Polynesian Va'a Story publications

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Pure Adrénaline

Tahiti

DES PLAISIRS EN PAGAIE Plus qu’un sport national, le va’a, compétition de rameurs, est en Polynésie presque une religion. Atteindre le mana, la puissance spirituelle du groupe, est indispensable pour vaincre. PAR MARIE DUFAY. PHOTOS : JULIEN GIRARDOT

Si aujourd’hui les matériaux composites ont remplacé le bois, le principe du va’a est toujours le même. C’est sur cette pirogue à balancier que les ancêtres venus d’Asie du Sud-Est colonisèrent, il y a deux mille ans, les îles vierges du Pacifique.


À 24 ans, Rete Ebb est le champion du va’a. Il s’entraîne tous les jours avant son travail de monteur électricien chez EDT.

“L’important c’est l’esprit d’équipe : être en symbiose avec tes cinq équipiers” RETE EBB Dans les compétitions internationales, les rameurs tahitiens, pourtant tous amateurs, trustent systématiquement les podiums.

Aussi populaire que le Tour de France, l’Hawaiki Nui Va’a dure trois jours et se déroule sur 125 kilomètres entre les îles d’Huahine, de Raiatea, de Tahaa et de Bora Bora.

Les rameurs plongent leur pagaie à un rythme effréné pour atteindre les 14 km/h.

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haque jour à l’aube, des hordes de V6, ces longues pirogues à six, couvrent le lagon. Alignés dans leur coque étroite, les hommes glissent sur les eaux calmes puis traversent la passe pour se frotter aux déferlantes. La mécanique est bien huilée, la cohésion parfaite : dans un même mouvement puissant et régulier, ils plongent leur pagaie d’un côté puis de l’autre, filant à plus de 14 km/h. Avec son balancier latéral qui assure sa stabilité, le va’a franchit la houle avec élégance. L’équipage apprend à supporter la fatigue, à optimiser son cap, à perfectionner ses gestes. Jusqu’à atteindre un quasi-état de transe, appelé le mana, synonyme de la puissance spirituelle du groupe. Tous n’ont qu’un seul but : gagner l’Hawaiki Nui

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Va’a, le Graal des courses de va’a. Depuis vingt-trois ans, cette épreuve est considérée comme la plus belle mais aussi la plus éprouvante au monde. Elle dure trois jours, réunit une centaine d’équipages et rallie, en 125 kilomètres, quatre îles de l’archipel de la Société : Huahine, Raiatea, Tahaa et Bora Bora.

Albert Moux, un important homme d’affaires de Tahiti, sponsorise largement le va’a via son club, Shell Va’a.

En Polynésie, l’Hawaiki Nui Va’a suscite le même engouement que le Tour de France chez nous. « Les rameurs peuvent perdre plusieurs kilos tant l’effort est intense », explique Philippe Bernardino, légendaire rameur devenu entraîneur et constructeur. Alternant courses de vitesse dans les lagons et marathons en haute mer, cette compétition est aussi l’occasion pour les trois plus grands clubs (Shell Va’a, OPT – Office des Postes et Télécommunications – et EDT – Électricité de Tahiti) de repérer leurs futurs poulains parmi les équipes issues des deux cents clubs locaux. À 24 ans, Rete Ebb a presque tout gagné. Il est devenu une icône dans les îles de la Société. Pourtant, le jeune homme travaille comme monteur électricien chez EDT. Il se lève chaque matin à 3 heures pour s’entraîner avant d’enfiler son bleu de travail et retourne

ramer avant la tombée de la nuit. Toute l’année, ses week-ends sont réservés aux compétitions. « Il ramait déjà à 4 ans, raconte sa mère. Ici, on a le va’a dans le sang. Être sur l’eau, c’est aussi vital pour nous que de respirer. » Enseigné à l’école, le va’a est le symbole de l’identité polynésienne. Linguistiquement, il désigne l’embarcation elle-même, mais aussi la lignée, le territoire du clan. Si les grandes pirogues à voile qui servirent autrefois au peuplement et à la pêche ont disparu avec l’arrivée des Européens, les plus petites, propulsées uniquement à la force des pagaies, ont donné lieu dès 1850 à des joutes festives entre districts. Désormais en polyester, elles ont vu leur forme évoluer dans une perpétuelle recherche de performance. Car le Polynésien est un compétiteur acharné et un marin hors pair. Australie, Nouvelle-Zélande, Hawaii, les

autres grandes nations du va’a le considèrent comme imbattable. Pour preuve, les trente et une médailles d’or rapportées des Championnats du monde de Rio en 2014 par les Tahitiens. « L’entraînement est fondamental, mais le plus important c’est l’esprit d’équipe, confie Rete. Pour gagner, il faut être en confiance totale, en symbiose avec tes cinq équipiers. » À 70 ans, Albert Moux, P-DG de Pacific Petroleum et de Vodafone Tahiti, n’accepte aucune interview, sauf pour parler de son club, Shell Va’a. Celui que ses rameurs appellent Patron met à leur disposition un centre d’entraînement haut de gamme et dépense chaque année près de 30 millions de francs CFP (environ 250#000 euros) pour son fonctionnement. « Mon rôle n’est pas seulement de permettre aux jeunes d’atteindre le meilleur niveau, mais aussi de les aider à construire leur

avenir. Parfois je les aide à obtenir un prêt pour une maison, je les pousse à suivre des études. » Vecteur d’ascension sociale, le va’a n’est pourtant toujours pas professionnalisé. Mais les anciens grands champions devenus entraîneurs affirment que cela ne saurait tarder. Les Australiens attendent plus de trois mille compétiteurs aux prochains Championnats du monde, et l’on murmure que la pirogue ferait bientôt son entrée aux JO. Une bonne nouvelle pour la championne du monde Vaimiti Maoni, 28 ans. « C’est grâce aux anciens qu’on en est là : ils nous transmettent l’expérience, la ténacité, l’humilité. Leur instinct a laissé la place à la performance pure, analyse-t-elle. Mais qu’on ne s’y trompe pas : la jeune génération est fidèle aux valeurs de l’âme polynésienne. La mer est notre ADN : le va’a ne mourra jamais ! » M. D.

