memoire

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petit Guide du Web 2.0 a' l'uSaGe deS éditeurS

Sandie LEVENT Josselin MONEYRON Sous la direction de Laurent COUSIN

Université de Cery-Pontoise Master 2 IEC 2007-2008




Sommaire Introduction

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Avertissement Qu’est-ce que le web 2.0 ? Les nouveaux lecteurs Et le web 3.0 ?

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écrire en groupe sur internet La critique en ligne Un exemple de terreau à auteurs, la Cour d’Obéron L’étape suivante : le wiki

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Concevoir un site d’éditeur dédié à l’écriture en groupe

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L'éditeur face à la "sélection naturelle"

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Quelques systèmes de sélection naturelle Digg DeviantArt Amazon.com

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Utiliser la sélection naturelle pour découvrir les succès de demain Quelques exemples Le meilleur de deux mondes

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Le rôle d’éditeur mis à mal ?

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Des outils pour naviguer au coeur des contenus

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La préparation à l'ère de l'édition numérique 16 Un nouveau support de l’édition, le livre numérique Qu’est-ce que le format XML Avantages pour l’éditeur

L’édition numérique, un pont direct entre l’auteur et le lecteur Hypertexte Indexation Bibliographie Adaptation aux mal-voyants Les risques intellectuels de l’accessibilité

Impression... ou non ?

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Readers et e-paper : portabilité de la littérature numérique PRS-500 de Sony Kindle d’Amazon iLiad d’iRex Technologies 4

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V3 Hanlin de Jinke Electronics STAReBOOK de eRead Cybook de Bookeen

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Un manga électronique : pourquoi ?

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Impression à la demande Papier vs Bits : des supports différents pour des usages différents

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Gratuité, disponibilité : les nouvelles formes de distribution 26 Le modèle économique du web 2.0 (Partie I) Une opportunité économique : échapper aux dérives du système Le livre remis en liberté

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Le modèle économique du web 2.0 (Partie II) : La longue traîne Un risque pour le modèle actuel

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Le “mécénat” : un modèle hybride qui a déjà fait ses preuves In Rainbows The Ransom

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Conclusion temporaire

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Faire communiquer les lecteurs entre eux Le succès des librairies électroniques Amazon, un libraire 2.0 Folksonomie et librairie en ligne Personne n’aime entendre quelqu’un ne parler que de lui Le futur des relations presse Tout-le-monde adore parler de soi-même Des outils pour atteindre la longue traîne Et les libraires dans tout ça ?

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Un exemple d'éditeur 2.0

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Au bord des continents, éditeur breton d’illustrations fantastiques

Le site d’éditeur, nouvelle génération Un site communautaire Un site à thèmes La publication La diffusion Créer des ambassadeurs Des outils de communication automatisés Caractéristiques de ce nouvel éditeur

Editeur ou webmaster ?

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Conclusion

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Bibliographie commentée

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iNtroductioN

Avertissement Ce mémoire n’est pas un essai prospectiviste sur l’avenir du livre et de l’édition. Il se contente de décrire des outils existants mais encore peu usités, et parfois peu connus des professionnels du livre, pour en proposer des usages dans le cadre de l’édition. Il ne contient aucune prophétie et, plutôt que de déclarer que la conquête est achevée, dresse une carte d’objectifs potentiels et de moyens à mettre en œuvres pour les atteindre. Dans les années 1990, lorsqu’Internet s’est développé pour devenir le medium central que l’on connaît, son fonctionnement, sa philosophie, étaient inspirés de l’édition classique, et en particulier de la presse. Les sites internet étaient pensés comme des magazines, fournisseurs de contenu informatif ou culturel, où la position de l’éditeur et celle du lecteur étaient fixes, conformément à la tradition du livre. C’est ce qu’on appelle aujourd’hui le web 1.0, par opposition au nouvel internet apparu ces dernières années, le web 2.0. Le web 2.0 est né d’une prise de conscience, collective mais fragmentée, qu’Internet permettait des usages totalement nouveaux, aux antipodes du modèle traditionnel. En particulier, il a entièrement chamboulé la position des fournisseurs de contenus (les éditeurs, producteurs...) par rapport aux récepteurs (lecteurs, auditeurs, spectateurs...). Alors que le milieu de l’édition n’en finit plus de râler d’agonie (à défaut d’agoniser véritablement), il est temps pour les éditeurs de se demander s’ils n’ont pas, en retour, des leçons à retirer de l’incroyable engouement populaire pour cette nouvelle manière de vivre (et donc aussi de vivre la culture) en réseau.

Qu’est-ce que le web 2.0 ? Il est difficile de définir “exactement” ce qu’est le web 2.0, mais on considère généralement qu’il s’agit de l’ensemble des services en ligne visant à impliquer les internautes dans le réseau. Ce sont les sites qui permettent de participer à la production

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Et le web 3.0 ?

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duquel on évoluerait spatialement autant que sémantiquement. Née du succès de projets comme Second Life, mais au fond rêvée par tous les technophiles depuis les premiers écrits cyberpunks dans les années 80, cette seconde proposition pourrait sembler beaucoup moins probable, et pourtant, les premières promesses technologiques faites aux programmateurs à propos de l’Internet des années 2010 iraient plutôt dans ce sens.

Forcément, le terme web 2.0 est tellement entré dans les usages qu’on entend de plus en plus utiliser le terme de web 3.0. Ce n’est cependant pas encore un terme consensuel, puisqu’en fonction de celui qui l’emploie, il englobe deux réalités très différentes. D’un côté, il y a ceux qui appellent web 3.0 une nouvelle mouture d’internet parfaitement sémantique, qui serait donc basée sur une structuration forte de l’information, en particulier grâce au format XML (voir “Qu’est-ce que le format XML”, page XX). Entamée avec l’apparition des feuilles de styles, qui permettent de séparer en partie le fond de la forme, ce rêve de structuration est défendu par le W3C (World Wide Web Consortium) mais mis à mal par des applications qui n’ont pas été conçues avec cet idéal en tête (on pense en particulier au Javascript, qui intègre du code de mise en forme dans une page html, alors que cette dernière est censée être exclusivement dédiée au contenu).

En effet, l’Internet de ces prochaines années sera fortement modelé par la nouvelle mouture du format HTML, le HTML5. Hors, plutôt que se rapprocher du XML avec, par exemple, la possibilité de créer ses propres balises, il semblerait qu’il soit plus porté sur l’expérience utilisateur, avec des formats audios et vidéos natifs (et non plus dépendants de lecteurs comme Quicktime ou Flashplayer) et bien sûr... la 3D, par compatibilité avec OpenGL1.

1 Source : Web2Rules, “HTML5, Ecmascript4, RIA : ce qui va changer dans le web de 2010”, posté le 7 mars 2008

L’autre vision du web 3.0 n’a rien à voir puisqu’elle consiste en l’idée d’un web 3D, au sein

replacer le lecteur au centre de la chaîne du livre.

de contenu (Wikipedia, Flickr), qui permettent de personnaliser son espace et son expérience – pour parfois la partager (Digg, del.icio.us, NetVibes), mais surtout, ce sont tous ces sites qui permettent facilement de s’intégrer au réseau par la création de pages liées les unes aux autres comme une toile (MySpace, Facebook, et bien sûr tous les moteurs de blog). Le web 2.0, c’est l’Internet en tant que plate-forme1, au sens d’une série d’outils ouverts, conçus pour laisser les internautes construire eux-même le web de leurs rêves.

Les nouveaux lecteurs On entend souvent dire que les gens lisent de moins en moins depuis quelques décennies, mais il est indéniable que les internautes lisent énormément. De fait, l’évolution de ces dernières années est beaucoup plus positive que ce que l’on veut nous faire croire : ce n’est pas le nombre de lecteurs qui baisse, mais le nombre de gros lecteurs (plus de 20 livres par an). Mais dans un même temps, le nombre de non-lecteurs a lui aussi diminué, au profit des faibles lecteurs (au moins deux livres par an). Si l’on peut, dans l’univers des intellectuels, regretter que le nombre de gros lecteurs baisse, il faut bien avouer qu’à l’échelle de toute la population, les choses évoluent dans le bon sens. Les observations qui suivent

Lorsque l’on parle d’appliquer les leçons tirées de l’observation du web 2.0, il s’agit de développer un ensemble d’outils en ligne qui permettront de 1 O’REILLY Tim, “The web as platform” dans “What is Web 2.0 ? Design patterns and business models for the next generation of software”

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LeMonde.fr : un exemple de site d’éditeur cherchant à jouer sur la flexibilité, la réactivité, le partage d’informations... et les conseils qui en découlent ont aussi pour but d’inciter les éditeurs à redécouvrir leur lectorat, grâce, notamment, à l’échange que permet internet. L’édition 2.0 (pour employer, exceptionnellement, ce néologisme un peu artificiel), ce pourrait être avant tout des liens nouveaux qui se développent entre les auteurs, les éditeurs et les lecteurs. Le plan suit la chaîne de production habituelle : création (auteur), sélection et travail sur l’œuvre (éditeur), conception du produit final (préparateur), fabrication (imprimeur), distribution (diffuseur et distributeur) et promotion (service de communication/librairie).

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écrire eN Groupe Sur iNterNet Un des premiers conseils que l’on donne aux apprentis auteurs est de donner leur texte à lire autour d’eux avant de le proposer à un éditeur. Il relève en effet du bon sens pour un auteur de prendre en compte l’avis du plus grand nombre possible de lecteurs. Or, jusqu’à peu il fallait se contenter de son cercle familial et de quelques amis. Si un jeune auteur n’avait pas autour de lui de gros lecteurs, il était difficile pour lui d’obtenir des critiques vraiment constructives, et le texte qu’il envoyait à l’éditeur n’était pas aussi bon qu’il aurait pu. Il se pouvait aussi que, peu confiant, il n’ose pas montrer son travail à ses amis, où encore que ses amis n’osent pas émettre toutes les critiques qui leur venaient à l’esprit. Étant donné que les éditeurs, qui croulent sous les propositions, sont généralement enclins à une grande sévérité, le manque de critiques en amont pouvait condamner au refus des oeuvres non dénuées de qualités. Il est désormais possible de poster son texte en ligne, pour le soumettre à l’appréciation des autres.

recevoir les critiques de lecteurs plus ou moins expérimentés, peser les avis, effectuer des corrections... Parfois même, les lecteurs se mettent naturellement à débattre autour d’un point problématique, certains trouvant par exemple les phrases trop longues, d’autres estimant que la lenteur, le rythme languissant, fait partie intégrante du style de l’auteur. Très rapidement, celui qui fait l’objet des critiques découvre ses fautes récurrentes, les caractéristiques de son écriture... Mais l’activité communautaire est toujours à double sens. Ceux qui émettent les critiques aussi apprennent des débats, découvrent des vérités sur leur propre écriture grâce au regard qu’ils portent sur celle des autres. Ainsi l’apprenti-auteur ne vient pas que pour être lu, mais pour lire ce que les autres produisent et ce qui en est dit. Chacun se trouve impliqué dans le travail des autres. Or, comme on le verra dans la dernière partie, consacrée à la communication en ligne autour des titres, tous ceux qui participent à la conception d’une œuvre, même de manière minime, deviennent automatiquement des relais naturels, qui ne pourront s’empêcher de parler autour d’eux du texte qu’ils ont aidé à parachever, avant qu’il ne soit publié.

Cet outil n’est pas utile qu’aux auteurs sans éditeurs, mais aussi aux auteurs aguerris et aux éditeurs eux-même. Étant donné qu’une fois sélectionné, un texte fait toujours l’objet de nombreuses corrections, si la plupart des “erreurs” ont déjà été repérées et corrigées par une relecture en groupe, le travail de l’éditeur est d’autant facilité.

Un exemple de terreau à auteurs, la Cour d’Obéron La Cour d’Obéron est, à l’origine, le site d’une petite communauté francophone s’intéressant au jeu de rôle. Un jeu “amateur”, cependant, créé par quelques auteurs de cette communauté, a obtenu

La critique en ligne Sur des sites communautaires qui réunissent de nombreux auteurs, les jeunes créateurs peuvent 9


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un tel succès sur internet qu’il a fini par être publié sur papier (voir chapitre suivant pour des détails sur ce processus éditorial). Une fois disponible dans toutes les boutiques spécialisées, Te Deum pour un massacre (c’est le nom de ce jeu de cape et d’épée se déroulant pendant les guerres de religion) a inspiré de nouveaux fans, qui sont venus se greffer à la communauté existante. Ensemble, ils réfléchissent désormais à des suppléments possibles au jeu d’origine. La communauté organisant régulièrement des concours d’écriture, des scénarios pour Te Deum sont régulièrement sont écrits par ces “auteurs secondaires”. Après quelques modifications demandées par l’éditeur, ces scénarios sont publiés dans une sorte de magazine réunissant du matériel de jeu pour Te Deum. En 2008, quand l’éditeur décide de concevoir une seconde édition (dans le but d’intégrer les remarques faites par les fans sur le forum de la Cour d’Obéron), le principal auteur de la version originale s’est lancé dans d’autres projets et il n’a pas de temps à investir dans l’amélioration du contenu. L’éditeur décide alors, le plus naturellement du monde, de faire appel à ses “auteurs secondaires”. Pourquoi ne pas leur demander d’apporter les améliorations qui leurs semblent importantes. Personne ne se sent le courage d’entreprendre les recherches historiques nécessaires pour écrire plusieurs dizaines de pages, mais chacun est prêt à produire un petit texte sur ce qu’il maîtrise le mieux, ou sur un sujet qui l’intéresse et pour lequel il est prêt à acheter de la documentation. La communauté travaille ainsi en groupe sur un panorama de la France du XVIème siècle et sur un chapitre résumant la situation politique en Europe. L’un va écrire sur la Pologne et la Russie, un autre sur la péninsule Ibérique, ainsi

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que sur le Béarnais, dans lequel il habite et qu’il sait pouvoir décrire, grâce aux bibliothèques municipales qui regorgent de documentation sur l’histoire de la région. Plusieurs auteurs postent leur production sur le forum pour demander aux autres leur avis et ainsi améliorer leur proposition. C’est à l’éditeur que revient, à l’arrivée, la mission d’assurer la cohérence du tout, en demandant parfois quelques modifications.

L’étape suivante : le wiki L’exemple de la cour d’Obéron permet d’imaginer une nouvelle manière de travailler pour écrire des livres, autour d’un site où les auteurs se retrouveraient pour mettre en commun leur travail. Chacun posterait ses articles et attendrait des autres qu’ils émettent des critiques constructives, repèrent les coquilles ou les fautes de langue. Il serait cependant possible de rendre encore plus fluide cette chaîne de production, en permettant à tous les utilisateurs de modifier eux-même le texte qu’ils sont en train de lire. De cette manière, l’auteur ne perdrait pas de temps à corriger lui-même les fautes, elles se corrigeraient virtuellement d’elles-même aussitôt qu’elles seraient repérées. Bien sûr, pour beaucoup de monde, en particulier dans l’édition, il paraît inconcevable que tout le monde puisse toucher à l’œuvre d’un “Auteur”, car on imagine aisément cet article dans lequel il a mis toute son âme affreusement mutilé par des utilisateurs malveillants, cachés derrière l’anonymat protecteur de la navigation sur internet ; mais c’est une crainte qui a depuis longtemps été remise en cause par un des précurseurs du web 2.0, Ward Cunningham, inventeur du Wiki. 10


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Dans un wiki, tous les utilisateurs peuvent modifier toutes les pages (à l’exception de leur mise en forme). Ils peuvent donc, d’une part, apporter de petites modifications aux articles des autres, mais aussi ajouter, dans les articles au sujet similaire, des liens vers leur propre article, pour intégrer précisément leur travail dans l’économie globale du document en cours de production (voir Hypertexte, p.17). Pour empêcher que les utilisateurs abusent du pouvoir

qui leur est accordé, plusieurs outils existent. Tout d’abord, la plupart des moteurs de wiki enregistrent toutes les modifications dans une base de donnée, ce qui permet de rattraper les dégâts causés par une fausse manœuvre, et de repérer les saboteurs récurrents qui peuvent faire leur apparition. Si ces derniers sont trop nombreux ou trop dangereux, il est toujours possible de ne plus autoriser que les utilisateurs enregistrés à effectuer des modifications. Mais on gagne en tranquillité d’esprit ce que l’on perd en réactivité et en publicité (les deux principales qualités d’une démarche communautaire).

