vie dans tout รงa?
Et la
LAURENCE DUARTE
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« Si quelqu’un commençait par se demander : qu’est ce que l’homme ? Quels sont ses besoins ? Quelle est pour lui la meilleure façon de se réaliser ? (…) S’il reconnaissait cela, il pourrait utiliser les produits de la science et de l’industrie en fondant toujours ses choix sur ce même critère : est-ce que cela me rend plus humain ou moins humain ? »
George Orwell
Il a fallu des rencontres, des conférences, des voyages, des lectures, des liens tissés, des instants de grâce, des énervements aussi parfois. Il a fallu écouter intensément et comprendre simplement pour donner des pourquoi pas ? Paradoxe espérance / doute pour créer un blog, petit îlot perdu dans l’immensité d’internet. C’est de là que je lançais ces petits messages, telles des bouteilles à la mer. Il y a ces phrases que j’ai aimé au cours de mes lectures, il y a ces aspirations profondes transformées en petits textes humbles, il y a ces regards, textes témoins des paysages intérieurs de notre société, il y a des histoires courtes un peu chamboulées en sociologie d’amour, il y a de petites choses, fragments d’une vie à l’endroit, à l’envers, curieuse, toujours optimiste, indéfectiblement humaniste. Le blog prend ici la forme d’un livre - abécédaire en miscellanées, pour une lecture facile, vivante, à l’envie, pour découvrir en prenant son temps valeurs, mutations, forces en mouvement, pour se reconnaître au hasard des mots, résonnances d’esprit, d’actes et se sentir d’un coup ensemble.
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Remerciements Je remercie de tout mon cœur mes enfants pour leur amour solaire et la joie qu’ils me procurent chaque jour renouvelé. Je vous ai donné la vie mais vous avez sauvé la mienne. Tout au long de ces années de promenade j’ai eu la chance de lire des auteurs qui m’ont inspiré, il y a réconfort à reconnaître une idée, une pensée jumelle. Ils m’ont aidé à écrire ces relevés libres. J’ai osé grâce à eux. André Comte Sponville, Alexande Jollien, Edgar Morin, Philippe Sollers, Christian Bobin, Albert Jacquard, Xavier Emmanuelli, et tant d’autres cités pour la plupart dans cet ouvrage, sur lesquels je me suis appuyée. Pour ceux que j’aurai pu omettre, je leur demande pardon, car c’est bien involontaire de ma part. Merci donc à tous ces auteurs, penseurs, qui écrivent, car écrire c’est mettre à nue un bout d’intimité de soi, prendre des risques, mais avec vous je me sens moins seule.
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Sommaire A
Arbre..................................11 Agir....................................12 Année (belle).........................12 Année (bonne).......................13 Anniversaire.........................14
B
Bali....................................17 Beauté.................................20 Bobin (Christian)...................21 Bouddha..............................22 Bushido...............................23
C
Cap Horn.............................25 Communication.....................25 Compassion..........................27 Comprendre.........................28 Compréhensif (incompréhensif) ...................29 COQ...................................29 Confucius.............................30 (Pleine) Conscience.................31 Constance............................32
D
Décalage..............................35
E
Éthique...............................37 Enfance...............................37 Enfant.................................38 Étiqueter.............................38 Éveille.................................39
F
Flatterie / Flagornerie.............41 Fleur..................................42 Forme humaine.....................43
G
GuÉrison.............................47
H
Homme................................51 Histoire ..............................52 Hygiène...............................57
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I
Imagine...............................61 Immatériel...........................62 Incompréhension...................63 Inde....................................64 Indignation...........................65 Ingénierie.............................65 Introspection........................67
J
Japon..................................69 Jardiner..............................69
K
Kilomètre.............................71
L
La haut................................73 Loved..................................73
M
Mandchou............................77 Marthe................................77 Mendiant.............................78 Merveilleux..........................80 Monde.................................80 Mythe.................................82
N
Naufrage..............................85 Nid.....................................85 Nord...................................86
O
Objet..................................89 Orient.................................90
P
Paradis...............................93 Pépé...................................94 Père-Noël.............................95 Péril...................................96 Peur...................................97 Point..................................99 Politique..............................99 Possible............................. 101 Pouvoir............................. 101 Propagande........................ 102
Q
Quantité............................ 105
R
Rapa Nui........................... 107 Regard.............................. 108 Regard.............................. 109 Résilience........................... 109 Résolution.......................... 111 Ridicule............................. 112 Roseau.............................. 112
S
Sage.................................. 115 Sauvage............................. 116 Sceptique........................... 117 Sculpteur........................... 117 Sens interdit....................... 118 Serendipity......................... 118 Sincérité............................ 120
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T
Tranquillité........................ 123
U
Ubuntu.............................. 125 Univers............................. 126
V
Vacances............................ 129 Venise............................... 129 Vertu................................ 131 Vie................................... 132 Ville.................................. 133 Visage............................... 134 Voyager............................. 135
W
Western............................. 137
X
Xénophobe......................... 139
Y
Y-être................................ 141
Z
Zut................................... 143
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A
BONNE ANNEE ARBRE AGIR
BELLE ANNEE
ART
ANNIVERSAIRE
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ARBRE L’Arbre Une amie m’a envoyé un bout de texte sur le « revivre » lorsqu’après avoir connu la présence de la mort, lorsque la vie s’est retirée si loin qu’on se demande si elle va revenir, elle revient. La bataille fût incertaine, longues journées à juste devoir respirer, longues nuits à prier avec folie, aller chercher tout au fond des regards de ceux qui vous disent la vie ou la mort. Et puis finalement les fils sont retirés, on se relève faiblement, on remarche et on sort dehors. Je ne sais si c’est pour cela que j’aime tant le milieu du printemps, mais je n’oublierai jamais le retour au dehors, devant un arbre verdoyant d’étincelles, le vent soufflait les prémisses de l’été et une chenille agrippée à son fil tentait de regagner son point d’ancrage, bringuebalée par les courants d’air farceurs. Oui c’est sans doute pour cela en autre que j’aime la nature printanière. Comme a conclu Guy Corneau dans cet extrait de texte « devant ces amandiers en fleurs au printemps, je me suis dit : c’est donc pour cela que j’ai été si malade » Qu’il faut aller
poser sa tête, son dos contre un grand arbre et JUSTE lever la tête.
C’était, il y a quelques années au départ tout est comme neuf mais cela ne dure pas, la contemplation, le temps de la respiration reconnue et appréciée, ne durent pas.
On continue à se tromper de vie, à s’énerver pour des broutilles, à se faire du souci pour des riens, à ne pas avoir le courage de ces idées, à laisser les autres décider, à laisser faire. On oublie qu’ « on » nous a laissé vivre. Même en y prenant garde, on se laisse emporter par les peurs, l’argent, l’ambition, l’égo, la compétition. Toutes ces choses sans importance, mais que nous pensons avec tant d’erreurs qu’elles nous définissent. Heureusement les arbres au Printemps sont toujours là, il suffit de s’asseoir sous un feuillage vert tendre et de se laisser éblouir par les étoiles du soleil pour nous souvenir que nous sommes en vie, une vie à un fil telle une petite chenille. J’aimerai dire à ceux qui souffrent, les tristes ou les désespérés que la nature est à tout le monde, que les arbres offrent leur ombre et leur lumière à n’importe lequel d’entre nous. Qu’il faut aller poser sa tête, son dos contre un grand arbre et juste lever la tête. L’arbre s’occupera du reste…
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AGIR Agir plutôt que témoigner «Agir c’est ce que l’écrivain voudrait par-dessus tout. Agir plutôt que témoigner. Ecrire, imaginer, rêver, pour que ses mots, ses inventions et ses rêves interviennent dans la réalité, changent les esprits et les coeurs, ouvrent un monde meilleur» JMG Le Clézio à Stockholm, discours de réception du prix Nobel de littérature.
ANNÉE (BELLE)
«vous voulez Tout ce que
que les hommes fassent pour vous, faîtes le de même pour »
eux
La plus belle des années L’année s’est achevée. Enfin! diront certains, déjà? diront d’autres. Fini et bien fini. A défaut de bilan, elle commence par les souhaits, les rêves et les voeux que l’on se souhaite, à nous et aux autres.
Matthieu 7,12
Aujourd’hui et pour toute cette année, je nous souhaite des jours heureux et de grands lendemains. Des jours heureux où l’esprit demeurera frais tant il circulera. De grands lendemains, où la lumière ne nous donnera plus faim. Des jours heureux où la solitude sera notre aventure. De grands lendemains, où nous nous découvrirons en meilleur compagnon. Des jours heureux où nous aurons l’audace de vivre. De grands lendemains où nous nous réveillerons vivants. Des jours heureux où la rencontre sera notre quotidien. De grands lendemains, où le partage sera notre Sens. Des jours heureux où Ensemble sera noté sur chaque porte. De grands lendemains, où la lumière sera dans chaque foyer. Des jours heureux où je te vois remplacera je te nie. De grands lendemains où je t’aime abolira je te hais. Des jours heureux où l’autre sera un autre Soi. De grands lendemains, où l’humanité se sentira une.
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Des jours heureux où l’émerveillement sera perpétuel. De grands lendemains, où la joie sera sans lacune. Des jours heureux où nous habiterons la légèreté. De grands lendemains, où la transparence se fera présence. Des jours heureux où nous serons vivants. De grands lendemains, où nous serons heureux. Définitivement, je nous souhaite la plus belle des années!
ANNÉE (BONNE) Bonne Année d’Amour En lisant un livre consacré à Mère Teresa, je suis tombée sur une de ses pensées que j’ai trouvé profondément vraie; Elle disait des pays riches, que le plus grand mal dont souffraient ces habitants, était le manque d’amour. N’avait elle pas raison? Si l’on regarde le rapport à l’autre dans nos sociétés modernes, on ne peut être qu’atterré. L’autre n’est pas un ami potentiel, mais un ennemi potentiel, au mieux on s’en méfie, au pire il n’existe pas. A quoi bon risquer le lien? Nos politiques encouragent le «déliement», la société : l’ambition et l’écrasement de l’autre par la même occasion. Sans compter la stigmatisation des faits divers par la presse et la télévision nourrissant notre imaginaire des pires peurs, l’autre se montre pervers, pédophile, violeur, serial killer... A quoi bon risquer le lien? Il est quand même inquiétant d’être obligé d’inventer une journée de la gentillesse, à quand une journée de la politesse? Sommes nous en train de redevenir des animaux sous la coupe de la loi de la jungle? Alors forcément, on récolte l’indifférence des autres, le manque d’entraide, la solitude et le manque d’amour. Comment peut on oublier que les autres, ce sont des autres nous? Comment peut on oublier que sans empathie, sans compassion, sans entraide, l’être humain est voué à sa perte? Alors pour cette année nouvelle, j’aimerai de tout mon coeur souhaiter à notre monde, une année d’Amour, une année de Liens, une année de Rencontres. Une vraie et belle année humaine.
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ANNIVERSAIRE Anniversaire La vie de l’homme ne s’écoule pas de manière uniforme, comme le discours convenu sur la fuite du temps pourrait le laisser entendre: il y a des commencements et des éveils, des défaites et des ruptures. Il y a un temps pour la croissance et un temps pour la pause, un temps pour l’accumulation et un temps pour le don, un temps pour l’action, un temps pour l’attente, un temps pour la vie et un temps pour la mort. La vie est fait de hauts et de bas. Nous voudrions vivre cette alternance selon des rythmes réguliers pareils au balancier de l’horloge de nos grands-mères, et non dans le tourbillon des évènements. Des évènements qui semblent nous tomber dessus en désordre où nous ressentons le temps affreusement long en période de disette et bien trop rapide en période généreuse. Dans ces alternances et dans ces rythmes, les anniversaires sont des moments de pause; ils nous rappellent à la fois le commencement et la fin, occasions de bilan car notre temps de vie est limité. Ce que nous fêtons lors des anniversaires, ce n’est pas la progression inélucable du temps, mais la qualité de la vie qui nous est accordée dans le temps présent et les tâches accomplies ou à accomplir par lesquelles nous donnons nous-mêmes à cette vie sa qualité. Cette fameuse qualité de remplissage. Donner de la qualité implique d’aménager sa vie en parfaite symbiose avec les autres vies: c’est le bonheur de la créativité. Il ne s’agit pas là de vouloir trop, trop grand, mais plutôt de pressentir et de rechercher les rythmes de la vie, de trouver le ton à chaque fois propre qui unira la mélodie de la vie personnelle aux sonorités des autres vies, pour former une symphonie. Ce qui est bon d’être fêté, c’est le chemin parcouru, c’est la reconnaissance et la joie pour la chance que nous avons de mûrir en qualité d’homme.
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B BEAUTE CHRISTIANBOUDDHA BALI BUSHIDO BOBIN
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BALI La sagesse de Bali Il est des endroits un peu loin de l’Occident où les hommes prient. C’est un des traits les plus frappants de cette belle île qu’est Bali lorsque l’on prend le temps de la découvrir. Il ne s’agit pas là de fanatisme, mais d’une culture absolument unique, d’une richesse incroyable. Et l’on se demande comment celle-ci résiste encore alors que des millions de touristes l’abordent chaque année. C’est à peine s’ils ont pris quelques progrès de la vie moderne comme les moyens de locomotion, la télévision, ou encore le téléphone portable; S’ils ont adopté quelques coutumes venues d’ailleurs comme le noir dans les cérémonies de deuil ou cédés à quelques modes comme le tatouage autrefois signe des hommes ayant fait de la prison.
Des hommes ?
Tout presque tout, a été préservé, comme si les du monde extérieur n’avaient pas Non à Bali, tout ce qui soubresauts sur son éternité de mer mêlée de soleil, remue, résonne, joue, vit, prise la permanence d’un monde où les dieux viterrorise, vibre, ce sont sur sitent les temples, où les démons se promènent » sur les chemins et où les hommes sacrifiant aux deux pouvoirs parce que se sachant pétris de Henri Michaux chacun d’eux, se fraient une existence réglée par les cérémonies. L’enfant n’est pas sitôt devenu homme que vieillard déjà, il s’apprête à être vénéré comme ancêtre et à entrer dans le cycle des renaissances. Bali porte le nom de « l’île des Dieux », ils sont partout au même titre que les démons comme le dit avec humour Henri Michaux « Des hommes ? Non à Bali, tout ce qui remue, résonne, joue, vit, terrorise, vibre, ce sont les démons » «
les démons
Chaque jour, des cérémonies se font ou se préparent, les temples se parent et s’habillent, les femmes se réunissant pour fabriquer des offrandes belles et sophistiquées, que l’on retrouve plus modestement devant les maisons. Chez les balinais, les cérémonies sont importantes, car non seulement elles permettent de communier avec les dieux tutélaires mais aussi de ressouder les liens de la communauté. Bali, c’est un univers culturel d’une richesse inouïe. Il y a de L’Inde un peu mais pas tout à fait, Bali prend, transforme, amalgame pour créer un univers où
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Vishnu, Siwa, Brahmâ cohabitent avec le dieu soleil, les forces de la nature, les démons de la mer… Il ne faut pas voir chez les balinais une croyance quelque peu primitive ou exotique, mais bien reconnaître une véritable philosophie de vie, où le monde de la transparence est présent, tout comme le bien et le mal, les mystères de la nature, et des magies. Beaucoup prennent Bali comme une destination de vacances alors que c’est un voyage qu’elle nous offre à vivre pour peu qu’on ait un regard neuf. Il y a la loi ancienne, il y a les montagnes, les volcans, les gorges, les rizières, les palmeraies ; il y a les hommes, des hommes doux, calmes, et bons. Et c’est là que les dieux vivent, dans mille temples, dans chaque fleuve, chaque montagne, chaque champ. Il y a surtout à apprendre de leur vie à eux, parce qu’ils habitent les paysages sans les endommager, et s’y fondent avec l’élégance des choses de la nature, des plantes, des oiseaux, et des animaux. Tout à Bali est riche, raffiné, tortueux, simple. Tout même l’inconcevable y est possible. Les Balinais sont capables d’intégrer l’étrange, le merveilleux, l’inexprimable dans leurs vies. En est-il de même pour nous occidentaux ? Non, bien sûr ; nous, nous sommes coupés de ces mondes-là. Et il en a coûté infiniment à notre vie ; Cette vie que l’on appelle imaginaire, poésie, ce monde prétendu « surnaturel », la mort, qui sont en en nous et que nous avons chassé chaque jour un peu plus de notre vie. Au point qu’il nous est impossible aujourd’hui de ressentir quelques émotions inconnues. Et je ne parle pas de Dieu. La peur de l’inexplicable n’a pas seulement appauvri notre existence mais elle a appauvri les rapports d’homme à homme en leur supprimant la possibilité des infinis de l’horizon. Aujourd’hui c’est la rassurante monotonie que nous préférons ; comme si nous n’étions pas de taille à affronter le nouveau qui pourrait se présenter. N’est-il pas bon de vivre une vie qui s’attend à tout, même à l’énigme ? Voilà la sagesse à comprendre de ce que nous donne à voir Bali. Comment retrouver le monde la transparence qui nous manque pour ré-enchanter notre vie? Comment transformer notre modèle de vie occidentale qui fait de la possession, de l’accumulation de biens matériels, le sens de notre vie? Comment retrouver un vrai sens à notre existence dans cet occident qui ne sait
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plus répondre aux questionnements sur le bonheur, le progrès véritable, l’art de bien vivre ensemble. Car même si les traditions religieuses chez nous, ont tenté d’apporter des réponses, incapables de tolérance, de compréhension, si souvent intolérantes, elles ne répondent plus aux besoins de sens des individus. C’est bien pourquoi je m’interroge à chacun de mes voyages en Inde ou à Bali. Ce n’est pas qu’il faille adopter leur culture par trop éloignée de la nôtre mais qu’il faille voir que cette culture est capable de répondre à la connaissance de soi, du beau, du bien, de l’immortalité de l’âme, de l « être ». C’est une véritable sagesse de vie. Que cette culture là soit capable de créer une société cohérente où l’entraide et le respect sont présents, nous demande de la regarder au plus près. C’est donc par là qu’il faut chercher, qu’une fois nos besoins matériels essentiels assurés : se nourrir, avoir un toit et vivre décemment, nous devons rentrer dans la logique de l’être. Nous devons apprendre à nous connaître, à nous maîtriser, à connaître le monde qui nous entoure, avec bienveillance. Nous devons redécouvrir comment aimer, vivre avec les autres, gérer les frustrations, acquérir la sérénité, surmonter les souffrances inévitables de la vie et se préparer à mourir tranquillement. Car si l’existence est un fait, vivre est un art nous rappelle Frédéric Lemoine, un art qui s’apprend en étant à l’écoute du monde et de soi. Je laisse à Socrate le soin de conclure en nous rappelant les sources vives : « La Grèce est grande et l’on y trouve un grand nombre de personnes habiles ; Et il y a bien des pays étrangers : il faut les parcourir tous, en les interrogeant pour trouver cet enchanteur sans épargner ni travail, ni dépense. Et il n’y a rien à quoi vous puissiez employer votre fortune plus utilement. Et puis il faut aussi que vous cherchiez par vous. Car vous ne trouverez peut être personne de plus capable de faire ces enchantements que vous mêmes. » Phédon, 78a.
