Mémoire Paysage Basse Vallée du Var

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Vallée côtière du Var

Révéler une trame territoriale qui tienne la métropole Élaboration d’une approche paysagère globale de la basse vallée du Var dans le cadre de l'Opération d'Intérêt National "Éco-Vallée"

Laelien DELORT

Mémoire de stage réalisé au CETE Méditerranée

Master Paysage et Aménagement des Régions Méditerranéennes

École Nationale Supérieure du Paysage

septembre 2008


Illustrations couverture : LD


Remerciements En premier lieu, je tiens à remercier mes encadrants de stage, Alain GUGLIELMETTI (CETE Méditerranée) et Jean-Pierre CLARAC (ENSP) pour leur regards crtitiques qui m’ont poussé à argumenter mes positionnements et approfondir mon projet. Un grand merci aux gens du CETE, pour leur disponibilité, leur accueil et leur considération. Leurs remarques et réactions ont beaucoup apporté à mon travail. Merci à Laetitia BILLY, arrivée en stage au CETE avant moi, qui m’a transmis une documentation très fournie sur l’OIN, et à Catherine ADRIAN pour ses photos prises sur le terrain. Je remercie enfin toutes les personnes contactées qui m’ont consacré du temps, notamment Anne et Pierre MANIANI pour leur accueil chaleureux sur leur exploitation agricole, Michel DESSUS, Président de la CHambre d'Agriculture des Alpes-Maritimes, pour sa franchise et sa confiance, et Sylvie DE GALLEANI, des Archives Départementales, pour m’avoir fait don de plusieurs cartes anciennes. Et merci Aurélie pour ton soutien au quotidien et tes précieuses relectures...



Avant-Propos La Préfecture de Région PACA (SGAR1) a missionné le CETE Méditerranée pour conduire une étude préalable à la mise en oeuvre de l’Opération d'Intérêt National (OIN) "Éco-Vallée" sur la basse vallée du Var, près de Nice. Cette étude doit viser à "produire une analyse de l’état initial du site et de son environnement, à définir les possibilités d’aménagement de ce territoire et proposer un pré-programme opérationnel et à expliciter la pertinence d’une stratégie de la Plaine du Var au regard d’autres pôles économiques existants."2 Cette mission vise en somme à définir le "dire de l’Etat" sur la question et à encadrer les travaux de l'Établissement Public d'Aménagement chargé de mettre en oeuvre l'OIN, en clarifiant les conditions de la mise en œuvre de l’ambition de développement durable de l’OIN à l’échelle de son périmètre, en relation avec les enjeux d’intérêt national. Dans ce cadre, je suis intervenu en soutien au service Politiques Environnementales du CETE Méditerranée dans sa contribution à l’étude, concernant les problématiques paysagères. On m’a demandé d’établir un diagnostic territorial, puis d’en dégager des enjeux paysagers. Dans une troisième phase qui se prolongera au-delà du stage, je contribuerais à dessiner un projet qui réponde aux enjeux précédemment identifiés, en collaboration avec l'équipe chargée de l'étude. Le présent travail devrait alimenter cette troisième phase. Toutefois, je me suis autorisé, dans le cadre de ce mémoire de fin d'études, une certaine liberté par rapport à la commande formulée au CETE, et j'ai donc adopté certains positionnements qui me sont propres et peuvent différer sensiblement de ceux de l’État. L’ambition affichée de cette OIN est d’atteindre un niveau d'excellence en terme d’aménagement durable et de constituer à travers cette "Éco-Vallée" une vitrine exemplaire du développement durable. Ce concept restant flou et soumis à différentes acceptions, il m'a semblé nécessaire, avant même d'entrer dans le diagnostic, de préciser à quelle conception j’adhérais, et ce que cela impliquait pour l’ensemble de ma démarche. Celle-ci reste somme toute classique, puisque je débute par un diagnostic du territoire qui met en relief un certain nombre d'enjeux, auxquels mon projet apporte ensuite une réponse qui se dévoile progressivement, jusqu'à sa formalisation. Tout au long de ce travail, j'ai été amené à interroger les questions du rapport que peut entretenir l'Homme avec le territoire, dans un contexte global métropolitain. Aussi, j'ouvrirais ce mémoire par ces deux citations :

"La métropole contemporaine est caractérisée par une diffusion fragmentée pratiquement illimitée et détachée de l'environnement. [...] elle reflète la forme impériale du marché mondial et de son système monde : pour la première fois dans l'histoire, ce système est en effet privé de frontières géographiques, son réseau s'étend sur la totalité du globe terrestre, accessible en chacun de ses points en temps réel (télématiquement)." Alberto MAGNAGHI, Le projet local, 2003, p.14

"Le territoire est une appropriation à la fois économique, idéologique et politique (sociale, donc) de l’espace par des groupes qui se donnent une représentation particulière d’eux-mêmes, de leur histoire." Guy DI MÉO, Les territoires du quotidien, 1996, p.40 1 2

Secrétariat Général pour les Affaires Régionales Lettre de commande du SGAR adressée au CETE Méditerranée, en date du 5 décembre 2007


Sommaire


Entre territoire et métropole... Un site complexe

Une liaison entre le Chaînon Alpin et la Méditerranée. A la recherche du fleuve... Plaine ou vallée ? La basse vallée du Var au sein des paysages du département D’amont en aval : quatre séquences paysagères se dessinent...

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1 1 3 3 4 5

Un espace stratégique reconnu d'intérêt national

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Quelle démarche adopter ?

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Développement durable ou soutenable ? Aménagement durable des territoires S’appuyer sur les valeurs territoriales pour fonder le projet

Identité territoriale

Temps et formes du territoire

Un "fleuve-menace" qui charrie des limons fertiles Des terres gagnées contre le fleuve pour le développement agricole Des coteaux investis par l’homme Une attractivité touristique forte L’ère de la consommation Le contrôle des eaux

Les entités paysagères

Le lit du Var et la plaine Les vallons obscurs Les coteaux La confluence du Var et de l’Esteron La façade littorale

Des enjeux à concilier

Les enjeux de développement soutenable

12 13 15

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17 17 21 24 26 28 32

36 36 38 40 41 42

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Les enjeux métropolitains

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Les enjeux territoriaux

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Le fleuve et son réseau hydrographique Les terres agricoles de la plaine Les coteaux Le "coeur de plaine"

Des enjeux au projet...

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Révéler une trame territoriale qui tienne la métropole Conforter et mettre en valeur les terres agricoles Constituer des "pôles agricoles" dans la plaine Installer le MIN à St Isidore Mettre en valeur les coteaux cultivés

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Révéler l’ossature de la vallée

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Accueillir la ville autour de cette trame

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Réunir la ville autour de son fleuve

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Spatialisation des intentions

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Réponse du projet aux enjeux métropolitains

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Faire émerger un réseau de corridors écologiques Une trame pour tenir la ville Requalifier les zones urbanisées en plaine Densifier les coteaux en habitant la pente S’affranchir de l’autoroute Unir les deux rives

Formalisation du projet

Zoom sur le secteur de St Isidore

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Schéma directeur

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Vue d'ensemble sur le projet

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Déplacer le MIN à St Isidore Les corridors écologiques au sein du projet Habiter les coteaux Supprimer l'A8 dans le coeur de plaine Un boulevard urbain et une promenade le long des berges La promenade des berges à hauteur du MIN La ville au bord du fleuve... Un parc des iscles en rive droite Une passerelle entre les deux rives

Conclusion Bibliographie

Glossaire des sigles utilisés

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Entre territoire et métropole... Un site complexe

photo : Jean-Yves Guilloteau, 2006

SITE. s. m. Partie de Paysage considérée relativement à la vue. Un site agréable, riant, sauvage, agreste, etc. Les sites de Poussin, de Berghem. Ce Peintre choisit bien ses sites.1 Histoire de rappeler toute la subjectivité du "regard" porté sur ce "site"...

Une liaison entre le Chaînon Alpin et la Méditerranée La Côte d’Azur occupe une situation géographique unique, au croisement des arcs alpin et méditerranéen. "Les pieds dans l’eau et la tête dans la montagne"2, telle pourrait se résumer la situation géographique des Alpes-Maritimes tant la proximité mer /montagne est forte dans ce département. Ce contexte géomorphologique chahuté a rendu difficile le développement de la métropole azuréenne, dans un premier temps cantonnée sur le littoral. L’expansion de l’agglomération niçoise s’est faite de manière digitalisée par les vallons, et sur les crêtes, le long des axes routiers. La Basse Vallée du Var s’inscrit de manière atypique dans ce territoire maralpin. Le fleuve ouvre en effet une large brèche dans le système collinaire de l’arrière-pays niçois, et offre ainsi un vaste espace plan à l’arrière de la métropole azuréenne littorale. De par son histoire et les usages qui s’y sont succédés, cette Basse Vallée du Var constitue aujourd’hui un territoire "support" de l’agglomération niçoise qui accueille pèle-mêle, serres agricoles, pépinières, activités logistiques, casses automobiles, centre commerciaux, décharges, sites d’extraction de graviers, poste de transformation EDF...etc La vallée a subi ce qu’on pourrait nommer une "topophagie"3, c’est à dire une consommation frénétique et abusive des sols.

L'embouchure du Var et en arrière-plan, les Alpes...

Jusqu’à aujourd’hui, ce territoire a accueilli ces diverses activités nécessaires au développement de l’agglomération niçoise de manière anarchique, voire illégale, en l’absence de tout projet. La seule tentative sérieuse, le Plan Cornudet de 1931, qui prévoyait l’extension de Nice dans la plaine du Var sur la base d’un plan linéaire tramé suivant les lignes directrices du fleuve, n’a pas été suivi. Cette absence de projet s’est révélée cruellement problématique lors de la dernière crue du Var, en 1994. La nécessité de maîtriser l’urbanisation de cette vallée en intégrant le risque d’inondation s’est ainsi imposée. Ce territoire, au centre de l’agglomération azuréenne, concentre les infrastructures majeures des Alpes Maritimes : aéroport, voie ferrée, autoroute A8, et bientôt très probablement la LGV PACA. La plaine accueille par ailleurs la plus forte concentration de terres agricoles du département, au contact direct de l’agglomération niçoise.

Dictionnaire de L’Académie Française, 5ème Édition (1798) Formule empruntée à Alain GUGLIELMETTI 3 MAGNAGHI (2003) 1 2

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Plaine ou vallée ?

dessin : LD

Usuellement, on parle de "plaine du Var", non seulement pour désigner le fond de la vallée, mais aussi par extension toute la vallée. Ce glissement sémantique reflète sans doute le peu d'intérêt accordé au territoire dans son ensemble, l'espace plat attirant plus les convoitises des aménageurs.

La vallée vue depuis Gilette, le regard vers le sud

Cette confusion m'a choqué dés le début de l'étude, aussi je m'efforcerais d'utiliser le terme géographique consacré pour parler de ce territoire : basse vallée du Var. Le terme de "plaine" ne désignera que le fond de valée. Pour des raisons de communication, on pourra avoir recours à l'appellation "vallée côtière du Var", qui met en avant la spécificité de cette portion de la vallée du Var, alors que le terme "basse vallée" peut véhiculer une image dévalorisante. On connait tous le cas du département des Basses-Alpes qui pour revaloriser son image s'est rebaptisé Alpes de Haute-Provence... Cette obstination à parler de "plaine", là où le géographe voit une vallée, s'explique peut-être par la difficulté à percevoir le fleuve....

A la recherche du fleuve... Dés les premières minutes sur le site, je m'étonne de ne pas voir le fleuve. Je n'ai pu l'apercevoir que très brièvement en le franchissant par l'autoroute. Hormis ce bref aperçu, le fleuve reste absent du paysage de plaine. Très vite, l'envie de poser un regard englobant sur ce territoire me pousse à rechercher des belvédères sur les coteaux. Les premières vues qui se dégagent lorsqu'on monte sur les coteaux permettent de deviner la présence du Var... grâce aux axes routiers qui l'enserrent et qui sont eux nettement visibles !... Il faut s'élever jusqu'au crêtes, ou mieux encore sur les sommets plus élevés au Nord, pour voir enfin le fleuve se dérouler et comprendre le paysage que l'on a parcouru.

depuis la plaine ou le pied des coteaux, le fleuve n'est pas visible... on le devine, enserré entre l'A8 et la RD 6202 bis...

RD 6202 bis

très vite, on éprouve le besoin de monter sur les coteaux le fleuve se dévoile alors...

photo : LD

A8

photo : LD

Dominique TRACHEL - Au bord du Var 42x54 - non daté (XIXème)

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carte : LD

La basse vallĂŠe du Var au sein des paysages du dĂŠpartement

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D’amont en aval : quatre séquences paysagères se dessinent...

La haute vallée

La boucle de Carros

La vallée intermédiaire

Nice

St Laurent du Var

croquis : LD

La basse plaine

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La haute vallée

De la Vésubie au Broc La confluence du Var avec la Vésubie constitue l’origine de la plaine. Si elle apparaît encore étroite (moins de 500 m), elle amorce cependant une configuration de plaine longiligne, encore dominée par un contexte naturel.

Cet ensemble paysager est cependant perturbé par plusieurs éléments d’origine humaine, notamment par l’usine chimique de la Mesta au niveau de la confluence avec l’Estéron, ainsi que par la nouvelle route construite en rive droite du Var (RD 6202 bis) et le lac du Broc, creusé pour l’extraction de matériaux.

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croquis : LD

Le relief relativement raide, limite l’usage des coteaux. La rive gauche offre une image associant roche et végétation naturelle. En rive droite, le relief moins abrupt permet le développement d’une mosaïque associant la végétation naturelle dominante avec une agriculture en terrasses et des quartiers d’habitation dans la colline. L’endiguement du fleuve commence ici. On peut y observer le système de casiers ayant servi au développement de l’agriculture (rétention des limons en période de crues).


La boucle de Carros

Du Broc à Gattières A l’aval de Saint-Martindu-Var, le fleuve forme une boucle contournant avec une certaine amplitude la montagne de Chiers, vaste massif calcaire dominant cet espace. La plaine s’élargissant sensiblement, l’ensemble de la rive droite du fleuve (lit majeur) a fait l’objet d’un développement économique important avec l’installation d’une vaste zone industrielle linéaire (ZID) couvrant tout le territoire entre la digue et le pied des coteaux.

En rive gauche, l’approche paysagère est sensiblement différente, l’espace de plaine est plus réduit, (fortement contraint par les contreforts des collines boisées) et encore essentiellement agricole. Sur les coteaux, seuls émergent les villages de crête, comme Castagniers ou Colomars.

croquis : LD

Les autres éléments marquants sur cette rive droite sont la ville nouvelle de Carros-le-Neuf, particulièrement visible dans le paysage, et les villages de crête (Le Broc, Carros) qui émergent du côteau boisé. Les développements urbains récents touchent de façon discontinue les espaces proches des crêtes, les pentes intermédiaires étant le plus souvent encore boisées.

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La vallée intermédiaire

de Gattières à St Isidore A l’aval de la boucle de Carros, la plaine élargie offre maintenant un espace équilibré entre la rive gauche et la rive droite. L’essentiel de l’espace de plaine est encore dévolu à un usage agricole, associant aux parcelles cultivées un bâti vernaculaire peu dense. Le développement de serres modifie cependant cette perception en "durcissant" cette approche visuelle.

Les vignobles de Bellet, sur les hauteurs niçoises, constituent un espace particulier très "entretenu". Des villages ancestraux émergent toujours mais sont le plus souvent effacés visuellement par les développements urbains contemporains. Au niveau de Lingostières, la proximité de l’agglomération niçoise se fait plus évidente avec la présence en rive gauche d’un vaste centre commercial, totalement discordant dans ce paysage.

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croquis : LD

Les coteaux qui encadrent la vallée s’adoucissent, ouvrant ainsi la vallée à la lumière mais favorisant aussi un développement urbain sur les hauteurs. Seuls les coteaux les plus abrupts restent végétalisés.


La basse plaine

La basse vallée : de Saint-Isidore à la mer Avec la conjonction d’une topographie collinaire adoucie et du débouché maritime, cet espace présente une identité paysagère fortement anthropisée. La limite de cette séquence est marquée par la bifurcation de l’autoroute qui, après avoir suivi en surplomb le fleuve contourne Nice par le nord.

En rive gauche, la large plaine offre une image globalement moins bâtie mais aussi moins structurée et organisée, associant aussi bien des équipements, des activités économiques, des parcelles agricoles que de l’habitat dispersé. L’autoroute et la RD 6202 irriguent cet espace. Si la RD 6202bis marque un nouveau lien entre les deux rives, elle vient aussi un peu plus perturber visuellement cet espace. La fonctionnalité l’emporte sur l’image urbaine.

croquis : LD

En rive droite, la rupture avec l’espace agricole est franche, l’ensemble de l’espace de plaine s’étant développé, à la fois pour de l’activité et pour de l’habitat (ville de Saint-Laurent-duVar). Les collines elles-même sont bâties.

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Un espace stratégique reconnu d'intérêt national Le 28 novembre 2006, le gouvernement a pris la décision de créer une Opération d’Intérêt National (OIN) le long de la Plaine du Var. Cette décision s’est accompagnée de la mise en place d’un collège d’experts chargé de définir les contours de l’opération. Ces experts ont confirmé et précisé dans leur rapport les conclusions énoncées dans la Directive Territoriale d’Aménagement. Celle-ci avait identifié en 2003 la Plaine du Var comme un secteur stratégique. "Cependant, cet espace stratégique offre le plus souvent une image peu valorisée, urbanisée de façon relativement anarchique, aggravée par la permanence de l’effet de coupure d’un fleuve qui a longtemps constitué une frontière. Dans ce contexte l’aménagement de la Vallée du Var sera fondé sur sa restructuration et sa requalification en tenant compte, en premier lieu, des risques d’inondation provenant du fleuve et des vallons adjacents."1 Le 5 avril 2007, le gouvernement a mis en place une mission de préfiguration de l’établissement public d’aménagement chargé de supporter cette opération, placée sous l’autorité du Préfet des Alpes Maritimes. L’objectif de cette mission est de définir : - un schéma directeur sur l’ensemble du territoire de la Plaine du Var, en lien avec les enjeux de l’agglomération, notamment sur la prise en compte des grandes infrastructures de transport et la spécialisation des territoires ; - les conditions de succès de l’opération en matière foncière ; - un programme d’action pour la nouvelle OIN. La conurbation azuréenne a assis sa notoriété internationale sur le tourisme depuis longtemps et connait aujourd’hui encore un succès sensible (9,3 millions de séjours en 2001, dont presque 60% d’étrangers et 69 millions de nuitées en 2001)2. "Ce rayonnement touristique international est conforté par l’accueil de nombreux salons, congrès et évènements internationaux,"3 d’où le positionnement international de l’aéroport de Nice Côte d’Azur (deuxième aéroport de France après Paris) avec 10 399 513 passagers en 20074.

L'Opération d'Intérêt National en bref La notion d’opération d’intérêt national est née en 1983, lors de la décentralisation en matière d’urbanisme, de la nécessité de ménager un régime d’exception au transfert de compétence afin de préserver des champs de prérogatives spécifiques de l’Etat pour la réalisation d’opérations d’envergure et/ou stratégiques. La qualification d’opération d’intérêt national a pour effet juridique de retirer aux communes ou E.P.C.I compétents et d’attribuer à l’Etat, les compétences en matière de permis de construire, d'autorisation de lotir ou de création des Z.A.C. La quasi-totalité des opérations d’intérêt national s’appuie pour leur réalisation sur un établissement public d'aménagement (E.P.A.). Parmi les OIN les plus célèbres, on peut citer le quartier de La Défense, à Paris, ou encore l'opération Euroméditerranée, à Marseille.

les étapes...

DDE 06 (2003), p. 105 JOURDAN (2005) 3 op. cit. 4 Source : UAF (Union des Aéroports Français) www.aeroport.fr 1 2

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28 novembre 2006

décision de créer une OIN le long de la Plaine du Var

5 avril 2007

mise en place d'une Mission de Préfiguration de l’OIN

7 mars 2008

signature du décret portant création de cette OIN "Éco-Vallée"

30 juillet 2008

l’Etablissement Public d’Aménagement de la Plaine du Var est créé...


Créer des logements et des emplois à l’échelle de l’agglomération Réaffirmer le rayonnement métropolitain et international de Nice Constituer une vitrine du développement durable

Malgré cette activité touristique forte, la conurbation azuréenne souffre "d’un déficit de nombre d’emplois par habitant par rapport aux grandes aires urbaines françaises." Quand elle offre 0,36 emploi par habitant, Lyon en offre 0,43, Toulouse 0,41 et Lille 0,4...1 L’attrait touristique de la région n’est en outre pas à l’abri de revirements. Il semblerait que le département des Bouches du Rhône ait récemment détrôné les Alpes-Maritimes au palmarès régional des destinations touristiques2. Selon le responsable de cette Mission de Préfiguration, Thierry Bahougne, "la Côte d’Azur [...] éprouve de plus en plus de difficultés à recruter, faute de pouvoirs loger ses employés. D’où un réel problème de développement et un risque important de dégradation du modèle économique azuréen." C’est pourquoi l’État a souhaité soutenir les élus locaux dans cette opération d’envergure nationale. Le 7 mars 2008 est signé le décret portant création de cette OIN désormais baptisée "Éco-Vallée". En effet, s’est imposée "l’idée d’utiliser l’espace de la Plaine du Var comme un espace de démonstration du savoir-faire azuréen en matière de gestion de l’environnement et de développement durable."3 Il s’agit ainsi, d’une part, de créer des logements et des emplois à l’échelle de l’agglomération et d’autre part de conforter ou réaffirmer le rayonnement métropolitain et international de Nice. Au-delà du discours officiel, la nécessité d’une OIN sur ce territoire relève peut-être surtout d’un besoin d’une intervention forte de l’État pour rendre possible les projets passés qui n’ont pas aboutit. Pour les plus critiques4, le recours à une OIN sur ce territoire permet d’une part de faciliter la maîtrise foncière des terrains (c’est le Préfet qui y délivre les permis de construire, et le recours au PIG est aisé) et d’autre part de s’affranchir des exigences de concertation et de participation au motif de l’intérêt national (les grands projets soulèvent toujours des contestations).

