa,

mas

s'era roumassat,

hors de chantar,

:

bestiguet la

de Fraire Alengrin et saguet

monges. A

coma

fort et

gia

li

nom

autres

deflîgun s'en

plan-

monges podian cha-

que volés? Fazia sô que podia

:

un

lop n'es pas de gôrgea a chantar la messa, pas mais

qu'un ase n'a de biais per Sajas, solamen,

jazia sobre

un

tochar la chabreta...

que Fraire A leyigrin

leit

fazia penitensa,

de gavels, plorava

sis

pechats et

pregeava de bon cuer.

Mas pregea que pregearas temps, Ihas

e' Is

de sopa Ai

si

!

autres lioumes

Ihi

faire

maigre tant de

li

lis

pastena-

fazian gingiva; satopinada

qu'auria crocat una fedona!... lo tornet prener.

Elh que chantava, d'avant, :

De

bailava lo badalh

La languizon zava

!

dents venian langeas, langeas,

a la gleisa,

li

am

tant de cuer, se tai-

monges podian pus

chabidar!...


43 Est-ce

«

toi, frère,

faisait voir,

es

dans

fît

mon

me

que saint Julien

celui-ci,

rêve de cette nuit?

«

Je t'attendais, sais-tu?

«

Notre saint, sur l'ordre de Dieu, m'a révélé que tu

un grand pêcheur fais pénitence, frère Fais péniQue la grâce d'en haut tombe, comme la rosée !

:

tence

!

âme

sur ton

!

»

Et l'abbé était

brassé

si

joyeux, qu'il l'aurait presque em-

I.,.

Donc, l'avale-brebis vêtit la robe, on lui donna

nom nes.

de Frère Isengrin

A

l'église,

il

et

il

fut le plus

chantait bien un peu fort et d'une

voix enrouée, mais personne ne s'en plaignait lieu

le

pieux des moi-

:

au

de chanter, les autres moines pouvaient dormir...

Et puis, que voulez-vous?

Il

faisait ce qu'il

pou-

vait: un loup n'a pas plus une voix à chanter la

messe qu'un âne n'a d'adresse à jouer de

la chevrette

!

Sachez, seulement, que Fy^êre Isengrin faisait pénitence, gisait sur

un

lit

de sarment, pleurait ses péchés

et priait avec ferveur.

Mais

il

avait

beau prier

et prier

!

De

faire

maigre

longtemps, ses dents devenaient longues, longues,

si

les

carottes et autres légumes lui donnaient la gingivite;

son pot de soupe

Ah

!

le faisait bâiller.

qu'il aurait volontiers

La langueur

croqué une brebis

!

le reprit.

Lui qui chantait, auparavant, avec tant d'ardeur, se t

aisait à l'église, les :

moines ne pouvaient plus dormir

I


Lo matin,

44

pas très delh covent sortian l'aver

lis

Fraire Ahngrin, qu'auzia aurilhas et niflava

:

sis

sonalhas, plantava

li

uelhs lioucegeavon

:

lis

aviaenve-

;

ja de crocar.

Lhi chalia de part, de part sangosa Ai

per de ques avia quitat

1

cor, ont la

lo

!

boscas ont

lo

senglar

sauvagina farfôlha? Per de ques avia fugit

sa cavorna d'ont sortia, a son biais, per anar querre,

dins lo pargue, dins la fedaria,

la nueit,

li

bestias

bialarellas ?

Una

nueit que Tenveja de charn

li

torsia

li

budels,

trobet lo biais de sorter et viret ves lo bôs.

A

per la plana, se viset qu'una fedas era

la lunaira,

perduda dinc un champ «

—E

que «

!

bôna

nueit,

:

feda

faguet lo sauta pargue,

!

fazes' qui, soleta ?

— Me

sei

escampelhada

et

sabe pas ont es

ma

par-

geada, aora. «

— Crei me,

feda, la trobaras pas

1

»

Alengrin faguet dos pas per la graupir pelh cuelh. Mas

penset ques avia

fat lo vot

de ges mangear de part de

sa vida.

«

Basta

!

so

diguet,

autre l'atapara et s'en

fam

!

si

la

laisse

estar,

galara. Pueissa, ai

un

trop de

»

Et lo crôca feda espelet la bestiona. lops son

Li

don

!

totjorn

lops

:

que'ls fedas

se

gar-


— Chaque matin, troupeaux

45

les pâtres

de l'abbaye sortaient

les

Frère Isengrin,, qui oyait les sonnailles,

:

dressait les oreilles et humait, de loin, l'odeur de sa

proie

yeux jetaient des

ses

;

éclairs;

il

avait envie de

jouer des crocs. lui fallait

Il

de la chair, delà chair saignante

Ah pourquoi !

avait-il quitté la forêt

où tout ce qui est sauvage s'ébat? Pourquoi

glier,

avait-il

son antre d'oà

fui

aller ravir, la nuit,

animaux bêlants

Une rait,

l

où court le san-

dans

trouva

le

à son gré, pour

sortait,

?

véhémente envie de chair

nuit qu'une

il

il

parc, dans la bergerie, les

le

moyen de

le tortu-

sortir et se dirigea aussi-

tôt vers le bois.

Au

bis était «

de lune, par la plaine,

clair

il

s'avisa qu'une bre-

perdue dans un champ.

— Hé

bonne

I

nuit, brebis,

fît

saute-parc, que

le

fais-tu là, seulette? «

où «

— Je me suis séparée du troupeau il

et je

ne sais pas

se trouve, à cette heure.

Crois-moi, brebis, tu ne le trouveras pas! »

Isengrin

songea

fit

deux pas pour

qu'il avait fait

le

la saisir

vœu

au cou. Mais

il

de ne plus manger de

chair de sa vie. a

— Bast

emparera Et

le

!

se dit-il,

si

je la laisse aller,

s'en

faim

!

»

dévore-brebis mit en pièces la pauvre bête.

Les loups sont toujours loups deatl

un autre

et s'en régalera. D'ailleurs, j'ai trop

:

que

les brebis se gar4


I

lis

A LOPS ET LOPS

La Mietas avia totas

46

son

tant sabut dire

que

conte

coviseiras avian laissat'star sis fuses per l'es-

coutar.

Gaire ben totas avian vist de lops

;

mais non com'

aquelh. «

— Vezés, s'ere estada aqui,

diguet la Finon,

séria pas signada de lo veire passar.

Auria podut cassar de mangear

lo

uelhs com' una robiaca que ven

lis

bon Dieu.

a cops d'escobas

!

me

Lo mostrelhasl

Te Ihi auria doblat

lis

costas

aco, la Naneta ji'era

cran-

.

.

»

D'auzir parlar com'

hosa. «

— Et s'acos era estât quican? ques era un temps

Sabés

»

so respondeguet

ont vesian

d'estranjas

besonhas. «

Un

tirar

cop, lo paire Boschet, ques es mort,

de vin ves sa

aguet badat

cava dels Esconduras.

la porte, veguet,

nègres que mostravon

cops de ped

;

mas

si

davans

elh,

anava Quant

dos chinas

dents. Li vouguet sorter a

avia trobat de trabalh

!

Lhi saute-


Y A LOUPS ET LOUPS

IL

La

47

Miette avait su dire

si

bien son conte que toutes

en repos leurs fuseaux

les dentellières avaient laissé

pour l'écouter. Presque toutes avaient vu des loups^ n'étaient pas «

comme

— Voyez-vous, me

mais qui

celui-ci.

si

j'avais été là, dit la Finette, je

serais pas signée en le

voyant passer. L'afpu baisser les yeux comme une bigote qui vient de manger le bon Dieu... Je lui ne

freux monstre

!

Il

aurait

aurais enfoncé les côtes à coups d'écoupe

»

!

D'ouïr parler ainsi, la Nanette ne pouvait se défen-

dre d'une certaine crainte. «

— Et

si

c'eût été

quelque être surnaturel

Car vous savez qu'il fut un temps

dit-elle.

?

répon-

l'on

voyait d'étranges choses. «

tirer

Une

fois, le

père Bouschet, qui est mort,

du vin à sa cave des

eut ouvert la porte,

il

«

vit,

devant

chiens noirs qui montraient les sortir à

coups de pied; mais

Quand il deux gros

il

se

Il

voulut les

lui,

dents.

allait

»

Escondures

.

trouva fort empê-


— ma

de sobre,

ron

fîna

48

— chauguet que barresse

et

!

\iste la porta.

Son pas de chins ordinaris

«

d'aqui rai «

«

»,

Anet querre lo curât. Lo curât portet un gros

la cava, se botet

a

chins

creirias? Lis

libre, et,

»

quant saguet dins

besonhas en

legir de

Zo

latin.

sauteron de sobre,

Ihi

mas'co

so diguel;

sabe qiiau n'en sera mestre...

:

ams

elh

mais.

— N'ai res per me parar

«

s'en anet.

Mas

set sobre' Is chins

Sautavon

:

sauts de très aunas

lis :

la porta, Ihi borret

cubas,

li

man. L'espous!

fasian de

cubels; !

vouguet arrestar en barrant

lis

:

lis

petava

tôt n'en

Et quant Boschet

«

faguet lo capelan. Et

»

aco era' quels que desparravon

gerlas,

li

!

tornet, l'esparson a la

chins,

mais que saguesson

gros, passeron per la paqelieira. « Si lo

lops era 'stat com'

Irompada, Finon...

La Finon

riguet

aco, sérias

ben 'stada

»

mas

:

— Grezés, so diguet, totas

«

ton de ves

lis «

lis fotraudisas que conEsconduras»? Sô que veguet, aquelh

nas roge de Boschet, aco era, de segur, de rats

coma «

s'era pintat,

lis

prenguet per de chins...

— Maucrezenta de Finon

!

cridet, d'alai,

;

et,

»

laNanon»

cranhas res ? «

— Que volés que cranhe?Digeas

dlDS

lis

:lis

cavas sarradas delh biais? Et

li

chins entron

lops son dins


— chêl

Ils

sautèrent sur

49

lui,

ma

chère, et

lui fallut,

il

tout de suite, refermer la porte. «

— Ce ne sont pas des chiens ordinaires,

mais patience « Il

«

Je sais qui en aura raison

I

alla quérir le curé.

Le curé apporta un gros

dans

se dit-il,

».

la cave,

croiriez-vous

?

livre, et,

quand

fut

il

Le

se mil à lire des choses en latin.

il

Les chiens

sautèrent dessus tout

lui

pareillement. «

— Je n'ai rien pour me défendre

Et, s'étant retiré, l'agita

au-dessus

fuyaient

!

faisant des «

des

chiens

prêtre.

bonds de

trois

aunes

:

eux

qui

cuves, tonneaux,

tout en craquait

!

Et quant Bouschet voulut les arrêter, en fermant

la porte,

il

ne put en venir à bout

qu'ils fussent très gros, passèrent « Si le

La Finette ne

:

les chiens,

par

encore

la chatière.

loup eût été ainsi, vous eussiez été

trompée, Finette...

«

» fit le

c'étaient

:

sautaient cuveaux,

Ils

!

revint, le goupillon à la main, et

il

fît

que

rire

Croyez-vous toutes

conte à propos des

bien

«

«

:

les niaiseries

Escondures

» ?

que Ton ra-

Ce que

vit ce

nez

rouge de père Bouschet, c'étaient, bien sûr, des rats;

comme

et, «

la

il

était gris,

il

les prit

Incrédule de Finette

!

pour des chiens...

s'écria,

»

de l'autre côté,

Nanon vous ne craignez donc rien ? « Que voulez-vous que je craigne? Les chiens ;

entrent-ils dans les caves

convenablement fermées?


— 50 — li

bôs

enquera

e

;

en demôra gaire, aora.

n'i

Si n'en

trôbon quaucuns ves Sauvanirgues, se venon pas pro-

menar

pels charreiras, elh hiuer,coma d'autres côps.

Li moeirian d'aqui, sabés! «

~

Botas, Finon, diguet la Goton,

i

avia ben qui-

can, per que n'en digeon tant. «

— De

segur,

delh

plardisa

faguet la Finon,

monde... Vezés,

qu'aquels que son dins

chambas !... Aco paure monde, lis

i

:

i

avia

sim-

la

a d'autres

lops

a de lops a doas

que fazon de

mau

elh

fortunats que raubon lo pauc de li

servents

si

bôs

es'quels

ben dels pelhards, gaire

li

i

mauvas mestres que paion que

et

lis

fazon

de

crebar

fam... ce

Et

li

lops que parle son mais de fugir qu'aquels

ques an quatre pautas tias « fai

que

;

els

mangeon

lo

:

aquestes

monde

— Taizas vos, Finon quican de vds auzir

ma

!

:

«

li

bes-

diguet la Marinon n'ai lo

aco

;

me

cuer cofle de saber

tanta Reina, de ves Chavalet, a gardât nôstré

mon

ben, depueis la mort de

quant

mangeon mas

!

l'on

sap

paure

Vezés,

paire...

res...

Anem, Marinon,

n'ajas pas d'esmai

:

beleu

d'avant que morir... « «

— Es trop lobai per pariar coma vos. — Que sem simplas Dizem un autre conte 1

voudra melh. «

avés auzit, Catonet 7

;

aco


— Quant aux loups, en

ils

51

sont dans les bois, et encore n'y

en trouve quelques-uns

reste-t-il guère, ore. Si l'on

à Combaneire ou à Sauvanirgues,

promener dans

se

On

fois.

«

les ôterait

Allons,

pense

là, je

ne viennent pas

en hiver,

les rues,

de

ils

comme

Margoton,

Finette, dit la

autre-

1

il

y avait

bien quelque chose, pour qu'on en raconte tant.

— Assurément,

«

rie des gens.

..

fit

ceux qui sont dans

il y avait la niaise" y a d'autres loups que il y a des loups à deux

la Finette,

Voyez-vous,

il

les bois

:

jambes!... Ce sont ceux qui font du mal aux pauvres gens, les riches qui ravissent le peu de bien des bles, les

hum-

mauvais maîtres qui payent insuffisamment

leurs serviteurs et leur restreignent la nourriture... « Et les

loups dont je parle sont bien plus à fuir que

ceux qui ont quatre pattes

que «

fait

les bêtes

;

eux,

— Taisez-vous, Finette, de

la

ces derniers ne

:

mangent

le

ma

dit la Marinette

Allons,

quand on

Marinette,

«

j'ai le

me

cœur

la

mort de mon pauvre

soyez pas en peine: .

— Elle est trop /oMue, pour parler comme vous. — Que nous sommes sottes! Disons un autre

conte «

cela

est ignorant...

ne

peut-être qu'avant de mourir. «

;

;

tante Reine, de Chevalet, a

gardé notre part d'héritage, à père... Voyez-vous,

mangent

!

peine de vous ouïr parler ainsi

gros de savoir que

«

monde

;

cela vaudra

mieux

!

Avez-vousouï, Catherinette?


— «

son «

52

N'en pôde ges dire

:

sabe

mas

'

na chan-

».

— Aco changeara

;

La Calonet, ques era chadeira et chantet

«

chantas'na chanson

»

.

elh rai delh solelh, ressenet sa

Joaneton à l'aiga

».


— — Je

«

53

^

ne peux pas en dire

:

je

ne sais qu'une

chanson. «

La

Cela changera

;

chantez une chanson

Gatherinette, qui était exposée

soleil, recula sa chaise et

taine ».

chanta

«

».

aux rayons du

Jeanneton à lafon^


54

-

JOANETON A L'AIGA

Joaneton s'en vai a Faiga, Querre d'aiga per pousar, Larirolon Lariro Ion

{bis)

la,

la,

Querre d'aiga per pousar. Pelh chamin, la drolla encontra

Un garson ben

la,

Lariro Ion

la,

Un garson ben « «

a caval,

Lariro Ion

a caval.

— Bella, dona me'n pauc d'aiga Per

mon

caval abiurar,

Lariro Ion

Lariro Ion «

Per

mon

{bis)

la, la,

caval abiurar.

«

Mossur,

«

Vos en chaura

«

{bis}

si

n'en volés d'aiga, davalar... {bis)

Lariro Ion

la,

Lariro Ion

la,

Vos en chaura

davalar...


55

JEANNETON A LA FONTAINE

Jeanneton s'en va àFeau, Quérir de l'eau pour en puiser

Larirou Ion

la,

Larirou lonlo, Quérir de l'eau pour en puiser.

Par

Un

Un

le

chemin,

la belle

rencontre

élégant cavalier,

Larirou Ion

la,

Larirou Ion

la.

élégant cavalier.

«

— Belle,

«

Pour mon cheval abreuver,

donne-moi un peu d'eau

Larirou Ion

la,

Larirou Ion

la,

mon

«

Pour

«

— Monsieur,

Il

cheval abreuver. si

vous voulez de l'eau,

vous faudra dévaler,

« Il

Larirou Ion

la,

Larirou Ion

la,

vous faudra dévaler...


— «

— Drôlla,

«

Un poton

si

te

-

56

eu n'en davale, colara, {bis)

Lariro Ion

la,

Lariro Ion la, «

Un poton

«

— Un poton

«

«

«

«

te colara

Mossur, tôt

Mossur,

n'es

î .

.

pas grand causa

so que voudrés.

Lariro Ion

la,

Lariro Ion

la,

tôt so

que voudrés

l

si n'es pas pro, m'amia, Te poiriaben caressar... (ôw)

Lariro Ion

la,

Lariro Ion

la,

Te poiria ben caressar...

«

«

Mas que pensara ma maire, Quant me veira pas tornar ? (ôw)

Quant

Lariro Ion

la,

Lariro Ion

la,

me

veira pas tornar

?

«

— Creira que l'aigas es fera,

«

Que

«

(bis)

— Vai,

«

«

..

Que

n'as pas

podut pousar,

Lariro Ion

la,

Lariro Ion

la,

n'as pas

{bis)

poudut pouzar...»


— «

— Belle,

«

Un

si

57

je dévale,

baiser cela te coûtera,

Larirou Ion la, Larirou Ion

la,

«

Un baiser cela

«

«

Monsieur, tout ce que vous voudrez,

Un

coûtera

te

!...

baiser est peu de chose

Larirou Ion

la,

Larirou Ion

la,

:

<(

Monsieur, tout ce que vous voudrez

M

— Va,

«

Je pourrais bien te caresser.

si

ce n'est point assez, m'amie,

Larirou Ion

la,

Larirou Ion

la,

«

Je pourrais bien

«

— Mais que pensera

«

Quand

«

Quand

elle

ne

te

me

caresser.

ma

Larirou Ion

la,

Larirou Ion

la,

elle

ne

me

.

mère,

reverra point revenir

«

— Elle croira que l'eau Que

Que

.

verra point revenir?

«

«

!..

?

est trouble,

tu n'as pas pu en puiser,

Larirou Ion

la,

Larirou Ion

la,

tu n'as pas

pu en puiser.

.

.

»

Cette chanson nous a été obligeamment communiquée par M. Vénard, pharmacien.^Nous Tavons mise en ordre et complétée.


58

APRES CHANTAR, CHAU RIRE

Aquela chansons avia agradat am' Estapauc,

lornèron chaplar «

coviseiras.

:

Mas, chantas delh biais, Catonet. Quausauria

credut que sabia de tant bravi besonhas «

Is

piquèron delhs mans coma chau. Pueis,

— M'es vejaire que chantavias

?

a la gleisa, quant

ères filha?

— Oc ben. — Lo curât vos aprenia de chansons? « — Adivôc — Et coma n'en sabés? — N'en sabe de mon grand. N'en chantava pro, lo «

«

1

«

«

paure home,

et

me

n'avia pro après;

dadas, aora. Ai tant plorat, dins

ma

mas .lis vida,

ai oble-

que

l'en-

veja de chantar m'a leu'gut passât... (c

— Aco

tornara, vezés

acô tôrna per'quels que

;

vôlon. «

«

— Acô tôrna gaire viste — E fotrauda! anueit que !

!

plorar, beleu?

Aurem pro

fai solelh,

lézer de

voudrias pas

badalhar

et

de cos-


59

APRÈS AVOIR CHANTÉ,

FAUT RIRE

IL

Cette chanson avait eu l'agrément des

femmes de

l'assemblée. Aussi, elles applaudirent vigoureusement. Puis, la conversation reprit «

:

— Mais vous chantez très bien, Catherinette.

aurait cru que vous saviez de «

«

« «

«

«

!

les

le

je les ai

que

Il

pauvre homme, et

il

le

m'en avait appris pas mal

oubliées, ore. J'ai tant pleuré, en

l'envie de chanter

— Cela

ceux qui «

étant

?

!

mais

«

l'église,

fille?

— Cela est vrai. — Le curé vous apprenait donc des chansons — Ah bien oui — Et comment en savez-vous? — Je tiens de mon aïeul. en chantait beau-

coup,

vie,

choses?

— lime semble que vous chantiez à

jeune «

jolies

si

Qui

;

ma

m'a passé de bonne heure. cela revient pour

reviendra, voyez-vous

;

veulent.

— Cela ne revient guère vite — Hé sotte que vous êtes hui !

I

I

qu'il fait soleil,

vous ne voudriez pas pleurer, peut-être? Nous aurons


60

quant

sirar

moscias blanchas tombaran, que

li

lis

congeiras cataran lischamins et que l'aura nos bofara entre'ls aurilhas

!

»

Lis autras fennas trobèron, co

n'en laisseron 'star sis Is

fuses per

tant delh biais

rire, la

que

Catonet coma'

autras. «

— Pracô, pracô, disia la Marinon, d'aquelh monin

de Finon

1

me chau mostrar mi dents

Mais

Et mostrava qu'era berchuda. •'

[.

«

— Anem, anem,

!

»

.

a

.

Catonet, avés pro redut; chan-

un pauc mais. Paura Finon, ai obledat lis chansons mas me sovene de quaucas goalhas. Trobas 'quela besonha

tas

«

;

:

«

«

Gôrgea dins gôrgea,

«

Set peds, la coa darrés.

»

sabe, faguet laRoseta; aco es

chai que biù

lo

dins Vola. » «

E ben, respondeguet la

tant, qu'ei acô a «

Quant hi

«

es

farina.

lo

vai^

aco es elh

Qant tôrna, aco es

*••••••••" — Anem, forgeas Aco

Catonet,

si

n'en sabés

:

blat

:

ella ? »

,...,.... vos

que vai

a

lo cervel!...

Trobas pas?

molen

qne tôrna en

elh

et


61

temps de

bien le «

tomberont, que les congères

»

couvriront les chemins et que entre les oreilles

!

la Calherinette «

vent nous soufflera

le

»

Celte boutade parut qu'elles laissèrent,

soupirer quand les

bâiller et de

mouches blanches

si

pour

comme

plaisante aux autres femmes,

fuseaux en repos,

rire, leurs

les autres.

— Mon Dieu, disait la Marinette, qu'elle est drôle,

cette Finette!

^ents!

lime

faut,

malgré moi, montrer mes

»

Et elle montrait qu'elle était brèche-dent.

«

— Allons, allons, Calherinette, vous avez assez

ri;

chantez encore un peu. «

je

— Pauvre Finette,

me

a «

«

— Je

dans «

j'ai

la

La bouche dans la bouche, Sept pieds, la queue par derrière.

le sais,

fil

la Rosette

:

»

c'est le chat qui boit

marmite.

— Eh bien, répondit la Calherinette, puisque vou$

êtes si habile, qu'est ce a «

«

oublié les chansons; mais

souviens de quelques gouailles. Trouvez ceci:

que

farine.

:

Quand il y va, c'est lui Quand il en vient, c'est

— Allons, creusez-vous

pas?... C'est

c'est

le blé

la tête

;

elle? »

I...

qui va au moulin

et

Vous ne trouvez qui en revient


— Devinas enquera

:

si

62

trobas pas, Loison, per vostra

penitensa nos contarés quican... «

Te bolegue

«

Et

«

Prene acô tiône

«

E o bote dins'cô miône.

me

Dettgun devina?

bolégues,

»

P La Finons aguel un côp «

— Sabés, Finon? — Oc. Aco

«

«

d'uelh coquin.

es...

Taizas vos, Finon!

.

.

.

Trobas quican mais

!...

Dengun devina? «

Aco

es un

Tabre^ elh se

home sobre una fai

varzella.

bolegar; prend de

En bolegant

celeiras et

li

bôtadins son benel... «

Loison, noi devés un conte

La Loison «

se faguet

I

»

pas pregear

— Adonca, so diguet,

vas fennas; vos contarai

:

badas vostre auzidor, bra«

Plan Pognet».


— Devinez encore

«

si

:

63

vous ne trouvez pas, Louison,

pour votre pénitence, vous nous conterez quelque chose...

Je te

remue

«

Et tu

me

«

Je prends ce qui est tien

«

«

Et je

le

La

— Vous savez,

«

«

— Taisez-vous,

Finette?

Oui, c'est... Finette!...

Personne ne devine « C'est

bre,

il

est,

lui-même, remué;

met dans son

Trouvez autre chosel...

?

un homme dans un

cerisier. il

En remuant l'ar-

prend des cerises

— Adonc,

se

fit

fit-elle,

je vous conterai

et

panier...

Louison, vous nous devez un conte!

La Louison ne «

est mien... »

Finette eut un coup d'œil malicieux.

«

«

mets dans ce qui

— Personne ne devine?

«

les

remues,

«

pas prier ouvrez

l'oreille,

Plein Poignet

»

:

».

braves femmes;


-

64

PLEN POGNET

Una

fennas avia très efants. Eron tant bravonets,

qu'acô fazia geau de

li

Mas

veire.

lo

darrer, belsi-

gneta, era tantpetitonet qu'auriachabut dins

per acô, era

nommât Plen

D'aquelh temps,

de

la

que

vida s'es

vist.

lo

laman

:

Pognet.

paure monde patissian coma de

Avian tant mougut de guerras,

la terra estivava.

Ges de gran, ges de pan

senhors avia de blat de cobre, dins sa graneira

;

.

Lo

mas

pelhard mangeava sô que trobava, d'herba mais

lo

d'un côp. Dins sa chabana, la paura serva plorava tons avian fam, et res per Ihi donar

maire per saber com' acô

fai

mau

I

:

sis

efan-

Vezés,chal esser

de veire plorar de

fam lis petiots... Aqueli manonas, que sabon mas demandar, voi reviron lo cuer !

«

— Si n'avia mas dos,

podria sauvar. despei tarai

.

.

Que

pensava

farai

la fenna,

beleu

lis

de l'autre? Gossi m'en

Et plorava, plorava sen poder trobar cossi s'en despei taria.

.


65

PLEIN POIGNET

Une femme gnons que

avait trois enfants. Ils étaient

c'était

une

joie de les voir.

était si petit, le pauvret, qu'il aurait

de la main

En

:

ce qui l'avait fait

ce temps-là, les

Mais

mi-

si

dernier

le

tenu dans le creux

nommer Plein

Poignet. si

mal-

On

avait

pauvres gens étaient

heureux que jamais on n'a rien vu de

tel.

déchaîné tant de guerres, que la terre restait en

fri-

che. Point de grain, point de pain. Le seigneur avait

du blé en réserve, dans son grenier mais le manant mangeait ce qu'il trouvait de 1 herbe, plus d'une fois. Dans sa chaumière, la pauvre serve pleurait ses pe;

:

;

tits

enfants avaient faim, et rien à leur donner

vous,

faut être

il

mère pour savoir

la

!

Voyez-

douleur que

cause la vue des enfants pleuranlde faim... Ces menottes, «

qui ne savent qu'implorer, vous remuent le cœur!

