Manifestations de l art total_Art Nouveau, Szecesszió, Sezession, Jugendstil_FR

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Manifestations de l’art total en Roumanie

ART NOUVEAU 2

Strengthening the cultural identity of the Danube region by building on common heritage of ART NOUVEAU

L’exposition « Manifestations de l’art total en Roumanie. Art Nouveau, Szecesszió, Sezession, Jugendstil », le catalogue et d’autres documents et événements connexes ont été produits par l’Institut National du Patrimoine dans le cadre du projet ART NOUVEAU 2. Le projet est réalisé dans le cadre du Programme Transnational Danube, cofinancé par les Fonds de l’Union européenne (ERDF, IPA II).

EQUIPE DU PROJET

Irina IAMANDESCU – coordinateur du projet, directeur adjoint monuments historiques

Lucia LECA, architecte

Ana CHIRICUȚĂ, restaurateur

Simina STAN, historien

Florentina MUREA-MATACHE, architecte

Irina DOBRIȚĂ, spécialiste communication

CONSULTANT SCIENTIFIQUE ET RÉVISEUR

Françoise PAMFIL, architecte

AUTEURS DES TEXTES

Simina STAN, Florentina MUREA-MATACHE, Françoise PAMFIL, Lucia LECA, Ana CHIRICUȚĂ

CONCEPTION GRAPHIQUE

Ana CHIRICUȚĂ, Lucia LECA

ORGANISATEUR DE L’EXPOSITION

PARTENAIRES DE L’EXPOSITION ET ÉVÉNEMENTS ASSOCIÉS

REMERCIEMENTS AUX PARTENAIRES impliqués dans le développement de l’exposition et des événements associés :

Musée National de Peleș: Narcis Dorin Ion, directeur général; Mircea-Alexandru Hortopan, directeur du patrimoine.

Musée Départemental de Târgu Mureș - Palais de la Culture: Szántó Loránt, directeur du département; Oniga Erika, muséographe.

Aquatim - Musée de l’Eau : Ilie Vlaicu, directeur général ; Loredana Leordean, coordinatrice des programmes éducatifs.

AVEC LE SOUTIEN DE: Musée national d’art de Roumanie, Musée national d’histoire de Roumanie, Musée départemental de Teleorman, les Archives nationales de Roumanie, le Service départemental des Archives nationales Iași, le Service départemental des Archives nationales de Mureș, l’Institut de l’Histoire de l’art « G. Oprescu », Oradea Heritage, Association ARCHÉ, BETA. Bianca Azap & Dan Purice, Dragos Andreescu. Monumentaliste, Andreea Andronic, Alexandra Baboi, Raluca Bărbulescu, Victor Bunoiu, Veronica Burtea, Ana Dumitru, George Dumitriu, Alexandru Duță, Rebeca Gag, Mădălin Ghigeanu, Ioan Grămada, Camil Iamandesu, Raluca Iosipescu, Thomas Laschon, Irina Leca, Anca Majaru, Alexandru Mexi, Ovidiu Micsa, Ana Maria Pop, Adrian Spirescu, Matei Eugen Stoean, Liana Carina Tătăranu, Árpád Udvardi

Manifestations de l’art total en Roumanie

Art Nouveau, Szecesszió, Sezession, Jugendstil

Catalogue de l’exposition

Description CIP de la Bibliothèque Nationale de la Roumanie Manifestations de l’art total en Roumanie. Art Nouveau, Szecesszió, Sezession, Jugendstil : catalogue de l’exposition.Bucarest : Patrimonia, 2022

ISBN 978-606-95194-6-2

© Institut National du Patrimoine

Tous droits réservés. Aucune partie de cette publication ne peut être reproduite, stockée ou transmise par voie électronique, mécanique, copie, enregistrement ou autre sans l’autorisation préalable de l’Institut National du Patrimoine.

Vitrail de la salle d’honneur Château de Pelișor, 1899-1903 Sinaia

OFFRE:

Couverture 1 : Palais de la Culture, Târgu Mureș © INP. Georges Dumitriu

Couverture 4 : Palais Vulturul Negru, Oradea © Oradea Heritage

Page 3 : Château de Pelisor, Sinaia © INP. Lucie Leca

Page 5 : Palais Salamon Brück, Timișoara © INP. Ovidiu Micșa

Détail figuratif sur la façade du côté de la place Unirii Palais Salamon Brück, arh. Székely László, 1910-1911
Timișoara

Introduction

L’Art Nouveau est un style et un mouvement international d’art, d’architecture et d’art appliqué d’une intensité captivante, qui s’est manifesté principalement au début du XXe siècle. C’est pourquoi on l’appelle aussi l’art de 1900. Il se distingue comme un style précieux et inspirant de reconsidération et de renouvellement esthétiques cohérents à travers ses manifestations dans les arts décoratifs. Il traverse les domaines, surmonte les influences, dissout les canons et invente. Connu en Europe sous divers noms: Art Nouveau en France, Sezession en Autriche, Szecesszió en Hongrie, Jugendstil en Allemagne, Modernismo en Espagne, Modern Style en Grande-Bretagne, Stile Liberty en Italie, etc., le style est populaire entre 1890 et 1910 , à la Belle Époque, qui s’achève avec le début de la Première Guerre mondiale. Réaction contre l’art académique, l’éclectisme et l’historicisme de l’architecture et des décors du XIXe siècle, le style est fondamentalement moderne, Nouveau, gracieux et élégant. Le mouvement homonyme représente une libération des canons et des règles de composition presque axiomatiques. Ainsi, l’Art Nouveau - ou art total - invite à la découverte de la beauté de la nature, à la contemplation de l’équilibre parfait de l’asymétrie, à la célébration du hasard et à l’émotion du mouvement. Fluidité, grâce et élégance sont sa triade caractéristique.

Souvent inspiré par des formes naturelles telles que les courbes sinueuses des plantes et des fleurs, l’Art Nouveau se caractérise par le dynamisme, l’inattendu et le flottement. Tout un arsenal graphique stylisé - majoritairement marqué par la fluidité, les textures finement équilibrées, les combinaisons inédites ou encore l’impertinence plastique des lignesrecourt à l’utilisation de matériaux modernes, notamment le fer, le verre, la céramique et plus tard le béton, soutenant le souci de créer des formes insolites et de grands espaces ouverts.

La chromatique et les textures répétitives donnent aux éléments de l’art du début du XXe siècle une nouvelle visibilité, et les territoires d’expression sont infiniment ouverts. La simultanéité avec le pointillisme et avec de larges mouvements d’avantgarde explique l’émulation du style. La standardisation produite par la révolution industrielle fait que l’Art Nouveau embrasse la complexité et la diversité, et que le Jugendstil intensifie la beauté des séries. Mosaïques, vitraux, placages de céramique et enduits décoratifs impriment l’identité spatiale des bâtiments, qu’il s’agisse d’édifices publics ou de simples résidences. Des masquerons et des registres décoratifs soigneusement calibrés y répondent, dans de nouvelles densités, ou sont spectaculairement prolongés par des séquences d’entrée, des couloirs et des escaliers où la lumière naturelle devient l’acteur principal. L’étonnement et la surprise sont les effets spatiaux.

