ostrea
1
l’huître, l’Homme et le littora Suzanne Katz
2
ostrea l’huître, l’Homme et le littoral Suzanne Katz
Mémoire d’initiation à la recherche En vue de l’obtention du Diplôme d’État de Paysagiste Soutenu le 3 juin 2019 à Versailles, sous la direction de Pauline Frileux Année universitaire 2018 - 2019
Abstract
Oysters and oyster landscapes hold historical, economic and cultural importance. How do oysters and oyster production create landscapes ? How can they be added to the Landscape Architect’s toolbox ? Through the study of oysters, one can trace and analyze the interconnections between economy, ecology and landscape. Roughly 40 % of the human population is estimated to live less than 100 km from a coastline. Both the population density and economic activity related to coastlines is increasing. As a result, the pressure on coastal ecosystems is also increasing. The oyster is considered a bio-engineer or a keystone species, a species with a disproportionately large effect on its environment relative to its biomass or abundance. This dissertation uses the oyster as a prism in order to examen and highlight the construction of oyster landscapes, their cultural importance and the ecological risks or benefits associated with it. Through an exploration of three oyster landscapes, we obtain a more global vision of the difficulties met by such places, possible future solutions, as well as the potential role of landscape architects in the creation or definition of these fluid spaces found at the limit between land and sea1.
oyster coastline territory culture future 1.
NEUMANN, Barbara et al. “Future coastal population growth and exposure to sea-level rise and coastal flooding--a global assessment.” PloS one vol. 10,3 e0118571. 11 Mar. 2015, doi:10.1371/journal.pone.0118571
Résumé
Les huîtres et leurs paysages ont une importance historique, économique et culturelle. Mais comment construisent-elles leur environnement et peuventelles être assimilées dans la boite à outils du paysagiste concepteur ? L’huître est caractéristique des interconnexions entre économie, écologie et paysage. Environ 40 % de la population mondiale vit à moins de 100 kilomètres de la côte. La densité de population et l’activité économique dans le littoral augmente, aussi bien que les pressions sur les écosystèmes littoraux. L’huître est considérée comme une espèce clé de voûte, c’est à dire « une espèce qui a un effet disproportionné sur son environnement au regard de ses effectifs ou de sa biomasse ». Par ce prisme, ce mémoire se propose de faire la synthèse de la construction des paysages ostréicoles, de leur importance culturelle et des risques écologiques qui leur sont associés. Par une exploration de diverses paysages ostréicoles, nous obtiendrons une vision plus large des difficultés qu’ils rencontrent, des solutions futures possibles, ainsi que du rôle pouvant jouer le paysagiste concepteur dans la création ou la définition de ces espaces entre terre et mer.
huître littoral territoire culture avenir
Sommaire
2
Abstract / Résumé
6 Avant-propos 8 Remerciements 9 Introduction
66
CHAPITRE 3
NULLE PART RESTE QUELQUE PART, DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY 72
Un autre estuaire fantôme
76
Une ruée vers l’ors et l’appropriation des terres amérindiennes
11
CHAPITRE I
POÉTIQUE ET LOINTAIN COMME UN PAYSAGE
13
L’huître, une être littéraire et méconnu
18
« Une vie terrible, mais palpitante »
80 L’ostréiculture rurale de Willapa Bay : Un marché mondial à partir d’un jardin secret
26
L’habitat de l’huître
27
L’Homme et l’huître, une longue histoire
35
CHAPITRE 2
L’HOMME ET L’ESTRAN, UNE CULTURE À MARENNES-OLÉRON
38 Creation d’une « culture » sainteongeaise et « un métier passionnant pour les hommes passionnés » 44
« Les ostréiculteurs sont comme leurs huîtres »
46
Mouton de la mer
52
Une appropriation d’un paysage anthropique
54
Les outils de travail ostréicole
56
Écluses
58
La bélon
83 Rencontrer les huîtres de Willapa Bay 83
Pacifique ou Japonaise
84 Kumamoto 84 Olympia 85
La Virginica
85
La bélon
86
Méthodes de production
87 « Bottom culture »
ou les parcs à plats
88
Stake Culture — Bouchots
89
Longline Culture
90
Culture d’huîtres individuelles
91
Poches sur tables
91
Les filières
94
CHAPITRE 4
UN MILLIARD D’HUÎTRES POUR SAUVER LE MONDE (OU AU MOINS NEW YORK)
59
La portugaise
60
La japonaise
61
Un estuaire fantôme
102 Oystertecture
100 Un pari sur l’huître
et les lycéens
110 Living Breakwaters 114 Billion Oyster Project 118
CHAPITRE 5
UN AVENIR INCERTAIN À MARENNES-OLÉRON
123 Marges et le centre,
peur de la vase
124 La Saga de la Maleconche 126 La Présidente
de l’Association pour la Préservation du Littoral de la Maleconche (aplimap)
128 Alice Pauwels 129 Michel Parent 130 L’ostréiculture,
une attraction touristique ?
132 Crise mondiale,
impacts locaux
134 Conclusion 156 Bibliographie 140 Sites Web 142 Glossaire 143 Table des figures 158 Annexes 158 Les personnes
interviewées 159 Exemple d’un questionnaire d’enquête
8
Avant-propos
Ce projet de mémoire est né il y a deux ans
Je savais que l’État de Washington était
maintenant. J’étais de retour dans mon pays
un lieu de production conchylicole : huîtres,
natal, dans le Nord-Ouest des États-Unis.
palourdes, panope (une spécialité locale).
Ma mère vit sur une île dans les San Juan,
C’est l’une des choses qui me manque le
un archipel dans l’État de Washington,
plus dans ma vie en France. La pêche aux
dans le Puget Sound. Depuis son balcon,
tourteaux en bateau pendant le mois d’août
je pouvais voir au premier plan une grande
avec ma mère, ou encore la pêche à pied sur
baie bordée de montagnes couvertes
la vasière de palourdes, ou crevettes, avec
de forêts de résineux. Ces montagnes se
ma meilleure amie, qui vient d’un village
reflétaient dans l’eau, en fonction des
au bord de la mer. Pourtant, je ne me suis
marées et du ciel. C’est un tableau qui
jamais intéressée aux productions humaines
change en permanence. Les couleurs
sur le littoral.
varient entre des pastels et des couleurs très sombres. Quand il y a de la brume, ce qui
Mon parcours d’étudiante dans le domaine
est souvent le cas, les choses se perdent et
de la gestion forestière m’a donné
réapparaissent. La limite entre terre et mer
une compréhension des forêts et des
est en mouvement, mystérieuse.
écosystèmes du Nord-Ouest des États-Unis.
9
Pourtant, depuis ce balcon ouvrant la vue
J’ai trouvé un paysage surprenant dans
sur la baie, je me trouvais devant un paysage
sa beauté et impressionnant dans
qui m’était à la fois familier et inconnu.
sa complexité.
Ce territoire dont le mouvement
Les questions que je me posais sur l’impact
est influencé par les marées, mi-terrien,
de la production conchylicole sur l’estran
mi-aquatique, m’a intrigué et restait
et inversement, sont également applicables
une énigme que je souhaitais éclaircir.
à la France. Par chance, mes beaux-parents
Pendant ce même voyage, j’ai descendu la
ont récemment acquis une petite maison
côte en voiture avec mon mari, depuis la
de vacances sur l’Île d’Oléron, qui fait
frontière avec le Canada, jusqu’en Oregon.
partie du bassin Marennes-Oléron, le plus
Je connaissais bien la côte de l’Oregon,
grand bassin ostréicole en Europe. C’est
mais la côte de Washington, elle, est
en découvrant ce territoire si proche, mais
souvent inaccessible, entre les réserves
aussi si différent du Nord-Ouest des États-
amérindiennes, les plages privées et les
Unis, que l’idée de travailler sur les paysages
exploitations conchylicoles sur l’estran.
ostréicoles m’est venue. FIGURE 1 DEPUIS LE BALCON DE MA MÈRE, SUZANNE KATZ
10
Remerciements
J’aimerais adresser mes sincères remerciements à ceux qui ont contribué à l’élaboration de mon mémoire. Je tiens d’abord à remercier Madame Pauline Frileux qui m’a soutenu, pour son attention aux détails et ses conseils pendant ces derniers mois. Je remercie également Monsieur Patrick Moquay pour son temps hors les murs et horaires de l’école. Merci à ma belle-famille, pour leur petite maison de vacances sur l’Île d’Oléron, à ma belle-sœur pour son aide monumentale sur la mise-enpage de ce document. Je remercie particulièrement mon mari pour le temps il a passé avec moi à Marennes-Oléron pendant mes visites de sites et mes entretiens, ainsi que les heures qu’il a passé à relire mon mémoire. Je remercie également toutes les personnes que j’ai eu la chance d’interviewer, pour leur temps et leurs réponses à toutes mes questions. Finalement, je remercie les chevaliers de la charrette, sans qui je n’aurai jamais fini à temps et certainement pas en aussi bonne compagnie. Merci.
Introduction
11
L’huître peut apparaître comme un sujet
réjouit d’avoir pu le faire. On appelle cela
étrange pour un paysagiste. Souvent, on
le voyage du héros. Pour Le Guin, cette
associe les paysagistes avec les arbres, les
vision linéaire du pouvoir contre des forces
fleurs et les jardins. S’intéresser de manière
extérieures est une fiction. Elle compare
plus générale au domaine du vivant me
sa manière d’écrire à une cueilleuse.
semblait à la fois logique, et pourtant
Elle cherche à droite et à gauche pour
très difficile. C’était comme un défi.
rassembler les fils qu’elle trouve, et créer
Le métier de paysagiste ne me semble pas
une tapisserie, puis un sac. Elle amène
consister seulement à habiller le paysage
des choses et les met à l’intérieur. La
par des plantes. C’est bien plus que cela.
linéarité de l’histoire devient une surface,
Il s’agit pour moi de travailler avec le vivant,
puis un volume, large, avec des épaisseurs
quel qu’il soit. L’huître est un petit être,
différentes, des fils plus ou moins présents
fermé sur lui-même et qui forme diverses
et des objets précieux à l’intérieur2.
associations : les huîtres entre elles, avec le végétal, ou encore avec les Hommes. C’est
Un mémoire de recherche suit les mêmes
un être qui peut drastiquement changer son
conventions que l’écriture d’une histoire.
environnement grâce à sa capacité à filtrer
Thèse, antithèse, synthèse. Héros, obstacle,
de grands volumes d’eau, et qui peut même
vainqueur. Le paysagiste, lui aussi, raconte
changer les courants . Finalement, c’est une
une histoire. Trop souvent, l’intervention
espèce fondamentale sur un littoral de plus
du paysagiste est limitée à un aménagement.
en plus fragilisé par les actions de l’Homme.
Le travail consiste en un état des lieux, suivi
1
par la conception et pour finir par Ursula K. Le Guin, écrivaine et philosophe,
le chantier. Le cycle complet de l’héroïsme.
explique sa théorie de la narration d’une
Avant, pendant, après.
histoire. Dans la forme traditionnelle,
1. 2.
occidentale, une histoire est un récit
Mais le paysage est tout sauf linéaire. C’est
linéaire. Elle la compare avec un chasseur :
un palimpseste. Une construction depuis
un protagoniste rencontre un ou des
des millions d’années. La suite de milliers
obstacles, il arrive à les vaincre et il se
d’actions initiées par les êtres vivants, les
LENIHAN H. S., PETERSON C.H., ALLEN J. M., « Does flow also have a direct effect on the growth of active suspension feeders ? An experimental test with oysters » , Limnology and Oceanography, 41(6). 1996 pp.1359-1366, p. 1362 LEGUIN K. Ursula « The Carrier Bag Theory of Fiction », Dancing at the Edge of the World : Thoughts on Words, Women, Places, New York, Grove Press, 1989, pp. 165-170. 303 p.
12
humains et autres. Depuis le début de
L’huître.
mes études, je cherche à tisser des liens entre les Hommes, entre l’Homme et son
À travers ce tableau sur l’huître, je vais
environnement, entre son environnement
explorer le bassin de Marennes-Oléron
et son imaginaire.
en France, et faire une étude comparative de ce lieu avec la Willapa Bay, dans l’État de
En suivant cette démarche, je vais tenter
Washington et des projets de restauration
d’écrire un mémoire comme un paysage,
d’habitats par des paysagistes à New York.
comme histoire, comme une tapisserie. Voici l’histoire d’un être vivant, si loin
Chaque site montre d’autres façons de
de nous mais qui, comme nous, fait partie
voir et construire ces paysages mi-terriens,
intégrante de la construction
mi-aquatiques, avec des rapports différents
des paysages. Un lien de plus entre l’être
entre terre et mer, Homme et estran, entre
et son environnement, entre l’Homme
Homme et huître.
et son paysage.
FIGURE 2 APRÈS LE RÉVEILLON DE NOËL : BOUTEILLES VIDES ET COQUILLES D'HUITRES : [PHOTOGRAPHIE DE PRESSE] / AGENCE MEURISSE, 1936
CHAPITRE 1 POÉTIQUE ET LOINTAIN COMME UN PAYSAGE
13
qu’ils en laissèrent, et comment ces traces se dévoilent dans le paysage).
de l’histoire des huîtres et de l’Homme (les lieux où les Hommes ont commencé à manger les huîtres, les traces
Redécouvrons l’huître. D’abord par le fantasme, ensuite par la vie d’une huître et finalement par un résumé
14
L’huître, un être littéraire et méconnu
De Lewis Carroll à Casanova, de Ponge à Proust, l’huître a été décrite dans la littérature. Symbole d’excès, de sensualité et même, du Monde, l’huître nous lie à la mer et à nos émotions primaires. Ma première rencontre avec une huître, est passée par les mots de Lewis Carroll. Alice s’est perdue au Pays des merveilles où elle fait connaissance de Tweedledee et Tweedledum. Ces frères jumeaux récitent le poème le plus
1.
long qu’ils connaissent « Le Morse et le Charpentier. » Ce poème prend la forme d’une fable. Les jeunes huîtres innocentes sont escroquées par le Morse et le Charpentier. Au lieu de faire une balade en bord de mer, elles sont prélevées de leur milieu, mises en danger et finalement mangés par le Morse et le Charpentier. En tant qu’enfant, cette histoire fût une mise en garde au danger d’être trop naïve1.
CARROLL Lewis, Alice’s Adventures in Wonderland. Peterborough, Ont. 1832-1898 : Broadview Press, 2000. Print.
CHAPITRE 1
FIGURE 3 LE MORSE ET LE CHARPENTIER - SIR JOHN TENNIEL, 1871
POÉTIQUE ET LOINTAIN COMME UN PAYSAGE
15
16
Pour Casanova, l’huître fût à l’inverse, un outil de séduction, un symbole de la féminité et un aphrodisiaque, qui dévoile les passions intérieures. Dans ses mémoires, il décrit une soirée passée en mangeant des huîtres avec deux jeunes femmes. Leur perte d’innocence commence avec leur initiation aux
huîtres. C’est un rite de passage, comme une deuxième naissance. La forme de l’animal est devenue métaphore de l’organe sexuel de la femme. Armeline et Émeline, les deux jeunes femmes, se demandent si manger des huîtres, métaphore du plaisir, est un péché.
« Nous nous mîmes à table ou j’appris à ces filles à manger des huîtres en leur donnant l’exemple. Elles nageaient dans leur eau. Armelline, après en avoir avalé cinq à six dit à Emeline qu’un morceau si délicat devait être un péché ; Émeline répondit que ça ne devrait pas être un péché parce que le morceau était exquis, mais parce que à chaque huître, nous avalions un demi paul2. - Un demi paul ? dit Armeline, et notre seigneur le pape ne le défend pas ? Si ce n’est pas un péché de gourmandise, je voudrai savoir ce qu’on entend par gourmandise. Je mange des huîtres avec plaisir mais je t’assure que je veux m’en accuser en confession pour voir ce que le confesseur me dira. Ces naïvetés me rendaient heureux dans l’âme ; mais j’avais besoin de l’être dans le corps. Mon amour qui mourrait de faim enviait le sort de ma bouche. En mangeant 50 huîtres nous vidâmes deux bouteilles de Champagne mousseux ce qui fit rire ces bonnes filles qui se trouvaient obligées à commettre l’indécente faute du renvoi. Que j’étais fâché de ne pouvoir pas me livrer au rire, et dévorer de baisers Armelline que je ne pouvais dévorer que des yeux ! J’ai dit au valet de servir le souper, gardant les autres huîtres au dessert. Elles se trouvaient étonnées de se trouver l’appétit plus vif après avoir mangé 18 morceaux si excellents. Armelline me paraissait devenue amoureuse ; j’avais besoin de me flatter et de l’espérer. Comptant un peu sur Bacchus, j’ai défendu l’eau. Nous eûmes un souper des plus fins pour une auberge. Mes pauvres héroïnes s’en donnèrent. Emilie même était toute en flammes. J’ai fait porter des citrons, une bouteille de rhum, du sucre, une grande jatte et de l’eau chaude, et, après avoir fait mettre sur la table les autres 50 huîtres, j’ai renvoyé le valet, j’ai fait un grand punch que j’ai animé en y versant une bouteille de Champagne. Après avoir avalé cinq à six huîtres et bu du punch qui fit faire les hauts cris aux deux filles, car elles se trouvaient excédées par les charmes de cette boisson, je me suis avisé de prier Emilie de me mettre dans la bouche avec ses propres lèvres une huître. » Histoire de ma vie, Casanova, 18263
2. Monnaie des États du Pape 3. Mémoires de J. Casanova de Seingalt, écrits par lui-même, Paris, Garnier Frères, [1880] (rééd. de Laforgue, 1826-1838) ou Histoire de ma vie, éd. Robert Laffont, coll. Bouquins, 1993 (rééd. de Brockhaus-Plon, 1960-1962)
Cette connexion entre la femme et l’huître est restée jusqu’à nos jours. La chanteuse Franco-Vietnamienne Mai Lan l’a détaillée dans sa chanson « Les huîtres » et son clip vidéo en 2013. Mais cette fois-ci, c’est la femme qui
prend en charge sa propre sexualité. Elle remarque que les huîtres sont hermaphrodites et peuvent changer de sexe, pour montrer que la sexualité et le genre sont plus fluides qu’il n’est couramment admis.
« […] Des huîtres et des perles rares Des mythos de Bergerac Se parlent et se mettent à nu, À perte de vue. Des mollusques flasques Avec une boulette de strass
17
POÉTIQUE ET LOINTAIN COMME UN PAYSAGE
FIGURE 4 LES HUÎTRES SONT HERMAPHRODITES, PHOTOGRAMME D’APRÈS « LES HUÎTRES ». YOUTUBE.COM, 4 JUILLET 2013
Hermaphrodites dans le sexe, Jolie coquille dans le texte. Un-deux-trois-quatre-cinq-six-sept-huître ! Où tout et calme et plat quand la mer se déchaîne ? C’est là bas ! Où les perles tombent du ciel toutes seules, plus besoin de les faire ? C’est là bas ! À la surface libres et décrochées sans les algues et sans crabes Prions nos sœurs qu’il nous emmène, nous emmène, nous emmène Ho là bas !… »
4. LAN, Mai. “ Les Huîtres ”, Mai Lan, Chapiron /Aurelien Côtentin / Max Labarthe / Ahmed (pka Nikkfurie) Mazouz, Warner Chappell Music France, BMG Rights Management, 2012, track 8.
