revue J'aime beaucoup ce que vous faites

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revue littéraire & artistique numéro 3, hiver 07

Laetitia Sophie Aurélien Patrice Michel Thomas Ariel Joseph Rachel Benjamin Laure François Claire-Lise Marie

Bénat Calle Froment Hamel Houellebecq Hirschhorn Kenig Kosuth Labastie Lafore Limongi Morellet Panchaud Redonnet Unglee


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© éditions « j’aime beaucoup ce que vous faites.../...ça fait toujours plaisir » dépôt légal / décembre 2007 ISSN 1779-1227


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revue littéraire & artistique numéro 3, hiver 07


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couverture © Laetitia Bénat

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Sommaire

Joseph Kosuth / Du phénomène de la bibliothèque / 8 Marie Redonnet / Le vieux serrurier / 16 François Morellet / Poèmes en trois dimensions / 20 Sophie Calle / Lettre à F. / 28 Rachel Labastie / Bibliothèque du bonheur / 60 Patrice Hamel / Sans anamnèse / 68 Michel Houellebecq / Mourir / 76 Laure Limongi / Alrisha / 90 Ariel Kenig - Benjamin Lafore / La pause (portfolio) / 98 Claire-Lise Panchaud / Bataille navale / 116 Thomas Hirschhorn / Artist-Lectures / 130 Aurélien Froment / De L’Ile à hélice à Ellis Island / 148 Unglee / Disparition / 156


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Fidèle à la ligne directrice initiée dans les premiers numéros, ce troisième opus de la revue « J'aime beaucoup ce que vous faites » propose de naviguer, au sens propre comme au figuré, dans les eaux troubles du texte in progress. La multiplication exponentielle des textes et des images à l'ère du village global pousse artistes et écrivains à repenser le langage et l’écriture sous des formes nouvelles, souvent mouvantes et instables. Plus que jamais la production contemporaine se saisit d'archives, de références, de citations pour mieux en réactualiser les formes. À la fin des années 70, Julia Kristeva définissait l'intertextualité comme un processus d'écriture constitué d'emprunts, de traces plus ou moins conscientes d'une mémoire des textes lus, renvoyant ainsi l'auteur, dont Barthes avait annoncé la disparition, à la position seconde d'ouvrier productif. Il assumerait alors une “auctorialité” partagée, puisant dans des sources antérieures le matériau à réinvestir. Aujourd'hui, il semblerait que cette notion d'intertextualité soit au coeur de nombreuses pratiques dont ce numéro, par de nombreux aspects, se fait l'écho. Loin d'être restée la démarche presque inconsciente que rapportait à l'époque Kristeva cette approche s'effectue aujourd'hui de manière réfléchie, revendiquée, assumée. C’est cette navigation qui est au coeur des propositions réalisées par les artistes et auteurs de ce numéro. C.A. / A.V.


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Joseph Kosuth

Artiste né à Toledo (Ohio, USA) en 1945. Figure majeure de l’art conceptuel dont il est l’un des principaux pionniers, il utilise, dès le début des années 60, le langage comme fondement de son travail. Basant sa réflexion sur la production de définitions de l’art, il matérialise des propositions tautologiques qui apparaissent sous forme de “statements”. Dans le projet “Du phénomène de la bibliothèque” présenté à la Galerie Almine Rech en 2006, il rend hommage aux écrivains et philosophes qui à l’instar des artistes sont autant de “passeurs” d’une réflexion sur le monde, et rend visible les liens qui réunissent de livre à livre l’entre-deux des textes.


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Joseph Kosuth, Du phénomène de la Bibliothèque (Michel Foucault) 2006 verre sérigraphié, néons, livres Courtesy Galerie Almine Rech, Paris


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Joseph Kosuth, Du phénomène de la Bibliothèque (détail) 2006 verre sérigraphié, néons, livres Courtesy Galerie Almine Rech, Paris


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Joseph Kosuth, Du phénomène de la Bibliothèque (détail) 2006 verre sérigraphié, néons, livres Courtesy Galerie Almine Rech, Paris


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Joseph Kosuth, Du phénomène de la Bibliothèque (vue d’ensemble) 2006 verre sérigraphié, néons, livres Courtesy Galerie Almine Rech, Paris


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Marie Redonnet

Ecrivain, née en 1948. Elle a publié dix-sept livres dans plusieurs maisons d’éditions (POL, Minuit, Gallimard, Grasset et Flohic). Agrégée de Lettres, elle enseigne actuellement la littérature française à l’université du Colorado (USA). Voix singulière de la littérature contemporaine elle construit d’un livre à l’autre une oeuvre atemporelle qui tourne autour des questions d’héritage, de transmission, de deuil, et de la nécessité pour chacun de trouver sa propre voie. “le vieux serrurier” est un texte inédit.


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LE VIEUX SERRURIER

Le vieux serrurier fait les meilleures serrures de la région. Seules les maisons dont les portes sont équipées par ses serrures sont assurées de ne pas être volées. Dans la région, les voleurs sont de plus en plus nombreux et de plus en plus malins. Ils viennent à bout des systèmes électroniques les plus sophistiqués qui remplacent les vieilles serrures. C'est même devenu leur sport favori : démontrer que ces systèmes de sécurité dont on vante les mérites sont inefficaces et qu'ils savent les déjouer. Le vieux serrurier, très méticuleux et travaillant lentement à cause de son grand âge, ne fabrique plus qu'un petit nombre de serrures. Il ne peut satisfaire toutes les demandes. Il pourrait devenir très riche en n'offrant ses services qu'à ceux qui lui propose la plus forte somme d'argent. Les riches sont nombreux dans la région et ils sont prêts à le payer très cher pour se sentir enfin en sécurité dans leurs nouvelles propriétés. Mais il se moque de l'argent. Quand un client vient le voir pour lui passer commande, il prend son temps. Il demande à visiter sa maison. Il s'y installe comme s'il y était chez lui, le temps de mûrir sa décision. Il parle à chacun des habitants de la maison, leur pose toutes sortes de questions sans rapport avec son métier. Beaucoup n'apprécie pas son comportement et le renvoie, perdant ainsi toute chance d'avoir les fameuses serrures. D'autres pensent que c'est un charlatan acoquiné avec les voleurs de la région. Certains disent même qu'il serait payé par une puissante multinationale qui voudrait ruiner les petits entrepreneurs locaux et installer son monopole dans la région. Il est devenu un personnage controversé dont on parle. A cause de son grand âge et de ses méthodes de travail, il fait de moins en moins de serrures. Il se fait payer très peu, juste pour avoir de quoi vivre. Sa satisfaction, dit-il, est le bien-être et la sécurité que ses serrures apportent à ceux qui ont su gagner sa confiance. Personne n'a encore réussi à les imiter. Pourtant leur mécanisme paraît simple. Il doit y avoir un secret. Il le dément, affirmant que ses serrures n'ont rien de particulier. Elles sont seulement faites dans les règles de l'art. Mais voilà, qu'entend-il par les règles de l'art? Les jeunes serruriers qui sortent des écoles professionnelles ne semblent pas les connaître. Et il s'est bien gardé de les transmettre. Il a toujours travaillé seul, sans aucune aide. Les règles de l'art, dit-il, sont à la portée de ceux qui veulent les connaître. Il suffit d'étudier l'histoire de la serrurerie et d'observer attentivement les vieilles serrures d'autrefois faites par les maîtres serruriers. Les habitants de la région haussent les épaules. Pour eux, le vieux serrurier est un mystère.