Dans les intérieurs, les meubles, les plafonds, les éléments muraux lambrissés ou en stuc, ainsi que les luminaires où la convergence est accentuée dans la composition, proposent des environnements gracieux, avec des chaînes de moments harmonieusement articulés et des espaces subtilement dessinés.

Organiques, surcapitalisées, allongées et très décoratives, les lettres Art Nouveau peuvent constituer une manifestation à part entière incluse dans le champ de l’illustration. La publicité du début du XXe siècle intègre, à travers des expressions Art Nouveau, des éléments mémorables totalement insolites et réécrit les codes de la communication visuelle.

L’exubérance, l’enthousiasme et l’esprit de l’époque sont les éléments caractéristiques du style qui, quel que soit le nom sous lequel il est connu dans différents pays, palpite fébrilement, se développe étonnamment et apporte de nouvelles expressions dans tous

les domaines artistiques dans lesquels il se manifeste.

En Roumanie, les manifestations d’art total connaissent des noms donnés par les influences majeures à travers lesquelles l’architecture, les intérieurs, le mobilier et l’art appliqué finissent par se réaliser.

Ainsi on rencontre en Transylvanie à la fois Sezession, Szecesszió et Jugendstil, et dans l’Ancien Empire l’Art Nouveau.

Des noms tels que Gustav Klimt, Baillie Scott, Ludwig Bernhard, Marcel Kammerer, Carl Witzmann, Hans Bolek, J. Soulek, Karel Liman, la Reine Marie, Daniel Renard, Marcell Komor et Dezső Jakab, Székely László côtoient le non moins célèbre Émile Gallé , René Lalique, Karl Fabergé, L.C. Tiffany, les frères Daum, Almaric Walter & Henri Bergé, Ferdinand Benedikt von Poschinger, Marius Ernest Sabino, Christian Désiré, R. Fournier, Emil Arnold Krog, Gotfred Rode, mais aussi Joseph Franz Maria Hoffmann. Tous complètent la beauté des espaces intérieurs aux côtés des modèles établis D’Argental, Loetz Wietwe ou Eugène Baudin, Clément Massier et Zsolnay-Pécs pour n’en citer que quelques-uns.

L’exposition intitulée « Manifestations de l’art total en Roumanie. Art Nouveau, Sezession, Szecesszió et Jugendstil » vous invite à découvrir les débuts éphémères de ce style, à observer attentivement les parcours proposés dans le château de Pelisor. Ensuite le Casino de Constanţa met sous vos yeux un espace qui appartient à la fois à la ville et à la mer. Le Palais de la Culture de Târgu Mureş change le lexique en étant un emblème élégant et raffiné de la société moderne du début du XXe siècle. L’architecture industrielle est touchée par Szecesszió, et l’un des exemples apportés par l’exposition est l’Usine d’eau d’Urseni à Timișoara.

Maison Stork, arh. Alexandre Clavel, 1911-1913

Str. Vasile Alecsandri 16, Bucarest © Matei Eugen Stoean

Des débuts éphémères

L’Exposition générale de Bucarest de 1906 marque un triple anniversaire : 1800 ans depuis l’établissement des premiers colons roumains en Dacie, le 25e anniversaire de la déclaration du Royaume de Roumanie en 1881 et 40 ans du règne de Carol I, étant inspirés d’événements universels ou nationaux similaires à travers l’Europe. Le plan général est réalisé par les architectes Ștefan Burcuș, Victor Șephănescu, en collaboration avec le paysagiste Édouard Redont, l’inspecteur général est l’architecte Ion D. Berindei, tous étant nommés par le commissaire général Constantin Istrati. L’exposition comprend des pavillons: national (France, Hongrie, Autriche), régional (Transylvanie, Bucovine, Dobrogea), administration locale et générale, et représentants de l’industrie, de l’agriculture, du commerce, des transports, de l’alimentation, un total de 167 bâtiments. La grande majorité d’entre eux sont des structures éphémères. Les pays invités ont choisi d’exprimer leur identité à leur manière : la France dans le style Beaux Arts, tandis que l’Autriche choisit la modernité Sezession, et le pavillon hongrois affiche un style vernaculaire spécifique. L’image architecturale générale qui prédomine est celle du style néo-roumain, mais comme toute l’Europe est fascinée par l’Art Nouveau, on remarque aussi sur les photos quelques présences pittoresques, voire exotiques, malgré la volonté manifeste de Constantin Istrati. La tentation de la liberté des nouvelles formes était trop forte pour les architectes roumains, le public bucarestois et non seulement.

2. Brasserie Bragadiru, Str. Al. Lăpușneanu 16, Iași, avant 1914 © Carte postale, Service départemental des Archives nationales de Iași

1. Vue d’ensemble du Parc Carol, Bucarest, 1906 © Album Exposition générale roumaine 1906, Institut d’Histoire de l’Art « G. Oprescu »

3. Le buffet du parc Copou, architecte Ignio Vignali, Iași, 1901 © Carte postale, Service départemental des Archives nationales de Iași

Dans l’arc extracarpatique de notre pays l’Art Nouveau / Sezession / Szecesszió s’affirme avec un certain retard, les architectes adoptent ce style unique notamment dans les expositions générales et les programmes de loisirs : casinos, grands magasins, restaurants, cinémas, hôtels, pavillons dans les parcs, établissements balnéaires.

Après la Première Guerre mondiale, le public se désintéresse de l’Art Nouveau, et la valeur marchande de ces immeubles diminue, et avec elle le profit, c’est pourquoi, du moins à Bucarest, certains propriétaires réaménagent radicalement les façades des immeubles construits dans le style Art Nouveau. C’est arrivé dans le cas des cinémas : Bulevard, Lumina, Regal et Trianon du boulevard Elisabeta et de l’hôtel Athénée Palace construit entre 1912-1914 par l’architecte français Théophile Bradeau, le bâtiment a été modernisé à la fin des années 1920 par l’architecte Duiliu Marcu.

4. Arc de Triomphe, architecte
Petre Antonescu, Bucarest, 19181921 © Carte postale
5. Boulevard Elisabeta, Bucarest, vers 1910 © Carte postale
6. Hôtel Athénée Palace (aux façades Art Nouveau), architecte
Daniel Renard, Bucarest, vers 1912
© Carte postale
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La résidence royale de Pelișor

La résidence d’été des héritiers au trône, construite sur la demande de Charles Ier, entre 1899 et 1903, complète l’ensemble du complexe royal de Peleș, dans le style « Altdeutsch » de la Néo-Renaissance allemande. L’architecte tchèque Karel Liman a rencontré de nombreux obstacles lors de la construction de Pelișor, qui repose sur des fondations déjà existantes. Il a adapté le projet de 1883 qui avait une fonction administrative et a renforcé la zone contre les glissements de terrain. L’absence de façade principale est compensée par le volume de la toiture accentué par les deux tours, la ronde du sud-ouest, et la principale carrée du sud-est, qui confèrent de la verticalité à l’édifice. L’alternance entre la pierre à facettes qui orne toute la hauteur du rez-de-chaussée, les encadrements en pierre des fenêtres et entrées et le système fachwerk des étages, complétée par le jeu des interstices de formes différentes, des balcons et terrasses , sont le fruit de la collaboration entre le roi et l’architecte.