CHAPITRE 1
— Mai Lan, “ Les Huîtres ” 2012 4
18
FIGURE 5 UNE AFFICHE PUBLICITAIRE DE 1885
Pour autant, l’huître n’a pas seulement l’image du sexe féminin, car elle est aussi un lien direct avec la mer. « […] autant de plaisir à mon imagination qu’à ma gourmandise ; parfois le petit morceau de nature d’où ils avaient été extraits, bénitier rugueux de l’huître dans lequel restent quelques gouttes d’eau salée, ou sarment noueux, pampres jaunis d’une grappe de raisin, les entourait encore, incomestible, poétique et lointain comme un paysage, et faisant se succéder au cours du dîner les évocations d’une sieste sous une vigne et d’une promenade en mer […]. » Pour Proust, dans son livre Le Côté de Guermantes, l’huître évoque la côte et les vacances. Elle fait partie d’un monde imaginaire au soleil,
avec un vent doux qui vient de la mer. À l’instar de la célèbre madeleine trempée dans du tilleul qui rappelle son enfance à l’auteur, l’huître constitue pour lui un lien direct avec l’océan. Francis Ponge, dans son poème célèbre « L’huître », analyse la forme de l’animal, ses couleurs et ses textures, la peur de se couper sur les pousses bien aiguisés de la coquille, la nécessité d’un geste franc si on cherche à l’ouvrir pour enfin trouver « tout un monde » et peut-être même une perle. Par contre, comme pour Casanova, l’animal est dissocié de son paysage. Elle existe hors de son habitat, son contexte, pour le plaisir de l’humain5.
5. PONGE Francis, L’huître, La partie prise des choses, NRF-Gallimard,1942
19
FIGURE 6 VENDEUSE D’HUÎTRES AU DÉTAIL AVEC SON ÉTALAGE ROULANT : [PHOTOGRAPHIE DE PRESSE] / AGENCE MONDIAL
FIGURE 7 UN GROS ARRIVAGE D’HUÎTRES DEVANT UN RESTAURANT PARISIEN : [PHOTOGRAPHIE DE PRESSE] / AGENCE MONDIAL
POÉTIQUE ET LOINTAIN COMME UN PAYSAGE
France, peu importe la proximité avec la mer. Cette pratique a encore engendré une dissociation entre l’être et son paysage. Aux États-Unis, elles sont aujourd’hui associées à l’image d’une certaine classe sociale, un produit de luxe, souvent accompagnées d’un verre de champagne, lui aussi importé de France. Pourtant, peu d’entre nous sont capables de répondre avec assurance à la question « qu’est-ce qu’une huître ? ». La réponse nous échappe. L’huître reste méconnue.
CHAPITRE 1
La consommation des huîtres est cosmopolite. De Paris à Londres, de New York à San Francisco, les huîtres se sont même intégrées dans l’identité des villes, à des époques variées. Aujourd’hui, seule Paris a gardé sa connexion avec ces êtres vivants bien qu’elle soit la seule de ces villes qui se trouve loin de la mer. Ses bars à huîtres, en provenance directe des côtes françaises, sont plus emblématiques de la ville que de la mer d’où elles viennent. Les huîtres sont mangées lors des repas de Noël et Nouvel an, partout en
20
« Une vie terrible, mais palpitante » — M.F.K. Fisher Voyons la vie d’une huître à travers ses « yeux ».
FIGURE 8 : LA VIE D’UNE HUÎTRE, SUZANNE KATZ
Avec mes millions de frères, sœurs et cousins, je flotte dans le noir. Il fait ni trop chaud, ni trop froid, entre 16 °C et 18 °C. Mes chances de survie sont faibles. Si j’arrive à me trouver un endroit pour me reposer, une vie stressante et dangereuse m’attend.
Peu à peu, les courants et les prédateurs prennent les autres. Il ne reste qu’un œuf sur trois. Nous entrons dans la phase « électron libre » de notre vie.
21
J’ai grandi et poussé une couronne de cils de velum qui m’aident à nager.
Mes cils s’atrophient. Je commence la formation de ma coquille. Ma coquille me rend lourde et m’entraîne vers le fond.
CHAPITRE 1
POÉTIQUE ET LOINTAIN COMME UN PAYSAGE
J’entre dans la phase planctonique de ma vie pour une durée de 15 jours.
22
Phase benthique. J’ai perdu mes cils vibratiles, mais j’ai gagné un pied. Je m’appelle naissain. Mon pied m’aide à me déplacer jusqu’à ce que je trouve un endroit qui me plaît pour me fixer dessus. Il faut que ce soit sur un objet solide, dans l’estran et pas trop loin d’un estuaire. Il faut que l’eau soit salée mais pas trop. Et le mieux, c’est de se fixer sur d’autres huîtres.
J’en ai trouvé d’autres comme moi !
substance qui va me fixer sur une roche où la coquille d’une autre huître.
CHAPITRE 1
Je pense que j’aimerais rester ici. Mon pied s’atrophie et je sécrète une
POÉTIQUE ET LOINTAIN COMME UN PAYSAGE
23
24
Je m’appelle dentelle. Je grandis par « pousse ». C’est la partie de ma coquille en extérieur la plus fine. On peut la comparer avec des anneaux d’un arbre. Je la crée par une sécrétion de cellules de mon manteau intérieur, couche par couche. Attention, c’est la partie de ma coquille qui coupe !
POÉTIQUE ET LOINTAIN COMME UN PAYSAGE
25
Mon intérieur est plus compliqué qu’il n’y parait. Mon manteau est constitué de trois parties avec trois rôles dans ma vie. Comme je l’ai dit, la partie externe sécrète une muqueuse qui crée la coquille. La partie médiane est constituée des cils tactiles et vibratiles qui perçoivent le contenu des éléments qui peuvent être utiles pour la nutrition ou autre. Enfin, la partie interne est constituée des tentacules sensoriels qui règlent le débit de l’entrée d’eau, limitent le passage de l’eau dans la cavité palléale (ma partie centrale) et détectent les éléments hostiles. Mon manteau, de concert avec mon système respiratoire (mes poumons), crée une pompe à eau. Cette pompe crée des courants qui ont plusieurs utilités : ils me permettent de respirer, d’amener la nourriture phytoplantonique jusqu’à ma bouche et d’expulser déchets et sécrétions génitales6. Ceci est fait l’eau par ma simple existence.
6. VIDAL, Huîtres, moules et autres coquillages p. 87
CHAPITRE 1
par une ondulation permanente de l’eau à l’intérieur de l’huître, ce qui fait ma capacité de filtrer
26
Ensemble avec les autres huîtres, nous devenons un banc, lit ou récif d’huîtres. Les plantes autour nous cachent des prédateurs comme l’étoile de mer, ou des oiseaux ou les humains. Nous mangeons les planctons et les convertissons en nutriments pour les plantes. En grand groupe, nous nous protégeons contre la dessiccation, les vagues et les prédateurs. Si nous ne sommes pas sur une côte rocheuse mais sur la vase, notre implantation sur site stabilise les vasières et aide les plantes à prendre racine. D’autres huîtres se construisent en récifs en mer, les unes sur les autres, jusqu’à ce que les plus jeunes puissent être à découvert à marées basse. Ces huîtres en récifs arrivent à même changer les courants de la mer et protéger les côtes contre les ondes de tempêtes7.
7. ORFF, Kate, Toward an Urban Ecology : SCAPE , The Montacelli Press, New York, 2016, p. 92
POÉTIQUE ET LOINTAIN COMME UN PAYSAGE POÉTIQUE ET LOINTAIN COMME UN PAYSAGE
CHAPITRE 1
CHAPITRE 1
27
28
L’habitat de l’huître Scrooge… secret and self-contained and solitary as an oyster 8. — Charles Dickens, « A Christmas Carol », 1843
Contrairement à ce que pensait l’écrivain Charles Dickens, l’huître n’est pas un être solitaire. Au contraire, les huîtres colonisent des endroits caillouteux, en denses assemblages, ou « récifs ». Comme les récifs de corail, les récifs d’huîtres sont des structures tridimensionnelles9. Les huîtres sont parfois appelées « bioingénieurs » parce qu’elles créent leur propre écosystème10. Les lits d’huîtres ou récifs d’huîtres constituent un substrat stable dans un habitat de sédiments mobile et aident la colonisation des invertébrés épibiotiques qui ont besoin des surfaces rugueuses pour s’y attacher et y vivre. Ces nouvelles structures servent aussi de lieu de forage ou d’habitat pour des crustacés et autres poissons11. Dans les vasières, en plus d’avoir une utilité pour d’autres organismes, les bancs d’huîtres et autres bivalves enrichissent le sol et stabilisent le fond, ce qui aide à l’installation des zostères. Quand les bivalves mangent du plancton, ils le déposent sous forme de déchets nutritifs pour les plantes. En
8. 9. 10. 11. 12. 13. 14.
contrepartie, les plantes protègent les huîtres contre les prédateurs12. Autre facteur de regroupement, les huîtres ont besoin de grandes populations pour se reproduire. Leur système de reproduction est lié au fait que les huîtres, d’abord mobiles pendant leur période adolescente, deviennent immobiles et entièrement sédentaires à l’âge adulte. Le succès de leur reproduction dépend ainsi de la proximité de leurs congénères. L’huître plate Ostrea edulis est vivipare. Elle pond entre 500 000 à 1 500 000 œufs par an et les conserve dans sa cavité palléale, entre son manteau et ses branchies. Ensuite, elle attend que les spermatozoïdes en suspension passent à proximité et les absorbe13. En contraste, l’huître creuse Crassostrea gigas est ovipare, elle propulse ses œufs (entre 20 à 100 millions) non fécondés, en même temps que l’huître mâle expulse ses spermatozoïdes. Les œufs et les spermatozoïdes flottent à la surface de l’eau, en créant un nuage laiteux, pendant la période de reproduction entre juillet et août14.
« Scrooge… Secret, et autonome, et solitaire comme une huître » — Charles Dickens, « A Christmas Carol », 1843 LENIHAN H. S., PETERSON C.H., ALLEN J. M., « Does flow also have a direct effect on the growth of active suspension feeders ? An experimental test with oysters » , Limnology and Oceanography, 41(6). 1996 pp.1359-1366, p. 1362 MANN Kenneth H., Ecology of coastal waters with implications for management, Dartmouth Nova Scotia, Wiley- Blackwell, 2000, p. 230 PETERSON Charles H., ESTES James A. , « Conservation and Management of Marine Communites » in BERTNESS Mark D. , GAINES Steven D. , HAY Mark E. (dir.), Marine Community Ecology, Sunderland MA, Sinauer Associates Inc, 2001, 550p., p. 483 BERTNESS Mark D., The Ecology of Atlantic Shorelines, Sunderland MA, Sinauer Associates Inc, 1999 p. 259 VIDAL, Huîtres, moules et autres coquillages p. 70 Ibid., p. 97
L’Homme et l’huître, une longue histoire
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He was a bold man that first ate an oyster 15. — Jonathan Swift, « Polite Conversation », 1731
Quand les humains mangeaient des huîtres, ils laissaient souvent de grands tas de coquilles. Les buttes coquillières d’huîtres se trouvent presque partout où les Hommes ont consommé les huîtres. Ces buttes laissées par les peuples préhistoriques étaient principalement considérées par les archéologues comme de simples déchets. Les chercheurs reconnaissent seulement maintenant qu’il peut s’agir d’œuvres architecturales monumentales qui fournissent des informations essentielles sur les cultures anciennes17. On trouve également ces buttes sur les continents européen et américain. En Corse, on trouve les plus anciens gisements de coquilles d’huîtres de France18, preuve que l’Homme a consommé des huîtres durant l’Antiquité. À SaintMichel-en-l’Herm, se trouvent les plus grands gisements de coquilles,
15. « Le premier à manger une huître était un homme audacieux » — Jonathan Swift 16. MAREAN, C., Bar-Matthews, M., Bernatchez, J., Fisher, E., Goldberg, P., Herries, A., Jacobs, Z., Jerardino, A., Karkanas, P., Minichillo, T., Nilssen, P., Thompson, E., Watts, I. and Williams, H. (2007). Early human use of marine resources and pigment in South Africa during the Middle Pleistocene. Nature, 449(7164), pp.905-908. 17. MALAKOFF, D. (2018). Rethinking Shell Middens. American Archeology, [online] 21(1). Available at : https://www.archaeologicalconservancy.org/rethinking-shell-middens/ [Accessed 21 Apr. 2019]. 18. VERGER Fernand, Zones humides du littoral français : estuaires, deltas, marais et lagunes, Paris, éditions Belin, 2009 29 / 29
POÉTIQUE ET LOINTAIN COMME UN PAYSAGE
peut-être joué un rôle crucial dans la survie de ces premiers Hommes, car ils ont élargi leur domaine vital afin d’inclure les côtes et ont suivi la position changeante de la côte lorsque le niveau de la mer fluctuait16.
CHAPITRE 1
Les huîtres et l’Homme ont une longue histoire. En 2007, une équipe de scientifiques en Afrique du Sud ont trouvé la plus ancienne trace de la consommation de coquillages par l’Homme. Depuis 1991, Curtis Marean, archéologue à l’Arizona State University à Tempe, étudie les premiers Hommes modernes en Afrique du Sud. Sur la base des archives paléoclimatiques, dit-il, seule une poignée d’endroits sur le continent africain aurait pu permettre la survie des populations humaines pendant le maximum glaciaire atteint entre 195 000 et 130 000 ans. Un refuge potentiel se trouvait le long de la côte Sud de l’Afrique, où les courants océaniques auraient maintenu des températures plus chaudes et créé des conditions propices à une nourriture abondante sur terre et en mer. Son équipe a montré qu’il y a environ 164 000 ans (± 12 000 ans) à Pinnacle Point (sur la côte sud de l’Afrique du Sud), les humains ont élargi leur régime alimentaire pour inclure les ressources marines, potentiellement en réponse aux conditions environnementales difficiles. Les mollusques et crustacés ont
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FIGURE 9 : UNE CARTOGRAPHIE DES BUTTES COQUILLIÈRES EN FRANCE
CHAPITRE 1
POÉTIQUE ET LOINTAIN COMME UN PAYSAGE
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principalement ceux de l’Ostrea edulis — l’huître plate. Ces gisements sont constitués de trois buttes, qui font chacune plusieurs mètres de hauteur, une douzaines de mètres de large et une centaine de mètres de long. La plus grande a un volume estimé entre 200 000 m3 et 600 000 m3, soit entre 2 et 6 milliards d’huîtres. Ces structures construites entièrement par l’empilement de coquilles d’huîtres vides, datant du xie siècle et où les archéologues ont conclu à une intense pêche des huîtres par l’abbaye de SaintMichel-en-l’Herm, où elles étaient écaillées et exportées, soit salées soit en saumure. Aujourd’hui, les buttes de Saint-Michel-en-l’Herm ont diminué
du fait de leur exploitation pour faire de la chaux. À Beauvois-sur-Mer, on trouve encore un gisement de coquilles d’huîtres, cette fois-ci, d’une hauteur de 2 m, d’une largeur qui atteint 30 m et d’une longueur de plusieurs centaines de mètres, aussi situé en proximité d’un monastère19. Selon l’historien Mark Kurlansky, à propos de New York, « the most common marker of pre-european settlement anywhere in the area of the mouth of the Hudson are these piles of oyster shells, sometimes as much as four feet deep, sometimes buried in the ground, sometimes piled high20 ». Les Lenapes, la tribu indigène de l’île de Manhattan consommaient de
FIGURE 10 DESSIN DES BUTTES D’APRÈS AUGUSTE RIVIÈRE (1838), EXTRAIT DU DICTIONNAIRE PITTORESQUE D’HISTOIRE NATURELLE (CLICHÉ BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DE FRANCE.
19. Ibid., p. 100 20. “Les buttes coquillières, parfois jusqu’à quatre pieds de profondeur, parfois enfouis dans le sol, parfois empilées en hauteur, sont le repère le plus courant d’un établissement préeuropéen situé dans la région de l’embouchure de l’Hudson”
vastes quantités d’huîtres et ont donc laissé des buttes coquillières partout sur l’île. Lorsque les hollandais sont arrivés au xviie siècle, la présence de ces buttes a inspiré le nom de certaines rues, telle que Pearl Street. Les colons européens prenaient les coquilles et les mettaient dans le sol afin de neutraliser les sols acides pour les cultures. Ils ont également brûlé ces coquilles pour produire de la chaux servant à la construction
de la ville21. Les huîtres ont donc quitté la mer pour faire partie du paysage terrestre, en forme de buttes géantes, mélangées à la terre, ou dans les murs des villes. Animal étrange et méconnu, l’huître a pourtant accompagné l’Homme et imprégné son imaginaire depuis des dizaines de milliers d’années pour divers usages et sous différentes formes.
21. KURLANSKY, The Big Oyster : A molluscular history of New York, p. 11
CHAPITRE 1
FIGURE 11 BUTTE COQUILLIÈRE À NEW YORK, DÉBUT XXÈ SIÈCLE
POÉTIQUE ET LOINTAIN COMME UN PAYSAGE
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de la naissance, de la sensualité. Peuvent-t’elles devenir symbole du littoral ?
comment les vaches normandes donnent l’image des bocages. Les huîtres, symbole de la femme,
Tout comme les cyprès d’Italie sont l’image de la Toscane, la lavande l’image de la Provence ou encore,
L'huître fait l'objet de constructions dans notre imaginaire et pourrait être emblématique des paysages.
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CHAPITRE 1
POÉTIQUE ET LOINTAIN COMME UN PAYSAGE
FIGURE 12 SANS TITRE, SUZANNE KATZ, EMBOUCHURE DU CHENAL D’ARCEAU, ÎLE D’OLÉRON
36 FIGURE 13 L’OSTRÉICULTURE À MARENNESOLÉRON SUR L’ESTRAN ET EN MARAIS
CHAPITRE 2 L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
37
globale. ” —Pascale Legué-Dupont, La moisson des marins-paysans
et de commercialisation imposent des rythmes de travail particuliers souvent en décalage par rapport à ceux de la société
puisque l’essentiel des temps de travail se calque sur le rythme lunaire et que les calendriers des activités de production
et culturelles qui le distinguent pareillement du monde de la terre et celui de la mer. Marginalité temporelle ensuite,
certaine marginalité. Marginalité spatiale d’abord, car cet univers mi-aquatique, mi-terrien recèle des valeurs culturales
elle une vague impression d’archaïsme. Cette méconnaissance tient en partie au fait que le métier s’inscrit dans une
l’ensemble des Français, l’ostréiculture véhicule peu de représentations auprès du grand public ; tout au plus laisse-t-
« Alors l’agriculture, l’horticulture ou la viticulture suscitent un certain nombre d’images et de connaissance dans
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CHAPITRE 2
L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
FIGURE 14 a. FASCINE DES HUÎTRIÈRES DE SAINT-BRIEUC ; b. RAMEAU D’UNE FASCINE (COSTE, 1861)
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Création d’une « culture » sainteongeaise et « un métier passionnant pour les hommes passionnés » Au début de l’ostréiculture, au milieu du xixe siècle, sa pratique se limitait à l’estran, cette limite fluctuante entre terre et mer à laquelle on accède au gré des marées. Avec l’évolution de l’industrie, par la mécanisation et la spécialisation des tâches, et en grande partie par l’appropriation des marais salants déjà existants, l’ostréiculture de Marennes-Oléron s’assoit aujourd’hui sur deux paysages opposés : la terre et la mer, le marais et l’estran, la douceur et la violence. Cette division de l’espace par la production ostréicole se prolonge même dans les rôles attribués à chaque sexe. Les femmes dans les terres, les hommes dans la mer. L’industrie ostréicole a commencé à la fin du xviiie siècle en France1 dans la Mer du Nord, la Méditerranée, et sur la Côte Atlantique2. Aujourd’hui, selon le Comité National de la Conchyliculture, « l’ostréiculture, avec près de 2654 entreprises, produit 130 000 tonnes d’huîtres en moyenne. Ce volume représente un chiffre d’affaires estimé à 630 millions d’euros »3. Elle représente donc un poids économique important en France.
1. 2. 3. 4. 5.