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HAWAIKI NUI VA’A

UNE FOLIE POLYNÉSIENNE Depuis 24 ans se tient dans les Iles Sous-le-Vent la plus mythique course de pirogues à rames, l’Hawaiki Nui Va’a. Grâce à elle, le monde entier connaît désormais le va’a, cette pirogue à balancier indissociable de la culture polynésienne.

Entre les îles, la houle peut être forte. Les hordes de va’a disparaissent entre deux lames et les rameurs réapparaissent tels des gladiateurs dans cette arène liquide. Après un début d’étape dans le lagon de Taha’a, les rameurs franchissent la passe de Pai pai et rencontrent la houle qui vient se fracasser sur la barrière de corail protectrice. Malgré le ciel gris, tous sont unanimes pour dire que le temps est clément; une mer calme, c’est triste pour un rameur qui aime surfer. Dieu soit loué, la fine pluie, la houle, les embruns et les nuages sont au rendez-vous.

Texte: Marie Dufay • Photos: Julien Girardot

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Sur la ligne de départ de la première étape à Huahiné, direction Raiatea. Des centaines de rameurs sont prêts à en découdre. Voilà un an qu’ils s’entraînent à synchroniser leurs gestes, à devenir plus précis, à mieux se connaître, car les six membres d’un va’a doivent être unis pour vaincre. L’air est électrique, des centaines de bateaux-spectateurs font du lagon un véritable stade. Chaque équipe ira jusqu’au bout, pour la beauté du sport, pour la culture polynésienne.

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uiconque a déjà assisté à une édition de l’Hawaiki Nui Va’a le sait: ce qu’il se passe sur l’eau durant ces trois jours de novembre est tout bonnement incroyable. Un spectacle dont on ne se remet pas: une centaine d’équipages de six rameurs, un parcours d’environ 130 kilomètres entre les îles de Huahine, Raiatea, Tahaa et Bora-Bora, une horde de bateaux suiveurs qui accompagnent tout du long ces athlètes hors norme pourtant tous amateurs… Les voir ainsi filer à plus de 7 nœuds (près de 14 km/h), ramant sans pause, à raison de 50 à 80 coups de pagaie par minute dans un synchronisme parfait, vous fait instantanément comprendre que ces hommes-là ne sont pas faits du même bois que les autres. A bord, chacun a un poste bien précis. Le Fa’ahoro ou n°1, plutôt un gros gabarit, donne la cadence et doit être endurant; le n°2 se cale sur lui. Les numéros 3 (le Tare, capitaine de l’équipe) et 4 sont les moteurs. Les plus petits gabarits sont numéros 5 et 6 (le Peperu) et dirigent le va’a en utilisant la pagaie comme gouvernail. Luttant contre la fatigue,

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la déshydratation, les crampes, ils ne se déconcentrent pas une seule seconde, sous peine de perdre leur harmonie magique, fruit de toute une année d’entraînement, qui peut les mener à la victoire. Dans les compétitions internationales (dont la célèbre Molokaï à Hawaï), les Tahitiens trustent systématiquement les podiums, qu’ils fassent partie des plus grands clubs aux moyens conséquents, ou de structures plus modestes: les Australiens, les Californiens, les Néo-Zélandais, les Hawaïens, les considèrent tout bonnement comme imbattables. Mais quel est donc leur secret?

LA CONFIANCE POUR GAGNER Les 6’000 licenciés de la Fédération Tahitienne de Va’a dispatchés dans les 200 clubs de l’archipel passent littéralement leur vie sur l’eau pour atteindre le meilleur niveau: au moins quatre heures par jour, sans compter les exercices de cardio ou de muscu, et la participation aux courses qui se déroulent presque chaque week-end. Aucune des stars

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Le jeune Rete Ebb habite au bord du lagon de Mataia. Tous les jours, il s’entraîne aux aurores avec son V1 (pirogue à une place) avant d’aller au travail. Il a tout gagné cette année! En individuel, en équipe. «Le secret, c’est l’entraînement… », confie-t-il.

du va’a n’est un sportif professionnel: ils vont ramer avant de partir au lycée ou au travail, et ressortent leur pirogue le soir avant de rentrer chez eux. «L’entraînement est fondamental, confie Rete Ebb, jeune phénomène du va’a devenu une icône pour sa génération; mais le plus important, c’est l’esprit de corps. Pour gagner, il faut être en confiance totale, en symbiose avec tes 5 équipiers…» Le va’a, enseigné depuis les années 80 à l’école, attire les graines de champions, filles et garçons, dès leur 11 ans. C’est en faisant un tour au Musée de Tahiti et des Iles qu’on prend la pleine mesure de l’évolution architecturale du va’a, depuis que les ancêtres des Polynésiens venus d’Asie colonisèrent il y a 2’000 ans les îles vierges du sud-est du Pacifique. Si les pirogues modernes sont faites de matériaux composites, elles étaient à l’origine – et jusqu’il y a quelques

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décennies – en bois creusé. Celles qui servirent aux longues navigations étaient à voiles, plus grandes (20-30m de long), profondes et ventrues, pour pouvoir charger un maximum de gens, de plantes et d’animaux. Tara Hiquily, responsable des collections ethnographiques au musée et co-auteur du très beau livre «Va’a, la pirogue polynésienne», explique: «A l’époque des premiers contacts entre Polynésiens et Européens, le degré de technicité de construction des va’a était très élevé. Malheureusement, hormis quelques écrits, plans, objets (voiles, rames…) et photos – pour la période plus récente –, il ne reste presque aucune mémoire en Polynésie de ce savoir-faire millénaire. Les dernières pirogues de pêche ont disparu il y a dix ans, mais avec ce qu’il se passe au niveau sportif, je suis presque sûr que ce patrimoine va renaître».

