Des gaulois à cavalaire

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La saga de la famille Wallon Par André Falconnet Président de l’association archéologique Aristide Fabre Denis Wallon, le fouilleur du Montjean, fait partie de ces personnes rares qui ont contribué de façon majeure à la connaissance, la mise en valeur et la protection de sites préromains inédits du massif des Maures. Pédiatre parisien, il consacrait à Sainte-Maxime, sa résidence secondaire, tous ses loisirs de vacances à arpenter les collines des Maures, comme un siècle avant, Aristide Fabre, sériciculteur (éleveur de ver à soie) maximois d’origine, avait consacré ses temps libres à inventorier et décrire tous les sites préhistoriques et antiques du massif, établissant une carte de l’occupation humaine de ces périodes et des voies de circulation. La mairie actuelle de SainteMaxime est édifiée à l’emplacement de la maison familiale d’Aristide Fabre et de son exploitation. C’est dans cette ville que fut créée, sous l’autorité de Denis, l’Association Archéologique Aristide Fabre, en 1996, dont il fut le président fondateur. Il savait communiquer sa passion et son avidité de connaissances du passé, en tout premier lieu à sa famille. Le compte-rendu réaliste de son fils Philippe « ah mes aïeux, quelle famille » joint dans l’exposition est significatif de cette période de fouille intensive. Autodidacte en archéologie, il apprenait vite auprès de maîtres reconnus dans ce domaine, comme Messieurs Py, Goudineau, Fernand Benoit, Gaëtant Congès, n’hésitant pas à rencontrer lors de voyages en Grèce (une dizaine de séjours) des professeurs éminents, en particulier Madame Virginia Grace, pour l’identification d’un sceau grec trouvé au Montjean ou d’autres vestiges grecs. Il était frappé par la grande simplicité, l’accueil chaleureux de ces sommités professionnelles, indifférentes au statut bénévole ou professionnel de leur interlocuteur.

Ses fouilles Il s’était vu confié par les services de l’Archéologie régionale, plusieurs fouilles : le Montjean bien sûr, et sur la commune de Sainte-Maxime, l’oppidum de Peygros de la même période, et l’exploration des mines antiques de l’Acate de Vaillas dont la famille dressa une carte précise, sans compter les prospections et sondages divers. Mais aussi Maravieille, autre oppidum important de l’Age du Fer à La Môle, des VIe et Ve siècles avant J.-C. Il y découvrit, en 1980, un trésor monétaire romain du IIIe siècle après J.-C. de 1745 pièces romaines en bronze dont 3 deniers, représentant 14 empereurs romains, entre 263 et 285 après J.-C., stockés dans un pichet sommairement caché 18 siècles auparavant, dans le rempart de l’Age du Fer. Ce trésor en excellent état, confié au Cabinet des Médailles à Paris, a fait l’objet d’une publication en 1983, thèse de Madame Sylviane Estiot.

Le Montjean : la naissance d’une passion C’est sur ce site que naquit la passion de Denis pour l’archéologie. Un jour de 1962, lors d’une visite au Docteur Regner, son ami, il découvrit l’oppidum. Une vraie passion était née : le Prince charmant venait de découvrir la Belle endormie et il n’eut de cesse, sa vie durant, de la tirer de son sommeil deux fois millénaire.


Le sauvetage du site Apprenant peu après en 1977, qu’une tour de surveillance des incendies devait être installée, au sommet, après arasement de l’oppidum, Denis fit déplacer le projet à l’emplacement actuel, et sauva ainsi l’oppidum. Il ignorait encore qu’il en ferait le sujet de sa thèse de maîtrise en décembre 1984, présentée avec succès à l’Université de la Sorbonne Paris I. Grâce à ses travaux, le site fut inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques, le protégeant pour l’avenir. Une série de campagnes de fouille se déroulèrent depuis le sondage de 1962, durant les vacances d’été et de Pâques, en 1978, 1979, 1980 jusqu’en 1990, livrant un matériel abondant, grec, massaliote et local.