— Si je

n'en avais que deux, pensait la

peut-être les pourrais-je sauver... l'autre?

Et

Comment m'en

elle pleurait,

comment

Que

femme,

ferai-je

de

déferai-je? »

pleurait,

elle s'en déferait.

sans pouvoir

trouver


— «

— Anem, so faguet,

66 lo

perdrai dins lo bôs

!

Mas quant chauget chauzir aquelh que perdria, saguetempeitada, Per

et tornet plorar.

penset que Plen Pognet séria de bon

la fin,

melh escampelhar elh

et

dos premers

am

comandet

bos. D'avant que

sis efants

parteguesson, diguet

d'anar

am

li

:

Anas vos promenar dins lo bos, tant luan coma podrés. Aqui avés de pesés que semenarés «

pelh chamin. Quant voudrés tornar, vos escondrés delh Plen Pognet et lo laissarés star.

»

coma la maires avia

Lis efantons faguèron

Pelh chamin, l'ainat eschampava de

saguèron luan, tant luan coma

poduts portar,

s'arrestèron

sis

et

pesés.

chambas

se

lis

dit.

Quant avian

setèron sot un

grand fau. Saguèron benaises de trobar de fainas de n'en mangear. Lo

S'endormiguet

Quant

e'is

petitet,

et

era lasse»

pechaire,

autres lo laissèron.

se desvelhet et

que veguet que

sis

fraires

s'eron n'anats, charchet son chamin. Lis pesés ques

avia vist semenar Ihi lo faguèron trobar,.

Fazianueit quant tornet. La porta de era barrada. Cridet a

— Maireta,

badas

me

!

— D'ont venes,

Et lo peliotcontet cossis'era trobat.

chabana

»

La maire correguet badar «

la

:

mon coma

et Ihi diguet

:

petiot ? » sis fraires FaviaXi

perdut

et


— — Eh bien,

«

Mais quand

— perdrai dans

fit-elle, je le

il

fallut choisir celui

embarrassée

elle fut

67

et

le

qu'elle

boisî

»

perdrait,

pleura encore.

Enfin, elle pensa que Plen Poignet serait plus facile

à égarer et elle envoya ses enfants au bois. Avant leur départ, elle dit aux deux premiers

:

— Allez vous promener dans le

«

bois,

aussi loin

que vous pourrez. Voici des pois que vous sèmerez le chemin. Quand vous voudrez revenir, vous

par

ferez en sorte

que Plein Poignet ne vous voie pas,

vous l'abandonnerez.

et

»

Les petits enfants firent ainsi que la mère avait

dit.

Pendantqu'ils cheminaient, l'aîné jetait des pois. Lors-

que leurs jambes avaient

qu'ils furent loin, aussi loin

pu

les porter,

ils

s'assirent sous

s'arrêtèrent et

un

grand hêtre. Ils furent bien aises de trouver des faînes et d'en

manger. Le tout

fatigue.

Il

Quand

petit, le

s'endormit et

il

s'éveilla et

étaient allés,

il

les

qu'il

pauvret, était recru de

autres l'abandonnèrent.

que ses frères s'en

vit

chercha son chemin. Les pois

qu'il

avait vu semer, le lui firent retrouver. faisait

Il

cabane

«

nuit,

quand

était fermée.

Il

cria

le petit lui

perdu

et

raconta

comment

il

et lui

!

dit

:

comment

s'était

la

:

— D'où viens-tu, mon petit

Et

La porte de

revint.

Mère chérie, ouvrez-moi

La mère courut ouvrir «

il

ses frères l'avaient

retrouvé.


68

Era totbanhat,pechaire. La maire, que cossirava, atubetlofiôc et lo faguet chaufar.

L'endeman, faguet tornar

sis efants elh

comandet que perdeguesson Plen Pognet tornesse, aqueste côp Li drollels hi

bôs et

Ihi

que non

et

!

aneron

et

perdegueron

lo fraironet

de

tau biais que non tornet.

mas

Plen Pognets era pro petitet,

cridava

!

Gridava

sa maire que l'avia'nat faire morir dins'quelh boscas E dengun Ihi respondia, non mas lo rasas ont quican I

cridava,

De

comas

l'auzir,

elh.

.

sabe pas qiiaus auria banhat sis uelhs.

un viot de ped per una prada ont hi avialo

Viret etdesvirettant que trobet

sôrter delh bôs Arribetdinc .

biou Morel.

S'espaoreget de veire una tant grôssa bestia, elh qu'era tant menudet, et s'escondeguet dins l'herba,

darres un cheir.

Lo d'alai,

biou Morel

pasturava to bellamen,

venia d'aise,

et, toi

d'herba amais Plen Pognet Alai, dins nu.eil, «

sachabana,

sonhet que

— Qu'ai

barai, aora?

fat

la

î

maires era cossirosa. La

lo diable la

de

mon

venia querre.

petiot ?

so disia. Ont lo tro-

»

Elh matin, anet elh bôs. Cridava «

Pognet

Plen !

!

»

d'aqui

per un côp, avalet lamota

Pognet

!

Plen

:

Pognet

!

.

.

.

Au

Plen


69

Le pauvret alluma

rant,

était tout mouillé.

Le lendemain,

renvoya ses enfants au bois

elle

recommanda de perdre

leur

La mère, en soupi-

le feu et le fit réchauffer.

façon qu'il ne revînt pas, cette fois

Les garçonnets obéirent

et

et

Plein Poignet et dételle !

perdirent leur frérot de

façon qu'il ne revint pas.

telle

Plein Poignet, malgré sa petitesse, criait bien fort 11

bois maudit le

1

appelait sa mère, qui l'avait envoyé mourir dans ce !

Et personne ne lui répondait,

si

ce n'est

ravin où ses cris se répétaient...

De 11

l'ouïr, le

du bois

tir

cœur

le

plus dur eût versé des pleurs.

virs^tant et tant qu'il trouva une sente

pour sor-

dans une prée où se trouvait

et arriva

le

bœuf Morel. Il si

une bête

s'effraya de voir

minuscule,

et

se cacha

il

si

grosse, lui qui était

dans l'herbe, derrière un

tas de pierres.

Le bœuf Morel pâturait tout tranquillement, delà, approchait tout

avala

temps

la touffe

doucement,

d'herbe

Plein Poignet en

et...

Là-bas, dans sa cabane, la

«

— Qu'ai-je

trouver

Au «

il

même

1

nuit, elle rêva

le

deci,

tout à coup,

et,

que

fait

mère

était

dolente.

La

diable venait la quérir.

le

de

mon

petit? soupirait-elle.

?

matin,

elle alla

— Plein Poignet

!

au bois, criant

:

Plein Poignet Plein Poignet! I

!

»


70

-

Gesde Plen Pognet Lo bôs era tant grand Et Plen Pognet era tant petite* que l'aurian cachât am lis peds, amais l'aurian 1

!

pas

vist.

La maire espiava li gènes, Il genebras, lis pinetonSy li grands faus coma per demandar s'escondian pas son petiot;

et

li

genes espes,

pinetons verturos fasian

lis

un paac mais

si

genebras sornes

li

coma

branchas per que veguesse

grands faus forchats semblavon dire

«

volian

si

!

.

.

.

res,

et

li

:

Mauvasa maire, chalias gardar ton

Ves, cossi parem nostri brostons

campar

petiot!...

»

Lo cuer de li maires sap coma li besonha^ parlonE aco era mais que'ls faus que Ihi disian « Chalias gardar ton petiot » Aco era totas lis peiras que son ped fazia redolar, totas li bestionas que rondinavon per terra, totes lis escirôus que sautavon pels :

!

branchas, totes dels pinetas,

morre. «

li

totas

i

cridavon

garnas que

Ihi

en

aut

gimblavon

lo

.

— Chalias gardar ton

De

que

gralhs li

pensar,

petiot!

tombada simpla. Corria

n'en séria

d'assai, d'alai... Era cofla

»

que n'en podia pus.

Mais n'avia pas trobat son petiot. S'en tornet.

Aqueste jorn, tueron son ventre. A

la nueit,

lo

biou Morel e'schampèron

lo

lop,

que furava entorn

dels hostaus, lo golet: aqui aguet Plen Pognet dins

sa cornhôla

!


~

71

Point de Plein Poignet!

Le bois

Poignet était

était si vaste! Et Plein

qu'on l'aurait foulé aux pieds sans

La mère

interrogeait des

leur

demander

s'ils

yeux

les genêts,

grands hêtres,

vriers, les pinetons, les

petit

si

le voir.

les

gené-

comme pour

ne tenaient pas son petit abscons

et les genêts épais, les genévriers

;

sombres, les pine-

tons vigoureux semblaient vouloir rassembler un peu

plus leurs

branches,

afin qu'elle

grands hêtres fourchus avaient «

Mauvaise mère,

il

ne

de dire

l'air

fallait

vît rien,

et les

:

garder ton petit!

Vois avec quel soin nous protégeons nos rejetons

Le cœur des mères

comprendre choses. Et ce n'étaient pas seulement lui disaient

:

sait

« Il fallait

le

les hêtres qui

garder ton petit!

toutes les pierres que son pied les bestioles qui erraient

sur

!...»

langage des

»

C'étaient

faisait rouler, toutes

le sol,

tous les écureuils

qui sautaient sur les branches, tous les corbeaux qui coassaient au faîte des grands pins, toutes les

ches qui «

lui fouettaient le visage.

11 fallait

Cette pensée

garder ton petit troublait

Elle courait en tout sens,

gnait son

!

bran-

.

»

profondément son

esprit.

une immense chagrin

étrei-

cœur

Elle s'en retourna sans avoir retrouvé son petit.

Ce jour-là, on tua intestins.

A

le

bœuf Morel

la nuit, le loup,

maisons, les avala

:

et

on en jeta

les

qui rôdait autour des

voilà Plein Poignet

dans sa gorge

!


— Lo mangea

feda,

~

72

ques avia mais fam, s'en anet,

champs, veire si trobava qaauqua bestia per crocar. Desviselun pargue e i anet. Quant saguet de

pels

rase, Plen

lop

Pognet cridet

— Gara,

«

pastre

I

:

Gara, mouton,

qu'aqui

a lo

i

»

!

Et

am

pastre

lo

chins

sis

passet

darrés

lo

lop que s'entornet elh bôs, la pel traucada de cops

de dents

costas

e'is

machadas de cops de

can-

lia*.

Tant de côps hi vouguet tornar, tant de cops Plen

Pognet

lo faguet rostar.

.

Lo lop, que bava res mais per mangear, crebava de fam. Anet veire lo reinaud. Lis côps de barra fan pas viure.

«

— Fraire,

so diguet, sei la mais de planger de

totasli bestias. Ai dins totes

sis

digea

me

pastres 1.

.

moeire acô que crida dins

cossi farai per

casset

res

son

mas

nas

melh pensar, pueis

d'aise «

e'is

môri de fam

ventre. »

testa,

per

:

que sabes tant de besonhas,

fin et

Lo reinaud, ques a sa

ventre quican que crida

fedas et pôde res graupir

Tu, que ses tant

mon

mon

côps que vau veire un pargue,

lis

paron

tro-

lis

de coquinaria dins

pontut,

sarret

lis

uelhs

tornet badar per dire,

:

Fraire,

me

besonha coma tu

et

sovene d'un lop ques avia tau

que

mon grand gariguet.

leu

te


73

Le mange-brebis, dont

la

faim n'était pas encore

apaisée, alla, à travers champs, voir

que bête à dévorer.

Quand «

il

Et

s'il

trouvait quel-

découvrit un parc

et s'y rendit.

fut tout près, Plein Poignet cria

Prends garde, pâtre

Voici le loup

l

le pâtre,

suite

Il

!

:

Prends garde, mouton

1

»

aidé de ses chiens,

du loup qui regagna

coups de dents

et les

pourpeau trouée de

se mit à la

le bois, la

côtes meurtries de

coups de

fourche à parc

Autant de autant de

fois,

voulut surprendre les moutons,

il

Poignet

fois Plein

lui fît

recevoir de

mau-

vais coups...

Les coups de barre ne font pas vivre. Le loup, qui ne trouvait plus aucune nourriture, mourait de faim. alla consulter le renard.

Il

— Frère,

«

parmi toutes

dit-il,

plus à plaindre.

J'ai,

dans

qui crie chaque fois que je les pâtres sir

meurs de faim!

sais tant de choses,

pour

me

je suis le

mon ventre, quelque chose me dirige vers un parc, et

défendent leurs brebis

aussi, je

:

les bêtes,

dis-moi

et je

ne puis rien sai-

Toi, qui es

comment

débarrasser de ce qui crie en

rusé et qui

si

je

m'yprendrai

mon

ventre.»

Le renard, qui n'a que méchanceté en tète, baissa son museau pointu, ferma les yeux pour mieux réfléchir, puis les rouvrit «

vait

pour dire lentement

— Frère, je me souviens d'un dans

le

même

:

loup qui se trou-

cas que toi et que

mon

aïeul gué-


74

qu'as paor. Aqui as sô que faras.

garirai,

Vezes

aquels dos abres que se tôchon quasi, alai? Bôta

entremed

me

et fai tôt sô

darres

botarai

sortra

.

que podras per

tu per

te

passar

i

quant

dire

:

te

ieu

bestia

la

.

Grammaci, fraire, respondeguet lo lop en badalhantdefam.Tebailarai quican o asben ganhat «

:

per lo plazer que

Lo lop «

fazes. »

se botet entre lidos abres et tiret

n'en pengeava

ton

me

— Tôrna tirar

!

!

.

sa lenga

cridava lo coquin de reinaud

ventre platezit!...

sôrter

:

!

Tirai

tirai

La

bestia

:

vai

.

Lo lop tirava tant que sis côstas n'en crocenavon. « s'era Aug » so faguet, tôt per un côp

espetat*

:

!

!

Lo reinaud, benaise delh mau que venia de

faire, s'en

anet en sautegeant.

un pauc montet pus luan, per una brancha que tochava a la cima d'un grand fau. Volia veire lo chamin pe s'en anar. Era aqui que gardegeava, quant très hômeg se venguèron setar elh ped de son abre. Aco era de raubaires. Badèron un sachon et se botèron a compPlen Pognet sorteguet de sa prison,

et,

terra,

tar de pistôlas et d'escuts.

Un «

dizia

:

— Aqui as

miônai

la pessa,

aqui a la siôna, aqui a la


-

-

75

Je te guérirai, sois sans crainte. Voici ce que tu

rit.

devras

deux arbres qui

faire. Vois-tu ces

se touchent

quasi, lâ-bas? Boute-toi au milieu et essaye dépasser

de force

:

me

je

mettrai derrière pour

dire

le

quand

la bête sortira... «

— Grand merci, frère, répondit

de faim. Je

récompenserai

que tu

le service

Le loup de passer «

te

se

bouta entre

la

:

langue

toujours

Tire

ventre s'aplatit

Le loup

me rends.

!..

Tire

.

les

!

avec tant

tirait

loup, en bâillant

»

deux arbres

en pendait

lui

criait

!

le

tu l'as bien gagné, par

:

et s'efforça

!

méchant renard ton La tire bête va sortir!... p de force que ses côtes en le

;

!

craquaient. «

— Aug

ventre

!

»

tout à coup.

fit-il

Il

s'était

faire, s'en alla

qu'il

venait

en sautant de plaisir.

Plen Poignet sortit de sa prison, join,

le

!

Le renard, heureux du mauvais tour de

rompu

et,

un peu plus

en s'aidant d'une branche qui touchait terre,

il

monta sur un grand hêtre. Il voulait voir s'il découvrirait un chemin pour s'en retourner. Il était là à observer, quand trois hommes vinrent s'asseoir au pied de son arbre. C'étaient des voleurs. sachet et se mirent à compter des

Ils

ouvrirent un

pisloles et des

écus.

L'un d'eux disait voici la

mienne

1

:

«Voici ta pièce, voici la sienne,


76 «

— Et

la

miôna

!

Lo raubaire, qae cridava (c

»

faguet, d'en aat, Plen Pognet.

que

crezia

l'autre

se plangia,

:

Mas Tas ben, bougre

!

»

Trescops, tau besonha arribet. Li raubaires pensèron que

li

gai ta von et desparrè-

ron tant viste que laissèron l'argent.

Pognet davalet de

Plen

blanchas, escampelhadas pro.

Li gentas pessas

l'abre.

per l'herba, Ih'agradavon

Mas coma'ls emportai'?

Et,

pas mais, ont s'en

anar? Sabia gesde chamin. Era'qui en pessamen,

quant sa maire, que

charchat despueis que s'era perdut,

lo trobct

l'avia

a costat

delh sac.

Aguet leu de potons

et

fat

de lo botar dins

plorava d'aise

si

bras.

Lo mangeava

:

L'efantonet se jassava dins lo cuelh de sa maire «

— Maireta

qiiitar

I

!

A

I

de

ma

:

maireta! Vos tornarai pas

»

La paura fenna campet l'argent, pueis s'en anet am son petiot, et, quant tornet ves sa chabana, toti n'aguerongeau.


— — Et la mienne

«

77

d'en haut, Plein Poignet.

» fit,

!

Le voleur, qui croyait que son compagnon réclamait, criait

— Tu

«

:

bougre

l'as bien,

Trois fois la

même

I

»

chose se reproduisit.

Les voleurs, se croyant découverts, détalèrent vite qu'ils

si

abandonnèrent l'argent.

Plein Poignet dévala de l'arbre. Avec quel agrément il

vit les

gentes pièces blanches éparses sur l'herbe

Mais comment aller?

Il

du

mère, qui

s'était

perdu,

le trotiva

à

de

bouter dans ses

le

de baisers

et pleurait de

bon-

:

— Ah

!

mon pauvre pouUet

L'enfançonnet

mère

blotissait

se

!

Je

l'ai

dans

retrouvé le

cou

!

»

de sa

:

— Mère chérie

vous quitter

1

I

avec son

ô

mère chérie

!

Je ne veux plus

»

La pauvre femme alla

il

eut vite fait

elle

Elle le dévorait

!

heur

jour où

le

l'avait

sac.

Comme bras

I

où s'en

ne connaissait aucun chemin.

cherché depuis côté

«

Et, d'autre part,

était là qui songeait, lorsque sa

11

«

emporter?

les

recueillit l'argent, puis elle

petit, et,

quand

elle fut

cabane, tous les siens furent en joie.

s'en

de retour en sa


78

PLAIDEJAT PER LA MAIRE

«

— Pracô, Roseta,ques era petitonet aquelh paure

Plen Pognet!.

.

.

Tant pauc mais seria'stat com'uaa

neira...

Aco

es dins lo conte

ques era com'aco, Mari-

non. «

— D'aquel efanton, belsigne

maire

!

Sel benaisa

que sa

l'aje trobat.

« Oc ben avia pro patit. Mas n'avia fat veire amelh lop, tant mingornel comas era « E Gatonet Sabés coma dison « Petita mos;

!

!

cia fax rapetar gros ase «

:

!

Me chau

rire

.

»

de pensar de quant

biais

lo

fotraud de lobas se laisset afinar per lo reinaud... «

A

!

lo

bougre! Avia pro mangeât de fedas

Podia ben crebar «

— Et

la

!

!

maire? Crezés, Roseta, qu'era pas mau-

virada d'escampelhar son efant pelh bôs?

— La gampa « — Et son home? Podia pas preneruna trica «

zo faire petar

!

?

et Ihi


79

PLAIDOYER POUR LA MÈRE

«

Mon

Poignet

puce

Pour un peu,

!

Plein

eût été de la grosseur d'une

il

!...

«

«

mère «

Dieu, qu'il était petit, ce pauvre

Le conte

dit qu'il était ainsi, Marinette.

Pauvre enfançon

l'ait

!

Je suis bien aise que sa

retrouvé.

— Certes,

il

avait assez pâti. Mais

avait joué de

il

vilains tours au loup, tout petit qu'il était. «

verbe «

Hé «

:

Catherinette

!

Petite

mouche

!

Vous savez

fait sauter gros

— Je ne puis m'empécher de

quel biais

ce

rire,

que âne

dit le pro!

»

en songeant de

nigaud de loup se laissa afiner par

le

le

renard... «

— Ah

brebis

!

«

Il

la

!

mauvaise bête

!

pouvait bien crever

Et la

Il

avait

mangé

assez de

!

mère? Ne croyez-vous pas, Rosette, d'abandonner ainsi son enfant

qu'elle était dénaturée

dans « «

le

bois

?

— La vilaine femme — Et son mari? Ne pouvait-il donc

une trique

!

et la lui faire sentir ?

pas prendre


80 « ((

«

— Beleu n'en sabia res. — L'aurias parangida, vos, Mieta — Acô d'aqui rai S'avia vescutd'aquelh temps et .

!

!

que l'aguesse Irobada, Ih'auria «

A! Paura Miela

aquela fenna

me pense petiot

si

:

dit quican!

De segur que fazia de mau,

!

de von pas botar lisefants defora;

mas

ques auria pas vougut laissar star son

Ih'avian bailat un chantel de pan.

.

Vezés,

mancon de res, ques an de sedat, de part*, podon entopinar, elh caire delh fiôc, quant

aquels que et

que

se

acô cera et que Taura

fai

de bofadas, aquels an leu fat

de trobar quels autres son mauvirats

!

Mas si chalia qu'ausiguesson cridarson ventre, hors de mangear, aurian pas tant de morre! « Auzés la Finon? S'entrava pas per parar la

maire delh Plen Pognet «

!

Pare sô que deve parar! La maire patiguet

pro d'aver perdut son drolleton. Et pueissa, saber que « «

la

fam

?

— Goton,

devés

mauvasa comandeira...

— Ma figa, ieu sei de vés la Finon. — Vos mais, Goton Anem, vos hi

chaura sostar «

es

si

botas, nos

!

quant chaplas, contas quauqua brava

besonha, un conte que

parla de

bestias, si

n'en

sabés. «

Per

peseira. »

fe

d'acô,

vole ben. Sabe

«

Lo

Boc per

la


— « «

«

~

81

— Peut-être n'en rien. — Vous l'auriezcorrigée d'importance, vous, Miette! — Assurément j'avais vécu en ce temps-là, et que savait-il

!

.

Si

je l'eusse rencontrée, je lui aurais dit «

__

Ah Pauvre

Miette

!

!

Il

agissait mal, cette femn^e

dehors

les enfants

est hors de doute qu'elle

on ne doit pas bouter

:

;

petit, si

quelqu'un

pain... Voyez-vous,

lui eût baillé

ceux qui ne man-

quent de rien, qui ont du pain blanc, de

la viande, et

comme

qui peuvent se tenir chauds, au coin du feu,

soupe au toupin, quand souffle

Mais lieu de

la

neige tombe et vite

que

jugé que

les

le

vent

autres

!

s'il fallait

manger,

— Oyez

a

la

en rafales, ceux-là ont

sont dénaturés

!

mais je pense, aussi, qu'elle n'eût

pas abandonné son

un chanteau de

quelque chose

qu'ils ouïssent crier leur ventre,

ils

ne seraient pas

la Finette

!

elle

si

sévères

au

!

ne bronche pas pour parer

mère de Plein Poignet Je pare ce que je dois parer! La mère !

«

pâtit

assez de la perte de son petit. Enfin, vous devez savoir

que « «

la

faim est mauvaise conseillère...

— Ma je suis de — Vous aussi, Margoton foi,

boutez de son côté, a

de la Finette.

l'avis

il

?

Allons,

nous faudra céder

si

vous vous

!

— Margoton, puisque vous êtes partie à discourir,

contes-nous quelque chose d'inléressant, un

il

«

est question de

dans

Oh pour !

la pesière. »

bêl'^^s, si

cela, je

conte

vous en savez.

veux bien. Je

sais «

Le Bouc


82

LO BOC PER LA PESEIRA

Jacôt de Trompet era partit per anar a la feira.

En passant per

la

troba'n

prada.

boc

per

sa

peseira.

Aqui aguet Jacôt pr« empeitat per anar a Val querre

la feira...

lo lop.

Lo lop vouguet pas mangear

lo

boc, ni lo boc

se

parar de per la peseira.

Aqui aguet Jacot pro empeitat per anar a Vai querre

la feira...

lo chin.

Lo chin vouguet pas pelhar gear lo boc, ni

lo

lo lop, ni lo

lop

man-

boc se parar de per la peseira.

Aqui aguet Jacot pro empeitat per anar a

la feira...

Vai querre la barra.

La barra vouguet pas barrar lo chin, ni lo chin pelhar lo lop, ni lo lop mangear lo boc, ni lo boc se parar de per la peseira.

Aqui aguet Jacot pro empeitat per anar a

la feira...


83

LE BOUC DANS LA PESIÈRE

Jacot de Trompet était parti pour aller à la foire.

En traversant

la prade,

il

trouve

un bouc dan» sa

pesière.

Et voilà Jacot bien empêché d'aller à la foire! Il

va quérir

le

loup.

Le loup ne voulut pas manger

le

bouc, ni

bouc

le

sortir de la pesière.

Et voilà Jacot bien Il

va quérir

le

empêché

d'aller

à la foire

!

chien.

Le chien ne voulut pas

piller le

loup, ni le loup

bouc sortir de la pesière. Et voilà Jacot bien empêché d'aller à la foire

manger

le

bouc, ni

le

!

Il

va quérir

la barre.

La barre ne voulut pas frapper le chien, piller le loup, ni le loup manger le bouc,

ni le chien

bouc

ni le

sortir delà pesière.

Et voilà Jacot bien empêché d'aller à la foire

i


— Vai querre

84

lo fiôc.

Lofiôc vouguet pas cramar la barra, ni

la

barra

barrar lo chin, ni lo chin pelhar lo lop, ni lo lop

mangearlo boc, ni lo boc se parar de per la peseira. Aqui aguet Jacot pro empeitat peranar a la feira... Vai querre Taiga. L'aiga tuet lo

fiôc, lo fiôc

cramet

la barra, la

barrât lo chin, lo chin pelhet lo lop, lo lop

boc, lo boc se parel de per la peseira

.

Et Jacot saguet preste peranar a la

.

feira.

barra

manget

la


— SSII

va quérir

le feu.

Le feu ne voulut pas brûler frapper

le

manger le bouc,

ni le

Et voilà Jacot bien

Il

ni

bouc

sortir

empêché

barre

la

loup

le

delapesière.

d'aller à la foire

!

va quérir Teau.

L'eau éteignit

frappa le

la barre,

chien, ni le ohien piller le loup, ni

le

bouc,

chien,

le

bouc

le feu, le feu le

chien pilla

sortit

brûla le

loup, le loup

de la pesière.

Et Jacot put aller à la foire.

la barre, la

barre

mangea


86

GIGONAIRES

«

— Aqui

as

«

— De que

i

«

— Aco es mon fiou que s'embôlha.

a « « « «

u (c

« lis

1...

a,

Naneta ?

— Vos coitas trop, pardinal — El Acô vira, Finon Vai esser — N'avés bravamen — Pas tant qu'acô. — Quant? !

fat

— Medj'auna

.

quatre horas.

?

et

medja.

— Quant vos paion, vostra dentella? — Trenta sous l'auna. Mas es fîna que la

fina,

uelhs

!

N'en faze gaire et

me chau

coitar

:

hi

perde

la

levon

dimenche. «

— Mas s'embolhas vostres fuses,

farés

de Trompet que podia pas'nar a la feira

:

coma Jacot non serés

presta, quant chaura... «

«

— Fairai ben — Digeas, Naneta, !

era ben tan entestat, aquelh

boc! <v

Era coma d'homes que

i

a.