JOURDAN (2005) Article "Plein succés pour les panisses et le soleil", La Marseillaise du 19 août 2008 (sources non-citées) 3 Interview de Thierry Bahougne le 23 mai 2008 par Jean-Pierre Largillet, disponible sur www.webtimemedias.com/wtm_article47645.fr.htm 4 Les Alternatifs : www.alternatifs.org/presse/publi/nice_p4_1007.pdf 1 2

carte : LD

On peut également penser que face à la problématique du risque d’inondation, l’intervention sur la constructibilité des parcelles privées est plus confortable pour les élus locaux, en prise directe avec leur électorat, si c’est l’État qui en prend la responsabilité et ainsi les dédouane.

L’ambition motrice de cette O.I.N. (telle qu’elle est affichée) est d’atteindre un niveau exemplaire en terme d’aménagement durable et de constituer à travers cette "Éco-Vallée" une vitrine, un modèle du développement durable "à la française". Toutefois, qu'entend-on par développement durable?...

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Quelle démarche adopter ? Développement durable ou soutenable ? Le terme de développement durable bien que formulé pour la première fois par L.Brown en 1981, n’a vu son usage popularisé que bien plus tard, à l’occasion du Rapport Brundtland en 1987 et plus encore lors de la Conférence des Nations Unies de Rio, en 1992. La Commission Brundtland avait alors défini le "développement soutenable" (sustainable development) comme étant "un développement qui réponde aux besoins des générations du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs." ("a development that meets the needs of the present without compromising the ability of future generations to meet their own needs.")1 Dans l’esprit de Mme Bruntland, l’adjectif "sustainable" était porteur de deux significations distinctes et complémentaires : il fallait faire en sorte que le développement économique de nos sociétés soit à la fois acceptable par tous aujourd’hui, ce qui impliquait une solidarité géographique envers les pays les plus défavorisés en accroissant les efforts de coopération, et acceptable par les générations futures, en leur laissant des ressources naturelles en quantité et qualité suffisantes pour qu’elles puissent assurer leur propre développement. Dans la première version française du texte, les traducteurs avaient inventé le néologisme "soutenable" qui, effectivement, évoque bien les deux volets du concept suivant le sens accordé au verbe soutenir (aider, renforcer ou faire durer), dont il est issu. La greffe, malheureusement, n’a pas pris. Peu à peu, "soutenable" a été remplacé dans le discours général et officiel par "durable". Cette déviation sémantique n’est pas sans importance, d’autant que, partie du français, elle est allée contaminer l’anglais.2 On appuie habituellement le développement durable sur trois "piliers" : économique, social et écologique. Je m’appuierais plus volontiers sur une définition de la soutenabilité fondée sur les "5 dimensions indissociables : sociale, économique, écologique, géographique, culturelle" 3, identifiées par Ignacy SACHS, fondateur du concept "d’écodéveloppement", prédécesseur malchanceux du développement durable. Cette définition intègre bien, me semble-t-il, notre rapport au lieu sous ses multiples dimensions.

Le concept de développement soutenable atteint ses limites lorsqu’il ne consiste pas en une remise en cause fondamentale des logiques mêmes du développement. Le développement reste essentiellement dicté par des lois économiques et les problématiques écologiques ne sont finalement attaquées de front que lorsqu’elles portent atteinte à la "durabilité" de notre système économique. On retrouve ainsi derrière les mesures dites de "développement durable" bien souvent une approche "fonctionnaliste" qui tend à confier "la résolution des problèmes environnementaux à la science et à la technique." On met ainsi en place, en "annexe" de notre modèle de développement, différentes mesures afin d’atténuer les effets les plus extrêmes causés par notre développement. "Ces mesures [...] correctrices des effets éco-catastrophiques du modèle de la croissance illimitée, et qui relèvent encore d’une conception du territoire comme support technique et fonctionnel de la production, se limitent à évaluer la capacité d’endurance du territoire en fonction de l’utilisation qui en est faite."4 On se contenterait en fait, pour reprendre une célèbre contrepèterie, de "changer le pansement" plutôt que d’oser réellement "penser le changement"5. Très critique vis-à-vis de cette vision fonctionnaliste de la soutenabilité, je m’inscris plutôt dans une approche territorialiste (pour ne pas dire paysagère...) visant "la construction d’un système de relations vertueuses entre les trois composantes du territoire que sont le milieu naturel, le milieu construit et le milieu proprement humain."6

United Nations, "Report of the World Commission on Environment and Development", 11 December 1987 D’après un article publié le 31 juillet 2000 sur www.energie-plus.com 3 SACHS (1993) 4 MAGNAGHI (2003) 5 BOUTAUD Aurélien (2005). Le développement durable : penser le changement ou changer le pansement?, Thèse soutenue à l’École Nationale Supérieure des Mines et à L’Université Jean Monnet, St Étienne 6 MAGNAGHI (2003) 1 2

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"Penser le changement, ou changer le pansement ?"5


Aménagement durable des territoires "Quand on me parle de ville durable, je demande toujours s’il s’agit d’une ville construite en briques..."1

Si on veut dans cette vallée mener un vrai projet de territoire qui marque les siècles à venir par la cohérence, la pertinence et l’évolutibilité de ses aménagements, on devra s’appuyer sur ce qui est constitutif du lieu ; le "lieu" étant ce qui "se différencie de l’espace en cela qu’il possède une identité, une appropriation humaine par des représentations. Le lieu est alors un espace qui a une signification particulière pour l’Homme."5

Derrière cette boutade d’Ignacy SACHS, on perçoit bien qu’on se doit de définir de quoi on parle sans s’appuyer sur des concepts qui en viennent à sonner creux, à force d’être malmenés dans nos discours.

L’ignorance du lieu conduit à l’uniformisation et la banalisation du "territoire" ; si on entend par "territoire" l’espace des relations entre l’Homme et le lieu, ou comme l’énonce Guy DI MEO "une appropriation [...] de l’espace par des groupes qui se donnent une représentation particulière d’eux-mêmes, de leur histoire."6

Il m’est apparu essentiel de sortir de la logique métropolitaine pour renouer avec la territorialité des lieux, en tant que "triple relation symbolique, cognitive et pratique que la matérialité des lieux entretient avec l’activité sociale."2 A travers la logique de métropolisation, traduction spatialisée de la mondialisation, "le territoire est objectivé", c’est à dire réduit à une fonction de support physique ayant certaines propriétés apte à accueillir telle ou telle activité répondant aux besoins du moment. "La conurbation métropolitaine projette ses fonctions comme des météorites, qui ensevelissent au hasard ce qui gît en dessous : le territoire des lieux, de la communauté établie, de la toponymie, des genius loci, des cultures et des langues locales, des styles de vie, des modèles socioculturels, etc."3 Notre relation à la terre a changé et s’est éloignée d’une dépendance directe (en raison de la déprise agricole notamment), et de ce fait nous façonnons des paysages différents, qui parfois par leur caractère éclectique disent bien cette perte du rapport direct au sol. La Vallée du Var en est un exemple saisissant. Or, "en se coupant de son contexte vivant, de son rhizome, la ville interrompt le processus qui engendre le paysage en garantissant sa reproductibilité et son identité."4

La métropole, en tant qu'expression urbaine de la globalisation économique, véhicule sa logique de non-dépendance avec le territoire dans un processus qu'Alberto MAGNAGHI nomme "déterritorialisation".

"L’affranchissement progressif à l’égard de l’ensemble des contraintes territoriales (déterritorialisation) génère une ignorance croissante de la relation primordiale qui lie l’établissement humain à son environnement. Autrement dit, il entraîne une amnésie territoriale et nous contraint à vivre dans des sites indifférents, dont le rôle se limite à servir de support aux fonctions d’une société instantanée, qui a subitement rompu toute relation avec l’histoire et la mémoire des lieux."7

Ignacy SACHS dans un entretien accordé à l’Institut d’Urbanisme de Paris, disponible sur http://urbanisme.univ-paris12.fr, rubrique Documentation/Paroles DEMATTEIS Giuseppe (1999). Sul crocevia della territorialita urbana, in DEMATTEIS G. et al., I Futuri della città, Tesi a confronto, Ed. Franco Angeli, Milano, pp. 117-128 3 MAGNAGHI (2003) 4 op. cit. 5 FISCHER Gustave-Nicolas (1981). Psychosociologie de l’espace, Que sais-je ?, PUF, Paris, 127 p. 6 DI MEO Guy (1996). Les territoires du quotidien, L’Harmattan, Paris, p. 40 7 MAGNAGHI (2003) 1 2

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* invariants structurels :

S’appuyer sur les valeurs territoriales pour fonder le projet Le territoire, dans toutes ses dimensions, géographique, culturelle, écologique, sociale et économique, recèle une richesse qui va fonder la qualité du projet. Voilà ce sur quoi je m’appuierais dans ma démarche d’aménagement soutenable. Il s’agit de renouer avec la territorialité des lieux et d’en faire le gage de réussite du projet. Pour Magnaghi, "la soutenabilité du développement implique que la production de territorialité soit conçue comme un facteur déterminant de la production de la richesse."1 Je pense qu’il est en effet urgent de cesser de voir le territoire comme une contrainte limitant la production de richesse, alors qu’il en est le substrat. Encore faut-il considérer le territoire comme un substrat et non un simple support... et encore faut-il intégrer dans l’idée de richesse d’autres dimensions non exclusivement économiques mais liées à la qualité du cadre de vie, des écosystèmes, du lien social, de la vie culturelle... etc. Il s’agit donc bien de fonder le projet de territoire sur les valeurs propres à ce territoire que le diagnostic aura permis d’identifier à travers des enjeux. "Ce qui est en jeu, c’est le territoire, en tant que néo-écosystème construit par les civilisations qui s’y sont succédées au cours du millénaire précédent."2 Une lecture de ce néo-écosystème articulée autour d’un regard sur ce paysage permettra de créer aujourd’hui "des néo-écosystèmes, fondés sur la co-évolution de l’homme et de son milieu."3 Après une rupture consommée dans la Basse Vallée du Var entre l’Homme et son territoire, il convient de composer à nouveau une vallée pour les Hommes qui renoue avec sa territorialité afin de jeter les bases permettant à un nouvel "écosystème territorial"4 de se constituer. Dans un projet de territoire à long terme comme celui de l’OIN Eco-Vallée, il convient de donner au projet un fil conducteur tissé à partir des invariants structurels* du territoire et de veiller à ce que, au fil du temps, les différents aménagements s’inscrivent avec cohérence dans la trame esquissée. "Il s’agit de saisir et de préserver, dans la longue durée, le contenu ontologique du territoire, sa règle fondatrice ; au quotidien, il importe de proposer un projet qui l’utilise et le transforme de façon soutenable et compatible avec le statut ontologique des lieux."5 Voilà la posture que je m’efforcerais d’adopter en tant que paysagiste. "Le paysage dans lequel on s’inscrit est humanisé depuis de nombreux siècles. Il porte en lui les stigmates, les traces de cette présence humaine qu’il suffit de révéler pour les traduire en éléments de projet."6 Bien loin de vouloir muséifier le territoire, le projet devra puiser dans la richesse patrimoniale du territoire pour initier des évolutions qui répondent aux besoins et aux envies d’aujourd’hui. "Sauvegarder ces territoires [...] ne signifie pas préserver leur prétendue authenticité dans une perspective de conservation muséale." Il s’agit plutôt de faire en sorte "qu’une multiplicité d’avenirs possibles surgissent de l’affirmation des valeurs locales."7

"Caractéristiques qui constituent l’identité d’un système donné et qui, en lui permettant de s’adapter aux perturbations extérieures, en garantissent la préservation. [...] Ces caractères ne renvoient pas seulement aux fleurons du patrimoine, mais aux structures et morphologies territoriales et urbaines résultant des processus de co-évolution entre établissement humain et milieu, aux caractéristiques du paysage, à la nature particulière de certains systèmes environnementaux ou de certains systèmes économiques et culturels à base locale...etc., dont l’ensemble constitue ce que nous pourrions définir comme le patrimoine territorial. [...] Ils désignent des systèmes environnementaux, des réseaux écologiques, des bassins hydrographiques, des systèmes côtiers, des paysages historiques, [...], des tissus agraires, des modèles socio-culturelles, des valeurs relationnelles entre établissement et milieu : en somme, des caractéristiques dont la perte et la dégradation peut compromettre la soutenabilité du développement, fondée précisément sur l’interprétation de ces valeurs patrimoniales comme ressources."8

Il s'agit de faire émerger du territoire les valeurs fortes et intangibles qui donneront un cadre reterritorialisé à l'expression des besoins des Hommes

MAGNAGHI (2003) op. cit. 3 op. cit. 4 op. cit. 5 op. cit. 6 POUTARAUD, MAZAS, LEGUILLOU et al. (2007) 7 MAGNAGHI (2003) 8 op. cit. 1 2

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carte : www.beuil.com

Si la Basse Vallée est aisément identifiable en tant qu’unité paysagère, elle est culturellement multiple. Elle se partage entre trois aires linguistiques occitanes : dialectes provençal, nissart et gavot (cf. carte ci-contre). Les conditions de vie liées à la géomorphologie (littoral, plaine, collines, montagnes) et les successives appartenances territoriales (provençale, savoyarde, piémontaise, sarde...) ont fait de ce territoire une interface depuis longtemps enrichissant son identité d’influences très diverses. L’unité s’est réalisée peut-être un peu plus tardivement qu’ailleurs avec le rattachement du Comté de Nice à la France en 1860. Afin de saisir un peu mieux la complexité de ce territoire, un parcours à travers les différents temps et formes de son occupation s’impose...


Identité territoriale Temps et formes du territoire Un "fleuve-menace" qui charrie des limons fertiles Le fleuve Var, qui prend naissance dans la montagne de la Cayolle à 2600 m rejoint la mer après un parcours de 110 km qui fait de lui le plus important fleuve côtier de Provence. Au quaternaire, le Var a creusé dans son cours inférieur une large vallée parmi les collines de poudingues. En rive droite, les "baous" (en provençal, rocher escarpé) surplombent les collines de poudingues et laissent apparaître le substrat calcaire du jurassique. Le fleuve se distingue par son régime pluvio-nival qui connaît deux maximums, à l’automne et au printemps. Il possède un fort débit et charrie des graviers et galets qui n’ont pas le temps de se fragmenter plus avant de rejoindre la mer. Le Var serait "ainsi nommé, dit-on de varius, a variando, aut varius, à cause de l’irrégularité de son cours"1 En effet, les orages estivaux et la fonte des neiges au printemps induisent un lit et un débit très variable. Le cours du fleuve contribuait ainsi à former des "iscles", c’est à dire des terres qui émergent dans le lit du fleuve, au gré de ses crues. Le débit moyen du Var est de 56 m3/s mais il peut atteindre 6000 m3/s pendant les crues les plus importantes. Le fond de la vallée est ainsi longtemps resté inoccupé par l’homme, car trop dangereux. "L’habitat reste cantonné en hauteur, pour des raisons défensives et de salubrité"2. Seuls les gués de Gattières et de St Laurent permettent de franchir le cours inférieur du fleuve. Dés le Moyen-Age pourtant, les iscles du Var attirent la convoitise pour l’agriculture, cantonnée jusque là aux collines. Ces iscles vont pouvoir alors être utilisés "comme prés de pâture pour les bovins, prairies à fourrage, parfois comme terre de labour"3. Ils ne peuvent toutefois être occupés que temporairement en raison des crues torrentielles. "Différens travaux partie en maçonnerie, partie en arbres et arbustes couchés le long de la rivière [...] ont réussi à faire tirer quelque parti de ce qu’on nomme à cause de cela, les Iscles du Var, mais sont insuffisants pour en assurer une culture entière contre les grandes crues de la rivière, ainsi qu’on en fait chaque année la trop malheureuse expérience."4

un fleuve au cours irrégulier, menaçant les établissements humains

Frère des écoles Chrétiennes (1850) N’GUYEN (2007) 3 CLARAC (1994) 4 FODÉRÉ (1803) 1 2

Extrait de la carte géologique du BRGM au 1/250 000ème

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un "fleuve-frontière" Contrairement à Borgonio, Cassini matérialise la forntière (en pointillés) mais ne dessine pas le pays voisin...

Les axes de circulation passent sur les crêtes et l'habitat occupe les positions hautes de part et d'autre de la frontière entre la France et le Piémont.

des "iscles" au niveau de Gattières

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Carte de Borgonio (1683)

Carte de Cassini (1750)


Le franchissement du fleuve est difficile, les ouvrages en bois étant fréquemment emportés par les crues du Var...

Reproduction photographique (1932) d’une estampe ancienne anonyme conservée au Musée Masséna et datée d'avant 1860

Pendant longtemps, des "guéyeurs" faisaient franchir le fleuve aux gens au niveau des gués stratégiques de St Laurent et de Gattières

Hercule TRACHEL - Le Pont du Var - 28 cm. x 35 cm. - non daté (XIXème)

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vers un fleuve-ressource...

L’homme préfère s’installer sur les coteaux qui bien que très contraignants pour y établir des terres, offrent toutefois des qualités d’accès à l’eau et d’ensoleillement non-négligeables. "Les hommes [...] éclaircirent les bruyères, plantèrent les landes et les collines en pente, brisèrent les roches et de leurs débris élevés en murs soutenant les terrains pendants, firent de ces rocs escarpés de riches amphithéâtres."1 L’ampleur de ces travaux de terrassements est considérable, mais ces coteaux finissent par devenir des restanques fertiles. Joseph Roux précise toutefois que "les terres fertiles sont de plusieurs espèces. Celles qui sont près des embouchures des rivières doivent être mises au premier rang parce qu’elles sont annuellement engraissées par le limon des montagnes."2 Les défrichements et le surpâturage sur les collines du bassin versant du Var et de ses affluents aboutissent à causer au XVIIIè siècle de gros problèmes d’inondations. Le lit du Var, "autre fois resserré, a acquis depuis une quarantaine d’années une étendue considérable, et augmente à vue d’œil, à cause des orages qui ont lieu souvent sur les montagnes pelées qui l’environnent, et sur lesquelles les eaux pluviales ne peuvent plus s’arrêter, depuis les défrichemens des petits bois qui étaient sur leur sommités."3 Les terres des iscles sont d’un enjeu tout particulier pour l’agriculture en raison des limons fertiles qui les composent. Fodéré témoigne en 1803 des "meuriers qui y existaient avant le débordement, et qui produisaient un commerce honnête" qui ont été depuis arrachés par le fleuve. Au-delà des terres agricoles, ce sont même les établissements humains qui sont menacés : le Var "s’empare du terrain cultivé, mais encore du sol des habitations ; dont il a déjà emporté plusieurs, avec une église et le chemin qui conduit à Gilette"4.

Estampe aquarellée d’Albanis Beaumont, 1787

Il va très tôt s’avérer nécessaire pour conserver ce "terrain très précieux complanté en jardinet, vignes et oliviers, dans une plaine riante (si l’on n’avait pas le spectacle des désordres causés par le Var), de construire une forte digue"5...

Cette remarquable vue sur le Var nous permet de remarquer le ramassage de bois sur les berges ainsi que la présence d'hommes sur les iscles (au second plan). Au fond, on reconnait les silhouettes caractéristiques des Baous.

Le fleuve est ainsi pendant longtemps une menace, voire un ennemi à combattre. Parallèlement, les iscles sont depuis longtemps des terres très convoitées. Plus tard, les terres agricoles gagnées durablement sur le lit le seront d’autant plus. L'homme commence à percevoir l'extraordianire ressource que constitue le fleuve... L’évolution du positionnement des voies de circulation dans la vallée du Var témoigne bien du rapport au fleuve et de sa progressive domestication (cf schéma ci-dessous).

Positionnement des voies de circulation dans le temps et l'espace

passage en crête, dominant la plaine passage à la rupture de pente

passage sur la digue du fleuve (A8) ROUX (1862) op. cit. 3 FODÉRÉ (1803) 4 op. cit. 5 op. cit.

passage en milieu de plaine (RD 6202)

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Aujourd'hui

Moyen-Age d'après schéma J-P. CLARAC


Des terres gagnées contre le fleuve pour le développement agricole

canal d'amenée

Commence ainsi une lutte contre le fleuve pour gagner des terrains fertiles. En 1860, quand le Comté de Nice revient à la France, Napoléon III poursuit les travaux engagés sur la rive gauche, et les achève en 1869. La rive droite ne connaîtra ce sort qu’au siècle suivant. Ces travaux de colmatage ont défini "une trame qui persiste encore aujourd’hui dans le parcellaire"5. Ces travaux d’endiguements, hormis le gain de terres fertiles pour l’agriculture, permettent progressivement d’installer de nouveaux axes de déplacements plus rapides que les anciennes routes des coteaux. Cela favorisera les échanges et l’essor du commerce. Selon Joseph ROUX, dés 1862, de toutes les voies des Alpes-Maritimes, "les plus commerçantes sont celles de l’endiguement du Var". Cette "route principale qui mène à St Martin du Var, et, de là, [...] bifurque sur un beau pont en fil de fer"6 pour rejoindre ensuite l’arrondissement de Puget-Théniers.

l'eau du Var est acheminée derrière la digue par un canal d'amenée dans des casiers où on laisse décanter les limons avant de restituer l'eau au fleuve

digue

ROUX (1862) http://saintlaurentduvarhistoire.hautetfort.com/archive/2007/10/11/les-demeles-entre-laurentins-et-nicois-a-propos-des-iscles.html 3 CLARAC (1994) 4 ROUX (1862) 5 CLARAC (1994) 6 ROUX (1862) 7 Conseil Général 06 (2007) 8 CLARAC (1994) 9 N’GUYEN (2007) 10 GUIGO et al. (2001)

croquis : LD

En 1835, le Roi Charles-Albert de PiémontSardaigne décide de commencer l’endiguement de la rive piémontaise. Un système de casiers de colmatage est mis en place afin de permettre l’accumulation des limons charriés par le fleuve derrière la digue. Des canaux d’amenée sont créés au-delà de la digue, de sorte qu’en période de crue, les eaux troubles transitent par ces canaux vers les casiers qu’elles traversent successivement par l’intermédiaire de martellières. "Le colmatage a ainsi permis le dépôt de 20 à 30 cm de limons et de sables"3.