Une journée avant le départ de l’Havaiki Nui. Quelques équipages s’entraînent, alors que les enfants s’amusent sur les amarres d’un cargo qui ravitaille les îles depuis Tahiti.

Toute la beauté des eaux transparentes de la fin de course. A Bora Bora, l’arrivée se donne dans le bien-nommé Lagon turquoise.

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Le site du marae de Taputapuatea, sur l’île de Raiatea. Le vocabulaire de la pirogue (tira, ava’a, to’o) rappelle celui des différentes parties d’un marae, lieu cérémoniel sacré polynésien. A gauche, une étape difficile pour les concurrents dans le lagon entre Raiatea et Taha’a.

PIROGUE DES ÂMES ET DES JEUNES Si les va’a, dont la construction était très ritualisée, servirent d’abord au déplacement, au peuplement et à la pêche, ils étaient aussi un support de l’organisation sociale, politique et religieuse; on dit d’ailleurs que les âmes repartent vers l’île d’origine sur une pirogue symbolique. Le terme va’a, quant à lui, peut désigner les hommes d’un même clan et leur espace territorial, et le vocabulaire de la pirogue (tira, ava’a, to’o...) rappelle celui des différentes parties d’un marae, lieu cérémoniel sacré polynésien. C’est à la fin du 19ème siècle que les va’a sont devenus également des supports de compétition. Aujourd’hui, Albert Moux, PDG de Pacific Petroleum et de Vodafone Tahiti a même son propre club, Shell Va’a, qui affiche le plus gros palmarès tant local qu’international:

Sur les bateaux accompagnateurs, l’ambiance est digne d’une finale de Coupe du monde de football avant l’arrivée à Bora Bora dans le lagon turquoise et sous les encouragements des vahinés.

«La pirogue donne des repères aux jeunes. Quand notre club prend sous son aile un rameur au talent prometteur, l’entreprise lui fournit également un travail. Mon rôle n’est pas seulement de leur permettre d’atteindre l’excellence, mais aussi de les aider à construire leur avenir; parfois je les aide à obtenir un prêt pour une maison, je les pousse à suivre des études». Rares sont les petits Tahitiens qui ne rêvent pas de pouvoir un jour participer eux aussi à l’Hawaïki Nui Va’a. Ce n’est plus seulement sur le drapeau polynésien que s’affiche fièrement le va’a: partout dans le monde commencent à se créer des écoles et des courses de pirogues, et l’on parle d’inscrire la discipline aux J.O. Le 21e siècle sera-t-il l’âge d’or de la pirogue à balancier?

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Va’a

Pirogue polynésienne : une fierté, un sport et un symbole Polynesian outrigger canoe – pride, sport and symbol


Découverte

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DEPUIS 24 ANS SE TIENT DANS L’ARCHIPEL DES ÎLES SOUS-LE-VENT LA PLUS MYTHIQUE COURSE DE PIROGUES À RAMES : L’HAWAIKI NUI VA’A. GRÂCE À ELLE, LE MONDE ENTIER CONNAÎT DÉSORMAIS LE VA’A, CETTE PIROGUE À BALANCIER INDISSOCIABLE DE LA CULTURE POLYNÉSIENNE. À LA FOIS SPORT NATIONAL ET SYMBOLE IDENTITAIRE, L’ANCESTRAL VA’A N’EN FINIT PAS DE FASCINER.

THE LEGENDARY CANOE RACE HAWAIKI NUI VA’A HAS BEEN HELD IN THE LEEWARD ISLANDS FOR THE PAST 24 YEARS. THANKS TO THIS EVENT, THE ENTIRE WORLD HAS BECOME FAMILIAR WITH THE VA’A, AN OUTRIGGER CANOE THAT DISTINGUISHES POLYNESIAN CULTURE. AT ONCE A NATIONAL SPORT AND SYMBOL OF CULTURAL IDENTITY, THE ANCESTRAL VA’A IS STILL CAPTIVATING.

TEXTE / TEXT : MARIE DUFAY PHOTOS / PICTURES : JULIEN GIRARDOT

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Découverte

Anyone who has attended a Hawaiki Nui Va’a event has been impacted. What happens on the water at the beginning of every November for three straight days is simply incredible. At least one hundred 6-man teams undergo a journey of 130km/81mi between the islands of Huahine, Raiatea, Tahaa and Bora Bora accompanied by fleets of companion boats that follow these extraordinary amateur athletes. To witness firsthand how they paddle nonstop at about 50-80 strokes per minute makes you instantly aware that these men are not made like most others. In international competitions, such as Hawaii’s famous Molokaï, Tahitians consistently rank at the top, whether they stem from big clubs or smaller organizations. Australians, Californians, New Zealanders and Hawaiians consider them unbeatable. But what is their secret? Gordon Barff, a trainer and instructor with the Tahitian Va’a

Quiconque a déjà assisté à une édition de l’Hawaiki Nui Va’a le sait. Ce qu’il se passe sur l’eau chaque année début novembre au cours de ces 3 jours est tout bonnement incroyable : une centaine d’équipages de 6 rameurs, un parcours d’environ 130 km entre les îles de Huahine, Raiatea, Tahaa et Bora Bora, une horde de bateaux qui accompagnent ces athlètes hors-normes pourtant tous amateurs… Les voir ainsi ramer sans pause et à raison de 50 à 80 coups de pagaie par minute vous fait instantanément comprendre que ces hommes-là ne sont pas faits du même bois que les autres. Dans les compétitions internationales dont la fameuse course de la Molokaï à Hawaï, les Tahitiens accaparent systématiquement les podiums, qu’ils fassent partie des plus grands clubs ou de structures plus modestes. Les Australiens, les Californiens, les Néo-Zélandais, les Hawaïens, les considèrent tout bonnement comme imbattables. Mais quel est donc leur secret ? Gordon Barff, entraineur et formateur au sein de la Fédération Tahitienne de Va’a depuis 2003, amène une première réponse. « À l’aube des années 1980, Tahiti a perdu le Tour de Moorea face à une équipe américaine très entraînée issue du kayak. Puis nous n’avons plus ramené de médailles d’or aux championnats du monde, alors que depuis longtemps nous dominions toutes les courses. ça a été une claque énorme. Avec de grands champions comme Lewis Laughlin ou Philippe Bernardino, nous avons décidé de réagir. Il fallait une vision collective et structurée de ce que le va’a moderne devait être. Nous avons travaillé d’arrache-pied pour que les jeunes rameurs bénéficient d’une vraie formation et 32

