LE DÉSORDRE DE LA LAGUNE DE BOLMON -Du
débarras jusqu’à la lagune
-
Directrice de mémoire : Anne-Sohie Verriest Mémoire de fin d’étude de : Joséphine Pinatel - Année 2012
L école nationale supérieure de la nature et du paysage
MEMBRES DU JURY : Président de jury : Marc Claramunt, Paysagiste DPLG, enseignant en projet de paysage à l’ENSNP Blois Directrice de mémoire : Anne-Sophie Verriest, ingénieur paysagiste diplômée de l’ENSNP, enseignant l’ingénierie urbaine à l’ENSNP Professeur associé : Jean-Christophe Bailly, écrivain, philosophe, enseignant à l’ENSNP (histoire de la ville et de la représentation urbaine éléments culturels dans la formation du grand paysage) Personnalité extérieure reconnue pour ses compétences professionnelles : Jérôme Mazas; paysagiste DPLG, enseignant à l’ENSP Marseille Personnalité extérieure représentant la maîtrise d’ouvrage : Luc Brun, directeur du SIBOJAÏ -syndicat intercommunal du Bolmon et du Jaï- (gestionnaire de l’étang de Bolmon pour le Conservatoire du Littoral)
"Si je choisis, au hasard, un volume dans ma bibliothèque, je puis, après y avoir jeté un coup d’oeil, le remettre sur les rayons en disant : « ce ne sont pas des vers.» Est-ce bien ce que j'ai aperçu en feuilletant le livre? Non, évidemment. Je n'ai pas vu, je ne verrai jamais une absence de vers. J'ai vu de la prose. Mais comme c'est de la poésie que je désire, j'exprime ce que je trouve en fonctions de ce que je cherche, et, au lieu de dire « voilà de la prose », je dis « ce ne sont pas des vers »."
Henri Bergson; «Esquisse d’une théorie de la connaissance fondée sur l’analyse de l’idée de désordre.» in «L’évolution créatrice» (1907)
3
SOMMAIRE 8 14 21 28
1. INDICES. Préambule
Premières impressions Repérage
Démarche
Penser le désordre
Ambivalence de la lagune de Bolmon -Richesse écologique et pression anthropique-
Carte des horizons - repères visuels depuis le site entre l’aéroport, l’étang et la ville
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2. À L’ORIGINE, LE SOCLE EST SCULPTÉ PAR L’EAU (PRINCIPALEMENT)
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De la Formation de l’étang de Berre à celle de l’étang de Bolmon
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Qu’est-ce qu’une lagune «oligo-mesohaline»?
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La part de sel et la réouverture du Canal du Rove.
53
Les mythes du marais
57
Enjeux d’un Bassin versant : la cadière, marignane et vitrolle
59
Cheminement de la cadière
62
Fonctionnement hydrologique de la lagune
64
Les dangers de l’eau
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De nouvelles orientations pour l’eau
Plantes représentatives au sud de la lagune saumâtre Les populations végétales sur le lido du Jaï Plantes représentatives au nord de la lagune Les animaux observables
3. LA DYNAMIQUE URBAINE
68
Rapport de la ville à son étang 70
Évolution du trait de côte
72
Quelle géologie pour une débarras ?
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Dynamique d’expansion urbaine ( sur l’étang) L’histoire de la ville
78
-Et comment la ville s’est détournée de son étang-
82
Des vides et des pleins Tissu urbain : composition Dans la forme du bâti
Vocabulaire et expression du bâti Les spécificités du vieux-bourg ?
Répartition des équipements sur le territoire de la commune Quels sont les usages autour de l’étang ? Localisation et grands types de vides : les réserves foncières
4. UN DÉSERT ENTRE LA VILLE ET L’AÉROPORT
106
-Un reste de marais et des friches agricoles :les Rebus.-
108
Les entités du Paysage
110
Composition des terres agricoles
114
La décharge de matériaux inertes
117
Le royaume des plantes rudérales
5
5.
120
LE PAYSAGE DES FLUX. Les infrastructures liées aux réseaux et l’économie, et comment arrive t’on ici
122
Le Bruit raconte la ville
124
Marignane, une ville-carrefour
126 130
132
Les grandes structures économiques sont liées au réseau Les projets pour la découverte d’un territoire ambivalent
6.-VERS LE PROJET :
La lagune structure ce paysage singulier 134
Les «charpentes» de l’existant
138
D’une juxtaposition hasardeuse à une nouvelle syntaxe des paysages
142
Les grandes orientations de projet
-Mots de liaisons, déclinaisons, et ponctuationsLiaisons : l’eau et les traversées Déclinaisons des lieux stratégiques
146
Révéler la lagune :
-Développer un linéaire-promenade à la découverte de ses richesses-
148
Approche synchronique
150
Interprétations
161
CONCLUSION
162
Bibliographie
165
Remerciements
J’aimerais qu’il existe des lieux stables, immobiles, intangibles, intouchés et presque intouchables, immuables, enracinés ; des lieux qui seraient des références, des points de départ, des sources : Mon pays natal, le berceau de ma famille, la maison où je serais né, l’arbre que j’aurais vu grandir (que mon père aurait planté le jour de ma naissance), le grenier de mon enfance empli de souvenirs intacts… De tels lieux n’existent pas, et c’est parce qu’ils n’existent pas que l’espace devient question, cesse d’être évidence, cesse d’être incorporé, cesse d’être approprié. L’espace est un doute : il me faut sans cesse le marquer, le désigner ; il n’est jamais à moi, il ne m’est jamais donné, il faut que j’en fasse la conquête. Georges Perec «Espèces d’espaces» 1974
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INDICES.
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9
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-PREMIÈRES IMPRESSIONSLa piste de l’aéroport qui s’étend sur l’étang de Berre. Les avions qui s’envolent au dessus Ce qu’il reste du marais du bout de l’étang. Les flamands roses barbotent Au loin, les raffineries de Berre, La centrale EDF de Saint-Chamas... peuplent les limites visuelles sur le pourtour de l’étang de Berre L’urbanisation -la cabanisation s’étend sur le cordon sableux du Jaï. La dune est mise en danger par sa sur-fréquentation.
La décharge de matériaux inertes, qui avance lentement son tablier sur les eaux de l’étang.