.

.

Quant chau

tirar


87

MAZETTES

«

— Allons,

«

-^ Qu'y

« « ft

bon

a-t-il,

1

Nanetle?

— C'est mon qui s'emmêle. — Vous vous dépêchez trop, pardi — Hél temps passe, Finette va être fil

.

!

le

!

Il

quatre

heures. « «

« «

«

«

que

— En avez-vous beaucoup? — Pas tant que cela — Combien? — Demi-aune et demie. — Combien vous lapaye-t-on, votre dentelle? — Trente sons l'aune. Mais est fait

!

elle

perds la vue

j'y

hâter, car «

Mais,

comme

«

«

— — —

la lève si

Je n'en fais guère, et

!

dimanche.

il

faut

me

.

vous emmêlez vos fuseaux, vous ferez

Jacot de Trompet qui ne pouvait pas aller à

la foire «

on

si fine, si fine,

:

vous ne serez pas prête, quand

Si, si

Dites, Nanette, Il

il

le faudra...

!

était

comme

il

était bien entêté, ce

certains

hommes

bouc

!

qui, lorsqu'il


— 88 — de ves avant, liron de ves arrer. razoD, eoquera €

— Amais

.

Trobon ques an

.

!

rambalhava* per grand cas...

Jacot

bon cop de quaquelh bougre de sen-

S'avia'tapat lo bocalhas et rarchar d'un

pcd

coa^m'es vejaire

sot la

lina chabra auria laissât star «

lis

pesés

!...

— Era d'aquela mena' de monde que non se sabon

desvirar

se negearian dins

:

lo

bacbas dels po-

lasî... «

— S'ere estada

diguet la Nanela. «

dents

lo lop, Ih'auria mostrat

li

lo chin, Ih'auria pical lis

anchas

»

.

— S'ere estada

!

»

diguet la Finon. «

— S'ere

estada

la

barra, quant cop Ih'auria fat

petar pelh suc! » diguet la Mieta. *

— S'ere estada lo

fiôc,

Ih'auria rimat

lis

peds

I

»

diguet la Caionet. «

— S'ere

bota «

!

estada Taiga,

> diguet la

K

ieu,

com'una

Taiiria

coflat

lo boc,

d'una bannada

Roseta.

s'ere estada

pelb pitre auria setat Jacot elh

med

pueissa auria mangeât tota la peseira

de la prada, !

diguet la

>

Loison. c « « «

— Ses ben cobeda, Loison — Et Tos, MarinoD, de que serias'stada — Pardi, pas res — E ben, se sabés quican, digeas nos zo,

una conteira.

î

?

!

et serés

. .

.

1


— faut

de

aller

89

Tavant,

— En

en arrière...

tirent

donnent raison, qui plus «

S'il

eût pris

le

bouc pour

quer un solide coup de pied sous

la

«

queue,

rassés de rien

dents «

», dit la

— Si

j'avais été la

«

pieds

I

-

«

Si j'avais »

bacdespoulesl

le

barre,

chef!

lui

aurais pincé les

de quel coup je

lui

» dil la Miette.

aurais roussi les

été le feu, je lui

dit la Catherinette.

Si j'avais été l'eau, je

une outre «

sonner

fait

le

Nanette.

dit la Finette.

aurais

dans

loup, je lui aurais montré les

Si j'a^vais été le chien, je 1

me

espèce de gens qui sont embar-

se noieraient

ils

»

fesses «

:

Si j'avais été le

u

ii

laissé en

I

était de cette

11

appli-

lui

semble que ce gredin de hume-chèvre eût

se

de compte, Jacot était embarrassé pour

fin

peu de chose...

paix les pois

Ils

estl

»

I

l'aurais gonflé

comme

dit la Rosette.

— Et moi,

si

coup de

j'avais été le bouc, d'un

corne en pleine poitrine, j'aurai assis Jacot au milieu

de

la

la

Louison. «

«

prade, puis j'aurais

toute la pesière

— Vous êtes bien envieuse, Louison — Et vous, Marinette, qu'auriez-vous

I

»

dit

1

— Oh rien, « — Eh bien, «

mangé

!

si

pardi

donc été?

I

vous savez quelque chose,

nous, et vous serez... une conteuse

I

dites-le-


— «

— Rai

de vos au Iras, que

berchuda coma «

90

— Anem,anem

son dins vostra

ses joinas

;

mas'na

que volés que dise?

ieu,

Reviras un paucli besonhas que

!

testa, et

passar, de cops que

bercha, acô nos fara

i

trobarés pro per dire. Farés a,

una messongea per vostra

rire...

«

— Espeitas qu'aje remudat mis fuses. — Remudas delh biais et chaplas parer...

«

«

li

Si volés

!

.

.

.

Et vos contarai

«

La Rosa

»


— C'est bon pour

«

— Allons, allons

vous autres, qui êtes jeunes

comme

mais une brèche-dent que je vous dise ? «

91

Remuez vos idées,

!

;

moi, que voulez-vous

et

vous trou-

verez beaucoup à dire. Vous ferez passer, de temps à

une menterie par votre brèche

autre, rire. «

«

nous fera

— Attendez que remis du à mes fuseaux. — Remettez-en convenablement, parlez de j'aie

fil

et...

même «

et cela

.

Rose

»

!

Si

vous voulez

!

.

.

.

Et je vous conterai «

La


92

LA ROSA

Un home avia très filhas ques amava bravamen. Un jorn, qu'anava de feira, Ihi diguet :

«

De que vos portarai que vos agrade?

Margarita, l'ainada, et Maria, la cadeta,

deguèron «

»

Ihi

respon-

:

— Volem una rauba de seda.

Et Rôsa, la joina

— Mon

nom

»

:

Rôsa vole una rôsa. » Lo paire s'en anet, et, quant saguet a la feira, crompet doas gentas raubas. Per la rôsa, penset que «

es

:

n'en trobaria pro, quant s'en tornaria.

Faguet

Pracô, comencava de

sa feira.

quant se viset de

negrezir

s'en anar.

Aco era pelh mes de jun. Avia chalorat

tôt lo jorn;

estaben, l'hôme se galava* de marchar a la fressura et si bôtas farradas

Mas

la rota.

n'era pas a meitat chamin qu'acô se botet

a'sparnir. «

toucavon per

Lo celhse

Cossi

farai,

catet, pueis la plueja

so

pensava, en

arribar, s'acô trai tota la nueit?

tombet.

cossirant,

De que diran

ma

per

fenna

1


93

LA ROSE

Un homme avait trois filles qu'il aimait beaucoup. Un jour qu'il allait à la foire, il leur dit :

«

— Que vous apporterai-je qui vous agrée

? »

Marguerite, l'aînée, et Marie, la cadette, répondirent «

— Nous voulons une robe de

Et Rose, la plus jeune

:

soie. »

:

— Mon nom est Rose

je veux une rose. » quand il fut à la foire, il acheta deux gentes robes. Quant à la rose, il pensa «

Le père

qu'il la trouverait Il

vaqua à

lorsqu'il

On

:

s'en alla, et,

aisément en chemin.

ses affaires

;

cependant,

le

soir tombait

songea au retour.

était

au mois de juin. La journée avait été

chaude; aussi, l'homme se galait de marcher à

la

fraîche et ses bottes ferrées martelaient la route.

Mais à peine arrivait-il à moitié chemin, que des éclairs brillèrent.

Le

ciel se couvrit,

puis une ondée

se déversa «

— Comment

pour arriver,

si

ferai-je,

la pluie

pensait-il,

tombe toute

en

soupirant,

la

nuit? Que 7


94 e'ms efanls, si me vezon pas toroar aquesle ser? Mais que crezon pas que de raubaires m'an arrestat, beleu, tuât

et,

»

1...

Com'espiava ont se podria abrigar, veguet, en

un

lai,

fiôc entre Us abres.

«

— Un hostau -

!

so penset

;

se hi podia esser d'avant

qu'acô n'en fâche una autra bofada, me

pauc.

hi pausaria'n

»

Prenguet una corcheira e anet de qu'ont vezia de fiôc.

Acô

un chastel.

se trobet

Li fazia

esmai de

hi

entrar.

Auziguet que dizian «

:

— Entras, brave home

!

»

Passet lo portau de mauvasa gracia. Totas'ls fenestras

delh chastel eron esclairadas,

auzia una musica doussa, tant doussa que de sa vida n'avia

auzida la pareira. Mas vezia dengun

demandavade que

hi avia... et

et se

comencava de s'espao-

regear...

Coma «

se virava per s'en tornar, quican faguet

— Entras, brave hômel

paor

!

La

:

Chaufas vos, n'ajas pas

»

porte

se

badet

tota

soleta,

es

elh

en-

trât..

Dins lo chafoger, d'estellassas fiocavon

.

L'home

se

chaufet, se sechet; aquela brandada lo rebiscolet*, e

acô

Ihi

dar*.:.

sabeguet

tant

bon que

se botet a

chabi-


— diront

ma femme

et

mes

95

enfants,

s'ils

me

ne

voient

pas ce soir? Pourvu qu'ils ne croient pas que des voleurs m'ont arrêté,

Pendant vit,

et,

peut-être, tué

qu'il regardait

il

I.

.

.

»

pourrait s'abriter,

il

au loin, une lumière qui brillait entre les arbres.

« Une maison! pensa-t-il si je pouvais y arriver avant que la rafale ne redouble, je pourrais m'y repo-

ser Il

;

un peu. prit

»

par une coursière

et se

dirigea

se voyait la lumière. C'était justement

Peu assuré, Il

« 11

n'osait y pénétrer.

il

ouït qu'on

lui disait

:

— Entrez, brave homme franchit

Toutes

le portail,

les fenêtres

!

»

non sans

musique harmonieuse,

de sa vie

il

vait être... et la

<t

se virait

éclairées

;

il

harmonieuse que Pourtant,

il

demandait ce que cela poupeur commençait à le gagner... et se

pour s'en retourner, lorsqu'une voix

fit

:

Entrez, brave

pas peur!

si

n'en avait ouï de semblable.

ne voyait personne

Il

crainte.

du château étaient

oyait une

mystérieuse

du côté où un château.

homme

!

Chauffez-vous, n'ayez

»

La porte s'ouvrit d'elle-même et il entra. Dans le vaste foyer, d'énormes bAches flambaient. L'homme se chauffa, sécha ses vêtements ce bon feu ;

le ravigota.

sommeil

le

Il

en éprouva un

gagna,

.

tel

bien-être

que

le


— Quant

9G

se desvelhet, lo gropas* avia passât, l'aura

amaisada, claregeava

s'era

per

lis

fenestras

et

li

gealhs cridavon. Se coitet de s'en anar. Defôra, elh caire de la porta delh chastel, veguet

un roser ques avia de rcsas d'una mena que conissia pas. «

— Anem, so diguet, la

as de gentas flors

Rôsa sera benaisa

:

aqui

».

Et n'en copet una.

Mas quant d'una feda Diguet

e'is

am

s'estavanir «

« «

l'aguet copada,

Aquela bestias avia

Iret.

una

la testa

laida bestia se

mos-

d'un chin, lo ventre

pautas d'una chabra.

l'hôme que tremolava

et

que pesset

;

— Per de que copas aquesta rôsa? — Per bailar am ma drùlla, que se noma Rôsa. — Aco es bon volés pas que vôstra drôlla la

!

.

.

.

Si

môri,

menas

rosa,

aora qu'es copada, et que vôstra drôlla n'en

la'qui,

davant dec jorns... Emportas

côpe une autra, quant vendra

La «

la

».

bestia se tornet escondre et l'home s'en anet.

— Pracô, pracô,

fat!...

drôlla?

so dizia,

Quau sap de qu'aquela

coma chaminava,

qu'ai

bestia vau faire de

ma

»

Avia tant d'esmai que vezia pas l'aubeta, promeira rizeta de la matinada,

que blan^hegeava en aut delh

puec, ni la plueja de la velhada que gotegeava,

de perlas, pels folhas,

ni'ls

coma

pradellas que la banha-


97

Quand

Forage avait passé,

s'éveilla,

il

le

vent

s'était

apaisé, le jour naissant éclairait faiblement les fenêtres et les

coqs chantaient.

Dehors, au coin de la porte du château,

il

vit

un

rosier couvert de roses d'une espèce qu'il ne connaissait pas. «

— Allons, se dit

de belles fleurs Et

il

Rose sera heureuse

la

il,

:

voici

w.

en coupa une.

Mais à peine

l'eut-il

coupée, qu'une bête hideuse

apparut. Cette bête avait la tête d'un chien, le corps d'une brebis Elle

dit

défaillir « «

«

et les pattes

et qui

manqua

:

— Pourquoi coupez-vous cette rose? — Pour la donner à ma qui se nomme Rose. — C'est bon vous ne voulez pas que votre fille,

!

Si

meure, amenez-la

fille

tez la rose,

ici,

avant dix jours... Empor-

puisque vous l'avez coupée,

que votre

et

en coupe une autre, lorsqu'elle viendra

fille

La bête disparut «

d'une chèvre.

à l'homme, qui tremblait

— Hélas

fait?

Qui

!

Hélas

sait ce

Son trouble l'aube,

et !

l'homme

s'en alla.

se disait-il,

en cheminant,qu'ai-je

que cette bête veut était

si

».

grand,

faire

qu'il

de

ma

fille

ne voyait pas

premier sourire du matin, qui blanchissait la

cime du puy,

ni la pluie

de

la nuit,

qui tombait,

goutte à goutte, en perles, de chaque feuille, ni les pradelles baignées d'eau qui verdoyaient davantage..


-

98

-

dura fazia mais verdegear... Marcha va copet; aqueli gentas besonhas

cassava lo

et

Ihi fazian res...

enquera dins'quelh Chaque côp que lo chamin virava, crezia Irobar de bestias, et totjorn ramenava Era luan, desera,

et se vezia

chastel plen de trevas...

acô

:

— Quau sap de que vau

«

faire

de

ma

drolla?

»

Son monde, que Tespeitavon, saguèron benaises de lo veire. Quant aguet contât cossi la plueja l'avia tardivat, Margarita et Maria Ihi demandèron « Papa, avés crompada nostra rauba? » Lo paire bailet li doas raubas de seda. Et la Rôsa diguet Era esquintât*, nientat quant tornet chas

elh.

:

:

— Papa, avés portada ma rôsa?

«

Lis uelhs delh paire se

— Ai

«

!

ma

contet

banhèron

:

paura Roseta, so faguet, en

la flor, si sabia de

Et

«

la

que me cola

besonha

!..

.

Ihi

bailant

»

que chalia que sa

fîlha

faguesse

Quant et

la

Rôsa auziguet'co, pechaire*,

ploret, ploret,

respondeguet qu'amava melh morir

!

diguèron tant qu'elh novem jorn anet ves

Son paire

i

Quuant

saguet, copet

i

la

«

:

— Acô es

tu,

Ih'en

menet.

mostret. Aguet paor;

samen

Mas

lo chastel.

Rôsa?

mas

una rôsa

et la

bestia se

la bestia Ihi parlet

dous-


99 Il

marchait en baissant la

choses

était loin, déjà, et

Il

tête

du chemin,

A chaque

«

sait ce qu'elle

veut faire de

quand

il

qu'il eut

conté

Marguerite et Marie

arriva chez

comment la

lui

Le père donna Et Rose dit

les

demandèrent

deux robes de

ma

pauvre Rosette,

la fleur, si tu savais ce qu'elle

Et

il

»

?

soie.

:

Les yeux du père se mouillèrent

Ah!

conta ce qu'il

Quand Rose

fallait

me

ût-il,

ouït cela, la

en

coûte

que sa

»

:

lui baillant

raisonna

bien que

si

le

»

!...

fille fît.

pauvrette, elle pleura,

pleura, et répondit qu'elle préférait mourir la

Les

voir.

:

— Père, avez-vous apporté ma rose? —

lui.

le

pluie l'avait retardé,

— Père, avez-vous acheté notre robe

«

«

ma

:

fille ? »

qui l'attendaient, furent heureux de

Après

«

son esprit

en

revenait

était brisé, anéanti,

siens,

détour

croyait trouver devant lui cette bête et,

il

toujours, cette pensée

— Qui

dans ce châ-

se voyait encore

il

teau tout hanté de mauvais génies.

Il

ces belles

toutes

:

le laissaient indifférent.

neuvième jour

1

Mais on

elle se rendit

en ce château.

Son père

Quand

l'y

conduisit.

elle y fut, elle

coupa une rose

apparut. Elle eut peur; mais la bête

cement «

:

— Est-ce

toi.

Rose?

lui

et

la bête

parla dou-


— 100 « «

— Oc. — Demora dins'quelh

mau. Trobaras

tôt sô

dengun

chastel;

que

te

chau,

et, si

le fara

de

m'escoutes»

auras de benaise per ta vida... Oblèdes pas de copar

una rôsa, quant me voudras parlar » Lo paire et la fîlha demorèron elh de totas

chastel. Avian

besonhas mais que n'en chalia per

11

la

Quant volian mangear, trobavon sobre la taula tant sô que envejavon de la vida s'eron

gasta. tôt

:

galats...

Desera, una

semanada

penset que sa maire et

am

diguet

son paire

s'era passada.

La

drôlla

sors devian s'ennojar et

si

de

s'en

tornar

ves

l'hos-

tau.

Quant saguet soleta, anet, coma de costuma, copar una rôsa. La bestia venguet. Mas, en liôc de s'en lornar gaire de temps après, vouguel demorar

Rôsa, dins lo chastel. Se jasset la

am

la

peds de la drôlla

els

:

podia pas pro gardegear. «

rar'qui

Rôsa, !

Sei

ma Rôsa, so dizia, que t'ame de demomas'na laida bestia, un moslre, et tu me

gardes, et tus as pietat de ieu

pas parlar?.

am

.

.

Per de que

tu que ses tant bôna?

Et,

coma

dizia'cô, si

te

!

Ai

I

per de que pôde

pôde pas dire quau

sei

»

dos uelhs eron banhats et lan-

hava com'una persona.

La Rôsa, que

la

plangia perde bon,

delh biais per amaisar son mau.

Ihi

parlava


— — Oui. — Demeure

«

«

101

en ce château

de mal. Tu trouveras ce qu'il tes, tu

— personne ne

:

te faut, et, si tu

te fera

m'écou-

seras heureuse toute ta vie... N'oublie pas de

me

couper une rose, lorsque tu voudras Le père

et

la

parler

».

demeurèrent au château.

tille

Ils

avaient de toutes choses et bien plus qu'il ne leur en

pour

fallait

l'heure

du

leurs

satisfaire

repas,

ils

besoins.

Quand

tous les mets qu'ils pouvaient souhaiter n'avaient connu telle abondance.

ils

Une semaine

s'était

pensa que sa mère être, et elle pria

Une une

:

de leur vie

.

déjà écoulée. La jeune

et ses

sœurs

fille

s'attristaient, peut-

son père de retourner à la maison.

fois seule, elle alla,

rose.

venait

trouvaient, servis sur la table,

comme

Labête apparut. Maisau

de coutume, couper lieu

de se retirer, peu

de temps après, elle voulut demeurer avec Rose dans château. Elle se coucha aux pieds de la jeune

le

fille

:

ses yeux ne pouvaient se détacher de ceux de Rose.

«

Rose,

demeurer monstre,

Ah

ma

ici!

et tu

Rose, disail-elle, que je t'aime de

Je

ne suis qu'une hideuse bête, un

me

gardes, et tu

pitié.

pourquoi ne puis-je parler?... Pourquoi ne puis-

!

je te dire qui je suis, à toi qui es Et, elle

me prends en si

bonne

?...

»

en disant cela, ses yeux versaient des larmes et

gémissait

comme une

personne.

Rose, qui, du fond du cœur, la prenait en pitié, lui parlait

tendrement pour calmer sa douleur.


— 102 — «

— N'ajas pas paor, so

dizia, aurai d'espeita

voi

:

laissarai pas'star ». «

— Pracô, se demandava quau podia ©sser aquela

bestia,

de que

i

aviaque non podia dire

avia d'uelhs tan amistos.

per de ques

et

.

Quant saguet demorada un pauc com'acô, tornet pensar

am

son monde. Demandet de s'en tornar quau-

ques jorns ves son hostau. «

Te laisse anar, Rôsa, diguet

sabes sô que

dit

t'ai

quant seras de luan, lu mais...

Si

aora que

;

La Rôsa

m'escoutes,

anet

seras

trei

son

veire

te conisse,

;

mas

pâtirai

tomes pas, deve morir

et, si

d'aqueste pais... Te baile

la bestia

la

jorns

mais

et

benaisa

».

monde que

la

plora-

besonhas

et

qu'un jorn, que dévia leu vener, séria benaisa es

els

von,

Diguet

avia de

ques

totas

li

mais.

N'aguèron grand solas.

Coma passèron

viste,

aquels

trei jorns! Quant la Rosa se vouguet entornar, sa

pregèron tant, que se tardivet d'un

maire

et si sors la

jorn.

L'endeman, anet elh chastel. Se demandava

com'acô

faria...

Trobet

et 11 rosas desfolhadas,

pendolava, flaqida

lo roser

rabanat delh solelh

per terra. N'i avia ma'una que

!

La copet vistamen. Auziguet que cridavon «

— Ai

morir

1

»

!

Rôsa

1

Rôsa

:

!...

Me

fazes morir

I

Me

fazes


103 «

Ne craignez

rien, disait-elle, je saurai

patiente et ne vous abandonnerai pas

Cependant,

elle se

».

demandait qui pouvait bien être dont

cette bête, quel était le secret

délivrer et pourquoi elle avait

ses parents.

elle

ne pouvait se

un regard

Après avoir vécu quelque temps reporta vers

être

Elle

tendre.

si

.

pensée se

ainsi, sa

demanda quelques

jours pour se rendre auprès des siens. «

— Je

laisse aller. Rose, dit la Bête,

te

pelle-toi ce

que

je t'ai dit

:

pâlirai de ton éloignement, et,

suis vouée à la mort, ainsi

formes à

mon

désir, tu seras,

mais rap-

ore que je te connais, je si

que

tu

ne reviens pas, je

toi!... Si tu te

en ce pays,

la

plus heu-

reuse entre toutes... Je te donne trois jours

».

Rose se rendit auprès de ses parents qui raient. Elle dit qu'elle ne

jour prochain

manquait de rien

la pleu-

et

Comme ils passè-

QuandRose songea au

départ,

sa mère et ses sœurs la supplièrent tant, qu'elle féra d'un jour.

qu'un

heureuse avec eux.

elle serait

Ces paroles leur firent grand bien. rent vite, ces trois jours!

con-

Le lendemain,

elle s'en fut

le

dif-

au château,

remplie de crainte. Elle se demandait ce qui

allait se

passer. Elle trouvale rosier desséché par le soleil; les

roses étaient effeuillées à terre, excepté une qui pendait, flétrie

En

!

hâte, elle la coupa.

Elle entendit ces cris «

fais

— Ah

!

mourir

Rose 1

!

Rose

:

!..

Tu me

fais

mourir

!...

Tu me


104

Mas ges de

bestia

!

Espiet de qu'ont auzia lanhar, et la trobet que pen-

geava traire

pous

la testa dins lo

un pauc mais

:

anava

se hi

I

La Rôsa

se coitet

de

la levar, et,

comas era

garella,

la portet ves la fuant.

Quant l'aguet parangida, acô drôUe que «

diguet

Ihi

— M'as fat patir,

laissât' star, te

qaau «

se trobet

an gente

:

Rôsa

;

mas per de que m'as pas

pardone. Aora que pôde parlar. sabras

sei.

Mon

paires era lo senhor d'aqueste chastel. Mori-

guet a la guerra, en estranje pais, que ieus ère

Ma maires aguetson

joinet.

ben,

grandamen

richa,

Ëstaben,

paures conissian

lis

et,

lot

mais que saguesse

per lo paure monde.

fazia res

lo chastel e hi

venian

gaire.

Un

jorn,

pracô,

una fenna mau

bestida,

Iota

cassada sobre son baston, venguet demandar l'au-

morna

*.

Ma maire un

l'avia

caire de pan,

me

qu'aco

saje

vista.

Hors de

comandet' pardonat!

Is

faire

Ihi

chins, e

lis

aqissere

ieu *

bailar

maisves

la

paura.

Aquela d'aqui levet son baslon

e'is

chins demo-

rèron la gorgea badada, darres lo portau, virats en peira

diguet

:

;

et

saguèron

pueis, se viret de ves nos autres et


105

Mais point de Bête!

Cherchant du côté d'où venaient ces plaintes, la

trouva

pendante au bord du puits

la tête

à tomber dans

le

vide

Rose se hâta de

elle

et prête

!

la relever, puis,

comme

était

elle

souillée, elle la porta à la fontaine.

Quand

elle l'eut lavée, elle vit,

garçon qui lui dit

— Tu m'as

w

devant

un beau

elle,

:

Rose

fait pâtir,

m'as pas abandonné, je

mais puisque

;

tu

ne

pardonne. Ore que je puis

te

tout dire, tu sauras qui je suis. ((

Mon

père, qui était

mourut à

la guerre,

seigneur de ce château,

le

en pays étranger, alors que j'étais

Ma mère jouit de sa fortune, et, immensément riche, elle ne faisait point

bien jeune encore.

bien qu'elle fût

l'aumône au pauvre monde. Aussi, qui connaissaient de

réputation

les

le

mendiants,

château,

n'y

venaient guère. «

Un

jour, pourtant, une vieille

femme aux

vête-

ments sordides, toute courbée sur son bâton, vint demander l'aumône «

Ma mère

Pavait vue.

un quignon de pain,

moi

aussi

elle

que cela

Au

lieu de lui

faire

donner

lança sur elle les chiens, et

me

soit

pardonné

I

je les

excitai contre la pauvresse « Celle-ci leva

la

son bâton et

gueule béante, derrière

le

les

chiens demeurèrent

portail, et furent

gés en pierre; puis, se tournant vers nous,

chan-

elle

dit

:


— monde

Mauvas

«

mauvas coma

gralhs Et

si

Serés

ses!-...

chasti-

que son

servents,

li

mes très, anon coassar am

li

»

I

servents, virats en gralhats nègres, prenguè-

li

ron la volada ves

— Et

«

que

Per comencar, que

gals!.. tant

106

tu,

bos.

li

fenna aissa que pôdes pas veire

lis

pelhards, so tornetdire, sabras que sei la fadaBelina. Ai lo poder per' quesle païs

que

me

guelh

sei

et

melh afinar

chaque côp que coparan una flôc

*

flor,

acô

de pious!... Paras tant de cossirs

n'an fat aquels ques an

voler...

te

botada en paura... Per ques as tant d'or-

ranche un

coma

aco es per

de mauvestat, sajes virada en roser plen de

rosas, et que te

:

patit de

ton

mau-

»

E un roser se trobet elh caire de La fada se viret de ves ieu

la porta.

:

«

— Et

tu, drôlle

mau

estrut, seras'

na laidabestia

et viuras dins la terra. N'en sortras totes lis

destacharan 'na

mas podrasres

Parlaras

rosa.

dire de so

que

coma

t'es'ribat.

lo

cops que

monde,

Ses com'aco

per una centenada. S^ras sauvât, pracô, davant 'quelh temps,

si lo

promer que copara'na rosa es un pelhard et

qu'aje una droUa. Com'aco d'aqui te chaura maridar,

autramen moriras, morira coma «

et,

si

la

drolla

vôu pas vener,

tu.