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Un jour, il décide enfin d'arrêter de fabriquer des serrures. Il est devenu trop vieux pour travailler. Il ferme son atelier et le met en vente, avec tous ses outils. Un jeune serrurier étranger qui paraît sûr de lui se porte acquéreur. Il est en compétition avec de nombreux jeunes serruriers de la région qui espèrent s'emparer du secret du vieux serrurier en achetant son atelier. Encore une fois, il prend tout son temps. Il refuse de faire monter le prix de son atelier qu'il a fixé une fois pour toute. Il parle longtemps avec chaque jeune serrurier, le regarde travailler, sans jamais faire un seul commentaire. Finalement, il décide de vendre son atelier et ses outils au jeune étranger, créant un grand mécontentement parmi les jeunes serruriers. A part ceux qui ont eu le privilège de pouvoir lui acheter des serrures, il est très mal vu des habitants de la région. Il a reçu de nombreuses lettres d'insultes et même de menaces. On lui a conseillé de quitter la région s'il voulait finir sa vie en paix. Mais il se moque bien de tout cela. Il se retire dans la maison qu'il a passé sa vie à construire selon les règles de l'art. Elle est située à l'écart de la ville, à l'orée de la forêt, une maison idéale pour les voleurs. Mais il ne les craint pas. Sa maison est devenue un musée de la serrurerie. Toute sa vie, il a collectionné les serrures anciennes, dont personne ne voulait. Il ouvre son musée chaque dimanche après-midi. Mais personne ne s'intéresse à ses serrures. Ceux qui visitent son musée le font par curiosité, pour voir où et comment il vit. Le jeune serrurier étranger installé dans son ancien atelier est immédiatement surchargé de commandes. Il n'a pas les méthodes du vieux serrurier. Il engage des apprentis et les forme à ses méthodes. Il agrandit son atelier afin de pouvoir assurer toutes les commandes. Son commerce est florissant. Les vols dans la région ne sont plus aussi nombreux, comme si les voleurs s'étaient lassés ou qu'ils étaient partis dans de nouvelles régions. Le vieux serrurier vit à l'écart, occupé à rédiger ses mémoires. Il les publie à compte d'auteur. Très peu de lecteurs les achètent. Ce qu'il écrit n'intéresse personne, pas même le jeune serrurier étranger qui, grâce au rachat de son atelier, prospère. Il assure même des commandes pour d'autres régions, ne cessant de s'agrandir. Il y voit comme une punition. Malgré son grand art et l'entier dévouement à son métier ( il ne considère pas que le jeune serrurier étranger travaille selon les règles de l'art, mais selon les siennes propres) il y a quelque chose, se dit-il, qu'il n'a pas compris et qu'il a raté, une règle de l'art qu'il n'a pas respecté, mais laquelle ?


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François Morellet

Artiste né en 1926 à Cholet, où il vit et travaille. Figure majeure de l’abstraction géométrique et précurseur de l’art minimal, François Morellet tente d’éviter tout effet sensible par une posture de “neutralité”, privilégiant des principes de construction établis au préalable à une vision romantique de l’artiste inspiré. Transposant ses structures géométriques au sein de l’espace du livre il dévoile, non sans humour, une série de palindromes dissimulés dans l’apparente neutralité des lignes.


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François Morellet, Poèmes en trois dimensions Courtesy de l’artiste

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Photo Jean-Michel Lapelerie Courtesy Sophie Calle et la Galerie Emmanuel Perrotin

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Sophie Calle

Elle représente la France à la Biennale de Venise (2007). Lettre à F. a été réalisé avec des élèves de l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris dans le cadre d’un atelier d’écriture dirigé par l’artiste en 2002.


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J’ai onze étudiants. Huit filles. Trois garçons. Pour mieux les connaître, je leur ai proposé de vider le contenu de leur sac sur la table. On a trouvé de tout. Un tas de bizarreries. Ce cours commençait à me plaire. Alors que je pensais en avoir terminé avec ce procédé, une « nouvelle », prénommée Stéphanie, s’est présentée. Pour ne pas déroger à la règle, elle a vidé son sac. C’était lisse, sans surprises. Comme je lui en faisais la remarque, elle a dit qu’elle était simplement venue pour m’étudier. J’ai demandé des éclaircissements. Elle a raconté, sans embarras, son histoire. Je résume : elle est amoureuse, depuis des années, d’un jeune homme qui se dérobe. Elle l’attend. Il y a quelques mois, il aurait annulé une soirée avec elle, sous le prétexte d’un rendez-vous avec moi. Depuis, elle a perdu sa trace. Il s’appelle F. Je me souviens de F. Un jour il m’a rendu visite. Et je ne l’ai jamais revu. Mais je possède un avantage sur Stéphanie : j’ai son adresse email. Avec l’accord de l’intéressée, et sous le regard excité des autres, je décide de lui écrire sur le champ.


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Cher F. Je suis avec Stéphanie. Elle voulait se faire discrète, et finalement, elle se demande à quoi sert la discrétion. Pourquoi disparaître ? Stéphanie porte aujourd’hui un joli pull-over de couleur vert amande, elle a posé sa main gauche sur sa joue, elle me regarde vous écrire, d’un air intrigué, souriant, peut-être anxieux : Que suis-je donc en train de manigancer ? M’en aurait-elle trop dit ? Mais elle laisse faire. J’apprends que pour me voir, vous avez annulé votre dernier rendez-vous avec elle. Me feriez-vous le cadeau de la voir pour effacer toute trace de culpabilité. Amicalement, Sophie Calle. Il répondit le lendemain. Chère Sophie, Je reverrais avec plaisir Stéphanie si j’avais le moyen de la joindre. Le vert amande, j’en suis certain, lui va très bien. Je serai donc quelque part dans les arènes de Lutèce, samedi, autour de 14 heures à guetter cette couleur. F. Nous étions tous avides de connaître les répercutions de cette correspondance sur une idylle dont nous étions désormais les parrains et marraines. J’ai alors songé que, peut-etre, ils avaient tous des lettres qui traînaient dans leurs têtes. Des lettres difficiles à formuler, à envoyer. Des lettres qui résistaient. Des lettres à partager. Des lettres que nous pourrions ébaucher ensemble et qu’ils finiraient seuls. Je leur posai la question. Le premier à parler fut Gabriel. Sa mère allait épouser un certain Ilich Ramirez Sanchez, alias Carlos, condamné à perpétuité pour actes de terrorisme. Et ce futur beau-père, qu’il n’avait jamais rencontré, lui avait écrit depuis la prison où il purgeait sa peine. Carlos avait écrit à Gabriel et Gabriel souhaitait répondre à Carlos. Rien que ça. La suite ne fut pas décevante. Les lettres furent envoyées entre le 1er et le 30 avril 2002.


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Institut Français de New York 67 62 62 57 57 56 55 54 51 50 49 49 47 46 46 45 45 44 42 42 42 41 41 41 40 40 40 39 39 39 39 38 37 37 37 37 37 37 37

Saint-Exupéry, Antoine de Proust, Marcel Simenon, Georges Houellebecq, Michel Simenon, Georges Stendhal Flaubert, Gustave Nothomb, Amélie Flaubert, Gustave Simenon, Georges Grangé, Jean-Christophe Saint-Exupéry, Antoine de Ben Jelloun, Tahar Simenon, Georges Simenon, Georges Simenon, Georges Simenon, Georges Simenon, Georges Lévy, Marc Simenon, Georges Simenon, Georges Sagan, Françoise Simenon, Georges Simenon, Georges Dai, Sijie Nothomb, Amélie Simenon, Georges Beauvoir, Simone de Nothomb, Amélie Sagan, Françoise Simenon, Georges Duras, Marguerite Giroud, Françoise Nothomb, Amélie Simenon, Georges Simenon, Georges Simenon, Georges Simenon, Georges Simenon, Georges

Le Petit prince A la recherche du temps perdu Maigret tend un piège Les particules élémentaires Maigret et la jeune morte Le rouge et le noir Madame Bovary Stupeur et tremblements L’éducation sentimentale Maigret s’amuse Les rivières pourpres Vol de nuit L’enfant de sable L’ombre chinoise Betty Maigret et l’indicateur L’affaire Saint-Fiacre Le fou de Bergerac Et si c’était vrai Maigret en meublé Le veuf Dans un mois, dans un an La Marie du port Maigret à l’école Balzac et la petite tailleuse chinoise Hygiène de l’assassin Maigret et l’homme du banc Les mandarins Péplum Aimez-vous Brahms Maigret et le clochard L’Amant Mon très cher amour Cosmétique de l’ennemi Le Chien jaune Maigret et le tueur La Patience de Maigret Le pendu de Saint-Pholien Les autres