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BEAUTÉ « La beauté sauvera le monde »
beauté
La sauvera le
monde
Dostoïevski
« La beauté sauvera le monde», la phrase de Dostoïevski n’a jamais été autant d’actualité. Car, c’est justement quand tant de choses vont mal autour de nous, qu’il faut parler de la beauté de la planète et de l’humanité qui l’habite. Il n’est plus question aujourd’hui de lassitude raisonnante, mais d’Art, le beau, le bon, le vrai. Car l’Art aide à voir.
Aujourd’hui l’individu retrouve par l’Art sa dimension humaine et spirituelle. L’Art suggère les rapports de l’homme avec l’homme. Son langage dépasse la raison pour faire vibrer le cœur en touchant notre sensibilité. L’art est une fonction nécessaire à la collectivité, à son équilibre, à son environnement et à son devenir. Il est donc vital de se mettre au diapason du futur qui se met en place ; un monde qui pourrait faire peur avec ses dérèglements, ses inégalités et cette désespérance qui gagne nos contemporains ; mais un monde également chargé de promesses tant que les hommes resteront curieux des hommes . L’Art c’est un monde de toutes les couleurs qui fait l’éloge de la vie, de la diversité, avec élégance et style. L’Art a aujourd’hui besoin de lieux nouveaux, porteurs de sens, de simplicité, où être avec les autres reprend toute sa saveur. La ville de Lille a par exemple réhabilité plusieurs lieux pour des expositions géniales qui interrogent le visiteur, que l’on aime ou que l’on aime pas, n’a finalement que peu d’importance tant que l’on réfléchie, que l’on vibre. Des lieux où il fait bon vivre, animés par la curiosité, le respect, l’échange, la différence, autant de termes qui renvoient à une morale. N’est-il pas urgent de préserver la diversité culturelle à l’heure de l’uniformisation?
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BOBIN (CHRISTIAN)
sainteté vivre mal
Lire Christian Bobin, c’est laisser la délicatesse vous toucher au plus profond. Les livres de Christian Bobin ne se lisent jamais d’une traite, ils se lisent doucement, quelques phrases suffisent au bonheur de chaque jour. Presque chaque phrase pourrait être soulignée, citée, gravée en nous. Christian Bobin Christian Bobin écrit des trésors cachés qu’on se murmure à peine les uns aux autres, peut être parce que tant de beauté tranquille ne peut pas être comprise de tous. Sans doute faut il une disposition d’esprit, une disposition de coeur, une disposition d’âme, une disposition à l’intime de soi. « La c’est juste de ne pas faire le qu’on a en soi »
«Leurs paroles étaient faites de morceaux du monde ajustés n’importe comment. Parfois les carreaux de céramique blanche de la convention se décollaient, laissant apparaître le fabuleux rougeoiement des âmes -ce qu’il y a en chacun d’inconsolable et de grand»
Les ruines du ciel, Christian Bobin
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BOUDDHA Le retour de Bouddha Pourquoi Bouddha est il si populaire en Europe? Je me souviens d’une réflexion du Dalaï Lama à un européen qui cherchait la foi: le christianisme c’est bien pour vous lui avait-il répondu. Il est évident que le christianisme fait parti de notre culture comme il est évident que le bouddhisme demande de nombreux efforts pour le comprendre tant cette culture est éloignée de nous. Un début de réponse nous vient d’André Compte-Sponville, l’idéal du sage demeure plus que jamais nécessaire. Et il passe aujourd’hui par la méditation et la compassion issues de la pensée orientale: Bouddha au VIème siècle avant JC a invité les hommes de son temps à l’éveil de la conscience grâce à la concentration de l’esprit et à la compassion envers autrui. La notion de l‘octuple sentier dans le bouddhisme nous parle de la compréhension juste, l’aspiration juste, la parole juste, la conduite juste, les moyens d’existence justes, l’effort juste, l’attention, la concentration. Se concentrer, faire silence en soi, dompter le cheval fou de notre esprit, c’est chercher à se libérer de la dispersion, des fantasmes et des obsessions. Ce n’est pas facile mais c’est aller chercher ce qui nous sommes vraiment. C’est partir à la découverte de l’inconnu en soi, quelle aventure ! Dans cette démarche la compassion est essentielle car elle est inséparable de la méditation, se sentir lié à tout ce qui vit et souffre, c’est une manière de répondre à la question de la raison d’être. Ce qui manque le plus à notre monde occidental et pourtant ce à quoi les occidentaux aspirent. Curieux paradoxe .
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BUSHIDO Les sept vertus du bushido 義 GI la droiture, la rectitude, la rigueur 勇 YU le courage 仁 JIN la compassion, la générosité 礼 REI la politesse, l’étiquette, le respect 誠 MAKOTO la sincérité, l’honnêteté 名誉 MEIYO l’honneur 忠義 GHUG la loyauté
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C COMMUNICATION
COMPRENDRE
COMPASSION
COQ
COMPREHENSIF (INCOMPREHENSIF)
CAP CONFUCIUS HORN CONSTANCE
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CAP HORN «Je suis l’albatros qui t’attend au bout du monde. Je suis l’âme oubliée des marins morts qui traversèrent le Cap Horn venant de toutes les mers de la terre. Mais ils ne sont pas morts sur les vagues furieuses, ils volent aujourd’hui sur mes ailes, vers l’éternité, dans la dernière crevasse des vents antarctiques» Sara Vial (en mémoire des marins disparus au Cap Horn)
COMMUNICATION Communication politique, ça ne passe pas toujours Faire de la communication politique demande à la fois un profond cynisme et un sens inné de la manipulation, celle de son client et celle du peuple. Les communicants sont des véritables magiciens inventant de l’admiration face au néant , au mirage. Toutefois ils n’échappent à la règle immuable: les mots, il faut les remplir. La fidélité à une pensée, c’est toujours agir en conséquence. Ceux qui l’oublient, en font durement l’expérience. Il y a chez nos gouvernants de véritables cas d’école. Notre président Nicolas Sarkozy en était un, de grandes dégringolades en remontées timides, il a fini par faire l’unanimité contre lui. Durant son mandat, J’ai été effarée devant sa communication. J’ai eu l’occasion de demander à un publicitaire proche de lui, pourquoi ce fiasco si prévisible pourtant? Il m’a répondu ce que tous disaient, «c’est lui qui décide, il n’écoute personne surtout pas celui qui ne pense pas comme lui». Se considérant comme la plus belle des mécaniques, il n’accepte que des gants blancs qui le caressent, le «bichonnent», l’adulent. Lorsque les sondages étaient au plus bas, il écoutait un peu... Que fallait il lui dire alors ?
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Calmer le jeu monsieur le Président, un Président si énervé ne peut apporter rien de bon. L’énergie de la peur, la colère, la haine, la frustration ne peuvent conduire qu’à la violence. Un président doit rassurer, redonner de l’espoir, ouvrir un champ de possibilités, comprendre, aimer et gratifier. Voilà la seule et unique voie, arrêtons avec le mépris, la vulgarité, arrêtons s’il vous plaît... Et puis Monsieur le Président, pourquoi ne pas lire un livre magnifique celui d’Etty Hillesum, une vie bouleversée ou comment une femme juive a réussi à garder sa nature profondément bienveillante dans l’atrocité d’un camp de concentration nazi. oui, oui, ça aurait été bien pour vous.
gouverner plutôt que de combattre
Cher Président, Il y avait une trop grande violence en vous, émanant d’un mode de pensée qui attribue la cause des conflits aux torts de l’adversaire et à l’incapacité de reconnaître sa propre vulnérabilité ou celle de l’autre. Il aurait fallu passer à la bienveillance, à la communication non violente, au positif, au respect, à la compréhension, à l’appréciation, à l’attention envers les autres, à l’amour. Il aurait fallu absolument arrêter les comportements égocentriques, égoïstes, avides, haineux, plein de préjugés, de suspicion, et d’agressivité qui dominent la plupart du temps vos pensées. Monsieur le Président, Il aurait fallu apprendre à gouverner plutôt que de combattre, il aurait fallu apprendre le calme, la sérénité, l’écoute. Le plus grand défaut et la plus grande des punitions des politiques, c’est de se croire supérieur au peuple qui l’a élu. Je vous aurai conseillé très sincèrement de commencer à aimer vraiment les français, tous les français sans exception et peut être ceux ci vous auraient pardonné.
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COMPASSION La compassion, nouvel ordre moral
affreusement noir en dessus, miraculeusement pur en dessous » « Le monde :
Christian Bobin La pensée de Christian Bobin, n’est elle pas magique ? Tant nous sommes abreuvés chaque jour de mauvaises nouvelles pour soi et les autres. Pourtant... En ce début de XXIème siècle, les catastrophes qui marquent le monde mobilisent les énergies en une remarquable mondialisation du don, porteuse d’espérance. Catastrophes naturelles, attentats, accidents, nous nous retrouvons tous dans notre précarité d’homme, riche, pauvre, jeune, vieux, la mort prend au hasard sans distinction, sans exception. Dans ces moments là, l’humanité donne, aide, aime. En effet comment devant des événements aussi énormes et presque instantanément vus par l’humanité entière, l’homme confronté à sa propre impermanence, en pleine quête de sens, ne se sente pas directement touché au plus profond de luimême comme s’il s’agissait de la perte de membres de sa famille proche. Chaque jour, Les événements de vie nous rappellent notre finitude et nous renvoie au mieux faire. Nous voilà bien obligé à assumer l’incertitude et l’inquiétude, pour cela nous avons besoin des autres, de reliance avec les autres, comme nous le conseille le philosophe Edgar Morin. Prendre conscience que nous sommes perdus dans l’univers et que nous sommes engagés dans une aventure inconnue, nous fait ressentir le besoin impérieux de nous relier aux frères et sœurs en humanité. Démarche individuelle et sociétale, les vertus sont redécouvertes, et le « bien se penser » se recherche pour faire face à sa barbarie intérieure. Et même si on accuse l’homme moderne de vivre dans son égosphère, obsédé par ses propres besoins, il devient légitime devant ses réactions de nuancer le propos et d’y voir apparaitre la compassion comme valeur du XXI siècle « La compassion est un mouvement par quoi vous allez de vous qui êtes là, à l’autre qui est au delà de vous, et pour lui dire cette chose simple et obscure : « rien de vous ne m’est semblable hors cette misère d’une existence vouée à son effacement par quoi je me reconnais semblable à vous ». C.Bobin Éprouver de la compassion c’est remettre à plus tard son propre bonheur superficiel pour bien s’imprégner de la situation d’autrui, pour prendre sincèrement la mesure de sa souffrance. « Que les gens que nous rencontrons soient beaux, aimables, laids ou dérangeants,
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au fond, ils demeurent des êtres humains comme nous tous, comme nous ils souhaitent le bonheur et ne veulent pas souffrir. De plus, leur droit de surmonter les souffrances et d’être heureux est égal au nôtre » Dalaï Lama. La vraie compassion ne peut se définir uniquement par des actes, comme nous le précise Emerson « La bienveillance qui ne se mesure que par ses actes n’est pas authentique (…) nous évaluons la bienveillance par d’autres critères que le montant des contributions à des œuvres de charité. Seules les vertus médiocres peuvent êtres comptés ». La vraie générosité vient du cœur, ce n’est pas un comportement, ni une réponse émotionnelle momentanée mais un état d’esprit et un engagement construit sur la raison. Dans ce monde où chacun peut se remémorer la phrase de Rivarol: « Le plus difficile en période troublée n’est pas de faire son devoir, mais de le connaître », le monde a besoin d’attention. L’attention à toute vie, avec bienveillance et lucidité.
COMPRENDRE Et si on se comprenait ? Qu’est ce qui nous rend incompréhensif ? Notre demi-sommeil paresseux de l’habitude et de l’irréflexion, notre rigide petit monde à nous, celui qui nous avons construit, enfermés dans nos croyances, nos habitudes, nous empêchant d’accéder au monde tel qu’il est. Arrêtons de nous sentir les uniques porteurs de la culture et de la civilisation. Allons au delà des croyances, des tabous, des idées, et des Dieux. N’est il pas tant de s’affranchir de toutes les repréc’est pouvoir sentations convenues ? Mais qui se soucie encore de la vérité ? en N’avons nous pas peur de la vérité ? de la réalité ? « il me fallait entreprendre sérieusement une fois dans ma vie de me défaire de toutes les opinions que j’avais reçues jusqu’alors en ma créance, et commencer tout de nouveau dès les fondements » nous livre Descartes. De quoi avoir peur pour ne pas suivre le conseil de Descartes? Se remettre en question? Allons, c’est un bien nécessaire. Et puis, comprendre, comme le dit si
Comprendre, expliquer entier
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sagement d’Edgar Morin, ce n’est pas excuser, ce n’est pas justifier, c’est reconnaître l’humain derrière chaque être, c’est ouvrir son esprit à plus grand que soi, parce que l’on va vers la vérité. Cela n’empêchera pas de juger ce qui doit l’être, de condamner sur qui doit l’être, de punir ce qui doit l’être, mais avec un esprit éclairé, lucide englobant le monde. Comprendre, c’est pouvoir expliquer en entier, c’est vouloir comprendre le point de vue de l’autre, l’intégrer en soi, voir les contextes et les faits, appréhender l’autre dans ses environnements (politique, culture, religion, code de l’honneur, code du sacré, politesse...). Nous devons apprendre l’autre dans ses environnements, sinon on va à l’encontre d’énormes malentendus, qui nous nuisent dans notre vie, notre travail. C’est cela s’ouvrir, s’ouvrir au questionnement, se rendre curieux, gourmand des autres, autant que de soi même. Ainsi on devient comme Platon «Je désappris même ce que j’avais cru savoir jusque-là sur beaucoup de choses». Comprendre, c’est ouvrir son champs intérieur autant qu’extérieur, laisser le monde tout entier vivre dans ses veines, et ne jamais cesser de s’émerveiller de ce qu’il apporte au jour le jour aux esprits neufs compréhensifs...