Federation since 2003, was quick to respond: “In the early 1980s, Tahiti lost the Tour of Moorea against an American team that excelled at Kayak. Then we didn’t bring home any Gold medals or World Championship wins although we dominated the races for many years. It was a huge slap. With great champions such as Lewis Laughlin and Philippe Bernardino, we decided to take action. We needed a collective and structured vision of what the modern va’a needed to become. We worked very hard so that young paddlers could have real training and sharp team selections. The va’a, oars, training, coaching…we revisited everything in depth. It became imperative that we win the 2002 World Championships in Bora Bora. Much like head coach Aimé Jacquet did with the Bleus in 1998 during the Football World Cup, we recruited the best paddlers from each club and this strategy paid off. Ever since, Tahitians have again been on top.”

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modErn Va’a Indeed, for the past 15 years, some of the 6,000 members throughout 200 clubs of the Tahitian Va’a Federation spend practically their entire lives on the water, training at the highest level—at least 4 hours a day without counting cardio exercises, working out at the gym, and participating in other races that are held almost every weekend. None of the va’a stars are professional athletes. They train in their spare time when not at work. Since the 1980s, va’a has been taught in schools and attracts future champions, girls and boys, from age eleven. In the footsteps of Rete Ebb, Vaimiti Maoni, Kevin Ceran Jerusalemy (winner of the 2015 Super Aito) and Hinatea Bernardino, most trainees often have a father, uncle or brother who is used to standing on the winner’s podium. This provides powerful family support, just as much morally as financially.

de sélections pointues. Les va’a, les rames, les entraînements, le coaching, tout a été revu de fond en comble. Nous devions absolument remporter les championnats du monde à BoraBora en 2002. Alors, un peu comme le sélectionneur Aimé Jacquet a fait avec les Bleus en 1998 lors de la Coupe du Monde de Football, nous avons réuni les meilleurs rameurs de chaque club, et la méthode s’est avérée payante. Depuis, les Tahitiens sont de nouveau au sommet ».

lE Va’a modErnE Effectivement, depuis 15 ans, parmi les 6 000 licenciés de la Fédération Tahitienne de Va’a dispatchés dans les 200 clubs de l’archipel, certains passent littéralement leur vie sur l’eau pour atteindre le meilleur niveau : au moins 4 heures par jour, sans compter les exercices de « cardio » ou de musculation et la participation aux courses qui se déroulent presque chaque week-end. Aucune des stars du va’a n’est un sportif professionnel : tout le monde prend sur son temps libre pour s’entraîner, en dehors des heures de travail. Le va’a, enseigné depuis les années 1980 à l’école attire les graines de champions, filles et garçons, dès leurs 11 ans . À l’image de Rete Ebb, Vaimiti Maoni, Kevin Ceran Jerusalemy (vainqueur du Super Aito 2015) ou Hinatea Bernardino, la majeure partie d’entre eux ont très souvent un père, un oncle, un frère, qui est lui-même un habitué des podiums : un soutien familial indéniablement précieux, tant moralement que matériellement. 33


Découverte

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Outre la participation aux courses, l’achat d’un va’a est un véritable investissement : de 120 000 Fcfp (1 000 euros) pour un modèle en fibre de polyester à 375 000 Fcfp (3 142 euros) pour un modèle en fibre de carbone. Devenir champion, c’est aussi pouvoir bénéficier d’un sponsoring de la part des constructeurs de va’a et des fabricants d’accessoires. Fai Va’a est un des constructeurs réputés de Tahiti. De ce chantier installé depuis 2007 dans la vallée de Titioro, près de Papeete, partent chaque mois des containers de va’a en direction de la Nouvelle-Zélande, des États-Unis, de l’Australie, du Japon, d’Hawaï, du Canada et de l’Europe. Mais 80 % de la production est cependant destinée au marché local : les machines de guerre hyper profilées dessinées par Joe Bunton sont plébiscitées par les meilleurs rameurs. On reconnaît immédiatement son « shape », pincé à l’avant. En fibre de verre et résine polyester ou en carbone infusés sous vide, ses modèles de V1 (pirogue individuelle de 7,20 m) ou de V3 (pirogue à 3 de 10,50 m) sont un peu plus lourds que ceux de ses concurrents : la patte de Joe, c’est de privilégier la rigidité à la légèreté. Si chaque concepteur a sa recette et dessine ses va’a de façon empirique, à la main, les procédés de construction sont extrêmement maîtrisés. « La forme des va’a actuelle est quasi-parfaite, explique-t-il, et ne connaîtra pas à l’avenir de modification majeure ». 34

Outside of participation in the races, just the purchase of a va’a is a huge investment—from 120,000CFP/$1200USD for one made of Polyester to 375,000CFP/ $3,750USD for one made out of carbon fibers. To become a champion, it is highly beneficial to be sponsored by va’a builders and accessory manufacturers Fai Va’a is one of Tahiti’s reputable va’a builders. Every month, shipping containers leave their factory in Titioro valley close to Papeete for New Zealand, the USA, Australia, Japan, Hawaii, Canada and Europe. However, 80% of their production is for the local market, such as the high profile war machines designed by Joe Bunton which are prized by the best paddlers. Its shape is highly recognizable due to its long, narrow nose. Made from fiberglass and polyester resin or through vacuum infusion of carbon fibers, the V1 (7.2m/24ft. one-man canoe) and the V3 (10.5m/35ft. three-man canoe) are slightly heavier than the competition. Bunton’s signature move is that he prefers sturdiness over lightness. Va’a designers who create the plans by hand are able to precisely master the construction process. Bunton explains, “The shape of the modern va’a is virtually perfect to the point it is hard to envision how it could undergo any major changes.”