L’urbanisation s’étend, emplit le bassin de l’étang de Berre La petite route du milieu de Nulle Part qui mène au Jaï Les immenses et impressionnants hangars à dirigeables de Boussirons
Les immenses zones industrielles et commerciales de Vitrolles, que traversent la Cadière Anciennes maisons de pêcheurs dans la végétation luxuriante
Immeubles résidentiels et lotissements éparses remplissent l’espace de la commune. Le bâti n’a aucun lien avec l’étang. Le vieux bourg, très dense, fermé sur lui -même, délabré Le cirque en arrière plan : la Chaîne de l’Estaque La Cadière
18
DÉMARCHE. J
1) e pars de l’hypothèse que toute les villes ont leurs débarras Que tout espace porte en lui cette part de hasard - Le site choisi, c’est le lieu de rencontre entre différentes dynamiques, entre différents éléments qui font «Désordre».
M
2) on site se situe sur la commune de Marignane, au bord de l’étang de Bolmon. Cet étang fait lui-même partie d’un plus grand étang, l’étang salé de Berre, bien connu pour ses problèmes de pollution. En effet, nous sommes dans l’arrière pays marseillais.
J’ entends le désordre d’une certaine manière, et sans connotation négative. C ’est ici que l’on trouve tout ce Pour moi il s’agit simplement que l’on n’avait pas envie de voir d’un premier regard sur le site qui m’interroge ; il me semble que cette idée caractérise le site-débarras auquel je me suis attachée, et les questions qu’elle soulève. Malgré toute les pressions qui existent sur ce site et peut-être même du fait de ces pressions, il en émane une poésie, qu’il sera important de dévoiler. Les contrastes entre les différents éléments présents font émerger des désordres, qui peuvent être poétiques, et donc beaux - et d’autres qui sont néfastes, comme par exemple les désordres écologiques.
Idésordre l me semble en effet que le est bien «un ordre auquel on ne s’attendait pas», comme disait Bergson -Que le désordre est en fait un système complexe qu’il est difficile d’appréhender d’emblée. Pour moi cette notion permet de parler de la poésie du lieu, et de poser la question de la multiplicité, de la diversité des éléments présents- chacun selon ses particularités propres.
ailleurs : les raffineries, les centrales hydroélectriques, les grandes zones commerciales et les aéroports. Enfin, toute ces structures et infrastructures qui vont de pair avec les grandes métropoles - ou, en somme, toute ces choses dont on n’a pas trouvé la place, que l’on ne savait pas où ranger. Toute ces choses on les a mises là, au bord de la petite mer de l’étang de Berre. On peut donc dire que nous sommes au beau milieu du débarras de la métropole.
L ’étang de Bolmon, plus petit, est une partie de l’étang de Berre. Il en est
séparé par un cordon sableux naturel, qui l’isole des courants salés de Berre, apportés par le mistral. Sur le bassin versant de Bolmon, on trouve d’immenses zones d’activités, et plus particulièrement un aéroport. La ville de Marignane elle-même, directement édifiée sur la lagune saumâtre, s’avance sur les eaux, et arrive bientôt au terme de ses limites communales.
L e lieu d’étude s’étend depuis l’embouchure de la petite rivière qui
alimente la lagune jusqu’au cordon du Jaï : c’est à dire sur la zone de l’ancien marais, enseveli sous les remblais de la ville. Il se précisera sur le site de l’extension de la ville, où la ville et l’ancien marais rencontreront bientôt l’aéroport. C’est principalement le site d’une décharge, qui illustre bien l’avancée, à l’aveuglette, de la ville sur les eaux.
L e site est à la rencontre entre ces trois éléments : la ville, le marais et
l’aéroport ; il est un noeud entre ces différentes dynamiques, au bout de la ville et en un point limite de l’arrière pays marseillais. Puisque c’est un débarras, le désordre de ce site est une évidence.
C’
3) est ici que j’ai fait le constat de la juxtaposition hasardeuse de chaque élément du paysage. Alors que chacun de ces éléments poursuit son monologue de manière plus ou moins intéressante, mon objectif serait de faire en sorte que ces phrases s’accomplissent, et enfin qu’elles communiquent les unes avec les autres (Articulation) ; en sommes, de rendre la coexistence avec les autres plus fructueuse.
M a démarche est de repérer chacune des dynamiques présentes, de déchiffrer les monologues pour arriver à donner une cohérence au désordre ambiant.
E n somme le projet sera de «finir la ville», en prenant en compte ces
différentes dynamiques. Il faudra sans doute établir une temporalité à mettre en place pour que chacune de ces dynamiques s’accorde au reste. Evidemment, finir la ville ne signifie pas que l’histoire elle -même est finie : justement.
M on intérêt pour ce débarras vient du constat que la rencontre hasardeuse
est créatrice, qu’elle permet de rebondir, de faire émerger des choses nouvelles. Ainsi je souhaiterais ouvrir la question sur l’anthropisation constante des sols de cette lagune, sur la manière dont on peut voir évoluer un trait de côte et occulter totalement un paysage.
P
4) our ce travail de fin d’étude, j’ai donc tenté d’étudier les différents processus qui ont contribué à la formation de ce paysage. Et puisque chacun de ces différents processus se mêle, j’ai décidé de décomposer le site en différents calques.
Les protagonistes
Ils accompagnent les chapitres de l’histoire. Selon l’acte concerné, tel ou tel personnage prendra de l’importance.
Ville de Marignane Aéroport et Zone industrielles et commerciales Décharge
L’étang et ses Marais
22
D
° ans un premier temps, je mets en évidence le socle, et surtout la dynamique de l’eau, qui est essentielle, puisque c’est la le premier sculpteur et qu’elle est partout présente. Il s’agit de comprendre dans quel contexte géomorphologique on se trouve -par la formation du socle, la formation de l’étang et comprendre ses caractéristiques -ses richesses, jusqu’à sa rencontre avec la ville.
C ette rencontre se fait par l’avancée de la ville sur l’étang
donc par le déplacement de la matière, la dominance du solide sur le liquide Ce phénomène est traduit par l’évolution du trait de côte au cours du temps.
C
° ela nous amènera, dans un deuxième temps, à vouloir comprendre l’évolution de la ville et sa constitution : -Le plein -Le vide comment est-ce qu’elle en est arrivée à grignoter l’étang? et quel rapport (s’il y a lieu) entretient-elle avec celui-ci?