Les intrépides du Montjean ou « la valeur n’attend pas le nombre des années » La passion communicative de Denis emporta l’adhésion de toute la famille, y compris des plus jeunes : Aude (4 ans), Philippe, Abel, Gilles, mais aussi neveux, nièces et amis : Laurent Dognin, cheville ouvrière du site avec Gilles, Nathalie Potel, Pierre Frement, Jean Marie Croyal, Jean Michel Vallat, Jacques Olivier David, Caroline Plateau, Odile et Pascal Goetz, Isabelle Cottet, parmi les plus assidus durant ces premièr es années et bien sûr Geneviève, la maman attentive et dévouée, la mère nourricière de tout ce petit monde. Quel gros travail de prévoir avant l’ascension du Montjean boisson et alimentation (pain, pommes de terre, pâtes, jambon, saucisson, choucroute, etc) et tenir le choc sur place face à ces bouches affamées ! Comme il n’y avait pas de chemin d’accès, il fallait tout monter à dos d’homme : tentes, nourriture, outils divers, brouette et pioches, en suivant en ligne droite les « drailles » pentues. Lever tôt pour le départ de Sainte-Maxime, vers 5h, et bien sûr, pas question de descendre le soir : om campait sur place la nuit, sous les étoiles… Le jour chacun retrouvait son emplacement de la veille, un carré bien délimité dont il était seul responsable sous la direction de Denis qui payait de sa personne. Et quand l’ardeur des troupes faiblissait, monté sur le rempart, il leur contait la vie de ces ligures intrépides et entretenait leur passion. Par la suite, d’autres travaux furent conduits avec des volontaires locaux dans les années 1990 (Messieurs Romagnan, Gautier, etc), sans oublier l’apport bienveillant et professionnel de Gaëtan Congès, Conservateur en chef de patrimoine à la DRAC et de l’abbé Boyer, en charge du Var. 50 ans après ces premières fouilles, le Montjean demeure le site de l’Age du Fer le plus riche du Var et le plus emblématique. Mais il restera toujours le témoignage édifiant de la passion, de l’amour des ancêtres et du respect qu’ils inspirent, mais aussi un exemple à suivre : comment des particuliers étrangers à la région, archéologues amateurs, résidant seulement en été dans le Var, totalement bénévoles, ont su à force d’ingéniosité, de travail, d’implication, surmonter ces handicaps pour sauver ce site majeur du Var, le faire connaître et reconnaître par toute la profession et la population.

C’est l’émouvante saga des Wallon








Jarre peinte Céramique indigène VIème siècle av. J.-C. Collection particulière Une des sept urnes à décor géométrique peint retrouvées au Montjean. Celle-ci était peinte sur presque toute sa hauteur avec une barbotine crème sur le fond rougeâtre. Unique par son décor dont on ne connaît pas d’équivalent, cette pièce est exceptionnelle.

Fond de faisselle Céramique indigène Vème siècle av. J.-C. Collection particulière

Col d’amphore étrusque VIème siècle av. J.-C. Collection particulière Une cinquantaine de tessons représentant environ 25 à 30 amphores étrusques ont été retrouvés au Montjean. Circulant essentiellement au VIème siècle avant J.-C., elles sont parmi les plus anciennes céramiques du site.

Fond de coupe attique à vernis noir Vème siècle av. J.-C. Collection particulière Plus de 20 coupes attiques (produites par les ateliers d’Athènes entre le VIe et le IVe siècle avant J.-C., et largement exportées vers la Méditerranée occidentale) ont été recensées au Montjean. Le vernis qui couvre cette céramique, toujours passé au pinceau, est très sombre, résistant, brillant, et présente une grande qualité du fait d’une cuisson à haute température.


Amphore massaliète Col et panse Vème siècle av. J.-C. Collection particulière Type caractéristique des amphores vinaires produites à Marseille (de son nom antique Massalia), colonie fondée par les grecs de Phocée en 600 avant J.-C. Elles sont reconnaissables à leur forme en toupie dont la panse arrondie se termine par un bouton.

Estampille « M » sur col d’amphore massaliète Vème siècle av. J.-C. Collection particulière L’estampille est une marque imprimée dans la pâte avant cuisson de l’amphore, à l’aide d’une matrice en métal ou en terre cuite. Elle indique parfois le nom de l’exploitation viticole ou encore celui de l’atelier de production des amphores.

Anse d’amphore grecque archaïque avec cachet estampillé Vème siècle av. J.-C. Collection particulière Ce cachet, au décor de spirales très atypique, pose de nombreuses interrogations sur son origine. Les données de l’archéologie et de la pétrographie convergent pour en faire une importation - très exceptionnelle et archaïque - de Méditerranée orientale. .


Illustrations de Jean Soutif Toutes les illustrations sont des aquarelles originales créées par Jean Soutif pour la ville de Cavalaire sur mer. Ancien élève de l’école d’arts graphiques de la rue Corvisart à Paris, Jean Soutif travaille depuis plus de 15 ans dans l’illustration et la reconstitution historiques. Il a notamment dessiné pour les Monuments Nationaux et le CNRS. Ses dessins furent également publiés dans les Cahiers de Science et Vie, le Nouvel Observateur, la collection Découvertes de Gallimard…

Remerciements

Espace Archéologique Municipal Aristide Fabre Maison de la Mer - 50, rond-point Saint-Exupéry - 83240 Cavalaire sur mer Tél. 04 94 01 92 18 - Email : archeologie@cavalaire.fr

© Service Culturel de Cavalaire sur mer / Droits réservés - Reproduction interdite

Tout ce que nous savons de l’oppidum du Montjean, nous le devons au travail admirable et titanesque de Denis Wallon à qui nous rendons ici un humble et très sincère hommage. Nous tenons également à remercier chaleureusement la famille de Denis Wallon, et en particulier son épouse Geneviève Wallon, pour le soutien qu’elle nous a apporté dans cette exposition. Enfin, l’association archéologique Aristide Fabre, en la personne de son président André Falconnet, demeure un précieux allié pour que s’accomplisse la mission de l’Espace archéologique municipal de Cavalaire sur mer : l’accès au plus grand nombre de l’histoire antique de Cavalaire sur mer. A tous, un grand merci.


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