Découverte

thE roots of thE Va’a

Aux rAcinEs du Va’a C’est en faisant un tour au musée de Tahiti et des îles à Punaauia qu’on prend la pleine mesure de l’évolution architecturale du va’a, depuis que les ancêtres des Polynésiens venus d’Asie colonisèrent il y a 2 000 ans les îles vierges du sud-est du Pacifique. Si les pirogues modernes sont faites de matériaux composites, elles étaient à l’origine – et jusqu’il y a quelques décennies – en bois creusé. Celles qui servirent aux longues navigations étaient à voiles, plus grandes (20-30 m de long), profondes et ventrues, pour pouvoir y charger un maximum de gens, de plantes et d’animaux. Tara Hiquily, responsable des collections ethnographiques au musée et co-auteur du très beau livre Va’a, la pirogue polynésienne, explique : « La pirogue à balancier est présente des îles de Madagascar, Andaman et Nicobar à l’extrême ouest de l’océan Indien, jusqu’aux îles mélanésiennes au sud de l’océan Pacifique, micronésiennes au nord et polynésiennes à l’est. Cette zone du monde a créé le multicoques et le balancier : la pirogue est un concept fantastique, décliné en plusieurs tailles. À l’époque des premiers contacts entre Polynésiens et Européens, le degré de technicité de construction des va’a était très élevé : malheureusement, hormis quelques écrits, plans, objets (voiles, rames etc.) et photos – pour la période plus récente –, il ne reste presque aucune mémoire en Polynésie de ce savoirfaire millénaire. Les dernières pirogues de pêche ont disparu il y a dix ans… mais avec ce qu’il se passe au niveau sportif, je suis presque sûr que ce patrimoine va renaître ». Si les va’a, dont la construction était très ritualisée, servirent d’abord au déplacement, au peuplement et à la pêche, ils étaient aussi un support de l’organisation sociale, politique et religieuse. On dit d’ailleurs que les âmes repartent vers 36

l’île d’origine sur une pirogue symbolique. Le terme va’a, quant à lui, peut désigner les hommes d’un même clan et leur espace territorial et le vocabulaire de la pirogue (tira, ava’a, to’o...) rappelle celui des différentes parties d’un marae, lieu cérémoniel sacré polynésien. À la fin du XIXe siècle, les va’a deviennent également des supports de compétition. Même si les Polynésiens ont toujours aimé se mesurer sur l’eau, entre districts ou entre îles, c’est avec le protectorat français, mis en place en 1843, que le concept de course « à l’européenne » fait son apparition. En 1881 naissent les fêtes du Tiurai qui devinrent le fameux Heiva en 1984. Les catégories s’organisent et les pirogues contemporaines accueillent 1, 3, 6, 12, 14 ou 16 rameurs. De fameuses équipes comme celles de Maire Nui, au coup de rame « rapide comme celui des anciens » imprègnent fortement la mémoire collective. À partir de 1975, la construction en polyester se généralise, signant le début d’une ère nouvelle.

It is through taking a tour of the Museum of Tahiti and the Islands in Punaauia that one can fully realize the architectural evolution of the va’a when traced since the arrival of Polynesian ancestors from Asia who settled the uninhabited islands of the South-Eastern Pacific 2,000 years ago. Although modern canoes are now made of composite materials, they were originally— and just until a couple decades ago—carved out of wood. Those that embarked on long journeys had sails, were much longer (20-30m/65-100ft), deeper and wider in order to be loaded with passengers, plants and animals. Tara Hiquily, curator of the ethnographic collections at the museum and co-author of the beautiful book, Va’a: la pirogue polynésienne (Va’a: The Polynesian Canoe), explains: “The outrigger canoe is present in the islands of Madagascar, Andaman and Nicobar to the extreme west of the Indian Ocean all the way to Melanesia in the Southern Pacific and up to Micronesia to the north, then Polynesia to the east. This region of the world invented the multi-hulled and outrigger canoes. The outrigger canoe is quite an ingenious creation that comes in different

sizes. During the time of first contact between Polynesians and Europeans, the technical degree of va’a building was highly evolved. Unfortunately, aside from a few documents, plans, objects (sails, oars, etc.) and photos—from fairly recent times—there exists little documentation in Polynesia about this thousand year-old knowledge. The last fishing canoes disappeared about ten years ago…however, with what is happening with sports, I believe this legacy will undergo a revival.” The construction of a va’a was very ritualistic. First of all, the canoes were used for fishing and transportation. However, they were also a main fixture of social, political and religious organization. It is also said that souls depart to their island of origin on a symbolic canoe. The term va’a can designate the people of a same clan and territory. The vocabulary surrounding the canoe (such as tira, ava’a, to’o...) recalls the different parts of a marae, a sacred Polynesian ceremonial site. By the end of the 19th century, the va’a became a source of competition. Even though Polynesians have always measured their prowess on the water—either between districts or islands. Once the French Protectorate was established in 1843,

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the concept of European races made an appearance. The Tiurai Festival began in 1881, then in 1984, became known as the famous Heiva. Racing categories were put in place and modern canoes held 1, 3, 6, 12, 14 or 16 paddlers. Famous teams with a paddle as quick as the ancients, such as Maire Nui, are deeply entrenched in collective memory. After 1975, the manufacture of polyester canoes started to take place, which marked the beginning of a new era.