A Pelișor, le lieu où la reine Maria a créé un « continuum », chacune des 70 chambres a sa propre histoire, à commencer par le choix de la bonne taille du hall et de l’escalier d’honneur pour pouvoir reproduire le prestige d’une résidence royale et continuant avec l’association des couleurs, des textures et de la modénature pariétale, l’imagination des plafonds, la sélection des essences de menuiserie et de mobilier, pour préserver la tranquillité d’une maison. En fait, les travaux d’aménagement intérieur de Pelișor ont été réalisés jusqu’en 1929.

L’entrée principale avec un perron du château est située sur le côté est, car la résidence royale se développe sur l’axe est-ouest. La salle d’honneur ponctuée de colonnes de bois est revêtue sur toute la surface du rezde-chaussée de lambris à caissons. La lumière entre ici par le plafond vitré, décoré d’éléments floraux et d’une fenêtre généreuse placée du côté nord. La cheminée est placée dans une alvéole du même côté. Mais les éléments centraux sont l’escalier en chêne sculpté et la galerie du premier étage.

Au rez-de-chaussée, côté sud, se trouve l’Appartement du Roi Ferdinand (salon, bureau, salle de bain). Puis sur l’aile ouest se trouve la salle à manger royale, suivie du côté nord par l’appartement du Maréchal de la Cour. Au premier étage, côté est, se trouve l’appartement des enfants (salle de jeux, salle à manger, chambre de la gouvernante, chambre et salle de bain). L’aile sud est occupée par l’Appartement de la reine Marie (salle de marbre, chapelle, bureau, chambre, boudoir, salle de bain) puis les Appartements des Dames situés du côté ouest. Au deuxième étage de la tour principale, entre 1903 et 1905, la Chambre dorée a été aménagée. Des tiges et des feuilles d’acanthe, en stuc doré, recouvrent le plafond, toute la surface pariétale et une partie de la cheminée. Les portes sont ornées de la fleur royale sculptée dans l’ivoire, les lucarnes et les meubles dorés rappellent la tradition celtique, tandis que les vitraux Tiffany des fenêtres adoucissent la lumière.

1. La chambre de la reine Marie

© Musée national de Peleș

2. La niche de l’appartement de la reine Marie

© INP. Ana Chiricuță

3. Détail du plafond de la Chambre dorée, voûte terminée par une croix celtique

© INP. Florentina Murea-Matache

4. La chambre dorée

© INP. Lucia Leca

5. L’atelier de peinture de la reine Marie

© INP. Lucia Leca

6. Les façades sud-est

© INP. Florentina Murea-Matache

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Le Casino de Constanța

Construit pendant la frénésie des casinos, qui s’est propagée dans toute l’Europe au début du XXe siècle, le Casino de Constanta s’est défini, dès sa construction, non seulement comme le principal représentant des programmes de loisirs dans notre pays, mais surtout comme un symbole de l’influence française en Roumanie. Le bâtiment a été conçu entre 1903 et 1907 par le jeune architecte Daniel Renard, récemment diplômé de l’École des Beaux-Arts de Paris, sur la demande de la municipalité de Constanța, choisissant le style Art Nouveau comme moyen d’exprimer le processus de modernisation de la Roumanie au cours du règne de Carol I. La construction du casino a eu lieu entre 1907 et 1910, celui-ci s’élevant sur un site spécialement choisi dans la péninsule de la vieille ville, le long de la spectaculaire promenade au bord de la mer Noire.

Profitant de la position privilégiée, par la solution ingénieuse des plans et du volume, mais surtout par le traitement magistral du vocabulaire décoratif, l’architecte est parvenu à créer un objet qui semble appartenir à la ville et à la mer, à la terre et au ciel en même temps. Le Casino de Constanța se positionne comme un emblème du style Art Nouveau en Roumanie, principalement en raison de son identification avec un objet architectural déterminant pour « l’Art total », le mouvement qui a repensé l’art et l’architecture modernes du début du XXe siècle. Daniel Renard a examiné avec soin tous les aspects de la construction, de la structure et de l’architecture à

la décoration et à l’aménagement intérieur, incorporant habilement tout le registre du vocabulaire de l’Art Nouveau français dans la plupart des éléments du bâtiment. Ainsi, l’extérieur fait une référence suggestive à la symbiose des deux mondes, la ville et la mer, qui est dominée par de grandes ouvertures accueillantes, comme le portique de la façade principale vers le boulevard ou les vides généreux qui suivent des lignes fluides, décorées ou encore conçues sous la forme d’inspiration marine. Les motifs décoratifs d’inspiration marine ou végétale, les formes courbes et sinueuses sont également repris à l’intérieur, on les retrouve dans le langage des décorations murales, des éléments de ferronnerie et de menuiserie, ainsi que dans les installations et objets de décoration.

1. Les façades nord et ouest

© Association ARCHÉ. Irina Leca

2. Façade nord, vitrage vers la salle de spectacle, en forme de coquillage et encadré par des éléments végétaux

© Association ARCHE. Marian Stéréa

3. Le plafond de la salle de spectacle

© Ana Dumitru

4. Escalier d’honneur

© Ana Dumitru

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Palais de la Culture de Târgu Mureș

Le Palais de la Culture de Târgu Mureș est un bâtiment emblématique du style Szecesszió (Sezession hongrois) de Transylvanie, qui représente l’une de ces œuvres synthétiques d’art total, par son identification à un objet architectural complexe, qui traite profondément et unitairement de tous les types de l’art, jusque dans les moindres détails.

Le palais a été conçu par les architectes bien connus de l’époque, Komor Marcell et Jakab Dezső, à partir de 1908, en réponse à un projet de loi qui prévoyait la construction de maisons de la culture dans les villes de province à l’occasion du 40e anniversaire du sacre de FrançoisJoseph. Le maire de Târgu Mureș à l’époque, György Bernády, a remarqué l’opportunité d’aligner la ville sur les grands centres culturels à l’ouest de l’Autriche-Hongrie, en érigeant d’importants bâtiments publics qui répondraient aux besoins de la société moderne dès le début de le 20ème siècle.

