24 janvier 2014 —
N° 121
Stratégies & veille technologiques en environnement
Éditorial Priorités or not priorités ? Un rapport, une inauguration, un partenariat, un colloque : il n’en faut pas plus pour projeter sur le devant de la scène une filière et la qualifier de stratégique. Cette semaine, c’est l’hydrogène (voir P.3). Mais au vu des priorités régulièrement rappelées par les divers rapports ou plans nationaux, l’éco-économie ne manque pas de potentielles voies prioritaires. D’autant qu’il est vrai que par ses compétences technologiques et la structuration de son territoire, la France ne manque pas d’atouts pour s’attaquer de front à de nombreux challenges environnementaux. Peut-on donc encore parler de priorités sur lesquelles concentrer les efforts ? Je plaiderais plutôt pour une double stratégie : développer certes une capacité de fournir les moyens d’accélérer aux projets les plus mâtures ou les plus différenciant sur les thématiques déjà recensées, et parallèlement conserver l’œil ouvert et l’esprit alerte sur de nouvelles idées, fussent-elles des niches, partant du principe que les petits ruisseaux font aussi les grandes rivières. Outre le fait que les PME sont sources d’emploi, les enjeux environnementaux se prêtent très mal à une sélection dras-
tique de thèmes à favoriser. Peut-on par exemple négliger le marché de l’air sous prétexte qu’il n’est pas cité dans les plus récentes priorités? Laissons donc libre court aussi à la créativité. Deux thématiques émergentes méritent ainsi peut-être qu’on s’y arrête. C’est le cas de la filière des drones civils qui est soit porteuse d’avancées intéressantes en matière de gestion des questions environnementales (agriculture, bâtiment, gestion des risques), soit un marché propice à l’intégration d’autres innovations (propulsion d’énergie et stockage, capteurs divers etc.) Autre exemple, le biomimétisme. Là-aussi l’année 2013 a marqué la construction d’un socle de réflexion sur cette thématique transversale, source de véritables sauts technologiques et organisationnels, en général plus efficaces et moins impactants pour l’environnement. Deux sujets sur lesquels Green News Techno ne manquera donc pas de vous proposer prochainement de nouveaux services d’alerte.
Cécile Clicquot de Mentque
Sommaire : Acteurs Start-up
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• Nouvel acteur en phase industrielle dans les ORC La société Aqylon démarre son activité commerciale avec deux projets industriels de valorisation de chaleur fatale. • La variation de vitesse nouvelle génération arrive sur le marché Variapower s’attaque au marché du cycle, avec en ligne de mire, l’automobile et les machines industrielles.
Enjeu • La filière hydrogène confirmée comme stratégique Un rapport parlementaire pose les bases d’un déploiement de la filière hydrogène tandis que Pragma Industries et Trifyl illustrent la vivacité du secteur.
Développement industriel • Accélération industrielle pour des profilés composites biosourcés
Changement de stratégie pour Innobat qui industrialise désormais des pièces composites finies biosourcées ; premiers marchés en 2014.
À suivre... • Nouvel incubateur à Paris : respirer dans la ville. • Lancement officiel du cluster « Chimie verte » de Midi-Pyrénées
Technologies
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Éco-matériaux • Des tissus de fibres de bambou : une première industrielle Cobratex a réussi à produire des fibres longues de bambou et ainsi du fil pour développer des composites à base de tissu de bambou.
Air • Formaldéhyde : la mesure en continu enfin possible La start-up In’Air Solutions, primée par Nexity, fait sauter un verrou majeur dans l’analyse du formaldéhyde
Étude • Bio-déchets et air intérieur ? Une étude de suivi des acariens et bactéries menée par l’université de France-Comté
Énergie • Lumiroute entre en phase expérimentale Limoges teste la combinaison d’un revêtement clair et d’un éclairage à LED pour réduire les consommations d’énergie.
Brevets À retenir
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• Finances (Freemens) • Partenariats (Global Bioénergies, Qualitropic et Instituts Carnot, ImaGeau) • Développements industriels (Thomson, Solvay) • Ressources (association HQE sur la qualité de l’air intérieur, Cetim sur l’usinage durable) • Agenda
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24 janvier 2014
Acteurs
N°121 © Green News Techno
Développement industriel Accélération industrielle pour des profilés composites biosourcés La société Innobat qui dans son schéma d’origine avait vocation à être une société de R&D dans le domaine des matériaux innovants biosourcés pour le bâtiment (cf. GNT N°44) vit depuis 2013 une mue industrielle. Plutôt que de penser ses développements dans la seule optique d’un transfert industriel - démarche toujours longue - Michel Maugenet, son fondateur, a décidé de porter lui-même la mise sur le marché de certains produits innovants mettant en œuvre ses matériaux. Au cœur de sa démarche, il y a un matériau, le Pulgreen, un composite fait d’une mèche de fibres de lin imprégnées de résine thermodurcissable, destiné à la production de profilés (par pultrusion). Cette capacité de réaliser des profilés pultrudés à base de fibres naturelles constitue une vraie avance technique. D’où l’importance de conforter les futurs marchés de masse que sont notamment les huisseries de fenêtres en rassurant d’abord les industriels avec des pièces plus simples. C’est ainsi qu’Innobat a développé une pièce de renfort en Pulgreen (l’éco-renfort) destinée à remplacer les renforts en acier intégrés aux profilés PVC des fenêtres. Ces renforts sont incontournables pour garantir la tenue mécanique des profilés (risque de déformation) exposés à la chaleur du soleil (encore plus quand ils sont en couleur). Or le métal constitue un pont thermique qui empêche les fenêtres renforcées de répondre aux nouvelles exigences thermiques. D’une pierre deux coups, Innobat répond donc à la problématique thermique et fait la démonstration du potentiel technique de son matériau biosourcé. Un vrai galop d’essai pour le secteur des fenêtres avant d’envisager une conception tout en Pulgreen.