P
° uis, nous verrons la décharge et le «désert» qui sépare la ville de l’aéroport : la dernière réserve foncière de la ville. La réflexion sera portée sur le devenir du site de la décharge, et la manière
dont nous pourrions lui trouver une nouvelle vocation. Nous nous demanderons ce que pourrons devenir ces déchets, ces matériaux déposés -comment utiliser tous ces potentiels quelques peu oubliés : canal condamné et balbutiement de rivière, résidus d’ ancien marais et décombres en tout genre .
L
° e dernier calque qui viendra se poser serait celui des flux, du réseau, des infrastructures et, en quelque sorte, celui de l’ «économie». Il s’agit de replacer le projet à une échelle plus large, celui de la métropole et en même temps de le saisir localement, dans sa proximité à de grand réseaux. Je voudrais mettre en évidence L’implantation de l’aéroport, des grandes voies de desserte qui choisissent de relier le lointain en rompant avec le paysage local. Ces réseaux sont à la fois ceux qui relient, ceux qui fragmentent, et ceux qui alimentent ce débarras. Puisqu’ils font partie du paysage, nous devons vivre avec ; La question est maintenant de savoir comment rendre meilleur ce paysage lié aux réseaux, Quel point de vue adopter pour faire émerger la poétique de ces espaces -Ce qui est beau, c’est par exemple le contraste entre le béton armé et l’espace naturel, les machines volantes et les oiseaux.
24
QU’’EST-CE QU’UNE LAGUNE «OLIGOMESOHALINE»? Nous allons décrire, faire l’inventaire de ce qui caractérise la richesse de cette lagune de 720 hectares Et, au nord, y intégrer le débarras comme partie de ce grand lieu. La Grande Estrade
Cordon du Jaï
Décharge Les Beugons
Étang de Berre
Bassin de ski nautique
Étang de Bolmon Estéou
Canal du Rove
Pinède de Pataflou
Darses
Marais des Paluns
Chateauxneuf les Martigues
Scirpaie Groupement halophile (qui aime les milieux salés -sansouires-)
Vitrolles
Pelouse brachypodes
Pinède à pins d’Alep
Groupe psammophile (qui aime le sable)
Jonçaie
Phragmitaie
Marignane i La riv ère de la Cad
e ièr
Jonçaie, Scirpaie, phragmitaie, groupement halophile
Traces de ripisylve
Pinède à pins d’Alep de la colline Tamaris Espèces protégées
38
Ainsi, nous sommes sur une lagune méditerranéenne dite «oligo-me-
sohaline.» Qu’est ce cela signifie?
Disons par exemple, que les poissons sont plus ou moins capables de s’adapter à la salure. Certains peuvent tolérer des changements de taux, d’autres pas. Les poissons dits -Euryhalins : sont capables de tolérer des changements de salure. -Sténohalins : sont incapables de tolérer des changements de salure.
-Oligohalins : ne tolèrent pas la salure, vivent dans des eaux contenant de 0.5 à 5 g/l de sel. -Mésohalins : vivent dans un taux de salure intermédiaire, de 5 à 16 g/l de sel. -Polyhalins : sont capables de vivre dans tous taux de salure. Les eaux contiennent de 16 à 40 g/l de sel. Ici, le taux de salinité varie de 2 à 10 g/l de sel en hiver, et de 10 à 19 g/l de sel en été. Pour les plantes des abords comme pour les poissons, c’est la même chose, on croise donc des espèces de tout les milieux, plus ou moins salés. La pinède et la garrigue de la colline Notre-Dame nous rappellent dans quel climat méditerranéen nous sommes : une région où l’on s’attend plutôt à voir des plantes manquer d’eau. Ici, le milieu humide favorise leur croissance, et à certains endroits la ripisylve fait songer à une jungle.
PLANTES REPRÉSENTATIVES AU SUD DE Pinède (pins d’Alep)
Pelouse sèche -brachipodes Darses du canal du Rove -RemblaisEtang de Bolmon A
Coupe schématique des marais de la pinède de Patafloux.
Des pelouse sèches se sont installées sur les darses du canal du Rove. Ces pelouses pâturées par des vaches camarguaises et d’Angus voient fleurir une multitude d’orchidées, dont certaines espèces protégées.
Ripisylve
Prairie Humide
B Coupe schématique des marais des
Tamaris immergés
Paluns. Le marais des Paluns est le secteur le plus abondamment peuplé en espèces végétales ; ce marais concentre une grande part de la richesse écologique de l’étang de Bolmon, et de nombreux oiseaux s’abritent ici.
L
E
LA LAGUNE SAUMÂTRE A
Pin d’Alep Pinus halepensis
Tamaris commun Tamarix gallica
Pelouse à Brachypode
Genêt d’Espagne Spartium junceum
Ophrys miroir Ophrys ciliata
Jonc piquant Juncus acutus
Marais temporaire à herbier aquatique
Canne de Provence Arundo donax
Ophrys de provence Ophrys provincialis
Roseau des marais Phragmites australis
Phragmitaie
Ce marais constitue une résurgence de la nappe phréatique, empéchée d’atteindre l’étang de Bolmon par la barrière des remblais du canal du Rove. Le marais est donc remonté, noyant ainsi des parcelles agricoles.
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B
LES POPULATIONS VÉGÉTALES SUR LE
Sansouire au sud-ouest du cordon sableux, du côté de l’étang de Bolmon. On voit les ruines de l’usine de garance, et une multitude de voiles de kitesurfeurs qui affectionnent ce lieu qui reçoit le mistral de plein fouet.
Étang de Berre
o C
1
2
3
4
5
Coupe schématique du cordon dunaire du Jaï (d’après doc. A.Ricart)
6
LIDO DU JAÏ Le cordon littoral du Jaï constitue une zone sablonneuse de plus de 6 km de long, et d’environ 200 m de large. La végétation y subit le gradient de salinité et de multiples autres influences, puisque tour à tour s’abattent le vent (le mistral venu du nord-est), le soleil, la pluie…
Tamaris commun Tamarix gallica
Raisin de mer Ephedra distachya
c Cette végétation dunaire est indispensable à la pérennisation du cordon sableux, puisqu’elle en limite l’érosion. Ce cordon est composé de trois parties : Sa partie centrale, dite «naturelle», d’environ trois kilomètres de long. On y trouve un cortège d’espèces
Pourpier de mer Atriplex alimus
psammophiles (qui aiment le sable) ainsi que des groupements palustres ; des phragmitaies, jonçaies, scirpaies et surtout des sansouires, des groupements halophiles. Le premier étant plutôt du côté de l’étang de Berre, et le deuxième cortège du côté de l’étang de Bolmon.