Ainsi, après le projet du nouvel hôtel de ville, les deux architectes ont pensé, dans le même espace urbain central nouvellement créé, un noyau culturel important non seulement pour la ville de Târgu Mureș, mais pour toute la Transylvanie. Le palais comprend une salle de concert, un musée, une bibliothèque, une école de musique, mais aussi des espaces commerciaux et un café. Des premières esquisses réalisées en 1908 à la somptueuse inauguration en 1913, plus de 150 personnes ont travaillé à la réalisation de l’édifice, qui ont

pensé et mis en œuvre les moindres détails. Ainsi, si l’architecture du bâtiment est l’œuvre des architectes Komor et Jakab, le programme iconographique et les éléments de décoration extérieurs et intérieurs sont dus aux membres de la Colonie d’art Gödöllő.

Le couronnement de Szecesszió, dans sa version mature, se fait sentir au Palais de la Culture de Târgu Mureș dans les moindres détails, des façades décorées de mosaïques, de reliefs et de profils, aux intérieurs riches, mêlant plusieurs types d’artfiguratif, décoratif, meubles - une synthèse de style en Roumanie.

1. Les façades sud-ouest et sud-est

© INP. Georges Dumitriu

2. Balcon décoré de mosaïque, façade sud-est

© INP. Georges Dumitriu

3. Détail de la charpente en pierre façonnée, entrée latérale

© INP. Georges Dumitriu

4. Peinture murale « Les Chamans »

© Thomas Laschon

5. Foyer couloir transversal

© INP. Georges Dumitriu

PARTENAIRES DE L’EXPOSITION ET ÉVÉNEMENTS ASSOCIÉS

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ART NOUVEAU

Strengthening the cultural identity of the Danube region by building on common heritage of ART NOUVEAU

L’exposition « Manifestations de l’art total en Roumanie. Art Nouveau, Szecesszió, Sezession, Jugendstil », le catalogue et d’autres documents et événements connexes ont été produits par l’Institut national du patrimoine dans le cadre du projet ART NOUVEAU 2. Le projet est réalisé dans le cadre du programme transnational Danube, cofinancé par les Fonds de l’Union Européenne (ERDF, IPA II). Ce produit est une carte de voeux.

Aleea Peleșului 2, Sinaia

Chambre dorée de la reine Marie Château de Pelișor, arch. Karel Liman, 1873-1914

© INP. Ana Chiricuță

Bd. 3 August 1919 1, Timișoara

arh. Székely László, 1914

9. Palais de Neptun

© INP. Lucia Leca

Aleea Peleșului 2, Sinaia

8. Château de Peleș arch. K. Liman, 1872-1924

© Monumentalist. Dragoș Andreescu

Str. Al. Macedonski 53, Craiova

7. La Maison Mirică arch. Dimitrie Maimarolu, 1898

© INP. Lucia Leca

Aleea Peleșului 2, Sinaia

6. Château de Peleș arch. Karel Liman, 1873-1914

© INP. Lucia Leca

Str. Iosif Vulcan 11, Oradea

© INP. Simina Stan 5. Maison Darvas La Roche arch. les frères Vágó, 1909-1910

Piața George Enescu 1, Arad

4. Palais Culturel arch. Szántay Lajos, 1911-1913

© INP. Ovidiu Micșa

Str. Florimund Mercy 7, Timișoara

3. Palais Ferencz Emmer arh. Székely László, 1907

© INP. Raluca Bărbulescu

Secuiesc

Str. Baróti Szabó Dávid, Odorheiu

© INP. Simina Stan 2. Lycée «Tamási Áron», arh. Pápai Sándor, 1910-1911

Piața George Enescu 1, Arad

1. Palais Culturel arh. Szántay Lajos, 1911-1913

L’Usine d’eau no. 1 Urseni - Timișoara

Inaugurée en 1914 dans le cadre des initiatives de passage à un système centralisé d’approvisionnement en eau de la ville de Timișoara, l’ensemble de l’Usine no. 1 est un objectif représentatif de l’architecture industrielle de Szecesszió, non seulement de Timișoara, mais de tout le pays. L’importance du bâtiment pour le patrimoine architectural appartenant au début du XXe siècle est renforcée par son appartenance au programme de construction industrielle, qui à cette époque prend un essor particulier, l’édifice utilitaire répondant habilement aux deux exigences techniques, mais en même temps s’appropriant le langage de l’Art 1900. Il garde les mêmes sources d’inspiration, mais les détails et motifs utilisés au niveau plastique sont beaucoup plus abstraits et géométrisés, et la maîtrise avec laquelle ils sont traités définit la densité décorative.

Le bâtiment de plan circulaire nommé « Le Groupement de puits » fait partie de l’ensemble de la station d’épuration située au sudest de la ville de Timișoara. Une série de bâtiments ont été construits pendant cette période pour l’approvisionnement centralisé en eau de Timișoara. L’assainissement, la station d’épuration, les châteaux d’eau et l’ensemble du système centralisé sont dus à l’ingénieur en chef du service technique de la mairie, Stan Vidrighin, qui, à partir de 1919, devint le maire de Timișoara.

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2. Panneau de commande

électrique, station de pompage

© INP. Ana Chiricuță

Le groupement de puits
© Bianca Azap & Dan Purice
3. Pompes d’extraction d’eau souterraine, Groupement de puits
© INP. Lucie Leca
4. Le dôme du Groupement de puits
© INP. Lucie Leca

Lumière dans les séquences d’entrée

Les entrées des bâtiments surprennent, révèlent, conduisent et excitent. L’Art Nouveau, Sezession, Szecesszió revendiquent la lumière naturelle comme partenaire. Constituées d’escaliers monumentaux ou doux, de filtres et d’espaces d’accueil, les séquences d’entrée des palais, musées ou autres édifices publics sont des réceptacles lumineux. Dans ces espaces, de véritables rubans tridimensionnels, rythmés, nous entraînent dans une fine alternance d’ombre et de lumière. Les moments des scénarios d’utilisation naturelle tels que l’accès, l’orientation et la distribution sont transformés par des complicités de composition soigneusement coordonnées. Ainsi, des cages d’escalier à lucarnes deviennent des tubes immatériels – Palais Szántay, tissent des filtres gracieux – Palais Albert Spitz, ou marquent des plateaux horizontaux articulés de manière monumentale – Musée national Szekler. Dans d’autres cas, un escalier reggia monte vers la lumière dorée - le Casino ou relie les niveaux d’une salle à double hauteur de manière cartésienne, par des ressorts dosés - le Palais de la Culture. Des polychromies calibrées à travers les matériaux des finitions reçoivent la lumière pour l’enrichir dans l’espace.