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PALMARÈS DES LIVRES LES PLUS EMPRUNTÉS centres culturels français à l’étranger

Institut Français de Londres 0084 0077 0076 0067 0051 0051 0048 0048 0047 0047 0046 0045 0044 0044 0043 0043 0042 0042 0042 0041 0040 0040 0039 0039 0038 0038 0038 0037 0037 0037

Nothomb Amélie Attentat Nothomb Amélie Mercure Nothomb Amélie Hygiène de l’assassin Nothomb Amélie Cosmétique de l’ennemi Proust Marcel Du côté de chez Swann Nothomb Amélie Antéchrista Houellebecq Michel Extension du domaine de la lutte Beigbeder Frédéric 99 F Nothomb Amélie Robert des noms propres Gavalda Anna Je l’aimais Nothomb Amélie Stupeur et tremblements Céline Louis-Ferdinand Voyage au bout de la nuit Vargas Fred Un peu plus loin sur la droite Gavalda Anna Je voudrais que quelqu’un m’attende quelque part Houellebecq Michel Plateforme Nothomb Amélie Métaphysique des tubes Maupassant Guy de Le Horla : et autres contes cruels et fantastiques Camus Albert La chute Sagan Françoise Aimez-vous Brahms... : roman Maupassant Guy de Boule de suif : et autres Contes normands. Sagan Françoise Un peu de soleil dans l’eau froide : roman Camus Albert L’Etranger Camus Albert La peste Maupassant Guy de Contes et nouvelles, 1 et 2 Maalouf Amin Le Rocher de Tanios : roman Vargas Fred L’homme aux cercles bleus Vargas Fred Debout les morts ! Pennac Daniel Monsieur Malaussène Simenon Georges Maigret et les petits cochons sans queue Schmitt Eric-Emmanuel Lorsque j’étais une oeuvre d’art


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Rachel Labastie Série Bibliothèque du bonheur 2006-2007 Défis spirituels / Reflets de l’âme / Langage des étoiles aquarelle sur papier dim. 56 x 76 cm courtesy de l’artiste


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Rachel Labastie

Née en 1978 à Bayonne, vit et travaille à Lyon. Rachel Labastie questionne les codes des spiritualités alternatives de la culture “new age” dans une oeuvre aux formes multiples (dessin, vidéo, son, installation). A l'heure de la montée en puissance d'une radicalisation des religions, ces nouvelles formes de croyances faites d'emprunts tant aux religions qu'aux sciences humaines ou à la science fiction, proposent de nouvelles idéologies communautaires censées répondre à cette quête d'une vie meilleure. N’hésitant pas à utiliser la technique de l'aquarelle (considérée comme désuète dans l'art contemporain), elle reproduit les livres aux contours délavés de cette spiritualité bon marché.


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Tout livre ou presque, une fois ouvert, présente une série de doubles pages séparées par une pliure. Curieusement, peu de textes en tirent profit, et la plupart pourrait être imprimée sur des rouleaux tout aussi bien. Celui qui suit est en revanche déduit de son lieu d'accueil. La place des mots qui le constituent n'est pas indifférente, puisqu'elle autorise divers agencements. Il est ainsi possible de parcourir à chaque fois le texte entier de trois manières : d'abord page après page, puis en choisissant toutes les pages de gauche avant de les faire suivre de celles de droite, enfin, en lisant ligne après ligne à travers les pages en vis-à-vis. Sans anamnèse est la suite de Au sens propre (publié chez Jean-Michel Place). La syntaxe instable est ici le pendant des graphèmes ambigus travaillés dans les Répliques.


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Patrice Hamel

Né en 1956 à Paris, où il vit et travaille. Patrice Hamel est plasticien, metteur en scène, concepteur lumière et théoricien. Sa carrière de plasticien débute en 1996 à Paris, où il expose ses Répliques. Depuis il développe cette réflexion dans laquelle chaque objet appréhendé visuellement est déterminé par le système perceptif. Qu'il s'agisse de lumière projetée, d'adhésif découpé ou de néon, les différentes parties qui constituent l'ensemble matériel de chaque pièce intitulée Réplique permettent de déchiffrer des ambigrammes selon le point de vue du regardeur.


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Tout a commencé par des faits sans importance pour les enquêtes qui nous ont empêchés d’oublier et de refuser le passage des données enregistrées concernant


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l’amnésie qui a résulté bien qu’elle fût décisive au vu des témoins contraints au silence après le crash de nombreux passagers dont nous étions venus retrouver


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les souvenirs épars. Pourtant nous les relations sous forme de feuilletons les plus épisodiques puisque nous


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les avions reconstitués en gardant notre contrôle pour maintenir en maints adeptes l’attrait du suspens pendant que nous versions des flots d’encre, sommes de toutes les contradictions. Puis,


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nous retrouvons et nous brouillons les pistes empruntĂŠes dans le but de transfigurer en acceptions multiples le sens de chaque mot,


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sans prévenir, nos esprits un instant perdus, jetons maladroitement quelques écrits sur le papier avant que nous ne fixions les conditions et les conséquences de notre propre volonté sans perdre de vue que nous pouvons toujours décrypter


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Michel Houellebecq

Né en 1958 à La Réunion. A la fois poète, écrivain, essayiste, il est considéré comme le précurseur d’une nouvelle génération d’écrivains traitant de la misère affective de l’homme contemporain et des travers de la société dans laquelle il survit. Ses premiers recueils de poésie publiés en 1991 passent inaperçus. Il y expose déjà les principaux thèmes qu’il développera dans ses livres suivants. Son premier roman Extension du domaine de la lutte est refusé par plusieurs éditeurs avant de le révéler au grand public. S’en suivra une dizaine de livres controversés. Mourir est un journal rédigé à la suite de l’écriture de son dernier roman L’impossibilité d’une île qu’il porte actuellement à l’écran.


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MOURIR


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26 février 2005. 11 heures du soir.

Je n’en peux plus. Je souffre trop. J’arrête. Je mets fin. Cette fois, je suis vraiment fatigué. Je n’y crois plus. Je ne souhaite faire de mal à personne. Je ne publierai pas « Mourir ». Un de mes premiers livres publiés avait pour titre « Rester vivant ». J’essaie de refermer la boucle, d’annuler les traces de quelque chose ou de quelqu’un, d’un être malencontreux, embarrassé de lui-même, d’un être en somme qui n’aurait pas du être. Je n’ai pas eu une vie heureuse. J’ai quarante-sept ans aujourd’hui.


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16 août 2005. Midi.

Lorsque j’ai écrit les lignes qui précèdent, je venais de terminer « La possibilité d’une île » ; j’avais envoyé le manuscrit à mon éditeur. Une période d’une intensité exceptionnelle venait de prendre fin ; ma vie, je le savais, allait maintenant me paraître vide. Cela avait été, aussi, une période à peu près constamment douloureuse. Jamais je n’avais senti à quel point l’écriture d’un roman est une activité solitaire et pénible ; je crois, en réalité, que c’est l’activité la plus triste du monde. Ce livre est pourtant, pour la première fois de ma vie, dédié à des amis ; mais dans ma vie quotidienne avec ma femme j’avais constamment été entouré par la haine, par l’indifférence dans le meilleur des cas. L’amour, le plaisir, je ne les avais jamais connus. Et rien ne me portait à croire que je pourrais, de nouveau, les connaître. Quelques mois se sont écoulés depuis que j’ai terminé ce livre ; je les ai essentiellement consacrés aux modifications sur épreuves ; je n’ai donné le bon à tirer définitif que le 4 juillet. Certaines remarques faites par les premiers lecteurs ont pu m’être utiles ; mais l’élément décisif a quand même été la relecture à voix haute du texte, que je n’avais jamais pratiquée de manière aussi systématique et prolongée. Au cours de ces quelques mois, la conviction qui avait été la mienne tout au long de l’écriture n’a fait que grandir : « La possibilité d’une île » est mon chef d’œuvre, sur le plan romanesque tout du moins. Jamais auparavant je n’avais créé des personnages dotés d’une vie aussi intense ; jamais je n’avais été aussi loin dans l’élaboration d’une transposition romanesque signifiante et profonde. Ce que je suis en train de faire en ce moment est d’une importance bien moins considérable ; je n’ai pas tellement d’estime pour l’autobiographie, guère plus pour le journal ; je les considère comme des formes primitives de la création, incapables de s’élever à la vérité du roman, incapables aussi de rejoindre le niveau de l’émotion pure qui est celui de la poésie. Si je me livre cependant à cette activité pour laquelle je n’ai qu’une estime modérée, c’est parce que je ne suis malheureusement pas, pour l’instant, en situation de faire quoi que ce soit d’autre (pour des raisons sur lesquelles je n’aurai que trop l’occasion de revenir). J’écrirai ce texte négligemment, au fil de la plume comme on dit, sans jamais me donner la peine de le corriger ou de le relire ; je ne le destine de toute façon pas à la publication en volume. J’espère en terminer assez vite. Il est malheureusement possible que l’interruption de « Mourir » se fasse à l’occasion de ma propre mort, à laquelle je n’attache aucune espérance – ce sera la dernière bifurcation, une bifurcation vers le rien pur. Je continue, pour l’instant.