COMPRÉHENSIF (INCOMPRÉHENSIF) incompréhensible compréhensible vie
« Ce qui est , c’est que le monde soit . La plus belle chose que nous puissions éprouver, c’est le côté mystérieux de la » Albert Einstein
COQ
Un coq éminemment masculin À Bali, il y a des dieux, des hommes et des coqs. Ceux-ci sont réservés aux combats (interdits) lors de cérémonies religieuses comme l’Odalan. Si Bali n’est pas le seul lieu où sont organisés des combats de coqs, ici plus qu’ailleurs,on voue à
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ce petit volatile fière, une passion quelque peu déraisonnable. On les met au bord des routes dans de grandes cloches de vannerie à claire-voie à même le sol, et ils passent là leur journée à se distraire de la vie des hommes et surtout à s’habituer au bruit. Le coq de combat c’est la virilité du balinais. Tout homme adulte en possède un et son intimité avec l’animal est tout bonnement incroyable. On le voit le caresser, lui masser les mollets, lui murmurer mille compliments, béat d’admiration, à le nourrir avec précaution, sans compter les bains aux effluves de plantes médicinales et de fleurs. Le balinais prend un soin fou de son coq. A Bali, les coqs sont fiers, bien coiffés, la crête taillée et stylé arborant des couleurs vertes, roses, jaunes, fluorescentes par la grâce de teintures sans doute très surprises des usages que l’on fait d’elles. Et puis il y a les rencontres entre amateurs, où l’on peut toucher, admirer, soupeser, tripoter les coqs des voisins. Le coq de combat, c’est la virilité du balinais, une virilité détachable. Car lors des combats, les balinais attachent un terrible éperon à la patte gauche du coq et l’on compte sur la rage, l’endurance et le courage de l’oiseau pour vaincre l’adversaire. À Bali, le coq de combat est éminemment MÂLE...
CONFUCIUS «A 15 ans, je m’appliquais à l’étude. A 30, je me tenais debout. A 40, j’ai surmonté mes incertitudes. A 50, je me suis rendu compte de la volonté du ciel. A 60, nul propos ne pouvait plus me troubler. Maintenant à 70, je peux suivre tous les élans de mon coeur, sans jamais sortir du droit chemin »
Entretiens de Confucius
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(PLEINE) CONSCIENCE Un des cinq entrainements à la pleine conscience proposé par Thich Nhat Hanh: Consommation en pleine conscience « Conscient(e) de la souffrance provoquée par une consommation irréfléchie, je suis déterminé(e) à ne pas intoxiquer mon corps et mon esprit avec des poisons comme l’alcool, le tabac ou la drogue, comme certains sites internet, films, émissions de télévision, livres ou musiques, ou encore certaines conversations. Je suis déterminé(e) à être attentif(ve) à tout ce qu’absorbent mon corps et mon esprit, de façon à entretenir une bonne santé physique et mentale. Je m’engage à consommer et à offrir uniquement des nourritures qui peuvent m’apporter le bienêtre, la paix et la joie, et j’observerai profondément comment mon bien-être, ma paix et ma joie nourrissent à leur tour le corps et la conscience de mes proches, ainsi que le corps et la conscience collective de la société. Je suis conscient(e) qu’une discipline alimentaire et mentale est indispensable pour préserver la planète, notamment en prévenant le tarissement de ses ressources et la pollution. Au lieu de chercher dans la consommation un remède à l’insatisfaction et à la souffrance, je m’entraînerai à regarder celles-ci profondément en moi pour les transformer, et à entrer en contact avec ce qui peut me rendre heureux dans l’instant présent. »
Thich Nhat Hanh
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CONSTANCE La constance ? Qui connait encore ce mot que l’on n’utilise plus guère. Ne faudrait-il pas le remettre au goût de nos comportements ? Le Littré nous apprend que ce mot vient du latin Constantia, force morale par laquelle on garde l’empire sur soi-même, persévérance, stabilité dans les goûts. Si l’on va chercher un peu plus loin dans le Gaffiot, on apprend que la traduction du latin nous donne permanence, continuité, invariabilité. C’est savoir
se maîtriser,
fidèle à sa vocation profonde plutôt qu’à ses caprices, vifs mais superficiels.
être
En résumé,
savoir se transcender.
J’entends déjà les amoureux du droit au changer d’avis crier à l’entêtement et aux dangers des idées fixes. Mais non, non, la constance est une vertu à l’heure actuelle du zapping, ou rien n’est construit en «dur» mais plutôt sur du mouvant, du «je change», je change de goût car je veux faire parti de la mode, avoir les styles de vie des uns et des autres, aujourd’hui rien n’est fait pour durer mais pour changer. La société de consommation n’a pas uniquement changé notre manière de consommer, elle nous a changé. Notre manière de vivre, d’aimer, de nous comporter, nous zappons continuellement, si l’infidélité dans les choses peut se comprendre et même s’excuser parfois, quand est-il de la fidélité à l’attachement, à l’amitié, à l’amour, aux idées mais surtout aux valeurs qui nous définissaient ? La constance, c’est bien sûr la fidélité, la persévérance, le courage, c’est «avoir de la suite dans les idées». Imaginez vous êtes amoureux si cela veut encore dire quelque chose à notre époque , bon vous êtes amoureux depuis 2 semaines... si au bout de trois semaines, rien ne se passe, combien vont passer à autre chose ? Car la vitesse est la norme. Vivre vite, aimer vite, quitter vite, ré-aimer vite... Est ce de la constance ? Est ce de la sincérité ? Qui peut sortir grandi d’un zapping continuel ? La constance nous offre la perspective d’être en accord avec nos sentiments profonds. Cela ne veut pas dire que la
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constance n’est pas du côté de la vie, de la spontanéité car il s’agit de la constance à soi même dans le courage et la persévérance. C’est savoir se maîtriser, être fidèle à sa vocation profonde plutôt qu’à ses caprices, vifs mais superficiels. En résumé, savoir se transcender. Être une personne c’est se donner une unité au-delà des changements. Être constant c’est finalement ce qui fait le meilleur de l’homme: la pureté morale, la probité intellectuelle, l’exigence de vérité autant envers soi même qu’envers les autres, le sérieux de la vie, sans oublier la conversation, lumière de la fidélité profonde. Sans doute parce qu’à la manière de Pascal
la vraie constance se moque
«
de la constance »
Pascal
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D DECALAGE
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DÉCALAGE Décalage horaire 4 heures. Éveillée d’une nuit trouble, endormie trop tôt sous le chant des cigales du soir, me voici les yeux grands ouverts sur l’encre. Se lever doucement pour ne pas réveiller la nuit qui sommeille encore. Faire quelques pas dans une fraîcheur insoupçonnable près des éclats d’étoiles. Au loin, le monde dort tranquille. Ecrire, tendrement tout au calme d’un murmure de poésie. Contempler doucement le ciel blanchir et nager dans cette aurore toute neuve, juste seule au monde. Ecouter Satie et ses gymnopédies, Beethoven et son empereur pour fêter en délicatesse l’événement. 05 heures 59, une cigale chante, quel enchantement pour accueillir le matin. Jouir de ce matin neuf et offrir le premier des sourires, reconnaissante, à son enfant tout enveloppé de ses rêves et dont les bras encore tièdes de sommeil vous serrent fort. Alors c’est heureuse que je remercie les sortilèges du décalage horaire qui m’ouvre le regard et me donne à vivre.
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E ENFANT ETHIQUE EVEILLE ETIQUETER ENFANCE
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ÉTHIQUE La règle d’or de l’éthique universelle « L’éthique se manifeste à nous, de façon impérative, comme une exigence morale. Son impératif naît d’une source intérieure à l’individu, qui ressent en son esprit l’injonction d’un devoir ; Il provient aussi d’une source extérieure : la culture, les croyances, les normes d’une communauté. Il y a sans doute une source antérieure, issue de l’organisation vivante, transmise génétiquement. Ces trois sources sont corrélées, comme s’il y avait une nappe souterraine commune »
Edgar Morin
L’éthique consiste simplement à agir en évitant d’infliger aux autres la souffrance dont nous ne voudrions pas être victime. « Ne fais pas à l’autre ce que tu ne voudrais pas qu’il te soit fait » est la règle omniprésente dans toutes les traditions religieuses, philosophiques et humanitaires.
ENFANCE Je suis de ceux qui aiment l’enfance Ce matin, il y avait dans les parties communes de ma maison beaucoup d’enfance. De cette enfance enchantée et merveilleuse de nos enfants chéris que nous pleurons nous les grandes personnes. Le bain, un voilier à la coque rouge, échoué sur le bord de la baignoire et des pokemons en perdition. L’enfance est là dans ce terrain propice au jeu qu’est une baignoire océan, mer déchaînée, plein de trésors insoupçonnables. J’ai regardé ces petits personnages, jouets de mon fils, je les ai remis sur leur bateau, le plus joliment possible. Que puis je faire d’autre? L’envie que ce soit jolie reste la seule trace de mes aptitudes enfantines. De mon imaginaire de petite fille il ne reste rien, définitivement, une grande personne ne sait plus jouer, le voyage vers l’âge adulte reste un voyage sans demi-tour. Ce matin, un autre moment, ranger les plaids défaits de la soirée télé d’hier, repoudrer le salon de son air de circonstance, et tout à coup deux petites voitures rouges oubliées sur le bord du canapé, garés tout près des livres, elles attendent
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tranquillement que leur propriétaire revienne les chevaucher de ces petites mains quenotées. L’enfance est venue se mettre là, dans le décor de notre vie d’adultes, deux petites voitures au rouge éclatant, matière à jouets et rayon de soleil tiède sur nos cœurs de grandes personnes endeuillées. Amis grandes personnes, ne grondez pas vos enfants qui laissent leurs petites traces désordonnées dans votre intérieur sérieux et policé, ce petit désordre, c’est de la pure poésie pour nos vies de labeur, c’est un sourire sur nos lèvres d’adulte et un doux attendrissement sur cette enfance qui nous a échappé tout en la laissant filer. Oui, définitivement, je suis de ceux qui aiment l’enfance.
ENFANT «L’enfant, l’enfant du chef, l’enfant du malade, l’enfant du laboureur, l’enfant su sot, l’enfant du laboureur, l’enfant du Mage, l’enfant naît avec vingt deux plis. Il s’agit de les déplier. La vie de l’homme est alors complète. Sous cette forme, il meurt. Il ne lui reste plus aucun pli à défaire. Rarement l’homme meurt sans avoir quelques plis à défaire. Mais c’est arrivé. Parallèlement à cette opération l’homme forme un noyau. Les races inférieures, comme la race blanche, voit plus le noyau que le dépli. Le Mage voit plutôt le dépli. Le dépli seul est important. Le reste n’est qu’épiphénomène.»
Henri Michaux
ÉTIQUETER Etiqueter moins, aimer plus Chaque homme est unique, et à trop vouloir comparer celui-ci à une norme, à vouloir le résumer, on s’écarte de sa compréhension. Nous n’avons pas le droit d’enfermer les autres derrière des mots. C’est en emprisonnant une individualité dans une étiquette, qu’on le bafoue, qu’on l’assomme, qu’on le massacre.
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Il faut refuser de se laisser étiqueter, de se laisser enfermer. Pour nous et les autres. « Chaque fois que l’on parle de norme, on s’écarte de la richesse de l’homme » nous dit Alexandre Jollien. Normer, étiqueter, c’est juger, mais juger par rapport à quoi, à part soi même. Mieux ou moins bien que moi? A cela s’ajoute le problème de l’iceberg, je réduis l’autre à un comportement, en général mauvais, que je mets en relief en oubliant tous les autres aspects, je prends le détail, plutôt que le tout. La partie émergée et immergée font l’iceberg, font l’homme dans sa complexité. De cet homme on trouvera des nuances de folie, d’inhumanité parfois, mais aussi de grands aplats d’intelligence, de bonté. Pulsion et raison nous animent, un homme « Chaque fois que calme sera avenant, un homme en colère l’on parle de détestable, un homme amoureux séduion s’écarte sant. Pourtant ce sera toujours le même de la homme. Est il schizophrène parce qu’il a de » des humeurs ? Ou est ce le même homme Alexandre Jollien qui se module, se transforme ? C’est cela qu’il faut comprendre, comprendre de quoi nous sommes fait nous autres êtres humains afin de nous comprendre nous mêmes mais aussi les autres.
norme, richesse l’homme
ÉVEILLE Rester éveillé et veiller Rester éveillé et veiller « Il faut se méfier du mal, celui-ci n’est jamais spectaculaire au début. Le mal commence gentiment, modestement, on pourrait dire humblement. Le mal s’insinue dans l’air du temps comme de l’eau sous une porte. D’abord presque rien. Un peu d’humidité. Quand l’inondation survient, il est trop tard. (…) Le monde n’est si meurtrier que parce qu’il est aux mains de gens qui ont commencé par se tuer eux-mêmes, par étrangler en eux toute confiance instinctive, toute liberté donnée de soi à soi. Je suis toujours étonné de voir le peu de liberté que chacun s’autorise, cette manière de coller sa respiration à la vitre des conventions, et la buée que cela donne, l’empêchement de vivre, d’aimer »
Christian BOBIN
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F FLATTERIE FLAGORNERIE FORME
HUMAINE FLEUR
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FLATTERIE / FLAGORNERIE De l’art de la flatterie et de la flagornerie «Maître Corbeau, sur un arbre perché, Tenait en son bec un fromage. Maître Renard, par l’odeur alléché, Lui tint à peu près ce langage : «Hé ! bonjour, Monsieur du Corbeau , Que vous êtes joli ! que vous me semblez beau ! Sans mentir, si votre ramage Se rapporte à votre plumage, Vous êtes le Phénix des hôtes de ces bois.» A ces mots le Corbeau ne se sent pas de joie ; Et pour montrer sa belle voix , Il ouvre un large bec, laisse tomber sa proie. Le Renard s’en saisit, et dit : « Mon bon Monsieur, Apprenez que tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute : Cette leçon vaut bien un fromage, sans doute. » Le Corbeau, honteux et confus , Jura, mais un peu tard, qu’on ne l’y prendrait plus.» Tout le monde connaît la célèbre fable de Jean de La Fontaine « le corbeau et le renard », appris par des générations d’enfants. Monsieur de la Fontaine y célèbre une certaine naïveté puérile. Est ce pour cela que personne ne voit le corbeau en soi , lui préférant peut-être le renard ? Mais enfin, que reste-il « d’apprenez que tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute » Ah, ces doux compliments qui parfument notre vie. Soin de l’ego, désir d’affection, de reconnaissance, toutefois dois je rappeler que les hommes loin d’être désintéressés, flattent pour leur profit et que de ce défaut il faut guérir ou se préserver afin de ne pas finir « honteux et confus »
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A moins… À moins que l’on trouve dans le vice avec lequel on tire parti de ce défaut, une méthode, un chemin pour arriver à ses fins. Car de renard, nous préférerons être. Le compliment, l’éloge et la flatterie ne peuvent-ils pas être goûté avec délice ? Certains artistes flatteurs et fripons ne mettent le monde à leurs pieds ? Diplomate, langage d’amoureux ou de séduction, tractation de manipulateur, et autre falsificateur de réalité, comment s’y retrouver et ne pas sombrer dans une vanité bonne à rien. Dénaturer, cacher la vérité ou la réalité pour son propre profit, voilà ce qui est condamnable. Car si le fait d’être regardé peut sauver la vie, être « faussement » regardé peut tuer tout aussi bien. Falsifier la vérité est la faute morale par excellence, car seule la sincérité est la condition du respect d’autrui. Voici donc la différence entre loyauté et vilenie, entre vérité et mensonge, entre vertu et libertinage, entre moral et faute, entre ami et courtisan. Il faut se moquer autant que se méfier de la stupide vanité. Il y a chez les flatteurs plus d’une ruse de renard difficile à démasquer. Que faire alors ? Le plus simple serait de n’écouter personne, se défaire du désir de plaire autant que de déplaire. L’exercice est difficile. Alors, apprenons que les mots doivent être remplis d’actions, de persévérance et de patience. Qu’il faut s’éloigner des mots brillants mais sans vie pour ne s’intéresser qu’aux actions parfois humbles mais bien réelles. Cela ne protège pas de tout mais aide à voir.
FLEUR « Il y a des
fleurs
partout pour qui
veut bien les voir » Matisse
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FORME HUMAINE Reprenons forme humaine Tout a été dit, vécu, compris, nous ne faisons que redécouvrir, redécouvrir perpétuellement, parce que nous sommes sans mémoire. Au commandement « Aimes ton prochain comme toi même », je lui préfère « Aimez vous les uns les autres comme je vous ai aimé ». En effet, certains ont fait de cette phrase une justification pour le moins hasardeuse à leur entrée en écosphère. Ainsi peut-on entendre, « je m’aime moi avant d’aimer les autres, c’est normal, je prends soin de moi, c’est moi d’abord... » et cette nausée du moi, me vient. Partialité, stupidité, voilà qui peut résumer une si mauvaise application d’une des plus belles phrases du maître de vie que fût Jésus. S’aimer, c’est sortir du plus grand esclavage qui soit: le moi; le moi et sa bêtise, le moi et sa crainte, le moi et son désir, le moi et son ignorance. Ne cherchez pas plus loin les raisons d’une vie déréglée, méchante et conne. Je ne nie pas qu’il faille se soigner, et s’écouter pour apprendre à bien penser, à aimer la vérité, à cheminer en soi, à se maîtriser, à agir avec sagesse. Mais où voyez vous, qu’il faille revendiquer un quelconque égoïsme d’un tonitruant moi d’abord, les autres après. Croyez vous que le chacun pour soi, le moi je, soit la meilleure manière d’apprendre à dis« les uns les autres cerner le vrai du faux, le bon du mauvais ?