A rAdiAnt futurE Ever since, several names have marked the va’a world. Philippe Bernardino is one such name. Since he was 13, this star muchadored by the younger generations won all competitions and was 6 time world champion. “There is a turning point when we realized training outside of the lagoon would greatly improve our technique. To canoe over swells in a va’a and gain speed, one had to learn how to paddle on high seas. We started training at 5am and realized we didn’t have the time to get back over the coral reef before getting to work. Since we started training at 3am, the Hawaiians have not been able to beat us!” recalls Bernardino.

un AvEnir rAdiEux Depuis, de nombreuses figures ont marqué l’univers du va’a. Philippe Bernardino en fait partie : depuis ses 13 ans, ce géant adulé par les jeunes générations a tout gagné et a été 6 fois champion du monde. « Il y a eu un tournant quand on a compris qu’en s’entraînant en dehors du lagon, on allait améliorer notre technique. Pour surfer sur la houle avec les va’a et gagner en vitesse, il fallait apprendre à ramer au large ; or, nous commencions les entraînements à 5h et n’avions pas le temps de franchir la barrière de corail avant d’aller au travail. Le jour où nous avons commencé les entraînements à 3h, les Hawaïens n’ont plus réussi à nous battre ! ». 37


Toujours dans un souci d’améliorer la vitesse des va’a, il est le premier à concevoir des V1 en carbone. Puis il conçoit aussi des va’a pour enfants. « J’accueille plein de jeunes en stage dans mon chantier : les débouchés professionnels dans le secteur sont bien concrets désormais ». Devenu entraîneur, il ne cesse de continuer à apprendre, expérimenter, partager, fier de voir que les jeunes reprennent le flambeau. Albert Moux, PDG de Pacific Petroleum et de Vodafone Tahiti, ne s’y est pas trompé non plus. Il fut le premier chef d’entreprise à investir financièrement pour développer le va’a, mettant à la disposition de ses rameurs un centre d’entrainement haut-de-gamme et près de 30 millions Fcfp annuels pour son fonctionnement. Résultat : son club, Shell Va’a, affiche le plus gros palmarès tant local qu’international. « La pirogue donne des repères aux jeunes. Quand notre club prend sous son aile un rameur au talent prometteur, l’entreprise lui fournit également un travail. Mon rôle n’est pas seulement de leur permettre d’atteindre l’excellence, mais aussi de les aider à construire leur avenir ; parfois je les aide à obtenir un prêt pour une maison, je les pousse à suivre des études ». À l’instar de Shell Va’a, les plus gros clubs comme EDT ou OPT alignent jusqu’à 30 rameurs, mais les petits clubs continuent de créer la surprise, prouvant que les techniques de formation de la Fédération de Va’a ont révolutionné la discipline. Rares sont les petits Tahitiens qui ne rêvent pas de pouvoir un jour participer eux aussi à l’Hawaïki Nui Va’a. Ce n’est plus seulement sur le drapeau polynésien que s’affiche fièrement le va’a : partout dans le monde commencent à se créer des écoles et des courses de pirogues, et l’on parle d’inscrire la discipline aux JO. Le XXIe siècle sera-t-il l’âge d’or de la pirogue à balancier ? 38

Always on a quest to improve the speed of the va’a, he was the first to come up with the carbon V1. Then he designed a va’a for children. “Many youngsters come to my building site for workshops. There are now plenty of solid career opportunities in this field,” Bernardino states. Now a trainer, he continues to keep learning, experimenting and sharing his knowledge. He is very proud to see so many youngsters pick up the relay baton. Albert Moux, CEO of Pacific Petroleum and Vodafone Tahiti, sensed the power of va’a racing. He was the first business owner to invest in the development of the va’a. He created a state-ofthe-art training center for his paddlers and annually spends 30 million CFP ($300,000USD) to keep it running. The result is his club, Shell Va;a, which has won big races internationally as well as locally. “The outrigger canoe provides a point of reference for our youth. When our club takes a promising paddler under its wing, the company provides him with a job. My role is not to just allow them to attain a level of excellence, but also to help them build their future. Sometime I help them get a loan for a house and I push them to pursue their studies.” Like Shell Va’a, bigger clubs such as EDT and OPT align up to 30 paddlers, but small clubs continue to surprise, which proves that the Tahitian Va’a Federation training techniques have revolutionized the discipline. It is rare to find Tahitians who do not dream of one day participating in Hawaiki Nui Va’a. It is not just the French Polynesian flag that proudly displays the va’a. Va’a training centers and races are cropping up all over the world and there is talk about including this discipline in the Olympics. Will the 21st century be the Golden Age of the outrigger canoe?