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20 août 2005. 3 heures du matin.

Je suis né en 1956 ou en 1958, je ne sais pas. Plus probablement en 1958. Ma mère m’a toujours raconté qu’elle avait trafiqué l’acte de naissance pour me permettre de rentrer à l’école à quatre ans au lieu de six – je suppose qu’il n’y avait pas de maternelle à l’époque. Elle s’était persuadée que j’étais un surdoué – parce qu’à l’âge de trois ans, paraît-il, j’avais appris à lire tout seul, avec des cubes, et qu’un soir en rentrant elle m’avait retrouvé, à sa grande surprise, lisant tranquillement le journal. Qu’elle ait eu le pouvoir de le faire, ça ne fait aucun doute : les actes d’état civil étaient manuscrits et approximatifs, et elle faisait vraiment partie des notables à l’époque à La Réunion, elle y avait des relations puissantes (un de mes premiers souvenirs d’enfance est une réception dans une propriété incroyable avec des plantes luxuriantes, des serviteurs vêtus de blanc, une salle de cinéma privée où l’on nous avait projeté des dessins animés… une scène de film). Que ses motivations aient été aussi nobles qu’elle l’affirme, c’est plus douteux ; ma mère a toujours été experte dans l’art de retourner la narration des événements en sa faveur. Je me souviens, une des rares fois où je m’étais aventuré – bien timidement – à lui reprocher de ne s’être peut-être pas suffisamment occupée de moi pendant mes années d’enfance, de l’avoir entendu me dépeindre ses années de médecin à La Réunion sous un jour véritablement héroïque. A l’entendre elle était une sorte de médecin des pauvres, de mère Teresa de la médecine, n’hésitant jamais à se lever en pleine nuit pour aller accoucher une femme noire dans sa case perdue dans les montagnes (description des chemins ravinés par la tempête, des précipices frôlés en Land-Rover…). En pratique, je devais apprendre par la suite qu’elle faisait surtout des remplacements, et prenait six mois de vacances par an ; elle devait ensuite tranquillement terminer sa carrière comme médecin contrôleur de la Sécu. Il est donc bien possible qu’elle m’ait vieilli de deux ans non pour éviter que des entraves bureaucratiques étouffent l’éclosion d’un génie en herbe, mais simplement pour pouvoir se débarrasser de moi un peu plus vite. En l’occurrence, pourtant, je serais assez tenté de croire en sa sincérité. Ma mère était un personnage éminemment complexe, talentueux, souvent proche de la névrose, et tissé d’innombrables contradictions ; mais il y a un point, peut-être un seul, sur lequel tous les témoignages concordent : elle éprouvait un grand respect, un respect immense et exagéré pour l’intelligence. Elle était elle-même d’une intelligence supérieure, et ce sont ses études (accomplies avec un vrai brio) qui lui avaient permis d’échapper au destin des « bonnes femmes », qu’elle abhorrait, et de mener une vie indépendante et libre. Sa joie d’avoir un fils qui promettait d’avoir hérité de ses capacités intellectuelles était sans nul doute sincère.


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Cette histoire de surdoué, je dois le dire aussi, me plaisait assez ; je me revois, en classe de terminale, découvrant les tests de QI (qui n’étaient frappés, à l’époque, d’aucune suspicion idéologique). Je me revois ravi d’être dans les 140, essayant de trouver d’autres tests pour voir si je ne pourrais pas, grattant quelques points, atteindre les 150. Rétrospectivement je trouve ça minable, un peu pathétique aussi, car je me rends compte que je me suis fabriqué dès l’âge de quinze ans un personnage : celui d’un être supérieur, planant aisément dans les hautes sphères de la pensée, mais terriblement handicapé, dans la vie sociale et en particulier dans les relations avec les filles, par ses effroyables complexes physiques. Pourquoi ce choix étrange ? Etait-ce vraiment un choix ? Retrouvant récemment une photo prise au milieu d’un groupe de garçons et de filles à l’époque, j’ai quand même éprouvé un choc en constatant que j’étais, de loin, le garçon le plus attirant de la bande. Non seulement j’étais beau, mais en plus j’étais mignon, dans le style vaguement hippie, vaguement minet qui était en vogue à l’époque ; avec mes yeux bleus et ma veste en poils de chèvre afghane, je me trouve même franchement craquant. Le plus comique (ou le plus tragique, comme on voudra) est que j’ai finalement réussi à devenir le personnage que j’avais construit trente ans plus tôt. Sur les photos récentes, je suis effectivement, la plupart du temps, horrible ; et j’ai fait fructifier mes capacités intellectuelles jusqu’à devenir, ça me paraît maintenant inutile de jouer la modestie, un des écrivains les plus doués de sa génération. Il y a un point, un seul, sur lequel je n’exagérais nullement à l’époque, et qui reste, plus de trente ans après, d’une acuité atroce : mon incroyable, mon anormale sensibilité ; mon émotivité incontrôlable ; ma pathétique vulnérabilité, dans le domaine sentimental en particulier, qui explique évidemment pourquoi je me suis orienté vers la construction de ce personnage, le seul que ma timidité me permît de jouer. Il me faut ici évoquer une dernière fois ma mère – et j’espère que ce sera vraiment la dernière fois, que je n’aurai plus l’occasion d’y revenir ; que nous pourrons, chacun de notre côté, reposer en paix. Ce qui va suivre peut paraître dur, mais il faut se souvenir avant de la juger de son respect anormal pour l’intelligence, d’un certain mépris corrélatif pour le sentimentalisme ; il faut se souvenir que c’est l’intelligence, dans sa propre vie, qui l’avait sauvé. Elle m’a donné, simplement, ce qu’elle croyait être le meilleur pour moi ; elle s’est trompée, voilà tout. Lorsque j’étais bébé, ma mère ne m’a pas suffisamment bercé, caressé, cajolé ; elle n’a simplement pas été suffisamment tendre ; c’est tout, et ça explique le reste, et l’intégralité de ma personnalité à peu près, ses zones les plus douloureuses en tout cas. Aujourd’hui encore, lorsqu’une femme refuse de me toucher, de me caresser, j’en éprouve une souffrance atroce, intolérable ; c’est un déchirement, un effondrement, c’est si effrayant que j’ai toujours préféré, plutôt que de prendre le risque, renoncer à toute tentative de séduction. La douleur à ces moments est si violente que je ne peux même pas correctement la décrire ; elle dépasse toutes les douleurs morales, et la quasi-totalité des douleurs physiques que j’ai pu connaître par ailleurs ; j’ai l’impression à ces moments de mourir, d’être anéanti, vraiment. Le phénomène est simple, rien ne me paraît plus simple à expliquer ni à interpréter ; je crois aussi que c’est un mal inguérissable. J’ai essayé. La psychanalyse s’est depuis toujours déclarée impuissante à lutter contre des pathologies aussi bien ancrées ; mais j’ai un temps placé quelque espoir dans le rebirth, le cri primal… ça n’a rien donné. Je le sais maintenant : jusqu’à ma mort je resterai un tout petit enfant abandonné, hurlant de peur et de froid, affamé de caresses.