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sujets possibles et inimaginables, à condition qu’ils soient apolitiques, non-idéologiques, et respectent un certain nombre de règles morales courantes dans les sociétés occidentales. A première vue, ce concept ne devrait pas marcher : n’importe qui peut écrire n’importe quoi sur n’importe quel sujet, saboter le travail des autres pour le plaisir ou par ignorance... Et pourtant ça marche. Dans les faits, chacun apporte ses connaissances dans un domaine particulier qui le passionne ; les risques sont donc limités qu’un auteur parle sans savoir. Et lorsqu’il fait une erreur, d’autres spécialistes s’en rendent compte en corrigent. Parfois, plusieurs visions s’affrontent ; une discussion est alors ouverte sur le forum pour débattre et décider de la manière dont l’encyclopédie va rendre compte de ce conflit. Souvent, l’article principal indiquera que sur le sujet, deux écoles s’opposent, et proposera deux liens vers deux nouveaux articles présentant la théorie de chaque école. C’est ainsi que les utilisateurs peuvent se permettre d’avoir confiance en Wikipedia. Pourtant, les informations ne sont le plus souvent pas plus pertinentes que celles d’une encyclopédie classique. Ce qui fait le succès de Wikipedia, c’est le nombre d’entrées. Chaque défenseur d’une niche culturelle peut créer des articles sur des sujets extrêmement obscurs. Et c’est pour cette raison que Wikipédia est si utilisée : les internautes peuvent trouver des informations sur tout et n’importe quoi. Cette profusion n’est possible que grâce au nombre incroyable d’auteurs travaillant sur Wikipédia, et grâce à la surface littéralement infinie dont dispose l’encyclopédie en ligne par rapport à une encyclopédie classique. De la même manière, un site d’écriture en ligne ne produit pas que des livres qui ont un potentiel commercial, mais la diversité des productions offre à l’éditeur une vue d’ensemble de ce qui s’écrit loin des circuits traditionnels.

Comme toujours pour illustrer le fonctionnement d’un wiki et les possibilités étonnantes qui en découlent, il suffit de prendre l’exemple de Wikipedia. Cette “encyclopédie libre” laisse aux utilisateurs le soin de rédiger des articles sur tous les 11


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Concevoir un site d’éditeur dédié à l’écriture en groupe Pourtant, ces sites, s’ils sont amusants à observer, ne sont pas, aujourd’hui, un outil bien pratique pour les éditeurs qui souhaitent trouver leurs prochains ouvrages. En effet, ceux-ci sont obligés d’aller chercher dans cette masse informe de productions de qualité plus qu’inégale, et l’exercice reviendrait, pour celui qui aurait la témérité de l’entreprendre, à ramasser des milliers de feuilles volantes chez tous les volontaires possibles et inimaginable, pour ensuite faire le tri lui-même, non seulement entre le bon et le moins bon, mais entre les productions directement destinées au public et les notes au dos d’un ticket de caisse... Autant dire qu’il y perdrait une bonne partie de sa santé mentale. La solution sera alors pour l’éditeur de concevoir son propre site plutôt que de faire appel aux sites déjà existants. Prenons l’exemple d’un éditeur de sciences humaines, qui décide de créer un site d’écriture communautaire autour de ce sujet pour concevoir à plusieurs mains des ouvrages qu’il souhaite voir apparaître à son catalogue. Tout d’abord, l’éditeur aura tout à gagner à spécialiser son site dans un genre ou un sujet précis, en l’occurrence les science humaines. D’abord, parce que les sites de réseau sociaux sont en train d’évoluer avec succès vers des thématique forte ; Fubar, par exemple, se veut une sorte d’open bar virtuel où l’on vient assister à de petites représentations, mais surtout, où l’on vient rencontrer d’autres personnes à l’orientation sexuelle compatible. Sur le même modèle, quoique dans un registre un peu moins tendance, on peut imaginer un site qui se présenterait comme un café littéraire virtuel, où l’on vient, de la même manière, assister à des interventions d’auteur, participer à des débats, organiser de petites expositions, et pourquoi pas, s’offrir des bières virtuelles, comme le font déjà des milliers d’utilisateurs de Facebook et MySpace. Cette spécialisation aura aussi l’avantage d’attirer en priorité les passionnés, ce qui n’est pas négligeable lorsqu’on souhaite développer une communauté respectée. De la qualité de cette

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communauté dépendra la pertinence des textes produits, mais aussi la capacité du site à attirer l’attention de professionnels reconnus, qui n’avaient, dans un premier temps, pas daigné accorder d’attention au site. De plus, administrer un site à l’éclairage bien particulier, avec sûrement moins de trafic qu’un site généraliste et bien installé, donne à l’éditeur l’opportunité de développer une relation particulière avec les fidèles du site – qui sont le lectorat mais aussi pour certains les auteurs de sa collection – en exerçant sur leurs productions son métier d’éditeur, à savoir proposer, si nécessaire, corrections et améliorations. Grâce à cette position particulière au sein de la communauté, il aura la possibilité d’être à l’origine de projets, comme un ouvrage collectif autour d’un thème de son choix. Ensuite, l’éditeur pourra équiper son site de tous les outils nécessaire à un véritable site d’édition 2.0, que les sites d’écriture actuels n’ont pas développé, du fait qu’il sont conçus par des passionnés de littérature pas toujours technophiles et très souvent bénévoles. Ce pourrait être, par exemple, un flux rss qui réunirait des informations sur l’actualité des sciences humaines, et qui offrirait aux internautes un service secondaire non négligeable pour fidéliser les utilisateurs. Mais ce sera surtout ce nouveau type d’outil, caractéristique du web communautaire, qui permet de faire remonter à la surface les contenus les plus populaire, car ce genre d’outil peut, à terme, modifier en profondeur le travail des éditeurs.

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l'éditeur Face a' la "SélectioN Naturelle" Sur le web communautaire, les utilisateurs, nouvellement armés du pouvoir de proposer les contenus de leur choix, produisent une quantité phénoménale d’information, une masse parfaitement impossible à filtrer, à trier, par une instance unique. Mais ils sont aussi (sur les sites de contenu) capables de voter (de manière plus ou moins directe) pour leurs contenus favoris. Il suffit alors pour le moteur du site web 2.0 d’ordonner sa base de données pour faire remonter à la surface (c’est à dire en

première page) le contenu le plus populaire. C’est la capacité de ces sites à laisser leurs utilisateurs créer ensemble leur “Première Page” parfaite qui est à l’origine de leur succès, car cette première page a deux très importantes fonctions : tout d’abord, elle attire et recrute de nouveaux utilisateurs, et, surtout, elle bénéficie d’un trafic hallucinant qui rapporte les revenus publicitaires nécessaires pour continuer à faire tourner le site, et à étendre ses capacités. Les éditeurs peuvent-ils tirer parti, ou au moins s’inspirer, de ces outils de classements des productions ? Et, dans ce cas, en quoi consiste leur métier, si un algorithme se charge de pointer du doigt les succès plausibles ?

Quelques systèmes de sélection naturelle Digg Le site Digg.com est caractéristique du web 2.0 : non seulement il n’y a aucune équipe éditoriale derrière les articles postés, mais les utilisateurs eux-même ne font que proposer des liens vers des articles d’autres sites qui leur paraissent dignes d’intérêt. Une fois que le lien est posté vers un article, chaque membre enregistré peu le “Digger” en votant d’un simple clic. Automatiquement, l’article est alors envoyé à sa liste d’amis, qui peuvent ou non voter pour cet article à leur tour. Les articles qui reçoivent le plus de votes apparaissent ensuite en première page (par défaut, les plus récents favoris sont mis 13


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en avant, mais chaque utilisateur enregistré peut décider de ce qu’il veut voir apparaître sur SA page d’accueil).

DeviantArt DeviantArt est un site communautaire orienté sur l’art, qui permet aux créateurs en tout genre de poster leurs oeuvres en ligne. Chaque utilisateur a une page, qui contient un aperçu de sa galerie, un message d’accueil ou d’information, qui fonctionne comme un blog, un espace permettant aux autres de poster de petits commentaires, et surtout, un aperçu de sa galerie de favoris. La galerie de favoris contient toutes les œuvres d’autres utilisateur que le propriétaire de la page souhaite montrer ou simplement garder à portée de clic. Sur la page d’accueil sont présentés (par ligne) les dernières œuvres postées ; les œuvres les plus choisies comme “favori” ; les impressions les plus achetées (ce qui met forcément en avant les œuvres visuelles en 2D et écarte les sculptures, textes, etc...) ; les œuvres sélectionnées par le “comité éditorial” de DeviantArt. Le site tente avec plus ou moins de succès d’allier les principes du web 2.0 à une ligne éditoriale cohérente.

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Amazon.com Il ne faut pas oublier ce système de sélection extrêmement classique qui consiste à mettre en avant les meilleurs ventes (et que l’on retrouve par exemple dans les magasins FNAC). Il paraît presque vulgaire tant il est clairement orienté vers une logique de profit ; pourtant, couplé avec tous les autres outils proposés par la célèbre librairie en ligne, force est d’avouer que ce petit script est capable de faire des recommandations étonnamment pertinentes, notamment lorsqu’il ne sélectionne les meilleurs ventes qu’auprès des clients d’un ouvrage en particulier (“les clients ayant acheté cet article ont également acheté :”).

Utiliser la sélection naturelle pour découvrir les succès de demain Tous ces sites sont financés par la publicité (quand ils ont un modèle économique), ce qui signifie que le seul rôle des contenus les plus populaires est d’attirer des visiteurs. Pourtant, un site web 2.0 pris en charge par un éditeur pourrait servir à découvrir des talents, les créations les plus populaires ayant toutes les chances d’être des succès instantanés une fois publiés sur le réseau traditionnel.

Quelques exemples : DeviantArt, le grand site communautaire d’artistes, propose depuis quelques années un service d’impression à la demande (voir plus loin) permettant aux visiteurs de commander des cartes postales, des posters de toute taille, mais aussi des mugs, des tapis de souris ou encore des puzzles, d’ima14


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ges postées par des membres. Le créateur touche un pourcentage de chaque vente, et les artistes les plus populaires arrivent ainsi à percevoir un véritable salaire de DeviantArt. Il y a cependant deux gros défauts pour les gros vendeurs : d’une part, l’impression à la demande coûte beaucoup plus cher qu’un vrai tirage, ce qui oblige les artistes à vendre les impressions de formats classiques (carte postale, poster 60 cm) plus cher que nécessaire. Mais surtout, sans un vrai tirage et sans distributeur classique, impossible d’atterrir dans les libariries et le kiosques où les œuvres pourraient atteindre un public nouveau et bien plus nombreux. Les Editions du Matagot ont, elles, au contraire, parié sur un titre populaire en ligne pour sortir un livre de jeu de rôle en boutique. Te Deum pour un massacre était disponible gratuitement sur le site protocommunautaire de la Cour d’Obéron. En voyant son succès grandissant, l’éditeur a estimé, à raison, que le jeu avait le potentiel pour devenir un succès de librairie. Avec l’auteur, il a réfléchi à ce qui manquait à la version en ligne, à ce qui pouvait être amélioré au vu des commentaires, et finalement Te Deum est sorti dans les boutiques spécialisées. Et bien entendu, les 1000 premiers exemplaires (un chiffre énorme pour cet univers où l’on appelle bestsellers les jeux qui vendent 3000 pièces) ont été vendus à des fans de la version électronique. Une base de fans dont l’influence prévisible sur le reste des consommateurs a assuré le succès de ce jeu. A une échelle bien plus importante, on peut aussi citer l’exemple d’Ankama, société internet à l’origine du jeu en ligne Dofus, qui a réussi à se lancer dans l’édition grâce à sa communauté de fans (les premiers titres publiés étant soit des livres d’illustrations soit des bandes dessinées se

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déroulant dans l’univers du jeu). Le gros défaut de cette méthode est l’absence d’un véritable système de quantification du succès sur internet. L’éditeur de Te Deum ne pouvait que “ressentir” le potentiel de ce jeu à partir de ce qu’il entendait autour de lui. Il aurait suffi que son cercle de connaissances ne soit pas un panel très représentatif du lectorat pour que son estimation soit faussée, auquel cas le succès en librairie aurait été bien moindre (même si une communauté de fans, aussi petite soit-elle, peut faire des merveilles lorsque sa voix est adéquatement amplifiée).

Le meilleur de deux mondes On peut déjà deviner les contours d’un modèle “parfait”, qui mettrait en place les qualités de ces deux exemples, tout en évitant leurs défauts. C’est ce qu’ont réussi à faire les créateurs de LaFraise. com, un site pas exactement web 2.0, mais qui a su s’en inspirer pour devenir, comme dit leur slogan, un “éditeur de bien jolis T-shirts”. Sur Lafraise. com, n’importe qui peut proposer un motif pour un t-shirt, et voter pour les t-shirts qui lui plaisent dans la galerie “vote en cours”. Une fois qu’un motif a passé sept jours dans la galerie, il passe dans la galerie “vote terminés”. Les administrateurs du site viennent alors sélectionner dans cette galerie ceux qui seront imprimés, en fonction de leur popularité et de leur cohérence avec le reste de la collection. L’auteur du motif signe alors un contrat de session temporaire de droits, il touche automatiquement 1000 euros et le t-shirt est imprimé à un tirage limité de 500 exemplaires. Grâce à des accords, les T-shirts apparaissent dans des boutiques partenaires. L’exemple de ce site est intéressant pour deux raisons : il montre d’abord comment les principes du web 2.0 peuvent être appliqués à l’édition en facilitant la proposition de projets et le sondage d’opinion. Mais le choix fait par les administrateurs de toujours effectuer eux-même la sélection des t-shirts qui seront imprimés, plutôt que d’obéir aveuglément aux recommandations du logiciel de notation, soulève aussi une question très importante : quelles 15


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fonctions reste-t-il à l’éditeur si les internautes choisissent eux-même, par vote, ce qu’ils veulent voir édité ?

Le rôle d’éditeur mis à mal ? Même si elle a réussi à mettre en place un système communautaire efficace de proposition et notation de manuscrits, une maison d’édition aura toujours besoin d’éditeurs, et ce pour deux raisons principales. Tout d’abord, il faut savoir que la sélection naturelle est mise à mal par la dimension sociale des sites web 2.0. En effet, la polémique a frappé le site Digg, mais est aussi bien connue des membres de DeviantArt : au boût d’un certain temps, les productions qui remontent à la surface ne sont plus les meilleures, mais celles des utilisateurs ayant le plus “d’amis”, en gros le réseau le plus étendu. Digg a essayé de combattre cet état de fait en modifiant l’algorithme qui attribue les notes aux articles, mais cela n’a permis que de brider légèrement les extrêmes, sans véritablement sauver le système. Il s’agit donc d’avoir une équipe éditoriale capable de faire un tri dans les titres les plus populaires, et surtout, d’aller fouiller dans la masse, pour dénicher les chefs-d’œuvre qui n’ont pas réussi à retenir l’attention du plus grand nombre. En effet, il suffit de passer rapidement sur la page d’accueil d’un de ces sites pour comprendre qu’il manque quelque-chose. En ne sélectionnant que des sujets et des styles populaires, le risque saute aux yeux que la forme dominante engloutisse toutes les autres. C’est peu gênant sur les sites d’information, mais c’est beaucoup plus dérangeant de voir par exemple la première page de DeviantArt, où les productions mettant en scène des personnages du manga Naruto ou des romans Harry Potter monopolisent régulièrement la section “Favoris”. Les administrateurs de Lafraise.com ont bien compris ce risque d’enfermement dans des clichés culturels, et c’est pourquoi, au lieu de produire sans distinction

les designs qui ont reçu les meilleurs scores, ils les sélectionnent un à un, en s’inspirant des scores, mais sans perdre de vue la ligne éditoriale de chaque collection (Lafraise Classic et Lafraise Mad’). Le rôle de l’éditeur classique est de trouver l’équilibre entre les titres qui ont un potentiel commercial et ceux qui en ont moins mais qui semblent mériter d’être publiés. Dans un contexte où les œuvres les plus populaires se sélectionnent d’ellesmême, le métier d’éditeur revient presque exclusivement à savoir combattre le courant pour défendre les œuvres qui en ont besoin. C’est ce qu’essaient de faire les administrateurs de DeviantArt avec la section “Daily Deviation”, pour laquelle ils sélectionnent eux-même des œuvres leur paraissant dignes d’un grand intérêt mais qui n’ont pas réussi à atteindre la première page. C’est la condition Sine Qua None pour qu’une maison ayant pris le virage de l’édition communautaire puisse garder sa légitimité.

Des outils pour naviguer au coeur des contenus La sélection naturelle est souvent couplée, sur des sites comme FlickR, à un système de “Tags”. Ce système, appelé folksonomie, s’oppose au système de taxonomie. La taxonomie consiste à classer en rangeant dans des catégories et sous catégories. Cette méthode traditionnelle, imposée par la nécessité, dans le monde concret, de ranger sur des étagères, est d’une rigidité terrifiante dès lors que l’on parle 16


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de livres. Chaque titre devrait alors entrer dans une sous-catégorie de telle catégorie, au lieu de glisser d’un genre à l’autre au gré des envies de son auteur. On verra d’ailleurs au dernier chapitre comment la librairie en ligne gagne à pouvoir échapper au rangement par genre. Dans le système folksonomique, le créateur attribut à chacune de ses productions un certain nombre de tags. Ce seront, par exemple, “enfance”, “psychanalyse”, “Europe” et contes” pour définir un article sur La Psychanalyse des contes de fée de Bettleheim. En cliquant sur ces tags au bas de l’article, le lecteur pour accéder à d’autres articles (éventuellement classés par popularité) traitant des contes, ou traitant de l’enfance, ce qui permet de naviguer librement d’un article à l’autre en conservant une grande cohérence.

