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L’Ombre de Saint-Saëns

©LESLIE ARTAMONOW

# trio·kheops # spectacle

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TEXTE: STÉPHANE RENARD Mêlant théâtre d’ombre et magie, musique et comédie, L’Ombre de Saint-Saëns, mis en scène par Sybille Wilson et présenté aux Festivals de Wallonie, célèbre le centenaire du compositeur bourlingueur. Avec le Trio Kheops à la barre d’un répertoire à (re)découvrir.

Àforce d’associer sans cesse son nom à son Carnaval des animaux, pièce légère et satyrique, on finirait par oublier que Camille Saint-Saëns (1835-1921) composa bien d’autres œuvres au cours d’une vie plutôt mouvementée. Pianiste virtuose et organiste, Saint-Saëns fut en effet aussi un sacré globe-trotter, qui connut une gloire immense de son vivant. En cette année 2021, la commémoration du centenaire de sa mort est l’occasion, dans le cadre des Festivals de Wallonie, d’une étonnante création, L’Ombre de Saint-Saëns. Celle-ci mêle avec humour la musique, le texte, le théâtre et la magie. Une production à multiples facettes, qui colle parfaitement à l’image d’une personnalité facétieuse et pas toujours commode. Pour nous en parler, Marie Hallynck, violoncelliste de l’ensemble Kheops, en formation réduite ici au trio, avec Tatiana Samouil (violon) et Muhiddin Dürrüoglo (piano et arrangements).

Avant d’évoquer le compositeur, quelques mots sur cette coproduction des Festivals de Wallonie et de la Compagnie l’Orpiment? C’est une manière originale de populariser la musique classique… Marie Hallynck: Oui, c’est vraiment un spectacle complet, mais je ne veux pas trop le déflorer car il est plein de surprises! Il a été conçu et magnifiquement mis en scène par la franco-britannique

Sybille Wilson. Le texte reprend uniquement des écrits de Saint-Saëns, qui avait la plume tout aussi féconde, et a été mis en forme par l’écrivain Sylvain

Coher qui en assure la cohérence. Il est porté par le comédien belge Thierry Hellin, truculent en Saint-

Saëns, et par l’incroyable “ombromane” français

Philippe Beau. Cet étonnant magicien donne à ce rendez-vous musico-théâtral une dimension tout à fait onirique. Quant à notre trio, il est évidemment partie prenante de cette scénographie qui met vraiment en relief la musique de Saint-Saëns.

Apparemment, vous avez été vous-même surprise par l’ampleur de son répertoire?

Absolument. En préparant le programme, nous nous sommes rendus compte que, même en tant que musiciens, on méconnaît complètement sa musique. Il a énormément composé. On lui doit une douzaine d’opéras mais aussi beaucoup de musique instrumentale. Nous avons fait le choix de proposer un aperçu aussi large que possible, en l’adaptant à notre trio quand c’était nécessaire.

Mon mari pianiste, Muhiddin Dürrüoglo, a réalisé pas mal d’arrangements. Je pense notamment à la

Danse macabreainsi qu’au Carnaval des animaux qu’il était impossible d’ignorer. Mais nous jouons aussi des extraits de son superbe Trio n°2.

Il y aura également de vraies découvertes?

En tout cas des pièces peu connues et pourtant formidables. Nous les avons glissées pour montrer toute la créativité de Saint-Saëns. Je pense ainsi à sa Suite pour violoncelle et piano opus 16 mais aussi à deux morceaux pour piano seul, Antwort, qui est une étonnante improvisation, et Souvenir d’Ismaïlia, une œuvre virtuose écrite sur un thème ottoman, qui nous rappelle que Saint-Saëns fut un sacré bourlingueur. Et un touche-à-tout… On lui doit la partition L’Assassinat du Duc de Guise, qui a été la première composition originale de l’histoire du cinéma. Nous en jouerons bien sûr un arrangement. C’est donc un programme très contrasté, parce que nous l’avons souhaité à l’image de l’homme qu’il était, un sacré personnage.

Si vous deviez faire son portrait?

Un grand voyageur qui avait assurément besoin de s’évader sans cesse et dont la musique reflète étroitement sa nature profonde, qui était très complexe. D’après ce que j’ai lu, j’ai l’impression qu’il avait à la fois les pieds sur terre et la tête dans les nuages. Mais je ne voudrais surtout pas faire de la psychanalyse à deux sous… Sa musique parle d’elle-même!

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