Les problèmes de salubrité se font moins sentir, même si on dénote encore à St Laurent du Var et St Martin du Var "des fièvres intermittentes lors des chaleurs, [...] causées par les eaux stagnantes et les effluves marécageux", le département des Alpes-Maritimes est dans la seconde moitié du XIXè siècle "un des plus sains de la France"4.

Var

La Viguerie de Nice, à l’origine sous influence des Comtes de Provence, s’était détachée en 1388 de la Provence pour devenir Savoyarde. Le fleuve était ainsi (re-)devenu la frontière entre les deux territoires, exception faite de la baronnie de Gattières qui était une enclave savoyarde en Provence. Certains auteurs (Ptolémée et Pline) s’accordent pour dire que le Var constituait auparavant la "séparation de l’Italie ancienne et de la Gaule"1,ce qui est contesté par de nombreux historiens (notamment l’Abbé Gioffredo). Toujours est-il que les Provençaux et les Niçois se sont disputé la possession des iscles du Var pendant 400 ans. De nombreuses querelles et assassinats auront lieu pour la jouissance de ces terres2 (notamment pour la récolte de bois). De 1792 à 1814, la région niçoise est reprise aux piémontais, mais les conflits reprennent dés le retour du Comté de Nice au Royaume de PiémontSardaigne. On prend ainsi mesure de tout l’intérêt que suscitaient ces iscles.

La majorité des bassins seront colmatés en 1885 et vendus à des agriculteurs. En une trentaine d’année, la "plaine" du Var était devenue un des plus riches terroirs agricoles du département7. Les terres gagnées en 1860 sont toutefois moins riches en limons que celles gagnées auparavant (iscles et palissades). Cela s’explique "par l’ancienneté de ces terres où les dépôts se sont faits depuis des millénaires"8 alors que les casiers plus récents se composent d’éléments plus grossiers. Les sols les plus limoneux se retrouvent ainsi au pied des coteaux. La création en 1861 du premier Marché de Gros, par François Malausséna, sur l’actuel cours Saleya, va favoriser l’essor de l’agriculture autour de Nice. L’arrivée du chemin de fer peu après, avec le prolongement de l’axe PLM (Paris-Lyon-Méditerranée), conduira rapidement le Marché de Nice à occuper une bonne position au niveau national. "Les terres alluvionnaires de la Plaine du Var vont permettre l’établissement du maraîchage à grande échelle"9. Longtemps, la commune de Nice sera la première commune agricole de France. L’agriculture maraichère est "alors prépondérante dans la vallée et elle le restera jusqu’aux années 70."10

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A gauche, la basse vallée du Var avant endiguement (Carte de Bourcet, 1760) A droite, superposition sur la même carte du Plan d'endiguement réalisé par les français (XIXème, non daté)

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source : CG 06

source : CG 06

des terres ont déjà été gagnées sur les iscles au pied des coteaux en rive gauche avant le plan d'endiguement...


Endiguement de la rive gauche du Var (non daté, XIXème)

Détail des digues source : CG 06

source : CG 06

source : CG 06

(non daté, XIXème)

source : CG 06

Plans des digues, vannes et canaux en rive gauche de la basse vallée du Var (1852-1870)

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L’Homme est longtemps resté cantonné sur les hauteurs, du fait de la menace constituée par le fleuve, mais aussi en raison du positionnement stratégique que cela lui procurait. Il a pu perfectionner au cours des siècles d’ingénieuses techniques de domestication de la pente, pour les besoins de l’habitat, de la voirie ou de l’agriculture.

photo : LD

Des coteaux investis par l’homme

vignes et serres sur les coteaux de Bellet, Nice

On a ainsi retrouvé sur les coteaux différentes formes de restanques qui selon les besoins, les moyens et les époques ont pu s’appuyer sur de simples talus de terre ou des murs en pierres sèches. Sur ces terrasses, on retrouvait le triptyque agricole méditerranéen : blé, vigne et olivier. Le blé qui prédominait jusqu’au XIXème siècle (jusqu’à 75 % des surfaces agricoles à Aspremont en 1858) a pourtant disparu aujourd’hui. Les faibles rendements ont en effet provoqué un rapide déclin des cultures céréalières, voyant leurs surfaces passer de 27000 ha en 1862 à 5500 ha en 1929.1

photo : LD

La vigne, bien que marginale, s’est maintenue. En 1912, ce sera la création d’un canal de crête sur le collet de Bellet, qui permettra de sauver les vignes qui ont résisté au phylloxera. Grâce à "la modernisation des techniques et l’introduction de nouveaux plants"2, la culture viticole pourra prospérer sur les coteaux jusqu’à obtenir une Appellation d’Origine Contrôlée en 1941. Le vignoble s’étendait alors sur 600 hectares... Le vin de Bellet, mentionné dés le XVIIème siècle, connait aujourd’hui un certain succès qui permet à ce vignoble de maintenir sa surface (bien que réduite à une cinquantaine d’hectares). Église du Collet du Baron et domaine viticole associé, à Bellet 1

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Conseil Général 06 (2007) N’GUYEN (2007)


La polyculture vivrière était pratiquée au sein des oliveraies et des vignes afin de se prémunir contre les aléas météorologiques et les maladies phytosanitaires. Un paysan au XIXème siècle en témoigne : "la vigne est disposée en files étendues assez larges pour laisser dans leurs intervalles des planches de terrain sur lesquelles on sème alternativement du blé, des fèves, des petit pois et d’autres légumes. [...] Les propriétaires qui n’ont qu’un petit champ pour vivre ne veulent pas que tout soit sacrifié à un seul produit qui peut manquer."2 photo : http://raf-photos.blogspot.com

gravure : www.oleiculteur.com

Le cailletier est la variété d'olivier locale qui a valu aux olives du pays niçois leurs AOC pour l'huile et la table

L’oléiculture qui était une des principales sources de revenus des AlpesMaritimes a subi un net recul au XIXème siècle, suite à une succession de fortes gelées et d’attaques de la mouche "kaïron"1. Malgré son déclin, l’Olivier s’est sensiblement maintenu, notamment grâce à la prime à l’oléiculture instituée en 1910. Dans la vallée du Var, l’olivier occupe encore certains coteaux, au nord, à une altitude où il est moins soumis aux attaques de la mouche. La fin du XXème a connu un engouement assez fort pour l’olivier et l’idée de terroir qu’il véhicule. Néanmoins, la production reste aujourd’hui assez anecdotique, malgré l’AOC obtenu en 2001. L’arbre persiste surtout dans le paysage grâce au charme qu’il exerce sur les néo-ruraux et la plus-value touristique qu’il procure.

Prise d'eau du canal sur la Vésubie à St Jean la Rivière

Conseil Général 06 (2007) 2 op. cit. 1

photo : CANCA

Anonyme, vers 1895

Canal de Vésubie

En 1878, la création du canal de Vésubie va permettre la floriculture sur les terres des coteaux réservées jusque là à l’olivier, aux vignes et aux pâtures. Au sud, sur la commune de Nice, ce sont ainsi les cultures de fleurs coupées qui vont acquérir la renommée que l’on sait. Avec l’arrivée du chemin de fer, cette production horticole prit d’autant plus son envol et s’est imposée après la première guerre mondiale, l’oeillet en étant la principale production. L’horticulture s’est progressivement intensifiée pour passer d’une culture de plein champs à une exploitation scientifique sous serre, plus rentable. Toutefois, la spéculation foncière induite par l’essor de la construction et la concurrence étrangère sur le marché mondial ont entrainé la diminution d’un quart des exploitations de fleurs coupées entre 1970 et 1980.

La culture d'oeillets va devenir emblématique de Nice...

Alexandre Scipion GAMBA DE PREYDOUR Oeillets - 24 cm. x 36 cm. - 1887

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Le désenclavement de l’arrière-pays maralpin par la ligne Nice-Digne va coïncider avec la naissance des pratiques de sports d’hiver dans les Alpes Maritimes. Le Chevalier de Cessole, alpiniste philanthrope issu d’une vieille famille de la noblesse niçoise, crée en 1910 une station de sports d’hiver à la Tête du Sapet, près de Valberg.

Une attractivité touristique forte

La ligne Nice-Digne, surnommée "Train des Pignes" (en raison des immenses forêts de pins qu’elle traverse), permettra ainsi l’essor des sports d’hiver. Du réseau Sud-France, il ne reste aujourd’hui que cette ligne (propriété des Chemins de Fer de Provence), à vocation essentiellement touristique.

Dès la fin du XVIIIème siècle, Anglais et Français venaient passer l’hiver à Nice.

source : http://village-saintlaurentduvar.fr

On fait habituellement remonter l’engouement des Anglais pour la ville à 1766, avec la publication du récit de voyage de Tobias Smollett : "Travels through France and Italy." Ses descriptions du climat niçois et de ses amandiers fleurissant en janvier, séduisent la noblesse anglaise pour leurs villégiatures hivernales. La réputation de Nice atteint les hommes de lettres russes qui la fréquentent de manière sporadique au cours de la première moitié du XIXème siècle (notamment Gogol en 1843). Plus tard, quand la famille impériale russe y séjournera, la fréquentation saisonnière slave deviendra prédominante. Ainsi, "en 1859 à Nice, sur cent quatre familles étrangères, on en comptait trente Russes, dix-neuf Anglaises, vingt-quatre Françaises (le comté de Nice faisait alors partie du royaume de Sardaigne) et vingt et une de nationalités diverses."1 Première leçon de ski du Chevalier Victor de Cessole, en 1909 source : www.victordecessole.org

La France n’échappe pas à l’attrait de Nice. La Compagnie des Chemins de fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée, dite PLM, qui reliait depuis 1855 Paris à Marseille, étendra sa ligne à Nice, via la côte, peu après le rattachement du Comté à la France. Le PLM devient la compagnie par excellence des départs en villégiature, leurs affiches publicitaires en témoignent. Le tracé PLM entre Marseille et Vintimille suit en effet le littoral et dessert les stations désormais célèbres de St Tropez, Cannes, Antibes, Nice, Monaco et Menton. L’arrière-pays varois et niçois reste cependant complètement enclavé. Face au mécontentement de ces populations, le réseau "Sud-France" est créé avec notamment les lignes Nice-Digne via PugetThéniers (1883-1911) et Nice-Meyrargues via Grasse et Draguignan (1886-1892).

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La compagnie PLM va réaliser de nombreuses campagnes publicitaires et, via le train, la Côte d'Azur deviendra une destination de villégiature très prisée...

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http://www.cg06.fr/tourisme/jardin-cathedrale-russe.html


http://scanicehistorique.free.fr

Le climat niçois a offert très tôt l’opportunité de cultiver des plantes exotiques rapportées des colonies. La présence du palmier, devenu emblématique de la côte d’azur, est attestée dés le XVIIIème siècle.

L’introduction de plantes exotiques a peu à peu substitué au paysage agricole littoral, un paysage nouveau, dépaysant et exploité à son avantage par le tourisme, notamment sur les affiches publicitaires de la PLM2. Si les plantations d’arbres d’alignement ont été nombreuses dans la seconde moitié du XIXème siècle, il semblerait que l’essor de l’automobile ait conduit à les supprimer partiellement (Promenade des Anglais) ou totalement au début XXème3. Quelques squares et jardins publics seront toutefois créés à Nice après la seconde guerre mondiale, mais il faudra attendre les années 1980 pour renouer avec la présence du jardin en ville, qu’on appelle désormais "espace vert".

La promenade des anglais, juste après la guerre, les palmiers marquent le paysage côtier, mais l'automobile envahit déjà l'espace

http://tonton84.t.o.pic.centerblog.net

En 1860 est créée la Société Centrale d’Agriculture, d’Horticulture et d’Acclimatation de Nice (affiliée à celle de Paris). Aucune distinction n’est faite entre la recherche en agriculture et en horticulture, ainsi en 1864, la Société d’Agriculture acquiert 13 ha de terrains issus de l’endiguement du Var au lieudit "Le Bois du Var", à l’emplacement de l’actuel CADAM1.

En 1961, le Préfet des Alpes-Maritimes, s’adressant au Ministre de l’Intérieur, insistait sur l’importance que revêtait la sauvegarde du littoral azuréen, si l’on ne voulait pas "que des dommages irréparables soient causés à un pays qui, vivant essentiellement du tourisme, doit s’attacher au maintien et à la protection de tout ce qui attire et retient les visiteurs."4 S’en suivra la création d’un certain nombre de zones protégées à travers un projet d’acquisition d’espaces naturels départementaux. Malgré tout, cette prise de conscience assez précoce ne parviendra pas à enrayer sensiblement le phénomène.

Conseil Général 06 (2007) op. cit. 3 DE SOUZA Robert (1913). Nice, capitale d’hiver, Serre Éditeur, Nice, 216 p. 4 Conseil Général 06 (2007) 1 2

La décolonisation va au contraire accentuer encore le rythme de la construction, du fait d’une part des besoins des rapatriés et d’autre part du retour des capitaux des colonies.

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La demande en résidences secondaires se fait essentiellement dans les centres anciens et sur le front de mer, provoquant une flambée des prix du fait de la forte solvabilité de ces populations. "Subséquemment, la demande locale ne trouve plus satisfaction dans les centres urbains et se retrouve contrainte à prospecter en marge de ces derniers, notamment dans les communes périphériques."2 Il en découle une urbanisation diffuse des coteaux qui se fait au détriment des terres agricoles et des espaces "naturels" (en fait bien souvent d’anciennes terres agricoles en friche). A titre d’indication, dans les Alpes-Maritimes la surface urbanisée a été multipliée par 2,4 entre 1970 et 2000, passant de 166 à 400 km². Sur la même période, la population n’a été multipliée que par 1,4...3 En 1960, on comptait 260 ha de la vallée inférieure du Var affectés au maraîchage, c’était selon Blanchard, "le jardin maraîcher de Nice"4. L’avancée de l’urbanisation a ensuite provoqué un recul considérable de l’activité agricole. Le vieillissement de la population, et surtout l’envolée des prix du foncier a induit une spéculation foncière de la part des agriculteurs propriétaires en retraite.

A St Laurent du Var, le front de la zone industrielle gagne sur les terres agricole en plaine, tandis que sur les coteaux s'étend un habitat pavillonaire diffus...

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La Zone Industrielle Départementale est créée en 1968 sur les terres gagnées récemment sur le fleuve. Elle devient vite la première zone industrielle du département. D’autres suivront, s’installant souvent de manière illégale (sans permis de construire) et bénéficiant d’un laxisme favorable de la part des élus en raison du nombre d’emplois (et de la taxe professionnelle...) générés. Ces équipements occupent de vastes espaces à la périphéries des villes et s’accompagnent d’infrastructures lourdes (parkings, voiries).

CG O6

Les flux massif de touristes, séduits par les lieux, ont fait de l’espace un objet de "nombreuses convoitises; convoitises exercées par la population locale désireuse d’acquérir une partie du territoire qu’elle habite, convoitises d’une clientèle étrangère en quête de possession du rêve environnemental qui l’habite."1

Elle rend aussi possible le développement des centres commerciaux aux dépens des commerces de proximité. Le groupe Nouvelles Galeries crée Cap 3000 en 1969 près de l’estuaire du Var, sur d’anciennes terres agricoles.

L'estuaire du Var en 1951 et en 2003... le cours du fleuve a été dérivé par la construction de la digue qui sécurise le site de Cap 3000 qui a pris la place de terres agricoles et d'espaces naturels

CG O6

Jusqu’à la seconde guerre mondiale, la croissance de la région niçoise avait trouvé à s’exprimer principalement sur le front littoral et dans la cuvette de Nice. La Plaine du Var et les fonds de vallons se voyant essentiellement occupés par un bâti vernaculaire lié aux activités agricoles.

Il est à noter que "les centres urbains historiques se sont formés au temps de la mobilité pédestre. Leur extension spatiale a été limitée par la lenteur de la marche d’où, en contrepartie, une forte densité"6. La mobilité automobile au contraire va permettre une périurbanisation diffuse...

Mairie de St Laurent du Var

www.cap3000.com

L’ère de la consommation

A la fin de la seconde guerre mondiale, les Alpes-Maritimes ont connu une très forte croissance de leur population, voyant le rythme des constructions s’accélérer comme jamais. "En 5 ans, de 1955 à 1960, le nombre de permis de construire délivrés a dépassé le nombre de logements recensés à Nice au lendemain de la guerre"5. Fuyant les grands ensembles et la ville dégradée par la circulation automobile croissante, les habitants se sont tournés vers l’habitat individuel, profitant du cadre naturel de la "colline". Paradoxalement, c’est bien l’essor de l’automobile qui leur a rendu possible cette fuite...

VOIRON-CANICIO (2001) op. cit. 3 JOURDAN (2006) 4 Conseil Général 06 (2007) 5 op. cit. 6 JOURDAN (2005) 1 2


Cette période de croissance s’accompagne de la réalisation des grandes infrastructures, notamment de l’autoroute A8, qui est mise en service en 1976 sur le tronçon St Augustin - St Isidore. On a bien évidemment fait passer le tracé de l’autoroute sur les berges du Var, afin de limiter les coûts d’acquisition foncière et d’éviction. Cette voie à forte circulation est venue constituer un obstacle physique "entre la ville et sa voie d’eau, reléguant le fleuve au second plan, dans un au-delà visible mais inaccessible."1 Cet aménagement est venu renforcer la rupture préexistante entre Nice et le fleuve d’une part et entre rives droite et gauche d’autre part. L’essor de l’automobile et les logiques de mitage de l’espace ont effectivement rendu nécessaire un développement massif du réseau routier. Cela s’explique notamment par l’éloignement par rapport au lieu de travail du fait de l’étalement urbain (qui touche aussi bien l’habitat que les pôles d’emplois qui se concentrent en périphérie des villes). Ainsi, en 1982, 67% des actifs de la conurbation azuréenne vivaient et travaillaient dans leur commune, en 1999, ils ne sont plus que 53%2.

L’espace est abondant et donc consommé allègrement...

- la construction du CADAM au niveau duquel la distance entre les digues n’est plus que de 100 m4, (alors que le lit s’étend entre 200 et 300 m sur le reste de la basse vallée5).

photo : LD

La Plaine du Var devient peu à peu un "espace support" qui va recevoir les équipements et activités que la ville ne peut plus accueillir, faute d’espace. Elle devient en quelque sorte "l’arrièrecour" de l’agglomération niçoise, "on y retrouve les activités qui gênent la vue : garages auto, casses, centrales à matériaux, foyer Sonacotra, aire des gens du voyage..."3

- le doublement de la RD 202, qui a diminué d’un tiers la largeur du lit dans les gorges de la Mescla,

photo : CANCA

L'autoroute constitue une barrière entre la plaine et le fleuve...

Après guerre, la rive droite est progressivement endiguée, libérant des terres supplémentaires qui accueilleront des activités agricoles à Gattières ou la Gaude et des activités industrielles à St Laurent ou Carros. Malgré l’ampleur des terres ainsi gagnées sur le lit du fleuve, certains aménagements continueront de réduire le lit majeur du Var :

source : Andrée DAGORNE

photo : LD

photo : LD

On peut voir sur ces cartes que la réduction du lit du fleuve s'est poursuivie bien au-delà des grands travaux d'endiguements du XIXème...

DGUHC (2006) JOURDAN (2006) 3 N’GUYEN (2007) 4 GUIGO et al. (2001) 5 TRICOT et al. (1999) 1 2

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Evolution de l'occupation du sol dans la plaine (source : GUIGO et al., 2001)

1955 L’agriculture est l’activité dominante de la plaine du Var, elle occupe 72 % des terrains de la vallée. Si le cours du fleuve est déjà majoritairement endigué, même en rive droite, les casiers sont occupés par des activités agricoles de plein air, à même d’épancher les crues. 1977 On remarque une forte densification des périphéries de Nice et St Laurent. "Cette extension est caractérisée entre autres par l’apparition de grands ensembles, qui sont passés de 1 % des surfaces en 1955 à 7 % en 1977"1. Le tertiaire s’est développé, avec la création des grands centres commerciaux (Cap 3000 en 1969, Lingostières en 1977). "Par manque d’espace dans les zones urbanisées, les activités ont été transférées plus en amont dans la vallée."2 Du fait de la croissance démographique et économique, les grandes infrastructures de transport (A8 et aéroport) ont vu le jour. Les espaces cultivés se sont ainsi réduits, et les friches sont plus nombreuses (5 % en 1955 et 7 % en 1977). Elles correspondent soit aux anciens casiers, soit aux terrains gagnés sur le Var et non encore occupés (à la Gaude). 1994

GUIGO et al. (2001) op. cit. 3 op. cit. 1 2

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La tendance observée en 1977 se poursuit. Les nouvelles activités industrielles, commerciales, administratives ou sportives consomment énormément d’espace, au détriment toujours des terres agricoles. Elles n’occupent désormais plus que 20 % de l’espace. La réduction des surfaces agricoles disponibles est compensée par la présence des serres (6 % de l’espace) qui étaient absentes en 1955. "En revanche, les activités industrielles et de services occupent un peu moins de 2 % de la superficie en 1955, 13 % en 1977 et 23 % en 1994."3


En effet, ces constructions de logements et des infrastructures qui les accompagnent (ou les précèdent) ont nécessité des besoins massifs en matériaux. Le Var, par les matériaux grossiers qu’il charriait, a été à ce titre très sollicité. Ainsi, "c’est seulement à partir des années 1950 [...] que les extractions d’alluvions silico-calcaires se sont fortement développées dans le lit mineur du Var."1 Le lit du Var présentait en effet de nombreux attraits pour le secteur du BTP : "l’extraction se faisait à faible coût et les dépenses de transport étant relativement réduites du fait de la proximité des agglomérations. [...] De plus, les granulats extraits présentaient l’avantage d’être relativement propres, de très bonne qualité et d’une granulométrie tout à fait propice à ces nombreux travaux."2 Ces extractions de matériaux ont entrainé un abaissement du niveau de la nappe, compromettant l’alimentation en eau potable de l’agglomération niçoise. "Un arrêté préfectoral interdit dès 1963, toute ouverture de carrière en aval de la digue des Français."3 A l’amont, les extractions intensives se poursuivront cependant, la demande étant plus forte que les volontés de protection.

photo : Catherine ADRIAN

photo : CG O6

A cette consommation abusive d’espace, se faisant au détriment des espaces agricoles ou naturels, s’est ajouté une surconsommation des ressources.