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de favoris une œuvre d’un autre membre qui nous parle aussi. L’internaute se déplace alors au sein de ce site labyrinthique en sautant, en quelque sorte, d’une recommandation à l’autre. Pour notre éditeur de science humaines, il s’agirait d’installer sur son site un système efficace de renvoi vers ses sources. Il pourrait sans difficultés remonter jusqu’aux auteurs, pas forcément les plus appréciés du “grand public”, mais les plus cités par les auteurs que lui-même apprécie. Il verrait même se dessiner des liens entre certains d’auteurs, et à partir de là, pourrait concevoir des ouvrages, voire des collections, autour de groupes d’auteurs unis par une vision commune.

Même le système de sélection naturelle luimême peut être utilisé autrement. Sur DeviantArt, le principe des Favoris sert plus à naviguer d’un artiste à l’autre qu’à faire remonter le contenu de qualité. En effet, lorsque l’on apprécie le travail d’un membre, il arrive souvent qu’on aperçoive dans sa fenêtre

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la préparatioN a' l'e're de l'éditioN NumériQue Alors que les réseaux sociaux répondent au besoin d’appartenance des êtres humains, une autre sorte de web 2.0 existe, qui répond à un autre besoin, celui de se démarquer, de personnaliser un espace traditionnellement statique. Ce sont les portails, comme Netvibes, iGoogle ou le Live.com de Microsoft, qui permettent aux internautes de se fabriquer la page d’accueil parfaite. Cette logique peut-elle s’étendre aux livres qu’ils lisent ?

que des conversions d’un fichier XML et d’un fichier de mise en forme dans un format pensé pour la consultation sur tel ou tel support. Dans le cas de l’édition électronique, une manière de répondre au besoin de personnalisation des internautes serait alors de laisser le lecteur choisir parmi plusieurs mises en forme, un peu comme il a

Qu’est-ce que le format XML Le format XML est un format de structuration de l’information, issu du SGML, tout comme le HTML utilisé pour coder les pages web. Il consiste en la création de balises enserrant du contenu, ces balises définissant le type du contenu.

Un nouveau support de l’édition, le livre numérique

Ex : <titre>Victor Hugo</titre>

La préparation consiste à prendre le texte brut, tel que fournit par l’éditeur, pour penser sa mise en forme et gérer l’impression. Ce métier est en train d’évoluer en embrassant de nouvelles technologies, en particulier grâce à l’usage du XML.

<auteur>Jacques Bondellat</auteur> <éditeur>Fayard</éditeur> Une DTD (Description Type de Document) est un fichier indiquant les balises qu’il est possible d’utiliser et dans quelles conditions. Elle assure la cohérence du format entre les différents maillons d’une chaîne d’informations, c’est à dire dans le cadre de l’édition, entre les éditeurs, les compositeurs, les diffuseurs, les distributeurs et les libraires. Ce format étant compatible tant avec l’édition en ligne qu’avec la prépresse (on peut convertir le fichier XML vers n’importe quel format propriétaire habituellement utilisé en édition, le PDF en tête), et n’étant lui-même pas propriétaire, il a toutes les qualités requises pour devenir le format commun de toute l’industrie. Un pas de géant vers l’accessibilité et l’interopérabilité.

En effet, le temps, l’énergie (et donc l’argent...) que l’emploi d’un fichier numérique, au format ouvert et partagé, permet d’économiser, est impressionnant. En effet, un fichier XML est un livre complet, auquel il ne manque plus qu’une mise en forme pour atterrir sur un support quelconque. Pour fabriquer plusieurs version d’un même livre, par exemple une édition normale, une édition luxe, une édition poche et une édition au format électronique, il suffit de créer plusieurs instructions de mise en forme et de les appliquer au même fichier d’origine. C’est déjà le cas des formats utilisés dans l’édition électronique : Mobipocket, PDF, etc... Tous ne sont 18


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déjà parfois la possibilité d’acheter une version de luxe ou de poche, ou de sélectionner une ambiance parmi d’autres sur un site internet. On pourrait même aller jusqu’à lui fournir des outils en ligne pour mettre lui-même son document en page selon ses goûts. Après tout, on sait (grâce au succès du Web 2.0 mais aussi de la « déco » et du tuning) que tout-le-monde aujourd’hui apprécie de pouvoir personnaliser ce qui lui appartient.

Avantages pour l’éditeur Les fichiers numériques conçus par les éditeurs peuvent contenir le livre lui-même, mais ils peuvent aussi contenir de nombreuses autres informations secondaires, invisibles sous certaines configurations mais consultables sous d’autres, comme la date de sortie, l’adresse d’une personne à contacter chez l’éditeur ou chez le distributeur... Pour l’instant, de nombreux outils de stockage des informations existent chez différents intervenants de la chaîne du livre. En particulier, la base de donnée des distributeurs est un pont absolument essentiel entre les libraires et les éditeurs. Mais ces outils se caractérisent par leur effroyable manque d’interopérabilité. La base de donnée utilisée par l’éditeur sur son site internet n’est en aucun cas liée à celle du distributeur, qui n’a elle-même rien à voir avec le catalogue d’une librairie qui proposerait d’acheter ou de réserver en ligne. Les informations se répètent mais ne se déplacent pas. Il faut à chaque fois entrer les informations sur des supports différents, et plus la tâche est répétée, plus les chances sont grandes que des erreurs se glissent dans la base de donnée.

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sionnels employés par les différents maillons de la chaîne sachent tous interpréter un fichier XML à leur manière. L’éditeur aurait alors pour mission de concevoir un fichier XML avec toutes les informations nécessaires à la commercialisation du livre, pour que tous les intéressés reçoivent automatiquement dans leur base les informations qui les intéressent particulièrement. Et si le fichier pouvait contenir le livre lui-même, les libraires auraient l’opportunité, au moment où ils reçoivent les informations, de feuilleter les ouvrages, de choisir plus facilement ce qui les intéresse... Ce que les technologies de l’information peuvent apporter à l’édition dans ce cas, c’est un souci d’interopérabilité, et donc de fluidité.

L’édition numérique, un pont direct entre l’auteur et le lecteur Il convient de se détacher de l’image du livre imprimé. L’encre sur le papier, si elle nous paraît encore empreinte d’une grande poésie, est aussi incroyablement statique, réussissant à enchaîner à son support un imaginaire que l’on conçoit plutôt aérien. En pensant le livre avant tout comme une masse d’information virtuelle (ce qu’elle est, une simple organisation de pensées mises en forme par le langage), on comprend que le plus important, dans de nombreux cas, est de rendre facilement accessible le fond. Grâce au numérique, on s’en approche de plus en plus. Voici une petite liste d’outils qui permettent, en s’affranchissant du papier, d’abattre des frontières centenaires et de rendre la pensée plus accessible.

Il suffirait pourtant que les logiciels profes-

Sur Wikipedia : un concept non maîtrisé gêne la lecture ? Il suffit d’aller en voir la définition, avant de revenir - ou non - poursuivre la lecture. 19


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Hypertexte

Bibliographie

derrière ce mot à la sonorité emphatique se cache le concept fondateur du World Wide Web, la capacité de sauter en un clic d’une section d’un texte, à une autre section, ou à un autre texte. Sur internet, on ne lit plus de manière linéaire, et ce n’est pas autant une révolution que ne le pensent ses plus fervents défenseurs et ses plus violents détracteurs, car l’invention du codex (donc du livre) avait déjà en son temps remplacé le rouleau très exactement parce qu’il permettait de plus facilement rejoindre un point précis du texte. Le lien hypertexte ne fait que rendre encore plus facile cette navigation naturelle. En permettant aux liens du sommaire de mener directement au passage visé, il risque à terme de tout simplement rendre obsolète la numérotation des pages, et peut-être la page elle-même. En permettant de sauter de paragraphe en paragraphe, non plus selon un chemin tout tracé mais en fonction des associations qui se créent dans l’esprit du lecteur, elles nous libèrent du modèle Kantien “thèse-antithèse-synthèse” pour nous laisser vagabonder dans la connaissance. Si l’on considère qu’on apprend toujours mieux quand on a envie de savoir, alors l’hypertexte est la meilleur manière d’aborder l’univers de la connaissance.

Ce dernier point ne concerne pas exactement l’accès au texte, mais son utilisation secondaire. Une bibliographie est assez compliquée à rédiger. Or, avec le numérique, un livre peut contenir, de manière invisible, sa notice bibliographique. On pourrait même imaginer sur certains programmes spécialisés dans l’échange d’idées que, lorsque l’on effectue un copier-coller, la notice bibliographique est automatiquement importée. Plus intéressant encore pour ceux qui font des recherches : on peut imaginer sur une plate-forme de textes en ligne, que chaque entrée d’une bibliographie soit un lien vers l’ouvrage cité, et inversement, comme c’est déjà le cas sur GoogleBooks, que soient listés les ouvrages qui citent celui-ci.

Indexation Qui n’a jamais été frustré en feuilletant un index de ne pas trouver un terme ou un nom dont est pourtant certain qu’il se cache quelque part à l’intérieur de l’ouvrage ? Là, encore, si l’utilité de cet outil est reconnue depuis des siècles, force est d’avouer que l’index n’existe dans un livre de papier que sous sa forme la plus primitive. Grâce à l’édition numérique, il est désormais possible de retrouver un terme dans un ouvrage de plusieurs centaines de pages en quelques secondes, même s’il n’apparaît qu’une fois, grâce à l’outil recherche, qui se généralise sur les sites internet et dans les logiciels de lecture d’e-books (l’Acrobat Reader d’Adobe en tête). L’information n’a, pour ainsi dire, jamais été aussi facile à atteindre.

Adaptation aux mal-voyants Une des règles les plus importantes du webdesign est celle de l’accessibilité. En particulier, il est très mauvais, selon les standards, d’attribuer au texte une taille fixe. Il faut penser aux lecteurs mal voyants qui ont besoin d’agrandir le texte pour pouvoir le lire confortablement. Voilà une question que les typographes de l’édition classique font bien attention de ne jamais se poser, car il n’y a aucune solution dès lors que le livre est imprimé. Grâce à l’édition numérique, il est désormais possible de changer à volonté la taille des caractère pour améliorer la lisibilité, que ce soit parce que l’on souffre de problèmes de vision ou simplement parce que l’on préfère les colonnes courtes... Encore plus fascinant, certains logiciels, comme Microsoft Reader, proposent de lire à haute voix des textes numérisés. Ainsi, n’importe quel ouvrage numérisé devient disponible pour les non-voyants.

Les risques intellectuels de l’accessibilité On ne peut, à première vue, que se réjouir de l’accessibilité permise par l’édition numérique, mais 20


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il faut prendre conscience d’un défaut pointé du doigt par nombre d’intellectuels de toutes origines : si faciliter la lecture fragmentée permet d’inciter les moins lettrés à se confronter, sans se laisser impressionner, à des domaines de la connaissance parfois intimidants, il est à craindre, dans le cas des textes argumentaires (et l’on pense immédiatement à toute la “propagande” que les différents bords politiques produisent en permanence), que les lecteurs aillent de plus en plus vite à l’idée principale, sans s’ennuyer à suivre le processus de déduction, et donc sans pouvoir réellement juger de la pertinence de la thèse exprimée.

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certains cas ; ils n’ont pas forcément besoin d’être systématiquement intégrés en grand nombre dans toutes les pages. D’une part, parce qu’une trop forte abondance de liens gêne la lecture. D’autre part, parce qu’ils peuvent aussi détourner l’attention du lecteur du flux naturel du texte. Parfois, il conviendra de limiter les liens à quelques références courtes et aux très linéaires “< Précédent” et “Suivant >”. C’est une mission nouvelle pour l’éditeur numérique que de décider du meilleur équilibre entre liberté et cohérence au sein d’un texte long.

Les éditeurs futurs auront cette responsabilité : savoir remettre en cause les anciens et nouveaux modèles pour permettre aux lecteurs d’avoir un meilleur accès à la conaissance, mais sans que l’accessibilité ne nuise au développement de l’esprit critique. Enregistrer les informations sans les comprendre n’est pas savoir, même s’il est aisé de le croire. On a vu l’intérêt des liens hypertextes dans

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impreSSioN... ou NoN ?

“Pendant des années, il a été difficile de partager de l’information. La Presse à imprimer fut un grand bond vers un plus grand partage de l’information, mais nous attendons depuis longtemps qu’apparaisse une méthode plus efficace pour partager l’information que de la transporter de ci de là. L’impression sur papier est un support embarrassant, parce que pour distribuer l’information, il faut déplacer le papier, et beaucoup de papier prend de la place, pèse lourd, et coûte cher à diffuser.” Joseph Licklider, en 1972, à propos du concept de réseau, cité dans le “Steal this Film – Part II”, moyen métrage de la League of Noble Peers.

On vient de voir la nouvelle liberté de conception offerte au préparateur et au lecteur par l’édition numérique, mais reste à savoir en quoi consiste cette liberté du point de vue de la consultation. Qu’il puisse décider, lorsqu’il achète un livre, s’il souhaite le consulter sur son ordinateur, sur un support de lecture transportable, ou s’il aimerait recevoir une version imprimée, c’est très bien, mais pourquoi l’un plutôt que l’autre ?

Readers et e-paper : portabilité de la littérature numérique Aujourd’hui, lorsque l’on parle d’édition numérique, les gens s’imaginent devoir lire 300 pages sur un écran d’ordinateur, et les yeux leur piquent rien que d’y penser. Et ils éclatent de rire en se voyant transporter leur ordinateur de bureau aux toilettes ou dans le métro ! Bien entendu, aucun des acteurs de l’édition numérique n’imaginerait le moindre avenir à ce médium si les lecteurs étaient censés utiliser leur ordinateur de bureau ou même leur portable comme support de lecture. En réalité, il existe déjà sur le marché plusieurs supports révolutionnaires qui ne manqueront pas de s’imposer dans les années qui viennent, même s’ils sont, pour l’instant, chers et encore basiques dans leur fonctionnement (comme les téléphones portables d’il y a dix ans). Ils utilisent pratiquement tous la technologie dite de l’e-ink pour poser, sur une tablette un peu plus grande qu’un livre de poche, un écran e-paper dont la composition va énormément améliorer la lecture sur écran. En effet, la technologie e-ink, contrairement au LCD de nos ordinateurs qui marche par rétro-éclairage, ne produit pas de lumière, et ne fatigue donc pas les yeux. Ce sont de microscopiques capsules noires et blanches qui apparaissent et disparaissent pour représenter une image ou un texte, un peu comme sur une ardoise magique. L’écran est réfléchissant, comme un papier en pâte de bois, c’est-à-dire que nous percevons les couleurs telles que la lumière naturelle nous les renvoie. Lire sur ces écrans revient 22


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exactement au même que lire sur de papier, à l’exception du contraste, qui est souvent meilleur que sur du papier journal, mais jamais aussi bon qu’un vrai papier à livre. Cette technologie ne consommant d’énergie qu’au moment d’afficher une nouvelle page, leur autonomie n’est pas comptée en heures mais en pages, habituellement 10.000. De quoi tenir quelque temps.

PRS-500 de Sony

Le reader de Sony a été mis en vente fin 2006 aux Etats-Unis, et son succès est tel que son arrivée en France est prévue pour septembre 2008, date à laquelle il sera proposé à la vente dans les FNAC2. Sa principale qualité est sa technologie e-paper d’une qualité admirable, spécialement dans le rendu des photos noir et blanc, loué par tous les testeurs. Ni 2 Cette nouvelle apporte d’ailleurs un éclairage nouveau sur la position du président de la FNAC Denis Olivennes, dans le rapport qu’il a rendu fin 2007 au gouvernement. En effet, la tolérance qu’il affichait alors à l’égard des pirates détonnait avec sa posture de défenseur de la propriété intellectuelle et artistique, mais il semble en fait simplement que la FNAC est en train d’appliquer à la librairie le modèle économique qu’elle a déjà mis en place pour la musique : peu importe les ventes d’oeuvres quand la vente de lecteurs rapporte...

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très cher (350$), ni très lourd (255g), il possède un écran de taille moyenne 6 pouces, qui en font un produit de référence, à partir duquel juger les autres.