Aimez vous comme
je vous ai
Croyez vous que l’égoïsme aide au bon déroulement notre vie intérieure sans les apports des autres » de êtres humains ? L’égoïsme, c’est le manque de compassion par excellence, le manque d’amour, l’abJésus sence de discussion, de compromis. On est seul, et bien content d’être tyran de soi-même. Il me semble urgent de rappeler que l’égoïsme n’est jamais la solution, qu’il n’est pas bon de donner la priorité à ses propres intérêts. L’égoïsme est condamnable et ne doit pas être brandit comme justification d’une consommation excessive ou d’une absence d’empathie envers autrui. Il est fondamental de combattre les tendances égoïstes, car elles sont à la source du malheur des hommes. Qu’apporte notre culture de l’individualisme, de fermeture sur nous-mêmes ? Qu’apporte l’égoïsme à un homme ? à part l’isolement, l’ignorance, la sécheresse. On peut subsister seul, mais on ne peut pas exister seul. « l’homme a une intelligence qui lui permet de voir l’autre comme sien » nous rappelle Swami Prajnapad.
aimé
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Laissons l’amour prendre racine, cultivons le afin qu’il devienne véritablement une vertu. Les autres sont des autres moi-même si je prends soin de moi, et de mes proches, je suis capable de prendre soin du monde dans son entier. C’est la seule revendication que nous sommes digne de chercher à dire, à faire, à transmettre. J’ai envie de citer Emmanuel Levinas « L’autre passe avant moi, je suis pour l’autre ». L’autre c’est notre nécessité, écouter, aller vers la rencontre malgré le risque, le risque que l’autre se trompe ou nous trompe. La générosité est toujours intéressée, car elle implique l’échange, l’interaction entre deux êtres, l’ouverture à ce que nous apporte l’autre même si cet apport nous paraît inquiétant voir dangereux. « Toute rencontre comporte un risque. Être généreux, c’est affronter ce risque » nous dit Albert Jacquard. La générosité c’est notre devoir d’être humain, c’est assumer notre responsabilité d’être humain plutôt que l’égoïsme ou la culture de l’individualisme. C’est reprendre forme humaine.
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G GUERISON
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GUÉRISON J’achète donc je suis ou la guérison des coeurs Le 15 septembre 2008 le pape était à Lourdes… Le journaliste de la radio l’avait annoncé « Il va donner l’extrême onction au premier rang de fidèles, de grands malades et de grands handicapés. Il y a beaucoup de gens qui vont à Lourdes chaque année, ils viennent chercher la guérison du cœur et espère la guérison du corps. » Ils implorent la Vierge, mère des miracles. La guérison du cœur… c’est ce que le journaliste a dit. La Paix avec soi, avec les autres, avec la vie, avec le destin, avec la chance ou son contraire, avec … Nous devrions tous aller à Lourdes, n’est ce pas ? Combien d’entre nous, portons un cœur malade. Il bat si peu, même lui n’y croit plus à ce monde là, à cette vie là. Combien de crises de cœur ? nous doutons, nous doutons et cela commence jeune, le début de l’âge adulte pour certains , la quarantaine pour d’autres… Lancinante la perte de foi arrive, perfide la peur de vivre s’insinue, voleuse la déception nous prend tout entier, méchante la maladie de l’absence nous assèche. A quel âge, peut-on se rendre compte que l’on est seule, à quel âge commence t’on à négocier nos masques et apparences, à quel âge notre cœur en paie-il le prix ? Un grand choc ou une fissure dans le mur, mais le résultat reste le même, une neige noire recouvre notre cœur pour une nuit sans fin d’hibernation. Boum….boum….boum…. à la manière d’un automate il envoie juste ce qu’il faut pour survivre dans ce monde, notre monde, celui que nous construisons chaque jour en s’en plaignant le plus souvent. Combien sommes-nous à nous demander ce que nous faisons là, à ne pas comprendre, à ne pas savoir ou chercher, comment faire ? Comment faire ? Beaucoup veulent changer, mais changer quoi, « faire des trucs pour la planète, pour le monde, pour les autres », et puis on tourne la page. Il faut bien travailler pour payer le loyer, la bagnole, l’école, le dernier « it bag, » être ce que j’achète. Etre ce que j’achète, alors je consomme, tu consommes, il consomme, nous consommons, vous consommez, ils consomment. La consommation enchaine, dès le matin et jusqu’au soir, achetons comme nous respirons. Regardons les armoires, les chaussures, les sacs, les portes monnaies…
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C’est «in» l’hyperconsommation. Dans un ELLE Décoration, un reportage chez Ines de la Fressange ou l’on découvre un tiroir pour ses portes monnaies, elle en avait au moins 20. Si je fais pareille, je serai un peu elle, non ? j’aurai un peu sa vie, non ? La société occidentale vit à plein un confort exogène mais qui ne comble pas l’immense inconfort endogène de nos concitoyens. La faim affective, la faim de tendresse, la faim de compréhension ne trouvent aucun remède dans les choses. Nous voici dans une des plus terribles des dictatures, je consomme donc je suis. Aujourd’hui on peut voir ce qu’ont les autres, la comparaison est constante, on focalise sur l’avoir des autres, qui focalisent sur l’avoir d’autres plus riches… On est délabré de tout cela, mais c’est nous, c’est à l’intérieur de nous au plus profond de nos habitudes, et à moins d’être loin de tout, c’est difficile de changer. Comment faire ? Il n’est pourtant pas question d’arrêter tout type de consommation, il y a plaisir à se faire plaisir, toutefois il serait intéressant d’analyser ce que l’on met dans ses achats, l’achat va-t-il me rapprocher de ce que je suis vraiment ou va-t-il m’en éloigner. Est ce moi qui achète ou les tendances ? le marketing ? les masques ? Ne serait-il pas intéressant d’être vigilant, de se mettre à l’écoute de soi, de se détacher des courants afin de redevenir un plein acteur de sa vie, et de décider de poser des actes d’achat pour soi pour ce que l’on est vraiment en soi en toute connaissance de cause. Remettre de la pensée dans l’acte d’achat pour un achat « raisonné ». Il n’y a pas à avoir de rejet de l’hyperconsommation, ou de culpabilité à ressentir, juste voir. Voir ce que je suis et dans quelle monde je vis, sans jugement, dans l’acceptation et la compréhension. C’est à ce prix que nous pourrons être comme le dit Epictète « des esclaves en voie de libération » et ré-entendre notre coeur.
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H HOMME HISTOIRE HYGIENE
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HOMME Et si je devenais un Homme? « Un être humain c’est bien sûr un être vivant fabriqué par la nature comme elle a fabriqué les chimpanzés, les fleurs. Elle m’a fait par des rencontres aléatoires, me voilà je suis un individu qui peut devenir un être humain mais qui ne l’est pas encore. Comment va-t-il le devenir? Il va le devenir par sa capacité à rencontrer l’autre et c’est parce que je rencontre l’autre que je suis capable de performances nouvelles.(…) Par conséquent l’essentiel de moi ce n’est pas ce qui est en moi apporté par la nature c’est ce qui est en lien avec les autres, apporté par les rencontres. Il y a l’individu fait par la nature, l’objet, le caillou, la petite goutte d’eau dont parlait François d’Assise, et puis il y a la personne qui est capable de se savoir être. Et voilà la performance magique, non seulement être ce qui est à la portée de n’importe quel caillou mais se savoir être, qui semble être le privilège des êtres humains. J’ai l’impression qu’arrivé là j’ai un programme pour la petite planète. Pour le père de famille que j’évoquais tout à l’heure qui a à gérer cette planète, il faut que je sois conscient que l’essentiel de chaque être humain n’est pas en lui mais dans les liens qu’il tisse avec les autres. Par conséquent on débouche sur de la politique, comment vivre les uns avec les autres ? Alors on peut vivre évidemment en état de bagarre, de conflit, en voulant être un gagnant c’est-à-dire un fabricant de perdant. On peut avoir envie d’être compétitif, de l’emporter sur l’autre, mais c’est perdu, on perd le surhomme auquel on participe ou l’on pourrait participer. Ou alors on renonce effectivement à la compétition, à la bagarre, à être le gagnant, on se dit je vais être celui qui permet à l’autre de se dépasser parce que c’est par l’autre que je me dépasse. Cela a déjà été dit, comme toutes les choses un peu intelligentes, par le philosophe Erasme ‘‘on ne naît pas homme, on le devient’’ »
Albert Jacquard
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HISTOIRE Histoire d’amour courte « Ce fut, un soir, en septembre, Vous étiez venus m’attendre, Ici même vous en souvenez vous? À vous regarder sourire, À vous aimer sans rien dire, C’est là que j’ai compris tout à coup, J’avais fini mon voyage, Et j’ai posé mes bagages, Vous étiez venus au rendez-vous Qu’importe ce qu’on peut t’en dire, Je tenais à vous le dire, Ce soir je vous remercie de vous, Qu’importe ce qu’on peut en dire, Je suis venue pour vous dire, Ma plus belle histoire d’amour c’est vous… »
Ma plus belle histoire d’Amour, Barbara
ELLE Ça a commencé comme ça. Normalement. À l’heure bleue, sous les pins. Nous avions marché côte à côte, accompagné du silence de nos pas, du silence de nos paroles, du silence de nos peurs, du bruissement assourdissant de nos cœurs. Nous nous sommes abrités sous l’odeur des pins, j’ai oublié notre conversation. Les souvenirs ont cet avantage d’attraper l’essence de l’instant, son extrait le plus pur, patiné par la belle subjectivité de notre imagination. Il a passé la frontière. Cette frontière invisible mais parfois si profonde pour venir toucher mes lèvres. Il m’a embrassé. Rapidement, presque subrepticement. Surprise, je l’ai regardé, il venait de faire quoi ?
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Pas grand-chose, presque rien, un baiser… Il venait juste de déclencher la seconde phase de l’histoire d’Amour, l’aventure physique. Ça avait commencé bien avant ce baiser, et bien avant le premier regard. Bien avant nous, parce que la vie fait lentement son travail de façonnage, de polissage, nous prépare aux rencontres. Combien de fois, suis-je tombée sur des handicapés de l’Amour, des douloureux de la corde sensible. Ce n’est pas si simple, ou c’est peut-être trop simple, histoire de couleurs qui se mélangent, ou pas. À qui la faute, à personne, parce que les avantages d’être une grande personne, c’est d’assumer, assumer de n’être ni victime, ni coupable, mais juste un être humain qui cherche son chemin. À l’heure bleue, sous les ombres portées, il a posé sa main sur mon visage délicatement, merveilleusement. On s’est à nouveau embrassé bouche contre bouche, lèvre contre lèvre, langue contre langue, doux mélange de la rencontre amoureuse : enfin le Goût ! enfin le Goût ! Il a dit « Si ça commence comme ça, je suis mort ». Sa silhouette massive s’est éloignée de moi. Lui, il est de la race des chênes. J’ai souri, je venais de gagner un souvenir pour la vie. C’est difficile de raconter une histoire d’Amour par la fin. Le baiser reste le deuxième point zéro négatif de la rencontre. Ensuite on passe en moins, moins les lèvres, moins la peau, moins l’odeur de la peau, moins les vêtements, moins le corps. C’est le point le plus dangereux car ensuite je me désincarne en corps unique, seins uniques, fesses uniques, sexe unique. Je ne suis plus qu’un corps, à désirer, à découvrir, à caresser, à goûter, à pénétrer, à posséder, à aimer. C’est si facile d’aimer un corps, et si difficile d’aimer par delà. Le premier baiser est le pire des moments d’une histoire d’Amour car il ouvre en grand la porte des sens : toucher, mordre, lécher, sentir, sucer, effleurer…. C’est découvrir le territoire de l’autre, mais pas l’autre, annexer le territoire de l’autre mais pas l’autre. Qu’importe de déflorer le profond quand le superficiel s’offre. On se trompe d’intime dans les histoires d’amour. Pour moi, c’était différent, les femmes, c’est toujours différent. Le regard féminin va chercher plus loin qu’un visage gracieux, un corps entraîné, une voix assurée, qu’un descriptif physique avantageux. Mais avais-je le choix ? Il faisait son âge, il avait le corps de son âge, les rides de son âge, le look de son âge. 70 ans.
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LUI «J’ai toujours préféré l’intelligence à la beauté, ça se tient beaucoup mieux dans le temps. Sans compter que l’intelligence nous garde de l’ennui, lorsque la beauté nous y abime» Anonyme Je n’aime pas me souvenir d’elle, de toute façon elle ne veut pas. Je ne dors pas la nuit, je ne veux pas que la mort me surprenne dans mon sommeil. Alors je pense, je ressasse, je me souviens, j’ enjolive. Les souvenirs ne sont-ils pas toujours re-masterisés? Je la convoque souvent, mais elle ne vient pas, elle reste au plus profond, du plus profond de ma mémoire. Ce dont je me souviens? Je la voulais, je la voulais. Qu’importe ce visage abimé par le temps, je la voulais, je la voulais. Lorsqu’elle était là, j’étais un géant qui prenait toute la place. Je la voulais, je la voulais, je la voulais. Je me rêvais en homme libre imaginatif, fou d’amour, là ou je n’étais qu’un homme égaré, pressé et occupé. Et puis il y a eu ce dimanche, oui un dimanche, le dimanche j’avais un peu plus de temps. On a marché, et j’ai parlé longtemps. Je ne la touchais jamais avant, son parfum venait de mon passé, Guerlain, combien de femmes avais-je déshabillées avec ses effluves? Elles étaient toutes en elle, elles les résumaient. J’ai dû regardé sa bouche dix millions de fois, ça m’obsédait cette bouche rouge de vie qui me souriait doucement. Bouche de jour, bouche de nuit, bouche toujours, toujours. J’avais peur de cette bouche, envie mais peur, peur mais envie. Bon... et puis je me suis lancé, voilà tout. D’un coup, hop, c’était fait. Et là, le miracle, nos lèvres ont commencé un long bavardage physique, tout en danse, et en sensualité, comme deux amies qui se retrouvent, elles se parlaient sans nous, seules elles se reconnaissaient et s’émerveillaient de se connaître. Il n’y avait plus de mot, il n’y avait plus d’esprit, il n’y avait que la fusion douce de nos lèvres jumelles. Une éternité d’une minute. Le goût de la mort précipité par le goût de l’extase. Mon dieu, qu’allais-je faire de cela ? Qu’allais-je faire de moi ? J’ai vécu ce jour là. Ensuite ? Je suis parti.
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ELLE & quelqu’un qui l’interroge - Est ce que vous étiez sa maîtresse ? - Non - Pourquoi ses bruits sur vous alors ? - Un vieil homme avec une jeune femme qui a la vie devant soi, que croyez vous que les gens pensent ? C’était soit mon père ou autre chose. - Autre chose ? - Oui, un truc un peu contre-nature, la belle et la bête, la jeunesse et la vieillesse, vous voyez ? ça alimente un fantasme malsain, comment peut-elle être avec lui ? l’est-elle ? ça doit être une professionnelle ? non ? alors ? dans tous les cas on est mal catalogué, toujours mal catalogué. Et personne n’est armé pour vivre le regard des autres, et son propre regard à soi. - Donc vous étiez amis ? - Oui, c’est ça, amis… - Que s’est-il passé alors ? - La lâcheté, cette vulgarité de l’âme. -… - Combien d’hommes vivent au balcon de leur vie, gardant leurs vieux vêtements intérieurs. Les hommes sont lâches, c’est leur nature, leur unité de base. Que dire de plus ? C’est difficile de se mériter, n’est-ce pas ? - Sans doute - Sans aucun doute
LUI La jeunesse est cette fontaine de jouvence qui attire le vieux que je suis. L’espace d’un instant j’ai son âge, je retrouve la vigueur , le rire, la fraîcheur. Je veux descendre du bateau du temps, laissez- moi sur son île ou chaque nuit, je revis. Qu’importe le miroir, je revis ! l’hiver de la dégradation ne viendra plus, plus jamais ! Le corps reprendra force, vive les pilules bleues qui sauront la satisfaire. A moi l’intelligence, la vivacité d’esprit, voilà ce que je lui offre. Qu’importe mon ventre, mes mains fatiguées face à de tels avantages. Le classique ne passe jamais, je ne suis pas ce jeune effet de mode, je suis la force de l’âge. J’emmerde le miroir et tous ses vieux de 70 ans, qui font 100 ans. Oui, oui à vous tous, je crie : à 70 ans, on embrasse encore ! on bande encore ! on vit encore !
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La baiser devient mon obsession, l’admirer prise, à moi, rien qu’à moi. Heureux propriétaire de sa terre belle et fertile.