L’histoire ostréicole de MarennesOléron, et de la France de manière plus générale, peut être considérée comme une histoire en trois phases, ou, plus explicitement, la succession de trois huîtres : l’huître plate, l’huître portugaise et l’huître japonaise. Chaque espèce a emmené avec elle des changements dans la manière de cultiver l’huître, ainsi que dans la manière de construire le paysage. Jusqu’au milieu du xixe siècle, l’activité ostréicole de manière générale consiste en une activité de cueillette. Les huîtres sont draguées ou pêchées à pied4. Ce n’est que lorsque de fortes pressions sur les récifs et bancs d’huîtres naturels ont engendré un affaiblissement de la population d’huîtres jusqu’à son épuisement, voire la disparition de la ressource dans le Bassin d’Arcachon, en Bretagne et ainsi que sur les côtes saintongeaises (Île d’Oléron incluse) entre 1880 et 1882, qu’est née l’industrie ostréicole « l’ostréiculture »5. L’empereur Napoléon iii a chargé Victor Coste, un naturaliste, de la création d’un plan national de sauvegarde des gisements naturels et l’établissement de
SIMON-GOULLETQUER Catherine, Femme de la côte, La Crèche, Geste éditions, 2000, p. 32 huîtres.com http://www.cnc-france.com/Les-statistiques.aspx LEGUÉ DUPONT, Pascale, et Jean Prou. « L’Huître, un coquillage nomade sans tête ni jambe mais avec un pied. » Techniques & Culture, no. 59, 2012, pp. 284–305., doi :10.4000/tc.6717 LEGUÉ DUPONT Pascale, La moisson des marins-paysans, Paris, Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, Institut National de la Recherche Agronomique, 2004, p.153
la culture d’huîtres en France. Il testa et améliora un système de « captage » artificiel, déjà en utilisation par l’inspecteur de la Marine de Bon depuis les années 1850. Cette technique sert de base à l’ostréiculture telle que nous la connaissons aujourd’hui. Son principe est relativement simple. On met un objet rigide dans de l’eau, qui deviendra ensuite support pour les jeunes naissains au moment de la ponte. Les jeunes huîtres vont se fixer dessus et les ostréiculteurs les récoltent pour ensuite les élever en mer. Le « captage de naissains » prend plusieurs formes différentes, selon l’endroit de culture ou les matières premières disponibles6. Victor Coste proposa également de créer des
zones spécifiques pour la collecte de larves à Arcachon, Saint-Brieuc, le Pertuis Charentais et en Méditerranée7. Certains ostréiculteurs charentais, notamment ceux de la rive gauche de la Seudre, préféraient la plus ancienne technique, consistant à récolter les petites huîtres dans les bancs naturels restant au nord du bassin MarennesOléron ou même à l’extérieur, voire même en Bretagne, et les cultiver ensuite dans leur territoire. Arriveront par la suite, des capteurs de naissains, après l’épisode de l’épizootie (première grande crise dans le marché de l’huître) afin de cultiver d’abord l’huître plate, puis l’huître portugaise et enfin l’huître japonaise8.
FIGURE 15 PÊCHEUSE D’HUÎTRES - ILE D’OLÉRON : [CARTE POSTALE],
L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
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6. SIMON-GOUMMETQUER p.58 / LEGUE DUPONT p. 58 / Legue dupont huître coquillage nomade p. 10 / La moisson marins paysans, p. 155. 7. LEGUE DUPONT, La moisson marins paysans, p. 155. 8. SIMON-GOULLETQUER p. 58
CHAPITRE 2
FIGURE 16 TRIEUSES D’HUÎTRES - CHÂTEAU D’OLÉRON : [CARTE POSTALE]
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La première fois que je suis allée sur l’Île d’Oléron, mes beaux-parents m’ont amenée voir le village ostréicole de La Baudissière. C’est « un truc à faire » sur l’île. Ces « villages ostréicoles » ne sont pas des vrais villages avec des habitants ou un square ou une petite église. Ce sont des alignements de cabanes ostréicoles dans les marais le long des chenaux qui débouchent dans l’estuaire. Ils sont entouré d’étangs appelés « claires ». Mais l’attraction principale est une ligne d’une douzaine de cabanes en bois, peintes de couleurs variées, parfois tapageuses. La plupart des cabanes ne sont plus occupées par des ostréiculteurs mais par des artisans, graphistes, peintres, sculpteurs. Les cabanes sont au bord d’une route étroite avec quelques places de stationnements. Les touristes, comme nous, descendent de leur voiture et suivant l’alignement des cabanes, ils entrent dans chacune d’entre elles. Le tout ne prend même pas trente minutes, puis ils remontent dans leur voiture et partent pour d’autres endroits de l’île. Cette scène se répète souvent dans le bassin Marennes-Oléron, là où il y a les claires, à la Baudissière, Château d’Oléron, La Tremblade, etc. On est frappé par la déconnexion perçue entre le village ostréicole en tant qu’attraction et son environnement. Les cabanes sont un emblème historique de l’ostréiculture. Toutefois, ce n’est pas leur emplacement au cœur de la mosaïque des claires dans les marais qui attire le chaland, mais les couleurs vives et leur nouvelle fonction
9. Communication personnelle, J.P.D., 14.03.2019
d’atelier-magasin. En l’absence de relief spectaculaire, comme des montagnes ou des falaises, il est courant d’entendre qu’il « n’y a pas de paysage ». Les marais du bassin Marennes-Oléron, ne sont pas exempts de ce manque de considération. À l’âge d’Instagram et de la démocratisation de la photographie, preuve en est que les photos les plus populaires de la région sont des vues aériennes. Un responsable du Syndicat Mixte d’Accompagnement
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Pour Pascale Legué-Dupont, c’est un paysage avec une autre temporalité. Pour le comprendre et pour l’apprécier, il faut y passer du temps. Il faut voir comment la lumière se déplace dans les bassins, comment le vent traverse l’horizon. Il faut marcher lentement pour comprendre le jeu d’apparition et de
disparition des claires selon le point de vue. Cette errance peut être désorientante, jusqu’à la réapparition d’un chenal qui nous guide jusqu’à l’estran. L’estran avec l’eau qui se retire jusqu’à la limite de l’horizon. Quand l’eau se retire, on peut voir les poches d’huîtres sur tables, au loin avec leurs balises. C’est un ballet entre le vent, la lumière, et les rythmes concurrents des marées. Quand la marée remonte, tout en douceur, on aperçoit seulement les fines branches des balises qui ponctuent l’horizon, seules dans la mer.
CHAPITRE 2
du sage Seudre m’a confié que, lorsqu’il conduit des visites des claires, il n’est pas rare d’entendre les visiteurs dire qu’« il n’y a rien ici ». Il doit leur montrer les vues du ciel afin de faire comprendre que « Ben, si ! Je vous assure, c’est hyper compliqué »9.
L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
FIGURE 17 LE CHENAL D’ARCEAU ET L’HORIZON, SUZANNE KATZ, 13 MAR. 2019
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FIGURE 19 MARÉE BASSE À LA VASIÈRE, SUZANNE KATZ, 13 MAR. 2019
CHAPITRE 2
FIGURE 18 MARÉE HAUTE AU PARCS À HUITRES, SUZANNE KATZ, 13 MAR. 2019
L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
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« Les ostréiculteurs sont comme leurs huîtres »
J’ai en l’opportunité de m’entretenir avec Michel Parent, ancien ostréiculteur et actuel maire de Château d’Oléron. Pour Monsieur Parent, le marais est un lieu de douceur. « Vous avez ce contraste entre la mer et les établissements ostréicoles qui sont brutaux mais forts et le marais qui est beaucoup plus doux et beaucoup plus nuancé. » Les ostréiculteurs avec qui j’ai pu discuter ont insisté sur leur relation intime avec la nature. Pour eux, le travail ostréicole est une liberté. C’est le plein air et le lever du soleil sur la marée basse. C’est marcher à pied dans la vase. Avoir les mains dans l’eau et le vent au visage. Pour l’affinage et la production dans les claires, l’ostréiculture veut dire être debout toute la journée, été comme hiver dans les cabanes en bois, sans chauffage, souvent
FIGURE 20 UN HANGAR OSTRÉICOLE DANS LA PERSPECTIVE DES CLAIRES, SUZANNE KATZ, 13 MAR. 2019
sans électricité et, pendant les grands marées, avec les pieds dans l’eau. Monsieur Parent affirme qu’anciennement le travail d’un ostréiculteur était divisé entre les « producteurs » — ceux qui élèvent les huîtres en mer — , et les « affineurs » — ceux qui les affinent en claires. Mais qu’aujourd’hui, ces distinctions n’existent plus. Les producteurs et les affineurs sont aujourd’hui souvent les même entreprises. Madame Alice Pauwels, ancienne ostréicultrice et actuelle directrice de la Cité de l’Huître à La Tremblade m’a expliqué la quantité de travail nécessaire à l’entretien des claires. Les ostréiculteurs doivent enlever les algues dans les claires à la force des bras. Il faut draguer
Les anciennes claires ont été creusées à la main. Aujourd’hui, elles sont creusées à la pelleteuse. Certaines ont subi un remembrement. Plusieurs petites claires ont été rassemblée en retirant les bords qui les séparaient afin de gagner en surface et en volume d’eau10.
FIGURE 21 DES HUÎTRES DANS LEURS PANIERS, SUBMERGÉES DANS UNE CLAIRE, ÎLE D’OLÉRON. SUZANNE KATZ. 13 MAR. 2019
10. Communication personnelle, A.P. 12.03.2019
CHAPITRE 2
la vase régulièrement et la remettre sur le bord. Les claires d’affinage donnent une saveur particulière aux huîtres, mais il faut savoir les travailler. Quand on reprend un marais, la première année, « vous faites n’importe quoi parce que vous connaissez pas votre marais ». Une claire peut bien réagir et aider à produire une huître avec du goût et la chair, et celle d’à coté ne permettra pas un bon affinage. C’est un travail où il faut bien connaitre son marais.
L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
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Mouton de la mer
FIGURE 22 UN CAPTEUR DE NAISSAINS, SUZANNE KATZ
La vie d’une huître domestiquée, de son captage à la vente.
Le cycle de production moderne, en France et aux États-Unis est similaire au début puis diffère en fin de cycle. Il débute par le captage du naissain ou bien l’achat des naissains produits par les écloseries entre juillet et août. Les naissains captés sont détroqués (séparés du collecteur), calibrés et mis en poche : entre 400 et 450 huîtres juvéniles par poche. Une alternative à la mise en poche est la culture dans les parcs à plat, qui consiste à semer les naissains directement dans la vasières de petits parcs bordurés. Cette pratique est progressivement tombée en désuétude parce qu’elle nécessite plus de surveillance face aux prédateurs et au vol et rendait plus difficile le travail de collecte et de nettoyage. Elle a été définitivement abandonnée suite à la tempête de décembre 1999.
FIGURE 23 DES POCHES À HUÎTRES, SUZANNE KATZ
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L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
FIGURE 24 PARC À PLAT, SUZANNE KATZ
À partir de 18 mois, les huîtres sont séparées au cours du démaillage entre avril et juin ou juillet et août, à nouveau calibrées et remises en poche, puis redéposées sur tables en mer. Il est réalisé un nouveau démaillage et calibrage des huîtres à 26 mois avec une nouvelle
mise en poche, cette fois-ci avec entre 150 et 200 individus par poche. Les poches doivent être retournées régulièrement, tous les mois en moyenne, pour retravailler la forme et réduire les effets d’encrassement par les algues ou les sédiments.
CHAPITRE 2
FIGURE 25 PARC SUR TABLES, SUZANNE KATZ
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FIGURE 26 UNE HUITRE FINE DE CLAIRES AVEC LA NAVICULE BLEU , SUZANNE KATZ
Alors qu’ailleurs elles finissent leur croissance en mer, dans le bassin Marennes-Oléron, les huîtres sont ensuite placées dans les « claires », les anciens marais salants transformés pour l’ostréiculture en fin du xviiie siècle. Ce temps passé dans les claires les transforme en huîtres fines de claires, en addition du goût, elles obtiennent une particularité unique au monde. Si l’ostréiculteur a un peu de chance, ses claires sont habitées par une algue qui s’appelle la navicule bleue. Cette algue vit avec les huîtres en symbiose et rend leurs poumons vert foncé.
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11. VIDAL, Huîtres, moules et autres coquillages p. 137
CHAPITRE 2
FIGURE 27 UNE CABANE OSTRÉICOLE À LA BAUDISSIÈRE AVEC UNE EMPLACEMENT STRATÉGIQUE ENTRE CLAIRES ET CHENAL, SUZANNE KATZ
L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
Après l’affinage, les huîtres passent dans une période de purification en bassin de décantation. Il est ensuite réalisé le « trompage », qui consiste à remonter progressivement les huîtres vers la surface du bassin afin de les habituer à maintenir leur coquille fermée. Ce travail est conclu par le conditionnement et la commercialisation de l’huître11.
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L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
FIGURE 28 EXTRAIT DE LA CARTE D’ÉTAT MAJOR, 1820- 1866
CHAPITRE 2
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Une appropriation d’un paysage anthropique « Au 16e siècle, cet endroit, fourmillait d’activité toute la journée. Il y avait tout le temps, plein de monde. Aujourd’hui, il n’y a plus personne. C’est délaissé, c’est tranquille. Pour observer des oiseaux, c’est génial. C’est amusant comme fait de société : la richesse de la Saintonge est liée à ce marais salé… Intiment liée. » — Responsable du syndicat mixte SmaSS
Les marais salés12 concédés aux abbayes et aux seigneuries furent, à partir du xe siècle, transformés en marais salants et servirent jusqu’à la fin du xixe siècle voire, à certains endroits, jusqu’au xxe siècle pour la production de sel. Les exigences techniques et hydrauliques ont donné au marais salant sa configuration. Les marais salants ont assuré la richesse de la région jusqu’au xviie siècle. La lourdeur des impôts, la création d’usines salines au sud de la France, le
retrait de la mer et le manque d’entretien des voies navigables, en lien avec à une économie difficile, ont conduit l’industrie des marais salants à son déclin. Une reconversion totale a été achevée à la fin du xixe siècle. Les salines ont été transformées en marais de clairière13. Le marais est donc composé de deux types de claires : les sartières qui, sauf en Seudre, sont sur le domaine maritime public et les claires construites dans le marais qui font partie de la propriété privée14.
FIGURE 29 a., BLOC DIAGRAMME DES SALINES b., BLOC DIAGRAMME DES CLAIRES OSTRÉICOLES ET L’ESTRAN, SUZANNE KATZ
12. Les marais salants ou salins correspondent à des installations d’origine anthropique dont le but est de favoriser l’extraction et la collecte de sel marin à partir de l’entrée d’une ressource, l’eau de mer 13. 76. CASSEN, Serge, DE LABRIFFE, Pierre Arnaud, MENANTEAU, Loïc, « Le sel chauffé des baies marines en Armorique-Sud durant les Ve et IVe millénaires av. J.-C. : à la recherche (ouest-européenne) de croyances et de faits techniques », dans HOCQUET, Jean-Claude, et SARRAZIN, Jean-Luc, Le Sel de la Baie…, op. cit., p. 33-54. 14. LEGUÉ DUPONT, La moisson des marins paysans p. 24
L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
b.
CHAPITRE 2
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a.
56
Les outils de travail ostréicole Moyens nautiques :
machine à rabble
chaland
manne en fil de fer
lasse
patin
chalut
pelle
Instruments
pelle-fourche
ostréicoles pour : Travaux sur les parcs Balise Bique cercle collecteur combinaison commode cuissardes fourche gratte à collecteur gratte pour table herse laveur lieur (zigzornif)
piochon petit râteau pique-roque poche pointu rabale en bois rabale en metal râteau table (berceau) Travaux dans les claires boguet à douer brouette à piquer commode cuissardes essarteuse
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ferrée
cageot
luet
calibreuse
machine à rabaler
cercleuse/ficeleuse
manne
démanchoire
manne en fil de fer panier de fer à anse de bois patin pelle pelle-fourche petit râteau petite pelle-boguet rabale en bois trulle Travaux à la cabanes aérateur balance
futaine gant de cautchouc hacheau jet de forte pression laveur automatique lieur (zigzornif) manitout manne de plastique manne en fil de fer pelle-fourche
L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
de plastique
perceuse automatique pique-coque tapis roulant trieuse automatique
bique
brouette
CHAPITRE 2
bourre
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Écluses Les écluses à poissons sont des pêcheries de pierres aménagées sur l’estran depuis des milliers d’années. Sur l’Île d’Oléron, les écluses se trouvent sur la côte rocheuse au nord et à l’ouest. À marée haute, des écluses sont entièrement recouvertes. Les « bouchots », ouvertures dans la construction avec des grilles, sont fermées à marée descendante et permettent à l’eau de quitter les écluses. Le poisson se trouve alors piégé à l’intérieur de ce demi-cercle construit en pierre, sans liant. C’était la colonisation de ces structures par des coquillages (notamment les huîtres indigènes) qui les aidait à survivre aux assauts de la mer. Les côtes rocheuses de l’Île d’Oléron étaient le premier lieu de la pêche aux huîtres plates à Marennes-Oléron15. Aujourd’hui, il ne reste plus que 17 écluses en état sur toute l’Île d’Oléron contre jusque 237 au milieu du xixe siècle16. Ces murs peuvent mesurer entre 500 et 700 m de long. Ils fonctionnaient non seulement
comme ressource de la pêche, mais aussi de brise lames, en atténuant l’érosion marine sur les falaises et sur les plages17. FIGURE 30 UNE ÉCLUSE AU NORD DE L’ÎLE D’OLÉRON, SUZANNE KATZ
15. Visite du Site Ostréicole du Fort Royer 16. http://www.saintdenisoleron.fr/decouvrir/le-petit-train-de-chassiron/ 17. Musée de chassiron, Île d’Oléron, exposition permanente, 11 mars 2019
L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
FIGURE 32 LES BOUCHOTS DES ÉCLUSES, ROMAIN BOIDIN
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CHAPITRE 2
FIGURE 31 LES ÉCLUSES, LA ROCHE, LA MER, SUZANNE KATZ
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La bélon L’Ostrea edulis, l’huître indigène des côtes françaises n’est quasiment plus élevée en France. Pourtant, elles est à l’origine de l’ostréiculture. Aussi connu par le nom huître plate, Ostrea edulis est vivipare. Ceci signifie qu’elle pond et conserve dans sa cavité palléale les 500 000 à 1 500 000 œufs par an, entre son manteau et les branchies. Ensuite, elle attend que les spermatozoïdes
en suspension passent à proximité et les absorbe18. L’ostrea edulis, l’huître indigène de la côte Atlantique était cultivée à Marennes-Oléron entre les années 1880 jusqu’à 1920-1922 quand l’arrivée de l’épizootie de plate à décimé la population19.
FIGURE 33 OSTREA EDULIS
18. VIDAL, Huîtres, moules et autres coquillages p. 70 19. Ibid., p.80
La portugaise
FIGURE 34 CRASSOSTREA ANGULATA
20. SIMON-GOULLETQUER, Femme de la côte, p. 56 21. Musée d’Oléron 22. VIDAL, Huîtres, moules et autres coquillages p. 82
L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
l’estuaire de la Gironde, la population saintongeaise pêchait l’huître portugaise Crassostrea angulata des gisements naturels de l’estuaire de la Gironde et de la Charente. Progressivement le captage et la culture de l’huître creuse se développèrent. Après la décimation de la population des huîtres plates, les huîtres portugaises les ont remplacées. Dans les années 1960, une nouvelle épidémie a décimé Crassostrea angulata, qui a été remplacée en culture par Crassostrea gigas en 196622.