Vole qu'aquels que vendran'qui trobon per man-

gear et per biure.


— «

107

Mauvaises gecs que vous êtes Vous serez châtiés !

!

D'abord, que les domestiques, qui son t aussi méchants

que leurs maîtres, «

aillent croasser avec les

Et les domestiques, virés

corbeaux

!

en gros corbeaux noirs,

prirent leur vol vers les bois. «

— Et

toi,

miséreux,

les

femme haineuse fit-elle

fée Béline. J'exerce

mieux

te

qui ne peut supporter

encore, lu sauras que je suis la

mon pouvoir en

surprendre que

j'ai

ce pays

c'est

:

pour

pris lesapparencesM'une

mendiante. Puisque tu as tant d'orgueil

de méchan-

et

ceté, sois changée en rosier chargé de roses, et que

chaque

fois

cheveux

qu'on

te soit

douloureux que «

Et

«

La

«

un

coupera une

te

les

une

touffe de

!

rosier s'éleva au coin de la porte.

mon côté homme discourtois,

fée se vira de

Et

fleur,

Tu feras autant de soupirs malheureux que tu as repoussés ».

arrachée

toi,

jeune

:

tu seras une Tu en sortiras coupera une rose. Tu auras

bête hideuse et tu vivras dans la terre. toutes les fois que l'on

l'usage de la parole, mais tu ne pourras rien dire de

ce qui te concerne. Tu es condamné pour un siècle. Ta punition pourra, cependant, prendre fin avant ce temps, si le premier qui coupera une rose est un homme du peuple et qu'il ait une fille. Alors, tu devras te

marier, autrement tu mourras;

ne veut pas venir, «

elle

et, si la

mourra comme

fille

toi.

Je veux que tous ceux qui viendrent

à manger et à boire.

jeune

ici

trouvent


«

la

Acô trevara dins

promeira rosa.

108

lo chastel

— d'avant qu'ajon copada

»

La fada mo tochetain son baston despueis, sei estai un babalhas. Adonca, aco es tu, Rosa, que m'as sauvât. Auras et seras noi maridarem sô que t'ai prometut :

:

richa

Lo «

».

man

drôlle prenguet la

— Rosa,

Rosa,

ma

N'en diguet pas mais

Rosa. :

de la Rosa ..

»

sen saber com'acô se fazia,

dama

veguet, davans elh, una genta

rauba blancha coma nibla. Era

negea

la

coronada de

:

grifol

*

bestida d'una

et leugeira

et

coma

la

son morre rizent era

mais que mais agrados. Diguet «

— Me conissés?.

avésbeson de ieu

Lo

:

.

.

drôlle se genolhet

— Ai

Sei la fada Belina. Sabe ques

que volés?

»

:

bôna fada, si vos plai, so diguet, ajas pietatl Que ma paura maire e'is autres tôrnon'ver la vida delh monde. » La fada tochet'ls chins, e'is chins se jassèron a sis «

peds let

;

de

!

pueis, croset, per de sobre sa testa, son trico. trei biais

:

un

tropel de gralhs

venguèron dels

bos, et, quant se pausèron per terra, acô saguetli ser-

vents delh chastel. Per la

fin,

tochet lo roser

:

la

chastelana se trobet davant son monde. Mas era laidal N'avia ges de pious

!


109 Ce château sera hanté jusqu'à ce qu'on

«

première rose.

la

La

«

^n

bête... «

•ce

me

fée

coupé

»

toucha de son bâton

:

depuis,

vécu

j'ai

^

Ainsi, c'est toi, Rose, qui m'as délivré.

que

ait

je t'ai

promis

Tu auras

nous nous marierons et tu seras

:

riche, »

homme

Le jeune «

— Rose, Rose,

prit la

ma

main de Rose

Rose...

:

»

n'en dit pas davantage. Sans savoir

Il

cela se faisait,

vit,

il

comment

tout à coup, devant

lui,

une

dame vêtue d'une robe blanche comme la neige légère comme la nuée. Elle était couronnée de houx

belle et

et son visage riant avait Elle dit «

sais

— Me reconnaissez-vous? Je suis la fée Béline. Je que vous avez besoin de moi que souhaitez- vous ? :

Le jeune

homme

— Ah

bonne

«

ma

!

pauvre mère

vivants.

La â

fée

s'agenouilla

fée,

dit-il,

ayez pitié

!

reviennent parmi

Que les

;

les chiens, et les

beaux vinrent des

:

aussitôt,

:

du château. Enfin,

la châtelaine

qu'elle était laide

une bande de cor-

bois, et, à peine furent-ils à terre,

vit les serviteurs

le rosier

chiens se couchèrent

puis elle croisa, par-dessus sa tète, sa

baguette de trois biais

que l'on

de grâce,

et les autres

:

»

toucha

ses pieds

cha

une grâce sonveraine.

:

!

elle tou-

apparut devant tous. Mais

Elle n'avait pas

un

seul cheveu

l


— MO — La fada «

parlet com'acô

:

— Si vos ai tornats botar en vida, aco es per Famor

d*aqaesta drôlia. Sajas, d'aqui en

chau que dins

Drôlie,

trei

lai,

de bon monde.

jorns sajes maridat. Tu, sa

maire, per penitensa, demoraras la testa pialada et

non

veiras la nôssa. Tu, drôlla,

tau gracia

me

podras demandar

que voudras, non ma'una, pracô

te la

:

bailarai. «

Bôna

fada, faguet la Rôsa,

coma mon

benaisa tau jorn

mon

si la

esser

maire de

nôvi deu patir? Si vos plai, ques ella aja de que

chadena

faire sa

coma' a

coma podria

noviage,

et

que puescia mangear de

festa,

Is autres...

— Rôsa, m'amia, qu'acô

saja

Per que ses co-

fat.

rauda, auras de benaise tota ta vida, et dengun

podra justar Et, tôt solet,

per un côp,

lo

portau delh chaste! se badet

dos chavalhs, que tiravon un charre d'argent,

entrèron

;

la fada

Quant geau tornar veire

!

lo

i

montet

monde

et s'en anet.

delh chastel aguèron de se

Anèron querre

lo paire, la

sorsdelaRosaet covidêron chastelans de dec

grand

te lo

* ».

*

legas de festa.

luan.

Pueiss'

La Rosa am

maire,

li

et chastelanas

emprès, faguèron

sa rauba de nôvia

*

era

enquera mais genta que de costuma.

Quant saguet maridada, gardetson monde ves Ni mais obledet pas so que la fada

mandet am si servents de

faire

Ih'

ella.

avia dit. Co-

bôna charaamels pau-


~ La u

fée parla ainsi

lit

:

— Si j« vous ai readu la

jeune

Soyez,

fille.

c'est

vie,

trois jours. Toi, sa

il

grâce à cette

faut que tu sois marié

mère, pour ta punition, tu

resteras chauve et ne prendras point part

Quand à

toi,

jeune

fille,

aux

secourables

dorénavant,

malheuFeux. Jeune homme, dans

tu pourras

aux noces.

me demander

telle

grâce que tu voudras, mais une seule, cependant

je

:

te la baillerai. «

— Bonne

fée, reprit

heureuse en un

être

riage,

si

en prie,

la

tel

Rose,

comment

mère de mon époux

faites qu'elle ait

mon ma-

doit pâtir? Je vous

de quoi tresser sa chaîne et

comme

les autres.

fait ainsi.

Puisque tu

qu'elle puisse avoir part à la fête, «

pourrais-je

jour que celui de

— Rose, m'amie, qu'il en soit

es sensible à l'infortune d'autrui, tu auras

du bonheur

toute ta vie et personne n'y pourra porter atteinte. Et, tout à coup, le portail

du château

s'ouvrit

»

de

lui-même, deux chevaux attelés à un char d'argent le franchirent; la fée y prit place et disparut.

Quelle joie les gens du château eurent de se revoir!

On

alla quérir le père, la

on convia châtelains ronde. Puis on

mère,

les

et châtelaines

sœurs de Rose

et

à dix lieues à la

grand

fête. Rose, dans sa robe de mariée, était encore plus belle que de coutume.

Après

fit

de la

garda ses parents auprès d'elle. non plus, les recommandations

la noce, elle

Elle n'oublia pas, fée.

Ses serviteurs reçurent l'ordre de faire bon


— res.

412

Eslaben, aquels d'aqui irobavon

dada per

se parar de Ter delh

temps,

baun bon topin

la feneira

e

de sopa per se rapatiar.

La « Bona Dama d'efants, viusquet toi

lo

»

— coma dizian — aguet un Iropel gaire

be'na centenada et trobet

benaise que Ih'avian prometut et ques avia

tant méritât.


— accueil

113

aux pauvres. Aussi, ces derniers trouvaient-

ils

toujours la fenière ouverte pour s'abriter contre

les

intempéries et une bonne soupe pour apaiser leur

faim.

La « Bonne Dame » comme ils disaient eut de nombreux enfants, vécut presque centenaire et jouit de tout le

bonheur qui

qu'elle avait bien mérité.

lui

avait été promis et


114

DE QU'ONT CHAU PAS!

— Marinon,

«

diguet la Catonet, nos avés contât

quican de brave

;

mas m'avés

fat

am

paor

aquela

bestia; creze que n'en sonharai...

— Et per

«

de que, Catonet? Aco era pas'na

vasa bestia, aco era un galant.

— Vos en

«

fote!...

Un

galant ques a de paulas de

chabra, un ventre de feda, una testa de chin

«

Âcô vos

fai

dar

?

— Brave bon Dieu, que dizés'qui, Finon

passât .

.

:

li

?

Acô m'a

garsons son per'quellas que se volon mari-

Acô era bon per

.

..

soleu, Catonet? Lo morre d'un

gente garson vos agradaria mais, beleu «

la

Rôsa.

. .

et

per vos ques avés

homes E aquelh <iues ai fara trei !. « Basta que vostre tresem voi gaste delh vos mais gastat dos «

mau-

.

!

.

.

.

biais,

!

«

illent «

Me

pararai, Catonet,

ganhara

me

pararai

:

lo

pus va-

!

N'aurias pas

tant

fat

l'harbalanda, s'eres

estada la maire d'aquela paura Rôsa. Quant aurias


ou

115

NE FAUT PAS!

IL

— Marinelte, dit la Gatherinette, vous nous

«

avez

conté quelque chose de beau; mais vous m'avez

peur avec cette bête je crois que ;

«

Et pourquoi, Gatherinette

méchante

— Ah

«

bête, c'était 1

un

bien oui!...

j'en rêverai.

?

Ce n'était pas une

galant...

Un

galant qui a des pattes

de chèvre, un corps de brebis, une

«

d'un «

Cela vous

fait

..

tête

de chien

!

.

garçon vous agréerait mieux, sans doute

joli

— Ah!

mon

.

répugne, Catherinette? Le visage

Dieu,

que dites-vous

là,

?

Finette.

Cela m'a passé; les garçons restent pour celles qui

veulent se marier... C'était bon pour la Rose... et

pour vous, qui avez usé deux maris « «

— Et celui que — Puisse votre

j'ai

vous aussi

faut, «

drai «

;

Je

le

me

fera trois

troisième vous user

comme

il

I

défendrai, Catherinette, je

plus vaillant l'emportera

— Vous n'auriez pas tant

aviez été la

I...

!..

mère de

cette

me

défen-

!

fait la

faraude,

si

vous

pauvre Rose. Quand voua


— sabut que auria «

la chalia

fat cossirar.

— Oc ben

menar vec una

bestia, acô

demandât am mon home per de

ques avia copat de rôsas de qu'ont chalia pas «

— Aqui

as,

vos

.

auria

:

116

Finon

!

Es elh que crezia tant ben

!

faire!... «

la

man

Quant

l'on conis

pas quican, Ton

«

— Adivoc*, fotrauda

«

— Avés razon, Catonet. Aco saguet

grand ben n'en sortiguet

Rôsa «

bôta pas

floriguet

!

:

Si chalia res faire...

mau

fat

;

mas

per una rôsa copada, una

!

— Aco es vos que dizés'co, Roseta? E ben, tornas

hi et trobas de a

hi

!

que nos

— Farai ben, Finon,

faire rire

!

et vos contarai Meitat Gealh,


117

auriez su qu'il fallait la conduire auprès d'un tre, cela

— Oui,

«

pourquoi

«

faire

il

certes

demandé à mon mari

I

il

ne

fallait

— Mon

pas

l

bien

!

Dieu oui, étourdie!

S'il

ne

fallait

rien

.

— Vous avez raison, Catherinette. Ce fut un mal

pée,

une Rose -~

C'est

fleurit

;

"

!

vous qui parlez

ainsi,

Rosette? Eh bien,

Je m'exécuterai, Finette, et je vous

L Homme-Coq.

;

pour une rose cou-

continuez, et trouvez de quoi nous faire rire «

si

ne connait pas quelque chose, on

main

mais un grand bien s'ensuivit «

qui croyait

Et lui

!

faire. «

j'aurais

Et voilà. Finette

n'y porte pas la «

;

avait coupé des roses

— Quand on

«

mons-

vous aurait fait soupirer...

!

conterai


118

MEITAT GEALH

Un

meitat gealh, ques era esparnhant, avia cent

esculs de côbre. Lis prestet

am un homme

Mas una annada venguet que que

et

i

li

riche.

blats granèron gaire

aguet res per pasturar

lo

bestiau. Meitat

gealhs aguet beson de son argent et s'en anet per lo

demandar.

Quant saguet un pauc luan, trôba Ont vases, Meitat Gealh?

«

« «

«

lo reinart.

— Vase querre cent escuts que me devon. — Laissa me segre. — Oc ben voles. Bôta sot mon ala si

te

:

te

por-

tarai. »

Lo

reinart se botet sot son ala es eh l'emportet.

Elh Caire d'une garnassa, trôba lo lop. « « «

«

— Ont vases, Meitat Gealh? — Vase querre cent escuts que me devon. — Laissa me segre. — Oc ben voles. Bôta sot mon ala portasi

te

:

te

rai. »

Lo lop se botet sot son ala

es elh l'emportet.

Acô

Ihi


119

L'HOMME-COQ

Un homme-coq, écus de côté. Mais

il

de grain

11

vint et

Quand — Où

il

fut

à un

homme

riche.

blés donnèrent

les

eut besoin de son argent et

il

se

mit en

réclamer.

le

un peu

vas-tu,

peu

n'y eut rien pour pâturer le bétail.

il

route pour aller

«

les prêta

une année où

L'Homme-Coq

qui était économe, avait mis cent

loin,

il

rencontra

renard.

le

Homme-Coq?

«

— Je vais quérir cent

«

«

— Si

écus que l'on

me

doit.

Laisse-moi suivre. tu

veux. Mets-toi sous

mon

aile

je te por-

;

terai. »

Le renard se mit sous son

Au

coin d'un bois,

il

aile et

rencontre

le

il

l'emporta.

loup.

«

— Où vas- tu,

«

— Je vais quérir cent écus que l'on me

Homme-Coq

?

« — Laisse-moi suivre. — veux Mets-toi sous «

Si tu

.

mon

aiie

;

doit.

je te por-

terai. »

Le loup se mit sous son

aile et

il

remporta. Cela


120

mas

pezava, pracô,

n'avia geau de faire plazer

am

los

antres.

Un pauc pus «

luan, trôba l'aiga

— Ont vases, Meitat Gealh

— Vase querre cent — « Laissa me segre «

« fais,

— Oc ben sabes;

si

mas

voles.

se

i

L'aiga se faguet

:

?

me

escuts que

Bota

te

sot

devon.

mon

pôdes châber,

ala. N'ai

mon

te portarai. »

coma poguet

tant pelitoneta

et

chabeguet sot Tala.

Aquela chargea n'era pas leugeira que

trantiolava, de cops

peirassas

;

i

avia, per

mas de pensar ques

et Meitat

rocs o perlis

li

avia

Gealh

fat

plazer

am

d'autres, acô lo fazia marchar.

Arribetelhchastel del'hôme quelh'avia manlevat porta, tôuca,

Qent escuts et tustet per la

si

tôuca,

tôucal

Lo «

«

portier passet la testa pelh fenestron

:

— Quau's acô?

— Aco

es ieu, Meitat

Gealh

;

vostre

mestre

me

conis. «

« « «

dar

— Et que voles? — Vole parlar amelh mestre de — Per de que faire — M'a manlevat cent escuts

saien.

?

;

;

me

fan fauta.

Lo portier

Ihi

li

vene deman-

»

s'en anet trobar son mestre, pueis tornet

passar sa testa pelh fenestron

:


121

un peu, mais

pesait bien

il

heureux de

était

faire

plaisir à autrui.

Un peu plus loin, il rencontre M Où vas-tu, Homme-Coq?

la rivière.

— — Je vais quérir cent écus que l'on me — Laisse-moi suivre. — tu veux. Mets-toi sous mon J'en

doit.

« «

déjà certes mais si tu peux y tenir, je

faix,

;

La

ai

aile.

Si

«

rivière se

fit si

te

mon

porterai. »

petite qu'elle put et elle réussit à

tenir sous son aile.

Cette charge

n'était

pierres,

mais

la

les

et

l'Homme-Coq

rocs et les grosses

pensée qu'il avait

fait plaisir

à autrui

donnait la force de marcher.

lui

l'homme qui

arriva au château de

Il

prunté ses cent écus, et toc

pas légère,

parmi

chancelait; parfois,

il

frappa à

lui

avait

la porte,

em-

toc, toc,

I

Le portier mit

la tête

«

— Qui est là?

«

C'est moi,

an guichet

l'Homme-Coq;

:

votre

maître

me

connaît. «

« «

«

— Que veux-tu donc? — Je veux parler au maître de céans. — Que veux-tu? — m'a emprunté cent écus je viens lui

Il

;

les lui

demander; ils me font faute. » Le portier retourna auprès de son maître, puis reparut au guichet

:

i!


122 «

me, Meitat Gealh, vai

Escouta

mestres es de

Marida sa

filha,

se pica leu, sabas, et te podria

Pueissa,

Mon

t'en.

n'ama pas que l'empeiton. anueit; tornaras un autre côp.

festa et

mau

recè-

bre

— Acô

«

fai

cent escuts.

me

resjbadas

;

Ihi parlarai

Le portier tornet ves son mestre «

;

me chau mi

» :

— M'embestia,ton Meitat Gealh? so faguet

aquelh;

si-vôu tan entrar, bada Ihi et bôta lo am'ls polas!

La porta

se

badet, et Meitat Gealh se penset que

l'anavon recêbre

mangear

coma

meneron

sarrèron

Aco

Ihi

lioc

que l'anavon

se deu;

et biure et se pausar,

son chamin; mas en lo

»

faire

per sô ques era las de

de lo faire entrar elh chastel,

tôt dreit ves lo jocador, et craca

!

te hi lo

!...

copet lo geau, de se veire aqui dedins,

mas

chaguet demorar am'ls polas. Totas'queli

bestionas, la testa levada, lo garde-

geavon, un cop d'un caire, un cop de l'autre sis

chambas

et si

morrebecut,

Lo

gealh,

Ihi

bras d'home,

sis alas

;

de veire

de gealh et son

semblava d'estranjamena...

que desgranava una

espigea^

s'era

arrestat.

Lo cuelh et faguet

n'autre?.

:

.

plantât, elh mais, testeget dos o très cops «

Cô, eô, cô, de dire

Tu, gara

te

!

Te veze

!

:

E aora

?

Aqui n'as

... »

Elh chap d'un temps, tornet'spoussar son espigea.


— «

— Écoute-moi, Homme-Coq, va-t-en. Mon maître

donne une marie sa

fête et

fille,

il

n'aime pas qu*on

dérange

le

.

11

aujourd'hui; tu reviendras une autre

D'autant plus qu'il est sujet à des sautes d'hu-

fois.

parle

;

mal.

vois-tu, et qu'il pourrait te recevoir fort

meur, «

123

égal, ouvrez-moi, afin

Gela m'est

me

il

mes cent écus

faut

que

je

lui

»

!

Le portier se rendit encore auprès de son maître: «

11

m'importune, ton

puisqu'il insiste tant, le

avec les poules

La porte

manger voyage

teau,'on le

celui-ci et

;

mets-

doncetl'Homme-Coq pensa qu'on se doit

qu'on

;

et se reposer, car

mais au

fit

pour entrer, ouvre-lui

comme il

et boire ;

1

»

!

s'ouvrit

recevoir

allait le

Homme-Coq

allait le faire

était las de

il

lieu de lé faire pénétrer

mena au poulailler, et,

crac

Sa joie s'évanouit de se voir en

on

!

dans l'y

son

châ-

enferma

lieu,

ce

le

mais

!

il

fallut y rester.

Toutes ces bestioles, la tête levée, tantôt d'un œil, tantôt de l'autre

bes

et

le

considéraient

lui voir

des jam-

leur paraissait d'étrange espèce...

il

Le coq, qui égrenait un Le col dressé, fois la tête, :

de

des bras d'homme, des ailes de coq et un visage

orné d'un bec,

dire

;

lui

épi, s'était arrêté.

aussi,

en faisant

:

il

secoua deux ou trois

« Co, co,

co», d'un air de

«Qu'est-cequecelasignifîe?En voici un autre?...

Toi, prends garde

l

Je

te

surveille

Et, au bout d'un moment,

il

!..

.

»

se remit à secouer son


124

Mas'ls polas, tant mai'ardidas que Meitat Gealhs era

tomberon de sobre a cops de bec, et mais fugissia, mais lo picavon Quant veguet que se podia pas parar, cri-

sen defensa,

Ihi

!

det

:

— Reinart;

«

autramen

sei

mon amie

reinart,

perdu t

!

Lo reinart sautet fora son tota

lis

I

Sors de

mon

ala et se galet de tuar

polas.

Quant plomas.

am

serventa venguet

la

de gran per

son davantau plen

donar mangear, trobet res mas de

Ihi

.

anet conlar vistamen

Aquelh diguet am'ls fedas

!

:

«

Sarra

am me

son mestre. aquella mauvasa bestla

»

Sarrèron Meitat Gealh dins la fedaria Ai las Ihi

chaguet patir enquera mais que

fedas,

coma rôunhavon,

tra et

Testofavon

;

visèron de lo trucar

de

ala,

»

se sarravon

una contra

pueissa empres,

li

banards se

lo

:

li

Aqui,

!

ve'ls polas. Lis l'au-

moutons

se

justavon un

l'autre...

Quant veguet que «

men Lo

Lop, lop,

sei

perdut

lop,

I

podia pas parar, cridet

se

mon amie

!

Sors de

mon

:

ala, autra-

»

ques avia set delh sang d'aquelh bestiau,

sorteguet de sot

de Meitat Gealh e estranglet

l'ala

fedas et moutons.

Quant

lo chastelan

sabeguet lo chaple ques avian


125

qui étaient d'autant plus har-

épi.

Mais

dies

que l'Homme-Coq

les poules,

était

sur lui à coups de bec,

et

sans défense, se jetèrent

plus

fuyait, plus elles le

il

frappaient.

Quand cria «

ne pouvait pas se défendre,

vit qu'il

il

il

:

mon ami

Renard, renard,

autrement

je suis

perdu!

Sors de

!

mon

aile,

»

Le renard sauta hors de son

aile et tua

avec joie

toutes les poules.

Quand grain,

son tablier plein de

la servante vint, avec

pour leur donner à manger,

des plumes

!

elle

ne trouva que

»

Elle s'en alla,

de suite,

tout

le

raconter à son

maître.

On enferma l'Homme-Goq dans il

la bergerie.

Hélas

1

eut à pâtir encore plus que parmi les poules. Les

brebis, tout en ruminant, l'autre et l'étouffaient

;

se serraient l'une contre

puis, les béliers se mirent à le

frapper de leurs cornes

:

les plus

l'enlevaient de l'un à l'autre.

Quand cria «

il

vit qu'il

.

hauts encornés se

.

ne pouvait plus se défendre,

il

:

Loup,

autrement

loup,

je suis

mon ami

perdu

!

!

Sors de

mon

aile,

»

Le loup, qui avait soif du sang de ce bétail, sortit de l'aile de l'Homme-Goq et étrangla brebis et moutons.

Quand

le

châtelain sut quel massacre l'on avait fait 9


— 126 — fat

de son aver, menet tanl grand varalh qu'espaor-

reget Iota sa companha. «

— D'aquelh coquin

per m'empeitar

paor

!..

!...

Un

1

so cridava

;

n'es

aciu seg Tautra

!..

mas vengut .

Mas qu*as

»

Faguet vener quatre vailes fesson lo forn et que

i

et

comandet que chau-

traguesson Meitat Gealh. Lis

quatre vailes anèron querre Meitat Gealh, pechaire,

que sabia pas de que n'en dire, Mas elh, quant veguet que lo cridet vistamen «

— Aiga,

men

sei

L'aiga,

que

!

m'amial Sors de mon

s'era faita petitona per

et neget aquels

Tanava cramar, ala,

autra-

»

ala, n'en sorteguet

et

fîôc

:

aiga,

perdut

et l'enfornèron.

chaber sot son

grandinassa, eschantiguet

ques avian chaufat

lo fiôc

lo forn.

Quant lo diutaire veguet que l'aiga sortia delh forn comencavade montar, aguet paor et tornet li cent

escuts ques avia manlevas, et Meitat Gealh s'en anet.


— de son troupeau, apeuratous

— Ah

«

me Il

!

mena

si

grand tapage

le

!

coquin

!...

I

criait-il;

Un mauvais

il

n'est

en

venu que pour

tour suit l'autre

I...

Mais

»

venir quatre valets et

fit

qu'il

ses invités.

troubler

attends

il

127

commanda que

l'on

chauffât le four et que l'on y jetâtTHomme-Coq»! Les quatre valets allèrent quérir l'Homme-Coq, le pauvret, qui ne savait qu'en dire, et Tenfournèrent.

Mais

quand

lui,

cria en hâte «

— Rivière,

autrement

La

il

vit

que

le

feu allait le brûler,

il

;

m'amie

rivière,

je suis

perdu

I

!

Sors de

mon

aile,

»

rivière, qui s'était faite toute petite afin

de pou-

voir tenir sous son aile, en sortit toute grande, éteignit le feu et noya ceux qui avaient chauffé

Quand et

le

commençait à

s'élever,

il

four.

eut peur et rendit les

cent écus qu'il avait empruntés et alla.

le

débiteur vit que l'eau sortait du four

l'Homme-Coq

s'en


128

-

UN PAUG D'ADJUDA FAI GRAND BEN

Lis coviseiras trobéron pas qu'aquelh contes era fat

per rire

toi contrari,

;

plangian Meitat Gealh par

so ques avia'gut de pena

La Finon podia pas perdonar am aquelh

riche.

Diguet

— Vezés, Roseta, ma borsas

»

cros hi pot pas' star

bôgea de pistolas res am un riche

:

e li

coma dison

es ;

de pel de diable

et la

mas podria aver una

una gerla d'escuts que prestaria riches sabon manlevar, mas non

De que n'en dizés, Roseta? D'escunes que i a? D'escunes quei a? Volonpas mais un que l'auLiard per liard, raubon lo pelhard. Prestas Ihi

tornar... «

«

tre

— — !

d'escuts,

das ladre «

vos tornaran de peiras... et de regaunha-

qu'es

:

riches

es

honorât, qu'es paures

es

!

— Coma ses mau virada, anueit,

sac, totas

li

nosesson pas bofarellas

cunas ques an de nogealhs..