1. Ancien Hôtel de ville, architecte

Komor Marcell et Jakab Dezső, 1906-1908

Place de la Victoire 2, Târgu Mureș

© INP. Georges Dumitriu

2. Palais de la Chambre de Commerce et d’Industrie, architecte

Hubert József, 1910

Bd. 21 décembre 1989, 58, Cluj Napoca

© INP. Irina Leca

3. Casino, architecte Daniel Renard, 1909-1910

Bd. Regina Elisabeta 4, Constanța

© Association ARCHÉ. Elena Răceală

4. Palais Szantay, architecte

Szántay Lajos, vers 1905

Str. Horia 3 -5, Arad

© INP. Anca Majaru

Morphologie des plafonds et des pariétaux

1. Le Palais de l’Aigle Noir, architecte Komor Marcell et Jakab Dezső, 1907-1908

Place de la Victoire, Oradea

© Oradea Heritage

2. Maison Stoenescu, 1900 - 1915

Str. Jiețului 17-19, Craiova

© Monumentalist. Dragoș

Andreescu

Les salles de spectacle sont ces espaces dont l’architecture intérieure peut agir avec charme, peut être un acteur supplémentaire dans la perception ou l’empathie de l’ensemble. Objet de coupes caractéristiques particulières, la rencontre des plans verticaux et horizontaux représente une riche source d’articulations volumétriques, de motifs décoratifs, de textures et de luminaires. L’art et l’architecture des années 1900 apprivoisent quelque peu le faste des réunions. Elle invite les spectateurs à la joie de ressentir la domestication de l’environnement en le portant à l’échelle humaine avec l’écriture et le dessin de tissus fins qui unifient les morphologies et habillent les corps des chambres de registres denses et homogènes. Ainsi des bandes horizontales aux missions esthétiques bien assignées définissent les murs lignés avec raffinement du Palais de la Culture. Ici aussi, l’osmose entre la géométrie en caisson courbe du plafond et les luminaires génère un étonnant maillage lumineux. Les zoomorphes - personnifiés par des vautours ou des griffons de plâtre - soulignent et rythment les plafonds et les murs du Palais de l’Aigle Noir, poursuivant le soin de dessiner un « haut » pertinent et global. Les stucs et les moulures sont des épidermes expressifs.

3. Palais de la Culture, architecte Komor Marcell et Jakab

Piața Victoriei 1, Târgu Mureș

© INP. Georges Dumitriu

4. Palais de la Chambre de Commerce et d’Industrie, arch.

Hubert József, 1910

Bd. 21 décembre 1989, 58, Cluj Napoca

© INP. Irina Leca

Dezső, 1911-1913
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Empreintes décoratives de façade

L’une des nuances les plus fines que l’Art Nouveau acquiert dans ses multiples approches sur le territoire de la Roumanie est celle de créer, au niveau des façades - par l’utilisation de finitions et de textures dans divers matériaux et techniquesdes densités décoratives riches et même impressionnantes , bien que gracieuses en même temps. Ainsi, souvent les finitions sous forme d’enduits appliqués de différentes manières, telles que les techniques de calcio vecchio ou de sgraffite, l’utilisation de placages de pierre, d’éléments en céramique et en verre ou même en brique apparente, donnent aux surfaces pariétales de la profondeur et des valences sophistiquées, sans mais perdre la douce simplicité caractéristique du style. Reprenant les mêmes sources d’inspiration issues du monde naturel, transposées très tôt dans des formes et des lignes sinueuses et ondulantes, qui sont ensuite géométrisées et abstraites, en les appliquant à certains endroits clés ou en recouvrant entièrement les façades, selon les effets recherchés, les finitions Art Nouveau peuvent créer de véritables jeux de contrastes, de rythmes et d’accents, ou au contraire, elles peuvent produire des simultanéités consensuelles.

1. Bâtiment de rapport Kiss Károly, architecte Székely László, 1912

Str. Nistrului 2, Timișoara

© INP. Ana Chiricuță

2. Détail, Immeuble de rapport Kiss Károly, architecte Székely László, 1912

Str. Nistrului 2, Timișoara

© INP. Ana Chiricuță

3. Palais Szabó Albert, vers 1900

Bd. de la Révolution 92, Arad

© INP. Ovidiu Micșa

4. Palais de la Culture, architecte

Komor Marcell et Jakab Dezső, 1911-1913

Place de la Victoire 1, Târgu Mureș

© INP. Georges Dumitriu

5. Palais Dauerbach, architecte

László Székely, 1913

Place de la Victoire 4, Timișoara

© INP. Ovidiu Micșa

La morphologie et le langage des encadrements

3. Hôtel « István Király Szálló », architecte Zoltán Bálint et Lajos

Le fronton et la charpente sont des couronnes ornementales placées au sommet d’un bâtiment, d’une entrée ou d’une fenêtre. Si l’architecture gréco-romaine, romane, gothique, Renaissance ou baroque ont des règles bien définies pour décorer les façades, l’Art Nouveau n’a pas de règles. Les frontons et encadrements peuvent être fragmentés, trilobés, ogivaux, en plein cintre, en arc brisé, en croisillon, en trapèze curviligne, en triangle, groupés ou non. On les retrouve sur des façades enveloppées de décors végétaux aux formes délicates, bouffantes, allongées ou sinueuses de feuilles d’olivier, de laurier, de châtaignier, de lotus, de papyrus, de chardon, de palmier, de citrouille, etc., qui se nichent dans les recoins les plus inattendus. Les fleurs d’iris, de lys, de rose, d’églantier, de tulipe, de coquelicot, de chrysanthèmes, de marguerites, de pivoines, de tournesols ne sont pas purement ornementales. Rien n’est accidentel, chacun véhicule un message codé. Le stuc est principalement utilisé pour décorer les façades, étant moins coûteux. Les carreaux de céramique et le métal se traduisent également par des motifs végétaux, floraux et géométriques. Un regard attentif révèle la richesse des symboles de l’ornementation des édifices Art Nouveau.

1. Maison de rapport, vers 1910

Bd. Ștefan cel Mare 26, Suceava

© INP. Raluca Iosipescu

2. Maison Cioroianu, vers 1905

Str. Avram Iancu 14, Craiova

© Monumentalist. Dragoș

Andreescu

Jámbor, 1909

Place de la Liberté, Baia Mare

© INP. Irina Leca

4. Maison de rapport, vers 1905

Str. Kőrösi Csoma Sándor 7, Miercurea Ciuc

© INP. Raluca Bărbulescu

5. Ancienne Banque Agricole, architecte Gyula Sándy, 1909

Carré des Roses 26, Târgu Mureș

© INP. Ana Chiricuță

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Détails figuratifs

Le mascaron est une figure humaine fixée sur les façades au sommet d’un immeuble, d’une entrée ou d’une fenêtre. Il s’agit généralement d’un visage, effrayant ou chimérique, se retournant vers vous, qui devait à l’origine protéger la maison et éloigner les mauvais esprits. Plus tard, il devient un symbole des saisons, des éléments de la nature, des âges de la vie, de certaines régions ou parties du monde. Il fait partie d’une grande famille avec les Atlantes, les Cariatides, les Gorgones, les Séraphins, les Chérubins, etc. Le vocabulaire décoratif Art Nouveau également emprunté au bestiaire médiéval : griffons, licornes, harpies, basilics, dragons, chimères, oiseaux phénix, hippocampes, hippogriffes, hommes-oiseaux, monstres marins, sirènes-femmes et sirènes-hommes. Que l’on retrouve représentés aux côtés des aigles, des vautours, des colombes, des lions, des ours, des dauphins, des hiboux, des poissons, des serpents, des loups, des renards, des lapins dans de véritables formes de vie ornementales. Bien sûr, chacune a une signification, choisie par le propriétaire de la maison ou l’architecte, qui peut raconter des métiers, des ethnies, des religions, des légendes et autres.