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21 août 2005. 8 heures du matin. La faille psychique fondamentale que je dois à ma mère, je l’ai déjà suffisamment expliquée, dans la nuit d’hier. Les handicaps dont on peut faire remonter l’origine à ma relation avec mon père sont moins graves, mais là aussi très simples, d’un type banal, prévisible. La psychologie humaine, en général, s’avère d’une étonnante simplicité – en particulier la mienne ; il est à craindre que je me lasse assez rapidement de ce projet autobiographique. C’est pourquoi j’éprouve le besoin d’aborder tout de suite, pendant que je m’en sens encore l’énergie, le cas de mon père. Je me suis montré simplement incapable, et même paralysé, lorsqu’il s’agissait de me livrer aux deux activités dans lesquelles mon père excellait. La première, gravir des montagnes. La seconde, conduire des voitures automobiles. Je vous avais dit que ce serait très simple, élémentaire même. Si je n’ai pas réussi à surmonter le premier handicap (placé devant un vide imposant, j’éprouve encore aujourd’hui une sensation de vertige terrifiante), j’ai par contre réussi, tout récemment (il y a deux ans, trois tout au plus), à surmonter le second. Je parviens maintenant à conduire, et même avec plaisir, et habileté, sur de longues distances, des voitures puissantes. C’est une grande victoire sur moi-même, en fait c’est peut-être la seule que j’ai remportée de ma vie. Avant de prendre congé une dernière fois de mes parents, j’ai eu l’idée de rechercher quels points je pouvais citer en leur faveur ; en quoi leur fréquentation m’avait renforcé, m’avait préparé à la vie. Pour ma mère je n’ai pas trouvé, et je n’ai pas le temps de chercher plus, sinon je vais me fatiguer, et je n’écrirai plus rien. Mon père, par contre, pratiquait constamment une forme d’humour paradoxale, qui me plaisait déjà beaucoup à l’époque où je le voyais de temps à autre, et que je lui ai empruntée par la suite. Quoique intelligent, subtil, capable même de pensées réellement originales (je me souviens par exemple de sa critique de l’« Ulysse » de Joyce, qu’il jugeait à certains égards surfait), mon père n’aimait rien tant que se comporter comme une espèce de beauf, et se donner ainsi au spectacle sous les yeux médusés de ses amis qui, l’appréciant à juste titre pour son habituelle finesse de pensée, se montraient déconcertés par ce positionnement complexe. Je le revois par exemple affirmer qu’il n’y avait rien de tel dans la vie que d’assister à une étape du Tour de France, ou à un bon match de foot, tranquille devant sa télé, avec un pack de bière ; et je le revois en donner, presque aussitôt l’exemple. C’était là chez lui, quand on y pense, une stratégie assez audacieuse, car il était réellement issu d’un milieu populaire, et aurait donc normalement dû avoir le comportement d’un beauf. Pour pratiquer cette ironie à double détente, il fallait qu’il soit bien assuré de sa supériorité intellectuelle, et qu’elle ne serait jamais remise en question. D’autant que ce n’était même pas, au fond, de l’ironie : il pensait qu’une étape du Tour de France, ou un bon match de foot, en compagnie d’un pack de bière, sont réellement des choses bien agréables ; et le pire est qu’il avait raison. La différence étant qu’il pouvait, aussi, apprécier l’« Ulysse » de Joyce, tout en l’estimant par endroits surfait (le pire étant qu’il avait, là aussi, raison). Sur ce plan, sur ce plan précis, il est indiscutable que mon père a pu me servir de modèle.


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22 août 2005. 3 heures du matin.

Mes premiers souvenirs de la vie littéraire sont sans doute deux émissions d’Apostrophes que j’ai dû voir quand j’avais quatorze ou quinze ans, sans doute à une semaine d’intervalle. Dans la première, Modiano était l’un des invités ; j’en avais eu le coeur serré, j’avais eu de la peine pour lui. La pitié que j’éprouvais était certes ambiguë, car à l’époque j’espérais encore guérir, j’espérais encore ne pas en arriver, à son âge, au même point. Dans le numéro suivant, les invités vedettes étaient Philippe Sollers et Alain Robbe-Grillet ; à la fin de l’émission, Bernard Pivot avait exprimé le regret que l’entretien ait été modéré, courtois, presque ennuyeux à vrai dire. Cette idée de réunir des plateaux d’écrivains était déjà, au fond, un premier pas vers la trash TV - Pivot en était d’ailleurs si conscient que, lorsqu’il avait affaire à un invité de marque, il l’invitait pour une conversation seul à seul, comme cela se faisait auparavant chez Dumayet. Bref, Robbe-Grillet avait quand même trouvé le moyen, au cours de l’émission, de parler du “numéro d’autiste” de Modiano. Le mépris que j’en éprouvai aussitôt pour lui sur le plan moral ne devait que quelques années plus tard - quand l’idée me vint de lire, peu de temps sans doute après mon entrée à l’Agro se doubler d’un mépris radical pour son oeuvre. Cet aperçu précoce sur la méchanceté ironique, la cruauté même qui pouvaient se donner libre cours dans les milieux littéraires ne m’a pourtant nullement dissuadé d’y rentrer, alors que je n’étais guère mieux armé que, disons, Jean-Jacques Rousseau, pour y faire face. En réalité, j’avais complètement oublié l’incident, et je ne m’en suis souvenu que bien plus tard, en lisant « Un pedigree », de Modiano. Je ne pense même pas pouvoir parvenir à évoquer ce livre sur un plan littéraire, tellement il m’a atteint sur le plan personnel. La description qu’il donne de sa mère, jeune ? Une “jolie fille au coeur sec”. Elle s’avère ensuite attirée par les milieux “artistiques” (dans leur variante vulgaire), voire carrément par les voyous - les ressemblances avec la mienne sont hélas plus que frappantes. Pour mon père, c’est encore pire. En lisant le livre de Modiano, j’ai aussitôt revu mon propre père, plongé dans des petits calculs qu’il effectuait sur des feuilles de carnet et où intervenaient le taux du prêt bancaire, le salaire des ouvriers, les réseaux de commercialisation, etc. dans des projets aussi fantasques que planter des clémentines en Corse, élever des boeufs en Argentine ou ouvrir une station de sports d’hier au Népal. Alors qu’il aurait pu, tranquillement, placer son pognon à 2 % à la Caisse d’Epargne, comme le bon prolétaire enrichi qu’il était (période étonnante, quand même, ces Trente Glorieuses où les gens pouvaient s’enrichir ...). Mais ce qui m’a le plus frappé, dans le livre de Modiano, ce ne sont pas les ressemblances psychologiques réelles, profondes, entre nos parents respectifs ; ce sont plutôt des détails anodins, presque burlesques, ce qui n’en rend la coïncidence que plus frappante. Comme ce fait que Modiano ait été vieilli de


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deux ans, sa date de naissance modifiée sur son passeport, dans le but d’atteindre plus vite l’âge de la majorité... Et, le plus extraordinaire : ce passage où le père de Modiano conclut que la profession d’avenir, pour son fils, est de devenir... ingénieur agronome ! Conclusion d’autant plus absurde que son père, comme le mien, étaient des urbains purs, qui n’avaient même aucune notion claire d’à quoi pouvait ressembler la campagne... Contrairement à Modiano, j’ai obéi, forçant ainsi Robbe-Grillet, que cela met je le sais en rage, à partager le titre d’”ingénieur agronome de la littérature française”. En quelque sorte, j’ai vengé Modiano. J’arrête sur « Un pedigree », qui est pourtant un bien beau livre (ce passage où la doctoresse du lycée, avec une gentillesse qui manque de le faire fondre en larmes, lui demande “s’il n’a pas de parents”...). Si j’en parle, je vais encore me sentir obligé de revenir sur mes propres parents ; et cette fois ça suffit, ça suffit vraiment, parce qu’au fond la vérité, aujourd’hui, c’est que je m’en fous. Je sais que Catherine a l’intention d‘aller voir notre mère en septembre pour la forcer à “s’expliquer”. Je sais pour ma part que je n’en ferai rien. C’est trop tard, l’explication aurait déjà avoir eu lieu, elle ne me servirait plus à rien maintenant. Il y a une phrase dans « La possibilité d’une île » qui dit : “On s’intéresse aux circonstances de sa mort, c’est certain ; aux circonstances de sa naissance, c’est plus douteux.” Comme cela m’arrive souvent, je l’ai écrite sans vraiment réfléchir, pour la formule, avant de me rendre compte que ce n’était rien d’autre que l’exacte vérité.