ELLE « La beauté n’est jamais vieille, elle fauche de jeunes gens naïfs et bien portants » Beau ? Il ne l’était pas bien sûr, pas à la manière dont on s’imagine la beauté, mais il lui restait de ces années sportives un grand corps bien debout, des épaules larges qui semblaient rassurantes, des yeux sombres mais constamment brillants et ce léger écartement des deux incisives qui lui adoucissait un sourire carnassier pour laisser transparaître des réminiscences enfantines. Elle adorait ses sourires écartés. Il l’avait séduite comme ça, à force de sourires chanceux, de maladroites confessions à son avantage, il lisait les horoscopes de bazar, avouait pleurer souvent, disait douter. Elle avait vu comme un signe de sagesse cette auto dérision saine et douce, elle l’avait un peu crue, oui un peu. Par contre elle avait été indubitablement charmée par un esprit vif et brillant. Il disait l’avoir aimée devant un tableau de Giorgione. Ce tableau résumait ce qui allait arriver : une tempête, la tempête. Elle ne l’avait pas vu ce jour-là, perdu sous les ciels de l’Academia, toute à sa méditation sacrée. Lassitude, solitude, inquiétude l’abandonnait lorsqu’elle entrait par le grand Canal, Venise vivait en elle, luxueuse et humble, rêveuse, comme elle, comme elle. Le nez en l’air, elle regardait voler les anges et les étoiles dans la solitude de ses nuits. Elle aimait être seule, persuadée que les âmes ne peuvent s’accompagner. Elle avait reçu une lettre de lui en rentrant chez elle, comment avait-il eu l’adresse ? elle n’avait jamais demandé.
LUI à ELLE Chère Vous, Voilà plusieurs jours qu’une envie de vous écrire me tient. Déjà je vous parle nuit et jour, je vous raconte. En vous voyant devant Giorgione, je me suis senti moins seul, je nous ai vu, vous étiez si belle allaitant l’enfant, je vous voyais par-delà la rivière, si heureux, plein du désir d’aller à vous. Il fallait que je vous rencontre, passer la rivière. Vous connaître et être connu de vous.
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Difficile à expliquer ce désir de rencontre, pas de masque, de fioriture, de mots poudrés pour faire jolie. Vous laisser toute la place, comme dans ce musée que vous emplissiez tellement fort que je manquais de l’air habituel. J’ai envie de profondeur avec vous, une belle rencontre franche, dénuée de nos egos bavards. C’est ce regard magnifique de sensibilité qui me touche, cette larme à peine voilée, vous m’avez souri sans me voir. Ensuite j’ai vu les anges de Bellini autour de moi… J’aurais voulu vous accrocher, mais je n’ai pas pu sur l’instant, tant le mystère me paraissait grand. J’aimerais vous voir, je veux vous voir. Permettez-le-moi, oui permettez-le moi. Votre homme à la veste rouge Avait-il été lui-même pour une fois ? il l’avait suivi jusqu’à son hôtel, son assistante avait fait le reste : nom, prénom, adresse, téléphone. La chance était avec lui, ou le destin ? elle habitait si près… Mon dieu si proche…
HYGIÈNE Hygiène d’humain Comment faire aujourd’hui pour relever les défis de notre siècle, en améliorant nos vies mais aussi celles de nos enfants? Voilà ce qui anime un grand nombre de nos concitoyens qui trop bousculés dans leur vie, veulent que cela change, les difficultés sont une terre fertile aux questionnements. Les réponses nous ont été données par des philosophes et des sages de continents différents à travers las âges car la nature de l’homme s’expérimente depuis bien des siècles. Voilà bien longtemps que l’on sait ce qui réussit ou ne réussit pas à la vie, toutefois pourquoi faut-il toujours que l’homme doive expérimenter ce qui lui arrive pour comprendre... à minima le plus souvent hélas... Les êtres humains prennent conscience de la notion de responsabilité universelle et de la nécessité de l’intégrer dans leur vie ; il n’est plus question aujourd’hui de
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travailler uniquement pour soi, pour sa famille, ou pour son pays, mais au bénéfice de toute l’humanité. Cette écologie du comportement humain est l’assurance d’une utilisation équitable des ressources naturelles dans un souci des générations à venir. Chaque individu peut inspirer les autres simplement en s’attachant à développer sa propre motivation altruiste. Il s’agit de mettre en place une certaine forme d’écologie du comportement, de la pensée, d’éthique, militer pour une nouvelle hygiène verbale: ne pas mentir, ne pas calomnier, ne pas proférer de paroles injurieuses, éviter les bavardages frivoles. Vivre avec l’absolu devoir de bienveillante vis à vis de l’autre qui est aussi un être humain. Personne ne vous en voudra d’avoir injurié un homme, personne ne viendra vous jeter en prison ( à quelques exceptions près) pour avoir menti ou colporté des rumeurs et pourtant. C’est parce qu’il n’y a pas d’obligation, que l’obligation à la réserve, à un respect nécessaire, devient vitale pour nous tous. Il est temps de se remettre au diapason de l’humain en chacun de nous, dès aujourd’hui la relation aux autres doit reprendre toute sa saveur . Car la vision que doit avoir un homme de sa vie : est de la faire perdurer et progresser celle-ci dans le meilleur. La lecture d’un passage d’Ethique la méthode 6 le dernier ouvrage d’Edgar Morin doit nous éclairer: « La foi éthique est amour. Mais c’est un devoir éthique que de sauvegarder la rationalité au cœur de l’amour. La relation amour / rationalité doit être en ying yang , l’un toujours lié à l’autre et contenant toujours en lui l’autre à l’état originel. Cet amour nous enseigne à résister à la cruauté du monde, il nous enseigne à accepter / refuser ce monde. Amour est aussi courage. Il nous permet de vivre dans l’incertitude et l’inquiétude. Il est le remède à l’angoisse, il est la réponse à la mort, il est la consolation. C’est doctor Love qui peut sauver Mister Hyde. Paracelse disait : « Toute médecine est amour ». Disons aussi et surtout : « tout amour est médecine ». L’amour médecin nous dit : aimez pour vivre, vivez pour aimer. Aimez le fragile et le périssable, car le plus précieux, le meilleur, y compris la conscience, y compris la beauté, y compris l’âme, sont fragiles et périssables » Il est temps...
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I INCOMPREHENSION
INDE ingenierie
IMMATERIEL
indignation IMAGINE
INTROSPECTION
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IMAGINE « Imagine » John Lennon Rêver ! Pas le rêve qui n’est que la purge biologique de notre fonctionnement cérébral mais le plus difficile celui qui fait frémir, distille le désir, et peut être une raison de vivre. Faire des rêves est sans doute une des choses les plus difficiles à notre époque. Je ne vous parle pas des rêves que l’on fait lorsqu’on dort. Quoique… Je parle de rêve éveillé, lorsqu’on imagine un présent futur lumineux, profondément optimiste, pour nous d’abord et pour les autres ensuite. Faites un sondage, demandez à vos amis leurs rêves éveillés, s’ils se projettent en héros de success story, qu’ils soient matériels, amoureux ou spirituels. Ils vous répondront, à quoi bon ? Ne sommes-nous pas entrés dans l’air des bras ballants ? La plupart d’entre nous, sommes dans la désespé« la rance, désespérance de nous-mêmes et surtout des conduit d’un point A autres, du monde, de ses troubles et de ses hauts le à un point B, cœur. Je regarde mes enfants, ils sont dans la plus proconduit » fonde insouciance et dans la plus magnifique des espérances : du père Noël, des fées, des prières, du Albert Einstein « quand je serai grand, je serai Pompier », « Quand je serai grande, je serai chanteuse pour l’excitation et vétérinaire pour l’intelligence » … Mais en tant que personne inachevée ne suis je pas tout simplement une enfant ratée tel ces grands enfants… Les grandes personnes ne sont-elles pas des enfants loupés ? Des grands enfants aux regards vides des rêves morts nés ? Les enfants sont si proches de Dieu, si proches des fleurs, des abeilles, des papillons, de la lune, des étoiles : innocence, insouciance, espérance, jouissance. Jouissance pure de la vie. Peur aussi mais peur qui se protège d’un bouclier magique en forme d’oreiller blanc, ou d’un pouce en l ‘air.
logique
l’imagination partout
Les grandes personnes ne rêvent plus, n’y arrivent plus. Le rêve est un jeu. Mais savons nous encore jouer ? à part en singeant les enfants ? Pourtant il importe de rêver, remettre de la lumière dans les yeux, en commençant par soi, égoïstement pour soi. Puis lorsqu’on est devenu une magicienne du rêve, alors seulement rêver aux autres, avec les autres, à propos des autres. Oh je les entends tous les pisses vinaigres, les raba-joies, les ricaneurs, ces êtres
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gris blablabla, pseeepseee, j’entends déjà ceux qui ricanent, ces messieurs dames gris, ternes, sombres, « tête dans les nuages, hors des réalités ». Au contraire rêver, c’est remettre du rose au cœur, de l’optimisme, de l’espoir, entrer dans une autre Réalité. C’est imaginer. Imaginer. Quel joli mot. Qui nous empêche d’imaginer notre vie pour qu’elle se réalise enfin ? Parce que forcément l’action sera plus belle, plus légère, plus douce, plus forte que le rêve. Il me semble que rêver maintenant, c’est peindre en rose l’horizon, réchauffer son cœur, instiller l’espoir et générer de l’optimisme, pénétrer avec un frisson délicieux dans une autre réalité. Et au pire ? Oui au pire, que risque-t-on ? Notre vie n’est que finitude. Pas convaincu? juste une pensée d’Einstein : « la logique conduit d’un point A à un point B, l’imagination conduit partout » Allez, on s’y met...
IMMATÉRIEL L’immatériel : la nouvelle distinction S’il est vrai que le luxe repousse sans cesse plus loin les limites de la modernité et que sa raison d’être demeure principalement celle de distinguer, l’écart entre les petites différences distinctives a toutefois tendance à se réduire. Face à cette érosion le luxe a opéré depuis quelques années un mouvement de balancier du matériel vers l’immatériel. Le luxe de la richesse intérieure succède lentement au luxe des apparences. Le besoin d’appartenance que l’on croyait irremplaçable se voit fragilisé par la nécessité d’indépendance. Le savoir reprend ses droits sur l’avoir. Quant aux services de qualité dont le concept devenait poussiéreux, ils s’offrent une seconde jeunesse avec le développement de la personnalisation. La santé de l’esprit et du corps va de pair avec cette évolution qui conduit à un luxe beaucoup plus serein dans lequel l’épanouissement de la personnalité s’af-
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firme en tant que valeur sociale élitiste. Quoi que plus personnel, le luxe immatériel s’avère particulièrement ouvert sur le monde et nous rappelle que le luxe du luxe est incontestablement l’esprit du bonheur.
INCOMPRÉHENSION Une ère d’incompréhension mutuelle et généralisée Ne pas comprendre c’est être aveugle de tout. Ne pas être compris, c’est n’exister qu’à moitié. Qu’est ce qui vous fait le plus mal, vous met le plus en colère, vous attriste le plus? Ne pas être compris. Combien de relations se détériorent par manque de compréhension. La compréhension, entre voisins, entre collègues de travail, entre homme et femme, entre malade et médecin, être compris de l’étranger, autant que de la famille, nous avons tous ce profond besoin d’être compris et donc de comprendre, de nous comprendre. Combien de malentendus sont dus à l’incompréhension, combien de colères, combien de haines, combien de fureurs, combien de rages, combien de violences, combien de guerres? L’autre n’est pas moi, lui appliquer des sentiments qui me sont propres, c’est lui nier sa singularité, lui nier la vie qui l’a façonné, lui nier son propre passé et présent. Je me projette donc je ne peux comprendre l’autre. Et puis... Et puis, je suis au centre de mon monde, dans mon monde je suis le roi, j’ai le beau rôle, c’est l’autre le fautif, le mauvais joueur à coup sûr. Est-ce que je me mens à moi-même, dans cette auto-justification? Bien sûr. Mais à force mes mensonges deviennent ma réalité, ma réalité de roi. Nous voici donc devant cette grande incompréhension planétaire et quotidienne qui nous délie, nous impose l’autre en ennemi plus qu’en inconnu.
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INDE Souvenirs d’une première fois indienne L’Inde, en août c’était la première fois. Et malgré les guides lus, les reportages regardés, l’expérience sur place, l’Inde reste difficilement « résumable », c’est tellement tout et son contraire. Pour les voyageurs cela reste un pays à péripétie ou selon le degré de préparation du voyage on peut avoir un simple désagrément ou vivre un véritable cauchemar. Dans mon cas, cela s’est révélé être par moment des pertes de patience... Un vieux sage indien ne rappelle-t-il pas qu’en Inde le voyageur patient perd sa patience, et le voyageur qui en est dénué en acquiert ? Avec la mondialisation, nous avons tendance à penser que nous sommes tous pareils partout dans le monde, en Occident cette mauvaise manie de penser que tout le monde est identique, nous emmène vers des petits délits d’incompréhension. Mais en Inde... cela peut se transformer en crime d’intolérance ou pire de racisme. Il faut vraiment comprendre que l’homme indien n’a rien mais rien à voir avec l’homme occidental que cela soit dans le négatif ou le positif. Mais comme disait Tiziano Terzani l’Inde ne peut pas devenir un pays comme les autres, car tant qu’il existera une société qui respecte les saints mendiants, qui s’incline à leurs pieds pour se charger de leur énergie et qui leur donne à manger, cette société ne pourra jamais devenir totalement matérialiste. C’est ce qui donne à l’Inde son caractère incroyable. La société y est profondément spirituelle, le ou les dieux sont partout, même les rats que nous, nous détestons, les indiens les vénèrent. L’Inde est enchantement de la tête pour celui qui désire vivre le vrai dépaysement intellectuel qu’elle procure, on se sent à la fois anthropologue, « trouveur » de trésors d’idées et... complètement déphasé par moment. Mais ne vous méprenez pas, il faut aller en Inde « préparé » sinon l’on devient fou. Pourquoi ? tout simplement parce que nous arrivons avec notre vie d’occidental bien réglée, sous contrôle, fiable et là bas nous nous retrouvons dans un autre chose affolant ? Alors si nous restons avec nos visières d’occidental supérieur, on ne comprend rien à ce pays, et l’on repart d’Inde super énervé en les traitant d’arriérés. Et là ,c’est passer à côté d’une expérience intense et de grandes richesses. Et puis, il y a l’autre folie, de ceux qui pensent pouvoir embrasser tout de l’Inde, séduits par ses philosophies, ses gourous, sa naturophilie, cela aussi, c’est perdre le Nord, car c’est du plus profond d’eux-mêmes d’une histoire plusieurs fois millénaire que les indiens puisent leur nature et qu’il est impossible en une vie de devenir eux. Que dire de plus de ce pays ? que j’y pense chaque jour car ce séjour a rempli ma
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vie d’émotions et d’interrogations souvent contradictoires mais nouvelles. L’Inde a un fort pouvoir d’attraction, qui un peu à la manière d’un comprimé longue durée d’action nous fait changer d’avis. Une fois rentré, on se dit « bon on y retourne dans dix ans quand ça ira mieux », parce que leur côté approximatif, lent, pas organisé, à vouloir toujours t’arnaquer ça te met en rage et puis... ensuite on pense à tout ce qu’on a vu, les regarder vivre, agir, penser, tout ce qui nous a fait rire, émerveillé, intéressé et là on se dit que l’on y retournera bien avant les dix ans... Vraiment quel pays!