1. Maison de rapport, vers 1910

Str. Bărăției 48, Bucarest

© INP. Ana Chiricuță

2. Maison de rapport, vers 1910

Bd. Eroilor 3, Brașov

© INP. Irina Leca

3. Maison de la Communauté de Richesse, 1909

Str. Episcopiei 7, Caransebeș

© INP. Lucie Leca

4. Centrale hydroélectrique, architecte Székely László, 1909-1910

Str. Uzinei 1, Timișoara

© INP. Ovidiu Micșa

5. Maison de rapport, vers 1905

Str. Kőrösi Csoma Sándor 7, Miercurea Ciuc

© INP. Raluca Bărbulescu

Hypostases du métal

Calea Victoriei 141, Bucarest

© INP. Georges Dumitriu

2. Église réformée, Cluj Napoca

© INP. Irina Leca

3. Maison, vers 1900

Str. Márton Áron, Târgu Mureș

© INP. Ana Chiricuță

4. Banque Hongroise arch. Albert Spitz, 1912

Bd. Mureșenilor 5, Brașov

© Alexandra Baboi

Le métal, dont l’utilisation en architecture est fortement influencée par l’évolution des technologies à partir du XIXe siècle, connaît, lors des manifestations de l’Art 1900, des hypostases nouvelles et multiples. Également utilisé comme élément structurel du bâtiment, le métal, notamment sous forme de fer ou de ses alliages, acquiert des valences artistiques et devient un matériau sculptural, enrichissant les extérieurs et les intérieurs des bâtiments. La malléabilité du matériau et ses qualités esthétiques spatiales offrent aux architectes et ingénieurs des possibilités d’utilisation infinies sous forme d’éléments torsadés, organiques ou géométriques, de lignes sinueuses ou encore de motifs naturels et figuratifs. Le métal se retrouve à l’extérieur dans des éléments architecturaux au niveau des façades, comme les auvents, les marquises, les portes, les fenêtres, les grilles, les balcons ou les consoles, à l’intérieur étant présent au niveau des luminaires, dans divers éléments décoratifs ou ennoblissant les escaliers.

1. Palais Cantacuzino, architecte I. D. Berindey, 1901-1902
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L’art des menuiseries en bois

Dans l’architecture de l’Art NouveauSezession - Szecesszió, peut-être plus encore que dans les manifestations d’autres styles, la menuiserie en bois, utilisée aussi bien dans les portes que dans les fenêtres, contribue à transmettre les connotations fortes de ces éléments de passage, d’espaces de liaison, entre les mondes. Matériau fragile et naturel, mais durable à la fois, le bois résonne gracieusement avec l’atmosphère accueillante poursuivie par Arta 1900, accueillant et invitant l’utilisateur. Les espaces ecclésiastiques, qui ont toujours accordé une attention particulière au portail, créent un véritable art de l’artisanat de la menuiserie, intégrant souvent des motifs naturels ou traditionnels dans l’architecture de ces éléments. Le traitement de la menuiserie est tout aussi important dans le cas des bâtiments publics, mais aussi pour les bâtiments privés. On trouve ainsi, dans tout le pays, une variété de menuiseries, de forme et de surfaces différentes, qui suivent pour la plupart des lignes sinueuses et ondulées et dont la silhouette est recouverte de cadres spectaculairement décorés. L’expression douce du bois est souvent amplifiée par l’ajout de verre ou de certains éléments en fer fin, créant des compositions contrastées, mais aussi des images unificatrices.

1. Maison Emanoil Marculescu, 1911

Str. Frații Goleşti 45, Corabia, Olt

© INP. Daniel Subașu

2. Église Réformée (L’Eglise au Coq), architecte Kós Károly, 1913-1914

Calea Moților 84, Cluj Napoca

© INP. Irina Leca

3. Villa du Préfet Urbán Iván, architecte József Steiner, 1904

Str. Cloşca 4, Arad

© INP. Anca Majaru

4. Maison Sofian, architecte Davidescu, vers 1900

Str. I.C. Brătianu 65, Botoşani

© Archives INP

5. Maison Darvas La Roche, architectes les frères Vágó, 1909-1910

Str. Iosif Vulcan 11, Oradea

© Oradea Heritage

Les couleurs de la lumière

1. Maison Mirică, architecte Dimitrie

Maimarolu, 1898

Str. Al. Macedonski 53, Craiova

© Monumentalist. Dragoș Andreescu

2. Palais des Eaux, architecte

Baumhorn Lipót, 1901-1906

Str. Sfânta Maria 2, Timișoara

© INP. Ana Chiricuță

3. Palais de la Culture, architecte

Komor Marcell et Jakab Dezső, 1911-1913

Place de la Victoire 1, Târgu Mureș

© Georges Dumitriu

4. Palais Kovács Artur, architecte

István Babócs, 1906

Bd. Vasile Milea 19, Arad

© Rebecca Gag

Le vitrail est une composition décorative constituée de fragments de verre peints ou colorés en masse, disposés symétriquement ou asymétriquement, fixés dans des nervures de plomb, encastrés dans des profilés métalliques à l’intérieur d’une porte ou d’une fenêtre. Le XIXe siècle remet le vitrail sur le devant de la scène, qui devient un élément caractéristique de l’Art Nouveau. Depuis le Moyen Âge, la lumière et le verre peint fascinent, étant l’un des décors caractéristiques des cathédrales gothiques, d’un raffinement suprême, ils donnent de la volupté à la contemplation. Au XIXe siècle, la technique d’exécution est celle traditionnelle, de l’époque médiévale, mais la qualité du verre s’est grandement améliorée, et le dessin reproduit les formes exubérantes de l’Art Nouveau. La palette de couleurs varie selon le thème et la fonction du bâtiment, etc. Au début du XXe siècle, le vitrail ennoblit les églises, les palais, mais surtout les commerces, les cinémas, les institutions publiques ou culturelles et les résidences privées.