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23 août 2005. 3 heures du matin.

Oui, ça suffit ; pourtant il le faut, une dernière fois : parler de ma mère. Hier soir j’ai lu sur Internet quelques pages d’une biographie qu’un journaliste appelé Demonpion m’a consacrée, et qui sort ces jours-ci. Il y a certains points, dans ma vie, qui restent pour moi un mystère, sur lequel j’aurais aimé avoir des éclaircissements. Par exemple celui-ci : pourquoi ai-je, quittant l’Algérie en 1962, été envoyé chez ma grand-mère paternelle (Houellebecq) au lieu de rester avec ma grand-mère maternelle (Ceccaldi) ? Peu de gens le savent, et la lecture des quelques pages reproduites sur Internet le montre avec évidence : Demonpion n’a réussi, sur ces années obscures, à obtenir qu’un seul témoignage : celui de ma mère, qui a toutes les raisons de mentir, pour cacher les raisons réelles - en général passablement peu ragoûtantes, par l’égocentrisme absolu dont elles témoignent - de ses actions. Plus intelligente et plus motivée que Demonpion, elle n’aura eu aucune difficulté à le mener en bateau. En lisant le passage où elle relate notre dernière rencontre, j’ai retrouvé ses méthodes habituelles de travestissement, qui ne témoignent d’aucune imagination : elle procède simplement par translation et inversion, redistribution des rôles. Ainsi, notre dernière entrevue a effectivement eu lieu avec mon fils, et la brouille a en effet porté sur la première Guerre du Golfe, où ma mère défendait férocement Saddam Hussein. Sauf que c’est mon fils qui défendait la position américaine, et non pas moi, et que c’est bel et bien leur conversation qui, en s’envenimant, a provoqué la rupture. Son “plutôt sympa, le petit-fils” lâché dans la conversation avec Demonpion m’a presque arraché un sourire, disons un rictus. La première Guerre du Golfe, je me souviens que j’étais “plutôt contre”, mais je serais bien en peine de me rappeler pourquoi. Je me souviens que la veille, passant boulevard du Temple, je m’étais joint en badaud, avec mon fils, à une manifestation d’opposants à la guerre. Je savais pourtant qu’il était plutôt pro-américain, mais on s’était bien amusés il faut dire que c’est amusant, une manifestation, il y a une espèce d’enthousiasme, inhabituel. Ce que je devais découvrir au cours de cette conversation avec ma mère, c’est qu’il était farouchement pro-américain, et qu’il avait développé, en y réfléchissant seul dans son coin, une argumentation très complète ; sa pugnacité intellectuelle m’avait même stupéfait - après tout il n’avait que dix ans, et il avait tenu tête, sans faiblir, à la vieille. J’ai peut-être mis un peu d’huile sur le feu, vers la fin, par quelques attaques antiislamiques, mais c’était superflu, c’était déjà suffisamment âpre sans que j’intervienne, au fond je ne me souviens pas bien de ce que j’ai pu dire. Ce dont je me souviens par


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contre c’est d’avoir senti, de plus en plus nettement, au cours des minutes, grandir l’espoir que cette dispute imprévue allait peut-être déboucher sur un résultat inespéré : établir les conditions d’une brouille définitive entre moi et ma mère, mettre enfin un terme à ces visites espacées (une fois par an tout au plus) dont je comprenais de moins en moins la raison d’être tant il était clair qu’elle détestait ma femme, qu’elle n’éprouvait aucun intérêt pour son petit-fils et que nos relations à tous les deux étaient faites d’un mélange de non-dit et de rancoeur qui n’avait aucune chance de pouvoir se dissiper. Il est possible, les pages reproduites sur Internet semblent l’indiquer, que son véritable objectif en me rendant visite était l’espoir de pouvoir, un jour, me taper de l’argent ; mais c’était tellement grotesque, tellement incongru compte tenu de ma situation financière de l’époque, compte tenu aussi des masses de fric incroyables qu’elle avait pu gagner et dilapider tout au long de sa vie, que je ne crois même pas avoir clairement assimilé l’information. Toujours est-il qu’en me levant pour partir, avec mon fils, je savais que je ne reverrais jamais ma mère ; et j’en tressaillais de joie. J’étais un peu tendu, superficiellement, les disputes violentes me font toujours cet effet ; mais après quelques minutes de marche j’ai vraiment senti que j’étais en train de vivre un grand moment - lumineux, libératoire, paisible. Je suis toujours resté reconnaissant à mon fils de l’avoir provoqué. Ce moment de rupture en quelque sorte officielle, en tout cas clairement comprise et assumée de part et d’autre, ne s’est jamais produit avec mon père ; ce qui fait que je ne sais toujours pas si je le reverrai avant sa mort. Il y a, je crois, tout de même assez peu de chances.


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24 août 2005. 6 heures du soir.

Après avoir réglé - sans y consacrer, j’espère, plus d’espace qu’ils n’en méritent - le cas de mes parents, je vais maintenant pouvoir me tourner vers la biographie, qui doit sortir dans quelques jours, et qui m’a été consacrée par le journaliste Demonpion. Ce sera, je pense, encore plus bref. Certes je ne l’ai pas lue, mais pour ce que j’ai à dire ça n’a pas d’importance. Lorsque l’individu m’a pour la première fois informé de son projet, j’ai d’abord eu l’idée d’écrire une brève autobiographie, de mon côté, quelque chose qui réglerait rapidement la question ; mais je n’avais pas du tout terminé « La possibilité d’une île » à l’époque, j’ai mis le dossier de côté. Mon roman une fois terminé j’y ai repensé, vaguement, et je me suis vite rendu compte que l’exercice serait assez fastidieux. C’est alors qu’une idée m’est venue, que je continue à trouver éblouissante. Je laisserais Demorpion écrire sa biographie, enquêter, etc., puis il me remettrait son manuscrit terminé. Je le lirais, puis j’y rajouterais des notes de bas de page. Je n’interviendrais en aucune manière sur le texte de l’auteur, mais lui-même s’engageait à un respect total pour mes notes. On obtiendrait au final un objet curieux, ne ressemblant à mon avis à rien de ce qui a pu être fait dans ce domaine. Le projet lui a d’abord été soumis par l’intermédiaire de Raphaël Sorin ; il a demandé à y réfléchir. J’ai alors envoyé un e-mail à Demorpion pour mieux lui expliquer mon idée ; comme il souhaitait absolument me rencontrer, je lui a indiqué que son acceptation était le préalable à une rencontre, et la seule chose à mon avis qui puisse lui donner un sens. Après réflexion, il a refusé ; je trouve que c’est dommage. Mon rapport aux notes de bas de page est assez paradoxal : le plus souvent elles m’exaspèrent, je trouve insupportable de couper sans arrêt la parole à l’auteur ; mais, parfois, je les dévore avec délectation. J’ai jusqu’à présent très peu trouvé à les employer dans mes propres livres, alors que j’ai tout de suite, et très facilement, su manier les épigraphes ; mais, à chaque fois que je l’ai fait, ça a été une grande réussite - déjà, celle dans mon essai sur Lovecraft produit un effet réellement spécial. J’aurais bien aimé essayer sur une plus grande échelle, et ma propre vie me paraissait un matériau idéal. Par la suite, je me suis désintéressé du projet de Demorpion ; il n’est pas du tout vrai que j’ai tenté de lui “mettre des bâtons dans les roues” ; aux gens, très rares, qui m’ont consulté pour savoir s’ils devaient, ou non, témoigner, j’ai demandé de ne pas le faire ; mais je n’ai pris aucune initiative dans ce sens. Il n’empêche qu’hier, en fin de soirée, quelqu’un qui avait lu cette biographie un peu avant les autres m’a téléphoné ; et, là, ma propre réaction m’a surpris. Souvent, dans ma vie, j’ai su les choses dans un lieu secret, que je ne peux qualifier autrement que par l’expression banale “dans le fond de mon coeur”, avant de les savoir réellement ; parfois, j’ai pu, lorsqu’elles étaient encore dans ce lieu, les écrire avant même de les savoir ; il est même possible que ce soit au fond pour découvrir ce genre de choses que j’écrive.