2013 a permis de travailler commercialement sur ce marché, aboutissant à des essais concrets chez un fabricant de fenêtres (Prefal) dont la prochaine nouvelle gamme 2014 de fenêtres intègrera donc les éco-renforts d’Innobat. Et un deuxième contrat pourrait se signer très vite. Il s’agit donc désormais de suivre en production. Dans un premier temps, Innobat continuera de s’appuyer sur son partenaire de pultrusion dans l’Oise pour produire ses profilés de renfort. « Nous ciblons sur 60 000 mètres de profilés pour 2014 », confirme Michel Maugenet. Mais parallèlement, il faut préparer une ligne industrielle propre à Innobat. C’est donc l’objectif de l’année de travailler à la montée de la puissance commerciale et à l’optimisation du procédé industriel avant d’arrêter la conception définitive de la future usine. Une levée de fonds de 500 k€ a été bouclée à l’automne pour cela, à laquelle s’ajoute aussi un soutien de l’Ademe pour gagner en productivité sur la ligne. L’objectif est d’être prêt d’ici 18 mois. Ce travail d’optimisation sera par ailleurs essentiel pour les futurs transferts de la technologie vers les industriels souhaitant utiliser le pulgreen pour la fabrication de profilés en grande quantité, Michel Maugenet souhaitant pour sa part présenter en fin d’année à Equip’Baie un prototype complet de fenêtre en Pulgreen, pour démontrer en taille réelle le bien-fondé de sa technique.
Une R&D poursuivie A noter que la maturité des développements d’Innobat tiennent aussi à la résolution ou validation de quelques autres points techniques. C’est le cas des mises en peinture
des matériaux ou des co-extrusions de revêtements qui ont fait l’objet d’essais. De même, des travaux sont poursuivis avec l’Ecole des Mines d’Alès sur les moyens d’améliorer la tenue à l’humidité des fibres de lin (plusieurs pistes explorées parallèlement). Et c’est enfin le cas des travaux poursuivis sur la formulation du matériau. Si au départ, Innobat avait réussi à montrer la faisabilité d’un matériau 100 % biosourcé (fibres de lin et résine époxy biosourcée du marché), les problèmes d’approvisionnement en résine et la faible acceptabilité de l’époxy par les professionnels ont eu raison de ce choix. Le Pulgreen actuel est donc 60 % biosourcé (les fibres), la résine étant un polyester pétrosourcé. Cela dit, Innobat procède d’ores et déjà à des essais pour proposer une version du Pulgreen intégrant des nouvelles résines polyester 20 à 40 % biosourcées. En revanche, le projet qu’Innobat menait sur des résines époxy biosourcées, produites à base de tannins, a été mis en stand-by. Ce qui n’empêche pas la start-up de continuer à mener avec ses laboratoires partenaires des travaux sur la chimie des résines en général. Un exemple, hors composites, est la finalisation en 2013 d’un projet collaboratif (avec la société Spit, groupe ITW) ayant abouti à une résine de scellement époxy / vinylester / polyester, pour partie biosourcée (30 %), à impact réduit sur l’environnement et moindre dangerosité (problème de gestion des déchets résiduels dans les cartouches d’application). Autant d’initiatives qui positionnent aujourd’hui Innobat comme un interlocuteur de choix dans les matériaux bio-sourcés. Innobat > 04 67 59 30 36
À suivre... • Paris Incubateur et le i-Lab (laboratoire des nouvelles idées) d’Air Liquide ont annoncé la création d’un incubateur de jeunes entreprises innovantes sur le thème de « respirer dans la ville ». Objectif, identifier les réponses technologiques pour répondre à l’enjeu de la qualité de l’air urbain : lutte contre les émissions polluantes, mesure, cartographie et information, soins aux personnes en difficulté respiratoire, mise à disposition d’air pur en mobilité, applications autour du bien-être. Outre de disposer des services classiques des incubateurs parisiens (hébergement, coaching, mise en réseau, accès aux financements etc.),
les start-up bénéficieront d’un accompagnement stratégique des experts d’Air Liquide, qui animeront en outre des ateliers de formation. Un appel à candidatures est ouvert jusqu’au 28 février pour sélectionner les entreprises à intégrer. > www.parisincubateurs.com/respirerdans-la-ville • Le cluster « Chimie verte » de Midi-Pyrénées a été officiellement lancé le 20 janvier à Toulouse. Annoncé fin 2012 et opérationnel depuis l’an dernier, ce cluster vise à mutualiser les compétences de la chimie sur ce
thème stratégique. Il s’agit notamment de soutenir des projets innovants communs. 37 adhérents sont déjà enregistrés parmi lesquels Pierre Fabre, Arkema, BASF, mais aussi des PME (Solvionic, bois valor, Pylote...). Les premiers travaux visent à établir un recensement précis des compétences industrielles, académiques et de formation. Autres priorités annoncées, la gestion mutualisée de déchets et le bilan des ressources naturelles régionales. Le cluster est présidé par Cédric Cabanes, également président de l’UIC MidiPyrénées. > www.clusterchimieverte.fr
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