A la confluence du Var et de l'Esteron en 1946, le lit du Var occupe presque toute la plaine, seule la rive gauche est endiguée et cultivée... Le même site aujourd'hui : des casiers de colmatage ont été gagnés sur le fleuve au Bec de l'Esteron et entre temps, les extractions de matériaux en rive droite ont conduit à la formation du Lac du Broc...

S’appuyant sur les données du SAGE, Stéphanie N’GUYEN donne une image forte de la surconsommation qui a eu lieu : "Au total, ce seront près de 150 ans d’apports naturels qui seront extraits en 40 ans, soit 50 millions de m3 de matériaux."4 Ces extractions massives de granulats se poursuivront dans les casiers de rive droite les plus au nord, au niveau de la confluence du Var avec l’Esteron. Le creusement abusif de ces casiers a conduit à former le Lac du Broc, profond de 24 m, au fond duquel la nappe affleure à -18 m !... Les casiers du bec de l’Esteron sont aujourd’hui toujours exploités. Si le creusement du lit a eu quelques aspects positifs sur l’écoulement des crues, il a entraîné un affouillement des digues et des fondations des ouvrages d’art, l’impossibilité de continuer à alimenter gravitairement les canaux d’irrigation et un abaissement général du niveau de la nappe.5 Des carrières creusées dans les collines de poudingue, ont été réinvesties par d’autres activités (Nécropole de Nice, Pôle d’Activités Logistiques) après leur fin d’exploitation. SAFEGE (2002) CLARAC (1994) 3 SAFEGE (2002) 4 N’GUYEN (2007) 5 SAFEGE (2002) 2

Les derniers casiers exploités au Bec de l'Esteron...

photo : LD

1

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Dés l’après guerre, de nombreux champs captants sont créés dans la nappe pour l’alimentation en eau potable, les villes devant répondre à une demande en eau toujours plus grande. Le nappe du Var alimente l’essentiel de la population des Alpes-Maritimes en eau potable...

photo : Catherine ADRIAN

photo : Mairie de St Laurent du Var

Le contrôle des eaux

Le seuil N°16 près de Plan-du-Var

Aussi, quand en août 1967 se produit un abaissement significatif de la nappe, la population s’inquiète et les agriculteurs manifestent. "Des canaux d’irrigation prenant leur eau dans le lit du Var étaient aussi asséchés : leur prise se trouvait trop haute par rapport à la ligne d’eau d’étiage."1 Un Comité Technique du Var, est créé par arrêté préfectoral le 1er juillet 1969. Il va expérimenter un système de seuils temporaires sur le fleuve afin de stabiliser le niveau de la nappe. Suite aux bons résultats observés, 7 premiers seuil sont réalisés entre 1971 et 1974. La construction de ces seuils sera financée par une taxe sur les extractions. Le champ captant de St Laurent du Var

Le Comité Technique constate en 1975 que les seuils ont "bien accompli leur rôle en maintenant des graviers en amont des zones d’extraction, en protégeant les berges par une vitesse du courant moindre, en préservant un fil d’eau compatible avec les irrigations par les canaux et en stabilisant le niveau de base de la nappe."2 D’autres seuils seront réalisés ultérieurement au cours des années 80.

Les "sucres" viennent tenir les digues, ici sur l'Esteron, peu avant sa confluence avec le Var...

Si ces aménagements ont assez bien régularisé la ligne d’eau du fleuve, ils ont également eu des conséquences écologiques. Les seuils ayant ralenti la vitesse d’écoulement du fleuve, les particules fines ont pu se déposer et colmater les berges du fleuve qui ont vu naître des "biocénoses dites secondaires car formées consécutivement aux endiguements et aux seuils."3 Le Var a ainsi retrouvé "d’une façon artificielle la ripisylve qui pouvait exister aux siècles précédents sur les terres aujourd’hui conquises au fleuve"4 (série méditerranéenne du Peuplier blanc).

CLARAC (1994) SAFEGE (2002) 3 op. cit. 4 CLARAC (1994) 5 IBRANYI (2006) 1 2

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Autrefois, les terres agricoles de plaine étaient en capacité d’absorber une partie des crues du Var, ce qui faisait d’ailleurs leur richesse. Aujourd’hui, la "disparition des zones agricoles ou boisées au profit de l’urbanisation a augmenté les surfaces imperméables, provoquant une accentuation de la vitesse d’écoulement, et donc une augmentation des risques d’inondations."5 La vulnérabilité des terres de plaine a ainsi augmenté, amenant les pouvoirs publics et les acteurs locaux à élaborer un SAGE afin d’éviter les situations catastrophiques, telle que la crue de 1994.

photo : LD

Le Var, par son cours mobile, soumet les digues à des phénomènes d’affouillement à leur pied, sous la force des courants. Les digues étant en terre, on les a protégées par des "sucres" de béton. Ne pouvant plus s’étendre en largeur, le Var a du gagner en profondeur ce qu’on lui avait ôté par endiguement (environ une quinzaine de mètres).


Historique des crues (source : SAGE) 1651 La Haute Vallée du Var est dévastée. 1842 Débordement du fleuve dans la plaine. 1846 Le Var emporte trois arches du pont de la route Nice-Antibes. 1857 Digues emportées. 1864 En aval de Puget-Théniers, les digues sont éventrées. 1886 Débordement du Var et du Tuebi entraînant des inondations à Guillaumes et aux abords de Puget-Théniers. La vallée du Cians est ravagée. 1898 Destruction du Pont de Villeneuve d’Entraunes. Un moulin et une scierie sont emportés ; 6 ha sont engravés. 1906 Rupture de digues à l’amont de Puget-Thénier ; routes et chemins de fer coupés, une victime 1957 Les précipitations de novembre provoquent inondations et coulées de boues sur la partie amont du Var et de ses affluents. Suite aux épisodes pluvieux de décembre, le Var déborde et détériore son endiguement aval, particulièrement sur la commune de Saint-Laurent-du-Var. Ces séries de crues ont longtemps servi de référence. 1979 Raz-de-marée lors de travaux sur l'aéroport 1993 La montée des eaux du fleuve rend impraticable la voie qui longe le Var rive droite, du pont de l’autoroute A 8 au pont Napoléon III (on enregistre à ce niveau un débit de pointe de 1720 m3/s). Post-crue, sont entrepris des travaux de restauration des canaux d’écoulement (dérasement, déboisement, rectification des méandres, etc.) et de remise en état des seuils 2 à 6.

photo : CG O6

1951 Le pont Charles Albert est emporté.

Le pont Charles-Albert emporté par la crue de 1951 Seuil détruit au niveau de Lingostières lors de la crue de 1994

photo : Mehran (Nice-Matin) Lors de la crue de 1994, le Préfet quitte le CADAM en zodiac....

photo : Jacques COSTA (CETE Méditerranée)

Suite à la destruction du pont du Var en 1945, certains secteurs sont inondés....

photo : CG O6

1994 La crue surprend tout le monde par son ampleur. Elle emporte des berges, détruit les seuils 2 et 3, submerge l’A8 et inonde le CADAM et l’Aéroport. Le Plan ORSEC est déclenché. La vulnérabilité potentielle des aménagement situés en bordure du fleuve a alors due être révisée.

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A propos du risque d’inondation... "Certains espaces, peu occupés, peuvent subir des inondations sans que cela représente un risque majeur. En revanche, s’ils s’urbanisent, le même aléa engendrera sur le même espace un risque fort. Le risque varie donc fortement en fonction du type d’occupation du sol."1 Le risque est le croisement d’un aléa et d’une vulnérabilité. "L’aléa se définit comme étant la probabilité d’un phénomène naturel à se manifester et pouvant créer des dégâts humains et matériels."2 Il est très délicat à caractériser du fait de l’étendue du bassin versant du Var et des bassins versants annexes (ceux de ses affluents). De plus, le bassin versant du Var se caractérise par des pentes très fortes : "moins de 5% de la superficie du bassin (soit 150 km2) accusent des pentes inférieures à 10 %."3 Il est difficile d’évaluer les probabilités météorologiques. C’est bien souvent l’expérience qui permet de réajuster les estimations d’aléa. Ainsi, l’étude de la SOGREAH4 a évalué le débit de la crue de 1994 à 3512 m3/s (à Nice) alors qu’on l’estimait auparavant à 1800 m3/s pour une crue centennale !...

Ces deux constituantes du risque sont grandement influencées par l’évolution de l’occupation du sol. L’imperméabilisation du sol par l’urbanisation va augmenter l’intensité de l’aléa. Et la présence d’établissements humains dans des zones potentiellement inondables va augmenter leur vulnérabilité. "S’il n’y avait pas la présence d’une ville, le risque se manifesterait différemment : nous aurions toujours un événement pluvio-orageux, mais il se produirait sur un "milieu naturel", la vulnérabilité serait moins forte étant donné l’absence d’enjeux humains et socio-économiques."6 "Ce fleuve méditerranéen connaît naturellement des crues violentes constituant un aléa qui ne génère pas de risque majeur, tant que le lit du fleuve est inoccupé et donc que la vulnérabilité et les enjeux sont faibles."7 Le bassin versant de la basse vallée du Var (en rouge, en bas) est alimenté par plusieurs sous-bassins. La basse vallée du Var recueille en fait une grande partie des eaux des Alpes du Sud. La définition de l'aléa au niveau de la basse vallée doit donc s'effectuer à cette échelle plus large et intégrer les aléas météorologiques qui se produiraient très en amont...

GUIGO et al. (2001) op. cit. 3 CLARAC (1994) 4 SOGREAH et al. (1999) 5 GUIGO et al. (2001) 6 op. cit. 7 op. cit. 8 op. cit. 1 2

Avant d’autoriser de nouvelles constructions, on doit "mesurer les impacts de la croissance du risque au travers de la création de nouvelles vulnérabilités."8

Le Plan de Prévention des Risques d'Inondation (PPRI) de la Basse Vallée du Var a été prescrit le 24 novembre 1999 et mis en application anticipée en avril 2002. Néanmoins, les cartes d’aléa de ce PPR sont toujours en cours d’élaboration... Ci-contre, un extrait du PPRI (état en 2002) dans sa partie sud (Nice et St Laurent du Var). L'ensemble de la rive droite est en rouge (risque fort) tandis qu'en rive gauche, seules certaines zones sont à risque moyen (bleu), dont le secteur du CADAM, inondé en 1994.

carte : SAFEGE, DDE 06

source : SOGREAH et al. (1999)

La vulnérabilité se "caractérise par la propension d’une société donnée à subir les dommages d’un phénomène destructeur. Elle relève d’enjeux socio-économiques et humains."5

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Les entités paysagères photo : Alain GUGLIELMETTI

Le lit du Var et la plaine La plaine du Var, c’est à dire l’ancien lit du fleuve, offre un espace plan de très faible dénivelé jusqu’à son débouché méditerranéen, qui contraste fortement avec le contexte collinaire voire montagneux de l’arrière-pays niçois. Le fleuve est étonnamment peu perceptible de la plaine du fait des endiguements et des infrastructures (A8, RD 6202, RD 6202bis, Voie Ferrée) qui viennent l’isoler en contrebas de la Plaine. On a un effet de "marche" entre la plaine et le lit du fleuve. Le fleuve n’est donc pas sensible (ni visuellement, ni symboliquement) depuis la plaine. Il faut monter sur les coteaux pour le voir se dérouler... La plaine, gagnée par l’homme contre le fleuve, concentre l’essentiel des attentions et convoitises, tandis que le Var (la menace, la frontière) reste repoussé derrière les digues.

Dans le lit du Var, à Lingostières, en contrebas de la RD 6202 (soulignée par des arbres d'alignement, à droite)

Les ponts de franchissement du fleuve, dédiés au transit automobile, ne permettent pas de relation avec le fleuve. Depuis peu, des pistes cyclables ont été aménagées sur les berges et sur ces ponts et redonnent quelque peu la possibilité d’être au contact du fleuve. Le fleuve, par son tracé reliant les Alpes à la méditerranée, constitue une voie de migration pour les oiseaux et à ce titre le lit mineur du Var est inscrit en tant que ZPS* dans le réseau Natura 2000. Cette reconnaissance environnementale du "lien maralpin" joué par le fleuve laisse entrevoir la forte symbolique qu’il pourrait porter...

photo : LD

La piste cyclable récemment aménagée entre les berges et l'A8 permet des circulations douces le long du fleuve, qui reste toutefois souvent caché derrière un écran de végétation...

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Schéma : Thévenin, DDAF 06 (1982)

L'endiguement induit un effet de marche entre la plaine et le lit du fleuve. Le niveau d'étiage du fleuve est 5 m en contrebas

photo : LD

Le fleuve aperçu depuis le pont de l'autoroute


photo : LD

Ainsi dans la plaine, on ne sent pas la présence de l’eau. Elle est pourtant parcourue par de petits canaux d’irrigation. Ces canaux sont le plus souvent mal entretenus, sousalimentés en eau et ne se distinguent que difficilement d’un simple fossé.

L'urbanisation a conduit à chenaliser les canaux et à aménager des couvertures pour l'accès aux habitations...

Ils prennent différentes formes le long de leurs tracés, tour à tour enherbés, chenalisés, busés ou couverts...

ici à La Baronne

Le canal des serres aux Baraques, absorbé par la friche qu'il traverse

photo : LD

Le canal d'irrigation est encore utilisé par les agriculteurs, ici à St Isidore

photo : LD

Derrière le centre commercial de Lingostières, difficile de distinguer le canal d'un simple fossé...

Les champs captants ne doivent accueillir aucune activité pour des raisons de protection de l’eau, ce sont donc des espaces vides qui s’apparentent à des friches et ne laissent pas comprendre leur rapport à l’eau. A droite, le champ captant de St Laurent du Var.

photo : Mairie de St Laurent du Var

photo : LD

Une présence de l'eau dans la plaine peu perceptible...

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Les vallons obscurs Nés du creusement inlassable du poudingue par de petits affluents du Var, qui peuvent toutefois devenir impétueux, ces vallons restent relativement étroits (parfois moins de 2 m à leur base). Ils bénéficient de ce fait de conditions climatiques très particulières. "Forte humidité, ombre quasi permanente, stagnation de l’air froid en hiver, ont permis l’installation et le maintien d’une flore plus froide qui s’est retrouvée piégée ici lors de la remontée généralisée des températures."1 Ils font l’objet depuis quelques années (en 1990 pour les plus septentrionaux, en 2005 pour les plus méridionaux) d’un classement en Arrêté de Protection de Biotope.

Le vallon obscur de Donaréo

La connexion biologique et paysagère de ces vallons avec le fleuve en est compromise. A terme, cet isolement des espèces dans les seuls vallons pourrait conduire à une "dégénérescence génétique"2 alors qu’auparavant, la biodiversité de ces vallons s’enrichissait d’échanges avec les espèces fréquentant le lit du fleuve. Le terme "vallon obscur" désignait à l’origine un vallon situé en proche périphérie de Nice, dans le quartier de St Sylvestre. Il est mentionné très tôt dans les guides touristiques et semble avoir une valeur patrimoniale forte (cf. encadré page ci-contre). Cela n’empêchera pourtant pas son bétonnage quasi intégral, puisqu’aujourd’hui le fond du vallon est en grande partie occupé par le boulevard Jean Behra... La partie demeurée "naturelle" abrite encore quelques espèces qui attisent la curiosité des botanistes locaux.

Des vallons "cachés", écrins de biodiversité isolés de la Vallée du Var.

1

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Cascade dans le vallon obscur de Donaréo

CLARAC (1994) terme emprunté à Frédérique GERBEAUD-MAULIN (CETE Méditerranée)

L'exutoire du vallon obscur de St Sauveur est traité comme un vulgaire canal d'écoulement pluvial

photo : LD

photo : Catherine ADRIAN

Au débouché de ces vallons, les cours d’eau sont le plus souvent contraints (buses, chenaux) afin de ne pas contribuer à l’inondabilité de la plaine. On peine à déceler la naissance de ces vallons, car leurs jonctions avec le fleuve sont écrasées par les infrastructures.

photo : Catherine ADRIAN

Ce sont des espaces intimes, cachés dans les plis du relief collinaire de poudingues.


En vert, les vallons obscurs classés par Arrêté de Protection de Biotope (APB)

Le "Vallon obscur" historique, tel qu'il se présentait au début du siècle dernier, à gauche

photo : www.nissalabella.net

Étant le plus proche de la ville, il a été bétonné pour les besoins de l'extension de Nice (quartier St Sylvestre)...

sources carte : IGN EDR25 et DIREN PACA

Le "Vallon Obscur de Nice" dans les guides touristiques anciens1 "Le but principal d’une promenade à St Barthélémy ne sera ni le couvent ni l’église, qui n’offre rien de bien intéressant, mais bien le vallon Obscur, auquel on ne manquera pas de faire une visite. [...] Le vallon Obscur, appelé aussi vallon des Étoiles, est un corridor long, étroit, sinueux d’un kilomètre environ, creusé à pic par quelque mouvement géologique dans un terrain tertiaire. Il a une hauteur de cent mètres. Le jour n’y arrive qu’affaibli, tamisé par les fines dentelles des capillaires (cheveux de Vénus) et des fougères, et par le feuillage des arbres suspendus tout en haut, au bord de l’abîme. [...] L’extrémité nord du torrent et à peu près obstruée par des amas de cailloux roulés ; le promeneur ne pourra donc le parcourir dans toute son étendue sans inconvénients. [...] L’air ambiant qui s’y engouffre du nord au midi, est beaucoup plus frais et surtout beaucoup plus humide que celui qu’on respire au dehors. Cette différence de température produit dans le ravin un courant d’air presque continuel très dangereux pour les santés délicates, même pendant la belle saison." 1

LACOSTE, PIETRI (1888)

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photo : LD

Les coteaux

Entre le littoral et l’arrière-pays, les coteaux adoptent une morphologie diversifiée, en fonction de leur orographie, mais aussi de leur proximité avec la ville. Sur les pentes les plus raides (> 30%), seul un boisement naturel a pu se développer, ce qui est moins vrai sur des secteurs de pentes plus douces. Les collines de poudingues, assez peu pentues, ont été plutôt colonisées par l’agriculture ou l’habitat, tandis que les monts calcaires plus au nord, sont essentiellement boisés.

En haut à droite, les coteaux boisés de Gilette, du Broc et de Carros En haut à gauche, des vignes sur le coteau de Bellet A droite, le lotissement de Ste Pétronille, à St Laurent En bas, Nice s'étend progressivement sur le coteau, de manière de plus en plus diffuse...

photo : LD

photo : LD

Des coteaux boisés, cultivés ou habités selon leur topographie.

Les coteaux à proximité des villes de Nice et St Laurent font l’objet d’une urbanisation diffuse qui leur ôte leur lisibilité. Sur ces coteaux habités, persistent par endroits de petites parcelles agricoles en terrasses.

Plus au Nord, on distingue bien mieux la présence des villages ancestraux (Le Broc, Carros, Gattières, Colomars…) qui émergent sur quelques pitons rocheux, leurs abords n’étant pas encore trop mités.

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photo : CANCA

Bien que mités, les coteaux dits de Bellet (qui s’étendent en fait sur les "colles" de Crémat et de Saquier) présentent tout de même des vignes en terrasses remarquables, qui imprègne fortement l’image paysagère de ces coteaux cultivés.


La confluence du Var et de l’Esteron

Lac du Broc

photo : LD

Ce site est le dernier espace gagné par l’homme sur le lit du fleuve. Les derniers casiers sont aujourd’hui exploités pour leurs granulats, à l’exception d’un espace classé en APB, à l’extrémité du "bec de l’Esteron". Par son étendue non-bâtie, cet espace met en valeur les montagnes qui le surplombent et marque l’entrée de gorges plus resserrée sur le Var, comme sur l’Esteron. La DTA ne s’y est pas trompée et a identifié cette confluence comme un site d’attention particulière marquant la "porte des Alpes du Sud".

Casier exploité pour ses granulats

En rive gauche de l’Esteron, juste avant qu’il rejoigne le Var, s’est installée une usine de chimie fine à la Mesta. Cette installation, constitue un point noir paysager et pose en outre des problèmes de pollution de l’eau (rejets de phosphore).

Casier classé en Arrêté de Biotope

Usine de la Mesta

Lac du Broc

carte : LD (fond IGN-EDR25)

Le passage de la RN 6202 bis en rive droite du Var, près des casiers du bec de l’Estéron a suscité des projets d’installations d’activités (IKEA notamment). De tels aménagements compromettraient la qualité paysagère et écologique du site, et iraient à l’encontre des principes de développement durable en terme de transports (site isolé des axes de circulation majeurs).

photo : Catherine ADRIAN

Les creusements abusifs d’anciens casiers ont conduit à la formation du lac du Broc, très profond, séparé du Var par une digue qui supporte la RD 6202 bis. Il fait aujourd’hui l’objet d’un projet de Parc Départemental. Cet espace est cependant très contraint, notamment du fait de la résurgence de la nappe au fond du lac (le lac fait 24 m de profondeur, et la nappe affleure à 18 m !...).

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Une façade littorale très "consommée" affranchie de l’estuaire du fleuve.