Kindle d’Amazon Le Kindle est la nouvelle étape du géant américain dans sa politique de transformation de la librairie. Couplé à une offre impressionnante (88.000 titres lors de son lancement, contre 10.000 pour le PRS), il est d’ores et déjà un succès aux Etats-Unis, et pourrait ne pas tarder à débarquer sur Amazon.fr. Sa caractéristique principale est d’être connecté à un réseau spécial, par wifi, qui permet de télécharger à tous moments près de 100.000 livres électroniques sur Amazon.com, ainsi que plusieurs titres de presse et autres blogs. Mais cette qualité est aussi son défaut puisqu’il coûte 10cents d’utiliser le réseau pour pouvoir récupérer un fichier sur son ordinateur. Pour un livre complet, c’est raisonnable, mais ça l’est moins quand il s’agit de mettre des images. La création d’un réseau équivalent en Europe est aussi la condition technique qui retarde l’arrivée de ce reader de bonne qualité sur le marché français.

iLiad d’iRex Technologies Lourd (390g) et cher, (649 euros), l’iLiad n’est pas un gadget pour bibliophiles. Ce reader, commercialisé en Europe depuis début 2006, a été pensé comme un outil de travail. Avec un écran très grand (122x165mm), le Wifi intégré et surtout, un écran tactile avec stylet pour annoter des passages, il a vocation à être utilisé prioritairement par les professionnels qui utilisent beaucoup de documentation, et dans un second temps aux élèves, comme cartable électronique. 23


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culture nous est parfaitement étrangère, et il est très souvent nécessaire d’introduire, entre les cases, des notes explicatives qui permettent au lecteur de comprendre de quoi les personnages parlent, ou à quoi ils font référence (qu’il s’agisse des Love Hotels ou de philosophie bouddhiste). Dans certains cas, la note mériterait d’être très longue, mais c’est parfaitement impossible à cause du cruel manque de place. Évidemment, la possibilité de mettre cette longue note dans une fenêtre secondaire permettrait de réduire la référence sur la page à un minuscule lien, et donc d’améliorer l’expérience du lecteur sur tous les fronts. La page serait vierge de tout élément extérieur à l’histoire, à l’exception d’une petite astérisque. La survoler avec la souris (sur un ordinateur) ou l’atteindre avec les touches de navigation (sur un PDA ou un Reader), ouvrirait une petite fenêtre, superposée par-dessus la page, contenant une vrai note explicative à caractère plus didactique que seulement informatif. Du fait aussi que le manga n’est pas pensé comme un objet livre, mais avant tout comme un contenu, imprimé sur le support le meilleur marché possible pour toucher le très grand public.

Un manga électronique : pourquoi ? S’il y a bien une forme de livre qui ne semble pas avoir grand chose à gagner d’être numérisée, c’est la bande dessinée : non seulement il n’est pas possible de changer la mise en page sans mutiler l’œuvre, mais en plus, de part sa dimension artistique, il est très agréable de pouvoir tenir l’objet lui-même entre ses mains.

Un seul problème : aujourd’hui, la lecture de bande dessinée sur les readers ne se fait pas au sein d’un fichier de type PDF mais sur des images, ce qui rend le chargement fastidieux et interdit au lecteur la sélection de texte, et à l’éditeur, d’intégrer des notes...

Sauf qu’un manga n’est pas une bande dessinée comme les autres. Elle vient d’un pays dont la 24


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V3 Hanlin de Jinke Electronics Comme l’indique Lorenzo Soccavo3, si les japonais technophiles s’orientent vers la lecture sur téléphone portable, les chinois, qui ont une forte culture du livre, font beaucoup de recherches sur les readers et sur le e-paper. Les premiers nés des industries de l’empire du milieu appartiennent à la gamme Hanlin, qui a déjà connu plusieurs modèles. Le dernier en date, le V3, est un modèle de classicisme, proche du PRS-500 tant au niveau des caractéristiques physiques que techniques.

STAReBOOK de eRead Concurrent en Chine du V3 d’Hanlin, le STAReBOOK a été développé par la chaîne de librairie du même nom, et se place sur un créneau légèrement différent en ciblant les amateurs de mangas. Pourtant, grâce à son prix dans la moyenne (420$), son écran et son autonomie classiques, mais son poids le plus bas (176g), son format véritablement de poche (188x118mm), son extrême simplicité et sa rapidité encore plus impressionnante que l’hyper-technologique iLiad, il possède les arguments nécessaires pour devenir leader du marché. Il

3 Gutenberg 2.0, le futur du livre, M21 éditions

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a d’ailleurs servi d’inspiration pour le Kindle.

Cybook de Bookeen Le Cybook, originellement développé par Cytale, fut à une époque le fleuron de la recherche française sur les readers. Plombé par l’échec finan-

cier de Cytale, il a cependant disparu un temps du paysage, avant que soit créé Bookeen, entreprise plus prudente déterminée à relancer le produit sur un marché plus accueillant et sans reproduire les erreurs du passé. Le nouveau Cybook gen3 propose des caractéristiques physiques très proches du STAReBOOK (même taille, même poids, et sur le site de Bookeen, on peut même le voir afficher une page de manga...), mais il est un peu moins puissant et a un peu moins d’autonomie (8.000 pages). Il est cependant disponible en France, pour 350 euros sans accessoires. Tous ces readers ne sont pas dénués de défauts, puisque la plupart utilisent des formats de lecture propriétaires, une pratique qui avait déjà été unanimement critiquée pour la musique ou les images, mais ils lisent aussi la plupart des formats standards : TXT, DOC, PDF, etc... Bien entendu, avec le e-paper, le livre perd une de ses fonctions sociales : montrer grâce à ses lectures, et donc surtout grâce à la couverture des livres, 25


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à quel groupe culturel ou social on appartient. La couverture reconnaissable des titres de la collection blanche de Gallimard ou le duo violet/argent de la collection PocketSF ont tous deux pour but de placer, tacitement, le lecteur au sein d’un groupe. Si l’on se met à lire des livres différents sur des supports équivalents, il faudra pour remplacer la couverture posséder et montrer des readers marqués culturellement. Le support deviendra inévitablement plus porteur du sentiment d’appartenance que le contenu, comme on peut le voir avec l’exemple frappant et symptomatique de l’iPod d’Apple. Il arrivera sûrement un jour, comme pour les lecteurs mp3, où une marque aura réussi à donner à son reader une aura “tendance” et où l’on pourra lire Les Bienveillantes, Harry Potter, American Psycho ou Le Cycle de Fondation sans avoir à se soucier de l’avis des autres sur ses goûts, mais en exprimant toujours son appartenance à un groupe plus ou moins clair, grâce à l’image véhiculée par son reader. Il est difficile de décider sans le moindre recul si ce phénomène est à craindre ou non, mais il y a peu de chance, dans tous les cas, que nos sociétés de consommation y échappent.

Impression à la demande Bien entendu, il a beaucoup été question ici de l’édition numérique dans ce qu’elle a de plus froid, avec des livres à cliquer, en plastique et en silice, mais dans les livres du futurs, il n’y a pas que les circuits qui sont imprimés. grâce à l’édition numérique, curieusement, on peut aussi redonner aux gens l’envie de posséder des livres qu’ils puissent réellement apprécier comme des objets. En effet, une des bases de l’édition numérique consiste à séparer le texte, c’est-à-dire le fond, de sa mise en page, de son environnement, c’est à dire de la forme. Un éditeur numérique vend donc du fond, mais il peut le vendre encore mieux en proposant au lecteur de se construire la forme de ses rêves, l’objet-livre parfait à ses yeux. Le XML, langage de l’édition numérique, est aussi celui de nombreux formats d’impression, en particulier le PDF d’Adobe. Il est donc possible de

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fournir au consommateur des outils de mise en forme sur le site de l’éditeur pour le laisser mettre en forme son livre avant de le commander. Comment cela fonctionnerait-il dans les faits ? Sur la page de commande, l’internaute choisit des paramètres : format poche, roman, A4, etc ; couverture dure ou souple ; taille et style des polices ; taille des marges ; placement des images. Le site effectue en temps réel les modifications sur un fichier de mise en page et, quand l’internaute est satisfait du résultat, il le valide et n’a plus qu’à laisser faire. Le fichier XML du livre, grâce aux informations contenues dans le fichier de mise en page modifié par l’internaute, est converti en un fichier PDF. Ce fichier PDF est ensuite envoyé tel quel à une compagnie d’impression à la demande, qui produit un exemplaire unique, parfaitement conforme aux attentes du lecteur. Les compagnies d’impression à la demande utilisent de nouvelles technologies d’impression numérique qui permettent de produire des livres en très petite quantité sans que le prix devienne exorbitant (l’auteur italien d’avant-garde Nanni Balestrini a d’ailleurs profité de cette possibilité pour publier Tristano, un roman ré-écrit 2000 fois – à l’aide d’un ordinateur, et dont chacun des 2000 exemplaires imprimés est unique). L’impression reste plus cher à l’unité que lors d’un gros tirage, mais dans ce système, il n’y a ni distributeur ni libraire, à qui reviennent deux tiers du prix d’un livre. Même en comptant les frais de port, il y a des chances que le client paye moins et que l’éditeur reçoive plus que dans le système actuel.

Papier vs Bits : des supports différents pour des usages différents Au-delà des petites communautés technophiles, peu de gens croient à la disparition totale du support papier. Mais ceux qui estiment que le numérique n’a aucune chance, que le plaisir du livre tient à l’odeur du papier, confondent les qualités du support et du contenu. Ceux qui aiment le parfum ou le toucher du papier ressentent ce plaisir parce qu’il est inconsciemment lié au plaisir procuré par les textes. 26


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De la même manière que les odeurs, qui nous rappellent l’enfance ou un voyage, ne valent pas pour ce qu’elles sont mais pour ce qu’elles nous évoquent inconsciemment des souvenirs heureux. En réalité, un livre n’est bien qu’un tas de feuilles imprimées, au même titre qu’un “rapport en trois exemplaires”, tant qu’il n’y a pas un lecteur pour lui donner vie en habitant l’univers qu’il donne à voir. Ne nions pas, pour autant, les qualités sensuelles du bois par rapport aux métaux ou au plastique. Si les boîtes de CD ont été remplacées par les Digipacks, ces packagings en carton épais (plastifiés par souci de solidité), c’est que le carton incite plus que le plastique à prendre l’objet dans ses mains, et donc à le posséder. Le livre reste un objet agréable grâce au papier, mais il devrait vite cantonné à des ouvrages qui ont un intérêt en tant qu’objet. Les beaux livres bien sûr, qui n’ont rien à craindre du numérique, les bandes dessinées sûrement, et peutêtre même les romans, si l’on considère (et ce sont les lecteurs qui en décideront) que la poésie de l’objet livre est en adéquation avec la beauté du texte. Mais les ouvrages techniques, scientifiques, universitaires, et l’immense majorité des essais n’ont pas besoin que l’on sacrifie pour eux des milliers d’arbres. Le numérique est parfaitement adapté à leur mission de transmission efficace de la connaissance. Il est d’ailleurs amusant de voir Livres Hebdo, pourtant au courant des évolutions du marché, s’étonner (ou presque) de voir les beaux livres reprendre des parts de marché, tandis que l’édition scientifique et universitaire en perd : il n’y a pourtant rien que de très logique, puisque ces études ne prennent pas en compte l’édition électronique...

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C’est vers une cohabitation de ce type que se dirige le monde de l’édition. Une petite sélection d’objets livres, beaux, agréables à tenir, et une multitude d’ouvrages numériques dont seul importe le contenu, de l’essai au livre de poche, en passant par les recueils de presse, ainsi que les ouvrages de faible ampleur qui coûteraient trop cher à produire4. On peut déjà voir se dessiner la séparation, puisque face au développement de l’édition numérique, des livres véritablement pensés comme des objets font leur apparition dans les grands évènements culturels. Turin, déclarée Capitale Internationale du Design pour l’année 2008, a mis en place, à l’occasion de son salon du livre, un espace Book Design, qui présentait les plus beaux objets livres réalisés par des étudiants des plus prestigieuses écoles de design du pays.

4 On pourrait aussi imaginer un autre type de cohabitation liée au succès de la librairie en ligne. En achetant un livre papier, on recevrait automatiquement la version électronique, pour pouvoir commencer la lecture immédiatement, quitte à la finir sur la version papier une fois qu’elle arrive. Ouvrage papier que l’on pourra alors afficher chez soi, et retrouver dans sa bibliothèque, tandis que la version électronique disparaîtra sous le flot d’informations électroniques diffusées en permanence.

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Gratuité, diSpoNibilité : leS NouvelleS FormeS de diStributioN “La propriété intellectuelle est le pétrole du XXIème siècle” Mark Getty, propriétaire de Getty Images Une question est restée en suspens jusqu’ici, à laquelle il va pourtant falloir répondre tôt ou tard : en quoi l’émergence de ces nouvelles technologies, et surtout de ces nouveaux usages, affecte-t-elle le marché de l’édition, son équilibre fragile, ses rapports de force ? Dans ce nouveau monde où les auteurs écrivent sur des wiki visibles par tous, où les éditeurs laissent les gens voter pour leurs textes favoris, où il n’y a même plus besoin d’imprimer le livre pour en profiter, comment les éditeurs réussissentils à dégager des bénéfices, pour payer les auteurs et eux-même ? Le web 2.0 est un modèle économique basé sur la gratuité et le libre accès. Les maisons d’édition peuvent-elles dégager des bénéfices en utilisant ce système ? Et sinon, y a-t-il d’autres manières de faire de l’argent, en appliquant les principes du web 2.0 mais en conservant un modèle conforme à la tradition ? Après tout, il est normal que les éditeurs n’aient pas envie de franchir le pas si aucun modèle économique viable ne semble apparaître.

Le modèle économique du web 2.0 (Partie I) En novembre 2007, le Monde Économie titrait en première page : “Le Web 2.0, un monde du gratuit qui vaut de l’or”. Comment les sites communautaires qui, pour la plupart, ne possèdent rien qu’ils

puissent véritablement vendre à leurs utilisateurs, font-ils pour dégager des bénéfices ? La réponse est tout simplement : grâce à la publicité. La plupart de ces sites se contentent d’attirer en masse les internautes avec un service parfaitement gratuit. C’est ce trafic parfois très important que les sites web 2.0 vendent, à des régies publicitaires en ligne. Contrairement aux sites classiques, et à l’instar de Google, ces sites peuvent proposer aux régies publicitaires un ciblage précis, en se basant sur les informations personnelles fournies par les utilisateurs eux-même sur leur profil. Celui qui a inscrit quelque-part qu’il était fan de cyclisme a de bonnes chances de voir défiler dans le menu latéral des offres alléchantes en rapport avec le monde du vélo. Grâce à un trafic fort et à la plus-value offerte par ce ciblage des utilisateurs, les administrateurs de sites web 2.0 réussissent à négocier des contrats publicitaires juteux. Si juteux, d’ailleurs, que certains craignent déjà d’assister au retour de la “bulle internet”.

Pour les éditeurs, c’est une manière un peu nouvelle de penser leur travail (sauf peut-être pour ceux qui ont travaillé dans la presse gratuite). Pourtant, revenons au site imaginaire décrit plus haut ; celui où les apprentis-écrivains viennent partager leurs productions et commenter celles des autres. Mis en place par une maison d’édition, qui garde ainsi un œil sur les tendances culturelles et les goûts de son 28


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lectorat, il pourrait parfaitement fournir un revenu secondaire généré par la publicité. Une publicité très facile à cibler puisqu’on s’adresse exclusivement à des passionnés de littérature, et qu’on peut facilement savoir quels genres les intéressent particulièrement. Et si l’éditeur rechigne à laisser s’afficher sur son site des messages publicitaires dont il ne maîtrise pas l’origine (et qui ont de bonnes chances d’appartenir à la concurrence), qu’à cela ne tienne, il peut se passer de régie publicitaire et simplement faire de la publicité pour ses propres livres. Il conserve alors l’attention de son lecteur, mais perd en partie les bénéfices d’un réseau plus étendu ; il continue à exercer son métier traditionnel, celui qui consiste à vendre des livres, mais se coupe l’accès à une source de revenus qui pourrait prendre beaucoup d’importance à mesure que la littérature se numérise. C’est un choix à moyen terme parfaitement légitime. Après tout, même les très gros sites web 2.0 (Facebook, MySpace...), choisissent aujourd’hui de proposer des services ou des contenus payants, après avoir attirés des millions d’utilisateurs avec un service de base gratuit. La grosse différence entre ces sites et un site d’éditeur moderne est que le site web 2.0 va chercher à attirer le plus de visiteurs possibles, par tous les moyens et sans grande cohérence, pour augmenter ses revenus publicitaires, tandis qu’un site d’éditeur aura pour but de cibler la clientèle potentielle d’une collection ou d’un catalogue. Pour ce dernier en effet, il est préférable d’avoir à gérer une communauté relativement réduite, à laquelle il saura s’adresser et qu’il sera en mesure de fidéliser par l’échange. Le site de l’éditeur, aussi adapté soit-il aux techniques du web 2.0, vise à rendre possible, facile et agréable cet échange. Rien de plus. Et si les visiteurs sont nombreux, il est toujours possible de produire quelque revenu par la publicité, mais cela restera très certainement une activité secondaire, tout juste capable de rémunérer une partie du temps consacré par l’éditeur à l’animation de son site communautaire.