Étang de Bolmon
o
Plage
1
Laisse* avec plantes halophiles
2
végétation dunaire du cordon littoral
3
Fossé de mise en défend* ; tamaris en semis très dense
4 5 6
7
7
44
Roseau des marais Phragmites australis
Salicorne Salicornia
Piste carrossable Zone à Ephedra distrachya Patûrage avec tamaris et Atriplex halimus Sansouire à hygrophile et halophile
PLANTES REPRÉSENTATIVES AU NORD
Frêne commun Fraxinus excelsior
Peuplier blanc Populus alba
Olivier de Bohème Elaeagnus angustifolia
Ronce commune Rubus fruticosus
Ciste cotonneux Cistus albidus
Glaucienne jaune Glaucium flavium
Alysse odorante Alyssum maritimum
Sénéçon commun Senecio vulgaris
Fenouil sauvage Foeniculum vulgare
Euphobe petit cyprès Euphorbia cyparissias
Canne de Provence Phragmitaie
Canne de Provence Arundo donax
Étang de Bolmon
Tamaris
E
DE LA LAGUNE SAUMÂTRE
D
Trace de ripisylve Frênes, chênes blancs Phragmitaie Champs -Céréales
Et quelques plantes rudérales Étang de Bolmon
D
Coupe schématique de la rive des Beugons Au niveau des Beugons, les terres sont pour la plupart utilisées pour la culture de céréales. Les rives sont investies d’une phragmitaie réduite, de tamaris, de plantes rudérales -orges, nombreuses labiées et ombellifères-Par endroits on note des traces de ripisylve, une frênaie qui se régénère, et même des souches d’une ancienne forêt de chênes verts.
Plantes rudérales Genêt d’Espagne
E
Coupe schématique de l’estrade de la décharge sur Bolmon Les rives de la décharge sont peuplées de roseaux des marais, de quelques tamaris, cannes de Provence et genêts. -plus haut la végétation rudérale se développe, plus particulièrement sur la partie sud du tablier de la décharge, plus tassée, moins nue. Nous approfondirons cela dans la partie sur le secteur de la décharge.
0 46
5m
10m
LA PART DE SEL ET...
20-30 g/l
2-19 g/l
20-30 g/l
2
1 Berre
Bolmon
Cadière
Canal du Rove
Bordigue
...LA RÉOUVERTURE DU CANAL DU ROVE En 1963, on a vu s’effondrer le tunnel maritime du Rove, qui reliait L’étang de Berre à l’Estaque. On avait inauguré l’ouverture de ce tunnel en 1926 ; son rôle était alors de faciliter les échanges de marchandises de l’étang de Berre et Marseille. Il constitue une partie du canal de Marseille au Rhône, et jusqu’à Martigues il parcours 27 km. Pour les marignanais, il a eu son importance historique, notamment parce qu’ en traversant le chaînon de l’Estaque il les rapprochait de Marseille. Et surtout, pendant la
seconde guerre mondiale, il faisait office de «passe à poisson» et permettait ainsi à la population de se nourrir. Depuis près de 50 ans maintenant, le tunnel est condamné ; la lagune de Bolmon s’est retrouvée complètement isolée des eaux salées de la mer, d’autant plus que les «bordigues» -les percées à travers le cordon du Jaï- se sont progressivement ensablées.
Le taux de salinité de l’étang de Bolmon varie aujourd’hui de 2 à 19g/L de sel, tandis que L’étang de Berre oscille entre 20 et 30g/l, et que la mer méditerranée est à environs 38g/L. Aussi, si Bolmon est aussi riche de milieux, c’est justement grâce à ce gradient de salinité. La réouverture du canal du Rove, redistribuant une partie de ses eaux vers l’étang de Bolmon détruirait les richesses de cette lagune par une augmentation importante de la salure dans l’étang.
1 L’étang saumâtre de Bolmon 1°
au sein de L’étang de Berre. -D’une superficie d’ environs 700 hectares-
2 Au XVème siècle, on ouvre 2° des bordigues à travers le lido du JaÏ pour faciliter la pêche. 1926 : ouverture du tunnel du canal du Rove, reliant l’étang de Berre à la mer au niveau de l’Estaque.
20-30 g/l
2-19 g/l
3 Ensablement
Effondrement
Bolmon est une lagune saumâtre comme il en existe peu en France et a fortiori dans la région. L’écosystème de la lagune est en jeu parce que la réouverture du canal sera effective en 2013. Cependant, un délai de 3 années est donné pour expérimenter ce mouvement. Or, au terme de ces trois années de délai, l’expérimentation prendra fin devant le constat des dégâts qu’aura impacté la réouverture du tunnel sur la végétation de la lagune de Bolmon. Il faudra ensuite quelques années, à nouveau, pour que les espèces reconquièrent l’étang. Canal du Rove,
52
3 En 1963 le tunnel s’effondre 3°
sous le massif de la Nerthe. Peu à peu les bordigues se bouchent (sauf une seule). L’étang de Bolmon s’isole et retrouve une eau peu salée, essentiellement alimenté par les eaux provenant de la rivière la Cadière.
FONCTIONNEMENT HYDROLOGIQUE DE
dière La ca
Emprise de la lagune de Bolmon et du ruisseau de la Cadière, son principal affluent
LA LAGUNE
Comme nous l’avons déjà dit, L’étang de Bolmon est isolé de l’étang de Berre par le cordon sableux du Jaï. Ce cordon est percé de trois bordigues, dont deux sont aujourd’hui obstruées. L’étang est principalement alimenté par la rivière la Cadière et son affluent, le Raumartin, mais aussi par les eaux qui s’écoulent sur son bassin versant -sur lequel on trouve les petites villes Marignane, Chateauneuf-lesMartigues, la zone industrielle de Vitrolles et l’aéroport de Marseille Provence. Au sud le canal du Rove est aujourd’hui bouché, fait qui limite les échanges avec la mer méditerranée, et par suite le taux de sel dans l’eau. L’étang est ainsi isolé ; cette solitude apparente en fait une réserve de nature. Cette nature entre dans un rapport insolite avec ce qui l’entoure : la brutalité de l’aéroport, les avions qui s’envolent, les cheminées qui fument, les grandes boîtes-conteneurs des zones d’activités.
chemin de l’eau
Direction générale des eaux dans le bassin de la ville.