INDIGNATION Eloge de l’indignation « Il arrive que des pays, voire des civilisations entières, prennent de mauvaises habitudes, ou pire. C’est pourquoi, depuis l’époque des prophètes jusqu’à nos jours, l’indignation, la colère et les appels à un ressaisissement moral ont de tout temps été nécessaires. L’indignation est autre chose que la révolution, la rébellion et la restauration, bien qu’ayant des liens avec les trois. Peut-être lui arrive-t-il d’être simpliste, feinte ou hors de propos, mais sans elle jamais la vie ne connaîtrait de nouveau départ »
The Guardian, après la mort de Stéphane Hessel
Ingénierie L’ingénierie d’idées, pourquoi ? « Juger est une illusion parce que si vous devez juger, vous vous servez de votre propre échelle de valeurs. Derrière le jugement se cache la croyance que tout le monde est identique » derrière cette phrase de Swami Prajanpad, on peut deviner
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ce qui anime celui qui part sur le chemin de l’ingénierie d’idées. L’ingénierie d’idées est à la fois une vraie philosophie de travail et un métier complet permettant une vision globale réaliste. Un métier dont on a absolument besoin puisqu’il permet une profondeur de vue, un angle de 360 degrés, dans un élan réceptif puis un souffle créatif. Aujourd’hui le monde est malade de ses classifications, on veut tout classer, typer, mettre dans des cases, on spécialise à outrance, oubliant le TOUT. Chaque individu est séparé des autres, puisque spécialisé dans son domaine, parle « financier » ou « marketing » ou « créatif » ou « sociologique » ou « politique »… créant ainsi des incompréhensions entre les individus, les services dans les entreprises et même notre société. L’hyperspécialisation contribue puissamment à la perte de vision ou conception d’ensemble, car les esprits enfermés dans leur discipline ne peuvent appréhender les solidarités qui unissent les connaissances entre elles, il devient alors quasiment impossible d’appréhender le complexe. Il est temps d’apprendre à voir la forêt plutôt que l’arbre devant... qu’est ce que la forêt? C’est une connaissance pertinente du monde. Il y a folie à ignorer les complexes nous dit Edgar Morin grand philosophe, le «tisser ensemble» de notre monde. Déjà Hippocrate et Avicenne nous apprenaient à traiter les causes d’une maladie, plutôt que les symptômes sauf en cas de danger mortel où il faut d’abord s’attaquer aux symptômes. L’ingénierie d’idées relie, décloisonne les connaissances, cherche une connaissance poly-disciplinaire, reconnaît et affronte incertitudes et contradictions, travaille le « bien penser ». Le principe de réduction est inhumain lorsqu’il s’agit d’humains et toute problématique est liée à l’humain d’une manière ou d’une autre. Il faut nous laisser contaminer par la vérité de l’autre, les vérités multiples et semblables dans leur somme: vérité du patron, vérité du fournisseur, vérité du consommateur, ect... Voilà pourquoi l’ingénierie d’idées donne à celui qui l’utilise, une vision éclairée de ses problématiques et un méta-point de vue. Lorsqu’on appréhende le complexe, on acquière une compréhension la plus proche de la vérité, et une augmentation importante des curseurs (signaux forts et signaux faibles) nécessaire à un formidable élan créatif. Car l’ingénierie d’idées n’est pas juste une philosophie d’analyse c’est aussi ce qui permettra dans un second temps de créer l’impulsion déployant l’action, souffle puissant de transformation fait de vigueur, de détermination, et de capacité à imaginer le nouveau. Voilà pourquoi et comment, l’ingénierie d’idées permet d’appréhender n’importe
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quel type de problématique telle que : politique, spirituel et marchand, stratégique, artistique, loisirs de luxe, industriel, humanitaire… C’est passionnant, apprécié par les dirigeants ayant compris l’intérêt de s’entourer d’esprit libre et honnête, d’un esprit qui ne peut se résigner au savoir parcellarisé, n’a jamais isolé un objet d’études de son contexte, de ses antécédents, de son devenir et pense qu’un problème est juste une pièce perdu du puzzle. À l’ingénierie d’Idées de lui retrouver sa place…
INTROSPECTION Connais toi, toi même : l’introspection contre l’incompréhension. Ecoutons la très belle pensée d’Etty Hillesum « un peu d’hygiène mentale, que diable! ton imagination, tes émotions intérieures, ect, sont le grand océan sur lequel tu dois conquérir de petits lambeaux de terre, toujours menacés de submersion » Donc, revenir à soi même, toujours à soi il faut revenir. A force de trop souffrir, et cela dès l’enfance, nous sommes devenus des hommes et des femmes forteresse, cette carapace nous protège chèrement car elle nous coupe des autres et de nous-même. Porter un regard sur soi-même. Se comprendre soi-même, s’observer, se regarder, s’analyser, c’est devenir conscient de soi, se mettre en auto-vigilance. Epitecte L’égo est mis de côté pour laisser la place au profond de soi. Apprendre à se regarder tranquillement, sensiblement, laisser affleurer sa propre fragilité. Regarder à l’intérieur de soi, Montaigne le préconisait déjà, c’est voir d’où je pars, voir ce que je suis, ma faiblesse, mes failles, ma précarité, sans juger; contempler avec bienveillance ce que je suis, sans complaisance, ni dureté, dans toute ma complexité. Je suis chez moi, en moi. Pour répondre au jour le jour à la question d’Epitecte « Qui es tu ?» .
« Qui es tu ?»
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J JAPON
jardinier
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JAPON Japonais de coeur Le voyage a cela de formidable qu’il vous rend citoyen du monde et l’on se découvre une grande famille humaine. Souvent on ne se rend pas compte que chaque voyage, chaque peuple rencontré, s’insinuent en nous, nous modifient, afin d’ élargir notre « ADN ». Etre dans d’autres pays que le sien, c’est se mélanger à des visages, des sourires, des vies, des habitudes, tout un tas de choses que l’on peut résumer un peu par « culture » , qui nous amuse, nous surprend, nous ravit ou nous énerve. Et l’on revient chez nous « mélangé » . J’ai eu la chance d’aller au Japon en octobre, j’ai pu partager avec eux leur pays, leur vie. J’y ai croisé des milliers de visages, rencontré de nombreux amis. Et aujourd’hui devant la terrible catastrophe qui les touche, c’est aussi moi qu’elle touche, parce que je suis devenue japonaise, parce que ces gens qui souffrent mais restent toujours incroyablement dignes, sont ma famille. Je suis certaine que nous sommes nombreux à nous sentir japonais aujourd’hui, et que tous, nous souhaitons que tout s’arrange vite. Mais surtout nous aimerions que les Japonais sachent que nous sommes là pour eux, et que nous ferons tout ce que nous pourrons pour les aider. C’est le moins que l’on puisse faire lorsqu’on est de la même famille.
JARDINER «La vie s’apparente à un jardin. Les feuilles flétrissent et les fleurs se fanent naturellement. C’est seulement si nous éliminons les déchets que nous profitons pleinement de la beauté des nouvelles feuilles et fleurs. De même, nous devons éliminer de notre esprit les expériences mauvaises, sombres du passé. Vivre, c’est se souvenir d’oublier. Pardonne ce qui doit être pardonné. Oublie ce qui doit être oublié. Embrasse la vie avec une vigueur renouvelée... Nous devrions pouvoir accueillir chaque instant de la vie avec un regard neuf, Telle une fleur fraichement éclose»
Mata Amritanandamayi
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Kilomètre « Une lettre, c’est un petit peu de compagnie, la preuve qu’on a pensé à vous. Cette attention, née du passé, écrite au présent et destinée à l’avenir survit, voyage, s’achemine lentement vers vous, triomphe des kilomètres et soudain, lorsqu’on ouvre l’enveloppe, vous saute au cou, vous salue et vous fête comme un petit chien heureux. »
Sylvain Tesson
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LA HAUT « La nuit, la Terre paraît encore plus magique que durant le jour. Il y a toujours une tempête quelque part. La lueur des éclairs couvre parfois le quart d’un continent. Cette perturbation naturelle, cette éruption d’éclaboussures de lumière est un spectacle majestueux. A l’intérieur du vaisseau spatial tout est calme. On n’entend rien du grondement de tonnerre; on ne sent rien des rafales de vent et tout paraît tranquille comme si c’était l’effet d’un simple jeu de lumière. Tout à coup, contre votre volonté, vous commencez à croire que ces éclairs ne résultent pas d’une tempête naturelle, mais proviennent de l’explosion de bombes. Non, c’est impossible! Seuls les éclairs et les aurores boréales peuvent éclater au-dessus de notre précieuse Terre »
Vladimir Shatalov (astronaute russe)
LOVED Be Loved C’est l’histoire d’un petit homme qui tombe amoureux pour la première fois. Il a cinq ans, il veut faire les choses de bonne manière, s’engager. Alors il achète une très jolie petite mignonne bague avec un coeur (c’est important) dans une merveilleuse petite boîte fleurie. On est sérieux à cinq ans. Le voilà fiancé. Deux ans plus tard c’est la séparation, la petite fiancée ne voulait plus le partager avec ses copains, c’était devenu ingérable. C’est l’histoire d’un homme qui tombe amoureux pour la seconde fois. Il a huit ans et il est très épris d’une petite blondinette. Alors il lui offre une de ces petites figurines en forme de chaton dans un sac en tulle rose avec un minuscule, joli, mignon petit mot, sur lequel il a écrit je t’aime. Difficile d’être plus explicite. Ensuite il lui a offert trois bagues dont une en main propre avec un coeur tout rose (c’est important le coeur). Les deux autres attendaient dans un petit porte monnaie à l’ourson souriant. Chaque jour d’école il lui parle, il l’écoute, il la défend,
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il la protège. Pendant les vacances, il lui a écrit la plus intense des lettres d’amour, avec deux grands coeurs tout collés ensemble. Il l’aime c’est évident du haut de ses huit ans, c’est très simple et très pure. Le plus merveilleux n’est pas qu’il l’aime, mais que cette jolie mignonne belle petite fille sache qu’elle est son aimée, celle qu’il aime. Il ne sait pas encore ce qu’est le romantisme, il pense que les bébés ça se fait par bisous prolongés. Mais il y a quelque chose qu’il sait c’est aimer: be loved. Les enfants connaissent le goût des cerises mais pas que ça, non pas que ça.
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M MANDCHOU
mendiant MENSONGE MONDE
MYTHE
MARTHE
MERVEILLEUX
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MANDCHOU Divertissement de mandchous Il existe un peuple (enfin une partie) qui passe son temps à élever des grillons en dehors de la saison de reproduction, pour pouvoir entendre, l’hiver, lorsqu’il neige dehors la voix du printemps. Il y a un art à élever ces petites bêtes, à les choyer, à les observer. Ils vivent entre citrouille aux caractères de longévité et de félicité (lorsque la citrouille sort de terre, on la met dans un moule en argile sculpté, en poussant celle-ci épouse les creux des caractères), et petites boites splendides. Les chinois aiment à les promener dans la poche intérieure de veste, bien au chaud. Et puis, bien sûr il y a les grillons de combat. Les Chinois, comme tous les Asiatiques sont de grands parieurs, de grands amateurs de jeux de hasard. Les grillons se combattent dans une minuscule arène bleu en porcelaine, très belle. Avant le combat les grillons sont gardés dans des cages noires avec une petite maison en porcelaine à l’intérieur, entièrement peinte, avec son si petit abreuvoir. Ensuite en route vers le combat, pour les mettre en colère, on utilise un pinceau avec deux ou trois moustaches de musaraignes pour les piquer, et puis c’est la guerre! Qui gagne ? celui qui reste au milieu et se met à chanter le chant puissant de la victoire. Si un jour vous passez par la Chine, cherchez un de ces marchés aux grillons et oiseaux (autre grande passion chinoise) pour admirer cette science du grillon.
MARTHE « Marthe que ces vieux murs ne peuvent pas s’approprier, fontaine où se mire ma monarchie solitaire, comment pourrais-je jamais vous oublier puisque je n’ai pas à me souvenir de vous : vous êtes le présent qui s’accumule. Nous nous unirons sans avoir à nous aborder, à nous prévoir comme deux pavots font en amour une anémone géante. Je n’entrerai pas dans votre coeur pour limiter sa mémoire. je ne retiendrai pas votre bouche pour l’empêcher de s’ouvrir sur le bleu de l’air et la soif de partir. je veux être pour vous la liberté et le vent de la vie qui passe le seuil de toujours avant que la nuit ne devienne introuvable.»
René Char
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MENDIANT Mendiants, premières victimes de la barbarie moderne Il y a des jours où les nouvelles sont vraiment mauvaises, lorsque l’homme s’éloigne de l’homme, cela est triste. Aujourd’hui, début de la période estivale de nombreuses villes de la Côte d’Azur prennent des arrêtés municipaux contre la mendicité, mais aussi contre toute « est une forme de pauvreté trop visible. Certains poussent le zèle à déconseiller à leurs adminisinterne » trés de donner directement aux sans-abris diabolisés au possible. A Cannes, avec un « ne donnez pas mais donEdgar Morin nez utile » (une liste des associations «spécialisées» est proposée sur le document) on décrédibilise celui qui aide son prochain par lui même.
Autrui nécessité vitale
L’incivilité fait certes des ravages, mais c’est dans les deux sens, pour quelques paumés qui vocifèrent, on permet l’ignorance d’autrui, on encourage l’absence d’assistance à l’inconnu en difficulté, on crédibilise la haine, l’offense, le mépris. Comment une politique municipale peut permettre cela ? Une politique qui sépare plus qu’elle ne relie ! Que dire à part citer Edgar Morin : « Autrui est une nécessité vitale interne » En effet, l’excès de séparation est pervers entre les humains quand il n’est pas compensé par la communauté et la solidarité, l’amitié et l’amour. Les clochards, les sans abris, les mendiants, les paumés, les perdus, les exclus sont des hommes comme les autres, comme vous, comme moi. Ils ont en commun une souffrance radicale qui induit une relation altérée avec les autres, qu’elle soit amoindrie ou pathologique, se traduisant parfois par de la violence mais le plus souvent par la solitude et la dépression. L’exclusion entraîne l’exclusion dans une spirale descendante, une lente mais réelle absence de foi en la société, en la vie, en soi. Trop déprimés, trop désocialisés, trop perdus pour attendre quoi que ce soit. Et ne croyez pas qu’ils ont tous le même parcours, chacun a sa destinée personnelle, rencontre avec les contraintes de la précarité suite à la perte d’un logement, perte d’un emploi, deuil familial, problème de la santé… Tous grands blessés de la vie. Et tous absolument tous ont été rejetés une fois, puis deux, puis mille à chaque fois que nous passons à côté d’eux sans les voir. En quelques mots, les grands exclus sont des personnes trop seules pour savoir
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formuler d’elles-mêmes des appels à l’aide et parfois même se les formuler. Voilà pourquoi malgré toutes les facilités d’accès que l’on a pu imaginer, elles sont la plupart du temps condamné à rester hors du système pourtant créés pour elles. Alors pensez-vous qu’il faille les achever en ayant en plus bonne conscience ? Pensez-vous que donner deux ou trois pièces ne leur rendra pas un peu de dignité parce que pour une fois on les a vu ? Pensez vous qu’il faille mépriser ceux qui ont tout perdu ? Les deux ou trois pièces, le repas acheté dans une boulangerie et offert à la va-vite ne réglera pas le problème, mais cela allégera à coup sûr la peine. Améliorer ne serait ce qu’un peu la condition des autres, c’est se faire du bien à soi aussi, c’est agir en sentinelle d’actions de vie, c’est cela la participation, la fraternisation, l’amour. Je voudrais qu’au lieu d’une politique qui cherche à désinvestir l’homme de ses devoirs envers les plus faibles, on encourage la solidarité et le respect de l’autre quel qu’il soit. Il est urgent de rester vigilant. À chaque époque on a cherché à éliminer les plus faibles, ou tout simplement ceux qui ne rentraient pas dans le cadre, avec les sans-abris c’est tellement facile de faire peur et aucune chance qu’ils se défendent et envoient un communiqué de presse aux journaux... « Il faut se méfier du mal, celui-ci n’est jamais spectaculaire au début. Le mal commence gentiment, modestement, on pourrait dire humblement. Le mal s’insinue dans l’air du temps comme de l’eau sous une porte. D’abord presque rien. Un peu d’humidité. Quand l’inondation survient, il est trop tard. (…) »
Christian Bobin
Alors oui, il faut continuer à aider comme on peut, une pièce de temps en temps, un don aux associations lorsque c’est possible. Même si ce n’est pas facile d’aller à la rencontre des blessés de la vie, tellement malheureux. Si l’on veut les aider, il faut les approcher avec tact et humanité, leur rendre leur dignité auquel ils ont droit, avec courtoisie, civilité, bienveillance. Nous sommes tous des hommes, alors travaillons à notre humanité, seul rempart à la barbarie moderne qui nous tente à chaque instant.
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MERVEILLEUX Le merveilleux de nos vies Nous avons tant besoin de ce sens du merveilleux dans notre monde de matière et d’efficacité, d’un merveilleux poétique qui nous interroge et nous entraîne vers d’autres rivages. Faire pleuvoir sur les hommes de la poussière de fées. Au merveilleux s’ajoute le sacré et ses symboles, les chevaux de vent des prières bouddhistes, la lumière fraîche d’un lieu de recueillement… L’émerveillement est signe d’ouverture, il est au cœur de la vie. L’attention que l’homme porte au monde naturel augmente sa sensibilité. L’homme part à la recherche d’émotions plus vraies. « Le frère Soleil par qui tu nous donnes le jour et la lumière…., La sœur lune et les étoiles : dans le ciel tu les as formées, claires, précieuses et belles ; Le frère vent, et l’air et les nuages, l’azur calme et tous les temps : par eux tu donnes soutien à toute créature ; La sœur eau, qui est très utile et très humble, précieuse et chaste ; Le frère feu, par qui tu éclaires la nuit ; Et notre mère la terre qui nous porte et nous nourrit, qui produit la diversité des fruits, avec les fleurs diaprées et les herbes »
François d’Assise
MONDE Le bord étincelant d’un monde « Il n’y a que dans les livres que l’on peut changer de vie. Que l’on peut tout effacer d’un mot, faire disparaître le poids des choses. Gommer les vilenies, et au bout d’une phrase, se retrouver soudain au bout du Monde » Cette citation trouvée dans le dernier de Grégoire Delacourt, m’a interpellée parce qu’au bout du monde j’y suis, le bord étincelant d’un monde, un bout du monde qui nous fait la blague de s’enrouler un peu sur lui même, dessiné par les vents d’Atlantique, dunes solitaires, lumière poudreuse, unie et silencieuse qui remplit le ciel, prai-
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ries, marécages, landes, le soleil et la lune viennent toujours de la mer ici, la voûte céleste y est aussi grande que l’océan. Est-ce qu’on choisit un lieu ? Ou est-ce que c’est lui qui nous choisit ? Ne vous est-il pas arrivé de vous sentir particulièrement bien dans un endroit du monde, ou à contrario particulièrement mal. Je pense que certains lieux ont une mystique particulière, et ne se donnent à voir qu’aux personnes qui en ont besoin. On n’oublie rien de sa vie à Provincetown, mais on la considère différemment. On la remplit de paysages bleus, de couples amoureux, de musique et de houle. J’ai toujours trouvé inutile de regretter sa vie et primordial de la nourrir. Ici les gens s’aiment plus qu’ailleurs, peut être la liberté de pouvoir être soi même et d’afficher ses préférences. L’homosexualité reste tabou dans de nombreux endroits aux Etats Unis et dans le monde, mais ici il y a la liberté de vivre, aimes et fais ce qu’il te plait. Hier soir en rentrant chez moi au coeur de commercial street, j’ai croisé bon nombre de couples heureux, très heureux; au début en tant qu’hétéro, ces couples gay m’ont surpris et interrogé, car il demande de se remettre en question sur ce que l’on pense d’autres qui sont à la fois pareils et différents. Comme à chaque fois, on essaie de les rapprocher de notre propre modèle de couple homme / femme, toutefois il n’en n’est rien, si la qualité de l’amour, de l’attachement est bien le même lorsque l’on s’aime vraiment (j’entends), c’est bien quelque chose de différent, d’autres équilibres, d’autres définitions, c’est mystérieux, inconnu, mais n’est ce pas le lot de tout attachement? S’il y a un lieu habité où vous pouvez être vous même c’est ici, ici on vous laissera vivre vos envies autant que vos folies.
