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Sexperte
Sexperte Sophie Pilcer, sexologue
TIMIDITÉ ET SEXUALITÉ ÉPANOUIE… COMPATIBLES ?
À notre sexperte, on pose souvent la question de l’impact émotionnel sur la sexualité. Et cela fait l’objet de beaucoup d’idées reçues.
Il était une fois un jeune homme beau, doux, à l’écoute mais qui ne parvenait pas à rencontrer une femme. L’idée même de la rencontre, de dialoguer avec une femme qui lui plait, relevait de la phobie. Rougir, bafouer, avoir envie de disparaître, trembler, transpirer… la paralysie, la sidération.
Il avait tout pour plaire à notre pimpante Janette. Ils s’étaient connus sur un site de rencontres, cette correspondance avait été un grand moment de bonheur pour tous deux. Ils étaient si heureux et si impatients de découvrir les délicats messages qui les attendaient chaque matin. Ils ont osé se dire, se livrer dans leurs failles, leurs bonheurs, leurs joies, leurs blessures même les plus archaïques, les plus sensibles et les plus inavouables. Eux, si pudiques, se dévoilaient avec une impudeur des mots qui étaient devenus leur langage érotique. Ils ne s’étaient jamais vus, jamais entendus, aucune tentative de se voir par la technique et le sacro-saint Zoom. Ils voulaient du vrai, du mystère, du suspens, ne rien déflorer avant la rencontre. La tension et l’attraction montaient et ils aimaient cela. Leurs échanges épistolaires avaient le tempo des préliminaires les plus délicats. Step by step, leurs mots caressaient les mains, les bras, les jambes, le dos, le visage, la bouche… Les yeux s’humidifiaient, touchés par la grâce de ce sentiment d’amour naissant.
Et puis, il fallut bien décider de se rencontrer, de transformer l’essai et là, panique à bord pour Jano! Il accepta la mort dans l’âme ce qui serait pour lui l’ultime épreuve, celle de se voir, de pouvoir se toucher, s’embrasser peutêtre. Il savait que sa timidité serait à son apogée, il savait que la rougeur de sa peau mettrait une barrière à ce qui aurait pu être les prémices d’un merveilleux amour. Timide… timide… timide… je te hais, se disait-il! Il trouva maints et maints prétextes pour retarder ce moment fatidique.
Puis ne pouvant plus reculer, il accepta de la rencontrer, un soir de préférence, la lumière y est moins crue et l’obscurité avait selon lui la capacité à transformer la rougeur de son visage en une couleur moins honteuse. Il anticipait avec angoisse: quand devrais-je l’embrasser, comment la déshabiller sans paraître aussi maladroit qu’un puceau? Comment lui faire l’amour sans que ma timidité n’entraîne une honteuse débandade? Toutes ces questions en boucle et la rencontre fut aussi dramatique qu’il l’avait anticipé: pas un mot, pas un geste ne fut possible pour lui. Le néant.
Comment gérer timidité et rencontre amoureuse? Considérons qu’il faille une immersion, telle la gestion des phobies. Rencontrez, abordez l’autre où que vous soyez, même le supermarché pourrait faire office de terrain d’entraînement. Sans harceler ni importuner, vous avez le droit d’aborder quelqu’un pour lui demander où se trouve le rayon de ce que vous voudrez. Si il ou elle vous répond en souriant, n’hésitez pas à bavarder de la pluie et du beau temps. Aucun enjeu et c’est un premier pas, une première victoire! Puis, s’il y a plus d'affinités, commencez piano et respectez votre timing: un regard, un geste, un mot… Respirez calmement, imaginez la séduction que vous voulez opérer et vous y parviendrez. Mais n’oubliez pas: de l’entraînement, de l’entraînement, car l’habitude tue la rougeur! Quand aborder l’autre devient banal et simple, la timidité disparaît.
Et encore une dernière chose: vous n’êtes jamais aussi rouge que vous l’imaginez!