L'estuaire offre un cadre remarquable, ouvrant sur les Alpes au loin. L'immeuble du CADAM, au second plan, s'affirme massivement dans ce paysage

A l’approche de l’estuaire du Var, les collines s’estompent doucement et laissent place à un cordon littoral plan qui a concentré l’essentiel de la conurbation Nice - St Laurent. Pont de l'A8 Pont double pour la voie ferrée et la nationale

"Petite Camargue" Aéroport de Nice

CAP 3000

STEP de St Laurent

Cette façade littorale, est marquée par les nombreuses infrastructures concentrées dans cet espace réduit : RD 6202, A8, voie ferrée et bientôt LGV Paca... Les grands équipements (Aéroport, Cap 3000, CADAM) ont induits parkings, bretelles routières, ponts et rond-points... Toutes ces infrastructures ont ainsi généré de nombreux délaissés urbains, inutilisés et non mis en valeur. Ce front littoral, bien que récemment équipé de pistes cyclables demeure un lieu de prédilection pour l’automobile, le piéton n’y ayant définitivement pas sa place. D’un point de vue paysager, on constate la consommation frénétique, systématique et anarchique du foncier littoral. "La fonctionnalité et la rationalité restreinte l’emporte sur l’image urbaine."1 De par la topographie maralpine, cet espace littoral plan a en effet concentré tous les enjeux, et ce plus tôt que la plaine du Var, plus reculée. L’estuaire du Var, enserré par un des plus vastes centres commerciaux de la région, forme néanmoins un véritable "couloir de nature" où se développe une très grande variété d’espèces animales et végétales surnommée "la petite Camargue". L’accès à la mer au niveau de l’estuaire est très contraint, d’un côté par l’aéroport, de l’autre par la Station d’épuration de St Laurent les bains. Il y subsiste cependant quelques pratiques marginales en rive droite à l’embouchure (pèche, baignade, graffiti...).

Fond IGN EDR25 1

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Propos empruntés à Alain GUGLIELMETTI

Photo : Jean-Yves Guilloteau, 2006 (www.survoldefrance.fr)

La façade littorale


Il est à noter aussi des aménagements faits a minima sur la digue qui borde Cap 3OOO : un sentier délicatement dénommé «ouvrage hydraulique» que l’on ne parcourt que sous notre "entière responsabilité" permet de découvrir la "Petite Camargue" et débouche sur la mer, juste après la station d’épuration de St Laurent du Var...

photo : LD

La "Petite Camargue"

photo : LD

Le panneau qui marque le départ du sentier de découverte de la "Petite Camargue"....

photo : LD

Le début du parcours se fait sur la digue qui protège CAP 3000...

photo : LD

Derrière l'espace naturel sanctuarisé, l'aéroport souligne le caractère remarquable d'un tel espace au coeur de la métropole...

photo : LD

Des panneaux d'informations sont disposés le long du sentier

A l'extrémité de l'estuaire, des pêcheurs, mais aussi des plagistes isolés qui profitent de ce cadre surprenant...

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Des enjeux à concilier Les enjeux de développement soutenable Au-delà de l’affichage politique, l’exigence de soutenabilité est aujourd’hui incontournable, plus que jamais, la finitude de notre planète étant clairement perceptible. Le projet politique cherche ici à répondre à une demande sociale à travers des enjeux nouveaux de développement (économique) durable. Je ne reviendrais pas sur la façon dont j’envisage d’assumer l’ambition "durable" de l’OIN, le positionnement méthodologique énoncé en première partie garantit la soutenabilité du projet. Le souci de "durabilité" est transversal et devra imprégner l’ensemble des éléments du projet. La participation des citoyens à l’OIN Éco-Vallée, pourtant une des conditions de sa réussite, n’est jamais évoquée, que ce soit par les services de l’État ou par les différents bureaux d’études ayant esquissé des projets. Je n’ai pu, seul, mener au sein de ce travail (dont ce n’était d’ailleurs pas l’objet) une consultation du public. En revanche, j’ai pu rencontrer différents acteurs, de bords politiques opposés ou tout simplement animés d’intérêts divergents. Chacun d’entre eux m’est apparu très préoccupé par le projet d’OIN, et porteur de propositions. dessin : Marthe, issu de VIDAL et al. (2007)

Il serait nécessaire, pour un projet de cette ampleur, de mettre en oeuvre un grand Débat Public, à l’image de ce qui a pu se faire pour le projet de contournement routier de Nice. Il me semble essentiel de ne pas laisser de côté les habitants, ces "experts du territoire", car ils peuvent non seulement enrichir le projet, mais surtout, ils sont les garants de son acceptation, et par là, de sa réussite. On peut mesurer autour du célèbre Quartier Vauban à Fribourg, comment les citoyens impliqués dans ce projet en sont devenus les meilleurs ambassadeurs... De manière générale, il est nécessaire dans ce "projet-vitrine" du développement durable "à la française" de rechercher de nouveaux modes d’excellence. Il ne s’agit pas de se lancer dans des prouesses architecturales visant à marquer ostensiblement le projet par un quelconque symbole phallique de puissance posé dans la vallée, ou de dresser un inventaire de chiffres sensationnels vantant les performances énergétiques des bâtiments. Nous sommes devant un défi bien plus complexe, il s’agit de répondre à des enjeux cruciaux, en terme de logements et d’emploi notamment, en s’inscrivant intelligemment dans la logique du territoire. Ainsi, l’excellence du projet transparaîtra dans la relation harmonieuse que les établissements humains sauront entretenir avec leur territoire. Il sera notamment primordial de garder à l’esprit que la terre est une ressource rare et non renouvelable. On se doit d’être économe en espace, de conserver des terres fertiles, pour des enjeux de souveraineté alimentaire, de biodiversité, de paysage, mais aussi pour la protection contre les risques d’inondation. Une des premières exigences de l’OIN est en effet d’assurer une maîtrise intégrée du risque d’inondation et de restaurer les équilibres écologiques au niveau du fleuve et de son réseau hydrologique.

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Penser le territoire comme un substrat et non pas comme un simple support


Les enjeux métropolitains Qu’on le veuille ou non, la ville est bel et bien inscrite dans une logique métropolitaine. Malgré ma volonté de m’extraire de cette vision métropolitaine déracinée, et de replacer les logiques de territoire au centre du projet, il est un certain nombre d’enjeux que je ne peux ignorer. Tout d’abord, on l’a vu précédemment, l’étalement urbain a généré des congestions importantes du trafic. Le réseau ferré des Alpes-Maritimes ne s’est pas développé depuis le début du XXème siècle alors que le réseau routier projette encore de nouvelles réalisations. carte : LD, fond IGN EDR25, données sources CCI

Pourtant, la fréquentation du "train des pignes" n’a cessé de monter en puissance avec la saturation du réseau routier. En un an, (de mars 2005 à mars 2006), on est passé de 39350 voyageurs par mois à 46889, soit une augmentation de 20 %.1 La ligne accueillait 891000 voyageurs en 1913, tandis qu’en plein essor de l’automobile, en 1968, elle n’en comptait plus que 151992. Mais ces dernières années, la fréquentation a constamment augmenté, atteignant 492770 passagers en 2005.2 On constate un déficit de transports en commun en rive droite alors que la rive gauche est très irriguée (cf. plan bus du CG06, à gauche). Or la rive droite accueille plus d’emplois avec notamment la ZID de Carros (cf. carte emplois, à droite). La résolution de la question des déplacements domicile-travail est un enjeu essentiel du projet. A l’échelle métropolitaine, "le développement des réseaux de transports collectifs rapides entre les pôles d’un réseau de ville ou d’une conurbation est un enjeu stratégique pour maintenir et augmenter l’effet d’agglomération à la source de la dynamique de métropolisation."3 Le récent tramway niçois, les lignes en projet ainsi que le projet de LGV PACA vont dans ce sens. Le futur TGV permettrait une mise en réseau du "chapelet métropolitain"4 de PACA et au-delà, constituerait le "chainon manquant de l’arc méditerranéen ferroviaire"5 qui relierait tout au moins Gênes à Barcelone, via Nice et Marseille.

Les principaux pôles d'emplois dans la vallée

importance en terme d'emprise au sol (violet) et de nombre d'emplois (cercles oranges)

Une des facettes des enjeux métropolitains relève de l’urbanisme. Il va s’agir de dépasser le modèle de l’étalement urbain et son corollaire : la mobilité automobile. Cette surconsommation de l’espace a provoqué une raréfaction du foncier, ainsi qu’une explosion des prix. Cette raréfaction agit aujourd’hui comme un frein relatif au mouvement d’étalement urbain. Comme, parallèlement, la production de "la ville sur la ville" n’augmente pas, il en résulte un déficit global de l’offre en logements. Cette crise du logement touche en premier lieu les classes les plus modestes, le nombre de logements sociaux étant très largement insuffisants dans le département.

CG O6

Ce déficit de logement "représente une grave menace pour la cohésion sociale mais aussi pour le développement économique en raison des difficultés croissantes de logement que rencontrent les actifs, y compris ceux qui ont un bon niveau d’emploi."6 Cette difficulté qu’a la métropole à loger ses actifs (à des prix abordables) la pénalise visà-vis d’autres agglomérations, plus dynamiques. En effet, vu son importance démographique, la conurbation azuréenne est en déficit d’emplois métropolitains supérieurs (EMS7) par rapport aux autres grandes agglomérations. (7,3 % d’EMS contre 12% pour l’agglomération toulousaine et 9,1% pour l’espace métropolitains de Montpellier-Nîmes)8.

Le Patriote N°2020, semaine du 2 au 8 juin 2006 op. cit. 3 JOURDAN (2005) 4 op. cit. 5 op. cit. 6 op. cit. 7 EMS : emplois propres aux métropoles identifiés comme "supérieurs" par l’INSEE (recherche, art, informatique, banque-assurance, télécommunications...etc.) 8 JOURDAN (2005) 1 2

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Les enjeux territoriaux Le fleuve et son réseau hydrographique Le fleuve Var, bien que repoussé dans ses retranchements les plus extrêmes, demeure l’entité structurante du territoire. Pourtant, il semble aujourd’hui être plutôt vécu comme une contrainte ou un vecteur de risque, que comme un formidable élément naturel pouvant fédérer un projet autour de lui. Aujourd’hui, le fleuve est tenu à l’écart, ses berges sont le plus souvent inaccessibles et les différents aménagements réalisés (digues, routes) viennent souligner encore plus son rôle de frontière, d’obstacle. Le projet d’aménagement a tout intérêt à s’édifier autour du fleuve, ce dernier étant à même de lui donner force et cohésion sur l’ensemble du territoire.

L’estuaire du Var et sa confluence avec l’Esteron méritent une attention toute particulière. L’embouchure du fleuve est en effet le point d’accroche de la vallée du Var avec la Côte d’Azur, et à ce titre constitue un espace tout à fait particulier et unique, que ce soit sur le plan géographique, environnemental, urbain ou paysager. Cet estuaire, contraint par les développements urbains depuis les années 60, a vu ses espaces naturels réduits (malgré leur appellation de "Petite Camargue"). Ne peut-on pas redonner à la basse vallée du Var une "porte d’entrée" de qualité, annonciatrice des ambitions du projet en terme de développement durable et de qualité du cadre de vie ?

L’enjeu majeur autour du fleuve est de le considérer comme "fleuve-ressource" (eau, limons) et de cesser de le vivre comme "fleuve-frontière" ou "fleuve-menace".

De même, à l’amont, la confluence de l’Estéron marque l’origine du fleuve maîtrisé par endiguement, dans un cadre encore préservé du développement urbain anarchique. L’existence d’espaces naturels protégés (APB) et le développement d’un projet ambitieux d’aménagement du Parc Départemental du Lac du Broc peuvent-ils constituer la base d’un aménagement global valorisant à la "porte" des Alpes ?

Pour une valorisation environnementale et paysagère, il serait intéressant de redonner au fleuve un fonctionnement à caractère naturel, notamment en rétablissant ses connections avec les exutoires des vallons obscurs et en retrouvant un lit tressé (faciès méditerranéen) qui permette une gestion équilibrée des transports alluvionnaires. Concomitamment, il s’agira aussi d’intégrer dans cette démarche le risque d’inondation. Le SAGE préconise d’ailleurs de "favoriser le fonctionnement hydraulique des vallons et de leurs exutoires."1 Parallèlement au système hydrologique constitué par le fleuve et les vallons affluents, il existe dans la plaine des canaux agricoles qui "jouent un rôle hydraulique important."2 Ce réseau mal entretenu gagnerait à être remis en état. Le fleuve, contenu et enserré, manque d’espace pour absorber des débits de crise. L’Étude de la SOGREAH3 préconise de supprimer progressivement les obstacles à l’écoulement du fleuve, c’est à dire d’abaisser les seuils, supprimer les végétaux et les atterrissements en certains points afin de reconstituer ainsi un lit capable de faire transiter 3400 m3/s. Ce débit maximal resterait toutefois en-dessous du débit mesuré lors de la crue centennale de 1994 (3512 m3/s). La DTA considère que "les données actuelles permettent d’évaluer les débits d’une crue centennale à 3 500 m3/s et d’une crue exceptionnelle à 5 000 m3/s."4 Il sera donc nécessaire de retrouver des zones où le débordement est possible en cas de crues ; des zones où l’occupation du sol afficherait une vulnérabilité la plus faible possible (terres agricoles, parcs, terrains de sports...).

Replacer le fleuve au centre de la vallée, le considérer comme une ressource Rétablir les équilibres écologiques du réseau hydrographique de la vallée

SMEBVV (2006) 2 op. cit. 3 SOGREAH (1999) 4 DDE 06 (2003), p.105 1

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Requalifier l'estuaire du Var et mettre en valeur sa confluence avec l'Estéron


Les terres agricoles de la plaine

Les terres (agricoles) "inconstructibles" sont équipées des réseaux et n'attendent qu'une révision du PLU pour s'urbaniser...

Quelle place accorder à l’agriculture en plaine, sachant que c’est elle qui a motivé l’endiguement du fleuve, et donc la formation de cette même plaine ?... Cet héritage agricole offre l’opportunité de construire la ville en lien avec les productions agricoles traditionnelles qui ont fait la renommée de la région et participent de l’identité de la Plaine du Var. Au-delà de ce rôle-témoin qu’elles pourraient jouer, ces terres agricoles, offrent avant tout des surfaces maraîchères susceptibles d’alimenter la ville par circuits courts (AMAP, vente directe...), avec une qualité reconnue. En assumant cette agriculture urbaine, on peut ainsi satisfaire plusieurs objectifs de développement durable (préservation du sol et de la nappe, réduction des émissions de gaz…). La disparition irrémédiable de ces terres agricoles au profit de zones bâties conduirait par ailleurs à une uniformisation du paysage le long de la plaine du Var, qui ne serait alors plus qu’un cordon urbain continu, depuis l’embouchure du fleuve jusqu’au Lac du Broc. Ces zones agricoles jouent en effet un rôle de coupure d’urbanisation ou d’espace de respiration qu’il est nécessaire de conforter. Nombre d'exploitations agricoles (INSEE/Agreste)

Il faut savoir que "l’agriculture est clairement l’activité traditionnelle des littoraux. Elle y occupe encore près de la moitié de l’espace (45%)"1. Cependant, l’agriculture recule sur le littoral plus vite qu’ailleurs, concurrencée par les activités résidentielles et touristiques. Ainsi, "les Alpes-Maritimes ont vu leur SAU divisée par 2 dans la décennie 80."2 La plaine agricole du Var est toujours la première zone de production agricole du département, devant la vallée de la Siagne. Étant donné le relief tourmenté de la région, les terres agricoles les plus fertiles et les plus viables économiquement se retrouvent évidemment en plaine. L’essentiel de la préservation de "l’agriculture départementale" va se jouer dans la plaine du Var3.

La soutenabilité passe ici par la non remise en cause de la vocation agricole des terres aux meilleures qualités pédo-climatiques, d’autant plus quand elles sont rares dans la région. Vu l’augmentation du coût de l’énergie, notamment pour le transport, il est primordial de garantir une souveraineté alimentaire locale, afin d’éviter d’avoir à "importer dans quelques années des tomates d’Espagne qui coûteront plus cher que celles qu’on aurait pu produire ici"4. Le concept de souveraineté alimentaire, présenté par Via Campesina lors d’un Congrès du FAO à Rome en 1996, donne la "priorité à la production agricole locale pour nourrir la population" et reconnaît aux états, le droit de "se protéger des importations agricoles et alimentaires à trop bas prix"5. Les enjeux de développement durable concernant l’agriculture s’inscrivent donc dans une réflexion mondiale. La conservation d’une activité agricole dans la vallée suppose de résoudre le problème du foncier et de voir les terres agricoles effectivement cultivées. Il ne sert à rien de maintenir un classement agricole pour des terres qui ne satisfassent pas aux conditions de viabilité économique. Les restanques et les vignobles sont généralement assez largement reconnus comme contribuant à une certaine qualité paysagère. Les espaces ouverts de plaine jouent euxaussi un rôle paysager important. Ils soulignent le pied des coteaux boisés, notamment en rive gauche face à la ZID de Carros, et participent ainsi pleinement à la bonne lisibilité des entités paysagères constitutives de la vallée du Var. Les agriculteurs ne peuvent toutefois n’être que des "producteurs de paysage", ils exercent avant tout une activité économique dont ils doivent tirer satisfaction. Si les enjeux paysagers ne sont pas le souci majeur des agriculteurs, ceux-ci sont toutefois souvent sensibles à l’aspect de leurs terres. "Le fleurissement, l’entretien des abords d’exploitations sont les témoins d’une réussite, d’une professionnalisation..."6 En outre, un paysage de qualité se révèle généralement porteur d’une image valorisante pour les produits agricoles. L'agriculture biologique progresse dans les Alpes-Maritimes, mais reste assez rare dans la basse vallée du Var. La tendance en France est un ralentissement du développement de l’agriculture biologique qui s’explique notamment par un "effort de recherche trop faible", et par des "politiques publiques de soutien à l’agriculture biologique insuffisamment incitatives"7. Pour la soutenabilité du projet, il est nécessaire d'oeuvrer au développement de l’agriculture biologique.

LEFEBVRE et al. (2004) op.cit. 3 Michel DESSUS, Président de la Chambre d’Agriculture des Alpes-Maritimes, entretien du 18 juillet 2008 4 op. cit. 5 Texte de Via Campesina sur la souveraineté alimentaire (2003), disponible sur : http://www.abcburkina.net/content/view/359/56/ 6 SERRANO et al. (2007) 7 INRA (2008) 1 2

photo : LD

Vu dans la vitrine d'une agence immobilière à Levens...

Garantir la vocation agricole des terres qui offrent les meilleures qualités pédo-climatiques

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Le "coeur de plaine"

Les coteaux Bien que souvent oubliés dans la perception que l’on a de la "plaine" du Var que l’on ne nomme que trop rarement "vallée", les coteaux constituent un élément très fort de la morphologie de ce territoire. Au sud, à proximité de la ville, on peut craindre la poursuite de l’urbanisation diffuse anarchique qui est venue peu à peu miter ces coteaux, l’agriculture étant en net recul. Comment requalifier les coteaux habités, comment répondre à leurs besoins en matière d’équipements et d’infrastructures, en un mot, comment habiter la pente? Les coteaux encore cultivés en restanques évoquent des techniques culturales ancestrales et suggèrent ainsi une certaine authenticité. Cela est renforcé à Nice par la présence du vignoble de Bellet qui jouit d’un certain prestige. Ces paysages de terrasses constituent souvent un argument de vente pour les produits agricoles. Bien que les prix du foncier agricole sur les coteaux soient inférieurs à ceux pratiqués en plaine, la spéculation foncière y est quand même forte. Les friches spéculatives prolifèrent tandis que des agriculteurs exploitants recherchent des terres sans succès. La plupart d’entre eux ne sont pas propriétaires des terres qu’ils exploitent et dépendent souvent de baux verbaux précaires, ce qui fragilise l’exploitation. La déprise agricole et le mitage menacent donc ce paysage à forte valeur patrimoniale et économique (tourisme, valorisation des productions agricoles).

Cet espace concentre l’essentiel des enjeux urbains de la vallée, pour la simple raison qu’il est le plus urbanisé à ce jour et en continuité directe avec l’agglomération niçoise. C’est l’espace le mieux desservi par les infrastructures de transport et il est appelé à l’être encore plus (projets de tramway et de LGV). Toutefois, ce site demeure scindé en deux par un fleuve qui n’est franchi que par des axes routiers de transit (autoroute, voies rapides). Cette rupture historique et physique est accentuée par l’endiguement du fleuve et par des axes routiers (l’Autoroute A8 en rive gauche et, dans une moindre mesure, la RD95 en rive droite). L’enjeu majeur à terme dans ce "Coeur de Plaine" est donc bien de réconcilier la rive gauche et la rive droite autour du fleuve, ce qui nécessite de tisser des liens entre ces deux rives. Il va falloir auparavant réussir à constituer de la ville, là où sévit depuis un demi-siècle une urbanisation anarchique, en l’absence de tout projet urbain. Comment insuffler du projet sur un territoire urbanisé "à l’emporte-pièce" pendant si longtemps ?

Requalifier les coteaux colonisés par une urbanisation diffuse anarchique Préserver les coteaux cultivés et boisés du mitage Ré-apprendre à habiter la pente

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photo : DDE 06

Les coteaux plus au nord, majoritairement boisés et pentus, ne peuvent que conserver cet aspect naturel faute d’autres fonctions. Il faut éviter toutefois qu’un habitat anarchique s’y développe. Ces coteaux servent en outre de cadre à la mise en valeur des villages perchés qui perdraient toute leur unité et leur lisibilité s’ils étaient noyés dans une masse d’habitat diffus.

Donner au "coeur de plaine" une image urbaine autour du fleuve


Des enjeux au projet...

assumer l'héritage agricole de ce territoire et garantir la vocation agicole des terres les plus fertiles

1. Conforter et mettre en valeur les terres agricoles

rétablir les équilibres écologiques du réseau hydrographique et maitriser les risques d'inondations

2. Faire émerger un réseau de corridors écologiques

donner une image urbaine aux espaces urbanisés de manière anarchique en l'absence de tout projet

3. Accueillir la ville dans les mailles de cette trame

replacer le fleuve au centre de la vallée, le considérer comme une ressource

4. Réunir la ville autour de son fleuve

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Révéler une trame territoriale qui tienne la métropole Affirmer les invariants structurels du territoire, mettre en valeur son identité Il ressort du diagnostic que l'homme a rompu son rapport au territoire. Il a notamment perdu de vue que le fleuve était porteur de ressources, en eau et en limons. Afin de renouer avec les valeurs du territoire, je propose de mettre en relief une trame aujourd'hui négligée, qui se constituerait de "pôles agricoles" reliés entre eux par un réseau de corridors écologiques raccordant le fleuve, les vallons et les canaux d'irrigation.