Découverte 近代的なヴァアがどうあるべきなのかということについて、

ン=ジェルザレミー(2015年スーパーアイトーレースの覇

共通で組織化されたヴィジョンを確立する必要があった。若

者)やヒナテア・ベルナルディーノなどの若いスターパドラ

いパドラーたちのために近代ヴァアに対応したトレーニング

ーの多くは、父や叔父、兄など、ヴァアレースで表彰台の常

方法と選手の選抜方式を確立するべく、一生懸命に方策を練

連だった近親者がいる。心理的にも物質的にも、家族の支え

った。ヴァアの船体、パドル、トレーニング、コーチング

は若いパドラーにとって欠かせない重要なものだ。レースの

等、全てについてくまなく見なおし、再検討した。2002年

参加費用だけでなく、ポリエステルファイバー製のモデルで

にボラボラ島で開催される世界選手権では、絶対に勝たなけ

約12万XFP(1000ユーロ)、カーボンファイバー製だと37

ればならなかった。サッカーの1998年ワールドカップでフ

万5千XFP(3142ユーロ)というヴァアの購入費は、家族に

ランス代表コーチ、エメ・ジャッケがやったように、各クラ

かなりの投資を強いている。そして、ヴァアのレースで勝っ

ブのトップパドラーを集めてタヒチ代表チームを構成したん

てチャンピオンになるということは、ヴァアや付属品を製造

だが、この方法は実に効果的だったね。それ以来、タヒチは

しているメーカーのスポンサリングを獲得するということで

ヴァアの世界で王者の座を奪還し、支配し続けている」。

もあるのだ。

近代的なヴァア

ヴァアの製造業者だ。パペーテに近いティティオロ地区に

フレンチポリネシアの島々にちらばる約200のクラブに所 属するタヒチ・ヴァア連盟の登録選手は約6000人にのぼ り、そのうちかなりの選手が毎日4時間以上のハードな海上 トレーニングをこなしているというから、彼らはほとんど水 の上で暮らしているようなものだ。もちろん、心肺機能や筋 力強化のためのトレーニングの時間、それに加えほぼ毎週末 のレースへの参加時間はこの時間には含まれていない。ヴ ァアのスター選手たちには誰ひとりとしてプロはおらず、

ポリネシアの誇りと象徴の国民的スポーツ

ポリネシアのアウトリガーカヌー、ヴァア 伝説のカヌーレース、ハワイキヌ イ・ヴァア・レースは、フレンチ ポリネシアの風下(リーワード) 諸島で24年前から開催されてい る。このレースのおかげで、ポリ ネシア文化と切っても切れない「 ヴァア」、つまりアウトリガー付 きのカヌーが世界に知られるよう になった。フレンチポリネシアの 国民的スポーツであり、ポリネシ アンとしてのアイデンティティー の象徴でもあるヴァアは、今も昔 も人々を魅了してやまない。

vA’A

みんな、仕事以外の自由時間を削って練習に励んでいる。 また、1980年以来、ヴァアは学校でも教科として教えられ るようになり、11歳からヴァアのオプションを選択できる ので、男女を問わず将来のチャンピオンたちの人気を呼んで いる。レタ・エブやヴァイミティ・マオニ、ケヴィン・スラ

ファイ・ヴァアは、タヒチで非常に高く評価されている 2007年から開業しているファイ・ヴァアの工場からは、ヴ ァアを満載したコンテナがニュージーランドや米国、オース トラリア、日本、ハワイ、カナダ、ヨーロッパに向けて毎月 々々搬出されている。しかし、ファイ・ヴァアの総生産台数 の80%は地元の市場向けだ。ジョー・ブントン設計の「マ シーン」と呼ぶにふさわしいすばらしいフォルムの最新鋭ヴ ァアは、世界のベストパドラーに圧倒的な人気を誇ってい る。ジョー・ブントンのシェイプの特徴である船体前方がほ っそりと優美なヴァアは、すぐに見分けがつく。 グラスファイバーとポリエステル樹脂、あるいカーボンを含 浸注入で成形したV1(艇長7.2mのひとり乗り)やV3(艇 長10.5mの3人乗り)のモデルは、他のメーカーのものに比 べるとやや重いのだが、これは躯体を軽量化することよりも 頑丈さを優先するジョーの設計の特徴だ。

ハワイキヌイ・ヴァアのレースを見たことのある人は誰でも知ってい ることだが、毎年11月初めに3日間にわたって水上で繰り広げられるこ のレースは、まさに壮観としか言いようのない驚くべきレースだ。6人乗 りヴァアが100艇あまりも打ち揃い、フアヒネ島からライアテア島、タ ハア島、ボラボラ島をつなぐ全長約130kmの外洋コースをカヌーで縦 走、それを多数の伴走船が追い、しかも、並外れた身体能力を持つパド ラーたちは全員がアマチュアだという・・・。1分間に50~80回という ものすごいスピードでオールをかき続けるパドラーたちを実際に目前に 見ると、彼らのフィジカルがどれだけずば抜けたものかがすぐに実感で きる。ハワイで開催される有名なモロカイ・カヌーレースを始め、国際 的なカヌーレースではタヒチの選手たちが表彰台をほとんど独占してお り、しかも、大きなクラブの所属メンバーだけでなく小さなクラブの選 手も同様に活躍している。今日では、タヒチアン選手はオーストラリア やカリフォルニア、ニュージーランド、ハワイの選手たちから天下無敵 のパドラーだと考えられているのだ。その理由を、2003年からタヒチ・ ヴァア連盟の監督兼コーチをつとめるゴードン・バルフ氏が説明してく れた。「1980年代初めのモーレア島周回レースで、トレーニングを積ん だカヤック出身選手を集めたアメリカチームにタヒチチームは敗退を喫 した。それまでの長い間、タヒチは世界中のアウトリガーカヌー・レー スを支配していたんだが、このレース以降、世界選手権で金メダルを取 れなくなってしまった。横っつらにビンタを食らったようなすごいショ ックだったよ。だから、ルイス・ローグランやフィリップ・ベルナルデ ィーノのような過去の偉大なチャンピオンと一緒に、なんとか対策を立 てようということになった。

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Découverte

輝く未来 その後、ヴァアの世界では多数の偉大なパドラーが歴史を 刻んでいった。フィリップ・ベルナルディーノはそのような 伝説的パドラーのひとりである。若い世代に絶大な人気のフ ィリップは、13歳の時からレースで勝利に勝利を重ね、6回 も世界チャンピオンの座を獲得した。「ラグーンから出て外 洋トレーニングをすると技術が向上することが分かり、それ がヴァア競技のターニングポイントになった。ヴァアでサー フィンのように波に乗ってスピードを上げるには、外洋での パドリングテクニックをマスターする必要があったが、トレ ーニング開始は朝の5時だったから、仕事に行く前にバリア リーフを超えてトレーニングする時間はなかった。だからト レーニング開始時間を3時に早め、それ以来、ハワイの選手 たちは俺達に勝てなくなったんだ!」。フィリップはいつも ヴァアのスピードを上げることを考えている人で、初のカー ボン製のV1(ひとり乗りヴァア)の設計者でもある。カー ボンの次には、子供用のヴァアを設計した。「ヴァアの建造 所に実習生として多くの若者を受け入れている。だから、彼 らはこの分野での就職先や仕事がどんなものか、具体的に知 っている」。コーチになったフィリップは、ヴァアの指導と 実験、共有することに専念し、若い世代にヴァアへの情熱が しっかりと受け継がれているが彼の誇りである。 ヴァアの設計者はそれぞれ独自のノウハウを持ち、カンと経