CHAPITRE 2
Ostrea edulis a alors été remplacée par l’huître portugaise, Crassostrea angulata20. L’huître Portuguese Crassostrea angulata était arrivée bien plus tôt que 1922. Elle est arrivée par accident via un navire portugais qui avait rejeté en mer une partie de son cargo d’huîtres portugaises alors qu’il était amarré devant le fort du Château d’Oléron en 1865. Certaines survivantes sont tombées dans l’estran suffisamment proche de la côte pour s’y installer21. Leur coquilles creuses, en contraste avec la Bélon (l’huître plate) leur permet de vivre dans la vasière sans être étouffées. Ainsi, vingt ans après son implantation dans
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La japonaise Aujourd’hui, 98 % des huîtres cultivées en France sont des huîtres japonaises, Crassostrea gigas, et la différentiation entre les huîtres vendues se passe par le « merroir » ou terroir de la mer. Elles sont, aujourd’hui, l’espèce la plus cultivée au monde. L’huître creuse Crassostrea gigas est ovipare, elle propulse ses œufs (entre 20 à 100 millions) non fécondés, en même temps que l’huître mâle expulse ses spermatozoïdes. Les œufs et les spermatozoïdes flottent à la surface de l’eau, en créant
FIGURE 35 CRASSOSTREA GIGAS
23. VIDAL, Huîtres, moules et autres coquillages p. 97 24. BERTNESS, The Ecology of Atlantic Shorelines, p. 243
un nuage laiteux, pendant la période de reproduction entre juillet et août23. Elle fait face à des mortalités estivales significatives. Plus de la moitié des naissains peuvent mourir chaque année. Les ostréiculteurs visent donc une production de plus en plus grande pour absorber l’effet économique de ces maladies. La surexploitation, la pollution et l’introduction d’espèces sont les problèmes de conservation les plus pressants auxquels sont confrontées les communautés littorales contemporaines24.
Un estuaire fantôme
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CHAPITRE 2
L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
FIGURE 36 LES MARAIS DE CHARENTE-MARITIME
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Le bassin ostréicole de MarennesOléron dépend principalement de la Seudre pour son alimentation en eau douce et en sédiments. Aujourd’hui, en raison de la multitude des prélèvements d’eau douce sur le bassin versant, la Seudre est un des fleuves les plus déficitaires de France, à tel point que ce fleuve est devenu un bras de mer. Le bouleversement du régime hydrologique de la Seudre a causé une perte de la biodiversité. L’objectif du syndicat mixte est de résoudre ce déficit chronique en eau douce avant de pouvoir effectuer toute autre action. Comment en est-on arrivé à ce point ? Deux tiers du lit majeur de la Seudre étaient une tourbière avec une écoulement diffus de l’eau. Au fil des siècles, dès l’antiquité, à l’époque romaine, le fleuve a été progressivement canalisé afin de faire fonctionner des moulins. Le nombre de moulins a augmenté, des biefs et des prairies permanentes ont été créés. Dans les années 1970, le gouvernement a payé des agriculteurs pour drainer et cultiver le lit majeur. Contrairement aux prairies qui tolèrent les submersions qui arrivaient parfois jusqu’en juin, les cultures n’aiment pas avoir leur racines dans l’eau. Dès le mois de mars, les champs situés dans le lit du fleuve doivent donc être drainés. Autrefois, les tourbières et prairies humides emmagasinaient l’eau pendant l’hiver et printemps. Quand
la ligne d’eau était supérieure à un certain niveau, elle alimentait le fleuve. Aujourd’hui, l’accumulation des actions hydrologiques (constructions des barrages, drainage des zones humides, canalisation des cours d’eau etc.) ont asséché les terres ont dégradé la fonctionnement du soutien d’étiage25. Ceci à été le premier point de dégradation physique du bassin versant. Deuxièmement, le bassin versant de la Seudre se trouve sur un socle calcaire karstique. La roche laisse l’eau s’infiltrer et crée des vastes nappes phréatiques. En pensant que les nappes phréatiques étant une ressource en eau inépuisable, plus de 500 points de prélèvement d’eau pour l’irrigation furent construit pour irriguer les cultures sur ce bassin versant mineur. Par ailleurs, sur un bassin versant typique, l’eau de pluie ruisselle puis arrive dans les fossés et dans les cours d’eau, ou il neige et la neige fond, et l’eau arrive dans les cours d’eau. Les cours d’eau se rassemblent et éventuellement un fleuve se jette dans l’océan. La Seudre possède un fonctionnement un peu différent. Il pleut, l’eau s’infiltre dans le calcaire. Quand les nappes phréatiques débordent, elles affleurent dans les marais et l’eau coule vers la Seudre. La Seudre coule jusqu’à la mer. Après tous ces aménagements, et surtout ceux du xxe siècle, le soutien d’étiage ne fonctionne plus. Il n’a plus la capacité à soutenir les débits faibles et les taux de basses eaux. Les 500 points
25. Soutien d’étiage : action d’augmenter le débit d’un cours d’eau en période d’étiage à partir d’un ouvrage hydraulique (barrage réservoir ou transfert par gravité ou par pompage…)
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de prélèvement en eau abaissent le niveau de la nappe phréatique à tel point que l’eau n’affleure plus dans les marais en amont et quand il fait très chaud en été, la Seudre s’assèche.
FIGURE 37 LES ZOSTÈRES, LES NUAGES ET LA VASE, SUZANNE KATZ, 13.03.2019
26. Communication personnelle, J.P.D., 14.03.2019
CHAPITRE 2
L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
Pour l’ostréiculture, ceci se traduit par un déficit en naissains. Alors que
dans les années 1970-80, les ostréiculteurs du bassins produisaient suffisamment de naissains pour en exporter, ils se retrouvent aujourd’hui contraints d’acheter des naissains produits par des écloseries pour maintenir leur exploitation26.
de l’environnement mettent en danger l’équilibre trouvé entre l’Homme, l’huître et le littoral.
paysage ostréicole à travers les deux derniers siècles. Aujourd’hui, des dynamiques de dégradation
humaine. La construction d’une culture s’est faite en même temps et avec la construction d’un
Le territoire de Marennes-Oléron est complexe, façonné par des centaines d’années d’activité
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CHAPITRE 2
L’HOMME ET L’ESTRAN, CULTURE À MARENNES-OLÉRON
FIGURE 38 LE PERTUIS CHARENTAIS ET LE PONT DE L’ILE D’OLÉRON, SUZANNE KATZ 2019
CHAPITRE 3 NUL PART RESTE QUELQUE PART : DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY
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une autre façon de faire un paysage ostréicole et ses enjeux.
pays natal avec des parallèles et divergences marquants. Un regard sur
L’ostréiculture sous d’autres horizons. Un retour sur une partie de mon
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FIGURE 39 OÙ SE TROUVE WILLAPA BAY ?
CHAPITRE 3
NUL PART RESTE QUELQUE PART : DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY
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FIGURE 40 LES MONTAGNES ET LA MER, WILLAPA BAY, ROMAIN BOIDIN 2017
CHAPITRE 3
NUL PART RESTE QUELQUE PART : DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY
en premiers, les traces qui en furent laissées, et comment ces traces se dévoilent dans le paysage).
Redécouvrons l’huître. D’abord par le fantasme, ensuite par la vie d’une huître et finalement par résumé une résumé de l’histoire des huîtres et de l’homme (les lieux où les hommes mangeaient les huîtres
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Un autre estuaire fantôme L’histoire géologique et géographique de Willapa Bay. Où elle se trouve, comment elle a été créée.
Willapa Bay et ses alentours se trouvent dans le Sud-Ouest de l’État de Washington, un lieu extrêmement rural, loin des grands pôles de population dans la région du Nord-Ouest des États-Unis : Seattle, Washington et Portland, Oregon. On y arrive par la route 101 qui longe la côte Ouest des États-Unis depuis le Canada jusqu’au Mexique. Malgré le fait que Willapa Bay produise 25 % des huîtres américaines, c’est un lieu qui reste largement inconnu du public. Entouré par les montagnes de la Coastal Range, avec de vastes milieux humides au pied des côteaux, Willapa Bay semble comme
un lieux tout droit sorti d’un rêve, ou en tous cas du mien. En 2017, la population totale du comté de Pacific (celui qui contient Willapa Bay et ses alentours proches) était de 21 626 habitants, soit une densité de 8 hab./km2 1. Sa population est constituée par la tribu des Chinook dans le Shoal Water Bay Reserve, des ostréiculteurs, pêcheurs et bûcherons2. Les collines autour Willapa s’élèvent à 1000 m au-dessus du niveau de la mer et font partie de la chaîne côtière. Elles s’étendent jusqu’au pied des Olympic Mountains au Nord et le fleuve Columbia au Sud. La province des Willapa Hills comprend
FIGURE 41 BLOC DIAGRAMME DE WILLAPA BAY, TAU RHO ALPHA POUR L’UNITED STATES GEOLOGICAL SURVEY, 1978
1. http://www.co.pacific.wa.us 2. Ibid. 3. https://www.dnr.wa.gov/programs-and-services/geology/explore-popular-geology/geologic-provinces- washington/willapa-hills#geology.1 4. WILSON, Dick. 2001. Made for Each Other : Oysters and Willapa Bay. Chinook Observer, 28 November : C2.
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FIGURE 42 CARTE DE SITUATION DE WILLAPA BAY
NUL PART RESTE QUELQUE PART : DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY
La province des collines Willapa témoigne de plusieurs événements majeurs : l’accumulation d’une couche épaisse de basalte océanique dans l’ouest de l’Amérique du Nord, un épisode prolongé de crue de basalte, et des inondations catastrophiques à répétition causées par la fonte de l’irlandais de la Cordillère qui recouvrait l’État de Washington pendant les périodes glaciaires du Quaternaire. Ces inondation
ont creusé la vallée du fleuve Columbia. L’embouchure du fleuve se trouvait alors à Willapa Bay. L’accumulation de sédiments a fini par créer une barre de sable qui a séparé cette baie de l’estuaire du fleuve Columbia dont l’embouchure se trouve aujourd’hui au sud, à Astoria3. Pendant la marée basse, l’eau se retire de la moitié de la baie, en dévoilant une vaste vasière de plus que 16 000 ha, l’habitat idéal pour les huîtres indigènes Ostrea lurida. 4
CHAPITRE 3
les Black Hills, les Doty Hills et les larges vallées adjacentes s’ouvrant sur l’océan Pacifique.
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FIGURE 43 LES MOUVEMENTS GLACIALES QUI ONT FORMÉ LE TERRITOIRE
CHAPITRE 3
NUL PART RESTE QUELQUE PART : DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY
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Une ruée vers l’or et l’appropriation des terres amérindiennes L’ostréiculture à Willapa Bay a une histoire parallèle à celle de Marennes-Oléron et la richesse des huîtres à été utilisé comme excuse pour l’appropriation des territoires amérindiens par les colons américains. FIGURE 44 UN TERRITOIRE COMPLEXE PRÉ-COLONIALISATION, AVEC DES LIMITES EN MOUVEMENT ET SUPERPOSÉES ENTRE LES TRIBUS
Si l’histoire de l’ostréiculture dans le bassin Marennes-Oléron a commencé à la fin du xixe siècle, l’histoire de l’ostréiculture dans l’État de Washington est aussi longue, rapporte Jim Camden, un journaliste local : « In 1851 — long before the Palouse hills were planted
with wheat or the Okanogan Valley with apples — Washington oysters were harvested and shipped off to a waiting market in California, where Gold Rush miners were willing to pay top dollar for the tasty bivalves »5.
5. CAMDEN Jim, shell games : Washington a leader in oyster farming
L’exploitation des huîtres Olympia de Willapa Bay a commencé dès 1852, quand trois ou quatre compagnies de Californie achetaient les huîtres auprès les Chinooks et Chehalis pour le marché de San Francisco pendant la ruée vers l’or, quand les chercheurs d’or originaires de la côte Est, grands amateurs d’huîtres, ont débarqué pour la côte Ouest en quête de leur fortune. Avant juin 1853, 19 bateaux assuraient l’approvisionnement de la baie de San Francisco en d’huîtres et fourrures provenant de Willapa Bay. Un article de journal d’époque à San Francisco a estimé que le commerce des huîtres de Willapa Bay avait atteint un valeur de plus que 100 000 dollars de l’époque en 1853 (soit plus de 3 millions de dollars d’aujourd’hui)6.
Avant l’arrivée des colons européens, Shoalwater Bay, un autre nom pour Willapa Bay, était peuplée par les Chehalis du bas (Lower Chehalis) au Nord et les Chinooks de Willapa (Willapa Chinooks) au Sud. Leur territoire d’origine consistait en un vaste réseau hydrologique au bord de la côte Pacifique. À la pointe Sud du territoire des Chehalis, sur le bord de Willapa Bay se trouvait le village Namps Chaahts, là où se trouve le site de la réserve aujourd’hui. Leur territoire s’étendait jusqu’au Nord de la ville actuelle de Westport, où existait le village Tsa-a-lis ou lieu de sable. Les premiers explorateurs prononçaient Tsa-a-lis « chehalis », qui deviendra le nom de la tribu. Le territoire des Chehalis entrait vers l’est dans les terres jusqu’à Satsop, Washington7.
6. RUBY, Robert H., et John Arthur. Brown. The Chinook Indians: Traders of the Lower Columbia River. Norman : University of Oklahoma Press, 1988 7. « Our Lands. » Shoalwater Bay Tribe. Accessed May 11, 2019. https://www.shoalwaterbay-nsn.gov/ home/about-the-tribe/our-lands/.
CHAPITRE 3
FIGURE 45 UNE RÉCOLTE D’HUITRES À WILLAPA BAY, 1940
NUL PART RESTE QUELQUE PART : DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY
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FIGURE 46 SHOALWATER BAY RESERVE DANS LE PARTIE NORD DE WILLAPA BAY DÉPUIS 1866
Au nord de Willapa Bay, on trouve la réserve de la tribu amérindienne de Shoalwater Bay, créée par ordre exécutif présidentiel le 22 septembre 1866. 355 acres de terrain (144 hectares) étaient consacrés aux Miscellaneous Indian purposes (usages amérindiens
8. Ibid.
divers) pour l’usage des derniers peuples Chinook et Chehalis pour la pêche, la récolte des coquillages, et la chasse. Leurs descendants sont aujourd’hui les membres du Shoalwater Bay Indian Tribe8.
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CHAPITRE 3
FIGURE 48 LA MAISON DE C. J. W. RUSSELL ET UNE MAISON LONGUE DE CHEHALIS
NUL PART RESTE QUELQUE PART : DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY
FIGURE 47 LES DÉLIMITATIONS DES TERRITOIRES DES AMÉRINDIENS PRÉ-TRAITÉ
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l’ostréiculture rurale de Willapa Bay : Un marché mondial à partir d’un jardin secret FIGURE 49 CARTE DES MILIEUX HUMIDES DE WILLAPA BAY
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L’ostréiculture aujourd’hui à Willapa Bay, les acteurs, les espèces cultivées et les techniques.
Les premières huîtres japonaises, les Crassostrea gigas sont arrivés en avril 1919 sur le pont d’un navire à vapeur en provenance de Yokohama (Japon) et destinées à deux éleveurs d’huîtres nés au Japon, Joe Miyagi et J. Emy Tsukimoto. Une huître du Japon, pensaient-ils, pourrait constituer un bon substitut. Surnommée « l’huître japonaise » et plongée dans un écosystème complètement inconnu, ce spécimen robuste et à croissance rapide s’est mieux développé que prévu. Mais Miyagi et Tsukimoto n’ont pas été en mesure de récolter bien longtemps les fruits de leur succès. En 1921, Washington a adopté les Alien Land Laws, interdisant aux résidents japonais de posséder ou même de louer des terres, y compris les terres de l’estran. En 1930, il y avait assez d’ostréiculteurs (occidentaux) qui cultivaient les huîtres japonaises pour former un groupe industriel, un groupe qui s’accordait pour dire qu’il avait besoin d’un surnom plus local. Ils ont choisi le nom d’huîtres du Pacifique (alternatives : Cascade, Western et Chinook), mais il a fini par s’effacer lorsque nous avons adopté l’habitude française de nommer les huîtres suivant leur « merroir », les baies et les criques qui les façonnent10.
9. Pacific Shellfish Institute. The Pacific Shellfish Institute | Washington. Accessed May 11, 2019. http://www.pacshell.org/washington.asp. 10. https://wsg.washington.edu/wordpress/wp-content/uploads/Immigrant-Oyster.pdf
NUL PART RESTE QUELQUE PART : DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY
Les tribus indiennes de l’Ouest de Washington récoltent des mollusques et des crustacés sauvages, notamment des huîtres et des palourdes, dans le Puget Sound et dans les zones côtières depuis des milliers d’années. La conchyliculture a commencé au milieu des années 1800 et visait à l’origine l’huître indigène Olympia, abondante dans la baie de Willapa et le sud de Puget Sound. En 1895, la législature de l’État de Washington adopta les lois Bush Act et Callow Act, qui autorisaient la vente à des propriétaires privés de marées appartenant à l’État et renforçaient encore l’aquaculture dans l’État. L’industrie de l’huître Olympia a atteint son apogée dans les années 1890, puis s’est brusquement effondrée en raison de la surexploitation et de la dégradation de la qualité de l’eau. En 1915, la récolte d’huîtres Olympia était
presque inexistante à Puget Sound. Les huîtres Olympia sont aujourd’hui une espèce désignée comme prioritaire pour les efforts de restauration9.
CHAPITRE 3
La vente des huîtres constitue une grande partie de l’économie de l’État de Washington. L’aquaculture des mollusques et crustacés joue un rôle de plus en plus important dans la production nationale de produits de la mer : l’État de Washington est le plus grand producteur de mollusques et de crustacés élevés en écloserie et élevés en mer, avec plus de 300 exploitations représentant 25 % de la production nationale totale en poids et une valeur annuelle à la ferme dépassant 108 millions de dollars.
84
international est vu et reconnu aux États-Unis, sans appellation forte et unifiée liée au lieu d’origine en fort contraste avec la labellisation des huîtres « fines claires » de MarennesOléron aop. Aujourd’hui, l’ostréiculture dans cette région est l’affaire d’une famille, les Taylor, indique le Seattle Met, un journal local : « The Taylors now run the largest oystering company in North America, owning or leasing 10,000 acres of tideland in Washington and British Columbia, and running hatcheries and nurseries in Hawaii and California and locally on Dabob Bay, in Quilcene. Its size means Taylor Shellfish exerts all manner of influence over Washington’s oyster industry »12.
FIGURE 50 CARTES DE BANCS D’HUÎTRES INDIGÈNES OSTREA LURIDA, 1849
Les huîtres de Willapa Bay sont vendues partout aux États-Unis et exportées dans le monde entier11. Ce marché
Même si il y a une diversité d’huîtres (5 espèces en tout) cultivées dans la région, la reine des huîtres dans la Willapa Bay et à Marennes-Oléron, reste l’huître japonaise Crassostrea gigas, « Known as the Pacific oyster in the United States, or the Japanese or Miyagi oyster elsewhere, it is relatively disease-resistant, hardier, meatier and faster-growing than the Olympia oyster. It quickly took over Washington’s tidal lands and became the staple of the Northwest oyster industry. It’s now grown on the shores of every continent except Antarctica »13.
11. Washington Sea Grant (2015) Shellfish aquaculture in Washington State. Final report to the Washington State Legislature, 84 p. 12. VERMILLION Alicia, https://www.seattlemet.com/articles/2016/3/1/the-five-oysters-you-meet-in-washington « Les Taylor dirigent maintenant la plus grande entreprise ostréicole en Amérique du Nord, ils possèdent ou louent 10 000 acres (4050 hectares) de l’estran à Washington et Colombie-Britannique, écloseries à Hawaï et en Californie,et localement sur la baie de Dabob, à Quilcene. La taille de cette entreprise signifie que Taylor Shellfish exerce une influence très puissante sur l’ensemble de l’industrie ostréicole dans l’ État de Washington. » 13. « Connue sous le nom d’huître du Pacifique aux États-Unis, ou l’huître japonaise ou Miyagi ailleurs, elle est relativement résistante aux maladies, plus robuste, plus charnu et à croissance plus rapide que l’huître Olympia. Elle a rapidement pris le relais sur les estrans de Washington et elle est devenue la base de l’industrie ostréicole du nord-ouest des États-Unis. Elle est aujourd’hui cultivé sur les rives de tous les continents au monde sauf l’Antarctique. »
Rencontrer les huîtres de Willapa Bay
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Pacifique ou Japonaise
NUL PART RESTE QUELQUE PART : DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY
FIGURE 51 TRIPTYQUE DE CRASSOSTREA GIGAS, SUZANNE KATZ
être élevées dans l’estran jusqu’à l’étage infra-littoral, sur des rochers, des graviers, la vase ou le sable. Elles grandissent rapidement (jusqu’à 10 cm de longueur entre 2 à 4 ans).