Finon ;

i

!

Dinc un

n'a ben quau-


129

UN PEU D'AIDE FAIT GRAND BIEN

Les femmes ne trouvèrent pas que ce conte fût fait

pour provoquer

THomme-Coq

le rire

;

au contraire,

Finette ne pouvait pas pardonner à ce riche.

La

Elle dit

:

— Voyez-vous, Rosette, ma

«

elles plaignaient

parce qu'il avait subi des épreuves.

bourse

peut demeurer

diable^ et la croix n'y

^

pourrais avoir une bouge de

mais je

est

en peau de

comme Ton

cuveau d'écus que je ne prêterais rien à un riche riches savent emprunter, mais

non

dit;

pistoles et :

un les

rendre... Qu'en

dites- vous. Rosette? «

D'aucuns...

«

D'aucuns

tre

desécus, ries «

? Ils

Liard à liard,

I

:

ils

ne valent pas plus l'un que l'au-

ils

volent

le

pauvre. Prêtez-leup

vous rendront des pierres.,

et des

moque-

qui est riche est honoré, qui est pauvre est ladre

Comme

Finette

de vent

amande

I

vous tournez tout en mal aujourd'hui,

Toutes les noix d'un sac ne sont pas pleines

!

;

..

il

y en a bien quelques-unes qui ont une


— —

«

Ai

Roseta,

I

chau

que gre

:

an sô Aco es mai-

lo

»

!

«

monde

amels paures.

Lo gras non sap de que viu

«

:

conisse aquelh

penson gaire

et

coma dizon

130

— Finon, avés de mauvasas razons, anueit

que dison amais

Lis promeiras se perdonon,

:

sabés

;

lis

aus-

tras se bastonon ? » E'is

fennas de rire, hors la Finon.

Pueis, la Nanela diguet «

:

— Finon, voi bastonarem pas, d'aqueste cop

zo farem,

tornas embolhar vôstres

si

fuses

bolhas un pauc vôstra lenga et coitas voi fazés petar aquels fuses

Lo morre de

«

pus fina

la

la

!

.

.

.

Finon s'esclairet

me

Prestas

pas coma l'home riche suent

»

!

Naneta, so

Naneta,

!

mas EmAnem, ;

;

:

respondeguet, vos ses vostra medj'auna

vos la tornarai

farai

:

tôt

coti-

*.

« E ieu farai pas coma Meitat Gealh vos comandarai pas l'aiga, ni mais lo lop, ni lo rei:

nartl... «

N'en deuguet aver geau de trobar d'ajuda,

quant n'aguet beson. « Aco es com'acô^

:

so que fazem amels autres,

autre nos fan. Et, de cops que fai «

i

a,

grand ben. Et vos, Justina, dizés res

— Vos escoute,

jamais batuda,..

»

Naneta...

«

lis

un pauo d'ajuda ?

Lenga muda saguet


— «

— Hélàs

pauvres. C'est de quoi vit «

le

maigre

Vous savez que Et les

les

ne

et

l'on dit aussi

:

«

la

méchanceté, hui.

«

rire, fors la Finette :

nous ne vous bastonnerons pas, pour

mais nous n'y manquerons pas,

un peu votre langue, résonner vos fuseaux

Le visage de

et

hâtez-vous

la Finette s'éclaira

!

Allons, faites

:

Prêtez-moi votre demi-aune; je ne ferai pas

~ Et moi je ne

ferai

je ne lancerai contre

renard

quand «

vous

»

!

commel'hommeriche; je vous

«

si

Embrouillez

— Nanette, Nanette, répondit-elle, vous êtes la plus

fine!...

«

ont ce

souci des

Les premières se par-

embrouillez, derechef, vos fuseaux

«

ils

:

Le gras ne sait point

«

autres se bastonnent ?

— Finette, ;

:

vous êtes portée à

femmes de

cette fois

dit

en

! »

Puis, la Nanette dit «

guère

sont

comme Ton

— Finette,

donnent,

Rosette, je connais ces gens

!

faut

leur

qu'il

131

!

vous

pas

la rendrai incontinent.

comme THomme-Coq

ni l'eau,

ni le loup,

:

ni le

. .

Il il

dut être plein de joie de trouver de l'aide

en eut besoin.

— C'est ainsi

:

ce que

est rendu. Et, parfois,

nous faisons à autrui nous

un peu d'aide

fait

grand bien.

Et vous, Justine, vous ne dites rien? «

— Je vous écoute,

fut jamais châtiée...

Nanette... «

Langue muette ne


— «

— Acô d'aqui

132

Justina

rai,

brave, atape la medj'auna «

tias

— Oc ben, :

La

oc ben

1

I.

. .

;

raas

si

dizés res de

Sabés quican

?

Aco parla de doas gentas bes-

caia et lo varrai.

»


— «

— Fort bien, Justine; mais

que

prends

jolie chose, je

vous quelque chose «

133

— Oui, certes

tes bêtes

:

«

La

!

la

— si

vous ne contez quel-

demi-aune

!...

Savez-

?

Il

est question de

truie et le verrat ».

deux charman-


134

LA CAIA ET LO VARRAT

Un

viege,

N'amava varrat

;

un varras amava una

mas aquestas

fomarer, cossi

la

Quant

la

podia trobar, ras

calinhava gentamen

se vertelhonava d'aise, sis aurilhas

coquins

uelhs

bon

faire lot

era s'amiona.

Et Ihi zo fazia veire! lo

caia.

coma deu

d'autras, saique,

luzissian,

son

Sa coa

!

bolegavon,

piou

rede

se

sis li-

zava...

Adonca,

am

fem

tinava

dura «

mascle,

lo

son lo

nas de sa caieta

Off, off

dizia en

et

lo

sen-

sa parla-

!...

»

:

— Om, om!...

De

pauc

caia Ihi fazia belh semblant, amais respondia en

alau parladura a

fojava'n

:

— Om, om...

La

amistos,

nas que se rebeqelhava, pueis

li

veire,

lis

Aus, aus

!...

»

aurias envejals, tant s'amavon!

Ai las D'aquelh temps, li bestias se fagueron una grand guerra. Tôt so ques avia de dents o d'onglas, o ques era becut o bannat se botet delh chaple, mas !


135

LA TRUIE ET LE VERRAT

Une

un verrat aimait une

fois,

truie.

en aimait d'autres, certes, ainsi que doit

Il

bon

tout

Et

il

verrat,

mais

le lui faisait

celle-ci était sa

voir!

Quand

près du tas de fumier,

trer,

il

faire

douce amie.

pouvait la rencon-

comme

il

la câlinait

gen-

timent Sa queue se recroquevillait d'aise, ses oreilles !

remuaient, ses yeux luisaient, son poil raide se

Adonc,

le

mâle, amoureux,

fumier avec son groin qui se redressait, l'odeur

du museau de sa mignonne

son langage «

— Om,

La

lui

répondait dans «

— Om, om

De

les voir,

s*aimaient

truie et disait en

:

om!...

truie

lissait.

un peu le puis il humait

fouissait

Off, off!...

faisait le

même

!...

vous

.

beau semblant, ensuite parler

Aux, aux

elle

:

!..

.

»

les eussiez enviés, tellement ils

!

Hélas! en ce temps-là, les bêtes firent une grande

armé de dents ou d'ongles, ou qui avait un bec ou bien des cornes prit part à la lutte, mais non les bêtes à lard... Et cependant que,

guerre. Tout ce qui était


-

136

non U beslias lardadas... Et qu'hora pels bos, pels montanhas, pels planas, la bestiaria s'espelava et qu'auzian de brams de dou, lo varrat et la caia, dins

amor

sa soda, sospiravon per «

«

— Om, om!... — Om, om!... Aus,

:

Off, offl...

ausl... »

Pracô, lo mascle vouguet veire

per que diguesson que

chapiou fazia

et Ihi

i

un pauc

la

guerra

era estât. S'en anet trobar lo

diguet que sa bodena pesava et Ihi

empeicha per

mas ques

se batre,

elh podria faire

quican per esser d'adjuda.

Lo chapiou-lo

lion-lhi

comandet de portar

lo viure

dels valhents que se batian.

Adonca, fagueron assaber amelhs bestias fumellas de campar sô ques avian gardai de bon per

si

mascles

que batalhavon. Lo message de la coa tôrta amasset toi acô,

en

mas hors d'anar

penaria,

bailat

faguet

elh

ves la soda de

brenos se galeron

et

norrir sis fraires ques eron

portar sô

sa caia.

que

Aqui,

se rapalieron

Ih'

avian

amaires

lis

quauques bravi

jorns

Un

una paura galina, ques avia dou de son coma gearratava davant la soda, veguet lo dammage. S'en anet de sautada, de volada, per anar vespre,

gealh,

pus

viste, zo dire elh lion.

Lo

lion

mandet

li

raubaires per Ihi

pausar

razon.

A

tota

demanda,

lo varrat

respondiamas

:

la


— par

les bois,

par

137

montagnes, par

les

les

plaines, la

gent animale s'entre-déchirait et qu'on entendait des de détresse,

cris

verrat et la truie, dans leur loge,

le

soupiraient d'amour «

«

:

— Om, om!... off!... — Om, om!... Aux, aux Off,

!

Pourtant, afin

le

chef et

le

...

mâle voulut voir un peu

que Ton pût dire

trouver

«

qu'il y

lui dit

la guerre,

s'en alla

était allé. Il

que sa bedaine, qui pesait,

l'empêchait de se battre, mais qu'il ferait volontiers

quelque chose pour être de bonne aide.

Le chef

lion

le

lui

commanda

de porter les

vivres des vaillants qui combattaient.

Adonc, on parer

les

assavoir aux bêtes femelles de pré-

fit

bonnes choses qu'elles

avaient gardées

pour leurs mâles qui guerroyaient. Le messager à

queue

torte

recueillit tout cela,

mais au

la

lieu d'aller

nourrir ses frères qui étaient en grand peine,

il

fit

porter dans la loge de sa truie tout ce qui lui avait été confié. Là,

les

amants bréneux

se rassasièrent

joyeusement pendant quelques beaux jours Un après-midi^ une pauvre géline, que l'absence de !

son coq rendait dolente, grattait

vit le

dommage

alors qu'elle

devant la loge.

Elle s'en alla, tantôt sautant,

tantôt volant, pour

aller plus vite, avertir le lion

Le

lion

manda

les voleurs, afin

A toute demande,

le

de les questionner.

verrat ne savait que répondre

:


138 «

Om,

Et la caia «

«

om!...Off,

off!...

»

:

— Om, om Âus, aus!... — Oc ben, diguet, en branlant »

!...

la

testa, lo lion,

perde que zo obledère? Auria deugut me sovener que ses d'un bestiau de mau près. Quau que fachon, coche tornaala caia, et caia elh fomarer... Serés penats d'aquelh biais

:

tu,

varrat,

demoraras

set

ans en-

sodat, et tu, caia, dos ans! »

Totas

li

bestias

queseron elh

plait troberon qu'aco

era un petas ben pausat. Ai

î

si

campavon en soda

doas pautas, cossi

lo

monde

li

varrats e

'Is

caias a

séria desempeitatl...


— «

— Om,

«

oml... Off, off!...

Et la truie (.<

139

»

:

— Om, om — En vérité,

!...

Aux, aux!...

»

dit

en secouant la

lion,

le

pourquoi l'oubliai-je? J'aurais dû

me

tête,

souvenir de

quelle vile origine vous êtes... Quoi que l'on fasse,

porc retourne à

la truie, et truie

serez châtiés de la sorte

enfermé dans

ta loge

pendant deux ans! Toutes

que

la

Ah deux

!

les bêtes

:

toi,

au fumier.

verrat, tu

pendant sept ans,

.

.

Vous

demeureras et toi, truie,

»

qui assistaient au plaid trouvèrent

sentence était bien rendue. si

on mettait en loge

pattes,

combien

le

les verrats et les truies

monde

serait débarrassé!

à


140

LIS

«

— Anem,

COCHES ELH FOMARER

so diguet la Justina, vos zo dizia ben

qu'acô parlava de bestias. « «

— Amais de bravas — De que vos

!

Naneta? De bestias que vos

cliau,

tenon de lard, de saucissas, de geambon, de bodin, et

mau

de que mais sabe? Et ses si

contenta? Veirem ben

parlarés com'acô, quant tuarés vôstre coche, per

Chalendas*... «

Acô d'aqui

rai

!

Mon coche

a quatre pautas et

devine ben qu'aquelh delh conte, amais la caia, n'avia

mas doas. Uns avia de braias et l'autra de raubas... Aco era de monde de tau*mena que sabe .

.

— Se galavon quant autres patissian, Naneta. — Adivoc, Finon; n'em vist longeamen d'aquels «

lis

«

ques aurian deugut

Anavon

jaire

peloiravon

dinsde bons

am

guerra et que se pausavon.

faire la

coflavon, rizian et

leits, se

de cadornas, quant

homes

et nostres drolles,

l'aiga,

dins la bolia, dins

pechaire lis

!

nôstres paures

eron defora, dins

congé iras, elh varalh


141

LES PORCS AU FUMIER

«

Allons, dit la Justine, je vous le disais bien

qu'il était question «

«

— Que vous

de bêtes.

Et combien nobles faut-il

vous fournissent du

du boudin, tente?

et

que

!

donc, Nanette?Des bêtes qui

lard, des saucisses,

sais-je

du jambon,

encore? Et vous êtes mécon-

Nous verrons bien

si

vous tiendrez

le

même

langage, quand vous tuerez votre porc, à la Noël... «

— Passe

pour cela! Mon porc, à moi, a quatre que celui du conte, ainsi

pattes, et je devine bien

que

la

truie,

n'en avaient que

deux. L'un portait

culotte et l'autre robe... Ils étaient d'une engeance

qui m'est connue... «

Ils

se gâtaient, alors

que

les

autres pâtissaient,

Nanette. «

— Mon Dieu, oui, Finette. Nous en avons vu long-

temps, de ceux qui auraient dû faire la guerre et qui se reposaient. Ils se couchaient

dans de bons

lits,

faisaient ripaille, riaient et se divertissaient, cepen-

dant que nos maris en plein

air,

dans

et

nos

l'eau,

fils,

dans

les

malheureux étaient

la

boue, dans la neige,

1

10


142

delh chaple, de qu'ont' cô

dava «

— bombava

*

bombar-

et

!

— N'en trobon,

mais, d'aquels que se son fortu-

nats. (c

«

— En raubant — Et lèvon

paure monde, Finon.

lo

la testa,

achaton de chastels

!

Mieta

!

Et se fazon veire

!

Et

Et son deputats, menistres, tôt

sô que vôlon! «

—E

aco es nos autras fennas, Finon, zo sabés,

avem

ques

per ajuda, que noi

efants

per

guerra, diable «

nostres

faire

sem crebadas,

tota la

viure aquela cochetalha

delh

!

— De

talha... «

am

laborat, semenat, medut,

que vos plangés, Mieta? An aumentat

An botat

la

l'hora novella.

— Mas'quels que nos an guerregeats,

lis

faran ges

paiar? «

es

— Mieta, ont es aquelh que nos fara paiar? Quaus

mestre? Dengun, ma'n tropel

d'estafiers

que son

de reinarts per ganhar pers els et d'ases per governar per nos autres et

;

que son d'agnels

de lops per lo poble

que

et

Mas que vai

se foton

t'en veire

si

mon

semblon,

que n'an pas bergonja de res

de nos

galon,

se

;

am quau

autres,

qu'ajon

paures païsansi

d'honors,

d'argent,

ase peta!... Et paia,

païsan

paia! «

— Mas,

digeas, Finon, aquels que se son mala-


— dans

tumulte du combat, parmi

le

bombardements

les

143

!

— On en trouve, aussi, de

«

explosions et

les

ceux-là, qui sont de-

venus riches.

— En volant les pauvres gens, Finette. — Et portent la tête haute, Miette Et

«

«

ils

ils

!

tent en évidence

!

Et

ils

met-

se

achètent des châteaux

!

Et

ils

deviennent députés, ministres, tout ce qu'ils veulent. «

Et c'est nous autres femmes. Finette, vous

vez, qui

avons labouré, semé, moissonné, ayant

aides nos enfants, qui nous toute la guerre, pour faire «

— —

les impôts.

une bande s'agit

.

.

On

damnés porcs!

a mis Vheiire nouvelle. fait la

guerre, ne les

payer?

Miette, où est celui qui

dommager? Qui donc

la

vivre ces

Mais ceux qui nous ont

fera-t-on pas

a—

sommes épuisées, pendant

De quoi vous plaignez-vous. Miette? On a

augmenté ((

le sa-

comme

est

les forcera

à nous dé-

maître ? Personne,

si

ce n'est

d'estafiers (1) qui sont des renards, lorsqu'il

de leurs intérêts, et des ânes, lorsqu'il s'agit de

chose publique

;

qui sont des agneaux envers leurs

pour le peuple, qui n'ont aucune moquent de nous, pauvres paysans

pareils et des loups

vergogne

Pourvu

et se

I

qu'ils jouissent, qu'ils aient des

honneurs, de

l'argent, qu'importe le reste! Et paye, paysan, «

Mais, dites-moi.

Finette,

paye!

ceux qui se sont

(1) Honneur au patriote Poincaré et à ses collaborateurs, à qui revient la lourde tâche de réparer les défaillances criminelles des « eslafiers « que toul 1& monde connaît.


— men

fortunats,

li

144

riches novels,

coma

dixon, Ihi faran

res tornar ?

— De que

«

la

Catonet?Si

Ihi faran,

'Is

coa de la padella, cossi farias per

sar

lis

faire fricas-

?

— Lis tornaria botar dins la padella et

«

ria

peissons tenian

vistamen dins Tontura

Aquela paraulassa faguet tant

que

Roseta

la

podia

en

n'

ravira-

li

»

!

fennas,

rire totas'ls

pas catar

bre-

sa

cha... «

can

Loison, voi dirai qui-

Catonet, so faguet la

aco es pas de peissons que

:

aco

de

es

corron

coches,

que

aciu et

pautas mais,

môzon de

cossègon...

'Is

an

de pautas,

quans an

vazon escondre,

se

et

dins lo conte,

a,

1

coches

Is

e'

quant vezon que

i

un'

fat

doas

coches de

Lis

a pas grat,

per' Is empeitas, et, elh jorn d'anueit,

se

non

son penats. «

fat,

Per trobar'

aco par «

qui

es'

Is

sabrem ont son coches,

que

i

a

'Is

et

mas de

fogenon

et

autres

paiaran

:

quant

!

saber lo fomarer

que

se

:

fazon ata-

!... »

Finon,

plait,

lo

coma

Aqueli d'aqui son

n'auran pro

sera lo

quant'

d'avant lion,

mas

que

Is

aurem près

'Is

et

que faran

cramar, non sabe quau

creze que podres faire lo razona-

dor... «

— Aco

es vos, Marion,

que

dizés'

co? Voi des-


— malement dit, «

enrichis, les

145

nouveaux

ne leur fera-t-on rien rendre?

— Que leur

ferait-on, Gatherinette? Si les pois-

comment

sons tenaient la queue de la poêle,

vous pour «

comme on

riches,

feriez-

les faire frire ?

— Je les remettrais

rais et retournerais

Cette boutade

fit

dans

la poêle, et les tourne-

vilement dans l'huile tellement rire les

!

»

femmes que

la

Rosette n'en pouvait plus couvrir sa brèche...

«

Gatherinette,

qu'il

y a dans

ils

ont

:

Louison, je vous ferai

ce ne sont pas des poissons

mais des porcs,

le conte,

ont des pattes,

la

fît

observer quelque chose

et les porcs

courent et vont se cacher, quand

ils

commis quelque méfait

et

qu'on les poursuit...

Les porcs à deux pattes agissent de

même, quand

voient qu'ils sont exposés à la vindicte publique se mettent à l'écart, et,

;

au temps où nous vivons,

ils ils ils

ne subissent aucune peine. «

ils

Il

en est de ceux-là

auront accumulé

trouver, et

ils

fumier «

:

les méfaits,

payeront

Pour trouver

comme

des autres

:

quand

nous saurons où

les

!

les porcs,

il

suffît

de savoir où est

le

c'est là qu'ils fouissent et se font prendre...

— Finette, quand nous

les

aurons pris,

et

qu'on

fera leur procès, avant de les brûler, je ne sais pas

qui tiendra

le rôle

pourrez tenir celui «

— C'est donc

du lion, mais je du procureur...

crois

que vous

vous, Marion, qui dites cela? Vous


146

velhas? Adonca, contas sô que sabés

brave «

:

et

qu'acô saje

ses la darreira.

Sabe

lo

conte delh Faure... e acô parla delh

diable... «

— Bougressa de Marion,

que me

noi volés faire sonhar, aquesta

farias dire

!

Mas

nueit? Creze que o

fazés d'eime... «

~

Si

vezés Banneta, nos zo conlarés

deman

n'en rirem. <'

— Anem,

escoutas sô que faguet Lo Faure

:

:


147

vous éveillez? Alors, contez-nous ce que vous savez

que ce

«t

— Je

«

du

tion

soit

beau

:

vous êtes

du

sais le conte

la dernière.

Forgeron... et

il

est ques-

diable...

— Maudite

Marion Vous voulez donc que nous ayons des cauchemars, cette nuit? Je crois que vous «

1

le faites exprès... «

Si

vous voyez

raconterez demain «

;

le diable

cornu, vous nous

nous en rirons.

— Allons, écoutez ce que

fit

Le Forgeron

:

le


148

LO FAURE

1

avia,

Se

un cop, un faure ques avia

le vava

set efants.

a la pica delh jorn et tustava tant que

podia sobre l'encuje per ganhar de que

li

norrir. Nfas

que tustarasl S'atapava de bônas

tusta

suzadas,

ganhava gaire de sôus. Acô Ihi fazia tant dôu de veire sis efantons cridar et plorar de fam, que se vouguet pengear. S'en anet dinc una garnassa. Coma se pengeava, arribet un petit home bestit de nègre que Ihi diguet «

«

:

— Que fazes, aqui — Sel trop pelhard ?

per norrir mis efants

:

me

vau pengear. a

— Fâches pas' cô, fotraud

auras sô que « «

te

chau. Paras

!

Te bailarai d'argent

mas

— Et de que me chau faire? — Pas grand cas faras pacha* am

vint ans de tôt sô

:

que

:

sô que te dirai.

t'aurai donat;

ieu. Jauziras

mas, pueissa,

mione et te vendrai querre ». Lo pelhard de faure sabia pas coma

seras

faire

:

avia


149

LE FORGERON

une

Il était, Il

fois,

un forgeron qui avait sept enfants. du jour et frappait sur Ten-

se levait à la pointe

clume

tant qu'il pouvait, afin de

Mais

nourrir.

il

gagner de quoi

les

avait beau frapper et prendre de la

peine, son gain était bien faible.

Sa douleur

était si vive

de voir ses enfants crier et

pleurer de faim qu'il résolut de se pendre.

dans un bois.

s'en alla

Il

survint un petit «

— Que fais-tu là?

«

— Je

suis trop misérable

mes enfants «

Ne

:

je vais

fait

Gomme

homme, vêtu de

pas

me

cela,

il

se pendait,

noir, qui lui dit

:

pour pouvoir nourrir

pendre

!

nigaud

!

Je te baillerai de

l'argent; tu auras ce qu'il te faut, et tu feras seule-

ment « «

ce

que je

te dirai.

— Et que me faut-il donc — Oh! peu de chose Tu I

faire ?

feras pacte avec moi.

Pendant vingt ans, tu jouiras de tout ce que je t'aurai donné; mais, ensuite, tu seras mien et je viendrai te quérir

».

Le malheureux forgeron ne savait à quoi se résou-


150 conissut qu'aco era

Amais, per

Banneta «

la fin,

diable et se volia pas donar.

le

faguet pacha.

Ihi diguet

:

Vai t'en ches lu et bota un sac preste

garnirai de lois d'aur

:

te

lo

».

Lo faure tornet ves son hostau. Faguet un trauc estachet una grôssa bôgea que pengeava en bas, dins la chambra. Per afinar lo

dins son soler* e hi

diable, descorduret lo qiulh de la bôgea.

Lo

diable saguel leu aqui.

I

ses,

faure?

— Oc ben. — Anem, a tapa

!

»

Et lo diable, d'en aut, se botet a traire ladas, dins la bôgea. Mas'

ronlavon per

la

Is

chambra

'Is

pessas a pa-

pessas hi demoravon pas et

Banneta n'en

:

trazia

mais. Elh chap d'un temps, s'arrestava « «

— a pas pro — Bôta n'en mais! N'i

:

?

>)

cridava lo faure.

Ë'is

pessas tindavon, tornar, dins

Mas

n'i

«

avia tant que la

Bougre!

t'en

chau ben tant! faguet Banneta.

Âqueste côp, m'arreste «

garda «

Oc ben

'Is

si

:

voles,

t'en baile

pus!

diguet lo faure

:

n'ai

pro;

autras*..

— Oblèdes pas sô

lo diable.

lo sac.

chambras era plena!

ques avem convengut

»,

faguet


loi dre

avait reconnu que c'était

il

:

diable et

le

voulait pas se donner. Cependant, à la

fin, il

il

ne

conclut

le pacte,

Satan

«

lui dit

:

Va-t'en chez

garnirai de louis d'or

et

loi

prépare un sac

Il fit

il

une ouverture

solier et y attacha

bouge qui pendait, en bas, dans afîner le diable,

je te le ^

Le forgeron regagna sa maison.

au plancher de son

:

».

décousit

le

une grosse

chambre. Pour

la

fond de la bouge.

Le diable ne tarda pas à venir.

— Es-tu forgeron — Assurément. — Allons, attrape

«

là,

« «

».

!

Et

?

diable, d'en hauf, se mit à jeter les pièces à

le

pelletées,

dans

raient point

:

la

bouge. Mais

elles roulaient

demeu-

les pièces n'y

par

la

chambre

et

Satan

remplaçait par d'autres.

les

Au bout d'un moment, « «

il

assez «

y en avait tant,

m'arrête

— :

»

le

forgeron.

pièces tintaient, de nouveau, dans

Morbleu!

fois, je

:

?

!

Mais

«

s'arrêtait

a-t-il

Et les

«

il

— N'y en pas assez — Mets-en encore criait

Comme je

te.

fais

Il :

que

la

chambre

t'en faut bien tant!

tu n'en auras plus

fit

le sac.

était pleine!

Satan. Cette

!

tu voudras, dit le forgeron;

— N'oublie pas ce que nous avons convenu

diable.

j'en ai

cadeau des autres... », fit le


— Racanet un bon cop

152

et s'en anet.

Quant aguet aquelh pogeaud de pessas,

lo faure

faguet bastir una granda fargea et prenguet dech obriers per Ih'ajudar. S'avias vist cossi lo foger borlava, cossi lo bofador bofava,

von, cossi

li

aqui

rava

dedins!

que

drolletas

li

aqui.

E

hi

de hi anar

plazer

era

cossi

martels peta-

li

beligeas sautavon, cossi tôt acô se desvi-

chantavon tant, farrar

faire

li

qu'aco

bestias

galavon d'anar covisar

se

et

per

.

Pracô,

monde

lo

se

pelhardas de faures avia fargea..

.

demandavon com' fat

aquelh

per aver una tant brava

Mas elh laissava pensar

et se

galava com'un

rei.

