Pierre-Henri : c’est la démocratie représentative qu’il faut sauver, y compris contre ces « gadgets démocratiques » que sont fréquemment les instances participatives, trop facilement noyautées ou détournées par des minorités agissantes ou militantes ! Quant au cinquième peuple, « le peuple-récit », il est le produit d’une histoire, toujours particulière, actualisée par la volonté de la continuer. C’est la nation selon Renan : « Avoir des gloires communes dans le passé, une volonté commune dans le présent ; avoir fait de grandes choses ensemble, vouloir en faire encore, voilà les conditions essentielles pour être un peuple » (Ernest Renan, Qu’estce qu’une nation ?, 1882). La méthode démocratique est universelle ; aucune nation ne l’est, ni aucun peuple, ni donc aucune démocratie réelle. Aussi aurait-on tort de prétendre diluer la France ou l’Europe, comme réalités historiques, dans l’universalisme abstrait d’une démocratie purement formelle ou méthodologique. Mais on aurait tort aussi, et plus gravement, de renoncer à la méthode démocratique (élections, délibérations, décisions, redditions des comptes) au nom d’un grand récit nationaliste ou populiste ! « Pourquoi est-on démocrate ? », demande Bouziane Behillil dans le débat. Notre conférencier lui répond : « pour grandir », pour « devenir adulte », ce qui suppose qu’on renonce à la fois « à la toute-puissance et à l’impuissance », l’une et l’autre mortifères, et qu’on assume les trois traits qui distinguent l’adulte de l’enfant : l’expérience (le rapport au monde), la responsabilité 9