CHAPITRE 3
Les huîtres Japonaises, Crassostrea gigas, en comparaison avec les huîtres Olympia, sont plus rustiques. Elles résistent aux fluctuations de température et de salinité et elles peuvent
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Kumamoto La Kumamoto Crassostrea sikamea, est une petite huître creuse, très ronde. Elle est originaire du Sud du Japon, la préfecture de Kumamoto. Elles résistent aux fluctuations de température et salinité et elles peuvent être élevées dans les zones intertidales jusqu’à l’étage infra-littoral, sur des rochers, des graviers, la vase ou le sable. Par contre, elles ne peuvent pas se reproduire dans l’eau froide. Les ostréiculteurs qui cultivent la Kumamoto sont donc dépendants des écloseries. Comme elles n’arrivent pas à se reproduire, elles ne sont jamais laiteuses et peuvent donc être vendues toute l’année. Elles mettent 3 ans pour arriver à une taille souhaitable pour la vente14.
Olympia L’huître indigène et de la Côte Ouest des États-Unis, l’huître Olympia ou Ostrea lurida pousse sur des rochers près de la ligne de marée basse ou dans des lits sur de la vase et des graviers. Elle préfère tout de même des fonds fermes dans les estuaires et les baies. Elle était d’autrefois cultivée dans des étangs endigués pour minimiser les variations environnementales (ce qui rappelle les claires de Marennes-Oléron)15. En revanche, contrairement aux huîtres du Pacifique élevées dans le commerce, les huîtres Olympia ne commencent à produire leurs coquilles que 2 à 3 jours après la fécondation et la produisent beaucoup plus lentement mais plus solidement, ce qui les aide à se protéger de l’eau corrosive pendant cette phase critique de développement16.
14. NOSHO, Terry Y. Small-Scale Oyster Farming for Pleasure and Profit. Washington Sea Grant, Marine Advisory Services, 1989. 15. ibid 16. WALDBUSSER, George. « Study Finds Native Olympia Oysters More Resilient to Ocean Acidification. »
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La Virginica La Virginica, ou Crassostrea virginica, qui provient de la côte Est des États-Unis, préfère vivre dans des eaux saumâtres et salées de 3 à 10 m de profondeur. Souvent concentrés sur les barres à huîtres, les bancs ou les rochers, situés dans les cours d’eau avec des zones de fond fermes17.
NUL PART RESTE QUELQUE PART : DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY
FIGURE 52 LES HUÎTRES DE WASHINGTON, A) CRASSOSTRA SIKAMEA B) OSTREA LURIDA C) OSTREA EDULIS D) CRASSOSTREA VIRGINICA
La Bélon
17. « Eastern Oyster. » Chesapeake Bay Program, www.chesapeakebay.net/S=0/fieldguide/critter/eastern_oyster.
CHAPITRE 3
Les Bélons, Ostrea edulis, habitent le sol sous la ligne de marée basse dans de l’eau froide et possédant une salinité relativement élevée. Elles ont été introduites dans l’État de Washington depuis la France dans les années 1970. Elle restent relativement rares et peu exploitées.
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Méthodes de production
FIGURE 53 CARTE DES PARCS À HUÎTRES ACTUELS DE WILLAPA BAY
18. WALDBUSSER, George. « Study Finds Native Olympia Oysters More Resilient to Ocean Acidification. »
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FIGURE 54 CULTURE D’HUÎTRES À PLAT, SUZANNE KATZ
NUL PART RESTE QUELQUE PART : DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY
À Marennes-Oléron, la technique des parcs à plat à été abandonnée après une tempête en 1999 qui à fait trop de dégâts et de pertes. Dans la Willapa Bay, l’élevage des huîtres dans les parcs à plats reste la technique la plus commune en raison de faibles besoins d’entretien et de préparation simple. Les meilleures zones pour cette technique sont les baies et les entrées protégées avec des fonds de boue fermes où les courants et les vagues ne sont pas excessifs. Les jeunes naissains sont semés sur le fond tout les 30 à 50 cm et puis
sont récoltés quand ils ont atteint une taille optimale. Si il y a trop d’huîtres attachées l’une contre l’autre, les ostréiculteurs frappent la partie inférieure de l’amas avec un objet en métal dur les brise mais peut provoquer la perte de certaines huîtres. La plage doit être surveillée régulièrement pour détecter les prédateurs et autres problèmes. À marée basse, les prédateurs sont éliminés et les grappes d’huîtres devenues trop grosses sont séparées. La récolte se fait à la main ou par dragage selon l’échelle de l’entreprise ostréicole18.
CHAPITRE 3
« Bottom culture » ou les parcs à plats
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FIGURE 55 BOUCHOTS, SUZANNE KATZ
Stake Culture — Bouchots La culture des coquilles sur des bouchots est principalement réservé à la mytiliculture en France. Dans la Willapa Bay, certains ostréiculteurs utilisent également les bouchots pour les huîtres. Il sont utiles pour les zones de baie au fond extrêmement boueux ou aux sols durs inadaptés à la culture à plat. La technique du cultch est utilisée. Elle consiste à fournir d’anciennes coquilles aux naissains qui s’y
fixent. La coquille avec les naissains (le cultch) est ensuite fixée au bouchot par un clou galvanisé. Le sommet des piquets ne devrait pas dépasser 1 m. Des piquets plus petits allant de 15 cm à 30 cm de la boue peuvent également être utilisés. Dans ce cas, les coquilles d'huîtres avec le naissain sont clouées directement au sommet du pieu. Cet espacement des piquets d'environ 1 m permet un entretien et une récolte faciles19.
FIGURE 56 BOUCHOTS EN DÉTAIL, SUZANNE KATZ
19. NOSHO, Terry Y. Small-Scale Oyster Farming for Pleasure and Profit. Washington Sea Grant, Marine Advisory Services, 1989.
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Longline Culture consiste à fixer les cultch à égale distance le long d’une corde ou de fil. Une fois les huîtres attachées, la corde peut être suspendue à un ponton, à des étendoirs, ou ancrée sur le fond. L’utilisation de techniques de culture hors lit présente certains avantages. Premièrement, les zones qui ne conviennent pas à la culture à plat (car trop vaseux ou trop durs) peuvent être utilisées comme espace de production. Deuxièmement, les techniques hors-sol réduisent la prédation par les étoiles de mer et les crabes.
Les techniques hors-lit peuvent toutefois être elles aussi problématiques. Les huîtres sont plus susceptibles d’être endommagées par les tempêtes, d’être encrassées par des algues et des animaux, ou d’être sujettes au vandalisme et au vol. Les coûts de production sont également plus élevés en raison du besoin de matériaux, tels que piquets, tuyaux, lignes, etc. Les systèmes de lignes longues les plus récents sont similaires aux lignes de culture sous tension des vignobles dont les lignes ne sont pas endommagées par l’action des vagues20. NUL PART RESTE QUELQUE PART : DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY
Longline Culture
FIGURE 57 LONGLINE CULTURE COMME DES VIGNES, SUZANNE KATZ
20. Ibid
CHAPITRE 3
FIGURE 58 LES CULTCH ATTACHÉES AUX FILS, SUZANNE KATZ
92
FIGURE 59 ERIC HILL, UN OSTRÉICULTEUR, AVEC SES POCHES D’HUÎTRES INDIVIDUELLES, JESSEY TINSELEY, 2017
Culture d’huîtres individuelles Alors qu’ils les ont longtemps consommées cuisinées, les Américains ont recommencé à manger des huîtres crues dans leur coquille. Cela a créé un marché renouant avec les huîtres individuelles au lieu des grappes d’huîtres qui été ensuite cassées pour permettre à la viande d’être congelée ou mise en pot. La production d’huîtres simples se fait dans des plateaux, des cages ou des
FIGURE 60 CULTURES D’HUÎTRES INDIVIDUELLES EN POCHES À MARÉE BASSE
FIGURE 61 CULTURES D’HUÎTRES INDIVIDUELLES EN POCHES À MARÉE HAUTE
sacs en plastique. Ils sont ensuite disposés sur des rayonnages bas, suspendus à des poteaux, à des quais ou simplement attachés au sol. L’action des vagues sur les récipients qui brise régulièrement les huîtres, formant des coquilles plus arrondies et plus creuses et donc une viande de qualité supérieure. Par comparaison, à Marennes-Oléron, ce travail est effectué manuellement.
La méthode la plus utilisée à MarennesOléron existe aussi à Willapa Bay sur des fonds qui ne permettent pas les parcs à plats. Par contraste avec MarennesOléron toutefois, les poches sont retournées plus souvent, toutes les deux semaines en moyenne, pour retravailler la forme et réduire les effets d’encrassement par les algues ou les sédiments. Les filières La culture des filières existe sous plusieurs formes dans l’État de Washington. Les cages ou lignes de polyéthylène sont suspendues dans l’eau. Cela crée un plus grand niveau de production par unité de surface mais nécessite un entretien considérable. Lorsque les huîtres sont cultivées à des concentrations denses telles que celle-ci, l’encrassement est réduit car elles améliorent la qualité de l’eau. Cependant, une sur-densité de la
population d’huîtres peut provoquer un retard de croissance, des coquilles irrégulières, une agglutination et une mortalité accrue. Les huîtres cultivées de cette manière ont des coquilles cannelées, extrêmement minces et fragiles. Les coquilles fines exposent les huîtres à la déshydratation et aux variations de température pendant le transport et sur le marché, réduisant ainsi leur durée de conservation. Les muscles adducteurs (qui permettent aux huîtres de fermer leurs coquilles) des huîtres en culture flottante sont également plus faibles que ceux exposés aux changements de marée quotidiens. Les huîtres cultivées en suspension flottante sont souvent transférées sur les lits intertidaux en septembre avant la vente, afin de durcir leurs coquilles, renforcer les muscles de l’adducteur et se développer un peu plus longtemps. FIGURE 62 CHALON OSTRÉICOLE À GRUE ET FILIÈRES, SUZANNE KATZ
CHAPITRE 3
Poches sur tables
NUL PART RESTE QUELQUE PART : DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY
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indigènes dans le contexte plus globale d’une protection des lieux naturels.
d’élevage d’autres espèces d’huîtres, et une mobilisation de restauration des gisements d’huîtres
l’utilisation d’autres techniques ostréicoles que les poches sur tables, l’expérimentation
par contre, Willapa Bay s’est divergé de Marennes-Oléron. Cette écartement se passe par
de richesse et des moments de crises) sur les mêmes temporalités. Dans l’histoire récente
marquantes avec celle de Marennes-Oléron avec une cycle de Boom and Bust (Des moments
l’industrie ostréicole. Simultanément, l’histoire ostréicole de Willapa Bay a des parallèles
amérindiens et plus tard Nippo-Américains de l’estran se raconte à travers l’évolution de
et du pouvoir. L’histoire américaine du colonialisme par la désinvestissement des peuples
Willapa Bay montre un paysage ostréicole en tant que cartographie de la discrimination
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NUL PART RESTE QUELQUE PART : DÉCOUVERTE DE WILLAPA BAY
FIGURE 63 OYSTER CAPITAL OF THE WORLD, JIMMY EMERSON 2011
CHAPITRE 3
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CHAPITRE 4 UN MILLIARD D’HUÎTRES POUR SAUVER LE MONDE (ou au moins New York)
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Une vraie intervention ou simplement la communication ?
L’ostréiculture comme acte de paysage et prévention des risques.
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FIGURE 64 NEW YORK, NEW YORK
CHAPITRE 4
UN MILLIARD D’HUÎTRES POUR SAUVER LE MONDE (ou au moins New York)
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FIGURE 65 UNE MÉDIATISATION FORTE
CHAPITRE 4
UN MILLIARD D’HUÎTRES POUR SAUVER LE MONDE (ou au moins New York)
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Un pari sur l’huître et les lycéens Le Billion Oyster Project en partenariat avec Kate Orff. La vente de l’huître comme superhéros du littoral urbain à New York. De Oystertecture à Living Breakwaters. Un mouvement de communication du moma à Instagram.
Peu de temps après que j’ai commencé à m’intéresser à l’huître et l’estran, j’ai découvert les projets de Kate Orff, fondatrice de l’agence scape et directrice de l’école de design urbain de Columbia University à New York. Renouant avec ses racines historiques, New York mène actuellement le premier projet au monde de restauration de récifs d’huîtres à grande échelle en partenariat avec l’agence scape1. C’est donc un exemple important pour montrer comment les huîtres et leur habitat peuvent être intégrés dans un contexte urbain par la pratique de l’architecture de paysage. Pour parler de l’ostréiculture à New York, il faut savoir que cette ville était autrefois le plus gros producteur d’huîtres au monde. Les témoignages des premiers colons qui sont arrivé sur l’île de Manhattan font état d’huîtres plus grandes que leurs mains, une ressource infinie de nourriture. La ville s’est construite sur des centaines des buttes coquillières laissées par les Lenapés, les amérindiens indigènes du territoire. De nouvelle buttes sont découvertes régulièrement à l’occasion de travaux. Les habitants de New York furent connus mondialement pour être une ville de brutes qui mangeaient leurs huîtres crues et entières dans la rue. La demande en huîtres était si forte qu’elle a finalement dépassé l’offre abondante de New York. Au milieu des années
1800, la population d’huîtres naturelles de la région était presque entièrement épuisée. Mais ce n’était pas la fin de la « Big Oyster ». Les new-yorkais ont commencé à élever des huîtres dans les basfonds du port et, dans les années 1880, la ville produisait plus de 700 millions d’huîtres par an. En parallèle, notons que pendant des années, la ville avait déversé des polluants industriels et des eaux usées directement dans ce même port. Au début des années 1900, New York a été touchée par des épidémies mortelles de choléra et de typhoïde, épidémies que les experts en santé publique ont retracées jusqu’aux parcs à huîtres. La ville fut obligée de mettre fin à l’ostréiculture et New York ferma en 1927 son dernier lit, au sud de Staten Island. La qualité de l’eau continuait à se dégrader jusqu’à ce que les huîtres ne puissent plus survivre. Au milieu du xxe siècle, les huîtres de New York, mondialement célèbres, avaient quasiment disparu, laissant le fond marin dénudé. La pollution continua de poser problème à New York, mais en 1972, le Congrès adopta le Clean Water Act, qui réglementait les déchets déversés dans les cours d’eau. Petit à petit, la qualité de l’eau dans le port s’est améliorée et de nombreux groupes tentent maintenant de ramener l’huître à New York. Pour Mark Kurlansky, historien et auteur de The Big Oyster : A molluscular history of New
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York, l’histoire des huîtres à New York est l’histoire du meurtre de l’environnement de la ville2. Kate Orff, paysagiste et fondatrice de l’agence scape, explique le raisonnement derrière son project
« Oystertecture » dans son livre Towards an Urban Ecology. Pour elle, comme pour Kurlansky, l’histoire du paysage new-yorkais est intimement liée à celle de l’huître.
« Why the oyster ? It is an ecosystem engineer, a unit of multipurpose infrastructure that filters nutrient contaminants from the water, provides aquatic habitat, and attenuates waves through the buildup of reef systems over time. Oyster beds once covered nearly 25 percent of the harbor (New York Harbor) and were
of cutting and filling, these flats were shaped into a uniform channels and hard edges that could no longer support the same diversity of life. »3
Son propos est d’utiliser l’huître, donc sa capacité à filtrer l’eau et à créer des récifs en forme de brise-mer, comme outil de restauration d’habitat naturel dans le havre de New York mais aussi d’un nouveau littoral. Un littoral qui reliera les habitants de New York avec l’environnement dans lequel ils vivent4. Elle travaille avec un projet de restauration d’habitat nommé « The Billion Oyster Project ».
« A future in which New York Harbor is the center of a rich, diverse, and abundant estuary. The communities that surround this complex ecosystem have helped construct it, and in return benefit from it, with endless opportunities for work, education, and recreation. The harbor is a world-class public space, well used and well cared for — our Commons »5. Ces projets ont fait l’objet d’une impressionnante communication. Kate Orff
1. « About BOP. ” Billion Oyster Project Home Comments, Billion Oyster Project, 2013, billionoysterproject.org/ about/our-story/ 2. KURLANSKY Mark, The Big Oyster : A molluscular history of New York, New York, Vintage Editions , 2007, p. 10 3. ORFF Kate, Toward an Urban Ecology, The Monacelli Press, New York, 2016, p. 92 « Pourquoi l’huître ? C’est un bio-ingénieur, une unité d’infrastructure de l’écosystème polyvalente qui filtre les éléments nutritifs et les contaminants de l’eau, fournit un habitat aquatique et atténue les vagues par l’accumulation de récifs au fil du temps. Les huîtres couvraient autrefois près de 25% du port (port de New York) et étaient capable de filtrer les contaminants de toute l’eau du port en quelques jours seulement… Récifs, lits et les marais protègent les terres et faisaient partie d’une riche économie maritime. À travers les siècles de déblais et de remblais, ces vasières ont été transformés en canaux uniformes avec des bords durs qui ne pouvaient plus soutenir la même diversité de la vie. » 4. Ibid. 5. « Un avenir dans lequel le port de New York est le centre d’un riche, divers et abondant estuaire. Les communautés qui entourent cet écosystème complexe l’a aidé dans sa construction et profiteraient en retour, avec des possibilités infinies pour le travail, l’éducation, et loisirs. Le port est un espace public de classe-mondiale, bien utilisé et bien soigné - un paysage de bien commun. »
CHAPITRE 4
and marshlands protected upland areas and were part of a thriving maritime economy. Through centuries
UN MILLIARD D’HUÎTRES POUR SAUVER LE MONDE (ou au moins New York)
capable of filtering nutrient contaminants from all of the harbor’s water in a matter of days… Reefs, shoals
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a fait plusieurs Ted Talks. Le projet Oystertecture est le premier projet de paysage exposé au moma. Il y a des articles régulièrement dans tous les grands journaux, des émissions de radio, des conférences, des événements dans des restaurants de New York, des sites d’internet, des livrets et surtout, un compte Instagram qui publie régulièrement les interventions, des demandes de financement par donations, des rappels et de l’information plus globale sur les projets. Le résultat est une rayonnement stupéfiant pour des projets de paysage à telle point que Kate Orff est le premier paysagiste à gagner le prestigieux Prix MacArthur Fellowship, parfois appelé The Genius Grant. Selon le Billion Oyster Project, ce projet a déjà restauré 28 000 000 huîtres avec un résultat de 896 trillions de litres d’eau filtrés dans le havre de
New York, ainsi que 2 250 000 kg de coquilles d’huîtres recyclés et remis en habitat6. Ils réalisent ce travail monumental par des projets participatifs et pédagogiques. Pour l’instant, les huîtres travaillent en tant que filtres et donc ne sont pas comestibles, mais elles sont responsable de la dépollution de l’eau et de la protection des berges de la ville. Les architectes paysagistes de scape ne prétendent pas que les huîtres peuvent sauver New York du changement climatique. Il n’existe pas de solution unique à un problème aussi vaste et complexe. Des chercheurs de l’organisation Climate Central ont récemment classé New York au rang de ville la plus vulnérable aux États-Unis face à l’élévation du niveau de la mer. Plus de 426 000 personnes vivent dans des zones susceptibles de subir de graves inondations d’ici 2050.
Oystertecture Le projet avait été commandé par le Museum of Modern Art en 2009 pour l’exposition Rising Currents : Projects for New York’s Waterfront, une initiative visant à élaborer des stratégies d’adaptation à New York face au changement climatique et à la montée des eaux. Il existe de nombreux obstacles à la restauration des huîtres, notamment le manque de larves d’huîtres. Mais, l’un des plus grands défis est en réalité un problème structurel : le paysage
6.
physique du port a totalement changé à la suite du dragage. Le port est devenu plus profond et a un fond plat et boueux. Ce défi a donnée à Orff l’idée de « l’architecture pour l’huître ». Le concept était de construire des filets géants en corde marine et de les élever à environ 30 centimètres du fond marin. Ces filets seraient ensuite ensemencés avec des larves d’huîtres et les huîtres pourraient se développer à partir de là.