1. Conforter et mettre en valeur les terres agricoles

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croquis : LD

2. Faire émerger un réseau de corridors écologiques


Apporter une réponse structurée au développement métropolitain L'ossature agro-écologique établie permettra de donner un cadre à l'expansion de la métropole qui viendra se lover dans les mailles de cette trame et retrouvera ainsi une relation avec le territoire. Il convient de réorienter la ville vers l'agriculture de la vallée (désormais qualifiable d'agriculture urbaine), vers ses espaces naturels et vers son fleuve...

3. Accueillir la ville dans les mailles de cette trame

Aujourd'hui les axes routiers s'érigent en barrières entre la ville et le fleuve...

Des voies routières plus perméables permettraient un accès à des promenades le long des berges...

croquis : LD

croquis : LD

croquis : LD

4. Réunir la ville autour de son fleuve

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Conforter et mettre en valeur les terres agricoles Constituer des "pôles agricoles" dans la plaine Les terres agricoles, on l’a vu, participent de manière essentielle à l’identité de la plaine. En outre, on trouve ici les terres les plus fertiles du département. Il serait irresponsable d’artificialiser irrémédiablement ces sols. Ces espaces ouverts sont les seuls à même d’encadrer l’urbanisation et d’éviter la banalisation de la vallée du Var. Si c’est bien "le vide qui structure l’espace"1, ces terres agricoles sauvegardées seront le socle du projet de paysage de la vallée. On va progressivement organiser une "mutation agricole proche de la ville [...] au service des nouveaux quartiers"2 en saisissant l’opportunité de fonder une agriculture urbaine productrice d’aménités en terme de paysage, de biodiversité et de souveraineté alimentaire locale. Protéger les terres agricoles réclame avant tout de rompre avec les logiques de spéculation foncière sur ces terres. C’est bien parce que la vocation agricole de ces terres peut être remise en question à chaque révision des documents d’urbanisme, que le prix du foncier agricole se rapproche dangereusement du prix du foncier constructible. La poursuite ou l’installation d’une activité agricole ne peut dans ces conditions "faire le poids" face à des potentialités de construction. Des outils réglementaires assez récents existent pourtant, pour garantir une vocation agricole de ces sols dans le temps. Les ZAP (Zones Agricoles Protégées3) permettent ainsi de soustraire à la pression urbaine des espaces agricoles fragilisés, par la création d’une servitude publique. Cette servitude est inscrite en annexe du document d’urbanisme. La remise en cause de la vocation agricole de parcelles classées en ZAP n’est possible que par arrêté préfectoral, après avis de la Chambre d’Agriculture et de la Commission Départementale d’Orientation de l’Agriculture. La nouveauté de cet outil, et par conséquent le faible nombre de réalisations de ZAP en France, ne permet pas encore d’évaluer leur succès.

Le projet vise à conforter ces "pôles agricoles" et à préparer leur conversion vers une agriculture biologique. Assumer l’ambition de soutenabilité de l’OIN, implique en effet de renoncer progressivement aux logiques intensives de l’agriculture conventionnelle. La conversion à l’agriculture biologique ne peut se réaliser à l’échelle de la plaine sans une planification et un appui technique, menée conjointement par l’EPA, la DDEA et les techniciens de la filière Bio (Agribio 06). Les délais de conversion des sols à l’agriculture biologique étant de trois ans (pour le maraîchage), il est en effet nécessaire de planifier une rotation sur les parcelles afin de ne pas cesser la production. De plus, l’agriculture biologique réclame une certaine technicité (polyculture, rotations, lutte biologique...), les agriculteurs conventionnels doivent donc être formés en conséquence. Un soutien financier est souhaitable pour les premières années de conversion. Il est reconnu que l’agriculture biologique permet sur le long terme de réaliser des économies (en intrants) et de produire plus de valeur ajoutée. "La diversification des cultures (espèces et variétés), dans le temps comme au sein de la parcelle ou au niveau du paysage, permet de stabiliser les rendements via ses effets sur les ressources et surtout sur les organismes participant aux fonctions de contrôle biotique."4 Ces activités agricoles pourront en outre générer des aménités pour la société en ce qui concerne le paysage, mais aussi "la disponibilité en eau et la régulation des crues, la qualité des eaux, la régulation du climat et la réduction des risques d’incendies."5 On reconnaît aussi de plus en plus à l’agriculture un rôle de "conservation patrimoniale" dans la mesure où elle protège l’espace de la surconsommation induite par l’étalement urbain. La tendance est bien chez les élus locaux "d’instrumentaliser l’agriculture en réponse à des demandes urbaines de services environnementaux, récréatifs et d’entretien de paysages."6

En conformité avec la logique initiée par la DTA, je propose d’identifier les zones agricoles les plus vastes et les plus cohérentes (20 ha minimum d’un seul tenant), afin de les prémunir contre l’urbanisation. Leur classement en ZAP permettra de les extraire du climat d’envol des prix du foncier qui sévit dans la région maralpine, et ainsi de pérenniser l’outil de travail des agriculteurs et le paysage de plaine.

Antoine GRUMBACH, cité dans CLARAC (1994) Michel DESVIGNE, extrait de la conférence donnée le 10 mars 2008 au Pavillon Arsenal, à Paris, vidéo en ligne sur : www.pavillon-arsenal.com/videosenligne/collection-6-108.php 3 Créées par la LOA de 1999 (articles L112-2, R112-1-4 et suivants du Code Rural) 4 INRA (2008) 5 op. cit. 6 BERTRAND et al. (2006) 1 2

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Les activités horticoles, fortes consommatrices de fioul pour le chauffage des serres (70000 litres/an pour 4000m² de serres2), sont en voie de conversion à des modes de chauffage plus respectueux de l’environnement. Le Président de la Chambre d’Agriculture, horticulteur de profession, "vient d’obtenir le permis pour passer à la filière bois" sur son exploitation et "travaille d’ailleurs depuis deux ans à l’étude d’un projet pour convertir tous les agriculteurs du département au bois."3 Un travail avec l’ensemble des acteurs permettrait de valoriser les différentes initiatives en faveur d’une agriculture plus soutenable au sein du projet. Chaque pôle agricole pourra mettre en avant certaines activités complémentaires selon ses spécificités (vente directe, recherche, éducation du public, agro-tourisme, horticulture, pépinières...). L’ensemble de la démarche vise à mettre la ville en relation avec ses espaces agricoles, en assumant l’héritage agricole de la plaine pour fonder une agriculture urbaine. Les produits de la "campagne niçoise" pourront être valorisés sur les marchés et dans la restauration auprès des nombreux visiteurs qu’accueille la côte d’azur toute l’année.

photo : LD

Les dynamiques de circuits-court (AMAP, coopératives, vente à la ferme...) ont fait leurs preuves un peu partout mais restent peu implantées dans la vallée (2 producteurs en AMAP). Domine plutôt une agriculture intensive qui écoule ses productions exclusivement par le biais de grossistes au MIN. Or, "l’espace agricole devient durable parce qu’il est relié au monde urbain par diverses relations."1 Le développement des circuits-courts est un enjeu qu’a saisi la majorité des acteurs agricoles, y compris les tenants de l’agriculture conventionnelle. J’ai pu par exemple, rencontrer un agriculteur à St Isidore qui avait cessé de travailler avec les grandes surfaces et assurait désormais ses ventes à travers 3 AMAP, 2 marchés et la livraison d’un grand restaurant niçois... Sa trésorerie étant plus saine, les banques ont pu lui accorder un prêt pour moderniser son exploitation. Les agriculteurs ont tout intérêt à diversifier leurs débouchés et à s’émanciper le plus possible des fluctuations des marchés, du coût du transport et des âpres négociations avec les centrales d’achats.

Les terres en maraîchage composent un paysage très particulier constitué de champs aux cultures variées et de serres... Ces étendues ouvertes offrent à la ville des espaces de respiration qui permettent d'ouvrir des vues sur le "Grand Paysage"...

VIDAL et al. (2007) Le Patriote N°2115, semaine du 4 au 10 avril 2008 3 op. cit. 1 2

photo : Stéphanie N'GUYEN

La proximité de la ville, jusqu’alors vécue par les agriculteurs comme une menace devient une chance...

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Installer le MIN à St Isidore En 2003, la DTA prévoit (et indique sur sa carte d’orientations) "l’implantation du Marché d’Intérêt National, au sud de l’échangeur de Saint-Isidore"1. Le déplacement du MIN est en effet nécessaire pour permettre à la future gare multimodale de s’implanter à son emplacement actuel à proximité de l’aéroport et de la voie ferrée. La concession entre la SEM qui exploite le MIN (la SOMINICE) et la Mairie, propriétaire des terrains, arrive à son terme en 2010. De plus, les élus locaux souhaitent y implanter "un quartier d’affaires abritant une gare multimodale de transport, [un] centre d’exposition [...] et le site d’implantation de sièges sociaux de grandes entreprises internationales."2 Le site actuel est en effet stratégique, car proche de l'aéroport et de la voie ferrée. Les porteurs de l’OIN ont vis-à-vis du déplacement du MIN une vision différente de ce que prévoyait la DTA. Christian ESTROSI annonçait dés novembre 2007 "le déplacement du MIN plus au nord sur un terrain appartenant au Conseil Général à la Baronne."3 En effet, le Maire de Nice souhaite y construire à la place le Grand Stade de Nice.

Emplacement projeté à St Isidore

Emplacement actuel à St Augustin

Le site de La Baronne est en effet très excentré et mal desservi par les axes majeurs de transport. Les terrains envisagés, propriété du Conseil Général, sont occupés depuis 1978 par le CREAT7 dont le bail emphytéotique court jusqu’en 2028... Les acteurs de la profession agricole reconnaissent la nécessité de restructurer le MIN, qui est un "outil vieillissant"8, mais souhaiteraient que ses utilisateurs soient associés au débat. Pour ma part, le déplacement du MIN à St Isidore me semble assez judicieux, du fait de la position stratégique du site, au milieu des terres agricoles et à proximité immédiate des axes de transports (A8, RD6202, RD6202bis). Cela permettrait de dynamiser les pôles agricoles précédemment évoqués. Je détaillerais ultérieurement quelle implantation j’envisage pour ce nouveau MIN.

DDE 06 (2003), p.107 Christian ESTROSI, extrait de son discours du 23 novembre 2007, www.estrosi2008.com/dotclear/index.php/2007/11/26/82-mon-intervention-convention-sur-l-avenir-de-nice 3 op. cit. 4 Édito du N°5 de Terres d’horizon de juillet 2008, mensuel d’information de la Chambre d’Agriculture 5 Claude GONELLA, adjoint au directeur de la DDAF des Alpes-Maritimes 6 Serge GRAVEROL, technicien à la Chambre d’Agriculture 7 Centre de Recherches Économiques et d’Actions Techniques (organe de la Chambre d'Agriculture) 8 Michel DESSUS, Président de la Chambre d’Agriculture des Alpes-Maritimes, entretien du 18 juillet 2008 1 2

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photo aérienne : Google Earth

Il se trouve que "la Chambre d’Agriculture a appris par voie de presse les velléités de déplacement du MIN de Nice sur le site de la Baronne, à la Gaude."4 Les acteurs du monde agricole ont plutôt mal perçu ces déclarations prises sans la moindre concertation. Les acteurs que j’ai pu interroger se prononçaient plutôt en faveur d’une restructuration sur place5 en libérant la moitié de l’emprise actuelle (20 ha), ou à défaut d’un déplacement à St Isidore6.


photo : LD

Mettre en valeur les coteaux cultivés Les coteaux qui surplombent St Isidore accueillent le célèbre vignoble de Bellet, mais aussi un certain nombre de petites exploitations maraichères. La spéculation foncière est monnaie courante sur ces coteaux et les friches attendent patiemment les modifications de POS... Viticulteurs et agriculteurs rencontrent des difficultés à trouver des terres disponibles, bien que les friches agricoles ne manquent pas.

Exploitation agricole visitée sur les coteaux de Saquier (Nice) :

Cette petite agriculture de coteau, outre ses qualités paysagères (restanques), présente un intérêt certain du point de vue de la biodiversité. En effet, si ces petites parcelles agricoles sont gérées de manière raisonnée, elles constituent alors pour l’entomofaune et l’avifaune des habitats diversifiés, complémentaires des espaces boisés qui les jouxtent. De récentes études scientifiques ont récemment démontré des évidences que certains répétaient depuis longtemps : "la complexité du paysage est un élément clé de la biodiversité dans les espaces agricoles."1 Un échange fructueux est alors à même de s’installer entre l’exploitation agricole et son environnement : la diversité des cultures participe à la biodiversité du site qui elle-même assure un rôle de contrôle biotique sur les cultures.

les cultures sur terrasses se font sur deux sites (en haut et à gauche), séparés par un vallon boisé (en bas, à droite) qui abrite de nombreux oiseaux qui se nourrissent des insectes indésirables pour les cultures...

photo : LD

Si l’outil ZAP semble approprié en plaine, sur les coteaux j’aurais plus volontiers recours aux Périmètres de Protection et de Mise en Valeur des Espaces Agricoles et Naturels Périurbains (PPMVEANP)2. Depuis juillet 2006, un décret permet la création de ces PPMVEANP, à l’intérieur desquels, un département aura la possibilité d’acquérir des terrains par le biais d’acquisition amiable, d’expropriation ou par exercice du droit de préemption de la SAFER. Cette protection des espaces agricoles est très forte puisque toute modification du périmètre nécessite un décret ministériel. Cet outil d’intervention foncière permettrait aux collectivités locales d’acquérir des terres agricoles pour ensuite les louer à des agriculteurs par le biais de CMD (Conventions de Mise à Disposition), qui garantiraient la pérennité des exploitations. Les prix du foncier étant plus raisonnables sur les coteaux qu’en plaine, la mise en oeuvre de ZAP, plus lourde, ne me semble pas adéquate.

La mise en valeur agricole des coteaux implique de pouvoir intervenir sur les friches, qui accroissent par ailleurs les risques d’incendies. Or, la Loi DTR (Développement des Territoires Ruraux) de 2005 permet, à travers des articles rarement utilisés, à un agriculteur de "demander au préfet l’autorisation d’exploiter une parcelle [...] inculte [...] depuis au moins trois ans"3. On peut ainsi faire valoir l’obligation faite à un propriétaire de terres agricoles de les mettre en valeur et en cas de refus de sa part, il peut être "mis en demeure par le préfet de mettre en valeur le fonds"4. De telles démarches ont pu être engagées avec succès à Vernouillet dans les Yvelines5.

photo : LD

Ces démarches de maintien d’une agriculture de coteaux pourront s’accompagner des dispositifs existants d’aide à la réhabilitation de restanques (FDGER, Programmes LEADER...).

INRA (2008) Créés par la Loi DTR de 2005 (articles L143-1 à L143-6 et R143-1 et suivants du Code de l’Urbanisme) 3 Article L125-1 du Code Rural 4 Article L125-3 du Code Rural 5 http://www.terredeliens.org/spip.php?article232 1 2

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Révéler l’ossature de la vallée Faire émerger un réseau de corridors écologiques A la base de la géomorphologie de la vallée, il y a bien sûr le fleuve et le réseau hydrologique qui lui est associé. Un fleuve oublié, des vallons cachés isolés de la vallée principale, des exutoires contraints, des canaux obstrués qui ne sont plus entretenus... L’homme a depuis longtemps rompu avec son territoire. Une des premières étapes dans la re-territorialisation de cette vallée est bien de faire émerger son identité à travers ce qui la structure au plus profond d’elle-même : son réseau hydrographique. L’idée est de rétablir les connections entre les vallons (notamment "obscurs") et le fleuve afin d’assurer une connection écologique entre ces habitats remarquables. Il va s’agir de "renaturer" les exutoires des vallons. Les exutoires busés ou canalisés seront supprimés au profit d’espaces publics végétalisés à même d’absorber les surplus d’eau en provenance des vallons (zones de débordement).

Il est important que la biodiversité ne reste pas cantonnée dans des sanctuaires ultraprotégés tandis que notre environnement quotidien s’appauvrit. C’est pourquoi ces couloirs biotiques, bien que d’intérêt écologique peu exceptionnel, offriront à la ville un droit à une certaine "biodiversité du quotidien".

photo : LD

Parallèlement, un réseau hydrologique annexe, formé par les canaux d’irrigation, sera remis en état, en lien avec le réseau fleuve/vallons. Les parties bétonnées ou busées seront restaurées dans un état naturel. Dans ce travail sur le réseau hydrographique, "le passage du paysagiste doit pouvoir s’oublier complètement au profit d’une nature recomposée… mais plus vraie que nature !"1

Le canal des serres à St Isidore : malgré son état d'abandon, ce canal présente un potentiel écologique intéressant...

Outre son rôle structurant, cette ossature pourra accueillir sur ses portions les plus larges des cheminements piétons ou cyclistes permettant ainsi d’autres rythmes pour traverser la vallée et peut-être la découvrir. Ce réseau de canaux agricoles fera le lien entre les pôles agricoles préservés et les sanctuaires de biodiversité. Ainsi, l’espace périurbain sera "traversé par des couloirs écologiques formant un système réticulaire dont les habitants profitent pleinement et dans les mailles duquel s’insèrent des zones productives (agro-écosystèmes)."2 Cette approche intégrée apporte ainsi des éléments de réponse aux enjeux de paysage, de biodiversité, et de maîtrise des risques d’inondations...

Jean-Noël CAPART, cité dans la brochure de présentation du Grand Prix du Paysage 2006 MAGNAGHI (2003) 3 RICARD et al. (2005) 1 2

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"Un aménagement intégré peut être appelé ainsi pour deux raisons : - le système pluvial s’intègre dans la forme et le paysage urbains. Il est cohérent avec les différentes constructions de la ville. - les ouvrages ou espaces créés intègrent plusieurs fonctions : hydraulique les jours de pluie, et autres fonctions telles que lieu de promenade, d’agrément, de loisirs, lieu pédagogique..."3


Une trame pour tenir la ville Le concept de trame, métaphore empruntée au textile, me semble pertinent lorsqu’on tient un discours sur ce territoire. Il est nécessaire de venir appuyer les "tissus" urbains sur un maillage qui lui donne une forme et une teneur d’ensemble.

canal

"Dés lors qu’elle est conçue comme un système d’écosystèmes, l’organisation des vides (territoire agricole et forestier, couloirs biotiques, systèmes hydrographiques, franges agricoles des aires périurbaines, etc.) permet de donner une forme et des proportions convenables à l’organisation des pleins, c’est à dire au bâti et à ses infrastructures. [...] Les conditions d’autoreproduction des écosystèmes peuvent à nouveau faire partie du projet urbain."1 L’ensemble formé par les espaces agricoles ouverts et les corridors écologiques qui les traversent, constituera ainsi la trame dans laquelle la ville viendra se lover. Les mailles de cette trame accueilleront les fonctions sociales, économiques, écologiques et paysagères de la ville naissante. On va en fait utiliser l’héritage des structures paysagères qui se sont succédées sur ce territoire au cours de l’histoire, pour "réhabiliter et revaloriser l’espace sans le réinventer."2 Le rôle du paysagiste est bien pour moi, d'écouter et de donner la parole aux paysages.

vallon

Cette orientation me semble finalement assez proche de ce que proposait Michel DESVIGNE dans son étude sur la plaine du Var en 2006. Il nous invitait à "comprendre les anciens méandres et les traces des méandres du fleuve tout en conservant les digues et d’imaginer un paysage à l’échelle de cette géographie qui puisse littéralement déterminer des zones constructibles."3 Son projet prenait ainsi la forme d’une "ville-archipel" organisée au sein de ce tressage de pleins et de vides. Mon "tressage", quant à lui, s'appuie sur le réseau hydrographique et les terres agricoles. L’agriculture a motivé la genèse de la plaine, elle persiste encore sur le territoire et dans les esprits. Je pense que c’est à travers cet héritage agricole réinvesti vers la ville, que l’homme peut se réconcilier avec la vallée et son fleuve.

terres agricoles

A l’échelle de la vallée, le "geste créateur" sera modeste et ne fera que révéler et tenir un maillage vernaculaire, composé de champs, de canaux et de vallons qui accueillera la ville dans une relation d’échanges mutuels.

MAGNAGHI (2003) MEDD (2006) 3 Michel DESVIGNE, extrait de la conférence donnée le 10 mars 2008 au Pavillon Arsenal, à Paris, vidéo en ligne sur : www.pavillon-arsenal.com/videosenligne/collection-6-108.php 1

carte : LD

2

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Accueillir la ville autour de cette trame Requalifier les zones urbanisées en plaine

Les entrepôts et hangars, globalement prédominants, sont le siège "d’activités-support" pour la ville (matériaux, casses automobiles) qu’il ne convient pas forcément de déplacer plus loin. Toutefois, soyons réalistes, la réalisation du projet d’Eco-Vallée va très certainement conduire au départ d’une grande partie de ces activités. Il conviendra au fur et à mesure des cessions d’activités, d’intervenir de manière à requalifier les bâtiments ou à y installer de l’habitat et des commerces de proximité. "La diversité fonctionnelle est un moyen intéressant de créer de la diversité formelle sur les fronts urbains sur la rue"1 et ainsi de rompre avec la banalité architecturale des zones consacrées exclusivement à l’habitat ou aux activités. Il faudra définir un plan directeur pour la ville, en lien avec la trame agro-écologiques décrite précédemment. A cette trame, s’ajoutent les petites parcelles agricoles relictuelles en friches, qui pourront muter en espace public (jardins, squares). On pourra procéder à des opérations de remembrement-aménagement afin de dégager du foncier dans les zones urbaines, et de permettre le transfert de ces petites parcelles vers les pôles agricoles. Les boisements existants sur les coteaux qui soulignent bien souvent des talwegs pourront être "prolongés" dans la plaine afin d’établir des liaisons écologiques et paysagères entre plaine et coteaux. La DTA prévoyait d’ailleurs "d'assurer des coupures vertes transversales [...] en prolongeant les coulées végétales des versants et en valorisant les espaces réservés pour l’écoulement des eaux."2 Il existe un certain nombre de champs captants en bordure du fleuve qui pour des raisons de protection de la nappe ne peuvent faire l’objet d’aucune construction. La CANCA envisageait de les couvrir de panneaux photovoltaïques3 afin de constituer plusieurs centrales solaires. Il est selon moi dommage de condamner un espace de bord de fleuve à ne pas être parcouru alors qu’il pourrait accueillir un espace public tout aussi protecteur de l’eau captée, mais qui donnerait en outre à redécouvrir des pratiques au bord du fleuve. Je détaillerais ce point ultérieurement.

