ACTIFS-MAG_Format_Dossier-TEST 08/10/13 17:53 PM Page 10
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Enquête
www.agefiactifs.com
DU 11 AU 25 NOVEMBRE 2013 / N° 552
Enquête
N° 552 / DU 11 AU 25 NOVEMBRE 2013
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Spécial CIP
Spécial CIP
Une réflexion sur l’avenir du conseil patrimonial v L’Agefi Actifs et Harvest dressent, à travers une enquête menée auprès d’une cinquantaine d’acteurs, un état des lieux du conseil patrimonial v Il en ressort qu’une mise à plat de l’organisation semble nécessaire afin de restaurer la valeur ajoutée de la gestion privée
par CHARLOTTE SIMMONS
Seul le conseil permet à la gestion de patrimoine de se distinguer aujourd’hui, mais cela nécessitede le rendre attrayancontrepartie”
@SimonetAgefi + E-MAIL charlotte_simmons @actifs.fr
L
’Agefi Actifs et Harvest ont souhaité mener une enquête auprès d’une cinquantaine de professionnels de la gestion de patrimoine − principalement des secteurs de la banque et de l’assurance − dans la perspective de dresser un état des lieux des métiers du conseil patrimonial, mais également d’en démocratiser la pratique en recueillant les bons usages qui pourraient être déployés dans les réseaux. Il en est résulté un rapport (lire l’encadré p. 12) qui analyse à la fois la qualité et l’amélioration du conseil, les moyens mis en oeuvre, les pratiques de distribution des produits financiers, les relations entre banques retail et gestion privée ainsi que l’évolution possible des acteurs du marché. Confiée à Gilbert Habermann, cette étude révèle finalement l’inquiétude des acteurs du monde de la gestion privée face à l’érosion forte du PNB et, plus encore, de la marge nette qui pourrait conduire à rompre avec la logique du conseil. Tous les participants à l’étude s’accordent sur un point fondamental : le contexte économique et les ponctions fiscales vont conduire à réduire le « gâteau » de la gestion privée et
CLAUDE LAMBERT directeur de la gestion de patrimoine, Groupama SA
cette réalité est loin d’avoir été assimilée par l’ensemble des hiérarchies. En toile de fond, les professionnels s’interrogent sur la manière de restaurer la valeur ajoutée de la gestion privée, restant animés par la volonté de délivrer un conseil adapté à la situation du client. Démocratisation du conseil. Comme le souligne Gilbert Habermann en introduction, « pratiquement uniquement axé sur la gestion de portefeuille, le métier a longtemps bénéficié en tendance de la valorisation substantielle des actifs patrimoniaux, tout était essentiellement axé sur la gestion de portefeuille (...) L’accompagnement du client en matière de conseil était considéré alors comme un adjuvant, très généralement marginal, destiné avant tout à permettre une offre différenciante par rapport aux concurrents. Depuis cette période bénie, de nombreux bouleversements sont intervenus, qui ont modifié le contexte
L’entretien avec Gilbert Habermann, consultant
C’est vers un élargissement du conseil qu’il faut s’engager L’AGEFI ACTIFS. Un sentiment de fatalisme et d’impuissance se dégage de l’étude quant à l’avenir de la profession. Comment l’expliquez- vous ? Les professionnels du conseil patrimonial s’estiment, non sans raisons, victimes d’une sorte de « complot universel » qui les frappe injustement. Contexte économique durablement récessif, défiance marquée à l’encontre des banques et de la finance, opprobre largement répandue à l’égard des détenteurs de patrimoines, avalanche d’une fiscalité sur les richesses jugée confiscatoire, mise en cause par Bruxelles des fondements de leur modèle économique au nom de la transparence et, pire encore, contestation par
la clientèle de la valeur ajoutée de leurs prestations… A quoi s’ajoute l’inquiétude propre à cette activité devant l’effet de ciseaux menaçant entre le haut niveau d’investissements que réclame le traitement de la clientèle haut de gamme et l’érosion des marges des produits commercialisés, notamment du fait d’une demande axée vers le refus du risque. La facturation du conseil est-elle une voie sérieusement envisagée ? Tous les professionnels qui − à juste titre − adorent leur métier, vivent mal cette accumulation de vents contraires.