“ About BOP. ” Billion Oyster Project Home Comments,, Billion Oyster Project, 2013, billionoysterproject.org/about/ our-story/
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CHAPITRE 4
UN MILLIARD D’HUÎTRES POUR SAUVER LE MONDE (ou au moins New York)
FIGURE 66 a) CYCLE DE VIE D’UNE HUÎTRE b) LE CYCLE DE VIE D’UNE HUÎTRE EN ÉLEVAGE COMME BASE DU DESSIN DES ESPACES PUBLIC DU LITTORAL — DE L’ÉCLOSERIE AU RÉCIF, SCAPE STUDIO, 2009
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FIGURE 67 UNE PROJECTION CARTOGRAPHIQUE AU 2050 DU SUD DE BROOKLYN AVEC L’IMPLEMENTATION DU PROJET OYSTERTECTURE PAR SCAPE STUDIO AVEC LA CRÉATION D’UNE RÉSERVE NATURELLE MARITIME, DES ESPACES PUBLICS OSTRÉICOLES ET UNE REDÉFINITION DES LIMITES TERRESTRES, 2009
CHAPITRE 4
UN MILLIARD D’HUÎTRES POUR SAUVER LE MONDE (ou au moins New York)
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FIGURE 68 UNE CARTOGRAPHIE DE LA CONCHYLICULTURE ET L’EMPLACEMENT DES VASIÈRES, RÉCIFS D’HUÎTRES, ET MARAIS SALANTS AU SUD DE BROOKLYN EN 1776, SCAPE STUDIO, 2009
CHAPITRE 4
UN MILLIARD D’HUÎTRES POUR SAUVER LE MONDE (ou au moins New York)
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UN MILLIARD D’HUÎTRES POUR SAUVER LE MONDE (ou au moins New York)
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CHAPITRE 4
FIGURE 69 MAQUETTE DES STRUCTURES À LA FOIS POUR LA CRÉATION DES RÉCIFS D’HUITRES ET L’ESPACE PUBLIC DU LITTORAL POUR L’EXPOSITION AU MOMA : RISING CURRENTS, 2009
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Living Breakwaters En 2013, le gouvernement fédéral a lancé son groupe de travail sur la reconstruction après le passage de l’ouragan Sandy et organisé un concours d’architecture intitulé Rebuild by Design. La société scape d’Orff a soumis une proposition centrée sur l’ostréiculture appelée Living Breakwaters. Le projet a reçu un financement de 60 millions de dollars et sera mis en œuvre par le Governor’s Office of Storm Recovery de New York. scape est actuellement en train de concevoir des digues artificielles pour brise-lames au-dessus de la côte Sud de Staten Island, qui était autrefois un épicentre de l’économie ostréicole de la ville et qui a également été durement touchée à Sandy. La conception a beaucoup évolué par rapport à la proposition originale basée sur une corde. Le plan consiste désormais à construire un collier de digues en
mer à partir de gros rochers et de grosses pierres et à les ensemencer d’huîtres pour qu’elles deviennent des récifs. Tout comme un récif d’huîtres naturel, les Living Breakwaters sont conçus pour briser les vagues dangereuses avant qu’elles n’atteignent la côte. Celles-ci réduiront l’érosion côtière, construiront des plages et rendront les tempêtes moins dangereuses, mais elles ne protégeront pas complètement des eaux de crue. Les digues sont des barrières dures qui bloquent le mouvement de l’eau dans le littoral, mais les architectes paysagistes de scape indiquent que l’incertitude entourant les changements climatiques rend difficile la conception d’un mur. Alors que les mers continuent de monter et que les tempêtes deviennent de plus en plus fréquentes et intenses, il est difficile de prédire exactement où un mur devrait être construit et à quelle hauteur. Les murs peuvent également
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UN MILLIARD D’HUÎTRES POUR SAUVER LE MONDE (ou au moins New York)
FIGURE 71 RÉCIFS D’HUÎTRES PROTÈGENT LE LITTORAL DES ONDES DE MER ET DES INONDATIONS PENDANT DES TEMPÊTES, SCAPE STUDIO, 2014
FIGURE 70 LES BLOCS DE CONSTRUCTION D’UN RÉCIF ARTIFICIEL FORMENT UNE BRISE-LAME, SCAPE STUDIO, 2014
CHAPITRE 4
FIGURE 72 COUPES COMPARATIVES D’UN RÉCIF ARTIFICIEL ET UN RÉCIF ARTIFICIEL EN BRISE-LAME, SCAPE STUDIO, 2014
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bloquer les écoulements naturels d’eau à travers un estuaire et empêcher l’accès de l’Homme au rivage. Ainsi, plutôt que d’essayer de maintenir la ligne de front et de combattre l’océan, les concepteurs veulent ralentir l’eau et la laisser passer, créant ainsi une zone tampon d’eau plus propre et plus calme le long du rivage. Ce projet vise également à valoriser le littoral en faisant revivre son écosystème. En plus de réduire les vagues et de filtrer l’eau, les digues vivantes fourniront une partie de l’habitat que constituaient autrefois les récifs d’huîtres. Avec l’aide de scientifiques de la mer, les architectes paysagistes ont aménagé des poches dans la structure du briselames, appelées « rues de récifs », qui offrent un abri aux poissons juvéniles.
Bien entendu, pour réaliser cette vision, Living Breakwaters aura besoin de beaucoup d’huîtres. Le projet Living Breakwaters constitue une étape vers une relation plus saine entre la ville et la mer, mais pour protéger à long terme New York et les autres villes côtières, Kate Orff déclare que de nombreuses autres interventions devront être prises en compte, telles que l’arrêt des constructions immobilières le long de la côte, le soulèvement les bâtiments existants et enfin le retrait des constructions situées dans les zones exposées aux inondations. Parce que New York est une ville au bord de la mer et que l’eau ne fait que se rapprocher7. FIGURE 73 PROGRAMMATION D’UN LITTORAL OSTRÉICOLE PUBLIC, SCAPE STUDIO, 2014
7.
« Living Breakwaters Rebuild By Design Competition. » SCAPE, www.scapestudio.com/projects/living-breakwaterscompetition/.
FIGURE 74 COUPE PERSPECTIVE OU AXONOMÉTRIQUE DES MILIEUX VARIÉS DEPUIS LES RÉCIFS AUX PLAGES, SCAPE STUDIO, 2014
FIGURE 75 VUE À VOL D’OISEAUX D’ENSEMBLE DU PROJET DE LIVING BREAKWATERS, SCAPE STUDIO, 2014
CHAPITRE 4
UN MILLIARD D’HUÎTRES POUR SAUVER LE MONDE (ou au moins New York)
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Billion Oyster Project
FIGURE 76 OYSTERS BLOWING UP MY PHONE, SUZANNE KATZ ET HARMONIE BOIDIN 2019
Situé juste au sud de Manhattan, Governor’s Island abrite une institution unique : la New York Harbor School. La particularité de cette école est qu’elle forme à la gestion maritime appliquée des enfants issus de familles à faibles revenus. Les étudiants s’y rendent en ferry et suivent des cours inhabituels comme la plongée sous-marine, la biologie marine et la robotique sous-marine. L’école coordonne également un programme appelé Billion Oyster Project, où les élèves découvrent le port grâce à la restauration des huîtres. Une étude réalisée juste avant que l’ouragan Sandy ne frappe, a révélé la présence de plus de 11 000 huîtres sur une bande d’eau de un mile (1,6 kilomètres). À l’été 2013, les étudiants ont transféré 100 000 naissains de ferme sur ce récif en croissance8. À l’heure actuelle, ils cultivent des millions d’huîtres sur l’île dans de grands réservoirs. Les participants au programme sillonnent la ville et ramassent des coquillages dans différents restaurants. Ces coquilles fournissent un substrat sur lequel ils peuvent faire pousser des huîtres. Le projet Billion Oyster est un partenaire officiel du projet Living Breakwaters. Les huîtres cultivées par des étudiants de New York protégeront bientôt Staten Island9.
8. 9.
http://www.slate.com/articles/health_and_science/science/2014/04/rebuilding_the_new_york_new_jersey_waterfront_ after_sandy_oyster_beds_dunes.html https://billionoysterproject.org
CHAPITRE 4
UN MILLIARD D’HUÎTRES POUR SAUVER LE MONDE (ou au moins New York)
117
la résilience au littoral de la ville et pousser les limites du domaine du paysage.
d’un lieu et qu’à partir de l’huître, elle pourra recrée ce lien, créer de l’espace public, donné de
paysage et rapprocher les New Yorkais à l’environnement. Que l’huître peut être emblématique
vue l’huître et elle s’est dit, là. À partir de ça, on pourra remettre New York en relation avec son
communication. Elle est dans le fait que Kate Orff, en tant que paysagiste est New Yorkaise a
La force des projets de Kate Orff n’est pas seulement dans la maîtrise de moyens de
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CHAPITRE 4
UN MILLIARD D’HUÎTRES POUR SAUVER LE MONDE (ou au moins New York)
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FIGURE 77 SKYLINE DE NEW YORK, GONNORD, KEVIN
CHAPITRE 5 UN AVENIR INCERTAIN À MARENNES-OLÉRON
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des retraités ? Face aux pressions urbaines et changements climatiques, ce territoire est-il prêt ?
triploïdes d’écloserie et bateaux à grue ? Une résidence des travailleurs pendulaires de La Rochelle ? Le rêve
Quel avenir pour Marennes-Oléron ? Un lieu d’exploitation ostréicole industrielle avec filières, huîtres
de Fort Royer. Les nouveaux habitants (retraités, plaisanciers) ont d’autres aspirations.
valorisation touristique de ses paysages ostréicoles par la création de la Cité de l’Huître et le Site Ostréicole
d’augmentation de la production face à des mortalités estivales fréquentes. Le territoire est en quête d’une
considéré dans la même manière. L’industrie ostréicole se tourne vers la modernisation dans une recherche
Si Marennes-Oléron est également à risques des tempêtes et à la montée des eaux, l’huître n’est pas
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FIGURE 78 DES CLAIRES DÉLAISSÉES RETOURNÉES AUX PLANTES HALOPHILES, SUZANNE KATZ, 2019
CHAPITRE 5
UN AVENIR INCERTAIN À MARENNES-OLÉRON
123
124 FIGURE 79 CARTE DES ZONES DE SUBMERSION MARINE APRÈS XYNTHIA EN FÉVRIER 2010
Les marges et le centre, la peur de la vase
Un couple d’une cinquantaine d’années, récemment arrivé, m’a avoué « quand on a regardé les maisons sur l’Île d’Oléron, on voulait surtout ne pas être proche des marais [ostréicoles]. » Ils ont fini par trouver un lieu pour construire une petite maison sur la côte ouest (dite sauvage) de l’île, entre la dune et les vignes2. Pour ceux qui viennent de la région, l’ostréiculture est l’identité même du lieu. C’est ce qui a construit leur paysage littoral et c’est une force économique non négligeable. Un peu plus de 4000 ha sont exploités pour la conchyliculture (ostréiculture et mytiliculture principalement) qui constitue une spécificité du département. La CharenteMaritime est le 1er département français producteur de coquillages3. En 2012, la Charente-Maritime a commercialisé pour la consommation 37000 tonnes d’huîtres creuses, soit 47 % du volume
1. Communication personnelle. N. D. 13. 03. 2019 / Communication personnelle. M.P. 14.03. 2019 2. Communication personnelle. J.B. et N. B., 09. 03. 2019 3. « La Charente-Maritime à Grands Traits. » La Charente-Maritime à Grands Traits - Insee Analyses Nouvelle-Aquitaine - 13, INSEE -- Institut National De La Statistique Et Des Études Économiques, www.insee.fr/ fr/statistiques/1908390.
UN AVENIR INCERTAIN À MARENNES-OLÉRON
Marennes-Oléron est à un point de basculement. Les français continuent leur mouvement vers l’ouest. Ils s’installent à Marennes-Oléron pour d’autres raisons que l’ostréiculture. Le modèle économique change. Une division s’est créée entre ceux qui « connaissent » et les nouveaux arrivés1. Le tourisme balnéaire et l’attraction du littoral est facilement discernable quand on constate que le littoral concentre 83 % des résidences secondaires du département. L’attractivité de l’Île d’Oléron pour ceux qui viennent d’ailleurs, n’est pas
liée à l’ostréiculture. La population a augmenté de 0,6 % en moyenne chaque année entre 2008 et 2015. Selon l’insee, c’est l’une des croissances les plus fortes en France sur la période. Le tourisme représente 10 % de l’emploi du département en été pour la région de CharenteMaritime, soit 13 500 employées en moyenne sur l’année et jusqu’à 23 000 employées en haute saison.
CHAPITRE 5
Marennes-Oléron est un territoire complexe avec des acteurs variés. Pour commencer, il comprend 27 communes ostréicoles, les inter-communes, le département de la CharentesMaritime, deux syndicats mixtes différents, un pour ma Seudre et un autre pour la Charente, le Comité Régional Conchylicole (crc), le Département Public Maritime, la direction départementale des Territoires et de la Mer (ddtm), la réserve naturelle de MoëzeOléron, le centre de recherches de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (ifremer) à la Tremblade, le Conservatoire du Littoral, une zone Natura 2000, et les acteurs du tourisme balnéaire qui représentent une puissance économique.
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national, dans un contexte de baisse de production suite à des phénomènes de surmortalité du naissain et des huîtres adultes. Mais l’industrie change. Le nombre d’entreprises diminue fortement. Autour de 37 % d’entreprises en moins en 11 ans, en raison de l’absence de repreneur et de la fusion des entreprises. Aujourd’hui, près de 6000 personnes travaillent à la production
des coquillages, ce qui représente une diminution de 26 % par rapport à 2001. En revanche, la part de l’emploi salarié progresse car celui-ci remplace le travail familial. Les surfaces exploitées pour les huîtres diminuent, que ce soit sur l’estran (sur le domaine public maritime) ou dans les claires, ce qui provoque l’abandon de ces dernières4.
La Saga de la Maleconche L’ostréiculture à Marennes-Oléron tend vers une mécanisation du métier et une augmentation de la production sur une surface qui diminue. Parfois, ces changements résultent en des conflits entre les ostréiculteurs et les habitants du territoire. En 2011, un projet d’installation des filières a été autorisé dans l’anse de la Maleconche, dans le Nord de l’Île d’Oléron, en face de la Plage des Gautrelles et Plage des Saumonards. En 2012, des habitants et même quelques
ostréiculteurs de l’île se sont constitués en association pour combattre le projet. La suite est succession d’enquêtes publiques, d’épisodes juridiques, passages au tribunal, débats, médiatisation, manifestations, et même une zad, qui a duré jusqu’en 2018 et a créé une fracture profonde entre ostréiculteurs et nouveaux arrivés. À travers mon enquête sur site, j’ai pu avoir trois points de vue différents autour de ce sujet.
FIGURE 80 CARTE DES COMMUNES OSTRÉICOLE ET L’EMPLACEMENT DU PROJET DES FILIÈRES
4.
http://agreste.agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/R5414A16.pdf
CHAPITRE 5
UN AVENIR INCERTAIN À MARENNES-OLÉRON
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La Présidente de l’Association pour la Préservation du Littoral de la Maleconche et des Pertuis Charentais (aplimap) Madame Demyk habite dans un petit hameau au nord de l’Île d’Oléron derrière la Forêt Domaniale des Saumonards et la Plage des Gautrelles. Elle habite ici depuis 2011 en tant que retraitée. Dans sa vie professionnelle, elle était professeur de géographie dans une université parisienne où elle a étudié l’impact du productivisme sur l’Amérique Latine. Elle s’est installée dans cette zone de l’île car elle a apprécié l’aspect « sauvage » de la dune et des plages, avec du sable très fin en contraste avec les plages plus rocheuses sur les côtes Nord et Ouest de l’île, ou la vasière et marais salants à l’Est. Un jour en 2011, à l’occasion d’une conversation avec des voisins du hameau, elle appris l’existence du projet d’installation de filières ostréicoles sur 400 hectares en mer juste en face de la Plage des Gautrelles et la Plage des Saumonards. Le projet était déjà en Mairie depuis trois semaines sans que n’aient été réalisées d’enquête publique ou d’étude d’impact. Elle a ensuite passé quelques jours en mairie à étudier la totalité du dossier. Puis elle a écrit une lettre au commissaire enquêteur. En décembre 2011 la préfète a pris le décret d’autorisation après avoir rencontré un certain nombre d’élus de la communauté des communes. En réponse, elle a créé en 2012 avec d’autres voisins inquiets l’Association
pour la Préservation du Littoral de la Maleconche (aplimap). Cette association a constitué un front collectif d’opposants au projet avec les trois mairies du Nord de l’île et un certain nombre de petits ostréiculteurs qui trouvaient le projet démesuré et regrettaient de ne pas pouvoir en bénéficier en raison des investissements coûteux en matériel de leur part que ceci nécessiterait. Ensemble, ils ont trouvé un relais médiatique dans la presse, organisé des manifestations sur la plage et ont rencontré la préfète. Ils ont lancé une bataille de volonté. aplimap décrit plusieurs réserves face à l’installation. La première est la crainte de l’envasement des plages. Les membres de l’aplimap pensent que l’installation d’une quantité très dense d’huîtres et moules créera des déchets qui vont être amenées sur leurs plages et va envaser les plages de la Gautrelle et Saumonards, comme c’est le cas plus au Sud de l’île5. Ils s’inquiètent également que l’installation des filières rendrait la baie difficile à naviguer pour les plaisanciers. Une autre réserve évoquée est que la forte présence des bouées liée à la filière va perturber la vue et donc la contemplation de la mer. Ensuite, les membres de l’association craignent l’utilisation d’huîtres triploïdes6 dans ces filières, notamment en raison des doutes quant à leur stérilité totale et au potentiel impact sur la population
d’huîtres du bassin. Finalement, ils jugent que ce projet, poussé par l’industrie ostréicole (le crc)*, a été validé trop rapidement, et regrettent le manque de transparence avec le public, sans étude d’impact suffisante.
Après de nombreux retournements et des échanges entre les différentes autorités territoriales, le projet a été modifié mais aplimap y est resté opposé en obtenant l’annulation donnée aux variations successives du projet.
Pour Madame Demyk, ceci rappelle les mouvements productivistes qu’elle a étudiés auparavant. Un phénomène de concentration des exploitations comme on l’a vu dans l’agriculture. Les promoteurs du projet de filières sont les 10 plus gros producteurs d’huîtres et de moules de toute la région.
Pour Madame Demyk, la technologie des filières est par nature industrielle et est une production de masse. Elle juge que progressivement, cette filière va rendre désuets toute une série d’aménagements constitués des cabanes, canaux et claires. Pour elle, la bataille d’aplimap qui a commencé par la peur de l’envasement des plages s’est transformée en lutte pour la protection du littoral contre la mécanisation de l’ostréiculture et la préservation des plages. Elle a pour but que la compétence du schéma de cohérence territoriale (scot) et des collectivités locales puissent être étendues à la bande de l’espace maritime en général contrairement à l’actuel plan local d’urbanisme (plu) qui ne considérerait pas suffisamment en détail le littoral de l’île. Derrière cette polémique, Madame Demyk voit un sujet d’ordre plus général. C’est une question plus globale autour du développement de l’aquaculture et les cultures marines sur le littoral Français.
5. 6.