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Géométries et modulations de pavements

Les carreaux décoratifs industriels pour les murs et les sols sont propres au style de l’Art Nouveau, caractérisés par leur abondance, sur les façades, les loggias, etc. Les premiers carrelages dans la technique innovante du grès pressé à la poudre sont produits en 1862. Le succès rapide s’explique par l’augmentation permanente de la demande, au fur et à mesure que de Nouveaux types de bâtiments apparaissent, tels que : gares, hôtels, mairies, tribunaux, bibliothèques, bureaux de poste, banques, musées, théâtres, bains, hôpitaux, écoles. Les plaques sont visuellement attrayantes, standardisées, durables, faciles à entretenir. En peu de temps, grâce à l’évolution des méthodes de fabrication et à la diversification de l’offre, les produits de luxe deviennent des éléments standards du confort au quotidien. Les carrelages pour le sol sont utilisés à l’intérieur des bâtiments publics, des églises, des usines, des magasins et des résidences. Les modèles varient dans la première étape du courant artistique. Les motifs végétaux et floraux prédominent : tournesols, iris, lys, coquelicots, lotus, chrysanthèmes, etc. Après 1905, les éléments décoratifs ont tendance à devenir géométriques et abstraits et sont disponibles en plusieurs combinaisons de couleurs. Pour fabriquer les modèles, les artisans des usines de production utilisaient des livres pour l’étude des ornements, des magazines d’art et d’architecture et des œuvres graphiques des artistes de l’époque.

1. Maison Darvas La Roche, architectes Vágó J. et Vágó L., 1909-1910

Str. Iosif Vulcan 11, Oradea

© Oradea Heritage

2. Maison, vers 1910

Str. Nicolae Gane 7, Iași

© Andreea Andronic

3. Palais de Salamon Brück, architecte Székely László, 1911

Str. Florimund Mercy 9, Timișoara

© INP. Simina Stan

4. Le palais de Bohus,

arh. Szántay Lajos, 1913

Str. Vasile Goldiș 1-3, Arad

© INP. Irina Leca

Déclinaisons décoratives murales

1. Palais de la Culture, architecte

Komor Marcell et Jakab Dezső, 1911-1913

Place de la Victoire 1, Târgu Mureș

© INP. Georges Dumitriu

2. Église « Saint-Nicolas », architecte

Kafauniski, 1906-1910

Str. Traian 40, Calafat

© Liana Carina Tătăranu

3. Église « Saint-Nicolas » (russe), architecte M. Preobrajenschi, 1905-1909

Str. Ion Ghica 9, Bucarest

© Veronica Burtea

4. Palais de Vulturul Negru, architectes Komor Marcell et Jakab

Dezső, 1907-1908 Piata Unirii, Oradea

© INP. Lucie Leca

La fluidité des formes, les motifs décoratifs et le jeu continu de l’articulation entre l’extérieur et l’intérieur sont un exemple d’application de la notion d’art total. Cette unité de l’art est soutenue par de nombreux artistes de l’époque.

Le style Art Nouveau marque une véritable collaboration entre architectes et artisans. Peintres, ébénistes, céramistes, vitriers, forgerons travaillent ensemble pour rendre les intérieurs et les extérieurs les plus harmonieux possibles et participent ainsi à l’embellissement du décor au quotidien.

Dans l’Art Nouveau, les volumes, toutes les surfaces, les matières sont décoratives, mais privilégient les qualités sensorielles des matières (texture, relief, couleur, transparence, jeux de lumière).

Le stuc est principalement utilisé pour la décoration intérieure, en créant des profils, des cadres, des compositions ornementales. Peu coûteux, il se transpose facilement en motifs végétaux, floraux et géométriques.

Le marbre, la pierre naturelle, le bois aux essences rares sont des pratiques moins courantes dans l’architecture Art Nouveau. Cependant, on les retrouve dans des bâtiments représentatifs, publics ou privés.

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L’expressivité des installations

L’atmosphère des intérieurs Art Nouveau, Sezession, Szecesszió, est également soutenue par le traitement des plafonds et, implicitement, des luminaires, les différentes solutions générant un éventail étonnant d’effets tels que l’élancement, la texturation, l’accentuation ou la diffusion. Ainsi, les espaces hauts et grandioses des salons de réception des grands palais publics ou privés ou ceux des espaces religieux sont couronnés par des lustres richement décorés à travers lesquels la lumière se répand en enveloppant toute la pièce. L’éclairage des espaces intimes des résidences est souvent traité comme un éclairage ponctuel, placé au plafond ou sur des surfaces verticales. La lumière coule doucement, s’intégrant de manière diaphane dans l’architecture de la pièce.

Les installations d’éclairage extérieur des bâtiments Art Nouveau complètent et enrichissent l’architecture des bâtiments, soit par une intégration harmonieuse dans la plastique décorative, soit en créant des effets de contraste, souvent obtenus par la texture ou la couleur.

1. L’ancien Hôtel de ville, architectes

Komor M. et Jakab D., 1906-1908

Place de la Victoire 2, Târgu Mureș

© INP. Georges Dumitriu

2. Maison Mirică, architecte Dimitrie Maimarolu, 1898

Str. Al. Macedonski 53, Craiova

© Monumentalist. Dragoș Andreescu

3. Palais de l’Evêché Orthodoxe Serbe, 1745-1748, transformations

1906 architecte Székely László

Place de l’Union 4, Timișoara

© INP. Lucie Leca

4. Centrale hydroélectrique, architecte Székely László, 1907-1910

Str. Uzinei 1, Timișoara

© INP. Ovidiu Micșa

Objets décoratifs

1. Poudrier, Émile Gallé, vers 1910

© Musée national de Peleș

2. Vase tulipier, Atelier ZsolnayPécs, vers 1900

© Musée national de Peleș

3. Vase, Atelier Loetz Wietwe, 1900-1925

© Musée national de Peleș

4. Pendule de cheminée, atelier de Rozenburg, vers 1900

© Musée national de Peleș

5. Lampe Wisteria, L. C. Tiffany, 1902

© Musée national de Peleș

6. Plateau, Gustav Gurschner, 1900-1925

© Musée national de Peleș

Les objets décoratifs Art Nouveau ont en commun, comme source d’inspiration, le mode de production (de l’objet unique à la série industrielle) et le désir de modernité en invoquant des techniques et des matériaux innovants, offrant ainsi une plus grande liberté des formes. Ainsi, le style Art Nouveau s’applique à tous les objets, qu’ils soient décoratifs (miroirs, cadres photos, pots décoratifs, plateaux) ou fonctionnels (horloges, cheminées, lampes, services à café et à thé, couverts, verres, etc.), qui transforment l’espace intérieur et ses composants. La multitude et la diversité des formes de l’Art Nouveau témoignent de la manifestation du courant artistique comme art total.

A Pelișor, divers objets Art Nouveau et Sezession en verre, cristal et céramique, célèbres dans le monde entier, portant les signatures de: Émile Gallé, René Lalique, Karl Fabergé, L.C. Tiffany, les frères Daum, Almaric Walter & Henri Bergé, D’Argental, Ferdinand Benedikt von Poschinger, Marius Ernest Sabino, Christian Désiré, Loetz Witwe, R. Fournier, Emil Arnold Krog, Gotfred Rode, mais aussi Joseph Franz Maria Hoffmann. Spectaculaires sont les modèles Gallé, D’Argental, Tiffany, Loetz Wietwe en verre coloré, stratifié, pigmenté, soufflé, à décor intercalé ou appliqué, peint à la main à l’émail, irisé ou gravé à l’acide. Les objets en faïence en forme de roue ou à motifs, peints à la main ou au pochoir, émaillés, bullés, comme ceux signés d’Eugène Baudin, Clément Massier ou Zsolnay-Pécs, sont d’importantes pièces de résistance.