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Une opportunité économique : échapper aux dérives du système Le marché du livre, au delà des règles établies par la loi Lang en 1985 (TVA à 5,5%, remise autorisée limitée à 5%...), est régi par deux phénomènes, le système dit des trois tiers, et le système des offices. Le système des trois tiers représente le découpage “équitable” du prix de vente d’un livre entre les acteurs de la chaîne. Un tiers pour le libraire, un tiers pour le diffuseur et le distributeur, et un tiers pour l’éditeur. De la part de ce dernier, il faut bien sûr retrancher le salaire de l’auteur et les coûts d’impression et de promotion. Des libraires, il convient aussi de préciser qu’ils sont nombreux mais que leur volume de vente est restreint et leur marge de profit ridicule (1,4% en moyenne5). Dans ces conditions, il n’y a rien d’étonnant à ce que les deux principaux distributeurs, Hachette et Interforum (groupe Editis), soient les véritables poids lourds financiers du marché du livre. Et rien d’étonnant non plus à ce qu’ils ne soient pas très motivés pour soutenir le développement de la vente en ligne et de l’édition numérique. L’expression “système des offices” représente, elle, le fonctionnement des rapports entre éditeur, diffuseur, distributeur et libraire. L’éditeur présente ses nouveautés pour les prochains mois aux représentants du diffuseur, qui vont aller les présenter aux libraires. Les libraires prennent alors commande d’un certain nombre d’exemplaires des ouvrages qui les intéressent. A l’office, c’est-à-dire à la date de sor5 “La situation économique de la librairie indépendante”, Ipsos Culture et Observatoire de l’économie du livre, mars 2007 29


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tie des ouvrages prévu par l’éditeur, les stocks sont livrés aux libraires par le distributeur. Ils doivent les garder trois mois avant de pouvoir renvoyer les invendus à l’éditeur. A cause de la rentrée littéraire, les éditeurs se retrouvent à vendre énormément d’exemplaires en septembre/octobre, sur un période de temps très courte. Mais une grande partie du chiffre d’affaires de cette période est virtuel, car en janvier, tous les libraires renvoient leurs invendus, et l’éditeur doit leur rembourser des milliers d’ouvrages au même moment. Pour contrebalancer cette perte violente, qui peut asséner un coup très violent à une maison d’édition fragile, une seconde rentrée est orchestrée en janvier, avec un nouvel afflux massif d’ouvrages en direction des librairies. Ce va et vient financièrement absurde est encore accentué par la nécessité pour les éditeurs de proposer beaucoup d’ouvrages lors de ces rentrées pour assurer la visibilité de leur catalogue face à la surproduction des autres. Une fuite en avant qui a pour effet de produire des centaines d’ouvrages éphémères dont la seule destinée, au delà de leur quart d’heure de gloire potentielle, est le pilon. La surproduction de bon nombre d’éditeurs est aussi due à une triste réalité : chaque titre vend, en moyenne, moins d’exemplaires. L’industrie étant traditionnellement financée, par à-coups, par de gros succès de librairies, chacun publie en surnombre, dans l’espoir qu’un titre sorte du lot et rapporte suffisamment d’argent pour rembourser les pertes de tous les autres... A cause des effets secondaires de ce système, la majorité des livres publiés au cours des cinquante dernières années sont quasiment introuvables, parce qu’ils n’ont eu le droit qu’à trois mois en librairie avant de disparaître, sous la masse des nouveautés, abandonnés à leur sort par des éditeurs qui ne voyaient en eux qu’un succès plausible. Bien sûr, s’il a quelque valeur, il en traîne quelques exemplaires chez des bouquinistes et dans une poignée de bibliothèques, mais il est plus que difficile pour un lecteur sans un réseau étendu de connaissances dans le milieu de mettre la main sur ces ouvrages épuisés. Il suffit de lire une bibliographie à la fin

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d’un ouvrage universitaire pour se convaincre qu’à moins d’être universitaire soi-même, on n’a aucune chance de trouver un quart des ouvrages dans le commerce, particulièrement ceux qui ne sont pas en Français et que même la BNF ne possède pas toujours... Et ce n’est pas particulièrement la faute des acteurs du marché si les livres ont une si forte mortalité. C’est simplement la conséquence logique d’une sorte d’anomalie intrinsèque au système. Mais grâce au numérique, tout ceci peut changer. Il suffirait déjà de proposer sur internet les titres épuisés du catalogue pour produire des revenus nouveaux, et ralentir quelque peu la tendance observée par Eric Vigne, selon laquelle les ouvrages de fond ont de plus en plus de mal à atteindre leur public à cause de la présence écrasante de nouveautés imposées au libraires par le système des offices6. A environ 500 euros la composition (passage d’un fichier texte avec styles, à un fichier XML), transformer un livre en un document parfaitement versatile n’est pas excessivement coûteux. Surtout si le livre est destiné à être distribué numériquement, et donc sans aucun coût d’impression et de distribution. Pourtant, ce prix paraît encore élevé, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, parce qu’une fois le fichier converti en XML, il faut le convertir à nouveau dans une multitude de formats propriétaires. En effet, plusieurs compagnies travaillent à développer des formats de consultation adaptés à la demande des lecteurs. Elles se livrent une concurrence acharnée, et pour cette raison, l’édition numérique risque de souffrir des mêmes aberrations que l’internet à une époque : la concurrence entre Internet Explorer et Netscape poussait les deux navigateurs principaux à constamment concevoir des outils pour « faire la différence », et cette division de plus en plus marquée des deux supports faisait le malheur des développeurs de sites, qui perdaient (et perdent toujours par la faute d’Internet Explorer) un temps précieux à concevoir des sites capables de s’afficher aussi bien sur n’importe quel navigateur. Il est très important pour l’édition numérique que tous les supports, même si leurs développeurs refusent de se rappro-

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6 VIGNE Eric, Le Livre et l’éditeur, Klincksieck


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cher, gardent une base commune, de préférence le XML, pour que l’adaptation aux différents supports ne devienne pas pour l’éditeur une corvée dont il se passerait bien Un autre problème concernant le prix de la démarche est que, le livre papier ayant encore de beaux jours devant lui, les ouvrages pour lesquels l’édition numérique serait la plus intéressante sont les moins vendeurs. Ceux qui ne sont plus édités, ceux qui sont de toute façon édités en de très petites quantités, pour des raisons de prestige ou par passion plus que pour leur potentiel commercial. Selon le principe de la longue traîne (voir ci-après), les grands éditeurs qui possèdent un important catalogue de fond, rempli d’ouvrages épuisés depuis longtemps, pourraient gagner une fortune en les rendant de nouveaux disponibles sur internet. Sauf que, forcément, dans le cas de ces titres, le coût d’entrée devient proportionnellement beaucoup plus élevé, puisqu’il s’agirait de dépenser 500 euros de composition pour un titre qui a peu de chances de se vendre à plus de quelques exemplaires.

Le livre remis en liberté La crainte partagée par la plupart des éditeurs lorsqu’on leur parle d’édition numérique est de voir se reproduire le fiasco de l’industrie musicale, avec l’apparition d’un circuit clandestin plus organisé et populaire qu’aucun des services proposés par les majors. Et il faut bien l’avouer : personne, aujourd’hui, ne peut les assurer que ce ne sera pas le cas. Pourtant, il y a une donnée très importante à prendre en compte pour analyser le cas de la musique : le mp3 est de très loin le format le plus populaire jamais utilisé pour distribuer de la musique. Parfaitement transportable, échangeable, copiable, il a très vite conquis les utilisateurs. Mais l’industrie musicale n’a pas daigné s’y intéresser. D’une part les professionnels de la musique trouvèrent (avec raison), que la qualité n’était pas au rendez-vous, que le format mp3 écrasait la gamme de tons, et d’autres part les financiers n’avaient aucune envie de revoir

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un modèle économique de plusieurs millions de dollars. Et non seulement ils n’ont pas prêté attention à l’apparition de nouvelles pratiques, mais ils ont voulu freiner des deux pieds leur développement inéluctable, une manœuvre tout simplement stupide qui a mené à ce schisme entre les amateurs et les professionnels. Les pirates expliquent désormais qu’il ne culpabilisent pas car ils ont le sentiment de rendre la monnaie de leur pièce à une industrie anonyme jugée malhonnête, illégitime et avide. Ces erreurs ne devraient pas être réitérées par l’industrie du livre, qui suit de très près les avancées technologiques, notamment en matière de e-paper, et les évolutions des pratiques, notamment grâce à des sondages dans la presse spécialisée et à une commission de veille créée par le Centre National du Livre. Si les lecteurs ne sont pas fidèles au papier et apprécient ce que le numérique a à leur offrir, ils ne combattront pas cette tendance. Du moins pas tous. Malgré tout, il faut garder à l’esprit que les lecteurs, c’est vrai, aiment accéder gratuitement à du contenu traditionnellement payant. Le risque est bien réel que les fichiers numériques échappent rapidement à tout contrôle. Le web 2.0, c’est la mise en commun, le partage, et ce qui fait sa force pourrait aussi être la corde utilisée par les éditeurs 2.0 pour se pendre. Imaginons qu’un éditeur a décidé que sur internet, il ne pouvait pas vendre des livres. S’il décide de faire un site accueillant et remplis de titres gratuits pour vivre de la publicité, encore fautil donner aux lecteurs de bonnes raisons de venir chercher leur exemplaire sur le site. Si les ouvrages se partagent facilement sur tous les réseaux sociaux du monde, cela ne sera pas forcément facile... Les téléchargements sont-ils cependant des ventes perdues ? L’immense majorité du temps, le pirate n’aurait de toute façon pas acheté l’ouvrage. L’auteur et l’éditeur ne perdent donc pas d’argent, mais ils gagnent un public, potentiellement fidélisé. Cette importante notion exprimée, voilà quelques modèles économiques un peu novateurs à analyser, et peut-être à combiner, pour prendre le virage du numérique. 31


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Le modèle économique du web 2.0 (Partie II) : La longue traîne Ce concept phare des études sur l’Internet permet en partie d’expliquer le succès de la librairie en ligne Amazon ou de l’encyclopédie libre Wikipedia. Dans le cas du premier, il a été observé que la majorité de son chiffre d’affaire n’est pas obtenue grâce à la minorité de titres très vendeurs mais grâce à l’immense majorité de titres peu vendeurs qu’il est en mesure de stocker alors qu’aucune librairie phy-

sique ne peut se le permettre. De la même manière, Wikipedia ne fait pas la majorité de son trafic grâce à sa page sur Einstein ou Gandi mais sur ses millions d’articles traitant de petits groupes de rock, ou de mangas encore jamais publiés en France... Ce modèle économique semble avoir fait ses preuves, puisque Larousse a annoncé en mai 2008 que son encyclopédie serait disponible gratuitement sur Larousse. fr, et que le but était que les lecteurs apportent leur contributions, pour compléter les entrées officielles. Habituellement, une fois qu’un livre publié est épuisé, il n’est pas intéressant de le faire réimprimer, parce que les libraires n’ont pas la place de conserver

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un fond très important. Le livre a beau avoir encore un public à atteindre, le nombre des acheteurs à court terme est trop faible pour qu’il soit rentable de conserver un stock pour lequel il faut payer des impôts et de la surface de hangar. Grâce à l’édition numérique, les éditeurs peuvent publier les livres épuisés sur internet. Ceux qui le recherchent peuvent encore le trouver et l’acheter, mais il n’y a aucun stock et donc aucun coût au-delà du coût de conversion en fichier consultable en ligne. Et si l’on en croit la « théorie de la longue traîne », un éditeur avec un fond important pourrait bien finir par gagner plus d’argent grâce à lui que grâce à ses nouveautés.

Peut-être alors que la fuite en avant ralentira et que les éditeurs arrêteront de bombarder les libraires de nouveaux titres, pour accorder plus de temps à la valorisation de leur fond. Bien entendu, tant que les grandes maisons d’édition n’auront pas internalisé la composition, le coût de composition du fond restera trop important pour que les financiers donnent leur aval à une entreprise de ce type, mais l’éditeur britannique Faber & Faber va annoncer en juin les 100 premiers titres proposés sur Faber Finds7, un service d’impression

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7 http://www.faberfinds.co.uk/


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à la demande d’ouvrages épuisés. Pas de numérisation, pas de téléchargement, donc aucun coût de composition. Aucun coût de stockage non plus et un coût d’impression simplement un peu plus élevé, reporté sur le prix de l’ouvrage (le lecteur paye donc plus cher pour avoir le privilège de posséder un ouvrage autrement introuvable)8. Si l’expérience est concluante, la longue traîne risque de devenir le mot préféré des éditeurs au large catalogue.

sur son adaptabilité au marché grand public... Si une méthode vraiment rentable apparaît soudain, le virage vers l’édition numérique pourrait être pris beaucoup plus rapidement que prévu.

Un risque pour le modèle actuel

Il s’avère, malgré tous les cris de panique des producteurs classiques, que le téléchargement sur internet a été un grand référendum, et que les internautes ont déjà changé leurs habitudes de consommation de la culture. Il n’y a aucun moyen de le combattre démocratiquement (c’est à dire sans violer la vie privée, utiliser des DRM, etc...), et le plus intelligent aujourd’hui est de chercher de nouvelles manières de gérer la distribution des œuvres, en prenant en compte, dès le départ, leur disponibilité gratuite. Les différentes expériences présentées ci-après vont dans ce sens, et tournent autour d’un concept pas bien nouveau mais pourtant révolutionnaire dans le milieu de la culture : chacun donne selon ses capacités financières et selon sa motivation.

D’autant que l’on ne sait pas encore si l’édition numérique est économiquement viable. Peut-être les pires craintes sont-elles fondées et le piratage fera s’effondrer les ventes des livres. Et pour ceux qui pensent proposer des livres, des revues ou tout autre contenu gratuitement en espérant vivre de la publicité, comme la plupart des sites actuels, peut-être la fréquentation ne sera-t-elle jamais suffisante... Or, si l’évolution qui semble aujourd’hui s’imposer ne s’avère absolument pas rentable, le retour en arrière risque d’être très douloureux. Car prendre ce virage, c’est aussi ce mettre à dos tous les acteurs du marché mis hors jeu par l’édition numérique : les libraires peuvent souffrir de fortes ventes directes sur le site de l’éditeur, mais ils ont une réelle valeur ajoutée à offrir, ce qui devrait convaincre ces derniers de continuer à développer des modèles économiques en commun, en permettant par exemple aux libraires de commander des exemplaires à -30% sur le site même de l’éditeur (ou sur des plate-formes prévues à cet effet) ; mais les tout-puissants distributeurs, eux, risquent de garder rancune contre ceux qui les abandonnent aujourd’hui. A l’heure actuelle, beaucoup d’éditeurs doivent donc avoir les yeux tournés vers les éditeurs scientifiques, qui travaillent depuis longtemps à développer de nouveaux modèles économiques. Chaque expérimentation doit faire l’objet d’analyses pointues sur leur rentabilité, sur les coûts de mise en place, 8 Source : NOROT Anne-Claire, “Editions à tirage limité” dans Les Inrockuptibles du 27 mai 2008

Le “mécénat” : un modèle hybride qui a déjà fait ses preuves

In Rainbows En 2007, le groupe Radiohead a beaucoup fait parler de lui en décidant de proposer son dernier album InRainbows en téléchargement direct sur un site internet dédié. L’idée était que chacun, au moment du téléchargement, décidait de combien il souhaitant donner. Certains donnèrent jusqu’à 40 euros, d’autres 5, et beaucoup de gens ne donnèrent rien. Mais l’opération fut un succès une fois rapporté à son coût de mise en place. Rien à imprimer, pas de distributeur 33


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ni de vendeur ; l’album étant auto-produit, tous les bénéfices revinrent directement aux membres du groupe. D’après le Figaro, ils auraient touché 10 millions de dollars en une semaine, grâce à 1.2 millions de téléchargements, et ce malgré les 800.000 qui n’ont rien donné... Un inconvénient de cette méthode est que le fichier a immédiatement été mis en ligne sur des sites de partage où, bien entendu, absolument personne ne rémunère les artistes. Une attitude qu’on ne saurait condamner automatiquement tant elle est entrée dans les mœurs mais qui, dans ce cas particulier, a fait un peu d’ombre a une démarche qui méritait d’être publicisée. On pourrait rétorquer que, si l’on ne s’appelle pas Radiohead, il doit être bien difficile de faire de l’argent avec cette méthode, mais en vérité, l’immense majorité des groupes sont peu ou pas connus et ne font pas d’argent. Tous les nouveaux groupes, de nos jours, mettent gratuitement leurs chansons en ligne pour se faire connaître. Si les gens qui ont découvert l’œuvre grâce à sa gratuité ont l’opportunité de donner un peu d’argent au groupe grâce à un système similaire, il n’y a absolument rien à perdre. S’il est fier de son action, il y a même des chances que l’acheteur en parle autour de lui, et il suffit pour le rendre fier de lui de le récompenser en faisant apparaître son nom quelque-part. On peut très bien imaginer une page “Mécènes” qui contiendrait un “nuage de noms”, c’est-à-dire une liste désordonnée de noms dont la taille dépend de la somme offerte (inspirée des nuages de tags – voir Folksonomie et librairie en ligne, p 34).