Après huit ans et plusieurs combats, les mairies du Nord de l’Île d’Oléron
Il convient de clarifier que les vasières existent par l’effet de floculation entre l’eau douce, l’eau salées et les sédiments quand l’eau devient saumâtre. C’est un phénomène typique des estuaires, qui ne semble pas lié à la présence des huîtres. les huîtres triploïdes sont génétiquement modifiées pour présenter trois chromosomes au lieu de deux, ce qui a pour effet de les stériliser (bien que ce point soit sujet à controverse) et donc d’empêcher qu’elles deviennent laiteuses en été. 30 % des huîtres cultivées en bassin Marennes-Oléron sont déjà des huîtres triploïdes — source : MARUCHITCH, Raphaëlle. « Huîtres Triploïdes : Des Douzaines En Questions. » Libération.fr, Libération, 2 Aug. 2016
CHAPITRE 5
L’aplimap affirme que l’ostréiculture reste un secteur économique qui a une valeur patrimoniale et une valeur identitaire. En s’appuyant notamment sur des statistiques de l’Insee, ils ont constaté que 80 à 90 % de l’activité économique oléronnaise est fondée sur le tourisme, soit par des emplois directs, soit par les emplois indirects, via l’artisanat et les résidences secondaires. La plage des Gautrelles et la plage des Saumonards sur la baie de la Maleconche ont beaucoup de charme et elles sont perçues comme des endroits sûrs pour la baignade et pour les activités en mer contrairement à l’océan qui est plus vigoureux. Face au tourisme, ils argumentent que l’impact économique de l’ostréiculture devient marginal.
UN AVENIR INCERTAIN À MARENNES-OLÉRON
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sont toujours du côté de l’aplimap et elle indique que l’association peutêtre mobilisée rapidement si le projet des filières venait à être de nouveau relancé. À son arrivée, cette polémique a permis à Madame Demyk de rencontrer des acteurs locaux et les personnes
qu’elle a fédérées. L’aplimap a créé un lien fort entre des personnes qui jusque là vivaient en électron libres. Madame Demyk ne pense pas qu’elle aurait rencontré les ostréiculteurs, ses voisins, ou les plaisanciers sans ce combat.
Alice Pauwels Madame Pauwels est l’actuelle directrice de la Cité de L’Huître, un musée dédié à l’ostréiculture à la Tremblade. Elle est arrivée dans le monde ostréicole par son mariage et elle a ensuite travaillé 10 ans en tant qu’ostréicultrice. Pour elle, les huîtres sur filière ne sont pas une aberration mais plutôt une autre façon de faire. Les huîtres sur filière sont apparues en 2000, d’abord par des essais qui ont été faits au Nord de l’Île d’Oléron. Elle explique que les huîtres sont élevées en poches dans des grandes cages suspendues avec des bouées en surface qui marquent leur emplacement. L’avantage de cette méthode tient au fait que l’huître reste toujours dans l’eau, ce qui lui permet une croissance plus rapide mais comporte aussi des inconvénients. Tous les ostréiculteurs ne pourraient pas accéder à ce type d’élevage car ceci nécessite un bateau avec une grue, ce qui n’est pas dans les moyens de tous les ostréiculteurs.
7. Communication personelle, A.P. 12.03.2019
Les filières représentent une évolution d’une activité qui permet un bon fonctionnement économique de la région tout au long de l’année, à l’inverse du tourisme estival. De son point de vue, le conflit autour des filières empêche l’amélioration d’un métier dur, physique et en lien direct avec la nature aux seules fins de préserver la vue des touristes qui ne veulent pas voir des bouées quand ils se baignent. Elle convient que ce n’est pas l’élevage ostréicole le plus esthétique, mais qu’il contribue au dynamisme de la région. Madame Pauwels relève la contradiction entre le discours tenu par l’opposition de ce projet et leurs habitudes dans la vie quotidien. D’après elle, la majorité des personnes impliqués dans la lutte contre le projet de la Maleconche ne sont pas des ostréiculteurs et sont des personnes qui eux, profitent de la modernité, qui vont au travail en voiture et y bénéficient du chauffage. Elle juge que les opposants au projet ont
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une vision de l’ostréiculture en tant que pratique archaïque et pittoresque qu’il convient de préserver telle quelle. Elle considère le métier d’ostréiculteur comme beau mais difficile et dont les conditions des travailleurs pourraient bénéficier de la modernisation.
de passer, alors que le pays de MarennesOléron est entièrement construit par l’homme, est une aberration. Elle lutte pour une prise de conscience sur la nécessité de l’existence d’une activité de l’homme pour assurer l’entretien de ce territoire7.
Pour Madame Pauwels, la sanctuarisation du paysage où l’homme est interdit
Pour lui, la polémique autour de la Maleconche est emblématique d’un problème plus large. D’un côté, des ostréiculteurs indigènes sont présents depuis des générations avec leur culture avec leur histoire. De l’autre, Monsieur Parent craint que les nouveaux arrivants ne viennent bouleverser le mode de vie local en imposant leurs normes. La question des filières est une traduction de ce sentiment, que les nouveaux arrivés ne prennent pas en compte, ni ne respectent l’histoire de ce territoire. L’identité du Sud de l’Île d’Oléron, incluant le Château d’Oléron, est fondée sur l’ostréiculture. Pour que l’activité se développe et ne meure pas, elle est obligée de se développer géographiquement, d’aller dans le Nord de l’île. Il convient avoir été surpris du
blocage fort et de l’incompréhension de ses collègues du Nord de l’Île d’Oléron, qui ont considéré que l’ostréiculture n’a pas lieu de s’y dérouler, et de leur manque d’intérêt pour cette activité. Il rapporte avoir entendu des craintes que les tempêtes ramènent sur la plage des coquilles d’huîtres et du matériel ostréicole qui viendraient la polluer. Pour lui, les questions de pollution et d’envasement des plages sont des Fake News et montrent une compréhension limitée de l’animal, de son élevage et son écosystème naturel. Il cite un moment emblématique du conflit, pendant une réunion publique où il se trouvait devant 600 personnes et qu’une personne lui a dit « mais vous vous rendez compte Monsieur Parent, un chaland ostréicole avec des ostréiculteurs dessus à 100 m de la plage… Mais ça va polluer complètement le panorama »8.
CHAPITRE 5
Michel Parent, issu d’une famille ostréicole depuis des générations est aujourd’hui maire de Château d’Oléron.
UN AVENIR INCERTAIN À MARENNES-OLÉRON
Michel Parent
8. Communication personelle, M.P. 14.03. 2019 131 / 131
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L’ostréiculture, une attraction touristique ? Pour améliorer la transmission de la culture ostréicole de la Saintonge aux personnes extérieures, deux sites de tourisme pédagogique et ostréicoles existent à Marennes-Oléron. Au nord de l’Île d’Oléron, à Fort Royer, il y a le « Site Ostréicole et Naturel de Fort Royer, Île d’Oléron ». Une quarantaine de cabanes en bois, au milieu d’un petit champ de claires, enclavées entre la vasière et le cordon dunaire. Le site propose plusieurs visites à thème : « L’ostréiculture à Fort-Royer », « Les parcs à huîtres », « Découverte des plantes de la dune et des vases salées », « La côte rocheuse, ses animaux extraordinaires et ses algues goûteuses » et « Le port de la Côtinière et les métiers du marin-pêcheur ». Chaque visite a pour but d’extirper les visiteurs balnéaires de leur image du littoral comme restreint à la plage et de leur faire comprendre la richesse de l’ostréiculture et des métiers de la mer, que ça soit dans l’estran ou dans les claires. À la Cayenne, entre claires, fleuve et mer, il y a un autre site, la Cité de l’Huître. Il est plus grand et prévu pour accueillir de plus larges groupes que le site Ostréicole à Fort Royer, avec un musée, des cabanes d’exposition, des animations pour enfants et un restaurant. Le site propose des événements tout au long de l’année, comme les concours des meilleurs écailleurs : La pré-sélection au Championnat de
9. https://cite-huître.com/experiences-a-partager/
France du meilleur écailleur, région Centre Ouest Charente-Maritime (ouverte aux professionnels) et la « Bourriche d’or Marennes Oléron »9 (ouverte aux étudiants). Pour Alice Pauwels, directrice de la Cité de l’Huître, le but du musée est de changer le regard des vacanciers sur le monde ostréicole. Elle considère qu’il est important que les visiteurs et donc les consommateurs comprennent qu’ils
travail de séduction avant tout. D’après elle, c’est un principe général. Sans séduire, le public n’écoute pas. Donc, il faut d’abord séduire son public pour pouvoir parler du métier et le travail qui est fait. Cette séduction passe par le paysage et l’histoire. Elle se présente comme le lien entre les ostréiculteurs et le grand public pour faciliter les relations entre eux10.
CHAPITRE 5
se trouvent sur un système d’élevage. Beaucoup de consommateurs imaginent que les huîtres sont pêchées le matin. Ils n’envisagent pas que chaque huître sera manipulée une cinquantaine de fois avant d’arriver dans l’assiette. La Cité de l’Huître, située directement sur le territoire ostréicole, est un outil qui permet d’attirer du monde et peut être plus de séduire le public. Madame Pauwels voit son travail comme un
FIGURE 81 CABANES OSTRÉICOLES À FORT ROYER, NATHALIE BOIDIN, 2019
UN AVENIR INCERTAIN À MARENNES-OLÉRON
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10. Communication personelle, A.P. 12.03.2019 133 / 133
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Crise mondiale, impacts locaux L’ostréiculture a survécu à des épidémies, des maladies, des prédateurs et l’humain, mais une nouvelle menace arrive. L’acidification de la mer due au changement climatique. Elizabeth Kolbert, journaliste et lauréate du prix Pulitzer, explique comment les stocks de récifs calcicoles comme les récifs d’huîtres et coraux nous ont aidé à absorber du carbone de l’atmosphère, mais cette aide a un prix. Le stockage de carbone dans la mer rend l’eau de plus en plus acide. « The seas have a built-in buffering capacity : if the water’s ph starts to drop, shells and shell fragments that have been deposited on the ocean floor begin to dissolve, pushing the ph back up again. This buffering mechanism is highly effective, provided that acidification takes place on the same timescale as deep-ocean circulation. […] That there is still a chance to do something to avert the worst consequences of global warming is thanks largely to the oceans »11. Les huîtres ont besoin d’une certaine température pour se reproduire et d’une certaine salinité, voire acidité pour survivre. Hors de leur environnement habituel, elles meurent12. L’augmentation de
11. 12. 13.
la température des océans et de l’acidité de l’eau sont donc dangereux pour cet animal. Un article récent dans Cultures Marines, un journal de conchyliculture indique que les scientifiques prévoient 100 % de mortalité des Crassostrea gigas en France en 2080 si rien n’est fait face au changement climatique. Selon une étude menée par le cnrs, l’ifremer, l’Institut de recherche et développement, et l’université de Nantes, l’hiver conditionne la résistance des huîtres (et donc leur mortalité) le printemps suivant. Le deuxième risque réside dans les tempêtes, plus fortes et plus nombreuses. La combinaison de l’eau plus chaude, des mouvements de courants plus violents, des pathogènes comme les champignons ou des blooms phytoplanctonique interrompra le repos biologique des huîtres pendant l’hiver. Même si le monde arrive à atteindre le scénario de cop21 ou les accords de Paris, les scientifiques prévissent 25 % plus de mortalités estivales dès l’année 203513.
KOLBERT Elizabeth, « The Darkening Seas », The New Yorker, 2006, pp. 66 - 76. « « Les mers ont une capacité intrinsèque à fonctionner comme tampon : si le pH de l’eau commence à baisser, des coquillages et des fragments de coquilles qui ont été déposés sur le fond de l’océan commencent à se dissoudre, et donc réhaussent le pH. Ce mécanisme tampon est très efficace, à condition que l’acidification ait lieu à la même échelle de temps que la circulation océanique profonde. […] S’il y a encore une chance de faire quelque chose pour éviter les pires conséquences du réchauffement climatique, c’est en grande partie grâce aux océans. » VIDAL, Huîtres, moules et autres coquillages p. 80 SCHEFFER, Hélène , Changement Climatique : 200 : 100% mortalités si rien est fait , Cultures marines, novembre 2018 #321
CHAPITRE 5
14. Communication personnelle, M.P. 14.03.2019 UN AVENIR INCERTAIN À MARENNES-OLÉRON
soutien du public pour continuer à faire partie du paysage14.
la voient de l’extérieur. Mais les enjeux sont élevés et l’industrie ostréicole va devoir obtenir le
rassembler, l’ostréiculture cristallise une confrontation entre ceux qui la pratiquent et ceux qui
Loin d’être un emblème autour duquel les habitants de Marennes-Oléron peuvent se
effectuée dans les années 1970 avec des huîtres provenant du Canada.
interrogés, eux, ont trouvé la proposition intrigante et ont pu citer l’exemple d’une tentative
que pour lui, l’huître japonaise était qu’une espèce invasive à éradiquer. Les ostréiculteurs
ostréicole n’aidait pas l’environnement. Le responsable du syndicat mixte a rit en disant
vision de l’huître en tant qu’une espèce clé de voute était réductrice et naïve, et que l’industrie
et leur a semblé être une idée incongrue. Une animatrice de la réserve naturelle, a déclaré que la
littoral a beaucoup amusé les acteurs impliqués dans la protection du littoral à qui j’ai pu parler
La proposition de créer de nouveaux gisements d’huîtres pour sauvegarder l’écosystème du
135
136
Conclusion
L’habitat de l’huître, indigène ou importée, sauvage ou cultivée, constitue un paysage. Un paysage physique, culturel, économique, avec des acteurs variés et une complexité de dynamiques et d’enjeux divers. C’est un « paysage en soi ». Après avoir fait des recherches, interviewé des acteurs, fait une analyse du site à partir de la cartographie et des expériences sur le terrain, j’affirme que les paysages ostréicoles font autant partie du champ d’action du paysagiste que n’importe où ailleurs. Nos interventions dans le littoral ne doivent pas s’arrêter au cordon dunaire et la protection des plages mais peuvent, et doivent, s’étendre jusqu’aux limites les plus éloignées, créées à marée basse. L’huître est caractéristique des interconnexions entre l’économie, l’écologie et le paysage. Environ 40 % de la population mondiale vit à moins de 100 kilomètres de la côte (selon une étude faite par l’onu en 2007). La densité de population et d’activités économiques sur le littoral augmente, de même que les pressions sur les écosystèmes littoraux. Si le paysagiste travaille dans les épaisseurs des limites, les marges et les franges, alors les limites entre terre et mer font également partie de son domaine.
137
FIGURE 82 ACCÈS INTERDIT, SUZANNE KATZ 2019
138
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Glossaire
aop
Appellation d’Origine Protégée
aplimap
Association de la Protection du Littoral de la Maleconche
et des Pertuis charentais
crc
Comité Regionale Conchylicole
Épizootie Une maladie frappant, dans une région plus ou moins vaste, une espèce animale ou un groupe d’espèces dans son ensemble. Halophile
besoin de fortes concentrations en sel dans son milieu pour vivre
ifremer
Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer
plu
Plan Local d’Urbanisme
scot Le Schéma de cohérence territoriale (abrégé par l’acronyme scot
ou scot) est un document d’urbanisme français qui détermine,
à l’échelle de plusieurs communes ou groupements de communes,
un projet de territoire visant à mettre en cohérence l’ensemble
des politiques sectorielles notamment en matière d’habitat, de
mobilité, d’aménagement commercial, d’environnement et de paysage
smass
Syndicat Mixte d’Accompagnement du sage Seudre
Syndicat Mixte Un établissement public créé entre plusieurs personnes publiques
qui sont des collectivités territoriales.
zad
zone d’aménagement différé devenue « Zone à Défendre »
zadiste
Militant engagé dans la protection d’une zone à défendre (zad)
ou aussi appelée Zone d’Aménagement Différé : l’occupation
et la mise en culture d’une zad a pour but de repousser, voire
d’annuler, la construction sur celle-ci.
Tables des figures
Figure 1 : Depuis le balcon de ma mère Katz, Suzanne E. Depuis le balcon de ma mère. 2017, Camano Island, Washington. Aquarelle, graphite et encre. Figure 2 : Après le réveillon de Noël : bouteilles vides et coquilles d’huîtres « Après le réveillon de Noël : bouteilles vides et coquilles d’huîtres [Photographie De Presse] / Agence Meurisse. » Bibliothèque Nationale De France, Département Estampes et Photographie, EI-13 (2916), Paris, 26 Dec. 1936, catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb404994605. Image de presse Figure 3 : Le Morse et le Charpentier Tenniel, Sir John. « The Walrus and the Carpenter Speaking to the Oysters. » Through the Looking-Glass and What Alice Found There, Macmillan Publishers Ltd, 1871, Angleterre. Chapitre 4 Figure 4 : Les huîtres sont hermaphrodites Katz, Suzanne, photogramme d’après Mai Lan. « Les Huîtres. » Youtube.com, 4 Juillet 2013, https://www.youtube.com/watch?v=Vq2tWM_kssY. Figure 5 : Une affiche publicitaire Huîtres de toutes provenances. Arrivage tous les jours : [affiche] / Daniel dess. 40, r. des Jeûneurs. Lemercier. Paris. 1885. lithogr. en noir ; 90 x 65 cm. Bibliothèque Nationale de France, département Estampes et photographie, FT 6-ENT DN-1 (LEMERCIER). https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb42697331f 18 Juillet 2014.
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146
Figure 6 : Vendeuse d’huîtres au détail avec son étalage roulant : [photographie de presse] / Agence Mondial Agence de presse Mondiale Photo-Presse. Agence photographique, editor. « Vendeuse d’Huîtres Au Détail Avec Son Étalage Roulant : [Photographie De Presse] / Agence Mondiale. » Bibliothèque Nationale De France, Département Estampes et Photographie, EI-13 (2989), Paris, 23 Dec. 1932, catalogue.bnf.fr/ ark:/12148/cb41603164w. Figure 7 : un gros arrivage d’huîtres devant un restaurant parisien « Gros arrivage d’huîtres devant un restaurant parisien » : [Photographie De Presse] / Agence Mondiale. Bibliothèque Nationale De France, Département Estampes et Photographie, EI-13 (2989), Paris, 23 Dec. 1932, catalogue.bnf.fr/ ark:/12148/cb41603163j. Figure 8 : La vie d’une huître, Suzanne Katz Katz, Suzanne E. La vie d’une huître. 2019. Aquarelle, graphite et encre. Figure 9 : Une cartographie des buttes coquillières en France Katz, Suzanne, d’après google.maps et VERGER Fernand, Zones humides du littoral français : estuaires, deltas, marais et lagunes, Paris, éditions Belin, 2009 Figure 10 : Dessin des buttes d’après Auguste Rivière (1838), Extrait du Dictionnaire pittoresque d’Histoire naturelle (Cliché Bibliothèque Nationale de France). « Il semble qu’il y ait une part de fantaisie dans ces vues. En tout cas, il n’y eut jamais ni village ni maison sur les buttes, mais tout au plus une bergerie. »
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Rivière, A. - Notice sur les terrains d’atterrissement et, en particulier, sur les buttes coquillières de Saint-Michel-en-l’Herm. Paris, 1838 : 44 p. + 3 pi. h. t. [Extrait du « Dictionnaire pittoresque d’Histoire Naturelle et des phénomènes de la nature », article « Plages », t. 8, pp. 98-109 + pi. 569]. Figure 11 : Butte coquillière à New York, début xxe siècle Field, Irving A. « Heap of Shells from Mussels Which Have Been Pickled for the New York Market. The Shells Are Used as Cultch for Seed Oysters. » Field, Irving A. (1911) Food Value of Sea Mussels, Bulletin of the Bureau of Fisheries, Vol.29, 1909, Washington, DC : Government Printing Office, Seattle, 1911. Figure 12 : sans titre, Suzanne Katz, embouchure du chenal d’Arceau, Île d’Oléron Katz, Suzanne, sans titre, embouchure du chenal d’Arceau, Île d’Oléron. 13 Mar. 2019. Figure 13 : L’ostréiculture à Marennes-Oléron sur l’estran et en marais Katz, Suzanne d’après Pascale Legué Dupont, L’ostréiculture à MarennesOléron sur l’estran et en marais (Ifremer). La moisson des marins-paysans, Paris, Éditions de la Maison des Sciences de l’homme, Institut National de la Recherche Agronomique , 2004, 308 p Figure 14 : a. Fascine des huîtrières de Saint-Brieuc ; b. rameau d’une fascine (Coste, 1861). FIGUIER, Guillaume Louis. Les Merveilles De La Science, Ou Description Populaire Des Inventions Modernes. Vol. 3, Furne, Jouvet Et Cie, 1867
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Figure 15 : Pêcheuse d’huîtres - Île d’Oléron « Charente Inférieure. Île D’Oléron. Pêcheuse D’huître : [Carte Postale]. » Ville De Paris / Bibliothèque Marguerite Durand, Paris, 1931, bibliothequesspecialisees.paris.fr/ark:/73873/pf0000859269. Figure 16 : Trieuses d’huîtres - Château d’Oléron : [Carte Postale] « Trieuses D’huîtres Au Port (Île D’Oléron) : [Carte Postale]. » Ville De Paris / Bibliothèque Marguerite Durand, Paris, 1901, bibliotheques-specialisees.paris. fr/ark:/73873/pf0000858688? Figure 17 : Le chenal d’Arceau et l’horizon, 13 Mar. 2019. Katz, Suzanne, Le chenal d’Arceau et l’horizon, chenal d’Arceau, Île d’Oléron. 13 Mar. 2019. Figure 18 : Marée haute au parcs à huîtres, 13 Mar. 2019 Katz, Suzanne. Marée haute au parcs à huîtres. Île d’Oléron. 13 Mar. 2019. Aquarelle, graphite et encre. Figure 19 : Marée basse à la vasière, 13 Mar. 2019 Katz, Suzanne. Marée basse à la vasière. Île d’Oléron.13 Mar. 2019. Aquarelle, graphite et encre. Figure 20 : Un hangar ostréicole dans la perspective des claires, 13 Mar. 2019 Katz, Suzanne. Un hangar ostréicole dans la perspective des claires. Île d’Oléron. 13 Mar. 2019. Aquarelle, graphite et encre.