L’objectif de production d’énergie renouvelable est par ailleurs louable, mais pourrait trouver à s’exprimer de manière plus durable s’il venait équiper les vastes toitures inutilisées de nos bâtiments au lieu de consommer encore un peu plus d’espace. Les toitures des entrepôts, hangars et grandes surfaces peuvent en effet être mises à profit en les équipant de panneaux photovoltaïques intégrés. On a ainsi pu à Laudun, dans le Gard, équiper un entrepôt de 30000 m² de panneaux (surface comparable à la toiture du Carrefour de Lingostières), pour une production de 1,6 MW/an, soit l’équivalent de la consommation annuelle de 500 ménages4. Les bâtiments de taille plus modeste, où la rentabilité des installations photovoltaïques est plus difficile à atteindre, pourront être valorisés par des toitures terrasses partiellement ou totalement végétalisées. Les toitures terrasses sont fréquentes dans l’architecture traditionnelle méditerranéenne et leur végétalisation est possible sous nos climats moyennant un choix adéquat des espèces (cf. page ci-contre). Le toit terrasse "permet la rétention et la récupération des eaux de pluie et contribue au principe de la retenue des eaux pluviales à la parcelle ; il offre une surface à vivre plus importante ; il offre une inertie thermique remarquable qui entraine de substantielles économies d’énergie."5 Ces espaces hauts donneraient aux habitations de la plaine des ouvertures sur l’horizon et le grand paysage. A l’échelle d’un habitat collectif, ces toitures terrasses constitueraient des espaces communs de qualité, en économisant un foncier rare et cher.

photo : Philippe Bertini

L’objectif est ici de requalifier les deux rives du "coeur de plaine" dans un souci de mixité fonctionnelle et sociale.

POUTARAUD et al. (2007) DDE06 (2003), p.109 3 Nice-Matin, jeudi 13 mars 2008 4 Article paru sur le Moniteur-Expert le 16 avril 2008 (www.lemoniteur.fr) 5 POUTARAUD et al. (2007) 1 2

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La plus grande centrale photovoltaïque d’Europe intégrée en toiture, à Laudun dans le Gard

photo : AFP

Des panneaux solaires installés dans un champ en région Centre.


DES TOITURES VÉGÉTALISÉES EXTENSIVES1 La végétalisation extensive s’appuie sur la culture de plantes adaptées à des conditions de sols peu profonds et pauvres. Elle ne nécessite qu’un entretien limité. En région méditerranéenne, les contraintes climatiques imposent l’unique choix de plantes succulentes, aptes à stocker l’eau dans leurs tissus. Ces toitures, outre leurs qualités esthétiques, offrent de nombreux avantages concernant la rétention d’eau2, l’isolation acoustique et thermique3. Enfin, ces toitures participent à une certaine biodiversité urbaine en accueillant papillons, coléoptères, sauterelles,… puis oiseaux insectivores. Cette diversité est accrue si l’épaisseur du substrat est variable (bosses), si la toiture est peu élevée, si la surface est importante et si les espèces végétales plantées sont variées.

photo : Siplast-Icopal

Si les plantes sont bien choisies, elles n’ont besoin ni d’arrosage, ni de désherbage, ni de tonte, ni de fertilisation. La pente idéale des toitures est comprise entre 3% et 5%. En-dessous de 3%, il existe un risque de stagnation d’eau, ce qui aurait pour conséquence de perturber le développement de la végétation. En-dessus de 5%, l’eau a tendance à s’évacuer trop rapidement. Le poids d’un système extensif est équivalent à celui d’une protection d’étanchéité gravillonée. Il peut donc être mis en oeuvre sur un plus grand nombre de supports ainsi que sur des bâtiments existants...

Station d'épuration, à Nice Réalisation : Siplast-Icopal

photo : ADIVET

Différentes espèces de sédum peuvent s'adapter au climat méditerranéen (plantes succulentes)

photo : Écovégétal

Palais des sports de Toulouse, Réalisation : Écovégétal. Architecte : Jean GUERVILLY

CLAMENS (2008) Selon une étude menée en Allemagne, où le climat est de type continental, une toiture végétalisée extensive peut retenir jusqu’à 60% du volume des eaux pluviales sur une année. 3 Selon des essais du CSTB, l’amortissement phonique est de 5 dB à 125 Hz. Pour ce qui est des performances thermiques, aucune étude n’a pu les démontrer pour l’instant. Il est toutefois probable que ces toitures végétalisées améliorent l’isolation thermique des bâtiments en été et réduisent l’effet d’îlot de chaleur urbain grâce à l’évapotranspiration des végétaux. 1 2

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Densifier les coteaux en habitant la pente Afin d’éviter l’urbanisation des terres de plaine, les plus fertiles, et pour donner une image urbaine aux coteaux mités par l’urbanisation, le parti d’aménagement consistera à tirer profit des qualités offertes par les coteaux pour y implanter de l’habitat urbain dense (au moins 50 logements/ha1). Les positions hautes, traditionnellement occupées par les villages anciens, offrent en effet de nombreux avantages. Tout d’abord, la position haute génère un sentiment plus ou moins conscient de domination symbolique sur le territoire en contrebas. "Le regard qui porte sur le paysage est un acte souverain, dépendant fondamentalement de la volonté de celui qui regarde. Par association d’idées, porter son regard sur un environnement quelconque en est venu à symboliser plus ou moins explicitement une souveraineté territoriale sur cet environnement."2 croquis : ISTED

Au-delà de l’attrait pour les vues offertes, habiter la pente permet une meilleure absorption des hauteurs bâties. La pente absorbe la hauteur, tandis que le plan la souligne. Il est possible d’atteindre des densités urbaines considérables sans réaliser d’opérations traumatisantes pour le paysage. En faisant la démarche de chercher à bâtir sur les coteaux, on sent vite que la relation au sol y est bien plus prégnante qu’en plaine : comment insérer le bâtiment, comment gérer la rencontre entre les murs et l’oblique? L’habitat en pente souligne ainsi un certain rapport au sol, perceptible dans nos déplacements, grâce à nos sensations visuelles et kinesthésiques. "La pente vient donc [...] renforcer la position de l’habitat entre terre et ciel."3 Habiter la pente revient ainsi à habiter le paysage... c’est à dire "l’endroit où le ciel et la terre se touchent", pour reprendre la célèbre formule de Michel CORAJOUD... Habiter le coteau implique de relever le défi de la maîtrise de l’eau de ruissellement, mais offre par là-même une ressource qui peut être mise au service des besoins en eau des habitants (arrosage, sanitaires...etc.) et participer à la qualité paysagère des aménagements. On peut ainsi "casser la vitesse d’écoulement par des dispositifs transversaux : seuils, ressauts, petits barrages, chutes, paliers", ou encore "concevoir des parties de l’espace collectif en mesure de jouer momentanément le rôle de bassin"4. Autant d’aménagements qui, outre leur rôle hydraulique, seront des atouts pour la qualité des espaces publics (approche intégrée). Sur les coteaux les plus au sud, le mitage étant bien avancé, il me semble difficile et peu pertinent d’y tenir l’agriculture. L’enjeu sur ces coteaux mités par un habitat pavillonnaire très individualiste, est plutôt de retrouver une dimension urbaine en replaçant l’espace public au centre des aménagements.

Différents mode d'acroche du bâti sur la pente (source : Alain DOUANGMANIVANH)

Chiffre atteint avec de l’habitat individuel mitoyen, cf. POUTARAUD et al. (2007) BRUNET Pierre (1992). Atlas des paysages ruraux de France, Éd. Jean Pierre de Monza, p. 108 3 DOUANGMANIVANH (2003) 4 DARDENNES (1988) 1 2

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Réunir la ville autour de son fleuve Si la réunion des deux rives est un des enjeux les plus essentiels, cette union n’a pas de sens tant qu’il n’y a "rien" à unir... Aujourd’hui, en effet, les deux rives dans leur parties basses ont peu de qualités "urbaines", bien que très urbanisées. On assiste simplement à une juxtaposition de fonctions et de formes hétéroclites qui n’ont en commun que le rôle support qu’elles jouent pour la ville-centre. La requalification urbaine de la plaine est un préalable indispensable à toute volonté de franchissement du fleuve. Pourtant, cette démarche doit être anticipée et le premier obstacle sur le chemin de la réunification de la ville autour du fleuve est bien la rupture imposée par l’autoroute A8...

S’affranchir de l’autoroute Avant de penser (re)créer une relation entre les deux rives, se pose la question du rapport au fleuve en rive gauche, sachant que la plaine voit son accès aux berges fortement limité par l’autoroute. On a pu voir plusieurs projets ambitieux de couverture d’autoroute (St Denis, Amsterdam) qui me semblent toutefois plus appropriés à des territoires très urbains. Les coûts de couverture importants ne peuvent se justifier que par des enjeux forts, pour relier des quartiers urbains trop longtemps isolés (St Denis), ou pour gagner du foncier constructible dans un contexte où l’espace manque cruellement (Amsterdam1).

photo : CANCA

N’étant pas dans l’un de ces cas de figures, j’ai été amené à écarter cette solution. Je m'appuierais plutôt sur les projets de contournement autoroutier de Nice, pour à terme substituer un autre tracé pour l’A8 et ainsi déclasser le tronçon qui s’étend entre St Augustin et St Isidore. On pourra ainsi sur l’emprise libérée constituer un boulevard urbain, doublé d’une promenade haute sur la digue et d’une promenade basse le long des berges.

piste cyclable (en contrebas)

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1

CAETANO-VIEILARD (2007)

délaissé emprise de l'A8 (environ 30 m)


Unir les deux rives

carte enjeux de franchissements... ???

Dans la mythologie scandinave, Vár est la déesse des mariages et des pactes d’unions... Peut-on espérer unir les deux rives autour du fleuve qu’elles partagent?...

Ces ponts sur le Var afficheront leur préférence pour les déplacements doux et collectifs (bus, trolleybus). Plus au nord, il serait nécessaire de franchir le fleuve afin de desservir la ZID de Carros (7500 emplois) par des transports en commun. Un projet est d’ailleurs à l’étude concernant le déplacement du "train des Pignes" en rive droite (ce que prônait déjà la DTA d’ailleurs)... Le futur pôle de transport multimodal de Lingostières, devra être relié à la rive droite (La Baronne). D’ores et déjà, sans attendre la mutation de l’autoroute, je prévois la réalisation d’une passerelle vouée exclusivement aux déplacements doux entre les deux rives, à hauteur du champ captant de St Laurent du Var.

photo source : DDE 06

Une fois chacune des deux rives restructurée et un certain rapport "urbain" au fleuve initié, il sera souhaitable de relier les deux rives longtemps étrangères l’une à l’autre. Les liaisons au niveau du "coeur de plaine" s’inscriront dans le prolongement des voies descendant du coteau en rive droite (St Laurent du Var). Ces voies sont plus en rapport avec la topographie du pied de coteau que la trame viaire actuelle de rive gauche, affranchie de ces considérations du fait de la largeur de la plaine sur cette rive. Il sera intéressant, dans la mesure du possible, d’anticiper ces franchissements dans la définition d’un schéma d’aménagement pour la rive gauche.

Emprises futures probables de la ville dense sur chaque rive

Franchissements existants Franchissements souhaitables

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Spatialisation des intentions Affirmer les valeurs territoriales...

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carte : LD

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... pour mieux répondre aux enjeux métropolitains

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carte : LD

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Réponse du projet aux enjeux métropolitains Selon l’étude de la SAEM-SACA1 réalisée en 20052, les espaces à enjeux fonciers sont limités sur la Plaine du Var. L’étude porte sur la seule plaine (1800 ha). Elle identifie différents secteurs (cf. cartes ci-contre) : Vocation agricole / DTA (540 ha) Tissu évolutif (200 ha) Foncier occupé non évolutif (900 ha)

Le projet que je présente aboutirait à conserver 400 ha de terres agricoles (regroupées en pôles d’un seul tenant). Sont ainsi libérés 140 ha de terres agricoles que l’ont pourrait urbaniser, auxquels viennent s’ajouter les 200 ha de tissu évolutif identifiés par la SAEM-SACA et les 240 ha d’espaces où des projets sont déjà arrêtés (Nice-Méridia, Arenas...etc). Au total, ce seraient 680 ha qui pourraient être urbanisés dans la plaine afin de répondre aux besoins de la métropole. A ceux-ci s’ajoutent d’autres opportunités difficilement chiffrables qui concernent la densification des coteaux au sud et la requalification de la zone d’activités de St Laurent afin d’y intégrer des logements, c’est à dire de la mixité. Le projet envisagé par la Mission de Préfiguration de l’OIN, dévoilé début août 20083, prévoit d’urbaniser 450 ha... Avec 680 ha urbanisables, on se préserve une marge de possibilités pour les besoins futurs, tout en garantissant le maintien d’un cadre paysager de qualité... Ainsi, il apparaît possible d’accueillir les besoins de la métropole pour son développement sans compromettre la survie et la lisibilité des valeurs territoriales, garantes de la soutenabilité du projet.

Société Anonyme d’Economie Mixte Sophia-Antipolis Côte d'Azur Étude consultée au CETE Méditerranée, non publiée à ma connaissance. 3 Conférence de Presse tenue le 4 août 2008 par Christian ESTROSI (article paru dans Nice-Matin le 5 août 2008)

cartes : SAEM-PACA

Projets d’aménagement en cours (240 ha)

1 2

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Formalisation du projet Zoom sur le secteur de St Isidore Étant donné l’échelle du territoire, il était nécessaire de détailler la forme que prendrait le projet. Mon choix s’est porté spontanément sur un zoom sur le secteur de St Isidore où j’avais la possibilité d’illustrer les différentes orientations de mon projet et ainsi de donner à comprendre sa logique en détail. Le secteur de basse plaine a concentré l’essentiel de l’attention à travers les précédentes études, et pour la majorité des projets en cours y sont à un stade avancé (les travaux de Nice-Méridia sont entamés). Il m’a semblé important de me concentrer sur un secteur à enjeux forts qui avait peut-être été moins étudié. Les zones urbaines de St Isidore et Lingostières sont amenées à se développer fortement en raison notamment de leur desserte par les transports en commun (chemins de fer de Provence et futur tramway).

1

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Ville de Nice, Agence Municipale Économique, Atlas socio-économique de la Ville de Nice et de ses quartiers, novembre 2003.

carte : LD

Le "village" de St Isidore connait depuis longtemps une croissance démographique forte : alors que la vieille ville de Nice perdait 36,17 % de sa population entre 1975 et 1999, St Isidore en gagnait 38,38 %1...


Etat existant

Quartier de Lingostières

Quartier de la Baronne Poste EDF

Zone d'extraction de matériaux

Passage actuel de l'A8 : la plaine est scindée en deux

croquis : LD

Quartier de St Isidore

Camping "Magali"

Foyer Adoma (ex-Sonacotra)

Zone industrielle de St Laurent

UFR Staps et Stade des Arboras

Champ captant de St Laurent

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carte : LD

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Schéma directeur Les éléments constituants la trame agro-écologique viennent tenir la ville qui se reconstitue dans ces mailles à partir des établissements humains existants (hameaux ou zones d'activités). Les terres agricoles les plus "solides" sont conservées tandis que d'autres, plus fragiles, peuvent accueillir du bâti ou des espaces publcs... La trame viaire s'appuie sur l'existant ainsi que sur la logique des anciens casiers de colmatage, perpendiculaires au fleuve. Les cheminements doux s'orientent préférentiellement selon un axe nord-sud afin de se prémunir des forts ensoleillements estivaux.

Quartier de la Baronne

Quartier de Lingostières Quartier de St Isidore

Camping "Magali"

MIN Passage du nouveau tracé de l'A8 sur viaduc

Passerelle piétonne

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Promenade des berges

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UFR Staps et Stade des Arboras

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1 km

carte : LD

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Vue d'ensemble sur le projet Nouveau site du M.I.N. Quartier de la Baronne

Franchissement du fleuve

Quartier de Lingostières

Quartier de St Isidore

Nouveau tracé de l'A8, sur viaduc

Passerelle piétonne autoportée

Pôle agricole des Baraques

Parc des Iscles

UFR Staps

Stade des Arboras

Liaison des conaux avec le fleuve

Tramway en rive gauche, le long de la RD 6202 requalifiée en boulevard urbain

Parc des berges, parcours sportif

croquis : LD

Promenade des berges

Jardin urbain sur anciennes terres agricoles

Boulevard urbain créé sur l'emprise de l'A8

Canal réhabilité (corridor écologique)

Tramway en rive droite

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carte : LD

Déplacer le MIN à St Isidore

Figure 1 : site actuel

Après examen du site actuel (cf. fig.1), je me suis basé sur le postulat selon lequel le MIN serait restructurable sur la moitié de son emprise actuelle (20 ha), en terme de surface bâtie et d'occupation du sol.1 Le site envisagé par la DTA, "au sud de l’échangeur de Saint-Isidore"2 me semblant pertinent, j'y ai identifié une zone potentielle de 10 ha, le long de l'A8. L'implantation sur ce site (cf. fig.2) empiète sur le tracé actuel de la RD 6202. Au tronçon concerné sera substitué le boulevard urbain projeté le long des berges sur l'actuelle bretelle de sortie d'A8 au bord du Var (cf. schéma directeur).

Le MIN aura ainsi une façade tournée vers le fleuve et l'autre vers le pôle agricole des Baraques.

carte : LD

L'implantation des bâtiments du MIN se fera en alignement avec l'actuelle A8 (futur boulevard urbain) en ménageant des perçées visuelles vers les coteaux, en alignement avec la trame du parcellaire agricole (cf. fig.2). Figure 2 : implantation sur le nouveau site

Le marché de gros connait une activité intense tôt le matin, mais est inactif et désert le reste de la journée. De ce constat, il me semble intéressant de réfléchir à une évolution possible du MIN vers la vente au détail, sur la façade tournée vers le fleuve (et desservie par le tramway et le boulevard urbain). Les producteurs, en ne se déplaçant qu'une fois, trouveraient le matin un espace de vente de gros et pourraient l'après-midi vendre leurs excédents au détail le long du boulevard urbain avec une meilleure plus-value...

1

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Claude GONELLA, adjoint au directeur de la DDAF des Alpes-Maritimes

Figure 3 : site projeté

carte : LD

L'ensemble du nouveu MIN permet d'accueillir la moitié des surfaces bâties sur une emprise au sol deux fois moindre, tout en conservant le fonctionnement actuel en trois pôles : fleurs, viandes et légumes (cf. fig.3).


Le MIN à St Isidore plutôt que le Grand Stade... L’actuel stade municipal Léo Lagrange de Nice, plus communément appelé Stade du Ray, n’est plus conforme aux normes de sécurité imposées par les fédérations de football et bénéficie de ce fait d’une dérogation provisoire. Ce stade, inauguré en 1927 pouvait initialement accueillir 3500 spectateurs. Il est agrandi en 1948 et en 1979, il atteint alors 25500 places. La destruction nécessaire d’une partie des tribunes en 1992 fait chuter sa capacité d’accueil à 12500 places. Des travaux en 1997 et en 2004 ont permis de faire remonter la capacité d’accueil du stade à 18000 places, ce qui reste insuffisant pour évoluer en Ligue 1. Le record d’affluence atteint en 1959 avec 22908 spectateurs n’a jamais été dépassé depuis. En 2003-2004, on a enregistré une moyenne de 13000 spectateurs...1 En 2001, la municipalité fait le choix de réaménager le Stade du Ray. Un appel à projet est lançé pour la création d’un stade de 30000 places sur le site du Ray, mais le projet s’écroule en 2003 avec l’éclatement de "l’affaire Vialatte", du nom d’un adjoint au maire condamné pour avoir truqué le marché public. En 2004, la municipalité vote la construction du Grand Stade dans la Plaine du Var, sur d’anciennes terres agricoles en sa possession... Des supporters s’insurgent contre ce choix, restant attachés au Stade du Ray, bastion historique de leur équipe. L’association "Ray e Basta" est crée en 2004 et recueille rapidement une pétition de 7000 signatures en faveur du maintien du stade à son emplacement actuel. La reconstruction du stade sur place est techniquement réalisable, à moindre frais si l’on considère le projet défendu par "Ray e Basta" : 25000 places suffisent, une reconstruction comparable a été réalisée en 2004 pour le stade de Rennes, par l’architecte qui avait été retenu pour le projet de Nice en 2001... L’association estime ce projet possible sans déménagement de l’équipe pendant les travaux. D’un point de vue plus urbanistique, la reconstruction du Stade sur place me semble préférable, compte-tenu de sa desserte par le récent tramway (ce fut d’ailleurs un argument à l’époque), de sa situation beaucoup plus proche du centre-ville et de l’histoire du stade qui imprègne depuis 80 ans ce quartier.