Semâna per semâna, mes per mes, coma laribeira,

li

plôu blanc

lo fat

bôna

chap.

l'aiga

de

vint ans passèron. Desèra, lo faures avia et

la pel

cofida, et,

mais qu'aguesse

vida, quican Ihi pesava, quant se veguet elh

Se dizia

que

i

auria

pas grat...

et

cossi-

rava.

Lojorn d'avant que lo diable venguesse, lo bon Dieu que fazian una virada pelh monde per

et sent Peire,

coma

veire

lo diable

ganhava, passèron pelh pais,

chascun sobre un ase tant gente que totes Fespiavon. Entrèron dins la fargea et sent Peire demandet «

:

Mestre,

vos plai?

me

farrarias

pa

'n

pauc

mon

ase, si


153

Il fit

entendre un ricanement significatif et disparut.

Une

fois en possession de ce

forgeron

Ah

vice dix ouvriers. était ardent,

comme

comme

si

1

comme

vous aviez vu

le

comme

tout

le

monde

le feu

avec force,

soufflet l'activait

le

marteaux frappaient, comme

les

sautaient,

monceau de pièces,

bâtir une grande forge et prit à son ser-

fit

les bluettes

était actif en ce lieul

Et on y chantait tant, que c'était plaisir d'y aller faire

que

ferrer les bêtes et

les jeunes dentellières

à se grouper dans ces parages.

aimaient

..

Cependant, les gens se demandaientcomment geron, pauvre

comme

belle forge...

si

suppositions

et

il

Quant il

était, avait fait

ii

lui,

il

la rivière, les

était

chenu

avait autant de bien-être qu'un roi.

fixé.

années s'écoulèrent. Déjà,

Il

veille

lui pesait,

que l'eau

le

forgeron

mené une

quand

il

vie

se vit

lui

donnait à penser.

du jour où

le

diable devait venir,

le

bon

Dieu et saint Pierre, qui faisaient une ronde par

monde,

au

se disait qu'il faudrait rendre des

comptes... et cela

La

ainsi

et ridé, et, bien qu'il eût

agréable, quelque chose

terme

pour avoir une

peu de cas des

faisait

Semaine à semaine, mois à mois, de

le for-

afin de voir

comment

le

le

diable s'y comportait,

passèrent en ce pays, montés, l'un et l'autre, sur un âne si

beau que tout

Ils

le

monde en

était

dans l'admiration.

entrèrent dans la forge et saint Pierre

demanda

:

« — Maître, ne ferreriez-vous pas un peu mon âne, s'il

vous plaît?


154

((

— Chaii

pas parlar com'aco, respondeguèron

lis

obriers.

Chau

dire

:

MesLre de sobre totes

«

farrarias pa'n paiic

S'en van ves

de

la

lo

fargea,

mon

ase,

vos plai?

si

dins

'si

me

mestres, ».

faure. Era seLai dinc

morre

lo

11

mans,

un tôt

caire soci-

dos.

Sent Peire «

Ihi

diguet

:

Mestre de sobre tôles

mon

pa'n pauc

ase,

si

que

Vai t'en ves

te lo

mestres,

vos plai?

Et lo faure respondeguet «

li

lis

me

farrarias

»

:

obriers, et fai te lo farrar, et

gramponon delh

biais

î

»

Lis obriers zo faguèron.

D'aquelh temps, sent Peire et lo bon Dieu se setèron '

ves lo faure. «

— Digea,

faure, faguet lo

qu'as d'esmai.. «

— Ai

tôt lo

donat

!

n'en pode ben'ver

monde

am

bon Dieu, me sembla

,

o vai saber

elh diable, et

me

!

:

... i

pode

dire,

aora que

a vint ans que

me

sei

vendra querre deman

lo

matin...

« sabe. Mas' scouta. Vendran trei diables lo promer qu'entrara ches tu, lo faras setar dins ta chadeira et se podra pus levar non que Ihi zo comandes; et, quant se levara, que tis homes ajon de boni barras!... L'autre, Ihi faras' massar una perade ton hort, et sera estachat amelh perer sei que lo destaches. Lo :


— «

ne

Il

ouvriers.

pas parler

faut

Il

faut dire

:

vont vers

un coin de

répondirent

ainsi,

les

Maître des Maîtres, ne ferreriez-

mon

vous pas un peu Ils s'en

-

155

âne,

le

la forge,

vous plaît?

s'il

».

forgeron, qui était assis dans figure

la

dans

les

mains, tout

soucieux. Saint Pierre lui dit «

peu

:

— Maître

des Maîtres, ne ferreriez-vous pas un

mon

s'il

âne,

Vous plaît?

Et le forgeron répondit

«

Va-t'en

».

:

vers les ouvriers,

afin

ferrent et lui mettent de bons clous!

Les ouvriers sirent auprès

«

— Ah!

j'ai

fit

me

le

dans

bon Dieu,

le

:

le

.

tes

Quant à

il

Il

me

le dire, il

:

et

il

y a

me

toi, fais-le

asseoir

ne pourra plus se lever, à moins ;

l'autre, tu lui feras cueillir il

il

viendra trois

le lui commandes et, quand il hommes soient munis de bonnes

jardin, et

s'as-

.

premier qui entrera chez

ta chaise, et

savoir

donné au diable

Je le sais. Mais écoute-moi.

que tu ne

que

le

monde va

suis

viendra quérir demain matin

diables

bon Dieu

bien sujet d'en avoir! Je puis

vingt ans que je

demandé.

et le

l'émoi...

maintenant que tout

«

le

du forgeron.

Dis-moi, forgeron,

semble que tu as de «

te

».

firent ce qui leur était

Pendant ce temps, saint Pierre

qu'ils

se lèvera, barres!...

une poire de ton

sera attaché au poirier jusqu'à ce que tu


156 darrer,

saqet

faras virar en rai, et lo botaras dinc

lo

un

».

L'endeman, de bon malin, Banneta arribet. D'un la lunda de la pôrla e enlret

cop de ped, tombel «

— Ânem, —

«

:

faure, le vene querrel

Espeila'n pauc

me

veire clar;

levé

ses lant preissal!

:

Laissa

mas. Vézes ben que non

me

sei des-

velhal! « «

— Coita te dize! — Fotraud! Mas me te,

fenna... M'en

Lo diable

chau dire adiussiasam

chau pas parler com'acoî Sela

se selet, es elh

sacin d'après, tornet davalar «

Tè, le segue. Veni

Mas

faguèron

tant

am

petar,

»

:

».

laissèron espingar a son aise,

fargeaires arribèron

qui!

monlet ves sa fenna. Un

demoret pegeal dins

lo diable

le'

ma

et, toi

la chadeira.

Lo

per un cop,

lis

de barras de ferre. N'

que

n'avia'

Is

i

en

costas dobla-

das.

— Gracia! Gracia!

a

so cridava. Laissas m'eslar!

Laissas m'estar! Laissa m'en anar, faure, laissa m'en

anar

— pas pro E' Is

Tornas !

hi,

vos autres! cridet lo faure

:

n'i

a

»

fargeaires

lo

tornèron escodre a cops de

barras de ferre. «

— Aia!

laissa

cridava lo diable. Si te plai, faure^

âia!

m'en anar Tornarai pus !

!


157

Pour ce qui

l'en détaches.

changer en

rat, et le

du dernier,

est

tu le feras

mettras dans un sachet

».

Le lendemain, de bon matin, Satan arriva. D'un coup de pied, « «

il fit

tomber

le

linteau de la porte et entra

— Allons, forgeron, je viens quérir. — Attends un peu que tu es donc

:

te

:

Laisse-moi voir clair!

A

peine suis-je levé

pressé

l

tu vois

:

bien que je ne suis pas éveillé. « «

— Hâte-toi, te dis-je! — Hé, nigaud! H me faut dire adieu à ma femme...

Je ne peux m'en séparer ainsi

Le diable

peu après, «

Mais

Eh le

il

s'assit;

lui,

:

assieds-toi là! ».

monta auprès de

en descendit

bien, je te suis. Viens!

diable

demeura

sa

femme;

:

fixé

».

dans sa chaise. On

le

laissa se débattre à son aise, et, tout à coup, les for-

gerons arrivèrent, armés de barres de pèrent de tant de coups

qu'il

fer.

Hs

le

frap-

en avait les côtes

enfoncées.

« Grâce! Grâce! criait-il. Laissez-moi! Laissezmoi! Laisse-moi m'en aller, forgeron, laisse-moi m'en

aller «

!

— Redoublez

geron

;

de coups, vous autres! cria

ce n'est pas encore assez

!

le for-

».

Et les forgerons recommencèrent à

le

battre

de

leurs barres de fer. «

— Aïe

!

aïe

!

criait le diable. S'il te plaît, forgeron,,

laisse-m'en aller! Je ne reviendrai plus!


-

— Te

«

laissarai sauvar per aqueste cop,

sinnaras que tornaras pus

«

Pôde pas sinnar'

m'en anarai per

tôt solet.

querre

te

158

»

mas me

».

cô,

non

mas

mestre;

sei lo

N'en vendra'n autre, se vôu,

.

Laissèron levar lo diable de la chadeira. Mas era tan esquintât de cops de barras, que sabiapas quana

chamba

botar davant l'autra

demoret

:

tornar en enfern. Quant hi saguet, diguet diables

ans per lis

autres

:

— Anas

«

set

am

aquelh

querre

faure,

volés

si

:

ieu

m'en charge pas! Jamais faure entrara dins Tenfern

!

»

aquels d'aqui Ihi

D'auzir* co,

mais

la pel

trauqèron un pauc

a cops de forchas et lo ravirèron dins

lo

fiôc.

D'aquelh temps,

lo faures

aguet patiensa.

un autre diable pus mestre que

Parteguet

lo

promer.

Quant saguet ves l'hostau delh faure, d'un cop de ped tombet un caire de «

— Sabes, faure,

delh biais

am

co «

mon

ieu...

i

porta e entret.

vazes segre

!

a set ans, mas

Parangiguères

me

crides? T'espeitave

mas

tu.

Si

de mau, aco es que m'agradava pas

mas tu. Anem, parles pas

te volia «

faras pas'

setarai pas dins ta chadeira...»

— Pracô, de que

l'autres aguel

me

fraire,

Me

la

tant

:

sei preissat.

:


159

'

— Je

«

me

tu

sauver pour cette

te laisserai

— Je ne peux pas signer cela

«

maître. Mais je quérir,

On

s'il

m'en

veut

:

».

laissa le diable

savait quelle

de sa chaise.

se lever

jambe mettre

la

première.

aux autres diables

Il

Quand

Mais

qu'il

il

ne

resta

y

fut,

.

— Allez donc quérir ce forgeron,

«

je

viendra te

autre

sept ans pour s'en retourner en enfer. dit

mais

je ne suis pas le

Un

irai seul.

coups de barres l'avaient tellement brisé,

les

il

fois-ci,

signeras que tu ne reviendras plus.

si

vous voulez

:

ne m'en charge pas! Pour moi, jamais forgeron

n'entrera en enfer!

Voyant peu plus

»

cela, les autres diables lui la

peau, de leurs fourches,

trouèrent

un

et, le précipi-

tant dans le feu, le remuèrent vigoureusement.

Pendant ce temps, Mais

il

partit

le

forgeron eut quelque répit.

un autre diable ayant plus de pou-

voir que le premier.

Arrivé devant la maison du forgeron, d'un coup de

pied «

il

effondra un coin de la porte et entra

— Tu

bel état

sais, forgeron, tu

mon

frère,

il

vas

me

suivre

!

;

Tu mis en

y a sept ans Mais tu ne !

me feras

point cela à moi. Je ne m'asseoirai pas dans ta chaise. «

que

— Mais enfin, pourquoi toi. Si l'autre

sait pas... Je «

cries-tu? Je n'attendais

eut à souffrir, c'est qu'il ne

ne voulais que

toi

me plai-

!

— Allons, pas tant de discours

!

Je suis pressé

!


— — Bougre

«

mas me pôde pas n'anar com' aco. ma chamisa un bocinon de temps, per querre. Ânueit es dimenche; me chau bolar !

Ai obledat l'anar

160

:

prôpi...

— Aco es bon

«

N'auras pas mester de chamisa,

!

dins l'enfern, ni de res mais! «

— Anem,

charreiras

tè,

i

;

sei.

i

Mas podem pas passar pels

a trop de monde, nos podrian veire.

Sabes pas? passa dins

mon

pera; d'un saut vau querre

ma

hort et

mangea una

chamisa

».

Lo diable passa dins l'hort, tocha una brancha per copar una grossa pera jaune, et... aqui l'as estachat Lis fargeaires espeitavon mas'cô.

de barras de

ferre, et n'i

ron, paure monde,

n'en crocenava «

— Coquin

m'en anar

!

Me

n'i

am

Venguèron

en conhèron,

n'i

en conhè-

en conhèron tant que

lo

perer

!

de faure! Laissa m'en anar! Laissa tuazes pas,

te dize,

me

tuazes pas

!

De

la vida tornarai et jamais faure entrara dins l'enfern «

«

— M'o sinnaras — T'o pode pas

;

Vendra

sinnar

ieu

:

si

podes

(c

— !

homes

Vai

sei

pas

pas lo

Ihi

t

!

mestre. :

lo

».

faguèron petar quauques autres

bônes cops de barras, pueissa, pro

te creze

Mestre de tota la diablaria, Lucifer

lo

faras sinnar, Li dech

autramen,

t'en, aora,

lo faure Ihi diguet

:

mangea pera mancat! N'as

Et tôrijes pas d'anueit

I

»


— Tout ce que tu voudras

<(

temps pour l'aller che

il

;

me

dans

voir.

Tu ne

chemise...

un brin de

;

il

j'y suis!

Mais nous ne pouvons pas-

y a trop de monde, on pourrait nous

Le diable passe dans pour couper une

mon jardin et mange ma chemise ».

le

jardin, touche

poire jaune, et

..

Les forgerons n'attendaient que

armés de barres de il

poirier, «

fer, et

il

une branche

le voici

cela.

attaché

!

vinrent,

Ils

reçut des coups, bonnes

reçut des coups et des coups tellement que

le

lui-même, en craquait.

— Coquin de forgeron

m'en

diman-

c'est

saut, je vais quérir

une poire; d'un

gens,

de

rien

toilette...

pas? Entre dans

sais

Un

chose!

l'enfer... ni d'autre

les rues;

Mais je ne puis m'en

Tu n'auras pas mestier de chemise,

!

— Allons, voici

ser par

!

Aujourd'hui,

quérir.

faut faire

— C'est bon

«

ma

J'ai oublié

ainsi.

aller

«

-

161

Ne me tue

aller!

!

Laisse-m'en aller

!

Laisse-

me

pas, je t'en supplie, ne

tue

De la vie, je ne reviendrai, et, s'il ne tient qu'à moi, jamais forgeron n'entrera en enfer!

pas

«

«

!

—Tu me le signeras; autrement, je ne te crois pas!

— Je

ne peux pas

maître. Mais

Lucifer

:

il

viendra

hommes le

— Va-

t'en,

en as assez

!

le

Maître de toute la diablerie,

peux

!

»

gratifièrent de quelques derniers

coups de barres, puis «

le

tu le feras signer, si tu

Les dix

ne suis pas

te le signer; je

le

forgeron ajouta

:

à présent, mange-poire mainqué

Et ne reviens pas d'aujourd'hui

!

»

!

Tu


— Lo paure bougras

162

una

s'en aaet, lot escambarlat,

espanla qae pengeava, et plen de sang,

N'i

avian tant

aconhat, que demoret cinq ans per s'en tornar. Quant arribet en enfern, diguet

«

:

coma

Sabés, vos autres, farés

mas

voudrés,

per ieu, jamais faure entrara dinsTenfern

-

»

!

Diablas, diables, diabletons, toti hi sautèron

de

sobre et lo rostèron delh biais.

d'aquelh

Et,

Mas

faure se pausava et se

temps, lo

gala va 'n pauc mais

.

.

.

parteguet, perl'anar querre, lo mestre de Ten-

fern et de tota la diablaria, Lucifer.

Quant saguet ves l'hostau delh faure, d'un cop de ped n'en desrochet un caire e entret. «

— N'as

mas «

de duras

fat veire

am

lis

ieu te farai sègre, qu'as paor

Tè, que ses bestial

mas Ieu? Anem, tè,

t'espeitave;

pas pus

te

volia

autres, so diguet

faguet lo

tu! te

;

I

faure.

Per de que sègue

Ieu

venias

marcha a

;

forai »

Acô se trobava tas diguet «

lo

jorn delhs Rogazons. Lo diabla-

:

Anueit, pôde

pas passar pels charreiras

eschampon d'aiga benezida «

— Passa pels

quels que fan de « «

:

aco

me

tua

charreiras, fotraud

mau que

— Non pôde — Pracô, vira

s'escondon

!

te

en chin.

;

!

Aco es mas'

!

!


163

Le malheureux diable

écartant les jam-

s'en alla,

une épaule plus basse que l'autre^ et plein de Il avait reçu une si ample distribution de coups,

bes,

sang.

ans pour s'en retourner. Quand

qu'il resta cinq

arriva en enfer,

il

dit

il

:

autres, vous ferez comme bon vous semblera; mais, quant à moi, jamais for«

Vous

savez, vous

geron n'entrera dans

A

l'enfer

!

»

ces mots, diables, grands et petits, tous lui sau-

tèrent dessus et lui infligèrent une sévère correction...

pendant ce temps,

Et,

le

forgeron se reposait et

continuait à prendre de l'agrément.

Mais

il

partit,

Quand

il

arriva devant la maison

coup de pied

il

«

il

je te ferai suivre,

moi

;

tu pas plus

tôt? Allons,

C'était le jour «

fit

toi

— Passe donc par

« «

le

forgeron. Je t'atten-

pourquoi ne venaiste suis: sortons! »

me tue

se cachent!

en chien.

;

I

nigaud

I

toi

:

puis passer dans les rues

les rues,

mal qui

— Je ne puis — Alors, change-

!

:

vite, je

on répand de l'eau bénite, cela «

:

le

des Rogations. Le diable dit

— Aujourd'hui, je ne

ceux qui font

et entra

moi, sois sans crainte

ne voulais que

je

du forgeron, d'un

à rude épreuve, dit-

les autres

— Tiens, que tu es bête!

dais,

Maître de Ten-

en démolit tout un coin

Tu as soumis

mais

;

.

l'aller quérir, le

de toute la diablerie, Lucifer.

fer et

«

pour

!

11

n'y a

que


164 «

— Non pôde

Tota

!

la chinaria

ataparia trop de cops de dents «

— Vira

sarai.

en

te

Dengun

*

me

corria de sobre

:

!

Te botarai dinc un saqet et te pasveira, dins ma pocha. Quant saras

rat. te

defora, et que cridaras

«

Qi

delh saqet e 'ns en anarem

».

Lo faures avia

son

:

Qi

!

Qi

î

saqet lot preste

:

diable, que s'era fat menut, et l'estachet

sortrai

te

»

!

bolet lo

i

pueissa,

;

tornet virar et lo portet ves sa fargea. Lo botet sobre

am

rencuje. Lis fargeaires,

l'autre

Qi

»

I

de barras de ferre,

l'es-

mena, aquelh mais un lo levava, tombaVa! Es elh fazia pro «Qi! Qi

codeguèron de lo

la

:

!

:

Mas

lo

laissavon

faire

tustavon un pauc

et

mais.

Entre dos cops, cridava «

— Laissa me!

promete « « «

:

:

Laissa me,

coquin de faure! T'o

jamais faure entrara dins l'enfern !

!

rada

et tornas'scodre !»

Li barras

.de ferre Ihi

fagueron

sautava coma'n espigeaî

Lis

lis

quatre de sobre

fargeaires n'avian

geammarôt! « De que n'en «

«

«

!

— Sinna me que me laissaras'star — Non pôde — Nonpôdes? Anem, vos autres droites, viras Tai-

— diezs, diablatas? N'i a pro — Coquin de faure, laissa me? — Sinnaras? — Sinnarai tôt sô que voudras !

»

?

:

lo


_- 165

«

Je ne puis

1

Toute

me

la chiennerie

j'attraperais trop de coups de dents «

- Change-toi en

et je te passerai.

Quand

rat.

Je

!

mettrai dans un sachet

te

Personne ne

:

Qi

diable, qui s'était fait le

menu,

et le

ferma

porta à la forge.

il

:

consciencieusement, lui aussi

l'autre

Qi

!

Qi

Lui,

l'aplatissait! !

»

Mais

ils le

faisait

Qi

:

»

!

irons

».

y mit

le

puis

;

!

il

revint

plaça sur

Il le

clume. Les forgerons, avec leurs barres de tirent

Qi

I

nous en

sachet et nous

Le forgeron avait son sachet tout prêt sur ses pas et

ma poche.

dans

te verra,

tu seras au dehors, tu crieras

Je te sortirai da

courrait sus et

l'.en-

fer, le bat-

un

le

sans cesse:

levait, «

Qi

!

laissaient faire et n'en frappaient

que davantage. Entre deux coups, «

— Laisse-moi

te le «

«

«

promets

:

!

criait

il

:

Laisse-moi, coquin de forgeron! Je

jamais forgeron n'entrera dans l'enfer!

— Signe-moi que — Je ne puis

tu

me

laisseras en paix

!

!

— Tu ne

virez l'airée

peux pas ? Allons, vous autres garçons, » et recommencez à battre !

Les barres de fer firent sur lui sautait

comme un

poignets endoloris

épi

;

les

« les

quatre

»

!

«

— Qu'en dis-tu, vilain diable? En as-tu assez?

«

-— Coquin de forgeron, laisse-moi

« u

:

il

forgerons en avaient les

!

— Tu signeras? — Je signerai tout ce que tu voudras

!

»


166

Adonca,

lo faure

badet lo saqet et lo diable sinnet

que jamais faure entraria dins Qu'acô

mâchai nar

:

Ihi

l'enfern. Et s'en anet.

sabla bon de s'estirar un pauc

et chablat,

Mas era

tant

que demoret set ans per s'en

tor-

podia pas'chabar d'arribar

Quant

li

!

!

diables lo vegueron tornar tôt soiet, auze-

ron res dire

aco eras elh

vireron per rire.

lo

mestre

;

mas

se

..

Lo faure viusqet set ans. Quant saguet mort, s'en anet ves lo bon Dieu per esser jugeât. Et portava son sac.

Lo bon Dieu

Ihi

diguet

:

« — As fat pacha amelh diable I

« «

anet, et tustet per la porta

te

:

chau'nar en enfern

:

— Quau's acô? — Aco es faure que ven am son sac lo

!

»

Diablassas, diablas, diablassonassas, diablassonas,

diablassons, diablassonetas, diablassonetassons, diablassonets,

diablassonetons,

diablonassas,

diables,

diablonas, diablonassonas, diablonassons, diablonassonets, diabletassas, diabletas, diabletassonas, diable-

tassons, diabletassonets, diablons, diablets, diablonetassas, diablonetas, diabletonassas, diabletonas, dia-

blonetassons, diabletonassons, diablonelassonets, diabletonassonets, diabletons, diablonets et diabletonets, toti i(

que «

corregueron darres la porta

Coquin de faure,

l'avia'nat querre,

— Garda

tis

et se hi

cridet lo

demôra de qu'ont

peras

!

ranqeron.

promer diable ses

!

cridet lo segond, et vai t'en

!


167 Alors, le forgeron ouvrit le sachet et le diable signa

que jamais forgeron n'entrerait dans s'en alla. Qu'il trouvait était si

il

I

ne pouvait achever de se

il

:

diables

les

point

n'osèrent

lui,

il

un peu Mais

!

Quand ^Is

Et

l'enfer.

s'étirer

meurtri et broyé qu'il demeura sept ans

pour s'en retourner rendre

doux de

de

faire

maître

le

revenir

virent

le

mais

tout seul,

réflexions

c'était

détournèrent pour

se

ils

rire...

Le forgeron vécut encore sept ans. Quand mort,

s'en alla, portant son sac,

il

vers

il

fut

bon Dieu,

le

pour être jugé. Le bon Dieu «

— Tu as

en enfer. Il

« «

lui dit

:

pacte avec le diable

fait

:

il

le

faut aller

»

y alla et frappa à la porte

— Qui est-ce — C'est

:

.

?

forgeron

le

qui

avec

arrive

son

sac! » Diables, diablots, diablotins et

coururent

derrière

la

porte

et

diablotinets, tous s'y

arc -boutè-

rent. «

Coquin qui

diable es

de

était

forgeron

allé

le

!

quérir,

cria

le

demeure

premier

où tu

!

'<

va-l'en

Garde !

tes

poires!

cria

le

deuxième,

et


— 168 — «

Barras

la porta,

vos autres

qu'aquelh faure s'en tôrne

!

cridet Lucifer, et

son sac

!

»

bon Dieu.

Lo Lo bon Dieu Ihi diguet « De que vénes faire faure tornet ves le

am

:

?

T'avia dit de demorar en

enfern.

« Brave bon Dieu, respondeguet lo gun me vôu, en enfern. Quan i sei estât,

faure, dentota la dia-

blaria s'es rancada darres la porta, es ai auzit Lucifer

que cridava «

am «

son sac

si

diables

!

»

Peïre,

qu'escoutava, n'aguet

porta delh Paradis «

:

Pracô, sei tornat; pôde pas demorar defôra! »

Sent [a

am

— Lo laissas pas enlrar! Qu'aquelh faure s'en tôrne

Anem,

sobre ton sac

Lo faure Paradis

:

bôta et

am te

pietat.

Badet

sa granda clau, et Ihi diguet

darrès la porta

demoràras'qui

.

:

te

:

setaras

»

entret, et, despueis, es darres la porta delh

quant hi anarès,

lo veirés.

.


169 «

— Barrez la porte, vous

que ce forgeron

autres

Le forgeron

s'en retourna vers le

Le bon Dieu

lui dit

— Que

«

I

cria Lucifer, et

s'en retourne avec son sac

»

I

bon Dieu.

:

viens-tu faire? Je t'avais dit de demeurer

en enfer.

— Dieu de bonté, répondit

«

me

ne

veut, en enfer.

Quand

forgeron, personne

le

j'y ai

été,

toute la dia-

blerie s'est arc-boutée derrière la porte, et j'ai

Lucifer qui criait à ses diables «

— Ne

le laissez

pas entrer

retourne avec son sac

peux pas

refster

»

!

dehors

Que ce forgeron

!

s'en

Alors, je suis revenu; je ne ».

!

Saint Pierre, qui écoutait, en eut pitié.

Il

porte du Paradis avec sa grande clef et dit «

ouï

:

ouvrit la

:

Allons, boute-toi derrière la porte: tut'assoieras

sur ton sac et tu demeureras

Le forgeron entra,

du Paradis

:

et,

là. »

depuis,

quand vous

irez,

il

est derrière la porte

vous

le verrez...


170

A REVEIRE

«

Marion, so diguet la Finon, n'em pas lézer

anar d'aqueste

ser,

elh

Paradis...

d'i

polas van

Lis

jocar... «

— Que Banneta noi venia querre,

«

A!

vôu...

si

Para pas'cô...

lo folraud!

a

I

lo faure,

alai! a

— Oc ben!

«

venia mas, totChilhac

Si

riria...

Digeas, vos autras fennas, lo solelh trescôla

:

nos chau'nar claure. «

« «

— Anem, a reveire — A reveire — Sei deman

!

!

!