Chacun sent bien que la solution pour retrouver un compte d’exploitation équitablement équilibré consisterait à facturer des honoraires au moins pour les prestations les plus sophistiquées. Ils sont néanmoins en majorité pessimistes sur la capacité à conduire une telle révolution dans un environnement aussi défavorable. Beaucoup se mordent les doigts aujourd’hui d’avoir, il y a trente ans, manqué à ce point de lucidité en ne faisant du conseil juridique et fiscal qu’un complément, hélas gratuit, à la gestion financière qui apportait alors une
Un an d’enquête, 50 entretiens et 10 propositions L’Agefi Actifs et Harvest ont initié il y a plus d’un an un « Etat des lieux du conseil patrimonial » au travers d’une grande enquête ayant fait appel au témoignagede 50 praticiens. Plus de douze mois auront donc été nécessaires pour mener à bien cette véritable réflexion de Place, qui ne peut que constater la décrue de rentabilité des intervenants et les interrogations que cela suscite quant aux offres et services à délivrer à une clientèle haut de gamme, par essence exigeante. . SYNTHÈSE DES DIX PROPOSITIONS 1) Mettre le client au cœur du système d’information Les outils de gestion de la relation client souffrent d’un défaut majeur de naissance : les informations qui y sont saisies par les conseillers ne sont pas ou peu utilisées. C’est tout le système qu’il faut revoir et qu’il faut faire vivre à chaque contact, toutes les données communes aux différents systèmes . 2) Valoriser le modèle du conseil patrimonial La profession gagnerait à communiquer sur les éléments différenciant le service patrimonial : la compétence du conseiller, la richesse des solutions, l’investissement-temps pour proposer une solution adaptée, l’objectivité du conseil…
3) Segmenter plus finement l’activité de conseil patrimonial Sous le vocable Gestion privée/Gestion de patrimoine, on s’adresse à des typologies de clientèle qui n’ont pas grand-chose en commun. Seule la clientèle haut de gamme doit avoir accès à une ingénierie patrimoniale personnalisée. 4) Aller vers la rémunération du conseil La facturation doit être vendue comme la juste contrepartie de la valeur ajoutée, notamment au moment où elle est sollicitée (structuration patrimoniale initiale, ou lors d’interventions sophistiquées. 5) Amplifier/réorienter la formation des conseillers Face aux exigences réglementaires, les sensibiliser à l’éthique professionnelle. Une formation aux risques contentieux permet de se prémunir contre le risque de défaut de conseil. 6) Faire travailler ensemble les conseillers entreprises et les conseillers patrimoniaux Une grande partie du patrimoine des en-
trepreneurs se situe dans leur entreprise. Cette collaboration devrait permettre une meilleure identification des potentiels et des risques représentés par un client entrepreneur. 7) Elargir le champ du conseil Une vision actif/passif est aujourd’hui différenciante. Elle permet de cerner les diverses préoccupations : choix de vie des clients et de leur famille. 8) Intégrer de façon volontariste la qualité et la pérennité de la relation client dans l’appréciation des conseillers La grille d’appréciation doit impérativement être orientée « qualité » en retenant les efforts de formation, les découvertes patrimoniales complètes et bien documentées. 9) Travailler activement à la mise en place de processus adaptés à la spécificité de la clientèle Les maîtres mots sont disponibilité, réactivité, respect des délais… La clientèle haut de gamme attend d’autant plus un service impeccable. 10) Des autorités de tutelle qui se concertent plus Depuis la mise en
œuvre des réglementations MIF, un pôle commun ACP-AMF a été créé afin, entre autres, de contrôler la bonne exécution des directives. LE COMITÉ DE PILOTAGE Laurent Bastin, directeur général Oddo Banque Privée Gilles-Emmanuel Bernard, président Laboratoire Assurance Banque Régis Buquet, directeur du marché gestion privée Caisse d’Epargne Ile-de-France Alain Gerbaulet, BPCE, chargé de l’animation gestion privée des Caisses d’Epargne Cédric Goguel, responsable du marché patrimonial et de la banque privée - Caisses régionales de Crédit Agricole SA Claude Lambert, directeur de la gestion de patrimoine - Groupama SA Serge Moreno, directeur marketing épargne et clientèle patrimoniale - AG2R La Mondiale Pour aller plus loin « Etat des lieux du conseil patrimonial -Gestion privée-retail : les bases d’un renouveau » Renseignements : L’Agefi Actifs, Armelle Dutheil : tél. 01 53 00 27 22 adutheil@agefi.fr
rentabilité substantielle à l’activité de gestion privée. Cette époque est, du moins pour l’instant, révolue. Comment se fait-il que la gestion actif/passif, et plus précisément la prévoyance ou la dépendance-santé, ne soient pas davantage perçues comme l’avenir du conseil patrimonial alors que certains cabinets ont de belles réussites dans ce domaine ? Soulignons en premier lieu que la performance des portefeuilles reste, ou devrait rester, aux yeux d’une majorité de professionnels, ce qui constitue la valeur ajoutée essentielle de leur métier. Ils ont la nostalgie des marchésqui montaient et leur discours était.
de la gestion patrimoniale ». Le conseil patrimonial, composante essentielle de la gestion privée, s’est, selon l’enquête, sensiblement développé depuis dix ans avec le recrutement de collaborateurs de plus en plus compétents dans un marché très concurrentiel et soumis à une réglementation toujours plus abondante, axée sur la protection des intérêts des épargnants. Néanmoins, la qualité du conseil pâtirait des nouvelles contraintes réglementaires. Quant au fait de savoir si les pratiques commerciales en matière de distribution des produits financiers ont été revues à la suite du rapport Delmas-Marsalet, les avis sont partagés mais tous tiennent à souligner que la pression commerciale est toujours aussi vive.
La bonne adéquation entre le profil du client, la compétence du conseiller patrimonial et la largeur de l’offre doit être mesurée systématiquement » SERGE MORENO directeur marketing épargne et clientèle patrimoniale, AG2R La Mondiale
Nécessité de rentabiliser le conseil. Face à l’effritement de la rentabilité de la gestion privée, 80 % des praticiens interrogés espèrent « une remontée des marchés qui permettrait de vendre à nouveau le risque,