63
ÉVOLUTION DU TRAIT DE CÔTE.
dynamique de la zone de rencontre, constat d’un étang-débarras.
Salines
Aéroport de Marseille-Provence
(Marignane) Baie
Étang de Bolmon Canal du Rove
-Les salines s’étendent sur le pourtour de Berre ; elles sont, quelque part l’adaptation de l’économie humaine à son milieu. L’actuel bassin de ski nautique n’était encore qu’une large baie.
Le «trait de côte» est en réalité plutôt une surface qu’une ligne ; cette zone de rencontre terre/eau est changeante, et son mouvement se fait au fil des saisons, selon le niveau de l’eau.
-Diminution progressive des salines, -Construction de l’aéroport ; -Le canal du Rove est creusé, et la baie commence à être comblée, tout comme l’embouchure de la Cadière.
Au fil du temps, la ligne de côte se tord et se rabat. Dans la réalité c’est le marais -autrement dit la zone de rencontre solide/liquide- qui perd du terrain au profit du solide, et gagne la bataille en empiétant sur les eaux. Cette dynamique, c’est celle du déplacement de la matière, insufflée par la colonisation humaine, l’extension de l’urbanisation.
L’avancée de la terre sur les eaux provient du développement urbain de Marignane, mais surtout de Marseille. Par ailleurs cette zone de rencontre a été très fortement modifiée par la présence humaine, et cela vient encore confirmer cette idée que nous sommes au bout de la ville, sur le débarras de la métropole.
?
Décharge
Bassin de ski nautique
La dynamique de ce désordre-la incite à aller encore plus loin dans l’évolution de la ligne de côte ; mais cette fois en réinstaurant un protagoniste quasiment disparu : ce phénomène de marécage, cette richesse de l’entre-deux.
-Avancée de la piste de l’aéroport -reliant des contrées toujours plus lointaines, mettant de côté le paysage local- . -Détournement de l’embouchure de la Cadière. Elle est déplacée pour pouvoir établir un lotissement à cet emplacement. -Évolution de la surface de transition entre solide et liquide dans la petite lagune de Bolmon. Ce phénomène est très visible sur le secteur de la décharge, qui s’extrude progressivement.
71
QUELLE GÉOLOGIE? -un réceptacle pour la matière anthropiqueColluvions würmiennes
Grès et marnes
Zone remaniée
Cuestas de Vitrolles au nord-est : alternance de Calcaire et Marne
dépôts actuels et récents
Au sud :Calcaire (massif de la Nerthe)
Terrils, remblais (darses)
Vases
Aire à forte densité de coquillages entiers et brisés
Sables grossiers
N
Quels sont ces sols ? Le point d’interrogation est parlant. Le périmètre de cette zone est lui aussi incertain. En géologie comme en pédologie, la considération de ces sols est toute nouvelle : elle n’a pas plus d’une vingtaine d’années. On ignore ce qui fait la composition des sols urbains en général, et ici des remblais. Ces remblais sont certes liés à l’urbanisation. Ici, il s’agit très certainement de terre excavée lors du creusement du tunnel du Rove au sud, et de la construction des nouvelles habitations -plutôt au nord. La responsable de l’évolution des côtes est l’anthropisation croissante des sols. Dépôts de déchets liés à l’urbanisation
VILLE (expansion)
73
1960
Sol scélé Expansion
1969
Dépôt de déchets liés à l’urbanisation
1974
Nous disions donc que la plupart des sols dans ces milieux touchés par l’urbanisation sont inconnus. D’abord, la ville rejette à l’extérieur ses détritus. Au fur et à mesure du temps, elle s’épaissit sur ses propres rebus, Recouvrant des sols déjà transformés. C’est comme si elle préparait son propre terreau Comme si ces déchets constituaient son propre engrais.
2011
83
Plan en enroulement
«Disposition concentrique du tissu urbain, généralement autour d’une éminence du relief ou d’un quartier plus ancien» «En particulier présent dans des agglomérations médiévales du sud de la France»
Cette forme est créatrice d’espace : elle apporte une diversité au site. Le bâti accueille une forte densité de population sur peu d’espace, et les vides connaissent différents types d’usages. Cependant un certain nombre de zones du centre tombent dans le délabrement.
Dans les rues étroites du centre Il y a un jeu de lignes, de couleurs et de lumière.
Les places sont habitées. Dans ce secteur l’espace public a du sens.
La forme dite «grand ensemble» a un intérêt économique -au sens large-.
Cependant, l’espace libéré est peu et mal considéré -donc déserté.
Les lieux que cette forme créent manquent donc «de vie», et créent de fait des ruptures dans la villes, et avec ce qui l’entourent de manière générale.
L’étalement résidentiel se définit surtout par une faible densité d’habitation pour une importante consommation de l’espace
Si dans le milieu de l’urbanisme, la tendance est de le juger négativement, il n’en est pas toujours de même chez les acteurs locaux : il promeut un type de confort moderne.
L’usage exclusif de la voiture comme moyen de locomotion tend généralement à rompre tout lien avec l’environnement ;et il n’offre pas de perspectives d’évolutions.
87
VOCABULAIRE ET EXPRESSION DU BÂTI
89
À TRAVERS LA VILLE : ORGANISATION -Épaisseur des rives dans la ville-
A
25
0
50
100
B
0
5
10
20
C
C
A B 0
5
10
20
Transect des rives au niveau du Parc sportif des Fontinelles
Transect
des rives au niveau de l’embouchure de la
Cadière
Transect des rives à la pointe de lEstéou (au stand de tir)
93
Architecure vernaculaire : cabane de pêcheur en bordure de l’étang de Bolmon
Cabanons à lEstéou - ancienne embouchure de la Cadière
Cabanons au sud de l’Êtang.