してはこの頃よりずっと後の時代のヴァアについての記述や

験にもとづいて設計するのだが、今日のヴァアの造船プロセ

図、帆やパドルなどの付属品がいくらか残っているだけで、

スは非常に精度の高いものである。「現在のヴァアのフォル

千年単位の昔の知恵や技術に関する記録はポリネシアには全

ムはほとんどパーフェクトで、将来に大きな変革はないだろ

く残っていない。漁船として使われていた最後のカヌーも10

う」とジョーは言う。

年前に姿を消してしまったが、スポーツの世界でのヴァアの

ヴァアのルーツを訪ねる タヒチ島プナアウイアにあるタヒチ博物館を見学すれば、 ヴァアの設計の変遷を如実に見ることができる。今から約 2000年前、アジアからやって来たポリネシア人の祖先は、 ヴァアに乗って南太平洋の島々に住み着いていった。近代ヴ ァアは複合材料でできているが、ヴァアは元々は丸太をくり ぬいて作られ、今からほんの数十年前まで木製のヴァアが実 際に使われていた。長距離航海用のヴァアは全長20~30m と大型で帆がつき、躯体は最大限の人と植物や動物を載せる ために、深さを持って膨らみのある形だった。、「ポリネシ アのカヌー、ヴァア」と題された非常に美しい本の共著者で あり、タヒチ博物館の民俗学コレクション責任者のタラ・ヒ キリー氏が、ヴァアの歴史を説明してくれた。「アウトリガ ーの付いたカヌーは、インド洋の西端のマダガスカル島、ア ンダマン島、ニコバール島から、太平洋の南にあるメラネシ ア諸島、北のミクロネシア、そして東のポリネシアの島々ま でに見られる。マルチコックとアウトリガーは、世界の中の この地域で生まれたもの。カヌーには多種多様の大きさと型 があり、すばらしいコンセプトの船だ。ポリネシア人とヨー ロッパ人が初めて接触を持った時代には、すでに非常に優れ たヴァアの建造技術が確立していた。残念なことに、資料と 42

パシフィック・ペトロリアムとボーダフォン・タヒチの社

vA’A

誤ることはしなかった。彼は、ヴァアを推進するために資金 投資を行った最初の経営者である。ハイクラスのトレーニン グセンターを整備してパドラーに供し、年間3000万XFPの 運営費用も提供。その結果、彼のクラブ「シェル・ヴァア」 は、地元ポリネシアのレースだろうと国際レースだろうと、 すばらしい成績をあげている。「ヴァアは、若者たちにメル クマールを与えるスポーツ。有望なパドラーをうちのクラブ に入れるときは、同時に会社でのポストも提供する。私の役 割は、彼らに一流選手になれるような環境を与えるだけでな く、彼らの将来設計の手助けをすること。住宅費のローン が借りられるように手助けしたり、学業を続けるよう後押 しすることもある」とムー氏は語る。シェル・ヴァアに習 い、EDTやOPTなどの大きなクラブも30人ほどのメンバー を抱えている。しかし、小さなクラブも負けてはおらず、レ ースでサプライズを起こし続けている。タヒチ・ヴァア連盟 が確立したトレーニング方法が、ヴァア・レース競技に革命 を起こしたことの証拠である。タヒチの子どもたちの中で、 世界最大・最長の国際カヌーレースであるハワイキ・ヌイ・ ヴァア・レースに参加する日を夢に見ない子はほとんどいな いだろう。今では、ヴァアにはためく国旗はポリネシアの旗 だけではない。ヴァアのカヌースクールやレースが世界中で 作られ始め、オリンピックの種目になることさえ話題に登っ ている。果たして、21世紀はアウトリガーカヌーの黄金時 代になるだろうか?

長アルベール・ムー氏も、ヴァアへの情熱の実現方法を見

盛況ぶりを見ると、ヴァアという文化遺産が復活することを 確信している」。 昔のヴァアの建造は非常に儀式化されていた。海上の移動 と移住のため、魚を捕るために使われていたがヴァアだが、 昔は道具としてだけでなく社会的、政治的、宗教的な目的で も使われていたという。そのためか、ポリネシアでは死後の 魂はヴァアに乗って故郷の島に戻っていくと言われている。 タヒチ語のva’aという言葉には、同じ部族の人々、領地と いう意味もあり、カヌーを意味するボキャブラリー(tira、 ava’a、

to’o)は、実際に古代ポリネシアの祭祀場であるマ

ラエの各部分を示すボキャブラリーに似ている。 ヴァアがレースに使われるようになったのは、19世紀末の ことである。元々、ポリネシアの人たちは地区同士や島同 士で対抗して力量を比べることが好きだったが、ヨーロッ パ式の船のレースのコンセプトがポリネシアに出現したの は、1843年にフランスの保護領になった時期だった。1881 年にはティウライ祭りが始まり、これが1984年に有名なヘイ ヴァ祭りに発展した。近代カヌーレースでは、1人乗りから 3人、6人、12人、14人、16人のカテゴリーが設定された。 「祖先と同じくらいの素速いパドルさばき」と言われたメー ル・ヌイのような伝説的チームが生まれ、ヴァアは人々の記 憶にしっかりと刻まれていった。1975年以降はポリエステル の船体が一般的になり、ヴァアの新時代が到来した。 43


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