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La seule chose que j’ai demandé à cette personne, c’est de me lire la liste des gens que Demorpion remerciait en fin d’ouvrage pour l’avoir aidé dans son “enquête non autorisée” ; la liste de ceux qui avaient collaboré, qui s’étaient “mis à table”. Et ce que j’ai découvert, hier en fin de soirée au téléphone, en écoutant cette assez longue hétéroclite liste de noms, est ce qui suit. Jamais plus je ne pourrai considérer comme un ami quelqu’un qui s’est permis de révéler, dans un ouvrage destiné à la publication, des faits appartenant à ma vie privée, et sur lesquels je n’avais pas souhaité, au moins jusqu’à présent, écrire moi-même. Je ne pactise pas avec les serviteurs de la transparence. Ma vie m’appartient. La seconde chose que j’ai découverte est encore plus importante, elle est d’une telle importance, et rejoint de si près les conclusions auxquelles sans rien savoir de tout cela j’étais arrivé dans « La possibilité d’une île », que je n’arrive même pas encore clairement à l’analyser. Tous mes amis m’ont trahi ; presque tous. Ecouter la lecture de cette liste au téléphone était un moment cruel ; il ne me reste plus, à l’heure actuelle, que très peu d’amis. Pour certains bien sûr je sais que le journaliste Demonpion les remercie alors qu’ils n’ont fait que l’éconduire au téléphone ; il me faudra bien sûr mener une petite enquête, au cas par cas ; il n’empêche que le résultat est déjà, dans le meilleur des cas, accablant. Aucun de mes amours ne m’a trahi. Absolument aucun. Aucune des femmes avec qui j’ai eu, au cours de ma vie, une relation amoureuse (et même quand cette relation s’est très mal terminée, même quand il y a eu des moments terribles) n’a accepté de témoigner. Elles ne m’ont même pas consulté ; elles ont su simplement, intuitivement, et sans l’ombre d’une hésitation, qu’elles ne devaient pas le faire. Et elles ne l’ont pas fait. Cela nous appartient. Je n’ai pas eu, bien sûr, tellement de relations amoureuses ; mais je n’ai pas eu tellement de vraies relations amicales non plus, sans doute même un peu moins. Le résultat en tout cas est si net, si tranché (et il contraste si nettement avec les idées reçues qu’on peut se faire à la lecture des indiscrétions des magazines people) qu’il me bouleverse. Il me bouleverse au sens originel du terme, il donne à tout ce que je pouvais savoir de la vie de nouvelles bases. J’en tiendrai compte, à présent ; j’en tiendrai le plus grand compte. A celles qui n’ont pas témoigné, qui ont gardé ces choses parfois si dures, mais parfois si douces aussi, dans le lieu secret, je dis merci. Vous m’aviez donné beaucoup de bonheur, ou beaucoup de souffrance, ou les deux mélangés, et plus de bonheur que de souffrance au bout du compte ; vous venez maintenant de me donner aussi, par votre exemple, un très grand enseignement.


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Laure Limongi

Laure Limongi est écrivain. Elle est née en 1976 à Bastia (Corse). Son œuvre interroge le genre dans lequel elle se développe : Éros Peccadille, d'apparence poétique, tend à la prose ; Je ne sais rien d'un homme quand je sais qu'il s'appelle Jacques propose une histoire et son démontage ; Fonction Elvis transforme le roman biographique en alterfiction chantée. Laure Limongi s'intéresse également à la musique. Activiste du milieu artistique, elle s'implique à la fois dans des activités éditoriales et de nombreux projets collectifs mixant différents médiums de création. Elle dirige actuellement les éditions Laureli - Léo Scheer.


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Alrisha

Laure Limongi


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Il n’a jamais pu les manger lorsque le côté rouge était face à lui, visible. Même en le retournant. Une fois que le côté rouge était vu, une seule fois, même du coin de l’œil, c’en était fini. Plat jeté. Malgré le diktat de la politesse. Plus fort que le diktat de la politesse. Un vieux souvenir des Malheurs de Sophie, trucidant ses jouets animés. Cœur battant. Ou l’obscénité manifestée. Porte mal refermée, refoulé. Ou le sang. Ou la messe. Ou. Réponse chez l’analyste. Le premier analyste. Le deuxième analyste. Le troisième analyste. Le quatrième analyste. Le cinquième analyste. Même pas. Quelles que soient la sauce ou la circonstance, dès que le rouge se brandissait sur fond porcelaine, le poisson était jeté. Quel que soit. Gouverné par Neptune, etc. Et selon les jours ou les heures, mon père m’appelait Biche ou Pinochet. Rien à voir. Puisque tout y était bleu. Salon, ciel, chemise, mer, tapisserie et même les veines, de l’extérieur, sur les bras des vieux. De bons bras qui avaient dû être forts ou tendres. Des bras qui ressemblaient à du bon pain. Mais quand même. La question est celle de la détermination. Ou plutôt de ce qu’on appelle destin, fatum – voire fatalitas, fatalitas – avec grosse voix de Chéri Bibi. C’est ici que nous ouvrons un livre et que nous lisons : Il fait partie de la triplicité irrationnelle par excellence. (C’est un père). Il symbolise l’homme parvenu à une phase d’illumination, un état de conscience réfléchie au plus haut degré, impliquant aussi bien l’imagination que l’intuition ainsi que la raison nécessaire à l’expression. Ça, c’est l’Astrologue inspiré, bien sûr, et encore : De type lymphatique, correspondant à l’élément eau (froid et humide), le natif du signe des Poissons se distingue par sa nature émotive, sensible, timide et réceptive, ce qui le rend très perméable aux conditions environnantes. Indulgent et bon, il manifeste une peur étrange de s’engager positivement sur le sentier de la vie de sorte qu’il est souvent considéré comme un être dépourvu d’initiative et d’autocontrôle. Se protégeant maladroitement, enfoui dans les profondeurs d’un monde intérieur, il savoure avec extase les moindres rêves et les plus infimes pensées émises par sa raison. (On a dérivé, c’est sûr.)


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Les lèvres sont plus minces, moins solides. La nageoire caudale est moins forte et moins échancrée. Il faut en manger au moins deux fois par semaines selon l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé). Bien enlever les arêtes. Réserver. Colorer le tout. Mais il n’a jamais pu manger un rouget dont le rouge était visible. Avait été visible. Un rouget qui manifeste sa rougeur, sa surface, sa peau. Qui dirait que le dehors peut-être comme le dedans – sanglant. Le rouge devait rester coller à l’assiette, recouvert de la substance gélatineuse qui le rattache à la chair blanche. Il pouvait décoller délicatement la chair et la manger du moment que le rouge restait masqué, hermétiquement lové à la faïence, comme en messe basse avec elle. Réserver. Colorer. Les Babyloniens décrivaient la constellation comme composée de deux poissons poussant un œuf géant. La mythologie grecque veut que ces poissons soient les formes assumées par Aphrodite et Éros poursuivis par le monstre Typhon. Ils auraient relié leurs queues avec de la corde afin de ne pas se séparer. C’est une constellation difficilement visible, faible. Deux être dérisoires qui poussent un œuf géant qui est censé être la vie. Dribler les prédateurs. Avancer. Enfin, entre Bélier & Verseau. Aux frontières. Avancer, esquiver, ne pas se séparer.