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Maîtrise des pièces de l’espace intérieur

Le château de Pelișor représente la manifestation de l’art innovant total, grâce à l’implication de la reine Marie, qui assume le style Art Nouveau dans son essence non conformiste et spectaculaire. Des influences considérables sur la création de meubles conçue par la reine Marie étaient dues à l’école de Darmstadt. L’Ecossais Baillie Scott était l’un des plus importants représentants européens du mouvement Arts and Crafts. Il a décoré de nombreuses pièces du palais du duc Ernst Ludwig von Hesse à Darmstadt, qui était le neveu de la reine Victoria de GrandeBretagne et l’époux de Victoria Melita, la sœur cadette de la reine Marie. Les ensembles de meubles pour la Chambre dorée et la chambre à coucher, conçus vers 1909 à la cour des ducs de Hesse, réalisés à l’École des arts et métiers sur le site des résidences royales, sont les œuvres les plus originales conservées dans la collection du château de Pelișor, présentant des motifs décoratifs médiévaux. La fleur de lys et l’iris sont des leitmotivs de la création, que l’on retrouve également sur les dossiers de certaines chaises et fauteuils. L’atelier viennois de Bernhard Ludwig a fourni de nombreux ensembles de meubles, dont ceux de la salle de jeux des princes. Le fils de Bernhard Ludwig devint plus tard, à Sinaia, le décorateur le plus important. Il a adopté le design Sezession, régi par des éléments géométriques, avec des lignes légèrement courbes et des insertions sculpturales.

1. Canapé avec étagère, armoires et chaises, Atelier Bernhard Ludwig, 1903, Château de Pelișor

© Musée national de Peleș

2. Détail du placard, Atelier Bernhard Ludwig, 1903, Château de Pelișor

© Musée national Peleș

3. Salle de jeux des princes, château de Pelișor

© INP. Lucie Leca

4. Détail de la commode, chambre de la reine Marie, château de Pelișor

© INP. Lucie Leca

5. Fauteuil, école des arts et métiers de Sinaia, vers 1903, château de Pelișor

© Musée national Peleș

Le pluralisme des meubles

Les meubles ont reçu progressivement différentes valences, conformément à l’évolution stylistique de l’Art 1900. L’intégration de l’évidence de l’implication humaine est un principe général des Arts et Métiers, et l’industrie du meuble a favorisé sa manifestation à travers la multitude d’éléments - complexes ou simples - qui composent, par exemple, une banquette ou un buffet. Le vocabulaire décoratif des meubles que l’on trouve actuellement en Roumanie utilise des lignes simples et des formes géométriques ou des motifs naturels conventionnels. La conception d’une servante est complexe en raison des parties fonctionnelles qui la composent, mais sur le plan esthétique, elle présente des registres verticaux et horizontaux clairement définis, mettant l’accent sur la personnalité de l’artisan dans les détails ajourés ou sculptés et les systèmes de traction (boutons, poignées , serrures) ou de rotation (charnières, pivots). En plus des meubles individuels, des façades continues de meubles ou des pièces encadrées dans des niches qui leur sont spécifiquement destinées ont également été réalisées, imaginées en même temps que la décoration murale.

1. Servante, Casa Darvas La Roche Str. Iosif Vulcan 11, Oradea © Oradea Heritage
2. Banquette, ancien Hôtel de ville Place de la Victoire 2, Târgu Mureș © INP. Georges Dumitriu
3. Serrure d’armoire, Maison Darvas
La Roche Str. Iosif Vulcan 11, Oradea

L’Art Nouveau s’est manifesté en Roumanie au cours des deux premières décennies du XXe siècle. En raison d’influences culturelles, il est connu sous différents noms - en Transylvanie Sezession, Szecesszió et Jugendstil, et dans l’Ancien Empire Art Nouveau. Des édifices représentatifs ou de simples demeures illustrent l’Art Nouveau esthétiquement et techniquement notamment dans l’arc intracarpatique. Au fur et à mesure que l’on avance vers l’Est ou le Sud, sa manifestation « se dissipe », et l’on retrouve plutôt des exemples ponctuels.

Les promoteurs de l’Art Nouveau (architectes, ingénieurs, artistes, etc.) cherchaient à exprimer le dynamisme et le mouvement par l’innovation et l’inspiration et visaient à réduire les différences entre les beaux-arts traditionnels (en particulier la peinture et la sculpture) et les arts appliqués (graphisme, théâtre, artisanat). Des artistes accomplis (urbanistes, architectes, vitriers, céramistes, orfèvres, etc.) ont voulu réunir dans un style commun l’architecture, les décorations extérieures et intérieures, le mobilier et les objets utilitaires (luminaires, installations de chauffage, services de table, etc.). C’est pourquoi l’Art Nouveau est considéré comme l’art total

En visitant des édifices représentatifs, dont certains apparaissent dans l’exposition, on peut remarquer la diversité de l’Art Nouveau dans les formes qui ont inspiré les citadins du début du XXe siècle. Avec le début de la Première Guerre mondiale, l’Art Nouveau perd son influence expressive, le style Art Déco étant son successeur sur la liste des courants artistiques mondiaux.

1. Palais Culturel, arh. Szántay Lajos, 1911-1913

Place George Enescu 1, Arad

© INP. Simina Stan

2. Lycée «Tamási Áron», arh. Pápai Sándor, 1910-1911

Str. Baróti Szabó Dávid, Odorheiu Secuiesc

© INP. Raluca Bărbulescu

3. Palais Ferencz Emmer, arh. Székely László, 1907

Str. Florimund Mercy 7, Timișoara

© INP. Ovidiu Micșa

4. Palais Culturel, arch. Szántay Lajos, 1911-1913

Place George Enescu 1, Arad

© INP. Simina Stan

5. Maison Darvas La Roche, arch. les frères Vágó, 1909-1910

Str. Iosif Vulcan 11, Oradea

© INP. Lucie Leca

6. Château de Peleș, arch. Karel Liman, 1873-1914

Aleea Peleșului 2, Sinaia

© INP. Lucie Leca

7. La Maison Mirică, arch. Dimitrie Maimarolu, 1898

Str. Al. Macedonski 53, Craiova

© Monumentalist. Dragoș Andreescu

8. Château de Peleș, arch. K. Liman, 1872-1924

Aleea Peleșului 2, Sinaia

© INP. Lucie Leca

9. Palais de Neptun, arh. Székely László, 1914

Bd. 3 August 1919 1, Timișoara

© INP. Ana Chiricuță

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