»

La covisada es'chabade. Tôt bellamen,

An

lis

coviseiras s'en vazon.

trabalhat longeamen per pauc ganhar

se plangeon,

ni

seregaunhon.

d'aver, an de voler et

;

mas

ni

non son richas de patiensa mais que mais. Non Si


171

AU REVOIR

«

— Marion, dit

la Finette,

sible d'y aller, ce soir,

il

ne nous est pas

loi-

au Paradis... Les poules vont

jucher... « «

— Que Satan nous vienne quérir, veut... — Ah nigaud! ne fera point cela.. y a s'il

!

le

Il

.

il

le

forgeron, là-bas!

— C'est vrai!

«

S'il s'avisait

de venir, tout Chilhac

rirait... «

— Dites, vous autres

derrière

le

mont

:

«

— Allons, au revoir — Au revoir

«

«

femmes,

le

cache

soleil se

faut rentrer chez nous.

il

!

!

Jusqu'à demain

L'assemblée a pris

Lentement,

»

fin.

les dentellières s'en vont.

Elles ont travaillé elles

!

beaucoup pour gagner peu mais ni un mot d'amer;

ne font entendre ni une plainte

tume.

Si elles

ne sont point riches d'avoir, elles pos-

sèdent un fonds inépuisable

de résignation

et

de

patience. Elles ne sont nullement envieuses et le tra-


172

son cobedas, e obrar

Ihi fai geau.

pena, aqui as so que

Ih' eschai.

Gaire de j么ia, pro de

Prac么, de b么na gracia

sis homes per trabalhar la terra, quant chau, donon elh pais d'efants verturos. Fennas valhentas, vos ame per s6 que ma maire

ajudon et

es de vos autras, et

vole sarrar aquelh libre en voi

lauzant.

m


— vail les contente.

173

Peu de

plaisir,

beaucoup de peine^

voilà ce qui leur échoit. Pourtant, elles aident, de

bonne grâce, leurs maris à travailler la terre, quand le faut, et donnent au pays des enfants vigoureux. Femmes vaillantes, je vous aime parce que ma

il

mère

est des vôtres et je

veux fermer ce

livre

en vous

louant.

12



NOTES ÉTYMOLOGIQUES

— Aco

P. 48.

(faqui rai, aco rai, rai d'aco, expres-

sions équivalentes qui signifient

:

cela est à l'ordinaire,

cela va bien, cela est aisé, rien de plus facile.

Et a rai, à l'ordinaire.

Les dialectes «

à

la raie

righi

d'oïl

», « en:

emploient, aussi, les expressions

raie

», «

à raie

».

Cf. l'anglais

« ail

voy. P. Malvezin (Glossaire) qui donne rai

» et

pour raid, mot venu d'un posée de ar, ajuster.

ratios, de la racine ra, trans-

— Adivoc,

particule affirmative, au sens de vraiment » « sans doute » « je crois que oui » Pour a div oc, littér. « Oh Dieu oui » Div peut être aussi bien l'abrégé du gaulois divos, Dieu, que du latin divus, même sens.

P. 58.

«

Oh

!

oui

»

«

;

;

;

!

.

P. 78.

au plus

Ajfînar, duper,

a fin

employé,

».

Cf.

aussi,

encore dans vieux Rat »

afiner,

en

la fable :

!

tromper adroitement, jouer

mot du

ancien

Centre,

français.

de La Fontaine

«

même

On

le

sens,

trouve

Le Chat

et le


i76 -notre maître Mittis

«

trompe

«

Pour

«

Blanchit sa robe et s'enfarine

la

seconde

fois les

— Aqissar, lancer

P. 104.

et les affine,

»>.

ou exciter un chien contre « Kss

quelqu'un ou contre un autre chien, en faisant

Kssl

:

!

»

Racine onomatopéique.

— Aumorna,

P. 104.

çais corrompu,

aumône,

comme on

n'est

pourrait

pas un mot franle croire.

C'est le

eleemosyna (emprunté du grec) qui a pris

latin

les

formes suivantes elemosina (aussi elimosina), elmosna, almosna, almorna (par différenciation de s en r) et, :

«nfin,

Au

aumorna

«

11

(par vocalisation de

aumorna^ compassion,

fig.,

Dava a Vil paubres elemosinas. » (Vie de Guillawnede

la Tour),

donnait à sept pauvres des aumônes. «

Quant hom

«

Cochât, ^'almosnd'l fazia,

«

Honors

vei

e bes

romieu

li

séria. »

{Azemar

— Quand un homme voit un lui faisait «

l).

pitié.

aumône, honneur

le

Noir^ Ja d'ogan).

pèlerin malheureux,

s'il

et bien lui serait.

Qui adordenamens vol far almorna, a se mezeys deu

«omenssar.

»>

[Y. et

— Qui j>ar

Yen,

fol. 82).

avec ordre veut faire aumône, doit commencer

lui-même.


177

«

D'home

«

Pot dompna aver almosna gran.»>

conques,

q'es aissi

{Bernard de Yentadour^

— D'homme qui grand

Non

es)

est ainsi conquis, dame peut avoir

pitié.

almosnera, aumônière, bourse; almornier almoynier, almonier, qui demande, qui fait l'aumône, aumônier; almonaria, soin de distribuer des Dérivés

:

aumônes, aumônerie

almornar^ aumôner,

;

faire l'au-

mône.

— Aver, bien,

P. 44.

vaillant de quelqu'un

peaux constituant,

;

argent, possessions, l'avoir, le

troupeau de moutons,

les trou-

autrefois, le principal de la richesse.

(Lat. habere, avoir, posséder). «

— Mais

Mas non

es

bo que

n'est pas

il

D'aquellas que

«

s fl'e

son aver.

bon qu'il se fie amon per aver. (B.

»

(Poème snr Boèce). en son avoir, »

de Ventadour, Chantars),

— De celles qui aiment pour argent. «

E playmi quan

«

Fan

las

gens

corredor

li

e'is

avers fugir. (B.

— Et

il

gens et L'oïl

me

les

plaît

quand

«

Bien

E

m play).

coureurs font fuir les

troupeaux.

employait aussi a

les

»>

de Born, Be

i

ad

or,

le

mot aver

:

mMistes ejacunces,

valent tut Vaveir de Rurne.

»»

{Chanson de Roland, v.

638).


— —

178

y a en quantité

Il

or,

améthystes et rubis, et

valent plus, à eux seuls, que tous les trésors de P. 108.

ils

Rome.

Babalhas, augmentatif de babalou babauy on fait peur aux

bête, fantôme, être imaginaire dont

Se couvrir le Gara lo babaul » visage d'un masque pour faire peur aux enfants, c'est « faire lo babau ». Cf. babarota, cloporte, soit « petite petits enfants :«

bête», et le

mot

cantalien babot, féminin babota, petit

insecte quelconque. Origine incertaine. P.

l4:2.

— Bo7nbar, produire un bruit sourd, exploser;

par extension, battre, frapper. De la racine onomatopéique bomb, qui a produit, aussi, le grec bombos (en latin bombus), bruit sourd.

bomba, nom verbal, toupie, bombarda, bombarde bombardar, produire une grosse détonation, bombarder bombassau, grand coup de poing. Au figuré, bomba, correspondant au latin powpa, pro-

De bombar sont dérivés

et son diminutif bombil

:

;

;

;

cession,

cortège solennel,

faste,

luxe,

magnificence,

bombansa ou bobansa (par dénasalisation), faste, bonne chère, bombance bombansai' ou bobansar, entourer de faste, mener joyeuse vie (en terme d'argot « faire la bombe ») bombansier ou boban-

appareil, ostentation

;

;

;

sier, fastueux,

prodigue, orgueilleux. L'ancienn.^. langue

d'oc avait, en outre, le subst. masc. boban,

corrompu en

burban, pompe, ostentation, générosité, magnificence, « inanis gloria "

»

(Donatz Proensals).

Lur bobans sera de sobre en jos

».

(Bertrand de Born, S'ieu fos aissi)


179

— Leur ostentation sera de dessus en bas. «

Et

«

No

si

la cortz del

m

Puei

relevon, jamais

bobans non serai sors.

e'I ric

»

(Richard de Barbezieux, Atressi cum)

— Et

Cour du Puy

si la

ne

et la noble générosité

me

relèvent, jamais je ne serai debout.

— Cantau, partie de

P. 2.

l'enceinte fortifiée de Chi-

Ihac, située à droite de la porte nord.

Nous n'avons pu

savoir l'origine de cette dénomination

dans Cantauy P. 72.

voir,

faut-il

:

la racine cant, côté ?

— Cantia, fourche à parc. Placées du côté exté-

rieur d'un parc, ces fourches servent à soutenir les claies et à les ajuster.

la

même

chanteau

celtique.

De

la racine cant, côté,

chantelar^ couper en chanteaux

;

coin du foyer

angle,

même graphie, On

Mot

que dans nos mots chantel, bord d'un pain,

;

chantier

^

égal au

chanton,

;

français de

etc.

trouve, aussi, cette racine dans le

nom

de lieu

Chanteuges, qui est écrit ÇanlogUu7n^ dans une charte

de 936

:

Halerii

«

Cantogilum, situm ex una parte super fluvius ex

et

altéra parte

super rivum

Deje...

»

(H. Doniol, Cartulaire deBrioude, p. 346). Chanteuges, en effet, est assis sur Tangle formé par la réunion de la

Desge et dé l'Allier. De même, Cantium est l'ancien (Angleterre)

;

c'est

nom du pays

un pays d'angle

:

alter angulus, qui est ad Cantium...

mentaires, V,

13).

Ce

nom

«

»

de Kent

Hujus

lateris

(César,

Com-

est écrit Cantia^ dans Gré-

goire de Tours (Histoire des Francs, Liv. IV, chap. 26).


180

P. 64. — Chahana ou chabona, cabane. Bas latin cabanna (dans Isidore de Séville), hutte de vigneron, cabane. C'est le mot gaulois capanna, de la racine cap, couvrir. Cette racine a formé de nombreux mots, aussi bien en oïl qu'en oc capa, chape capel ou chapel, chapeau capota, capote capella ou chapella, cha:

;

;

;

pelle, etc., etc.

P. 42.

Chabreta,

chevrette

«

de

instrument

»,

musique rustique en usage dans les montagnes du Massif Central. La « chevrette » se compose d'un sac en peau, aVoeire », l'outre, auquel sont rattachés deux tuyaux accouplés,

la

«

chantarella

et le

»

bronzi-

«

dor».

La chabreta bêlement de

est ainsi

nommée

la chèvre,

parce qu'elle imite

chabra, en oc

On rappelle aussi la « chabra ». On dansait, autrefois, la bourrée au son de vrette

du

»,

P. 140.

fifre et

le

capra)

(latin

la

«

che-

du tambour.

— Chalendas, au pluriel, la fête de Noël. Les

Romains appelaient Calendœ

le

premier jour de chaque

mois. Nos pères, ayant adopté leurs usages, disaient

au vingt-cinquième jour de décembre das

»,

par abréviation de

(januarias),

c'est-à-dire

«

:

«

Octavo Calen-

octavo die an te Calendas

le

huitième jour avant

»

les

calendes, ou avant le premier jour de janvier.

Lorsque

marqua

le

lument

«

le

christianisme se fut répandu et que Noël

commencement de Calendas

»,

parce

l'année, ce jour fut absoqu'il

quable d'entre ceux qui portaient

était le plus le

même nom.

remar-


— «

E

«

C'om

181

s'avenc entorn Nadal

si

a.pe\B,

Kalendas

lai. »

(Peire Vidal,

— Et ainsi «

Calendes

issio),

»

A

«

il

AbHl

arriva autour de Noël, qu'on appelle là

Calendas, lo sant jorn de Nadal.

•>

[Chronique d'Arles),

— A Calendes,

le

saint jour de Noël.

Dérivés Chalenda maia chanson qu'on chantait au mois de mai chalendier (calendarium), calendrier; cha:

:

lendar et chalendal, qui est des calendes. P.

24.

Chap^

quelque chose.

Au

tête,

sommet, bout, extrémité de Pour

figuré, principe, chef, chef-lieu.

cap, réduction du latin caput, tête, chef. (Pour rendre le

sens de caput, nous employons plutôt Dérivés

:

chabet, chevet de

lit

;

chabussar, plonger, jeter à l'eau

;

;

mot

bœuf pour

capsol, ancien droit seigneurial, lods

sier ou cabasser (de cabessa,

«

testa). ;

chassol ou chassou,

coussinet que l'on met à la tête d'un

au joug

le

chabeissa, perruque

cabèche

»,

tête,

;

le lier

cabes-

en espa-

gnol cabèça), celui qui est à la tête d'une troupe d'ouvriers

;

chabot, qui a une grosse tête

d'un enfant qui a une tête gracieuse la

vigne; cassar,

cassar, se baisser

chabiscot, se dit

;

;

chapolar, tailler

pour capsar, baisser ;

la tête;

se

chabidar (d'un bas latin capitare),

somnoler, à cause des mouvements de tête qui se produisent pendant l'assoupissement; descapitar, décapiter

;

achabar, achever, proprement,

«

mener à chef

escassar, pour escapsar, décapiter, été ter, etc.

»

;


— — Chaumassay

P. 8.

182

chaleur ardente, canicule, pour

caumassa, calmassa et calimassa

.

Du

latin calere, être

chaud.

Le mot français chômer, pour chaumer, est de même mots cantaliens calima, chaleur ardente,

origine. Cf. les

câlina^ petite chaleur, etc P.

2.

Chilhac, ancienne seigneurie ayant appar-

moyen

tenu, au

sur r Allier

(arr,

âge, à la famille de ce

nom,

et située

de Brioude).

Dénote un bas latin Ciliacum, dérivé du celtique ou Cellios (voir Holder, Dictionnaire d'ancien

Cilios

celtique).

Les seigneurs du Four

(dits)

de Chilhac étaient aussi

seigneurs de Sales (alias Salas), d'AUeret et de quelques censives, près de Chilhac. C'était une noblesse connue

depuis Odilondu Four, écuyer habitant Chilhac en 1300. Elle avait

pour armes

pagné de

trois étoiles de

P. 64.

:

«

D'azur,

même

au chevron

d'or,

accom-

».

Cobre. De cobre, de relais, en réserve, de

v Avés pro de blat per semenar? » N'ai de cobre réponddemande-t-on à quelqu'un. « Aquest'annada,li vinhas son estadas bravas ai il. mon cobre de vin ». -— a Aquest an, ai mon cobre

reste,

en suffisance

:

((

y>

:

:

cranhe res

».

Dérivé de cobrir, couvrir, cacher, garantir (bas latin coprirCy du latin cooperire). Cf. l'espagnol cobro, lieu où l'on garde une chose, où on la met en sûreté « Poner en cobro », mettre une personne ou une chose en sûreté, la mettre dans un lieu où elle soit hors de danger. :


— —

P. 24.

Codaca,

183

nom

onomatopéique, par allusion

plaisante au cri que pousse la poule qui vient de pondre.

Combaneira, littéralement, « Combe Noire » P. 50. massif montagneux et boisé situé au-dessus du village d'Aubazac, sur la rive gauche de l'Allier, à peu de distance de Chilhac. Mot formé de comba, combe, vallée, et neira, noire.

L'expression « lop de ves Combaneira

»,

désigne, à

un homme grossier.

Chilhac,

— Copel,

« P. 98.

petit

sommet, nuque. Diminutif de

coponcup, sommet d'un mont, d'un

arbre. Origine

celtique.

Copel est

le

nom d'un mont volcanique situé sur le commune de Saint-Eble (Haute-Loire).

territoire de la P. 60.

ner,

Cossirar, penser, considérer, rêver, imagi-

-

être dans l'inquiétude, soupirer.

(dans le

derare, «

Donatz Proensals

«

Pour consirar

réduction du latin consi-

regarder avec soin, examiner; proprement,

regarder les astres Dérivés

cossire,

»),

:

».

consideransa,

considération

chagrin, rêverie, pensée,

;

souci;

cossir ou

cossiransa^

inquiétude;comraere, morose, rêveur; cossiros^ pensif, chagrin, inquiet; cossirans^ en état de penser, de considérer.

Notre mot cossir ar ou consirar avait son correspondant en

oïl

:

«

Et je querrai d'amors joie

«

Car consirer d'amors ne me puis mie.

et

baudor,

(Colin Muset).


184 P. 2.

Colinent, incessamment, tout de suite.

En

continent.

Pour

in continenti (sous-entendu tem-

latin,

pore). Cf. le français incontinent. P. 2

commune, assemblée, Velay, groupe de femmes occupées à

Covise, réunion, vie

Dans

société.

le

faire de la dentelle

Dénote un bas intimité, vie

latin convitium, venu du commune. Autres formes

latin convictio,

convit et covic

:

convictus).

lat.

En

oïl,

convi et convif

portug. convite, «

An

ital. toit

(lat.

convivium). Cf. esp. et

convito, catalan convit.

dons

e convitz.

Giraud de Borneil

Ont supprimé dons La maison où

«

ils

En un convif où

Lo doutz).

et festins.

tenaient leurs grands convis

(Œuvres d'Alain Chartier, «

:

il

».

p. 44)

y avait plusieurs assis à

la table ».

(Amyot, Traductions de Plutarque, vie d'Antoine). Dérivés covisar, former un covise; coviseira, personne qui prend part au covise; covisada, durée du covise, ensemble des personnes forman,t le covise. :

P. 164.

— Dengun

(aucune) personne. Pour nengun,

necunus). En ancien oc, negun, neguna, aucun, aucune, personne. En Limagne, « personne se traduit par « pa'un » (pas un) ou par nasalisé de

negun

(lat.

j>

n'arma

»,

abréviation de

«

pas una arma

âme). Cf. l'expression française

«

»

(pas

une

pas âme qui vive

».


185

Pas dengun, sans bonne

homme

méprisable,

sans honnêteté,

foi.

— Desparrar, partir subitement,

P. 48.

courir à toutes

jambes. Dérivé de esparra^ mouvement subit, écart; esparra était aussi le nom d'une ancienne arme de trait.

D'après Pierre Malvezin,

de la racine spar,

variante de scar, fendre, séparer, disperser,

qui est dans

rejeter,

irlandais scarraim, je fends, je

le vieil

sépare, le breton dUshar, abatis, etc.

Autres dérivés

:

espar r on, échelon

;

esparrar, écar»

un autre desparrar, au sens de tirer, partir avec explosion, faire une décharge de mousqueterie cité par Des Sauvages (Dictionnaire languedocien-françois, Nismes, 1785). ter les jambes, glisser

;

,

Dralhar, laisser des traces de pas sur une dans un semis; battre, frayer, fréquenter, en parlant d'un chemin courir, se sauver. P. 34.

terre,

;

Dérivé de dralha, pour drailla^ contracté de draguillay

pour dragilla (avec g

dur), lequel est

nutif de draga^ sentier, passage,

un dimi-

détour, chemin de

traverse affecté au passage des troupeaux de moutons.

Autres dérivés de draga

:

dragar^ courir par les

sentiers, laisser des empreintes de pas sur les terres

;

draguegear ou draguechavj fréquentatif; adralhat, celui qui est en chemin, qui est en train d'aller; celui qui aborde quelqu'un ou qui va quelque part avec un air

empressé.

Dralhar

est, quelquefois, corrompu en draiar (cf., dans Mistral, travaia^ pour travalhar ; Mireio, pour


— MirelhOj etc.). Mais

il

186

n'a rien de

commun

même

avee dralhy

« dradzena », criblure, ainsi que le prétend M. A. Dauzat. Dralh est le nom verbal de dralhar, cribler (ancien

crible, et n'est pas de

français

«

drailler

la

racine que

»).

Dralhar, courir, dérive, par sdn formateur draga^

de la racine drag^ variante de trag, courir,

que dans

la

même

gaulois vertragos, vautre, chien coureur,

le

le latin tymhere,

et l'anglais to trag, tirer. (V. P. Mal-

vezin, Glossaire de la langue d'oc).

Empeitar, embarrasser, gêner, empêcher, P. 22. au propre et au figuré. Pour Empeicar (bas latin impedicare, du latin pedica, entrave) Proprement, « mettre empaiiar, empaichar, des entraves » Autres formes empachaTy enpazar, empechar (employées par les trou.

.

badours)

Cf. espagnol,

.

impacciare Dérivés tacle

:

«

:

catalan,

;

:

portugais

:

empachar;

italien,

empatœar.

empeitay entrave, embarras, gêne,

Moei

de per mis empeitas

te

»,

obs-

ôte-toi

de

devant moi, ne m'embarrasse pas. Empeitaire, gêneur, empeitada, gêne momentanée empeitos, indiscret ;

;

embarrassant, qui ne sait qte gêner; empeitat, embarrassé, retenu, occupé, empêtré; animal auquel on a

mis des entraves. Fenna empeitada, femme enceinte; empeitamen, empêchement, desempeitar, débarrasser, délivrer;

desempeita, débarras

;

desempeitos, ser-

vi able.

P. 10.

— Escenla

ou Escinta, clochette

d'autel, cla-

rine attachée au cou d'un animal, sonnette. Pour esqinla, nasalisé

de

esqilla,

du tudesque skella


— Escenla se le

groupe

;

Dérivés

nuyeux

;

(V

e initial a la valeur de

devant une voyelle, se prononce cf. Breseia, pron. Brechia).

se,

en italien sonnette

ichenla

lit

-

187

:

;

i,

et

comme

escenlar^idÀvQ résonner une clochette, une escenlaire,

qui sonne,

celui

homme

en-

escenlada, coup de sonnette, sonnerie; escen-

Ion, petite sonnette; petite fille; petit

P. 40.

c/i,

— Esfatar, dépecer, déchirer

de vieilles hardes,

et,

homme. de vieux linge,

généralement, déchirer

sans

effort

Dérivé de fata^ chiffon, autre forme du mot pata^ lui-même forme Ae peta, pièce, coupure, qui a donné petas, augmentatif, petassar, raccommoder, rapetassur pièces. Ce dernier est devenu, en français, rapetasser. De même, le francisé fatras amas de chiffons, de guenilles, résulte de la contraction

sar, mettre pièces

de notre ïâoifataraSy dérivé de fat a. Pierre Mal vezin Téiiepeta au bas ISLimpetia (en oc, pessa, en français, pièce). P.

— Esmaiar,

8.

allemand magan, bler,

chagriner,

«

pour esmagar

pouvoir

»

(préfixe

et haut

être fort), étonner, trou-

épouvanter; proprement,

selon la

remarque de Littré, « ôter force et pouvoir » Cf. le portugais esmaiar et l'italien smagare. En oïl, esmaer et esmaier (dans la Chanson de Ro.

land).

Nom

verbal

:

esmai, surprise, trouble, ennui, peine,

souci, émoi.

P. 34.

Esparlinar, dérivé de espar tin, ^omv ves-


188

pertin (bas latin vespertinuSy repas du vesper). L'

espartin

c

»

du

soir,

lat.

est le repas que font, l'après-

midi, les journaliers et les paysans au lieu où

ils tra-

vaillent.

Espariinar

est,

corrompu en despar-

quelquefois,

tinar.

Du même [vesperem] veillée ris

;

;

latin

vesper sont dérivés

vesper, étoile de

vespras, les vêpres

;

avespre,

approcher de

vespre^ le soir

;

;

soirée,

vespértillon, chauve-sou-

subs. m., le soir; avesprar, faire tard, la nuit; avesprir,

L'oïl avait, aussi, ces

—Espeiar,

P. 74.

:

Vénus vesprada,

même

sens.

mots.

éclater, se crever;

au

fig.,

crever

d'embonpoint. Formé du préfixe es pour eœ, et de petar, dérivé de pet (bas latin pettum, du latin peditum, incongruité). «

Tais jpetz que son de corn vos semblaran.

(Tenson de Montan et d'une

De

tels pets

que son de cor

ils

«

Las castanhas del brasier

«

Peton quan non son mordudas

Dame

:

»

leu).

vous sembleront.

».

(Un troubadour anonyme).

Les châtaignes du brasier éclatent quand

ne

elles

sont pas mordues. Espet,

nom

verbal d'espetar, désigne u» pétard ou un

éclat de braise allumée qui s'élance avec explosion

bruit d'une P. ^%.

arme à

;

le

feu. Petegear, c'est pétiller.

— Esquintar, déchirer, briser, rompre, user

figuré, fatiguer à l'excès. Ce mot,

;

au

qui correspond, pour


189

-

sens figuré, aux expressions françaises «c êlre brisé » être rompu »,a deux variantes esquisar ou esquissar

le

^

«

:

et

son nasalisé esquinsar.

On «

d'ailleurs, ces

trouve,

anciens

dans

mots

textes

les

:

Camenseron greumens a plorar e lurs vestis a esquirCtar (Hist. abrégée de la Bible, fol. 19).

»

— Ils commencèrent à pleurer amèrement et à déchirer leurs vêtements. <r

Que esqiiinton

e

pesseion per pessas totz

(Cartulaire de Montpellier,

Qu'ils déchirent et

?los

fol.

capels

».

144),

dépècent par pièces tous leurs

chapeaux «

L'autre esquisset sas gonelas

».

(Peire Cardenal,

Una

L'autre déchira ses tuniques. «

De sen blizautde seda

fetz

un pan esqumsar

(Roman de Fierabras,

Ciutat).

Il fit

».

v. 707).

déchirer un pan de son bliaut de soie.

«

Que

«

Si parta

l'amors, que m'aflama e

de lieys ni sesquis

m

ponh,

»

(G. de Cabestaing,

Ar

vei).

— Que l'amour, qui m'enflamme et me point, s'éloigne d'elle et se brise

Esquisar, pour esqisar, peut être dérivé de la racine que

le

même

sanscrit chidy pour ancien skid, le grec

skiso, le latin nasalisé scindere^ tous

au sens de fendre.

Cette racine scid (avee c dur) est dénotée, en celtique, 13


190

par un sceida, dans

le

breton shoaz, épaule,

le vieil

irlandais sciath, aile, nageoire, soit division; le bre-

ton 5CMid, brisé de fatigue.

Quant à esquintar, pour esqintar, devenu en fran^ c'est le latin scindere, qui nous est arrivé modifié par son passage dans la basse latinité. (Voirie « Donatz Proensals », dans lequel e^gt^m* est traduit par scindât, ce qui exclut le supposé eocquintare çais, esquinter,

de Darmesteter).

En

ce qui corîcerne le sens absurde de

cinq

Général, rire.

.

«

couper en

attribué à esquinter .i^ar Fauteur du Dictionnaire

»

accueillons-le, tout

au moins, par un sou-

D'où vient donc l'idée de ce partage en cinq

.

ou en sept? Est-il jamais arrivé dans le cas d'une extrême fa« Je suis coupé en cinq » ? Et le malheureux tigue auteur, esquinté par un critique partial, a-t-il lui aussi, son pauvre corps en cinq morceaux ? Et qu« dire de nos Immortels qui refusèrent, en 1913, d'admettre esquinter dans leur Dictionnaire, sous prétexte que ce vocable n'avait pas d'origine connue, qu'il faisait double emploi avec éreinter et qu'il était isolé

plutôt qu'en

trois

à quelqu'un de

dire,

:

dans

Le

la

langue française?