101
LOCALISATION ET GRANDS TYPES DE VIDES
1 4
-Zone industrielle des Florides
0
500m
1km
N
2
3
Zone naturelle -POS
Extension urbaine future -(POS)
Emplacement réservé (aéroport)
Dent creuse
Parc sportif
Voirie large, parking
Cimetière
Parc urbain
103
Cette carte vise à faire un état des lieux des réserves foncières de la ville. Elle mêle des éléments du Plan d’Occupation des Sols et des éléments de recherches personnelles sur les dents creuses et autres vides, comme les espaces sportifs et les voiries très larges. Bien sûr, la part du vide a son importance et tout n’a pas vocation à être construit (les espaces naturels a fortiori). Mais une grande partie de ces espaces pourraient être réquisitionnée pour densifier la ville. Le POS prévoit également de pouvoir étendre la ville en partie vers le sud. Cela ne me semble pas judicieux, étant donné la richesse des terres agricoles de ce secteur. Par ailleurs, il est déjà extrêmement menacé, d’une part par la cabanisation (construction sur les parcelles agricoles, créant peu à peu un mitage important). D’autre part, les remblais et darses du canal du Rove ont créé une barrière à la nappe phréatique, qui ne peut plus rejoindre l’étang de Bolmon. Un marais d’une grande richesse s’est reconstitué ; cependant une partie des terres agricoles a été noyée, la rendant inexploitable. La construction des zones industrielles des Paluns et des Florides renforcent ce processus ; la pression que subissent ces terres agricoles est donc très importante, mais il me semble essentiel de les conserver. La ville devra se densifier, se construire sur elle-même. Dans un second temps elle devra être très prudente et attentive sur la façon dont elle s’étendra au nord : Ce secteur -sous l’emplacement réservé à l’extension de l’aéroport- représente la dernière réserve foncière de la ville.
4.UNE ULTIME RÉSERVE FONCIÈRE -Un reste de marais et des friches
108
Les entités du Paysage
110
Composition des terres agricoles
114
La décharge de matériaux inertes
117
Le royaume des plantes rudérales
ENTRE LA VILLE ET L’AÉROPORT agricoles ; quelques rebus.-
107
LES ENTITÉS DU PAYSAGE
Le marais de la grande Estrade, coincé entre l’aéroport et la décharge.
Ville de Marignane Champs Exploitation de céréales- terrain réservé à la future extension de l’aéroport.
Maraîchage et restes de maraîchage Traces de ripisylve Décharge Résidus de marais de la Grande Estrade et marais du Lido du Jaï Remblais visibles, plus ou moins conquis par la végétation Résidus de Salines Peupliers devant un rideau de cannes : signes de la proximité de la nappe phréatique ?
Friche Espaces et équipements publics sur le Jaï (dont mairie annexe) Aéroport Plage du Jaï Les friches tente. Des
agricoles en franges espaces résignés face
de la ville : en atà l’avancée de la ville.
109
0
500m
1km
N
En tant que décharge, elle aurait pu être placée n’importe où ; la ville en a connu d’ailleurs plusieurs avant elle, placées, déplacées, recouvertes. En 1970, un projet d’assainissement et d’urbanisation du quartier de l’Estéou voit le jour : la municipalité cherchait alors de nouveaux terrains à construire, et on déplace les ordures vers le nord. De même, à l’emplacement du parc des sports de Fontinelle était autrefois dessinée une grande baie, qui fut par la suite comblée par une décharge. On a peu de précisions sur les endroits exacts de ces dépôts ; Leur site semble avoir été choisi presque au hasard, le long de la façade littorale de la ville. Ces décombres se regroupent en îlots, disposés de manière aléatoire sur la côte. La décharge de matériaux inertes poursuit cette logique, l’illustrant de façon tout à fait ostentatoire.
Représentation schématique du trait de côte, et des potentiels sites de dépôts des déchets. Disons par exemple, que et que
représente la ligne de côte,
représente les sites potentiels de dépôt.
1- Sites potentiels
2- Comblement de certains sites, parfois dans l’eau.
LE ROYAUME DES PLANTES RUDÉRALES : NAISSANCE D’UN ÉCOSYSTÈME Étymologiquement, rudérale vient du latin Rudus, rudéris - qui signifie décombres, déblais, déchet, ruine. Les plantes rudérales aiment à s’installer à proximité des lieux habités par l’homme. Elles sont, en quelques sortes, commensales de celui-ci : ces plantes poussent sur les rebus, les friches et les décombres le long des chemins. Ce sont en fait des plantes affectionnant les espaces ouverts, perturbés et instables. Il s’agît souvent des espèces pionnières qui surgissent après un bouleversement de l’écosystème local. Considérées comme des plantes de «mauvaises vies», elles ne sont généralement pas très honorées. Pourtant, la présence de ces drôlesses ramène la vie. Progressivement, ces plantes seront remplacées, et elles disparaîtront pour laisser place à une végétation pérenne.
Elles sont le signe de la genèse d’un écosystème. En s’installant sur la décharge, la végétation fixe le sol, et empêche les matériaux des décombres de s’échapper dans l’étang, et de le polluer d’avantage. Ce nouvel écosystème est celui de la décharge. Il fait dorénavant parti de l’écosystème de la lagune de Bolmon et de son évolution.
Glaucienne jaune Glaucium flavum
117
LES PROJETS POUR LA DÉCOUVERTE D’UN TERRITOIRE AMBIVALENT Le projet de «GR 2013*, le premier sentier métropoliain de randonnée pédestre» Le GR 13 est un projet de GR dont la singularité est de trouver ses sentiers dans l’espace périurbain. Il est conçutdans le cadre de Marseille Provence 2013 par un collectif d’artistes-marcheurs, dont l’intention -louable- est de créer une «infrastructure de transport pédestre» entre la ville est la nature. Ce parcours est un circuit de Grande Randonnée, mais a aussi pour vocation d’accueillir des oeuvres «et les événements qui pourront y bourgeonner». C’est, selon Baptiste Lanaspeze -le responsable du projet, une invitation au voyage à pied. Ce parcours prend la forme d’une double boucle en huit, dont le centre est la gare d’Aix-en-Provence TGV. Les villes de Miramas et Aubagne, aux deux extrémités, sont à 55 km l’une de l’autre. Le parcours lui-même sera long de 250 km, sur un faible dénivelé ; Il faudra entre 10 et 15 jours de marche pour en faire le tour. On peut se demander s’il sera très emprunter. Mais pourquoi pas? C’est, après tout, une tentative de redécouverte du territoire de la métropole marseillaise, dont on ne sait regarder que le front de mer. Or ce territoire s’étend bien au-delà, et il me semble que cette idée est juste.