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MYTHE Un jour mon prince viendra… un mythe qui a la vie dure « Ce qui m’intéresse ce n’est pas le bonheur de tous les hommes, c’est le bonheur de chacun »
Boris Vian
Enfant, chacun a été bercé par des histoires de princes, le prince avait des épreuves, des dragons, des sortilèges, des laideurs parfois, mais avec le courage, la bravoure, la magie, le destin, la réussite et l’amour étaient toujours au rendez-vous. L’amour dans les contes était associé à la richesse, aux fastes, au pouvoir. De contes en contes, de génération en génération, Amour, Prince et Princesse, ont été associés, pour obtenir encore aujourd’hui un imaginaire foisonnant chez nos contemporains. Aujourd’hui, chacun cherche son rêve de prince ou de princesse charmante, devenu valeur marchande, il est présent sur notre petit écran, dans les magazines people, ou dans des biographies non autorisées. On veut du prince ou de la princesse mais pour de mauvaises raisons. Fast food dreams, voyeurisme sur une vie privée incertaine, tellement identique à celle de nos contemporains, alors finalement déception et jouissance malsaine de s’apercevoir que les grands sont pareils aux petits de ce monde : humains. On ne pourra jamais empêcher les hommes d’avoir faim des rêves de leurs enfances. Mais il est temps de les nourrir autrement. Et de reprendre l’armure, l’épée, le bouclier et le cheval blanc… Le temps est venu de retourner vers la symbolique des contes. En effet, Etre prince ne dépendait pas de son sang bleu, mais d’un état d’esprit, un état de cœur, un état d’âme, de la curiosité, de l’intelligence, du courage, de la force, de l’éthique. Les richesses n’avaient que peu d’importance, condition nécessaire mais pas suffisante pour obtenir le statut de prince héros car le prince avait valeur d’exemple au même titre que le chevalier pour nos yeux d’enfants. Aujourd’hui ces valeurs ont disparues, laissant la place à une image superficielle strass et paillettes extrêmement néfaste pour un Prince dont le statut est intimement lié à celui de chef d’Etat. Être un prince d’Etat, c’est être Homme d’Etat. L’armure, l’épée, le bouclier, le cheval blanc, ont disparus, mais les valeurs sont toujours là… A nous de les faire redécouvrir.
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NAUFRAGE Un naufrage ? « Le genre humain est semblable à une foule de voyageurs qui se trouvent dans un vaisseau; ceux-ci sont à la poupe, d’autres à la proue, plusieurs à fond de cale, et dans la sentine. Le vaisseau fait eau de tous côtés, l’orage est continuel: misérables passagers qui seront tous engloutis! Faut-il qu’au lieu de nous porter les uns aux autres les secours nécessaires qui adouciraient le passage, nous rendions notre navigation affreuse! Mais celui-ci est nestorien, cet autre est juif; en voilà un qui croit à un Picard, un autre est natif d’Islèbe; ici est une famille d’ignicoles, là sont des musulmans, à quatre pas voilà des anabaptistes. Hé! qu’importe leurs sectes? Il faut qu’ils travaillent à tous calfater le vaisseau, et que chacun, en assurant la vie de son voisin pour quelques moments, assure la sienne; mais ils se querellent, et ils périssent. » François Marie Arouet, dit Voltaire
NID Nid, l’instrument de tendresse Nid : abris que les oiseaux se construisent pour y pondre, couver leurs œufs et élever leurs petits ou abris que se construisent ou se ménagent certains animaux. Nid et tendresse ne font qu’un où ne devront ne faire qu’un sans équivoque. La tendresse est un de ces mots dont la soudaine irruption révèle une révolution souterraine. Ainsi le mot tendresse comme celui de nid prend place en des lieux où longtemps il aurait paru déplacé. Quoi de plus vital pourtant ? Sans tendresse, le petit humain ne peut s’édifier ; ni l’adolescent s’émanciper ; ni l’adulte former un couple ; ni le vieillard mûrir. Sans tendresse, les amants ne s’aiment pas vraiment et les mourants laissent derrière eux d’irrémédiables regrets. Sans tendresse, nous n’existerions pas.
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NORD Les lueurs tranquilles de la plage du Nord On peut parcourir le monde, en apprécier toutes les beautés, les bleus coraillés des mers, les verts exubérants des paradis du Sud et revenir quand même, toujours à l’intime de nos premières émotions. Est ce parce que les lumières du Nord rappellent nos paysages intérieurs? Est ce que ce royaume des demis teintes renvoie sur nos vies une douceur feutrée. Même par froid cinglant, l’horizon de la mer et du ciel du Nord toujours mélangés, nous enveloppe d’une confortable jouissance. L’absence y devient un pays où il fait bon se promener. Oui, je promène ma solitude éclairée sur la plage du Nord, généreuse de lacs, de coquillages, de miroirs azurés. Sur la plage du Nord, je fais l’expérience du silence, apprend le langage poétique de la lumière bleutée et laiteuse. Il y a des horizons aux beautés thérapeutiques. Romantiques, rêveurs, apaisants, modestes, les infinis de la plage du Nord nous ouvrent le coeur et l’emplit de cet espace qui nous fait tant défaut. Je nettoie mes plaies dans cette immensité de dunes blanches, vertes, dorées, cette immensité de mer grisée, cette immensité de ciel écumé. Tout à coup sur la plage du Nord, soluble en cet horizon, ma vie semble prendre la légèreté d’un grain de sable et emportée par l’enchantement de cette Côte à nulle autre pareille, je vois le monde et son paradis, je touche son infini et je ressens son éternité.
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OBJET La connaissance de soi, un nouvel objet de valorisation La responsabilité, la force, le courage, la volonté, reviennent au goût du jour, la vie active souvent superficielle ne répondant plus aux exigences d’humanité d’un nombre croissant d’individus. Mais malgré la motivation de chacun, le désir d’accomplissement personnel demeure un luxe particulièrement difficile à atteindre. Pour ceux qui, enfants, ont satisfait leurs besoins primaires d’amour, de respect et d’estime de soi, ces acquis qui prédisposent à l’épanouissement, le chemin est relativement facile à parcourir. Plus les individus sont équilibrés, plus ils sont prédisposés à comprendre la nature profonde des hommes et à s’ouvrir au monde. Pour les autres, en revanche, l’épanouissement personnel est beaucoup plus difficile, difficile le déploiement des qualités, des potentiels, des tendances créatrices. Se réaliser, c’est être en phase avec le monde, développer son identité, son autonomie, devenir moins égoïstes. De là vient la joie de vivre, la sérénité, l’aptitude à résoudre les difficultés, tout devient opportunité. Bien sûr, ce n’est pas facile, long chemin laborieux, ruptures, petite mort, lâchage de vieilles habitudes, peurs, autant de mots à transformer avant la renaissance. Mais quelle renaissance ! un bonheur en sobriété et une sérénité au quotidien, des comportements doux permettant de choisir à coup sûr le vrai au faux, le bien au mal, la joie à la tristesse, la santé à la maladie, la consommation à la surconsommation. Quel bonheur ! Alors faisons de la connaissance de soi un objet de première nécessité à l’équilibre des hommes.
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ORIENT Désir d’Orient Aujourd’hui nous sommes dans une époque de transition et de prise de conscience d’un manque. D’où un besoin d’Orient, qui vient du vide des vies d’Occident. Ce besoin est stimulé par la découverte par les occidentaux que l’individualisme est loin de leur apporter la paix intérieure. En effet l’individualisme possède une face illuminée et claire : ce sont les libertés, les autonomies, la responsabilité. Mais il possède une face sombre : l’atomisation, la solitude, l’angoisse. Conjointement, les occidentaux ont découvert que les relations entre les âmes, les esprits et les corps sont perturbées, d’où le recours à l’Orient. En parallèle on observe un développement des modes proprement occidentaux pour traiter la relation corps-âme-esprit, comme les psychothérapies, les psychanalyses. Dans le recours aux pratiques orientales, chacun finit par apprendre une certaine distanciation à l’égard de lui-même à travers le « lâcher prise », un effort pour se dés-agripper de ce que chacun veut tenir compulsivement dans les mains.
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P PROPAGANDE pouvoir
PERE-NOEL possible
POLITIQUE PARADIS
PEPE POINT PEUR PERIL
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PARADIS Le paradis d’en bas Voici le paradis d’en bas : un enchantement tout simple, l’idée d’un jardin né d’un songe. Partageant l’espérance de cette nature Eden avec mon Ami Jean Jacques formidable rêveur de jardins, nous nous sommes attachés à ce doux exercice. Qu’il faut le dire, nous a bien amusé ! Comment se construit un jardin potager ? d’abord avec des mots, des impressions, des souvenirs, des odeurs. Il a dit… jardin, cabane, fontaine, fruits en espalier, allées ordonnées. J’ai répondu… choux se gorgeant de soleil, éphémère mais si belle fleur de courgette, verger rouge de tentation, bourdonnement d’abeilles. Il a dit… murets de pierre, gestes ancestraux, cabanon et remise à outils à la manière d’une maison de pays, réservoir, irrigation, plates-bandes, courge trombolino, haricots coco Marie Louise, rires… J’ai répondu… ivresse de parfum dans l’air tiède, rayon de soleil, démariage de carottes, comportements instinctifs, touché de la terre, caresse d’ herbes folles, jet d’eau farceur, déambulation, salades trempées de rosée, petites coccinelles, rires… Enfin, nous étions d’accord ! et le songe se fit. Le jardin a ses Lumières, la nature recèle en elle tant de solutions à condition de savoir l’observer, l’écouter, la respecter. Voilà donc le paradis d’en bas, beaucoup de vert, et de bleu, d’enthousiasme, d’espérance, d’émerveillement … et de petites coccinelles.
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PÉPÉ Cher Pépé, Lettre de tes petits enfants et arrières petits enfants. Si nous ne pouvons pas résumer tes années de vie, nous qui t’avons connu grandpère, nous pouvons te dire ce que tu nous as appris et commencer cette lettre par merci. Merci d’être venu en France pour y construire un foyer et le préserver toute ta vie, merci d’avoir guidé ta famille sans faillir, avec force et courage, merci d’être toujours reparti au combat sans craindre ni la solitude, ni l’orage. Car sans toi, aucun de nous ne serez ici à vivre cette vie là ; Nous n’avons qu’une infime idée de tous les sacrifices qu’ont demandé cette vie meilleure mais saches que chacun de nous porte en soi ce courage que tu nous laisses. Nous t’avons vu perdre des parties car la vie n’a pas épargné notre famille, nous t’avons vu pleurer et conserver ton courage, montrer l’exemple pour nous donner encore l’espoir, et lire dans tes yeux encore l’existence du bonheur. Merci d’avoir été un grand-père si attentif, tu savais voir nos tristesses sous de sombres soupirs, Tu savais être pour nous fort et tendre pour lutter et défendre, tu savais nous redonner l’envie et surtout être là à chacun de nos faux pas sans nous juger trop durement. Nous avons beau chercher, aucun souvenir de punition de ta part, de coups, de mots durs, et pourtant les bêtises ont été nombreuses, mais toi pépé tu rîmes avec gentillesse. Merci de continuer à être là même si tu crois ne plus exister dans nos cœurs, trop occupés que nous sommes à vivre nos vies. Nous savons pouvoir trouver refuge dans la chaleur de ta maison, car tu restes dans nos cœurs le plus fort des sages. Merci de nous avoir donné tant de souvenirs d’enfances, qui viendront panser nos années de vieillesse, tes vacances pleine de liberté, des conduites à droite, à gauche, tes histoires racontées doucement sans nostalgie, le plaisir d’être ensemble autour d’un bon repas et surtout tes célèbres frites ! Nous nous souvenons de belles choses en pensant à toi. Et pardon, pardon de ne pas faire sonner ton téléphone souvent, toi qui continues à te faire du soucis pour chacun d’entre nous, et à être fiers de nous. N’oublies jamais que tu représentes une des plus belles tranches de nos enfances et adolescences, qu’il y a en chacun de nous une part de notre grand-père et ar-
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rière-grand-père, ton sang coule dans nos veines, le sang du courage et de la fierté, le sang de la patience et de l’amour de la vie, le sang de la générosité et de la clarté. Tu es un pépé super chouette et nous t’aimons tous très forts, gardes la foi en nous, car nous : les filles : Salomé, Anne Laure, Hélène, Laurence et les garçons : Noé, Antoine , Philippe, Manu te seront pour toujours fidèles. Et pour ton anniversaire, nous te souhaitons la sagesse et la sérénité, car vieillir est un acte courageux, mais nous le savons de cela tu n’en manques pas.
PÈRE-NOËL Le problème du Père-Noël Ma fille de 12 ans m’a reproché de lui avoir menti sur le père Noël. Elle avait deviné la disparition de celui-ci et nous en subissions les funestes conséquences... Alors il a bien fallu répondre. Raconter que ce qui est décevant, ce n’est pas tant que le père Noël, le gros Monsieur en rouge ne descende pas par la cheminée, et ne vole pas à la vitesse de la lumière durant la nuit de Noël. Ce qui est triste, c’est de se rendre compte que la magie n’existe pas, qu’elle n’est pas vérifiable, que le père Noël ne pourra jamais apporter la ferrari rêvée en modèle grandeur nature, que les lutins ne réalisent pas les voeux. Que l’enfance s’en va, qu’il faudra faire avec le réel et négocier le possible. Mais c’est aussi un moment crucial, car si dans l’enfance on ne croit pas, tout simplement parce qu’on est sûr, on est sûr des monstres et des fées, on est certain du père Noël et des rennes volants. L’âge adulte nous demande de faire des choix, de «croire», de croire à la poésie, au monde de la transparence, de croire à la générosité, à l’amour, à l’espoir que symbolise si bien la fête de Noël. C’est à ce moment là qu’on choisit d’encourager ou pas le mythe du Père-Noël. Comme notre bonne Poste, qui envoie un courrier du Père-Noël à chaque liste reçue; Quel plaisir de mettre une adresse aussi exquise que «Monsieur le Père Noël, allées des Lutins Joyeux, Pôle Nord» et de voir un enfant heureux ouvrir SA lettre du père-Noël. Parce que si le père-Noël n’existe pas en tant que tel, son essence est bien là, elle nous parle de Noël, d’un sapin scintillant, d’une fête à venir, d’un partage de sourires, de bonté, de générosité, de paix. Lorsque le père Noël disparait, nous choisissons ou pas de le faire vivre et de lui
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donner notre propre vérité. Finalement croire au père-Noël, ce n’est pas déraisonner mais apprendre à cultiver sa raison tout en étant attentif et actif aux trésors cachés de Noël, dans sa dimension belle et mystérieuse. Joyeux Noël !
PÉRIL Le péril ouvert de notre temps ou la compensation des peurs Voilà c’est la rentrée, la routine des jours fatigués où nous sommes empêchés de vivre. Le taux de suicide devient dans nos pays modernes, une des premières causes de mortalité chez les moins de 40 ans, les consommations d’anti-dépresseurs et autres anxiolytiques n’ont jamais été aussi fortes. Pourquoi cela ? Est ce pour cause de problèmes psychologiques ou parce que nous assistons en spectateurs impuissants à la transformation de la société des hommes en quelque chose d’absurde, qui ne tourne plus rond. Devant ce monde-là, nous faisons l’autruche, nous nous arrêtons de respirer, nous restons cachés, c’est un « non de fuite » que nous offre la société de consommation et son prozac. Nous ne voulons plus voir, plus savoir, notre sphère familiale devient notre dernier refuge, égoïstement, nous cherchons à tout sécuriser, à vivre dans un cocon loin des autres. C’est protecteur un cocon, mais c’est sans espace et sans souffle. Le connu finit par devenir terne et plat. Qu’apportent nos attitudes de zapping ? de superficialités ? de narcissisme aveuglé ? D’indifférenciation ? Tous ces comportements qui nous conduisent à s’identifier à des schémas simplifiés, dictés par les industries du divertissement et de la publicité. Nous vivons abîmés. Ce n’est pas par là que la vie s’ouvre. Nos traditions se sont effritées, véritables branches mortes, elles ne nous guident plus. Dans ce monde où aucune religion ne s’impose plus ; la religion aussi a perdu son guide de sens.