The Ransom D’un autre côté, il existe le système inventé par Greg Stolzse, baptisé “Ransom”, et traduit par ses défenseurs en France par le terme plus romantique de “Mécénat”. L’écrivain estime le salaire qui lui paraît raisonnable en fonction du travail fourni sur une œuvre. Puis il propose aux lecteurs de venir faire des promesses de don pour atteindre la somme fatidique pendant une période donnée, et si elle est atteinte à l’issue de la période prévue, les dons sont débités

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et l’artiste met l’œuvre en ligne gratuitement sur un ou plusieurs sites. Une fois rendue publique, tout le monde peut la partager comme il l’entend. Les caractéristiques de cette méthode sont que : ceux qui souhaitent vraiment avoir accès à l’œuvre ont tendance à investir un peu plus si nécessaire, dans la limite de leur budget culturel ; l’artiste maîtrise le salaire minimum, sans souffrir de la concurrence des versions pirates disponibles sur internet. Mais il définit par la même occasion son salaire maximum. En effet, à cause d’un discours autour de l’opération qui met l’accent sur la somme à atteindre, les mécènes n’ont pas l’impression de récompenser l’auteur, mais de contribuer à entreprise collective visant à rendre l’œuvre disponible. Une fois la somme atteinte, et même s’il reste plusieurs jours pour continuer à contribuer, les lecteurs considèrent que la mission est remplie. Contrairement à l’exemple de Radiohead, ceux qui payent n’ont pas l’impression de le faire pour l’auteur mais pour les autres lecteurs. Du coup, ceux qui ne donnent pas sont dépendants de ce qui donnent, ce qui a pour effet de donner de l’importance aux fans sur les autres, mais aussi tout simplement à ceux qui ont les moyens sur ceux qui n’en ont pas... Cette méthode est inspirée d’une tentative entreprise par Stephen King de publication d’un livre sur internet. L’auteur de Carrie et The Shining avait proposé le premier chapitre gratuitement, puis demandé qu’une certaine somme soit investie avant de publier le second. L’opération avait malheureusement été un échec, et la publication s’était arrêtée au troisième chapitre (l’auteur avait d’ailleurs utilisé pour l’expérience un vieux texte dont il n’avait écrit que trois chapitres, comme s’il avait prévu dès le départ que cela n’irait pas plus loin...). Bien sûr, tout-le-monde avait conclu à l’époque que si King n’y arrivait pas, personne n’y arriverait, mais c’était il y a déjà plusieurs années (2000). Les succès du modèle de la Rançon prouvent que les lecteurs sont désormais prêts à payer pour avoir accès à une œuvre numérique. Aujourd’hui, un jeune auteur, avec 34


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des ambitions peut-être un peu moindre que Stephen King, pourrait sûrement essayer de se créer un lectorat, en proposant un roman selon un système de rançons exponentielles : le premier chapitre serait gratuit, le second posté si 20 euros sont levés, puis 50 pour le troisième, 100... A mesure que les lecteurs deviennent plus nombreux, l’auteur peut demander un peu plus. Et s’il souhaite pousser l’interaction plus loin, il pourrait aller jusqu’à s’inspirer des réactions des lecteurs pour écrire la suite (comme peuvent le faire certains auteurs de manga), même s’il est universellement convenu depuis le XIXème siècle qu’un vrai artiste n’a que faire de l’avis de son lectorat, et ne prête l’oreille qu’aux chuchotements de sa muse... Et pour ne pas, en tant qu’éditeur, être la première victime de cette méthode, le mieux serait de proposer aux auteurs de tenter cette méthode de publication, ou de prépublication, sur son site, déjà populaire grâce à ses autres offres, plutôt que de les laisser la tenter sur le leur. Après tout, la prépublication a été un modèle économique florissant, et l’est encore dans des pays aussi technophiles que le Japon ou la Corée du Sud, où les éditeurs font leur travail habituel, et aident aussi leurs auteurs à tirer partie du lien presque direct avec le lectorat, permis par les formulaires à envoyer contenus dans les magazines.

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puissance. Alors, les éditeurs pourraient mettre tous leurs livres en ligne gratuitement, chacun aurait accès à l’ensemble de la production, et les ventes des livres augmenteraient grâce au bouche à oreille permis par la disponibilité. C’est ce dont Paulo Coehlo a fait l’expérience9. En 2000, alors que son roman L’alchimiste plafonne à 1000 ventes en Russie, il décide de mettre une version russe du roman en ligne gratuitement. Le bouche à oreille est alors tel qu’en un an, les ventes montent à 10.000 exemplaires, puis 100.000, un million... Aujourd’hui, le roman s’est vendu à environ 10 millions d’exemplaires dans le monde russophone. Si bien que l’auteur a ouvert un site, PirateCoehlo.com, pour faciliter le téléchargement de versions électroniques de ses livres... Alors que les premiers readers arrivent sur le marché, cette méthode va-t-elle rester aussi efficace ? Et si les ventes baissent, n’est-il pas possible qu’elles restent finalement raisonnables et que cette méthode trouve l’équilibre entre rentabilité et démocratisation. Si, en plus, les lecteurs ont l’opportunité de donner un petit quelque chose au moment du téléchargement...

Conclusion temporaire En fait, la meilleure solution pour les éditeurs et les lecteurs serait que le papier garde toute sa

9 TZORTSIS Andreas, “Paulo Coehlo piraté par lui-même”, dans Newsweek

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Faire commuNiQuer leS lecteurS eNtre eux Grâce à sa présence sur internet, grâce à des versions numérisées des ouvrages difficiles ou épuisés, un éditeur peut à nouveau proposer aux lecteurs des livres qui ne trouvent pas leur place en librairie, mais encore faut-il que les lecteurs puissent découvrir ces livres. En librairie, il est possible de tomber dessus par hasard, sur internet, c’est plus difficile. Pour assurer la visibilité de ces œuvres, il faut mettre en place des chemins, assurer des liaisons, pour amener les internautes aux livres qui les intéressent. Et au centre de ces mouvements, on mettra le plus important moteur d’achat culturel, la recommandation.

Le succès des librairies électroniques Que l’on utilise ou non l’édition numérique, la nécessité pour une maison d’édition de développer un (ou plusieurs) site internet digne de ce nom n’est plus à prouver. Ce site sera presque entièrement destiné à faciliter et à développer les rapports entre l’éditeur et les autres maillons de la chaîne du livre, le lecteur très loin en tête. Or, si l’on efface les intermédiaires pour s’adresser directement au lecteur, autant le prendre par la main, si l’on peut dire, et l’accompagner jusqu’à l’achat. L’éditeur n’est pas obligé de prendre en charge le traitement des commandes, mais il a tout intérêt à négocier un accord avec des libraires qui s’en chargeraient, pour pouvoir vraiment capitaliser sur tous les efforts faits en amont en vendant finalement son livre lui-même. Et les premiers à avoir imaginé des outils en ligne

novateurs pour inciter les gens à acheter des livres, ce sont bien sûr les développeurs d’Amazon.com.

Amazon, un libraire 2.0 Dans son article sur ce qu’est le web 2.0, O’Reilly cite Amazon comme un des précurseurs, avec Google. En effet, il a très tôt proposé des services typiques du web 2.0, comme les commentaires et les pages personnalisées, mais en les appliquant à la librairie, un secteur qui n’avait pas évolué depuis des décennies. Les éditeurs qui décident aujourd’hui de prendre à leur tour en charge cette dernière étape, la vente d’un ouvrage à son lecteur, ont énormément à apprendre d’Amazon, et des autres librairies en ligne qui ont suivi dans son giron. Certains ne voient en Amazon qu’une multinationale sans imagination, qui phagocyte la petite librairie grâce à un budget pharaonique, mais cette image est en grande partie le fruit d’une propagande convaincante mais assez mensongère, contre les librairies électroniques en général. En vérité, le Centre National du Livre aime s’attaquer à ces boucs-émissaires justement parce qu’ils ne représentent pas une trop grosse part des ventes. Jamais il n’ose clamer bien fort que ce sont les grandes surfaces qui assassinent la librairie indépendante, avec leur sélection étroite, leurs rythmes de distribution effarants et leurs – potentiellement énormes – chiffres de ventes au titre. Amazon, lui, comme on l’a vu plus haut, gagne plus d’argent sur la vente d’innombrables titres introuvables en librairie, que sur les grands succès. Il ne fait donc pas vraiment d’ombre à la librairie traditionnelle, parce qu’il est utilisé en grande partie 36


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comme dernier recours d’une recherche difficile. Il fait par contre beaucoup de bien aux éditeurs, par sa politique d’achat beaucoup moins agressive, et donc risquée, que les grandes surfaces, et parce qu’il assure la «visibilité» de titres pratiquement disparus des étagères des librairies.

Folksonomie et librairie en ligne On a déjà vu un peu plus haut ce que les promoteurs du web 2.0 appelle la Folksonomie, et en quoi ce modèle de classifications était supérieur au modèle dit taxonomique dans l’univers du livre. C’est particulièrement le cas pour les librairies. Dans l’univers matériel d’une librairie ou d’une bibliothèque traditionnelle, un exemplaire ne peut être qu’à une seule place, sur une seule étagère, à côté de seulement deux autres titres. Cette règle mécanique de base est constitutive de l’univers en trois dimensions dans lequel nous sommes habitués à vivre. Un titre est donc cantonné à un point de l’espace précis, ce qui signifie dans une librairie, qu’il est enfermé dans un seul type de relation avec les livres qui l’entourent : il appartient à un genre, un seul, et en toute probabilité, les titres qui l’entourent sont d’auteurs dont le nom commence par la lettre d’avant ou celle d’après dans l’alphabet. Il faut bien avouer que pour naviguer dans l’océan de la littérature, ce n’est pas la manière la plus poétique. Les Trois Mousquetaires d’Alexandre Dumas, par exemple doit entrer dans une seule catégorie : Classique, Aventure, Histoire ou Romance, pour que le libraire puisse physiquement le placer sur la bonne étagère. Le plus souvent, il sera considéré comme un “classique”, au même titre que Victor Hugo et George Elliot, parfois comme un “roman d’aventure”. Grâce à la folksonomie, celui qui entre Les Trois Mousquetaires dans la base de donnée de la librairie ou bibliothèque en ligne peut lui attribuer tous les tags qui lui paraissent pertinents : Classique, Aventure, Histoire et Romance, mais aussi Richelieu et Gascogne, et chacun de ces tags permettra de découvrir, par l’intermédiaire d’un lien hypertexte, d’autres œuvres, soit appartenant à un des genres

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cités, soit traitant de la vie des mêmes personnages, etc... Si les clients ont la possibilité d’attribuer eux-même des tags, une toile de sens se crée d’ellemême, où les livres sont reliés par des liens plus ou moins ténus, mais toujours pertinents et, surtout, fluides. Le lecteur peut ainsi se lancer à la découverte de dizaines de livres, ouvrant d’innombrables portes à l’aide de son trousseau de mots-clés, glissant d’un univers à l’autre au gré de son attirance pour tel ou tel mot. Ces tags sont très souvent réunis en nuages de tags, qui affichent les tags les plus attribués (la taille de la police dépendant du nombre d’occurrences).

Personne n’aime entendre quelqu’un ne parler que de lui Cette prise de conscience est une des grandes découvertes de ces dernières années : les gens écoutent plus attentivement ce qu’on a à leur dire s’ils sentent qu’on parle d’eux, qu’on s’intéresse à eux. Certains secteurs jouent depuis des décennies sur la dimension sociale des actes de consommation, en mettant en avant la capacité d’un objet particulier à faire entrer son possesseur dans un groupe social plus élevé. Mais il ne s’agit pas là de pousser le communautarisme en communiquant lourdement sur la possible fonction sociale de l’ouvrage à vendre. Il s’agit d’apprendre à communiquer sur une réalité centrale du livre : il n’existe que dans son rapport au lecteur. Tous les amateurs de littérature confirmeront, à condition qu’ils parlent de lecture autour d’eux, qu’une relation entre un lecteur et un livre est intime, et ne ressemble à aucune relation du même livre avec un autre lecteur. Pourtant, à force de sacraliser le livre, on le rend inaccessible pour une partie de la population, qui s’avoue intimidée socialement par l’espace de la librairie. Or, pour toucher à nouveau ce public, de nombreux éditeurs ont fait le choix du nivellement vers le bas, et se sont mis à concevoir de toute pièce des livres “grand public” supposément accessibles à tous, qu’il devient honteux, si le marketing est réussi, de ne pas avoir lu ou au moins acheté. Cette relation des édi37


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teurs aux lecteurs, empreinte de cynisme, a quelque chose de malsain. Les éditeurs ont tout à gagner de faire comprendre aux gens qu’il y a des milliers de livres à découvrir, qu’on ne peut pas tous les aimer, mais qu’on peut en aimer certains passionnément. Les consommateurs n’en peuvent plus d’écouter les messages publicitaires ; plutôt que d’entendre lister les qualités d’un livre, ils ont besoin d’entendre que ce livre, c’est potentiellement un petit bout d’euxmême. Ils doivent donc pouvoir s’exprimer sur les livres qui les ont marqués, et partager leurs rencontres avec des titres particuliers, en toute liberté et en toute simplicité, de manière plus subtile que les “témoignages” publicitaires que l’on peut entendre à la radio. C’est ce qu’Amazon a été le premier à proposer, avec son service de notes et de commentaires, avant d’offrir un autre outil de recommandation naturel et efficace : les sélections thématiques.

Grâce à ces sélections, les lecteurs ne donnent pas simplement leur avis sur un titre en particulier, ils esquissent un croquis de leur univers de goûts, et cet outil touche beaucoup les acheteurs, car on écoute toujours attentivement les recommandations d’une voix, même anonyme, dont on se sent proche, au moins par les goûts. C’est ce que l’on pourrait appeler la recommandation de pair à pair. Il paraît évident que si, dans la sélection des livres préférés d’un client d’Amazon, on retrouve 3 ou 4 livres qui nous ont, nous aussi, beaucoup touché, les autres titres de la liste nous apparaîtront soudain sous un autre jour.

Le futur des relations presse Les relations presse sont nées d’une prise de conscience : Comparativement aux publicités, coûteuses et de plus en plus mal perçues par les consommateurs bombardés de messages, l’avis supposément objectif d’un journaliste est d’une grande influence sur les comportements d’achat. Mais une

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enquête, relayée par la WOMMA10 (Word Of Mouth Marketing Association), indique que les consommateurs accordent encore beaucoup plus de crédit aux recommandations des pairs qu’aux critiques de la presse. La recommandation de pair à pair est de loin le premier facteur d’achat pour les produits culturels. Dans ce contexte, il est une entité qui prend peu à peu la place de la presse traditionnelle : la blogosphère. Si l’avis de certains critiques reconnus importe beaucoup pour certains lecteurs éclairés, l’immense majorité des lecteurs préfère encore écouter l’avis d’un blogueur qu’ils apprécient et qui peut même être un ami, plutôt que les quelques lignes de 20 minutes ou Direct Soir. L’éditeur se retrouve cependant dans une situation difficile ; les relations presse ont une raison d’être simple : une quantité relativement réduite de personnes (les journalistes) a un impact fort sur le lectorat potentiel, c’est pourquoi on le chouchoute, à grand coup d’exemplaires de presse, de relance téléphoniques, de services personnalisés (envoi d’images pour illustrer l’article, organisation de rencontres avec les auteurs...). Les blogs sont infiniment plus nombreux, et s’il est déjà courant d’envoyer des services de presse aux plus influents, il est impossible d’atteindre efficacement la majorité de petits blogs, qui ne touchent que quelques personnes chacun, mais qui, ensemble, représentent une masse absolument non négligeable de leaders d’opinion. Or, puisqu’on ne peut pas s’adresser à eux directement, il faut développer des outils qui les aident et les incitent à relayer, de leur propre initiative, l’actualité de la maison d’édition, et à produire de vrais articles sur les livres. Car ces journalistes amateurs seront d’autant plus fiers, grâce à des outils efficaces, de produire du contenu d’aspect professionnel et leur engouement, autant que leur crédibilité, en sera accrue.