Le projet de restauration de la dune du lido de Jaï Sur le cordon du Jaï, un projet à l’initiative du Conservatoire du Littoral est également en cours. Le projet vise à restaurer la dune, en effectuant une mise en défens de celle-ci, et en permettant à la végétation de se réinstaller. Pour cela l’accès aux voitures -qui dament la piste- doit être interdit, et les usagers doivent avoir le sentiment d’entrer dans un espace menacé. À l’entrée du Jaï naturelle du côté de Marignane, La ruine de l’usine de garance rouge va être réemployée. Elle accueillera un nouveau pôle d’accueil du SIBOJAÏ (gestionnaire du site pour le Conservatoire du Littoral). Par ailleurs la partie naturelle du lido sableux est interdite aux voitures -mais seulement dans les textes. Alors, comme pour créer un compromis, il a été décidé de créer également un parking dans la ruine.
Vers une réconciliation ? Comme nous l'avons dit précédemment, l'étrangeté de Marignane tient du fait de la juxtaposition de réseaux internationaux à des réseaux très locaux et presque ruraux comme la dune et le futur GR, sans s'en être vraiment rendu compte jusqu'à présent et que peut-être, avec le projet du SIBOJAÏ et celui du GR, on est en train de commencer à le valoriser.
«La ville donne l’illusion que la terre n’existe pas. Le Land Art propose une alternative au système urbain absolu.» Robert Smithson «Une sédimentation de l’esprit : ‘Earth project’» 1968. * Le projet GR 2013 est initié dans le cadre de Marseille Provence 2013 (MP 2013) : En 2013, Marseille sera la Capitale européenne de la culture
Esquisse du parcours du GR 2013, le projet de GR Métropolitain conçu par baptiste Lanaspèze
Passages actuellement possibles autour de l’étang.
Issu de la publication «GR2013 Le premier sentier métropolitain de randonnée pédestre» Baptiste Lanaspeze Chemin ou passage ou simple passage
Parking -aménagé par le Conservatoire du Littoral
Observatoire
Route -desserte locale et transit
D’après le «Plan de gestion de l’étang de Bolmon» , par Biotope
129
6. INTENTIONS : DU DÉBARRAS À LA LAGUNE DE BOLMON
La lagune structure ce paysage singulier132
Les «charpentes» de l’existant
136
D’une juxtaposition hasardeuse à une nouvelle syntaxe des paysages
140
Les grandes orientations de projet
-Mots de liaisons, déclinaisons, et ponctuations-
-Liaisons : l’eau et les traversées-Déclinaisons des lieux stratégiques-
144
Révéler la lagune :
-Développer un linéaire-promenade à la découverte de ses richesses-
146
Approche synchronique
148
Interprétations
131
D’UNE JUXTAPOSITION HASARDEUSE À Il me semble que le point clé de ce
débarras, c’est ce sur quoi il repose : son socle, c’est à dire la lagune. C’est avant tout cette dernière qui a été oubliée, occultée Elle constitue le rhizome qui nourrit l’ensemble de ce territoire. Le principe à la base de ce projet est de donner aux différents éléments juxtaposés une syntaxe en plaçant des mots de liaisons ou des ponctuations qui permettraient d’établir des déclinaisons, en composant tout simplement avec l’existant.
C ela reviendrait à révéler le paysage de la lagune et, par extension du débarras en rééquilibrant le rapport terre / eau et en liant les éléments entre eux.
C ela pourrait se faire balisage, une signalétique
par un
qui adaptera sa forme en fonction du sens qu’elle devra prendre, par rapport au lieu où elle se trouvera par le séquençage d’un linéairepromenade, qui s’intégrerait aux autres systèmes de réseaux et, en ce qui concerne le plan- la surface, par des interventions sur certains lieux «stratégiques» de l’interface ville/ lagune. Les points et lieux stratégiques sont cités les pages suivantes.
observatoire de la décharge entre la ripisylve, le marais et la ville sur la baie de la ville au niveau de l’ancien village de pêcheur observatoire du marais-existantsous la pinède de patafloux à l’entrée du canal dans l’étang entrée sur le jaï naturel ouverture sur l’étang de berre
UNE NOUVELLE SYNTAXE DES PAYSAGES
-mots de liaison, dĂŠclinaisons et ponctuations-
137
Quartier lacustre des Beugons ; s’implantent les îlots d’habitations.
les canaux font remonter le marais dans les terres où
CONCLUSION : R iche d’une multitude de paysages qui ne cessent d’évoluer, la lagune de Bolmon est un territoire complexe. Dans un mouvement, nous cherchons sans cesse un point d’équilibre, sans jamais pourtant y parvenir vraiment. Nous avançons, pourrait-on dire, de déséquilibre en déséquilibre. Sans doute, ce que la plupart du temps nous cherchons dans notre travail est ce que l’on nomme la résilience - dans une interprétation assez large du terme.
C es derniers temps, l’évolution du paysage de la lagune a été induite par l’homme ; et cette évolution se traduit par le dessin du trait de côte de l’étang de Bolmon. Le site est à la rencontre entre trois grands éléments : la ville, le marais et l’aéroport. Il est un noeud entre ces différentes dynamiques, au bout de la ville et en un point limite de l’arrière-pays marseillais : nous sommes sur ce que j’appelle un ‘débarras’. L’étang de Bolmon est refermé sur lui-même : cet isolement est ce qui fait de lui un réservoir de nature, mais aussi le réceptacle de toutes les pollutions provenant du bassin-versant. La ville s’avance sur l’eau sans regarder : elle tourne le dos à ce qui lui donne pourtant sa singularité, ce qui fait d’elle une ville sur une lagune. L’aéroport nous rappelle dans quel contexte métropolitain nous nous trouvons. C’est un repère visuel, qui amplifie l’étrangeté du paysage du bassin de Marignane. Cette étrangeté provient d’un effet débarras du lieu -que dans un premier temps on trouve “mal rangé”, mais d’où émane en fait un charme singulier. Notre travail sera d’organiser une rencontre, afin de mettre en route une cohabitation entre les différents éléments présents.
M on intérêt pour ce débarras vient du constat que la rencontre hasardeuse est créatrice, qu’elle permet de rebondir, de faire émerger des choses nouvelles. Ainsi je souhaiterais ouvrir la question sur l’anthropisation constante des sols de cette lagune, sur la manière dont on peut voir évoluer un trait de côte et occulter totalement un paysage. De quelle manière peuton organiser une rencontre? Il me semble que le point clé de ce débarras, c’est ce sur quoi il repose : son socle, c’est à dire la lagune. C’est avant tout cette dernière qui a été oubliée, occultée ; elle constitue le rhizome qui nourrit l’ensemble de ce territoire.