Le déplacement à St Isidore, non prévu dans la DTA, semble en effet plutôt incohérent sachant sa capacité d’accueil et la saturation actuelle du trafic routier. La ligne des Chemins de Fer de Provence pourrait, après restructuration, "acheminer en l’espace de deux heures 1500 spectateurs de Nice-Ville à Saint Isidore»3 Quant à l’extension programmée du tramway (ligne 3) jusqu’à St Isidore, via la Plaine du Var, le PDU de la CANCA l’envisage "à l’horizon 2015"4. Le projet de construction du stade à St Isidore prévoyait en 2006 que l’acheminement des spectateurs s’effectuerait à 76 % par l’automobile... Une implantation du stade à St Isidore, au mépris des orientations de la DTA (qui prévoyait le MIN à cet emplacement), va à l’encontre des logiques de développement durable, en sacrifiant les modes de déplacements respectueux de l’environnement au profit du «tout automobile». Le bilan financier de l’opération ne semble pas non plus jouer en sa faveur. On estime que «cette opération coûtera en définitive 185 millions d’euros sur trente ans, soit 3 à 4 fois plus que la reconstruction sur place du stade du Ray.»5 De plus, les supporters redoutent que la concession de la gestion du stade au secteur privé induise des tarifs d’entrées inaccessibles aux plus modestes. C’est d’ailleurs autour de ce flou concernant la tarification des entrées que le Tribunal Administratif a annulé le projet en 2006. Malgré cette annulation, le projet de Stade de St Isidore est toujours d’actualité, aujourd’hui porté par la nouvelle équipe municipale. Les discours officiels6 le mentionnent comme acquis et partie intégrante de la future OIN... Ainsi, j'assume mon choix d'installer le MIN à St Isidore plutôt que le Grand Stade, qu'il me semble préférable de reconstruire sur son emplacement actuel, au Ray.

Une autre alternative consisterait à installer le Grand Stade à la place du stade d’athlétisme Charles Ehrmann, situé plus bas dans la Plaine du Var, à proximité de l'échangeur autoroutier de St Augustin.2

Source : Olympique Gymnaste Club de Nice (www.ogcn.net) http://www.lemoniteur.fr/depeches/print.asp?id=D0682839B 3 LE GUILLOU et al. (2006) 4 Plan de Déplacement Urbain de la CANCA, p. 2 5 Le Patriote N° 2020, semaine du 2 au 8 juin 2006 6 Conférence de Presse tenue le 4 août 2008 par Christian ESTROSI (article paru dans Nice-Matin le 5 août 2008) 1 2

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Les corridors écologiques au coeur du projet

croquis : LD

La renaturation des canaux d'irrigation s'inscrit dans une démarche intégrée permettant de restaurer des connexions écologiques, d'améliorer l'écoulement des eaux et d'offrir aux citadins des espaces de promenade à travers l'ensemble de la vallée. A ces usages, s'ajoute bien entendu l'irrigation des terres agricoles (par aspersion). Les berges des canaux restaurés devront être enherbées et il conviendrait de substituer aux passages busés sous les routes, des ponts laissant une continuité écologique s'établir en-dessous. Des sentiers de promenade seront aménagés le long des canaux dispensant l'accès aux espaces naturels à tous ("biodiversité du quotidien"). Ces canaux traverseront des ambiances urbaines ou agricoles et joueront parfois un rôle d'interface entre ces différents espaces.

Une certaine épaisseur est nécessaire aux corridors écologiques pour assurer leur fonction : entre 3 et 5 m selon les possibilités offertes...

croquis : LD

Des espaces naturels linéaires tout le long de la vallée

Entre ville et cultures, le canal offre un espace de déambulation permettant une autre approche de ces lieux à un autre rythme...

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Habiter les coteaux On va intervenir sur les espaces non-urbanisés (anciennes restanques) en ouvrant les habitations vers l’extérieur et en rendant possible des échappées vers la nature, à travers les espaces boisés qui soulignent les petits talwegs où l’eau s’écoule. La préservation de ces boisements structurants s’inscrit bien évidemment en lien avec le réseau de corridors écologiques restauré en plaine. les talwegs boisés soulignent la structure des coteaux

croquis : LD

Ces coteaux sont orientés nord-sud. Ainsi, une maison installée dans le sens de la pente (cas usuel), sera orientée à l’est ou à l’ouest (selon si on est à St Laurent ou à Nice). La meilleure orientation en Provence est l’orientation sud qui procure de la chaleur en hiver quand le soleil est bas et en reçoit moins l’été quand il est haut. La situation ici n’est donc pas idéale, toutefois il existe un certain nombre de moyens de contourner ce problème. On peut, par exemple, dans la façade exposée à l’est ou à l’ouest, ouvrir des bow-windows orientés vers le sud afin de capter plus d’ensoleillement en hiver et de ne pas trop s’y exposer en été. Un examen détaillé de la topographie de chaque site permettra de dégager des solutions personnalisées. De manière générale, la construction sur coteaux enrichit la composition de l’aménageur. "Le fait de s’appuyer sur la géographie du terrain [...] nous amène à échapper à la tentation de plaquer un dessin trop géométrique et abstrait. Le contexte déforme la trame, apporte des surprises, des décalages et des angles aigus."1 1

POUTARAUD et al. (2007)

schéma : ARENE-PACA

L’implantation et l’orientation des bâtiments saura tirer profit de l’ensoleillement, du rapport au sol (géothermie) et de la ventilation naturelle (cf. carte ci-contre) afin de s’émanciper des besoins en chauffage l’hiver et en climatisation l’été.

Le soleil étant à l'apogée en été, ce sont les faces est et ouest des habitations qui sont les plus ensoleillées, tandis qu'en hiver, la façade sud reçoit un ensoleillement maximal...

carte : CLARAC (1994)

les espaces agricoles ouverts en plaine mettent le coteau en valeur

La vallée bénéficie d'une ventilation naturelle favorable, avec une brise de terre froide venant des montagnes au nord, et une brise de mer apportant fraicheur et humidité l'été...

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Terres agricoles en restanques

Nice centre

Habitat dense sur coteau

Boisements structurants Ville de basse plaine

Serres

MIN

Corridor ĂŠcologique (canal des serres)

le Var A8 (nouveau tracĂŠ)

76

croquis : LD

Promenade des berges


La densification des coteaux devra donc se dérouler autour de la voirie existante qui devra être recalibrée sur ses axes principaux afin de permettre la circulation des bus sur une voie propre.

croquis : ISTED

photo : Catherine ADRIAN

Aujourd’hui, le réseau routier qui dessert les coteaux est très contraint par le relief et plutôt congestionné par le trafic automobile. Les bus qui desservent les coteaux les plus au sud sont tributaires de cette surcharge de véhicules sur des voies étroites et donc peu performants.

Les coteaux offrent l'opportunité d'intégrer le stationnement des véhicules en sous-sol

petite route sur la "colle" de St Isidore

Il existe sur le "collet" de St Isidore un certain nombre d'escaliers qui rejoignent la plaine. Ces passages gagneraient à être mis en valeur et connectés aux cheminements doux réalisés dans la plaine...

Coteaux et transports urbains... Se pose aussi le problème de la jonction entre la plaine et le centre de Nice à travers ces coteaux. Avec les projets de tramway, seule une connection par la côte est possible. A terme, en envisageant un développement urbain important dans la plaine et sur les coteaux, une liaison par téléphérique pourrait apporter des réponses performantes en connectant le réseau de tramway et de bus au centre de Nice, via le coteau de rive gauche.

Pierre JAUSSAUD, cité par Rue 89, article disponible sur : http://www.rue89.com/2008/05/02/demain-je-vais-travailler-en-telepherique op. cit. 3 http://pourlaterre.free.fr/quelle_evolution_pour_les_transports-suc5.html 1 2

photo : LD

Ce mode de transport par câble, s’il peut sembler fantaisiste, est en fait de plus en plus envisagé pour des usages urbains, en témoignent les réalisations récentes à Medellin, ou plus près de nous, à Barcelone. L’installation d’un téléphérique est bien moins onéreuse que la mise en oeuvre d’un tramway, puisqu’au kilomètre, "la construction d’un tram coûte 5 millions d’euros de plus qu’un véhicule sur câble"1. La consommation en énergie est très faible, le téléphérique étant soumis à "cinq fois moins de frottements que le tramway."2 De plus, les nacelles qui descendent restituent une part d’énergie non négligeable au système. Le câble offre la possibilité de transporter jusqu’à "4000 passagers par heure"3. La seule faiblesse du téléphérique est qu’il ne peut pas prendre les virages. La mise en oeuvre de telles installations nécessiterait un travail d’intégration paysagère soigné, les populations étant souvent réticentes à ce type d’ouvrage. Toutefois, le téléphérique de Belleville à Grenoble ne choque pas et fait partie du patrimoine de la ville, offrant une vision spectaculaire du paysage urbain...

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Supprimer l'A8 dans le coeur de plaine ... en s'appuyant sur les projets de contournement routier de Nice Dés les années 70, le SDAU de Nice prévoyait un "contournement de Nice par l’ouverture d’une nouvelle autoroute appelée la voie verte, allant de Draguignan à Nice et venant se greffer sur l’autoroute urbaine Nord de la ville"1. Ce projet va rencontrer l’opposition d’élus des communes concernées qui n’inscriront pas ce tracé dans leur POS. Dix ans plus tard le projet resurgit sous l’appellation d’A8 bis (puis A58) dans le SDAU de Cannes-Grasse-Antibes... Cette fois-ci, ce seront les associations qui mettront en cause le projet, qui finira par être abandonné en 1997, peu après l’annulation de ce SDAU2. En 2003, la DTA des Alpes-Maritimes remet au goût du jour un "projet de contournement autoroutier de Nice". Fin 2005 a lieu un débat public qui retient trois variantes :

3

cartes Issues de la synthèse du débat public 2005-2006

Sur ces bases, je propose la réalisation d’une quatrième variante reprenant à l’ouest du Var le tracé de la "solution 1 courte" et à l’est du Var la "solution 3 A.S.P." Cette voie de contournement viendrait remplacer l’A8 au terme de la concession de celle-ci accordée à ESCOTA (en 2026). Le développement des transports en commun d'ici là, devra permettre de s'en passer. En effet, "la saturation de l’A8 s’explique essentiellement par les déplacements internes à la conurbation azuréenne"4. Cette saturation reflète en fait les carences en transports collectifs de la conurbation. Une offre cohérente en transports en commun couplée à une action urbanistique limitant la dépendance à l’automobile, résoudrait alors ces problèmes de trafic internes à la métropole. L’emprise actuelle de l’A8 serait ainsi libérée à un moment où la requalification urbaine des deux rives aurait déjà bien pris forme. On pourra alors faire muter l’autoroute en promenade haute sur le bord du fleuve... En contrepartie, l’autoroute de contournement de Nice devra franchir le Var à hauteur de St Isidore pour relier en rive gauche l’actuelle A8, au niveau du péage le plus septentrional. En rive droite, le passage de cette future autoroute dans la plaine (aux Iscles) se ferait sur viaduc afin de ne pas générer un nouvel obstacle (cf. vue sur le projet, p.71).

DAUPHINÉ André (1990). Nice : une Eurocité Méditerranéenne, Serre, Nice, 198 p. TRICOT et al. (1999) 3 A.S.P. : Aménagement sur place 4 JOURDAN (2006) 1 2

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Sans attendre 20 ans, il est possible de réaliser de petits tunnels sous le remblais autoroutier afin de relier par déplacements doux les berges à la plaine (aujourd’hui les accès à la piste cyclable des berges sont très limités). De tels aménagements légers permettraient de semer les germes d’une redécouverte du fleuve. Ces aménagements pourront persister après le démantèlement de l’autoroute et constituer des accès originaux aux berges depuis la promenade haute.


Un boulevard urbain et une promenade le long des berges Sur l'espace libéré par l'A8, je propose de réaliser un boulevard urbain doublé d'une promenade le long des berges. En prenant appui sur la topographie induite par les endiguements, on peut ainsi réaliser une promenade haute (sur le sommet de la digue) et une promenade basse (près des berges). Cette promenade traversera différentes ambiances selon les espaces qui la jouxteront (habitat, équipements sportifs, MIN).

promenade haute

ambiance urbaine pour la promenade

croquis : LD

promenade basse

digue enherbée

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La promenade des berges à hauteur du MIN

EST

80

Tramway

boulevard urbain

7m

10 m

10 m

23 m

trottoir et espace de vente

promenade haute

emprise actuelle de l'A8

promenade basse

coupe : LD

La promenade basse est reliée à la promenade haute par des escaliers et des rampes d'accès pour les personnes à mobilité réduite. La promenade haute se divise en un espace piéton planté qui donne à voir le fleuve et une piste cyclable. Celle-ci longe l'emprise du futur tramway, qui se compose de deux quais de part et d'autre des voies. Lui succède le boulevard urbain, constitué de deux espaces de stationnement de chaque côté, et d'un terre-plein central planté. Enfin, devant les bâtiments du MIN s'étend un espace piéton qui accueille l'étalage des produits agricoles vendus au détail.

6m

MIN

30 m

0

5 mètres

10


La ville au bord du fleuve La simulation 3D ci-dessous donne à voir comment s'articuleront les quartiers avec le boulevard urbain, la promenade et le fleuve. Afin de se prémunir du bruit et de donner de l'épaisseur à l'interface avec le fleuve, je propose de réaliser un parc le long du boulevard urbain. Pour des raisons de nuisances sonores, il existe sur certaines portions une large bande vierge le long de l'actuel tracé de l'A8. Ce parc pourra accueillir des parcours sportifs en liens avec les stades et gymnases environnants et constituera un espace de respiration en plein coeur de la vallée.

actuelle A8

voies piétonnes orientées nord-sud

parc

rues principales

schéma : ARENE-PACA

le

r a V

L'orientation de la trame viaire en plaine sera essentielle afin de se prémunir en été du soleil. Ainsi, les voies piétonnes s'orienteront nordsud afin de s'exposer le moins possible aux rayonnements solaires en été. L'étroitesse de ces rues piétonnes ne laissera le soleil atteindre le sol que quelques minutes par jour, lorsqu'il sera à son zénith.

boulevard urbain

promenade haute

simulation 3D : LD (SketchUp et Google Earth)

orientées est-ouest

promenade basse

81


Un parc des iscles en rive droite

MIN

tramway rive droite passerelle piétonne Sur le champ captant de St Laurent du Var, je compte profiter de l'inconstructibilité pour réaliser un parc qui sache mettre en valeur le rapport au fleuve en tant que ressource. L'idée est de dessiner des "iscles" dont les limons accueilleront les espèces végétales que l'on pouvait rencontrer autrefois sur les "vrais iscles" (série méditerranéenne du Peuplier blanc). Le sol autour des iscles se composera d'un mélange de sable et de granulats fins. Cet espace, évoquant l'ancien lit du fleuve sera parcouru par les promeneurs. Je projette de détourner l'eau du canal passant à proximité afin de rendre l'eau visible au sein du parc. L'eau ainsi détournée s'élargira en un bassin allongé avant de rejoindre le fleuve. Cet espace en eau jouera en outre un rôle-tampon lors des crues du fleuve. Les différentes petites constructions abritant les captages seront réhabilitées dans une forme architecturale évoquant l'eau. Le parc donnera aux visiteurs l'occasion de découvrir l'histoire de la vallée sous l'angle du rapport au fleuve et à l'eau, par le biais de panneaux d'informations et d'activités ludiques pour les enfants.

construction abritant un captage tramway rive gauche

"iscle" activités sportives

canal

promenade des berges boulevard urbain

Le site aujourd'hui, vu d'avion du sud vers le nord...

82photos : Mairie de St Laurent du Var

plan : LD

bassin

parc de rive gauche


Une passerelle entre les deux rives Une passerelle piétonne viendra relier les deux rives à hauteur des deux parcs décrit précédemment. Afin de limiter le plus possible l’impact d’un tel ouvrage sur le fleuve, je préconiserais le recours à une passerelle acier assurant sa portée sans appui dans le fleuve, évitant ainsi toute intervention dans le lit du Var. La double structure du pont permettra d’avoir en rive gauche un accès haut, au niveau de la promenade haute et un accès bas donnant sur les berges. Cette passerelle sera ainsi le point central d'un projet qui vise à replacer le fleuve au centre de la vallée.

promenade haute

parc des iscles

is qu

D

:L

o

cr

promenade basse L'exemple de la Passerelle Simone de Beauvoir

L’architecte, Dieter Feichtinger, a "choisi de combiner les atouts de deux types de ponts pour gagner en puissance et obtenir une portée maximale : le pont en arc et le pont suspendu. Le pont en arc travaille en compression : les forces (poids des piétons, des cyclistes et du pont lui-même) se transmettent par l’arc en poussant sur les appuis du pont. Le pont suspendu, lui, travaille en traction. Ici les forces se transmettent par la catène en tirant sur les appuis. L’arc pousse. La catène tire. La combinaison des forces verticales et horizontales contribue ainsi à l’équilibre de la passerelle."1 1

photo : Dieter Feichtinger

photo : Dieter Feichtinger

Le 37ème pont sur la Seine de Paris a été posé en 2006 reliant la Bibliothèque François Mitterand et le Parc de Bercy. D’une portée de 190 m et d’une largeur de 12 m, la passerelle Simone de Beauvoir, consacrée aux déplacements doux, est devenue la plus grande passerelle de Paris par sa portée. La partie centrale de l’ouvrage, spacieuse, est conçue pour pouvoir accueillir des expositions et autres manifestations temporaires. Plus qu’un simple lien entre deux rives, la passerelle a été pensée comme un nouveau lieu parisien.

Office Technique pour l’Utilisation de l’Acier : www.otua.org/dossier-thematique/passerelle-beauvoir/default.htm

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Conclusion Par cette approche, j'ai choisi de poser un autre regard sur ce territoire, un regard non plus exclusivement focalisé sur la seule basse plaine et la rive gauche, mais recentré sur le fleuve et sa vallée. Tout au long de mon discours, métropole et territoire se sont opposés. J'ai voulu mettre un frein à l'expansion dévastatrice de la métropole en réaffirmant les valeurs du territoire à travers la trame révélée. Si cette ossature tient effectivement la métropole, j'aurais ainsi abouti à dépasser les logiques métropolitaines et à constituer de la "ville". Une ville qui ne soit pas indifférente au territoire qu'elle investit. J'ai pour ce faire cherché à identifier les fondements du paysage de cette vallée afin de déterminer comment les établissements humains pourront s'y développer harmonieusement. Au coeur de l'identité de ce territoire, la relation au fleuve, multiple, complexe, souvent conflictuelle, s'est révélée fondamentale et porteuse du projet. J'ai ainsi fait émerger du territoire cette trame paysagère dans l'intention d'assurer une continuité et une cohérence tout le long de la basse vallée du Var, qui se déclinera autour du fleuve, selon un gradient conduisant d'un paysage très urbain au sud à un paysage clairement teinté par la nature au nord, à la naissance des Alpes. Vu l'ampleur du territoire, j'ai conscience qu'il reste des éléments à approfondir, toutefois les grands principes développés me permettent de donner un cadre intangible aux aménagements à venir. Les implantations futures des établissements humains tels que je les ai projetés, se positionnent en relation étroite avec un "territoire-ressource", en terme d'eau, de sol, de climat, de produits agricoles, de biodiversité... J'invite donc les habitants de cette vallée à pouvoir à nouveau fréquenter un paysage, à s'identifier à leur milieu, à se l'approprier et ainsi être garants de son "habitabilité"1 pour les générations futures.

1

MAGNAGHI (2003)

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Méthode et Références AGENCE REGIONALE DE L’ENERGIE (non daté). Confort d’été en PACA, Fiches techniques rédigées sous la coordination de Dominique RAULIN, ARENE-PACA, Marseille, 50 p. (9 fiches) disponible sur : www.envirobat-med.net/Confort-d-ete-en-PACA

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Glossaire des sigles utilisés

AMAP : Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne APB : Arrêté de Protection de Biotope CADAM : Centre Administratif des Alpes-Maritimes CANCA : Communauté d’Agglomération Nice Côte d’Azur CCI : Chambre de Commerce et d’Industrie CETE : Centre d’Étude Technique de l’Équipement CMD : Convention de Mise à Disposition CREAT : Centre de Recherches Économiques et d’Actions Techniques CSTB : Centre Scientifique et Technique du Bâtiment DDAF : Direction Départementale de l’Agriculture et de la Forêt DDEA : Direction Départementale de l’Equipement et de l’Agriculture (fusion DDE-DDAF) DDE : Direction Départementale de l’Equipement DIREN : Direction Régionale de l’Environnement DTA : Directive Territoriale d’Aménagement EMS : Emplois Métropolitains Supérieurs EPA : Établissement Public d’Aménagement EPCI : Établissement Public de Coopération Intercommunale FAO : Food and Agriculture Organization FDGER : Fond Départemental de Gestion de l’Espace Rural INSEE : Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques INRA : Institut National de Recherche Agronomique ISTED : Institut des Sciences et Techniques de l’Equipement et de l’Environnement pour le Développement LGV : Ligne à Grande Vitesse MEDD : Ministère de l’Ecologie et du Développement Durable MIN : Marché d’Intérêt National OIN : Opération d’Intérêt National ORSEC : Organisation de la Réponse de Sécurité Civile (Plan d’urgence) PDU : Plan de Déplacement Urbain PIG : Projet d’Intérêt Général PLM : Paris-Lyon-Méditerranée (Compagnie de chemins de fer) PLU : Plan Local d’Urbanisme POS : Plan d’Occupation des Sols PPMVEANP : Périmètre de Protection et de Mise en Valeur des Espaces Agricoles et Naturels Périurbains PPRI : Plan de Prévention des Risques d’Inondation SDAU : Schéma Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme SAEM SACA : Société Anonyme d’Economie Mixte Sophia-Antipolis Côte d’Azur SAFEGE : Société Anonyme Française d’Etudes et de Gestion SAFER : Société d’Aménagement Foncier et d’Etablissement Rural SAGE : Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux SAU : Surface Agricole Utilisée SEM : Société d’Economie Mixte SGAR : Secrétariat Général pour les Affaires Régionales (Préfecture de Région) SMEBVV : Syndicat Mixte d’Étude de la Basse Vallée du Var SOGREAH : Société Grenobloise d’ Études et d’Applications Hydrauliques STEP : Station d’Épuration ZAC : Zone d’Aménagement Concerté ZAP : Zone Agricole Protégée ZICO : Zone Importante pour la Conservation des Oiseaux ZID : Zone Industrielle Départementale (Carros - Le Broc) ZPS : Zone de Protection Spéciale

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