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Enfin le 21 février 1976, c’était surtout un jour décisif pour le Tournoi des Cinq Nations. Victoire du Pays de Galle contre l’Irlande à Dublin (34-9). Victoire de l’Écosse contre l’Angleterre à Édimburg (22-12). Malgré le diktat de la politesse. & le maillot du Pays de Galle est rouge – encore. Mais on a dit qu’on ne parlait pas de soi Oui mais on parlait de Poissons ! et de rouge. Bon, bon, d’accord. Deux personnages, brûlants, incandescents, poursuivis par un monstre. Avant de finir la bouteille d’Ambroisie, après la victoire (ellipse chaste). Il est vrai que Typhon n’était jamais que le père de Cerbère, brave toutou, va. Tout cela, cette course-poursuite en technicolor à travers les étoiles, fait un mythe et un signe d’eau. Arrosons ça. Avec un petit panier et un petit pot de beurre de la vache UHT, à conserver à + 8° C maxi dans la forêt. Le rouge est mis Mais tu sais bien, dis, Comment c’est. Chiqué ? (Le rouge ami). D’ailleurs, Alrisha n’est pas l’étoile la plus brillante de la constellation des Poissons mais elle est la première. Et surtout, elle relie. Tirer la chevillette. Pour ne pas se séparer.


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Un jour, dans le salon privé d’un grand restaurant parisien dont nous tairons le nom, il décida d’outrepasser sa phobie chromatique et d’enfin toucher au rouge. Il était à table avec sa femme et son amant – sans le savoir. À la commande, il ne spécifia pas sa requête habituelle, à la stupéfaction de sa femme qui le lui fit remarquer. Mais il fit mine de ne pas entendre et poursuivit la conversation. L’assiette arrivée, il parvint à vaincre sa répulsion et lentement, posa le couteau d’argent sur la peau rouge marquée de fines écailles. En respirant fortement et sous le regard ébahi de sa femme dont la jambe touchait, sous la table, celle de son amant, reliés, pour ne pas se séparer, il parvint à doucement enlever la peau et à la déposer sur le côté de l’assiette en prenant garde à conserver le rouge sous les yeux, en drapeau vainqueur. Dehors un chien aboyait sans cesse comme pendant une chasse à cour. Il était singulier de l’entendre à un tel étage, vitre fermée. Mais voilà qui achevait de rendre la scène historique. Enfin, sans haut-le-cœur, il détacha un peu de la chair blanche de ce délicieux rouget, la porta à sa bouche, la mâcha en souriant et l’avala avec plaisir. « Ce n’était donc que cela ! » pensa-t-il avec un intense soulagement. C’est alors qu’il entendit quelqu’un à la porte, la bobinette choir, un homme, revêtant l’habit écarlate des sommeliers de cette prestigieuse maison, entra dans le salon et le poignarda. En voyant s’écouler son propre sang sur la nappe épaisse, immaculée et en poussant son dernier soupir, il comprit qu’il était l’étoile solitaire de cette triangulation. Et que vraiment, il avait bien fait d’éviter jusqu’alors, des poissons, le rouge. Que, vraiment, il n’aimait pas le rouge des poissons et que le rouge des poissons ne l’aimait pas. Fatalitas.


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Francesco Goya, Saturne dévorant ses enfants (1821-23) Courtesy Musée du Prado - Madrid


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Ariel Kenig / Benjamin Lafore

Ariel Kenig est né en 1983. Il est l’auteur des romans Camping Atlantic, La Pause et Quitter la France publiés aux éditions Denoël. Il écrit également pour le théâtre et la jeunesse. www.arielkenig.com Benjamin Lafore est né en 1983. Il est architecte et co-fondateur avec David Apheceix et Sebastien M.Barat du groupe d’architecture La ville rayée. www.la villerayee.com Ensemble ils réalisent un portfolio adapté de pages du roman La Pause.


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Courtesy Tschumi-Crespin

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Royan Courtesy BĂŠatrice Utrilla

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Bruno Peinado, Closeencounter, Courtesy Galerie Loevenbruck, Paris

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Courtesy La Ville Rayée

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Elmgreen et Dragset, Queer bar/Powerless Structures, Fig. 21, Courtesy Nicolai Wallner

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B.L., Sex in the city, courtesy Air Garten Galerie

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Vanna House Photo Rollin LaFrance, Courtesy Venturi, Scott Brown and Associates, Inc

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Courtesy Nicolas Pages

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Claire-Lise Panchaud

Artiste née en 1977, vit et travaille à Lyon. Claire-Lise Panchaud développe une œuvre protéiforme mêlant textes, vidéos, photos, installations. Elle aurait sans doute été navigatrice si elle n'était pas artiste tant son œuvre est marquée par l'appel du large. Ses œuvres sont autant d'explorations fictives dans lesquelles elle mène des enquêtes, brouille les pistes, sans jamais se perdre. Entre réalité et fiction, elle dresse la cartographie de territoires imaginaires ou bien réels, d'histoires individuelles aux tragiques destins. Les navires sombrent dans une bataille navale aux airs guerriers. A l'amour comme à la guerre …


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Notre rupture fut un vrai champ de bataille – ou plus précisément une immense bataille navale – chacun de nous tirant à l’aveugle sur l’autre tant nous nous connaissions mal. La plupart de mes tirs finirent dans l’eau, sans même la frôler. Les siens furent beaucoup plus pertinents et en quelques semaines seulement mes cinq bateaux sombrèrent dans les eaux noires d’une mer sans fond.


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Thomas Hirschhorn

Artiste suisse né en 1957 à Berne, il vit et travaille à Paris. Il s’impose dès la fin des années 80 avec un travail engagé et une esthétique singulière faite d’installations précaires, réalisées “à la main” à partir de matériaux de la vie courante. Il s’approprie les éléments utilisés par les exclus (carton, pancartes, etc.) pour accentuer la dimension politique et sociale de son travail. Dans la plupart de ses projets, il mobilise le public parfois très en amont comme pour le Musée précaire d’Albinet. Invité chaque année à présenter son travail dans différents contextes, il propose ici un ensemble de notes fait à partir de collages, réflexions, citations à l’image de ses oeuvres qui servent d’appui à ses “artist-lectures”.


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Aurélien Froment

Artiste né en 1976, vit et travaille à Paris. Son œuvre protéiforme et complexe exploite la mise en abîme au sein d'un processus de construction narrative in progress. Son travail est traversé par le cinéma, l'architecture, la littérature pour l'imaginaire, les types de narrations, la mémoire collective et les utopies qu’il y trouve. Le projet De L'Ile à hélice à Ellis Island, est instable et en perpétuel développement. Selon le principe du marabout, les titres s'enchaînent rendant visible une navigation au sens propre comme au figuré, dans l'intertextualité.


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© dessin Laetitia Bénat

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nos remerciements les plus chaleureux aux auteurs et aux artistes, pour leur précieuse collaboration : Laetitia Bénat / Sophie Calle / Aurélien Froment / Patrice Hamel / Thomas Hirshhorn / Michel Houellebecq / Ariel Kenig / Joseph Kosuth / Rachel Labastie / Benjamin Lafore / Laure Limongi / François Morellet / Claire-Lise Panchaud / Marie Redonnet / Unglee à tous ceux qui ont soutenu de près ou de loin ce projet : Ami Barak / Colette Barbier / Alima Boumediene-Thiery / Tewfik Bouzenoune / Daniel Bosser / Katharine Branning / Nicolas Christian / Marie Debat / Thomas Dryll / Christophe Girard / Eric Lapasset / Peggy Leboeuf / Irène Lindon / Danielle Morellet / Paul OtchakovskyLaurens / Joseph Perray † / Xavier Person / Isabelle Reverdy / Kate Rémy / Benjamin Rivière / Lina Tornare / Henri Vignes et les galeries Emmanuel Perrotin / Loevenbruck / Almine Rech / les éditions de Minuit / Denoël / Gallimard / Laureli-Leo Scheer à Edouard Levé

publié avec le soutien de la Région Ile-de-France


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j’aime beaucoup ce que vous faites ... revue littéraire & artistique

Directeurs de publication Christian Alandete / Agnès Violeau 18, place du Marché St Honoré 75001 PARIS www.revueJBCQVF.com revueJBCQVF@yahoo.fr

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