«

Donatz Proensals

»,

déjà

cité,

et

les

diffé-

rentes acceptions rapportées au début de cet article

démentent nos Académiciens éreinter et esquinter ne se confon^'ent pas, mais ils forment une gradation dont esquinter est le terme le plus fort. Enfin, le pré:

tendu isolement du francisé esquinter ne se voit guère, si l'on rassemble les mots français de la même famille


— que

lui

scinder^ scision,

:

scinliller,

venus du

latin

191 et, ;

probablement, étincelle

schisme

(division),

tique, schiste (pierre facile à diviser), schisteux,

du grec, tous de

la racine scicl

— Far folha7\ remuer

P. 44.

(1),

schisma-

venus

(2)

buissons, dans animaux. Par exten-

ddiïis les

les broussailles, en parlant des

pour les personnes. Pour barfolhar (ly latin ayant remplacé le b celtique) et barfodilhar. Ce mot se compose du préfixe péjoratif bes et de fodilhar ou fodiliar, de la même racine que le sion, s'emploie, aussi,

latin fodere,

pour un archaïque

/btZ^re, fouir.

Nous avons, aussi, barbolhar, remuer la vase avec mains. Darmesteter explique ainsi

les

«

Composé avec

inconnue

et

français farfouiller

:

une particule d^origine

».

— Flac,

P. 8.

fouiller

le

mou,

lâche, qui

manque de vigueur,

faible, flasque (lat. flaccus). «

Quar lapelh a molha eflacha

».

(Tenson de Bertrand et de Gaubert).

(1)

Ce mot, venant du

La métathèse (2)

latin scintilla, devrai^ être escintelle.

a produit estincelle,

devenu

étincelle.

D'après Michel Bréal, caedo (pour scaedo) appartient,

probablement, à

la

même

famille, ce qui ajoute

un nombre

important de mots à ceux qui sont donnés ci-dessus

:

concis^

concision, décider, décision^ inciser, incision, occire, césure, ciseau, et ses

Les Mots

dérivés, homicide, etc. (Voir

latins, art. scindo et caedo).

Bréal et Bailly,


— —

Car <<

il

Om

192

a la peau molle et fiasque. de flac cor s'espavent' e s'esmaya (G. Faidit.

Homme

Dérivés flacir

(lat.

:

».

Ja no crezatz).

de cœur lâche s'épouvante et s'effraye.

flaqir, flétrir, se faner,

flaccere)

;

passer autre forme, ;

flacar^ lâcher, fléchir, et, au figuré,

mollir; flaqeza, faiblesse; flacameny flasquement, mollement, lâchement fiaqegear, fréquentatif aflaqe;

ziVy affaiblir

;

dé/laquer,

(cf.

terme scatologique, en

argot). Il

zin,

y a lieu de remarquer que flac, selon Pierre Malvepourrait être une forme de blac, même sens, d'uu

Dans ce cas, il du remplacement b celtique par /' latin. j D'ailleurs, les mots ci-dessus ont une autre forme dans celtique blaccos, égal au latin flaccus.

aurait

laquelle entre le radical celtique blac

:

blacar, blaqessa,

blaqegear, etc.

Se galar, être à son aise, se réjouir. En Limagne, au sens particulier de «jouer», «prendre ses P. 92.

ébats

même

en parlant des enfants. Dérivé de gala, joie, le que l'ancien français gale, l'italien et l'espagnol

»,

gala un jour, un habit de gala, de fête, de « joie ». Dans le dialecte des Cévennes, se galaminar, c'est s'égayer, se délecter lo galapastre est la bergeron:

;

nette, l'oiseau qui

«

réjouit les pâtres ».

Gala est d'origine celtique. P. 14.

Geacada. En Velay

et sur les confins, ce

s'applique particulièaement à une poule dont est

marqueté de nombreux

petits

points

le

mot

plumage

blancs sera-


-

193

blablement disposés à ceux que l'on remarque sur le bord antérieur des ailes du geai ou geac. Dans le Cantal, c'est le nom propre d'une vache; il s'applique,

comme qualificatif,

d'ailleurs,

à d'autres

animaux.

Qeac est la forme chuintée de gac, mot de nos pères, venu d'une racine onomatopéique qui se trouve, aussi, dans le breton. Autres formes ^<xc/i, gas (dans les :

Cévennes). L'ancien français avait gai, pour gaie

gai qui sied sur l'arbre

Dans

breton gegin, Dérivés

:

;

même

Le

gag in. Ce mot correspond au

sens, également poar gagin.

-geaina, femelle du geai

;

geaïssa, l'engeance

troupe de geais geaïnon, petit geai. ;

Gsassa, -pour g eacia eigacia,

même

«

parler de Chilhac, geac est devenu geaïn, au

le

diminutif, pour geagin et

des geais

:

(Raoul de Cambrai).

»

nom

de la pie, est de

origine.

P. 86.

Giga, jambe, en français

gigar, agiter les gigues, courir, dont

«

gigue

le

»,

a formé

fréquentatif est

gigonar, marcher en tous sens, aller et venir,

et,

par

extension, hésiter, toucher à tout, faire peu de travail

Gigonaire est synonyme de « mazette », « lambin ». Giga est de la même racine que les mots latins gigas, géant, et ciconia, cigogne, P. Malvezin y ajoute « le nasalisé cingelo, de Vercingétorix, grand chef des guerriers, proprement de ceux qui marchent à la conquête». Racine ci<7 eigig. utile.

P.QO.

Nom

Goalha, moquerie, plaisanterie, badinerie.

verbal de ^ottZMr, plaisanter, se moquer. Goalhar

est le parallèle du français gouailler, battre

avec une


194 verge

par extension, donner une correction verbale,

;

moquer

se

(Voir P. Malvezin, Dictionnaire

des racines

celtiques.

Gomar, pousser des cris plaintifs, se lamenPour govinar. Racine gov, crier, la même que dans

P. 16. ter.

breton govela,

le

gémir, pleurer,

le

grec govein, se

lamenter, gémir. P«

72.

Dans

grand festa

»,

comme en

riables,

expressions

les

les adjectifs tau et

«tau gracia», et

grand sont inva-

grandis et les autres modèle avaient, comme on sait, la même forme au masculin et au féminin. De là vient qu'en français grand est invariable dans « grand mère », « grand messe », « grand route », etc. Mais on latin

a

lalis,

de faire suivre cet adjectif d'une apostrophe,

le tort

l'e

:

même

adjectifs faits sur le

muet que

l'on

prétend remplacer n'ayant jamais

existé...

Geste grant guère ne deit munter a plus».

«

(Chanson de Roland, v. « Si «

243).

a grant joie

El vergier ou dognoie

»

(Colin Muset, Volez oïr), P. 14.

— Graupir,

saisir, agripper.

Forme ouverte de

grapir, dérivé de grap, griffe. Ce radical a donné de

nombreux mots aussi bien en

grapa, grapaud, crapaud grapet^ diminutif, d'où est venu grapetar en français contracté « gratter » (pour grapeter) grapinar griffe

;

grapar, saisir avec

français qu'en oc

les griffes

;

;

;

dérober

;

grapinhar,

griffer, etc.

:


195 P. 108.

— Grifol, houx. Pouv agrifol

{Iditin

ag rifolium)

Et une autre forme agrevol, dans laquelle ne

En nom propre,

produite l'aphérèse de Va.

pour Vagrevol. fogliOy

même

P. 96.

Cf. l'espagnol

s'est

pas

lagrevol^

agrefolio et Fitalien agri-

sens

— Gropas,

ondée de pluie. Pour g lopas augmentatif de glob

forte

et globas (permutation de b etp), (latin

eorps

globus,

l'anglais club

sphérique, peloton, globe).

Cf.

.

Le commentateur Macrobe (ye siècle) emploie globi pour désigner des flocons de neige :« ^/o6^ nivium^^. Gropas a désigné, d'abord, une masse de nuages arrondis, puis, par métonymie, la pluie qu'ils produisent. P.

26.

Harbalant,

l'important, le

fier, le

lant et fabulant,

du

loquace,

hâbleur,

qui

fait

généreux; fanfaron. Pour habafabidantem,

latin

accusatif de

fabulansy lequel est dérivé de fabulare, causer, s'entretenir, inventer, mentir, et se relie à fari, dire,

parler,

par l'intermédiaire de Aôw/rt.

Pour Xr épenthétique, cf. largea, mot du parler de Chilhac, pour lâcha, laiche et, pour le changement de /"en 6, cf. l'espagnol /i^^^^r, parler, poar fablar (lat. fabulare). Ce changement, fréquent, en latin, et, aussi, en oc, surtout dans le gascon, se rencontre même en français (hardes pour fardes) Le changement inverse s'est produit dans notre moi fartalha, pour hortalha). Dans son Dictionnaire languedocien- français ^ Des Sauvages donne « abalan » ou abalous, généreux, libé;

.


rai

».

196

Abalous, pour habalous, vient du latin fabulosus

porté aux légendes, aux gie de harbalant

.

contes, et confirme l'étyraolo-

nous ne pouvons être

C'est dire qae

de l'avis de M. A. Dauzat, qui cite arbaJan (Glossaire

du patois de Vinzelles) et P. 14.

mateur

venir de

le fait

.

,

.

arbalète

!

1

/oc«t?or, juchoir, dérivé de jocar dont le for-

est joc, barres sur lesquelles les poules se cou-

chent. Autre dérivé -.jocada, accouchée.

En ancien

français, jue

de

quelquefois,

:

«

Et, à la vérité,

il

usait,

rudes termes que les poules s'en

si

fussent levées du et

Joyeux

^"mc. (Bon. Des Périers, Les Contes Nouv. XVI). Les dialectes du Nord, picard, ont joquer et Jouquer, au sens

devis,

notamment le

général de coucher, se coucher, en parlant des person-

nes et des animaux.

De

en latin

la racine ioc^

dont

iac,

le

sens primitif

est «jeter, lancer,»; le sens s'est étendu^ ensuite, à

ridée de repos. Le verbe latin jacère et son

jacère

«

rendent ces deux sens

Poma

&ivdXdi

jacent sub...

P. \\0. «

— Justar,

enlever des mains

la violence

:

des voleurs

tava la part,

»

;

le

sens primitif.

jouter, combattre; par extension» »,

s'emparer de quelque chose par

«De raubaires lui

inchoatif

Jacere lapides

(Cicéron).

»

Nos mots n'ont pas conservé

«

:

Ihi

an justat sa moneda », « Lo chin empor-

ont enlevé son argent. Ihi

l'ai

justada

»,

le

chien emportait la

viande, je la lui ai reprise.

Justar est

le

bas latin ^Maj^are, proprement «joindre,

faire joindre», venu, lui-même, &\x\2X\n juxta, de, près de.

à coté


-

197

Dérivés Jus ta, ^oûie; jus faù^e^ goûteur; parextension, :

prend quelque chose de force, voleur.

celui qui P. 98.

dans

— Menar,

mettre en

le dessein, projeter, et,

ser, faire agir quelqu'un

avec

soi,

avoir en tête, être

l'esprit,

par extension, faire pen-

comme on

veut, faire

aller

conduire; amener, produire, engendrer; tra-

mer, machiner. Ce verbe entre, avec des acceptions

dans un grand nombre de locutions

différentes,

sacin de

a'n

temps que zo mena

», il

a beau

«

iVenar fioc»,

incendier-

«

I

qu'il

Menar varalh», un métier. «Menar li bestial»,

y pense, qu'il a ce projet en tête. « Menar mester faire du tapage.

:

temps

«

faire

»,

conduire les bêtes. «

Mena

tos secretz a sabis

homes

>>.

Trad. de Bédé,

Confie tes secrets à sages «

Menan gran baudor

fol. 75.

hommes.

per tota

la ciutat ».

(Vie de St-Honorat)

— «

Mènent grande Can

allégresse par toute la cité.

l'enten Falmiran, gran

joya n'a menada».

Roman de

— Quand «

Fierabras, v. 2755.

l'émir l'entend, grande joie

Quan non

il

en a montrée.

poirai îHewar la langa«.

(Folquet de Marseille, Senher).

Quand

Menar dans je

les

me

je ne pourriii

remuer

la langue.

vient de la racine 7nen, penser, la

mots

même

latins, 7nens, esprit, intelligence;

que memini,

souviens, Minerva, pour Menerva, déesse de

l'in-


198 telligence, le grec menos, le sanscrit mafias, l'anglais

77iind,

même

«

esprit

meinen

sens; l'allemand

»

être

«

d'avis ».

De

même

la

famille

:

mena, menée, négociation,

manière, façon; espèce, race,

condition,

état,

engeance;

menât, semblable^ pareil menada, conduite menairas ou meneiras, nom qu'on donne, dans la cérémonie des ;

;

noces, à deux jeunes

son époux et qui

la

filles

qui conduisent la mariée chez

couchent demenar, troubler

la rai"

son, agiter, tourmenter (en italien dimenare), démenât,

dément, possédé, ramenar ou remenar, redire, répét3r, les

mêmes

choses, rabâcher.

En ancien

français,

ramentêr (du «

A

ce propos

«De

ramenar se disait vamentevolr ramener

latin mente^n) et

ung

dit

ramaine

:

:

saige mère, saige enfant». (Villon)

Ramener sien,

s'est, d'ailleurs, conservé dans l'argot pariavec son sens ancien. Quant au français mener,

a la même origine que l'italien menare, menear, l'ancien espagnol et l'oc menar. il

P. 78.

— Mingornel,

de très petite

taille.

le

portugais

Nasalisé de

Miconel, avec r épenthétique. Cf. minganelas, petites

mines, petites façons qui sentent l'enfant gâté (dans

Des Sauvages). La nasalisation a amené un ^ à la place du c. Miconel est le diminutif de micon et de mie, petit, donné pour un celtique micco* ou mlcos par P. Malvezin. D'après notre savant compatriote, les noms propres Michon, Michot, Miquet, M ion. Miette, etc.; et nos mots mic^û^, miche, mi^ea, mie, mialha, petite chose,


_ que

etc., ainsi

même

de la

l'oil

199

mïoche, tout petit enfant, seraient

origine.

— Neira, puce, littéralement, «la noire»

P. 78.

(latin

remarquer que noir et noire se àX^^ninegre et negra, à Chilhac. Neira semble emprunté au dialecte voisin. Cf. Comôrtnei'rrt, nom de montagne, nigray noire).

est à

II

déjà étudié.

nom

Niella,

noire

»

(latin

de plante,

nielle,

nigella, fém.

veut

dire, aussi,

la

<.y

de nigellus, diminutif de

niger, noir). P. 110.

nouvelle

— Novia,

jeune épousée. Littéralement,

Mot gaulois

».

«

la

qui s'est conservé sans change-

ment. Au masculin, novi, de

no?;/o.s',

nouveau. En

latin,

novus, nova.

Dérivés

:

novial, nuptial; noviadis, achats faits

pour

un mariage. P. 148.

— Pacha,

Au moment

convention, accord, marché, pacte.

de la conclusion d'un marché, l'acquéreur

frappe de la main dans la main du vendeur.

En

Limd^gne,.pacha signifie, aussi, «joue

»,

en souve-

nir d'une ancienne

coutume qui consistait à prendre un

enfant à témoin, au

moment de la conclusion d'un j^ac^e,

et à le souffleter

publiquement,

afin qu'il se

souvînt et

pût, au besoin, en témoigner.

On

lit,

à ce sujet, dans Le Livre des Gestes du roi

ChUdebert III Aî'vcrnes, et sa

:

«

Eptadius, noble de

femme

Salaberge,

mutuelle de tous leurs biens,

que

la

et,

la contrée

des

se firent concession

selon la coutume, pour

chose ne fût point oubliée, et qu'au cas néces-


— saire

il

200

en fût porté témoignage,

ils

produisirent un en-

fant d'onze années, qui était de leur ville, et sur

Joues duquel plusieurs

comme

étant

Pacha

soufflets

furent

les

appliqués,

moyens de souvenir.

pour pacta, du latin pactum. La graphie avec ch a été amenée par la prononciation chuintée du groupe et, de pacta. Cf. penche, nasalisé de pèche, est

peigne, venu du latin pectem.

Dérivés «

:

pachon,

Faire la pacha

»,

soufflet;

c'est aussi

pachonar, mettre

fin

souffleter.

à une querelle,

à un différend.

P. 16. Pannar, essuyer (avec un « pan »). Dérivé de pan, morceau d'étoiîe, lambeau (latin pannus). Autres dérivés panna man, essuicmain; panna qiou* :

pan de chemise, P. 44.

etc.

Part, viande.

mot a

portion, ce

D abord employé au sens de

désigné, ensuite, particulièrement la

viande, laquelle constituait, autrefois, la principale,

souvent, la seule nourriture «Equiti

(Suétone

Romano

{Id^iin

et,

part em, portion).

avidâus vescentip^r^^^ suasmisit

».

).

envoya sa portion à un chevalier romain qui mangeait avec trop d'avidité. Il

P. 98.

peccator).

aux

«

« pêcheur » (latin terme de commisération correspondant

Pechaire, littéralement,

Ici,

poverino

»,

au vieux français

«poveretto

» «

poverello

»

des Italiens,

pauvre » et à l'expression « bonnes gens» des paysans del'Angoumois et du Poitou. Diminutifs pechairon, pechaireta. :

«

le


201

«Quand

la nuis es

«

E

«

Mais clamet

passade

el

jorz esclaire,

Girarz a perd ut, non sat que faire sei

dolent,

pechaire

caitif,

!

».

(Girart deRoussillon, fol. 128.

P. 82. —Pelfiar,

pelh

{Iditin

mordre

à la peau. Dérivé de Pel ou

pelliSy peau).

Dans la fable « Le Chien à qui on a coupé les oreilles », La Fontaine a employé le mot piller dans le même sens

:

car étant de nature

»

«

A

piller ses pareils

Viennent aussi de pel pin,

:

»>

pelha, peau écorchée (de la-

plus particulièrement), mauvais

linge,

haillon; pelhela^ "^eiiie peau; pelalha,

pialalha, pelure, écoroe pelhissa, pelisse

pelhard,

pelher, pelletier, peaussier

pelharia, pelleterie

;

perpellicium)^ surplis ler;

;

pois,

;

;

sobrepelis [su-

;

;

pelar, corrompu Qn pialar, pe-

;

pelhardisa, -pacuYreté extrême;

-psiUYre

pelhairej pelharol, chiffonnier, brocanteur guenille

chiffon,

corrompu en

pelandral,

déguenillé

peau qui tient à

la

pelandrUy

;

pelhofa, écale de

;

viande cuite

;

peloira, peau

dégoûtante des viandes, peau flasque et pendante des vieilles gens,

femme de mauvaise

une terme de mépris, conduite

P. 76. latine «

indigne; espelar,

vie

peloirar, avoir ;

espelal,

etc.

— Po^Ze^ terme de tendresse Meus pullus passer

de l'inusité poZ^e

;

écorcher

(latin

minin eiitpolla (puUa)

(cf.

l'expression

dans Plaute). Diminutif pullus, jeune, petit), dont le fé-

;

en

»,

ol,

polie

:


202 »

«

Ne La

non la pouret omque pleier sempre non amast lo Deo menestier

ule cose

polie

».

(Cantilène de sainte Eulalie, v. 10).

Le langage populaire a conservé ce mot pour désiet, particulièrement^ une personne adonnée à la galanterie « une poulie »

gner une jeune femme^

:

En nom propre de personne P. 76.

:

Poulie.

Polon, baiser. Dérivé de pol (plus ordinaire-

ment pola, au Potonet,

féminin), lèvre,

diminutif;

mot

d'origine celtique.

polonar, pofonegear, faire des

baisers; potonaire, potonegeaire/ celui qui aime à faire

des baisers

ponnar, pour potnar eipotenar, bouder,

;

littéralement,

F. 94.

faire la lèvre

«

— Rabiscolar,

»

pour Rebiscolar (renforcement

de la syllabe initiale) et Eeviscolar, rétablir, ranimer, ravigoter, ragaillardir. Proprement,

«

revivre

» (du lat.

reviviscere]. «

Mas can

lo

mandamen

fon vengut, le peccatz reviviscolet

(Trad. de l'épïtre de Saint Paul

— Mais

quand

le

commandement

w.

aux Romains). fut venu, le

péché

ressuscita.

P. 30. ser,

Rambalhar, emmêler, et, au figuré, tracasse mêler mal à propos dans quelque Pour rembulhar et embulhar (voir Des Sau-

brouiller,

affaire.

vages, Dict.

languedocien -françois,

Embulhar ou embolhar du bas

latin

dj:^i.

embulicare (voir P, Malvezin,

legar). Dérivés

:

rambalia).

est le contracté de embolegar,

rambalhou

art.

eînbou-

ramôo?,filasse de chanvre


203

de rebut, mêlée et tortillée, dont on ne tire qu'une étoupe grossière. Au fig., embarras, tracas ramôa;

rambalhos, embarrassant, qui occupe beaucoup d'espace. Ètymologie incertaine. Ihaire, tracassier;

P. 50.

Sauvanirgues, écart de Saint- Privat-du-Dra_

gon, canton de La Voûte-Chilhac.

nom

Ce

est écrit Silvignanicus (pour

dans une charte de 906 Silvignanicus,.

.

.

quae

...villam

:

sita est

Silvimanicus)^

meam

quae vocatur pago ArvernicO; in

in

comitatu Brivatensi, in aice Cantiiiaco...

»

(Voir H. Do-

Cartulaire de Brioude, charte n" 294). D'Arbois de

niol,

Jubainviile le dérive du

même, du

cognomen

Silvianus, yenu^ lui-

gentilice Silvinius. (Voir Recherches sur la

propriété foncière, p. 577).

- Ronhar, ruminer

P. 124.

(lat.

ruminare). Pour roin-

niar, par métathèse.

P. 150.

Soler ou Solier, lieu exposé au soleil, au

haut d'une maison, terrasse au dessus haute «

;

et destiné

de

la

à faire sécher

maison

,

étage

,

le linge;

chambre

par extension, charpente, plateforme plancher

Un

jorn anet juguant per un solier antic.

»

(Vie de Saint Honorât).

— Un jour,

il diïls.

Jouant sur un plancher antique.

Ce mot était aussi dans «

Li barons a celle

Dieu

k'il le

(Li

femme

délivrast...

la

langue

d'oïl

:

fu en haut solier, et

si

»

Contes dou Roi Coustant TEmpereur).

prioit


— En bas

204

solerium, da latin solarium, dérivé de

latin,

sol, soleil.

P. 10.

Suon

Suan, sommeil, notamment à ChiPierre Malvezin dérive ce

et

Ihac (pron. souon et souan) celtique suoimqs.

mot d'un

est, d'ailleurs,

.

Le

somnus, sommeil,

latin

même, pour un archaïque svomnus.

lui

forme ouverte suan, employée à Chilhac^ suan et le sanscrit svapnas En ancien oc som.

Pour

la

l'irlandais

cf.

.

:

Dérivés nios

soniar

:

(lat.

somniosus)

{lat.

,

somniare), songer, rêver; so-

porté aux rêves

;

soniaire, qui

rêve.

Varzelta, cerisier. Du latin viridia, plantes P. 62. verdoyantes, dérivé de viridis, vert, et devenu verdia,

en bas latin

(cf.

verdiariuniy pour viridiarum), puis

verja, par chute du d ot allongement de Vi. L'adjonction de la désinence ella a amené, ensuite, le renforce-

ment de dz de la

la syllabe

initiale, et la simplification

du son

mutée en z dans

la gra-

lettre i, laquelle s'est

phie varzella. Yerjan, verger^ se trouve dans les textes des trou-

badours

:

«

Quan

la novella flors

par

el

verjan

(Bertran de Born,

— Quand «

la

E'

1

»..

Quan

la).

nouvelle fleur paraît au verger flor

brotoûon par verjan (B.

».

de Ventadour, Quant erba).

— Et les fleurs bourgeonnent dans

le

verger.


— 205 — Remarquons que la désinence ella n'est pas, ici, seulement diminutive; elle ajoute une idée de gentillesse, de grâce appliquée à certains végétaux en particulier. C'est ainsi que le peuplier, arbre remarquable par sa verdure, se

même

nomme, en Limagne,

varzella.

Pour

la

raison, sans doute, le cerisier a reçu^ chez nous,

ce nom.


ERRATA

Page

12, 2* ligne, lire

Page

15,

Page

28, 10« ligne, lire

Page

45, 21« ligne, lire

Page

76, «

que^ au lieu de qui.

:

dernière ligne,

lire

:

portant^ au lieu de portan.

au

sent,

:

lieu

trouveras^ au lieu de trouveras.

:

après la 16» ligne, ajouter

Ai

!

de

mon

paure pollet

Page

77, 13« ligne, lire

:

Page

77, 15* ligne, lire

:

Page

98, 18« ligne,

Page

118, 2« ligne, lire

lire

totas

lifi

Page

124,

l«"c

Page

188, art. espetar, lire

:

:

trobat

L'ai

lieu de

home, au

:

:

!

!

»

e.

fenestras.

sablas.

si

:

13'^

ligne, lire

au

le,

Page 118,

ligne, lire

de sant.

elh,

mas :

lieu

de homme.

au lieu de lis

eli.

pelas.

pettum au

lieu

de pellum.


ENSENHADOR

Pages Lo Covisc

2

Lo Conte delh Gealh IJna qu'ama pas lis flanhaires Coma ĂŽaguet Codaca per entrar

8

20

:

24

elh ceih

D'autres cops

Lo lop que T

32

monge

s'es fat

40

a lops et lops

46

.loaneton a l'aiga

64

Apres chantar, chau rire

58

Plen Pognet

64

Plaidejat per la maire

78

Lo Boc per

82

Gigonaires

la

peseira

86

!

La Rosa

92

De qu'ont chau pas

114

!

H8

Meitat Gealh

Un pauc d'ajuda La Caia Lis

et lo

fai

grand ben

Varrat

coches elh foniarer

Lo Faure A reveire! Notes ĂŠtymologiques

128

134 140

148 170 1

7B


Documents per l'estudi de la lenga occitana

51. Jules Gabriel DE VINOLS, Vocabulaires patois vellavien-français et français-patois vellavien (1891) 52. François Juste RAYNOUARD, Résumé de la grammaire romane (1838) 53. François Juste RAYNOUARD, Lexique roman - 1 (A-B) (1836) 54. François Juste RAYNOUARD, Lexique roman - 2 (C) (1836) 55. François Juste RAYNOUARD, Lexique roman - 3 (D-E) (1838) 56. François Juste RAYNOUARD, Lexique roman - 4 (F-K) (1838) 57. François Juste RAYNOUARD, Lexique roman - 5 (F-K) (1838) 58. François Juste RAYNOUARD, Lexique roman - 6 (F-K) (1838) 59. François Juste RAYNOUARD, Lexique roman - 7 (F-K) (1843) 60. François Juste RAYNOUARD, Lexique roman - 8 (F-K) (1843) 61. François Juste RAYNOUARD, Lexique Roman – 9 (Appendice) (1843) 62. François Juste RAYNOUARD, Lexique Roman – 10 (Index A-E) (1843) 63. François Juste RAYNOUARD, Lexique Roman – 11 (Index F-Z) (1843) 64. Général PLAZANET, Essai d'une carte des patois du midi (1913]) 65. Joseph ANGLADE, Notes languedociennes, in Revue des Langues Romanes (1900) 66. Léon LAMOUCHE, Note sur la classification des dialectes de la langue d'oc (1900) 67. François VIDAL, Étude sur les analogies linguistiques du roumain et du provençal (1885) 68. Émile de LAVELEYE, Histoire de la langue et de la littérature provençales (1845) 69. Joseph LHERMITTE dit SAVINIAN, Grammaire provençale (sous-dialecte rhodanien). Précis historique de la langue d'oc (1882) 70. Henri GILBERT, La covisada (1928)


Documents per l'estudi de la lenga occitana

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