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10 http://www.womma.com/


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Tout-le-monde adore parler de soi-même Et ce n’est même pas de la vanité. Il se trouve que tout être humain a besoin de se sentir reconnu, et cela nécessite, à un moment ou à un autre, de parler de soi, et de ses bons côtés. Parfois ce sera conscient, parfois presque conscient, et parfois un sujet nous semblera simplement intéressant, sans que l’on puisse se rendre compte que son intérêt pour nous vient du fait qu’il nous met en scène tel qu’on aime se voir. Et parce que nous sommes raisonnablement empathiques, nous trouvons intéressants d’entendre les autres parler d’eux-même, car nous nous y retrouvons en partie, ou au moins nous nous positionnons par rapport à eux. Qu’est-ce que cela signifie en terme de “marketing du bouche à oreille” appliqué à l’édition ? Cela signifie qu’impliquer les gens dans le travail éditorial est le meilleur moyen de les inciter à parler des livres. Cette implication se fait par le biais de sondages et de questions ouvertes. Les lecteurs peuvent se placer en position de conseiller, s’exprimer sur la politique éditoriale, sur le choix des titres et leur traitement. Pour peu que certaines de ces réflexions soient pertinentes et mises en œuvres, le sentiment d’appartenance de cette portion du lectorat à une sorte d’instance décidante de la maison d’édition est démultiplié. Ces lecteurs deviennent alors ce que les nouveaux marketeurs appellent des “ambassadeurs”, des amateurs qui prennent parti en faveur d’une marque et en font la promotion naturellement autour d’eux. Parce que, impliqués comme ils le sont dans la vie de la maison, ils sont, lorsqu’ils parlent des livres, d’une certaine manière, en train de parler d’eux-même. Ce désir de se mettre en avant permet aussi d’utiliser l’amour de la co-création sur le web à des fins “publicitaires”, par l’organisation de concours de productions, avec vote des visiteurs et quelques cadeaux pour les gagnants. Ce peut être un concours d’ordre général, comme “Prenez une photo de vous en train de lire dans des conditions insolites” ou plus précisément “Créez une affiche publicitaire pour tel titre”. Aussi abusive que puisse paraître cette derniè-

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re proposition, elle a été utilisée avec grand succès au cours de l’exemplaire campagne de lancement du jeu “Dragon Quest 6”11aux Etats-Unis. Car si aucune de ces publicités n’a été utilisée officiellement, le plaisir qu’ont pris les participants à créer leur œuvre et à s’amuser de celles des autres a produit un buzz intense, d’autant plus que tous ceux d’entre eux qui avaient un blog ou une page personnelle présentaient leur publicité dessus, parfois celles d’autres participants aussi, et presque toujours, fournissaient un lien vers le site communautaire de la campagne de lancement. Plutôt qu’une publicité de grande qualité, bien pensée mais mal perçue, mieux vaudra toujours cette multitude de petites publicités faites avec passion par des leaders d’opinions disséminés. Pour peu que les participants soient talentueux, il est même possible, à l’issue du concours, de sélectionner un gagnant dont la production sera utilisée. C’est le cas sur DeviantArt, qui organise en partenariat avec des producteurs, des concours de graphisme : l’affiche du dernier film de Tim Burton, Sweeney Todd, ou encore la pochette du dernier album de Megadeth, viennent de là.

Des outils pour atteindre la longue traîne Et oui, encore elle ! Qu’une multitude de petits blogs peu visités permettent d’atteindre une cible plus vaste qu’une poignée de médias grand public, c’est une autre manifestation de l’effet de longue traîne observé sur internet. Et comme pour ses autres formes, il s’agit de proposer des services nouveaux si l’on souhaite en tirer parti. Le nombre élevé de blogs empêchant qu’on s’adresse à chaque auteur personnellement, ces services doivent être automatisés, et consister principalement en : d’un côté, les outils visant à tenir les blogueurs informés de l’actualité de la maison d’édition ; de l’autre les outils qui facilitent le partage de ces informations et qui donnent envie de relayer 11 Voir à ce sujet l’étude de cas publiée sur le site de la WOMMA 39


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l’information. Très simplement, cela consiste à partir d’un moteur de blog. Les moteurs de blog dignes de ce nom proposent tous des flux rss et des rétroliens. Grâce aux flux rss, les passionnés peuvent s’abonner au blog et être automatiquement informés quand des nouvelles sont postées. L’étape suivante étant une newsletter proposant des bonus, pour inciter les internautes à souscrire. Les rétroliens, de leur côté, sont une liste, affichée sous un article de blog, de tous les articles qui citent celui-ci. Ils permettent aux blogs d’être reliés entre eux, et dans le cas d’un site d’éditeur, ils incitent les blogueurs, soucieux de se faire connaître auprès de la communauté, à relayer les informations qu’ils reçoivent, pour faire apparaître leur propre blog dans le rétrolien du site de l’éditeur. Mais ce ne sont que des outils basiques, qui doivent être accompagnés d’autres, plus pointus, plus graphiques, plus originaux, qui donnent envie de les utiliser.

Facebook vient d’annoncer (ou est sur le point de le faire) un outil dont il compte bien tirer profit, et qui permet aux membres d’annoncer à leurs connaissances qu’ils viennent d’effectuer un achat (de voiture, de télévision...). Sur un site d’éditeur avec vente en ligne, cela reviendrait à ajouter dans la page “merci d’avoir effectué vos achats chez nous” un bouton “prévenir mes amis”. Après avoir acheté ses livres, le lecteur a aussi l’occasion de poster un commentaire (alors appelé ‘critique’) sur la page de présentation de chaque ouvrage acheté, et pour augmenter la diffusion du message, un bouton permet aussi de “publier cette

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Et les libraires dans tout ça ? Le but de ce mémoire n’est pas d’aborder le problème du point de vue de qui que ce soit d’autre que l’éditeur, mais la question se pose, car les lois de protection du livre en France prennent comme point de départ que libraire et éditeur travaillent ensemble, l’un pour l’autre. Il y a des raisons de s’inquiéter pour eux, mais ils sont les premiers à le faire, et les premiers à s’intéresser aux possibilités d’Internet. Ils sont déjà nombreux à faire ce qu’Amazon ne sait pas faire, ce qu’un éditeur unique ne peut pas proposer : une sélection, une vraie, faite à partir de connaissances spécialisées et de goûts cultivés. Amazon propose de toucher un pourcentage sur les ventes de livres en faisant de la recommandation. Les éditeurs pourraient proposer la même chose. Alors libraire et éditeur travailleraient de nouveaux ensemble, l’un argumentant objectivement, et conseillant aux lecteurs tel titre du catalogue de l’autre, ainsi mis en avant. Cela ne pourra pas fournir un salaire complet aux libraires, mais les aider, tout en gardant un local physique dont on ne saurait se passer, à arrondir les fins de mois, en exerçant la partie la plus intéressante de leur métier..

Exemples : L’outil à l’origine de tous les autres est la désormais célèbre “Wishlist”, grâce à laquelle un client peut faire connaître à ses amis ou sa famille une sélection de produits qui lui feraient plaisir. Cette lettre au Père Noêl est un formidable outil de communication parce qu’il propose un vrai service aux utilisateurs, qui n’ont donc pas l’impression de diffuser un message publicitaire. Ce qu’ils sont pourtant en train de faire.

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critique sur un blog”. Chez un éditeur de Beaux Livres ou de bande dessinée, il y a forcément une galerie d’illustrations. Celle-ci peut proposer de nombreux services en rapport avec les réseaux sociaux. D’abord, elle peut donner à chacun l’occasion de se créer une galerie personnelle, contenant toutes ses œuvres favorites. En partageant cette galerie au même titre qu’une wishlist, pour montrer aux autres ce qu’il aime, le client fait de la publicité pour ce qui caractérise le mieux l’éditeur : son catalogue d’images. Un outil dérivé au fort pouvoir communicant serait alors un petit widget permettant d’afficher tout ou partie d’une galerie sur son blog (ou page personnelle, ou MySpace, etc...) Les lecteurs ont envie de partager des informations sur leurs habitudes, parmi lesquelles leurs 40


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habitudes de lecture. En leur rendant la vie facile, il est possible de faire de chacun d’eux un ambassa-

deur secondaire de la maison. C’est ce que Nintendo démontre avoir compris en créant un système de fankits, des ensembles de ressources à utiliser sur son ordinateur, son site ou ailleurs. Ils contiennent du matériel promotionnel officiel que tous les fans peuvent utiliser : des fonds d’écrans, des icônes MSN, des screenshots (captures d’écran montrant une image représentative du jeu), des images des personnages principaux et même des vidéos. Tous les blogs dédiés au jeu vidéo ou à Nintendo en particulier ont désormais de quoi proposer, parfaitement légalement, du matériel officiel. Leurs auteurs sont

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heureux de pouvoir habiller leurs écrits de manière professionnelle, et Nintendo récolte les fruits de cette publicité gratuite. De même, LaFraise.com, “éditeur de bien beaux T-shirts”, démontre encore une fois sa grande maîtrise des outils du web 2.0 pour promouvoir son activité d’édition, avec cette page proposant de télécharger plusieurs outils promotionnels contre des “brouzoufs” monnaie particulière du site (on remarque ici comment l’emploi d’une monnaie spéciale permet de rémunérer les promoteurs en bons de réduction, eux-même ayant – c’est bien connu – une fonction d’appel à l’achat). Il y a une place ici pour des outils spécialisés dans le livre. BookRabbit.com, par exemple, propose de prendre en photo sa bibliothèque, puis de transformer chaque tranche en un lien pour voir ou acheter le livre. Assez proche des nouvelles tendances, ce site propose aussi de poster des critiques vidéos des ouvrages. Une fonctionnalité encore peu utilisée mais qui a un intérêt évident.

Ce secteur n’en est qu’à ses débuts, et il revient à tous les producteurs de contenu dans un environnement Web 2.0 de faire preuve d’imagination, pour concevoir de nouveaux outils qui incitent les utilisateurs a partager leur passion, ou tout au moins leurs centres d’intérêt. Et ce, de préférence, non pas dans un rapport d’argent qui pollue l’image des deux parties, mais dans un rapport, soit de reconnaissance commune (le site d’éditeur récompensant les fans dévoués en reconnaissant ce que les autres et luimême leur doivent), soit d’échange en vue d’un but 41


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commun (l’éditeur de livres et l’auteur d’un blog littéraire ont tous deux à gagner que ce dernier ait à sa disposition des outils professionnels). Les premiers auteurs et éditeurs à profiter du web communautaire sont l’avant-garde britannique qui, boudée par les maisons d’édition, s’auto-éditent grâce au numérique et à l’impression à la demande, mais surtout, qui prennent d’assaut MySpace, pour le transformer en un espace de découverte littéraire autant que musicale. S’il y a une leçon à tirer de cette avant-garde, c’est bien ce lien ténu avec le lectorat permis par les réseaux sociaux.

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uN exemple d'éditeur 2.0 Ce chapitre a pour but de présenter concrètement une exemple – hypothétique – d’éditeur 2.0. Il permettra ainsi de se faire une idée plus générale de ce à quoi cela pourrait ressembler, et peut-être de mieux comprendre comment les différents outils mis en place travaillent ensemble à faciliter les rapports de chaque lecteur aux collections de l’éditeur, et aux autres lecteurs avec lesquels il partagent un engouement. Cependant, pour aborder le cas d’autres travaux d’édition que la sempiternelle édition de livres, il ne sera pas question de romans ou d’essais, mais d’illustrations.

a aucun moment ne met à l’œuvre les possibilités du réseau. Cet éditeur servira de comparaison pour juger des améliorations apportées par un site web collaboratif conçu avec le processus d’édition en tête. Quelques informations utiles à la comparaison : un nombre restreint d’illustrateurs fidèles peu de livres, mais longuement travaillés des débuts difficiles, avec en particulier un démarchage personnalisé en voiture dans toute la Bretagne une promotion classique, et donc coûteuse

Au bord des continents, éditeur breton d’illustrations fantastiques Les éditions Aux bord des continents12 ont commencé par proposer aux librairies spécialisées, alors que ce n’était pas du tout la mode, des illustrations au format carte postale, représentant des créatures du folklore celtique. Puis, grâce à quelques revenus et à un nombre d’illustrations grandissant, ils se sont mis à publier des livres d’illustrations, comme L’heure des fées. Aujourd’hui, la vente des livres en librairie représente la plus grosse part de leur chiffre d’affaire. Le site de l’éditeur Au bord des continents est des plus classiques, avec quelques petits textes de présentation du catalogue, une galerie présentant les produits disponibles à la vente, et des informations professionnelles pour les contacter. Un site aussi web 1.0 que possible, pour une activité d’édition qui 12 http://www.au-bord-des-continents.com/aubord-des-continents/interface/interface.php

Le site d’éditeur, nouvelle génération Un site communautaire Le site – imaginaire – de cet éditeur d’un nouveau genre, n’est pas pensé comme une mise en forme d’un contenu préexistant, mais comme une plate-forme, sur laquelle d’autres pourront mettre en ligne et partager leurs productions. Le premier outil à mettre en place est donc une zone de profil : chaque nouveau membre possède une page contenant des informations personnelles qu’il souhaite communiquer et, bien sûr, son travail, avec au centre une galerie. Ce profil est bien la première unité de mise en commun, de partage. Chacun peut le visiter, ainsi, bien sûr, que sa galerie, noter 43


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les œuvres (si le créateur à décidé d’accorder cette possibilité) et expliciter ses choix par des commentaires (chacun peut ainsi progresser au contact des autres). Le visiteur peut aussi aller voir les favoris de ceux dont il découvre la page et sélectionner parmi leurs créations certaines qu’il souhaiterait lui-même ajouter à ses favoris. Pour permettre à d’autres que les créateurs purs de participer à ce mouvement, le profil est fait de telle manière qu’une sélection d’images (dont on n’est pas forcément l’auteur) mises en forme de belle manière, soit aussi une production dont on puisse être fier et que l’on puisse partager. On peut aussi produire du texte, soit critique sur le travail d’un autre, soit “poétique” pour l’éclairer autrement. Un rétrolien apparaît alors sur la page de l’œuvre originale, créant une toile de sensibilités équivalente à celle qui relie les blogs. Vient ensuite une page d’accueil, qui propose de voir les dernières créations, les créations les plus populaires, les derniers produits publiés, etc... Un nuage de tags permet de naviguer selon les thèmes les plus abordés. Un blog permet aussi à l’éditeur de donner une actualité au site, par des annonces, des propositions et des questions, auxquelles chacun peut répondre dans les commentaires. Le dialogue qui se crée est la base du lien naissant entre les créateurs et l’éditeur.

Un site à thèmes D’autres sites proposent déjà des services de ce type. Certains sont très gros et très populaires, mais généralistes. Plutôt que de vouloir les concurrencer, l’idée est de mettre l’accent sur la véritable plus-value de ce site en particulier : c’est un site d’éditeur. Il est découpé en “univers” à la personnalité forte, qui sont autant de collections. Chacun crée un seul compte pour tout le site, et peut poster dans toutes les catégories, mais chaque univers doit être suffisamment “immersif” pour attirer des visiteurs et des artistes qui se reconnaissent dans, et se passionnent pour, le type de production proposé.

La publication

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Les œuvres peuvent alors être imprimées à la demande sous divers formats : carte postale, grande carte, poster, livre A4, livre de poche ou livret carré... Grâce à un outil de mise en page basé sur le XML et sur la technologie Ajax (contrairement à la plupart des autres outils du site qui sont basés presque exclusivement sur le langage de programmation PHP), chacun peut se fabriquer le livre de ses rêves, l’imprimer pour lui-même ou le partager. Sur la page d’accueil de l’outil de mise en page apparaissent les livres le plus populaires conçus par des membres. Ainsi, des graphistes et autres designers peuvent concevoir des objets-livres à partir du contenu des autres. Sur chaque impression, chaque créateur, ainsi que l’éditeur (pour le service) et le graphiste à l’origine de l’objet, touchent un petit bénéfice. Mais le gros du travail de l’éditeur reste classique. Si un livre très populaire correspond à l’esprit de la collection, il propose aux créateurs un contrat de cession de droit et fait un tirage plus élevé en vue d’une distribution plus large. Si lui-même a l’idée d’un ouvrage, il organise un concours, c’est-à-dire un appel à productions, accompagné d’un vote des visiteurs pour avoir une idée de ce qui plaît au moment de faire la sélection. Il conçoit l’ouvrage, en fait immédiatement un tirage, ou commence par le proposer en impression à la demande pour juger de son succès (et c’en est souvent un grâce au buzz produit par le concours). Enfin, il peut travailler sur des projets plus particuliers avec des créateurs qu’il a repéré et qu’il souhaite mettre en avant. Et comme toutes les images sont déjà disponibles en ligne, comme l’esprit est de proposer un beau livre, qui est une véritable raison d’être en tant qu’objet, le contenu n’est pas caché mais mis en avant, grâce à un script de “pageflipping”13, fait en flash et qui permet de feuilleter un livre sur un navigateur web classique, en voyant les pages tourner naturellement.