L e projet se dessinera à deux échelles : d’abord, tout autour de l’étang. Par des rappels, des renvois vers le paysage de la lagune, pour opérer une «re-territorialisation», en quelque sorte. La grande mutation du territoire de ces dernières années doit être intégrée, digérée. C’est pourquoi à un autre niveau, il me semble que le travail doit se faire dans un jeu entre les limites qui séparent nos éléments. De manière générale, le projet sera tourné vers cette question, de savoir comment organiser cette rencontre en utilisant tout simplement les outils dont nous disposons ici -en considérant qu’un débarras est aussi une réserve-. Comment redonner une syntaxe à tout ces éléments juxtaposés, pour qu’enfin ils communiquent et se regardent.
159
BIBLIOGRAPHIE : (NON EXHAUSTIVE)
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SITE INTERNET : Encyclopédie Universalis : www.universalis.fr/ Ville de Marignane : www.marignane.fr/ Conservatoire du Littoral : http://www.conservatoire-du-littoral.fr ARPE : Agence Régionale Pour l’Envirronement : http://www.rrgma-paca.org/ (réseau régional des gestionnaires) MP Marseille Provence : www.marseille.aeroport.fr Réseau de Mesures de la Qualité des Sols : http://www.gissol.fr/programme/rmqs/rmqs.php GISFI - Groupement d’Intérêt Scientifique sur les Friches Industrielles : http://www.gisfi.fr/index_fr.htm Lagune : http://www.ecosociosystemes.fr/lagune.html Pôle-relais lagunes méditérranéennes : http://www.pole-lagunes.org/ Géoportail : http://www.geoportail.fr/ Google map : http://maps.google.fr/ Les territoires in-occupés : http://territoiresinoccupes.free.fr/art/partie2.html La cabane de Tellus : http://cabanedetellus.free.fr/ Blog de Gérard Monnier : http://gerard.monnier.over-blog.com ; article «Avancée et limites», in L’architecture moderne en mémoire, Les Cahiers de la DRAC PACA, nº 4 décembre 1994 Association de la réserve naturelle du marais de Larchand : http://www.maraisdelarchant.fr Projet Babel : Histoire et patrimoine des rivières et canaux : http://projetbabel.org/fluvial/rica_marseille-rhone-canal. htm
DOCUMENTS CARTOGRAPHIQUES : -IGN 1/25000 carte de randonnée étang de Berre Istres Marignane Martigues, 3144 OT Cadastre et orthophotographie de IGN POS de Marignane (en révision) Cadastre Napoléonien
161
163
LE DÉSORDRE DE LA LAGUNE DE BOLMON -Du
Au dessus de l’étang de Berre,
les avions s’envolent dans la même direction que les oiseaux migrateurs en transit dans les marais de Marignane. C’est ici que l’on trouve tout ce que l’on n’avait pas envie de voir ailleurs : les raffineries, les centrales hydroélectriques, les grandes zones commerciales et les aéroports. Enfin, toutes ces structures et infrastructures qui vont de pair avec les grandes métropoles ou, en somme, toutes ces choses dont on n’a pas trouvé la place, que l’on ne savait pas où ranger. Toutes ces choses on les a mises là, au bord de la petite mer de l’étang de Berre. On peut donc dire que nous sommes au beau milieu du débarras de la métropole.
D epuis le ciel, on voit au sud la mer Méditerranée cernée par la
chaîne de la Nerthe, derrière laquelle s’étale l’étang de Berre. La piste de l’aéroport de Marignane se tend sur les eaux où souffle le mistral. Ce vent venu du nord-ouest a progressivement formé le cordon du Jaï, isolant l’étang de Bolmon du grand étang de Berre. D’ici, on perçoit bien que la petite ville de Marignane s’est, à l’origine, installée loin des eaux saumâtres pour laisser sa place à la nature étrange du marais. Des cabanes de pêcheurs
s’étaient établies au bord de Bolmon, à l’estuaire de la Cadière, la rivière qui ré-alimente celui-ci en eau douce. Aujourd’hui la ville de Marignane persiste à nier l’étang de Bolmon et s’avance à grand coup de remblais sur les eaux, comme l’illustre la presqu’île formée par la décharge de matériaux inertes.
D ans ce paysage plat et venteux bordé par le massif de la Nerthe, l’étang
reste, malgré la très forte pression anthropique, d’une grande richesse écologique -où se mêlent dunes, roselières, pinèdes et embouchure de rivière. Le mélange d’eaux douces et d’eaux salées accueille une multitude d’espèces de poissons des deux milieux et nourrit de nombreux oiseaux ; une grande partie des rives a été acquise par le Conservatoire du Littoral pour protéger ce biotope.
C ’est un site étonnant, malgré sa forte dégradation : la nature sauvage
est au pied des raffineries. Les volumes massifs des aérogares et la rectitude des pistes côtoient l’aspect fragile, toujours mouvant, du milieu naturel. Les oiseaux migrateurs sont au ras des pistes d’où s’envolent les avions en partance vers les pays de migrations.
débarras jusqu’à la lagune
-
C ette petite ville doit une part importante de son développement
à la présence de l’aéroport international de Marseille Provence. Le développement de la ville se fait surtout vers le sud, où de grandes zones commerciales et industrielles s’étalent, sans aucun complexe, audelà du canal du Rove. Alors que de ce côté-ci les limites communales sont atteintes, on trouve au nord le lieu de rencontre entre l’étang, la ville et l’aéroport qui laisse place à un grand vide, où se positionne la décharge.
L ’équilibre écologique de la lagune est mis en danger par une urbanisation irraisonnée. La décharge est l’illustration de la dynamique de développement de la ville sur l’étang, avançant à petit pas en recouvrant les eaux. La dynamique de remblais, de l’avancée de la décharge sur les eaux parce que la ville ne sait que faire de ses déchets illustre bien qu’elle ne sait pas non plus comment se développer sur l’étang.
C omprendre ces différentes dynamiques permettrait de retourner la ville sur sa lagune, afin qu’elles puissent trouver ensemble un terrain d’entente. -Sujet de TFE / Septembre 2011-
L’École Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage, 9 rue de la Chocolaterie, 41 000 Blois tél. : +33(0)2 54 78 37 00 / fax: +33(0)2 54 78 40 00 / www.ensnp.fr