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Figure 21 : Des huîtres dans leurs paniers, submergées dans une claire, Île d’Oléron. 13 Mar. 2019 Katz, Suzanne, Des huîtres dans leurs paniers, submergées dans une claire, Île d’Oléron. 13 Mar. 2019. Figure 22 : Un capteur de naissains Katz, Suzanne. Un capteur de naissains,. 2019. Aquarelle, graphite et encre. Figure 23 : Des poches à huîtres Katz, Suzanne. Des poches à huîtres. 2019. Aquarelle, graphite et encre. Figure 24 : Parc à plat Katz, Suzanne. Parc à plat. 2019. Aquarelle, graphite et encre. Figure 25 : Parc sur tables Katz, Suzanne. Parc sur tables. 2019. Aquarelle, graphite et encre. Figure 26 : Une huître fine de claires avec la navicule bleue Katz, Suzanne. Une huître fine de claires avec la navicule bleue. 2019. Aquarelle, graphite et encre. Figure 27 : Une cabane ostréicole à la Baudissière avec une emplacement stratégique entre claires et chenal Katz, Suzanne. Une cabane ostréicole à la Baudissière avec une emplacement stratégique entre claires et chenal,. 2019. Aquarelle, graphite et encre.
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Figure 28 : Extrait de la carte d’état major, 1820- 1866 Katz, Suzanne d’après un extrait de la carte d’état major, 1820- 1866, geoportail.fr, 2019 Figure 29 : a, Bloc diagramme des salines et b, Bloc diagramme des claires ostréicoles et l’estran Katz, Suzanne. Bloc diagramme des salines, d’après une image satellite de google maps. 2019. Promarker, graphite et encre sur calque. Katz, Suzanne. Bloc diagramme des claires ostréicoles et l’estran, d’après une image satellite de google maps. 2019. Promarker, graphite et encre sur calque. Figure 30 : Une écluse au nord de l’Île d’Oléron, Katz, Suzanne, Une écluse au nord de l’Île d’Oléron, Île d’Oléron. 13 Mar. 2019. Figure 31 : Les écluses, la roche, la mer Katz, Suzanne, Les écluses, la roche, la mer, Île d’Oléron. 13 Mar. 2019. Figure 32 : Les bouchots des écluses, Katz, Suzanne, Les bouchots des écluses, Île d’Oléron. 13 Mar. 2019. Figure 33 : Ostrea edulis Katz, Suzanne, Ostrea edulis, 2019. Aquarelle, graphite et encre Figure 34 : Crassostrea angulata Katz, Suzanne, Crassostrea angulata, 2019. Aquarelle, graphite et encre
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Figure 35 : Crassostrea gigas Katz, Suzanne, Crassostrea gigas, 2019. Aquarelle, graphite et encre Figure 36 : Les marais de Charente-Maritime Katz,Suzanne, Les marais de Charente-Maritime, dessiné après la carte des marais de Charente-Maritime (ddae, 1986). Figure 37 : Les zostères, les nuages et la vase Katz, Suzanne, Les zostères, les nuages et la vase, Île d’Oléron, 13 Mar. 2019 Figure 38 : Le Pertuis charentais et le pont de l’Île d’Oléron Katz, Suzanne, Le Pertuis charentais et le pont de l’Île d’Oléron, Île d’Oléron, 14 Mar. 2019 Figure 39 : Où se trouve Willapa Bay ? Katz, Suzanne, Où se trouve Willapa Bay ?, Dessiné à partir de Google Maps. 2019 Figure 40 : Les montagnes et la mer, Willapa Bay Boidin, Romain, Les montagnes et la mer, Willapa Bay, Etats-Unis, Aout 2017 Figure 41 : Bloc Diagramme de Willapa Bay, Tau Rho Alpha, 1978 Tau Rho Alpha, Oblique map of Willapa Bay, 1978, https://pubs.er.usgs.gov/ publication/ofr781015
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Figure 42 : Carte de situation de Willapa Bay Katz, Suzanne, Carte de situation de Willapa Bay, dessiné à partir de Google Maps. 2019 Figure 43 : Les mouvements glaciales qui ont formé le territoire Katz, Suzanne, Les mouvements glaciales qui ont formé le territoire, dessiné d’après le « Regional map of Pleistocene glaciers, glacial lakes, and outburst floods » du site https://www.dnr.wa.gov/programs-and-services/geology/ explore-popular-geology/geologic-provinces-washington/columbia-basin#.2 Figure 44 : Un territoire complexe pre-colonialisation, avec des limites en mouvement et superposées entre les tribus Katz, Suzanne, Un territoire complexe pré-colonialisation, avec des limites en mouvement et superposées entre les tribus, dessiné à partir des cartes de https://native-land.ca. 2019 Figure 45 : Une récolte d’huîtres à Willapa Bay 1940 BERTELSON, Ernest B. Oyster Harvest, Willapa Bay, 1940. UW Special Collections, University of Washington, Seattle.UW Special Collections (UW2998). 2019. Figure 46 : Shoalwater Bay Reserve dans le partie Nord de Willapa Bay depuis 1866 Katz, Suzanne, Shoalwater Bay Reserve dans le partie Nord de Willapa Bay depuis 1866, dessiné à partir de United States. Bureau of Indian Affairs. United States. Office of Indian Affairs. Puyallup Agency. « Shoalwater Reserve, Nisqually Agency, (1879). » United States Congressional Serial
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Set, House Executive Document 1, Part 5. Report of the Secretary of the Interior; Being Part of the Message and Documents Communicated to the Two Houses of Congress at the Beginning of the Second Session of the Forty-Sixth Congress. In Three Volumes. Volume 1. [after p. 254], 1879. Y 1.1/2:Serial 1910 Map 2 at University of Washington Libraries Government Publications Section, Washington : Government Printing Office, 1879. University of Washington Libraries Government Publications Section, content.libraries.wsu.edu/digital/collection/maps/id/30. Figure 47 : Les délimitations des territoires des amers-indiens pré-traité Katz, Suzanne, Les délimitations des territoires des amers-indiens pré-traité, dessiné à partir des cartes de https://native-land.ca. 2019 Figure 48 : La maison de C. J. W. Russell et une maison longue de Chehalis C.J.W. Russell’s house and Indian lodge, Shoalwater Bay, 1857 de : Swan, James Gilchrist. The northwest coast ; ou, Three years’ residence in Washington Territory. New York, Harper & brothers, 1857. Plate 4, University of Washington : Special Collections ( UW 1638) Figure 49 : Cartes des milieux humides de Willapa Bay Katz, Suzanne, Cartes des milieux humides de Willapa Bay, dessiné à partir des cartes de U.S. Fish and Wildlife Service, National Standards and Support Team, wetlands_team@fws.gov | Esri, HERE, Garmin | Earthstar Geographics, https://www.fws.gov/wetlands/data/mapper.html Figure 50 : Carte des bancs d’huîtres indigènes Ostrea Lurida, 1849 Katz, Suzanne, Carte des bancs d’huîtres indigènes Ostrea Lurida, 1849, dessiné à partir de « Map of historical natural oyster bed extent based
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on Townsend (1896) » de Blake, Brady, et Philine S. E. Zu Ermgassen. « The History and Decline of Ostrea Lurida in Willapa Bay, Washington. » Journal of Shellfish Research, vol. 34, no. 2, 2015, pp. 273–280., doi : 10.2983/035.034.0208. p. 275 Figure 51 : Triptyque de Crassostrea gigas Katz, Suzanne, Triptyque de Crassostrea gigas, 2019. Aquarelle, graphite et encre Figure 52 : Les huîtres de Washington, a) Crassostra sikamea b) Ostrea lurida c) Ostrea edulis d) Crassostrea virginica Katz, Suzanne, Les huîtres de Washington, a) Crassostra sikamea b) Ostrea lurida c) Ostrea edulis d) Crassostrea virginica, 2019. Aquarelle, graphite et encre Figure 53 : Carte des parcs à huîtres actuels de Willapa Bay Katz, Suzanne, Carte des parcs à huîtres actuels de Willapa Bay, dessiné d’après figure 5 de l’article de Tallis, Heather M., et al. « Oysters and Aquaculture Practices Affect Eelgrass Density and Productivity in a Pacific Northwest Estuary. » Journal of Shellfish Research, vol. 28, no. 2, 2009, pp. 251–261., doi:10.2983/035.028.0207. Figure 54 : Culture d’huîtres à plat Katz, Suzanne, Culture d’huîtres à plat, 2019. Aquarelle, graphite et encre Figure 55 : Bouchots Katz, Suzanne, Bouchots, 2019. Aquarelle, graphite et encre
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Figure 56 : Bouchots en détail Katz, Suzanne, Bouchots en détail, 2019. Aquarelle, graphite et encre Figure 57 : Longline culture comme des vignes Katz, Suzanne, Longline culture comme des vignes, 2019. Aquarelle, graphite et encre Figure 58 : Les « Cultch » attachées aux fils Katz, Suzanne, Les « Cultch » attachées aux fils, 2019. Aquarelle, graphite et encre Figure 59 : Eric Hill, un ostréiculteur, avec ses poches d’huîtres individuelles, Jessey Tinseley, 2017 Tinsley, Jessey. « Eric Hill, the Director of Clam and Oyster Farming for Taylor Shellfish at Willapa Bay, Inspects the Mesh Bags That Cover a Large Oyster Bed at Willapa. » The Spokesman Review, The Spokesman Review, Willapa Bay, Washington, 17 Dec. 2017, www.spokesman.com/galleries/2017/ dec/17/oysters/. Figure 60 : Cultures d’huîtres individuelles en poches à marée basse Katz, Suzanne, Cultures d’huîtres individuelles en poche à marée basse, 2019. Aquarelle, graphite et encre Figure 61 : Cultures d’huîtres individuelles en poches à marée haute Katz, Suzanne, Cultures d’huîtres individuelles en poches à marée haute, 2019. Aquarelle, graphite et encre
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Figure 62 : Chalon ostréicole à grue et filières Katz, Suzanne, Chalon ostréicole à grue et filières, 2019. Aquarelle, graphite et encre, dessiné après une image de CREEA de 2006, http://creaa. pagesperso-orange.fr/Doc%20actualite/information_filieres_malconche.pdf Figure 63 : Oyster capital of the world, Jimmy Emerson 2011 Emerson, Jimmy. Oyster capital of the world, South Bend, WA, 2011 Figure 64 : New York, New York Katz, Suzanne New York, New York, dessiné à partir de Google Maps. 2019 Figure 65 : Une médiatisation forte Boidin, Harmonie, Une médiatisation forte, collage des captures d’écran des articles et sites d’internet, 2019 Figure 66 : a) cycle de vie d’une huître b) le cycle de vie d’une huître en élevage comme base du dessin des espaces public du littoral — de l’écloserie au récif, SCAPE Studio, 2009 « Oyster-Tecture. » SCAPE, SCAPE Studio, www.scapestudio.com/projects/ oyster-tecture/. Figure 67 : Une projection cartographique au 2050 du Sud de Brooklyn avec l’implémentation du projet Oystertecture par SCAPE Studio avec la création d’une réserve naturelle maritime, des espaces publics ostréicoles et une redéfinition des limites terrestres, 2009 « Oyster-Tecture. » SCAPE, SCAPE Studio, www.scapestudio.com/projects/ oyster-tecture/.
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Figure 68 : Une cartographie de la conchyliculture et l’emplacement des vasières, récifs d’huîtres, et marais salants au Sud de Brooklyn en 1776, SCAPE Studio, 2009 « Oyster-Tecture. » SCAPE, SCAPE Studio, www.scapestudio.com/projects/ oyster-tecture/. Figure 69 : Maquette des structures à la fois pour la création des récifs d’huîtres et l’espace public du littoral pour l’exposition au MOMA : Rising Currents, 2009 « Oyster-Tecture. » SCAPE, SCAPE Studio, www.scapestudio.com/projects/ oyster-tecture/. Figure 70 : Les blocs de construction d’un récif artificiel forment une briselame, SCAPE Studio, 2014 « Living Breakwaters Rebuild By Design Competition. » SCAPE, www.scapestudio.com/projects/living-breakwaters-competition/. Figure 71 : Récifs d’huîtres protègent le littoral des ondes de mer et des inondations pendant des tempêtes, SCAPE Studio, 2014 « Living Breakwaters Rebuild By Design Competition.» SCAPE, www. scapestudio.com/projects/living-breakwaters-competition/. Figure 72 : Coupes comparatives d’un récif artificiel et un récif artificiel en brise-lame, SCAPE Studio, 2014 « Living Breakwaters Rebuild By Design Competition. » SCAPE, www.scapestudio.com/projects/living-breakwaters-competition/.
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Figure 73 : Programmation d’un littoral ostréicole public, SCAPE Studio, 2014 « Living Breakwaters Rebuild By Design Competition. » SCAPE, www.scapestudio.com/projects/living-breakwaters-competition/. Figure 74 : Coupe Perspective ou Axonométrique des milieux variés depuis les récifs aux plages, SCAPE Studio, 2014 « Living Breakwaters Rebuild By Design Competition. » SCAPE, www.scapestudio.com/projects/living-breakwaters-competition/. Figure 75 : Vue à vol d’oiseaux d’ensemble du projet de Living Breakwaters, SCAPE Studio, 2014 « Living Breakwaters Rebuild By Design Competition. » SCAPE, www.scapestudio.com/projects/living-breakwaters-competition/. Figure 76 : Oysters blowing up my phone Katz, Suzanne et Boidin, Harmonie. Oysters blowing up my phone, collaboration 2019 à partir des images du compte Instagram du BillionOysterProject, https://www.instagram.com/billionoyster/?hl=en, 2019 Figure 77 : Skyline de New York Gonnord, Kevin. Figure 78 : Des claires délaissées retournées aux plantes halophÎles Katz, Suzanne. Des claires délaissées retournées aux plantes halophÎles, 12.03.2019. Aquarelle, graphite et encre.
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Figure 79 : Carte des zones de submersion marine après Xynthia en février 2010 Katz, Suzanne. Carte des zones de submersion marine après Xynthia en février 2010, dessiné d’après https://www.lpo.fr/images/espaces_proteges_natura_2000/reserves_ naturelles/Moeze/maj_2019/syntheseplangestionrnmo2017_bat_logos_ok.pdf, p. 7 Figure 80 : Carte des communes ostréicole et l’emplacement du projet des filières Katz, Suzanne, Carte des communes ostréicole et l’emplacement du projet des filières, dessiné après le Figure 1. Les communes ostréicoles du bassin de Marennes-Oléron (Ifremer) dans La moisson des marins-paysans, de LEGUÉ DUPONT, Pascale p. 4, et http://aplimap.blogspot.com/p/le-projet-des-filieres.html, et La Carte Maritime du Pertuis Charentais. Figure 81 : Cabanes ostréicoles à Fort Royer, Nathalie Boidin, 2019 Boidin, Nathalie. Cabanes ostréicoles à Fort Royer, 2019. Figure 82 : Accès Interdit, Suzanne Katz 2019 Katz, Suzanne, Accès Interdit, Île d’Olèron, 2019
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Annexes
Les personnes interviewées: Alice Pauwels, directrice du Musée, Cité de l’Huître, À La Tremblade, ancienne ostréicultrice. 12.03.2019 Jean Philippe David, responsable du Syndicat Mixte Accompagnement SAGE Seudre, Géographe de formation, à Royan dans les bureau de la Communauté d’Agglomération Royan Atlantique, 14.03.2019 Joël et Nathalie Boidin, Nouveaux arrivées sur l’Île d’Oléron depuis 2 ans par la construction d’une maison de vacance à la Menounière. 09. 03. 2019 Michel Parent, maire de Chateau d’Oléron et ancien ostréiculteur, 14.03. 2019 Nathalie Bourret, Réserve Naturelle Nationale (RNN) de Moëze-Oléron, 12.03.2019, par téléphone. Animatrice. Moëze. Noelle Demyk, présidente de l’APLIMAP, à Fort Royer, Île d’Oléron, ancienne professeur de la géographie à l’Université Paris Diderot 7, maintenant retraitée et habitante sur l’Île d’Oléron. 13. 03. 2019
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Exemple d’un questionnaire d’enquête :
Vous êtes ostréiculteur, guide
Pouvez-vous me décrire une expérience
touristique, enfant ou petit-enfant
forte que vous avez eu dans le territoire
d’ostréiculteurs ?
ostréicole ?
L’ostréiculture vous évoque-t-elle un
Est-ce qu’il y a des éléments qui vous
paysage particulier, et si oui comment
tiennent à cœur dans un paysage
le décririez-vous?
ostréicole ?
Perception de l’huître :
Est qu’il y a des éléments qui vous
Quand vous pensez à l’huître, qu’elle image vient? Comment est-elle (l’huître) apparue dans votre parcours de vie ? Est-ce que vous pouvez me raconter votre première souvenir de manger une huître ? Où étiez-vous ? Perception du paysage:
rendent désagréables le paysage ou le travail ostréicole au sein de son territoire ? Comment ? Avez-vous vu des changements du territoire vis-a-vis l’industrie ostréicole ? Si oui, quel changements et depuis combien de temps ? Est-ce que ces changements ont changé votre rapport au paysage ? Quelle transmission (avec la génération
Est-ce que vous êtes grandi proche
passée, et avec la jeune génération),
du littoral ?
quelles évolutions du métier,
Les huîtres sont considérées comme une
de l’industrie ?
espèce clé de voûte, votre organisation
Dans l’avenir, est-ce que vous imaginez
est-elle impliqué dans la protection ou
des grand changements de ces
la restaurations des récifs, bancs ou lits
territoires ? Si oui, quoi et comment ?
d’huîtres sauvages ?
Plus particulièrement, est-ce qu’il y a
L’ostréiculture vous évoque-t-elle un
des changements ou évolutions de
paysage particulier, et si oui comment
ce territoire que vous souhaitez voir ?
le décririez-vous ? Quels sont les éléments clés ?
Imprimé en mai 2019 à l’Imprimerie Launay, Paris.
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