13 http://www.pageflip.hu/ (modèle original – il en existe aussi des versions gratuites très performantes) 44


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La diffusion Comment se passe ensuite la diffusion des ouvrages imprimés ? Tout d’abord, ils peuvent être vendus directement en ligne, comme les ouvrages imprimés à la demande. Le tirage n’a alors pour but que d’augmenter la marge en baissant les frais d’impression à la pièce. Et pour les faire arriver dans les librairies intéressées, un service est proposé à celles-ci pour leur permettre de commander tous les titres qui les intéressent en ligne à – 30%. Ils peuvent même utiliser le service d’impression à la demande pour produire des ouvrages qui n’existeront que dans cette librairie. Ce modèle a comme qualité d’économiser la commission perçue par les diffuseurs et distributeurs, et c’est pourquoi, aux Etats-Unis, des sites de ce type (comme le précurseur Indie Press Revolution14) ont fait leur apparition pour soutenir les petits éditeurs de comics et de jeux. Mais il n’est possible que si l’activité commerciale est faible, que la compagnie peut prendre en charge les envois sans y passer toutes ses journées, et si elle a réussi à attirer l’attention de librairies, ce qui est loin d’être facile tant elles croulent sous les propositions. Il est véritablement adapté aux très petites structures qui évoluent en dehors L’autre solution est de suivre le modèle classique, avec diffuseurs et distributeurs. L’intérêt de la dimension sociale du site d’éditeur est alors de pouvoir jouer, lors de la rencontre avec les représentants, sur le succès “avéré” du livre à proposer aux libraires. Il faut cependant être capable de les convaincre qu’il existe un lien entre le succès en ligne d’exemplaires imprimés à la demande, et le succès de la version imprimée “en gros”. Et même si la rencontre se passe bien, et que les représentants se donnent pour objectif de placer un grand nombre d’exemplaires en librairie, il faut être prêt à faire face, financièrement, à la possibilité que le titre, s’il a sa chance en librairie, peut révéler un décalage

14 http://www.indiepressrevolution.com/xcart/ home.php

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entre les goûts des membres et ceux du reste de la population. Auquel cas les retours pourraient asséner un coup dur à la maison, comme le système des offices sait si bien le faire. Un service qui n’est donc utilisé sur le site qu’avec une grande modération, pour offrir la chance d’un succès plus important aux ouvrages les plus porteurs.

Créer des ambassadeurs Les forums affichent très souvent le nombre de posts de chaque membre et attribuent des titres en fonction de ce nombre. Cette pratique qui pourrait être mal interprétée et vue comme un besoin toujours plus grand de compétition, vise en fait à récompenser par un système de “reconnaissance” ceux qui font vivre le forum. De la même manière, les membres qui participent activement au développement du site, qui communiquent à propos du site, le recommandent, devraient être récompensés par de la reconnaissance. Pas seulement par altruisme, mais aussi pour inciter les autres à les suivre dans ce sens. Pour ce faire, un système de points est mis en place, appelés points de prestige, que l’on peut gagner de diverses manières, comme en participant à un sondage ou à un concours, mais tout particulièrement, en faisant usage des outils de communication mis à disposition des membres.

Des outils de communication automatisés Dans sa page d’administration, sorte de pendant invisible de son profil, chaque membre peut effectuer divers opérations, comme communiquer par message privé avec d’autres créateurs. Mais surtout, des outils sont mis à sa disposition pour qu’il puisse facilement exporter son petit bout d’univers sur d’autres plate-formes. Des widgets permettent de faire apparaître aléatoirement un de ses favoris dans une barre de blog (ou autre page personnelle), d’inscrire son blog au flux RSS des commentaires sur sa production, pour que les avis donnés sur son travail apparaissent dessus en temps réel... Il peut ajouter à 45


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Editeur ou webmaster ?

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et autres connaissances. Une des leçons du web 2.0, c’est que les gens n’aiment rien autant qu’échanger, partager, créer des liens. En prendre conscience est aussi un moyen pour les éditeurs de réussir à prendre le virage d’une nouvelle édition.

On prend, comme donnée de départ de tous ces exemples, que l’éditeur a la volonté d’accompagner ses lecteurs dans la découverte de son catalogue. Cela paraît une caractéristique du métier d’éditeur que d’avoir toujours la plus grande affection pour ceux qui accordent de l’intérêt au fruit de son travail. Mais ce n’est pas toujours le cas. Il y a les éditeurs qui, passionnés par la littérature exigeante ou les raisonnements poussés, dépensent plus d’énergie à maudire en silence les illettrés qui n’achètent que des inepties qu’à partager leur passion avec leur petit groupe fidèle de lecteurs. C’est une erreur, car choyer ses lecteurs est bien, comme on l’a vu, la meilleure manière de les transformer en ambassadeurs de la maison auprès de leurs amis

Or, ce que l’éditeur partage, ce qu’il a à offrir, c’est son catalogue. Le but de ce site d’éditeur idéal, dont on a décrit des éléments constitutifs mais à peine esquissé le contour, est d’inciter les gens à découvrir ce catalogue dans sa cohérence, de les laisser construire une intimité avec les titres, en remettant au centre de l’équation leur expérience de lecteur. Dans ce site d’éditeur 2.0, c’est bien une affection commune pour les ouvrages qui lie les utilisateurs à l’éditeur et les utilisateurs entre eux.

son site une bannière publicitaire sur l’actualité du site. Et dans la plupart des cas, lorsqu’il met en place un de ces outils, il en est récompensé par des points de prestige.

Caractéristiques de ce nouvel éditeur par rapport au premier : un nombre infini d’illustrateur, dont une poignée suivie de près ; peu de livres, très travaillés par l’éditeur, au centre d’un réseau plus important de livres conçus par d’autres ; un départ sur internet, qui s’étend aux librairies intéressées puis à la distribution classiques, par des paliers successifs mais moins pénibles à assurer qu’auparavant. Une promotion par buzz, par recommandations, qui tire partie des réseaux sociaux.

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coNcluSioN

S’il y a une seule leçon à retenir du succès du Web 2.0, c’est le besoin qu’ont les gens de se sentir impliqués, de sentir qu’ils ont un pouvoir, même minime, sur leur environnement. C’est la base de la démocratie, et comme la démocratie, le Web 2.0 a ses dérives populistes. Il est aisé de sacraliser son lecteur sans jamais l’avoir rencontré, et de dénigrer l’internaute croisé à tous les coins de toile, et pourtant, plus notre société adopte les nouvelles technologies, et plus ces deux entités se confondent. Et l’internaute, pas plus que le lecteur, ne demande à ce que l’on nivelle la production vers le bas pour satisfaire des instincts primaires ; il demande qu’on lui laisse la liberté de doser ses activités de détente et de réflexion. Rien n’a changé, si ce n’est le besoin ancien de participer à son échelle. Les éditeurs n’ont rien à gagner en rejetant cette exigence d’un revers de la main. Des médias moins essentiels mais aussi moins scrupuleux s’engouffrent déjà dans cette brèche, et risquent, en entendant la demande des internautes, d’accentuer encore leur influence au sein des industries culturelles. C’est en ne faisant pas la sourde oreille à la demande des lecteurs d’être impliqués (comme ils le sont de plus en plus dans toutes leurs activités culturelles) que l’édition peut reprendre le dessus. Après tout, la lecture est une activité fondamentale,

plus exigeante que d’autres mais parfois plus satisfaisante intellectuellement. Elle mérite de conserver la place centrale qu’elle a encore sur internet, et pour cela, il faudrait que les principaux acteurs du milieu suivent les évolutions d’internet, plutôt que de s’enfermer dans une vision conservatrice qui, si elle est défendable, risque tout de même de faire plus de mal que de bien. Enfin, les éditeurs doivent prendre conscience que, s’ils sont sûrement les premiers défenseurs d’une certaine fonction du livre, ils ne sont pas les seuls amoureux de littérature. Or, s’ils ne prennent pas les mesures qui s’imposent, il se pourrait que le livre perdure, mais sans eux. Google, avec sa politique hyper-agressive de numérisation du catalogue mondial, est en train de tenter une sorte d’annexion dangereuse d’un univers du livre auquel il a peu à offrir. Or, son outil, GoogleBooks, est très bien pensé : il permet de consulter l’ouvrage recherché si possible, de trouver une bibliothèque où il est disponible, des liens vers les librairies en ligne qui le proposent, des liens vers les ouvrages cités dans la bibliographie ou qui le citent dans la leur... Google, pionnier du web 2.0, pourrait bien envahir le monde littéraire, si le monde littéraire tarde à envahir pas le web 2.0.

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biblioGrapHie commeNtée

Livres VIGNE Eric, Le Livre et l’éditeur, Paris, Klincksieck, 2008 Un portrait bibliophile mais pessimiste du secteur de l’édition au début du XXIème siècle. L’édition numérique n’est que très peu abordée et la question du livre en communauté est rejetée comme une perversion de l’acte de lecture, mais l’ouvrage vaut surtout pour se rendre compte à quel point, au fond, les amoureux de l’écrit ont peu à perdre de la mort potentielle du modèle économique actuel. SOCCAVO Lorenzo, Gutenberg 2.0, le futur du livre, Paris M21 Editions, 2007 Un ouvrage prospectiviste, dédié aux nouveaux supports de lecture et à l’édition électronique. Un peu trop dithyrambique pour être vraiment convaincant, mais très intéressant pour prendre conscience de toutes les expériences effectuées en matière d’édition numérique. Le VideoBlog associé : http://nouvolivractu.cluster21.com ANDERRUTHY Jean-Noël, Web 2.0 (R)évolutions et nouveaux services d’Internet, Editions ENI, 2007 Une sorte de guide du grand débutant, pour découvrir, mais surtout apprendre à utiliser, les outils qui caractérisent le Web 2.0. Internet & le Livre, chiffres clés de la vente de livres en ligne, Interforum L’étude publiée par le grand distributeur à partir de données TNS Sofres, Médiamétrie et surtout GFK

n’est sûrement pas la plus objective mais elle a le mérite d’être d’une précision impressionnante.

Et aussi... DE CHEZELLES Gilles, La dématérialisation des échanges, Lavoisier, 2006 FEILER Jesse, How to Do Everything with Web 2.0 Mashups, McGraw-Hill Education, 2007 HUSSHERR François-Xavier, HUSSHERR Cécile, CARRASCO Marie-Estelle, Le nouveau pouvoir des internautes, Timée Editions, 2006 ROUET François, Le Livre. Mutations d’une industrie culturelle, La Documentaion Française, 2007 SHUEN Amy, Web 2.0 : a strategy guide, O’Reilly, 2007 VOSSEN Gottfried, HAGEMANN Stephan, Unleashing Web 2.0, From Concepts to Creativity, Elsevier/ Morgan Kaufmann, 2007

Articles de Presse “Les méthodes de diffusion se multiplient”, dans Le Monde du 19/12/2007 Un petit article sur les différentes expériences de diffusion tentées dans le milieu de la musique, et qui permettent d’imaginer des équivalents dans le milieu du livre.

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CARZON David, GLAD Vincent, “La loi va mettre son nez dans le Web 2.0”, dans 20 Minutes du 16/04/2008 Un résumé qui aurait pu être intéressant sur le flou juridique qui, dans le cas de l’édition par exemple, peut faciliter la publication et diffusion de textes à caractère haineux ou de thèses extrémistes, mais qui choisit de s’attarder sur des affaires people sans grand intérêt... DUCOURTIEUX Cécile, FOUCART Stéphane, REVERCHON Antoine, “Le Web 2.0, un monde du gratuit qui vaut de l’or”, dans Le Monde Économie du 27/11/2007 Un dossier passionnant sur le modèle économique du Web 2.0, ses tâtonnements, ses victoires. En bonus, une petite colonne explique à merveille ce qu’on appelle web 2.0. LE GENDRE Bertrand, “Une année de l’histoire d’Internet”, dans Le Monde du 03/01/2008 De Radiohead contre l’industrie musicale au passage du NYTimes électronique au format gratuit, en passant par la crainte d’un retour de la “bulle internet”, un résumé des grands moments de l’année 2007 en ce qui concerne internet.

Le Monde 2 spécial “La Vie Connectée” (17/11/2007) PAPILLAUD Karine, “Ces blogueurs qui veulent passer pro” Comment ces nouveaux producteurs de contenus transforment la fréquentation de leur blog en revenu publicitaire et en vitrine commerciale pour leurs compétences. ULRICH Claire, “Plus belle, ma vie en ligne” Un long article, subjectif mais d’autant plus représentatif, sur le plaisir que procurent aux internautes les réseaux sociaux, blogs et autres univers partagés. WULWEK Diane, “Imprime-moi un objet” Pas vraiment de lien avec l’édition, dans cet article sur les machines à imprimer des objets, si ce n’est les possibilités offertes par ces étranges machines pour la création d’objets livres d’une toute nouvelle nature...

Courrier International spécial “Littér@ ture :” (13/03/2008)

NOROT Anne-Claire, “Editions à tirage limité” dans Les Inrockuptibles du 27 mai 2008

“Place au roman 2.0”, extraits d’un échange entre Gary SHTEINGART et Walter KIM pour le magazine Slate.

Un article carré, explicatif et intéressant, sur les éditeurs qui aimeraient tirer profit de la longue traîne.

Tout le débat autour de la littérature et du numérique résumé en trois pages. Impossible de faire plus instructif.

POTET Frédéric, “Le livre au pays des écrans”, dans le Monde 2 du 16/02/2008 Le témoignage d’un journaliste amoureux du bon vieux livre en papier et de plusieurs convertis à l’e-paper qu’il a interrogés. Objectif et instructif, ce long article est le meilleur moyen de découvrir les readers.

CLEE Nicholas, “La fin du livre n’est pas pour demain”, dans Prospect

RICHTELL Matt, TEDESCHI Bob, “Online shopping begins to lose some of its cachet”, dans The New York Times, 23/06/2007 Cet article américain montre que la vente en ligne est en train de ralentir, et que le modèle hybride, de plus en plus adopté, mêlera les capacités de service des sites internet avec le contact humain des boutiques physiques.

Un article anglais qui, bien qu’optimiste, permet de prendre conscience des avantages qu’il y a en France à avoir une législation particulière sur le livre. TAYLOR Paul, “Attention, le livre électronique décolle !”, dans The Financial Times Un bon résumé sur l’arrivée des readers, plus facile à lire, et moins spécialisé dans son approche, que Gutenberg 2.0.

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JORDISON Sam, “L’avant-garde s’installe sur MySpace”, dans The Guardian Un article étonnant sur ces jeunes auteurs britanniques qui s’auto-éditent, et se font découvrir sur MySpace, à la manière des nouveaux groupes de musique (mais avec une plate-forme moins adaptée). TZORTSIS Andreas, “Paulo Coehlo piraté par lui-même”, dans Newsweek Instructif, cet article court relate pourtant en détail le déroulement et les questions soulevées par l’expérience de Coehlo en Russie.

Sites internet http://publishing2.com Publishing 2.0 – The (r)Evolution of Media : Le site de référence sur l’édition numérique de journaux. Un bon outil pour observer au jour le jour l’évolution des grands quotidiens américains, à la tête de cette révolution (pragmatisme + gros moyens). http://www.oreilly.com

http://www.richcommerce.fr Un blog consacré aux applications riches dans le domaine du e-commerce. http://www.pronetariat.com Un livre d’abord, La révolte du pronetariat, mis en ligne gratuitement peu après sa sortie et qui prône la mise a disposition gratuite au plus grand nombre. http://www.nature.com Le site de l’éditeur scientifique Nature Publishing, qui a remporté le prix du “Meilleur usage de la plate-forme en ligne” (décerné par l’Association of Online Publishers). Magnifique à survoler pour voir comment un éditeur tire le meilleur d’Internet. http://www.lafraise.com Un site qui ne propose aucun contenu théorique mais devrait servir de modèle à tous les éditeurs désireux de mettre à profit le meilleur du web 2.0

Et aussi : Bebo : http://www.bebo.com

Le site-univers de Tim O’Reilly, l’homme qui a donné un sens et des limites au concept alors très flou de Web 2.0. L’immense majorité du site n’a rien à voir avec l’édition, mais les titres présentés (c’est en fait un site d’édition d’ouvrages techniques), les blogs proposés, donnent accès à un nouveau monde d’outils internet.

CaféSalé : http://www.cfsl.net del.icio.us : http://del.icio.us/ DeviantArt : http://www.deviantart.com Digg : http://digg.com/

http://pointlivres.blogspot.com

FlickR : http://www.flickr.com/

Blog de “réflexions sur l’édition et l’Internet.”

Facebook : http://www.facebook.com

http://lafeuille.homo-numericus.net

Fubar : http://fubar.com/

Blog de veille sur les innovations dans le domaine de l’édition électronique, sur le plan technique, économique ou culturel.

MySpace : http://www.myspace.com/ Netvibes : http://www.netvibes.com/

http://www.imazine.fr Un blog consacré principalement aux mondes du web-marketing et du e-commerce, qui porte un regard de professionnel sur tout ce qui touche à sa branche. 50




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