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Aujourd’hui tous nos repères stables disparaissent, il n’y a plus de norme, chaque point où nous sommes peut devenir un centre possible. D’un sol solide où nos ancêtres avaient l’habitude de vivre, nous sommes passés à un sol mouvant tel un fleuve, où tout est à « réinventer », à retrouver. C’est à la fois terrible d’inconnu et formidablement porteur de liberté pour nos vies. Cela passe par l’acceptation, accepter qu’il n’y a plus de réponse toute faîte, et que si le chemin existe unique pour chacun de nous, c’est un fleuve fluctuant et changeant, où il nous faut flotter et fluctuer avec lui. C’est cela la liberté, c’est cela habiter sa vie, loin des schémas préétablis, loin des restrictions de nos vies. C’est par là, que la vie s’ouvre.
PEUR Dis moi de qui tu as peur, que je te sécurise. « Je remontais dans ma mémoire jusqu’à l’enfance, pour retrouver le sentiment d’une protection souveraine. Il n’est point de protection pour les hommes. Une fois homme on vous laisse aller »
Antoine de Saint Exupéry
Toutefois le besoin de sécurité est existant pour chaque homme comme l’a démontré Maslow dans sa pyramide des besoins. Quelque soit son âge, son sexe, son niveau social ou son appartenance à un pays plus ou moins industrialisé , le besoin de sécurité vient juste après les besoins physiologiques (nécessaire à la survie de la personne). La sécurité est donc naturellement inscrite au même titre que les besoins physiologiques dans les droits fondamentaux de l’homme. Aujourd’hui l’ère de la terreur a commencé, nos sociétés doivent faire face à toutes sortes de criminalités y compris le terrorisme. Les attentats de New York, Londres, Madrid ont eu un rôle déterminant dans la mesure où la panique de ces attaques, entraînent chez nos contemporains et décideurs une peur latente constante appelée dans ses moments paroxystiques : terreur. En effet, ces attentats ont mis en lumière la capacité d’action et de destruction des réseaux terroristes et l’impuis-
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sance des institutions gouvernantes à faire face à cette nouvelle forme de menace Dépassés, les états ont dû inventer de nouveaux outils et comportements pour protéger. Voici donc l’avènement de la société de surveillance, avec son corollaire d’érosion des libertés individuelles. La surveillance définie comme « toute attention systématique portée à la vie d’une personne dans le but d’en influencer le cours » agit à plein sur les habitants de nos sociétés occidentales. L’ère du Big Brother est révolue, laissant la place à une armée de Little Brothers, une multitude de citoyens qui se surveillent les uns les autres. L’engouement pour la surveillance indique une crise de confiance, nous rentrons dans une société où la confiance qu’on va accorder aux gens sera compensée par une surveillance. Dans ce contexte, il est urgent de se prémunir des dangers de la société de surveillance et de la nécessaire protection des données personnelles. Néanmoins, si l’on prend l’exemple de la sécurisation de l’identité, celle-ci n’est pas antinomique de la sauvegarde des libertés. Protéger l’identité d’un individu, c’est protéger les droits attachés à sa personne, que ce soit le droit de propriété ou le droit d’aller et venir. Protéger l’identité, c’est aussi sécuriser les relations contractuelles. C’est dans cet état d’esprit que les progrès technologiques ne doivent pas être redoutés mais utilisés afin que le renforcement de la sécurité et la protection des libertés se soutiennent mutuellement. Le désir de sécurité est aujourd’hui puissant, se sentir en sécurité de nos jours c’est se protéger d’un extérieur dont on se méfie de plus en plus. Mais l’extérieur c’est l’autre, les autres humains. Et c’est de cela qu’il convient de deviner le danger potentiel, multiplier sécurité et surveillance, c’est freiner la rencontre vers l’autre. C’est imaginer dans l’autre le danger, plutôt que le bénéfice. Et par delà les discussions éthiques sur la protection des libertés bien évidemment nécessaires, il est urgent de s’interroger sur la disparition de la cohésion sociale et de l’envie d’aller à la rencontre de l’autre sans préjugé, sans étiquetage, sans norme.
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POINT « J’aimerai que ma maison Au lieu d’être un point noir, Soit un grand point lumineux Où tout le monde aime Se rencontrer gaiement. J’aimerais que l’on ne se perde pas, comme dans un labyrinthe, en suivant la route qui mène à ma maison… »
René Singer
POLITIQUE Vive la politique naturophile ! Aujourd’hui les villes sont malades de leur ville : débordements techniques, productivisme, urbanisation à outrance mettent en danger de manière irrémédiable l’environnement, et finalement la ville à moyen et long terme. Assaillies par les zones d’activités (artisanales, industrielles, commerciales), les parkings, l’affichage publicitaire, les grands ensembles de logements, les aménagements routiers (glissières de sécurité, carrefours giratoires…), Les villes et particulièrement en France contiennent un grand nombre d’espaces où dominent la laideur, le kitch et le mauvais goût. Il faut prendre à bras le corps ce problème crucial, dont la résolution devient de plus en plus urgente. Si la beauté nous signe et nous fait du bien, son contraire est aussi vrai. La laideur étouffe, « médiocratise », affaisse l’homme. Il est des villes de Côte d’Azur, où la beauté de la mer n’est plus qu’un point anecdotique, remplacée par son rendement économique. Plages privées par ici, plages bétonnées par là, le bord de mer ne se réduit plus qu’à une succession de béton, de peu sable et d’absence de nature. L’âme des villes a pris la dangereuse teinte du gris, il est pourtant urgent de repenser la ville en terme de cité, cité bienveillante ou l’on vit, réfléchit et aime.
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Il ne s’agit donc pas de rafistolage à coup de jardins publics ou d’espaces verts, mais d’incorporer pour les habitants de nouveaux paysages, des horizons de la belle couleur Nature correspondant à la demande sociale de cadre de vie, de loisirs, de chlorophylle.
Terre Mère « Ce n’est
pas seulement aux oiseaux que je m’adresse comme à des frères ; le soleil, la lune, le vent, tous sont des frères et des sœurs » Saint François d’Assise
Avoir enfin une politique naturophile pour définir sa manière d’être au monde, pour une Terre plus habitable, protégée par et pour l’humanité. On est encore loin hélas de la civilisation jardin. Pourtant que faire face aux déplaisirs que constituent les odeurs de la pollution, les bruits du trafic, les visions de déchets? A part opposer le plaisir sensible des espaces publics
où la nature occupe une place centrale. Aujourd’hui seule la nature constitue une sorte d’anticorps à la ville, et cela en de multiples points et écritures : parcs, cours, rues mais aussi devant des immeubles, au travers de résidences, et de manière plus intime dans les bacs de fleurs, et les jardiners intérieurs. Protéger ce qui doit l’être, réparer et replanter, car la nature n’est pas ingrate, elle sait renaître. Avoir une politique naturophile, c’est forcément aimer la Vie de toute chose et donner une vie plus belle aux habitants des villes.
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POSSIBLE Le champ des possibles L’horizon me fait toujours penser aux champs des possibles. Poser le regard au loin, là ou rien ne vient l’altérer, c’est tout à coup prendre de la hauteur, élargir son champ de vision. On ne tente plus de ramener tout à soi, de réduire à ce que l’on peut manipuler. Le «je sais» s’efface au profit de «j’ai tout à apprendre». Regarder le ciel qui fonce pour devenir bleu marine comme un regard sombre et beau, et voir s’allumer les étoiles doucement. Dans cette respiration nouvelle où l’immensité se joue de l’infini on prend conscience que la vie est belle, riche, étonnante, angoissante parfois. On sent qu’il y a quelque chose à trouver, ce quelque chose qui nous donne une raison d’être. C’est alors que le champ des possibles délivre son message, la vie doit être tentée, essayée, vécue. C’est ainsi que se construit le passage vers notre humanité.
POUVOIR Le pouvoir, la dernière des faiblesses ou la première des forces? Les fous nous entourent donc... Le pouvoir qu’il soit hérité, acheté ou fruit d’un long sans travail est il mérité aux hommes qui le détiennent? rend » Le pouvoir ne devrait il pas, ne servir qu’à ouvrir le champ des possibles. Qu’au fil des actes posés, on Alain puisse lire la naissance d’un nouveau projet, une perspective belle et ambitieuse dans laquelle s’inscrit de façon satisfaisante, l’envie de construire un nouveau monde. Le pouvoir ne devrait il pas aider les hommes, à relever les défis de notre temps. Le pouvoir uniquement à ceux qui ont un sens accru de leur responsabilité universelle ? « Tout
pouvoir contrôle fou
On a dit souvent que le pouvoir ne sert que la Grande Entreprise aux profits colossaux. Pourtant ça coince.
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Aujourd’hui avoir le pouvoir, c’est avoir le devoir de reliance contre tout ce qui joue en faveur de la séparation, encourager l’enjeu premier : relier les hommes entre eux ; Relier parce qu’il y a une absolue nécessité d’une société plus fraternelle. Le pouvoir est nécessaire s’il fait naître l’action du bon autant que du beau, le retour des visages frais, de la chaleur, de l’esprit gourmand, de l’humour. Le pouvoir ne devrait être accompagné que par l’auto-éthique. Parce que pratiquer l’auto-éthique ne veut pas dire devenir raisonnable, mais bien de recommencer à Imaginer. C’est se battre avec force et légèreté pour protéger, partager, aider, nourrir, instruire, aimer… A vous autres, hommes de pouvoir, n’oubliez pas la chance et le devoir d’amour qu’engendre celui-ci, respect pour toute Vie, amour pour toute Vie.
PROPAGANDE « La
propagande est à la démocratie
ce que la est à un
violence
Etat totalitaire » Noam Chomsky
« La manipulation consciente, intelligente, des opinions et des habitudes organisées des masses joue un rôle important dans une société démocratique. Nous sommes pour une large part gouvernés par des hommes qui modèlent nos esprits, forgent nos goûts, nous soufflent nos idées. »
Edward Bernays.
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Q QUANTITE
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QUANTITÉ « On mesure
l’intelligence d’un individu à la quantité d’incertitudes qu’il est capable de supporter. » Emmanuel Kant
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R RESOLUTION RAPA NUI
résilience ROSEAU REGARD RIDICULE
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RAPA NUI C’est un ilot noire avec ses volcans éteints, ses hautes falaises , sa végétation de prairies , presque noyé dans le bleu de l’océan Pacifique, petite pierre perdue à plus de 3500 kilomètres de toute terre habitée. L’arrivée sur l’île de Pâques (Rapa Nui pour les habitants) est une expérience unique, ici pas de chaleur moite et odorante des îles de Polynésie, ce que je découvre c’est un paysage de landes, battu par les vents, où vivent des hommes fiers aux tatouages compliqués et guerriers, qui honorent toujours des géants de pierre. Pour aller à la rencontre, de ses mystérieuses statues, je grimpe les pentes nues du volcan Rano Raraku , le vent souffle dans mes oreilles , en marchant je découvre un paysage de volcan , de mer et de chevaux sauvages. On raconte qu‘ici les chevaux sauvages sont plus nombreux que les habitants. Au sommet une passe mène au cratère, ses eaux sont vertes fluorescentes, bordées de roseaux. Les Moaïs sont posés là, immenses blocs de pierre de lave grise (certains pouvant atteindre 20 mètres), avec leur long nez , leurs oreilles plates, leur moue de la bouche, tatoués pour la plupart, les bras le long du corps , les mains sur les hanches, on dirait qu’ils surveillent , les yeux fixés sur le ciel. Lieu de leur fabrication, il y en a des centaines, plus ou moins achevés, telle une population pétrifiée, abandonnée pour toujours. Ils étaient sculptés à même les flancs du volcan, puis mis debout à l’aide de cordage, et transportés grâce à des rondins de bois, on avait l’impression qu’ils dansaient jusqu’au lieu de leur installation. Là perchés sur leur terrasse sacrée (ahu) le sculpteur appliquait la touche finale en créant leurs yeux à l’aide de corail , de pierre et de vertèbres de requins lumineux, ainsi les Moaïs se retrouvaient habités par l’âme des ancêtres qu’ils représentaient, fin prêt à protéger le clan des dangers extérieurs. Tito , mon guide Rapa Nui m’emmène maintenant visiter une grotte, son entrée est un trou à lapin parmi les blocs de lave noire. Nous rampons avec précaution le long d’un tunnel humide dans l’obscurité, soudain la grotte s’élargit, une tâche de lumière enfle, la mer est là qui gronde, trente mètres plus bas. Puis il me montre le nombril du monde ( Te Pito O Te Henua) , il s’agit d’une pierre qui ressemble à un gros œuf parfaitement lisse, lorsqu’on la touche elle est chaude. J’approche ma boussole qui s’affole, je lui parle de magnétisme, il me parle de Mana, la force spirituelle et surnaturelle des Rapa Nui. Avant mon retour, il me faut aller voir l’autre grand volcan de Rapa Nui le Rano Kau , nous marchons le long de la falaise sous le vacarme des vagues et nous découvrons enfin un immense cratère vert vif à la régularité parfaite, de 300 mètres de profondeur, véritable réserve d’eau de pluie pour les habitants de l’île, ses flans
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abritent de nombreux arbres fruitiers. J’y découvre les vestiges du village d’Orango, sur de grands rochers, sont dessinés des hommes oiseaux, corps d’hommes, visages d’oiseaux avec de longs becs, ils représentent les souvenirs d’une compétition passée où les meilleurs hommes de chaque clan s’affrontaient pour aller chercher l’œuf d’un oiseau de mer : la frégate, pondu sur un ilot au large , en partant du sommet du volcan. Mais voilà il fallait repartir, et c’est sous les constellations de l’hémisphère Sud que j’ai dit Au revoir avec cet île solitaire, mystérieuse, belle. On dit que la nuit les Moaïs marchent et visitent les rêves des humains et c’est vrai. Souvent la nuit je sens le vent frais sur mon visage, j’entends le hennissement des chevaux sauvages, je vois s’avancer vers moi ses colosses de pierre qui dansent sous les étoiles.
REGARD Là où le regard ne porte pas. Dans une ère planétaire, dans une époque brouillard et nuit, dans un aujourd’hui en quête de sens, il est urgent de remettre le Sens au cœur de toute action et de nourrir les gens, nous et les « autres ». Aller chercher là où le regard ne porte pas. Il est temps d’arrêter de réduire l’autre et soi même à des schémas, l’être humain est si dense. Il est temps d’arracher notre horizon de désespérance pour laisser éclater l’immensité bleue de nos rêves. Pas nos rêves d’être riche et célèbre (ça viendra après) mais plutôt restaurer le goût des belles pensées, du bonheur d’être, pour soi et pour les autres. Comment faire ? Parler de désir avec des paroles neuves, des visages frais, de la chaleur, un esprit gourmand, de l’humour, un zeste d’admirablement fou. Parce que pratiquer l’auto-éthique ne veut pas dire devenir raisonnable, mais bien de recommencer à imaginer. C’est se battre avec une douce force pour protéger, partager, aider, nourrir, instruire, aimer… C’est se mettre au diapason du futur qui se met en place. Le regard que l’on porte sur le monde, n’est il pas presque plus important que le monde ? un monde de toutes les couleurs qui aime la vie.
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« We can’t get away, un jour nous serons des humains éveillés » N’est il pas temps d’adhérer à la vie telle qu’elle se présente à nous. Ne pas essayer de tout contrôler, réapprendre la vie en acceptant son ascèse et rester vivant. En vie, on hésite, on réfléchit, on accepte, on rêve, on désire, on agit, on veut, on rencontre, on apprend, on comprend, on change, on aime, on dit oui , toujours oui à la vie. Regardez, tout est à faire et à aimer, dans la connaissance et l’amour de la vérité. Dans mon métier, les mots, il faut les remplir, c’est pareil pour la vie... Il est temps de donner de la valeur à notre vie et vivre mille vies en une, par sa qualité de remplissage en émotions, en rires, en larmes, en amour, en souvenirs, le maximum de bonheur dans le maximum de lucidité. N’est ce pas là notre première vocation que de vivre ?
REGARD Regard porté Parfois quelque chose se passe au détour d’un chemin, quelque chose de mystérieux. La Nature embellit le geste de l’homme. On ne se souvient plus de ceux qui ont construit, seul l’Arbre se rappelle et couvre de ses branches l’imaginaire du regard porté.
RÉSILIENCE Résilience, es-tu là? Bien secoué, bien shaké, voilà ce qui pourrait résumer le monde actuel, où le mot crise est employé 1 million de fois chaque seconde. Le discours ambiant, les images qui nous entourent voudraient nous faire croire que le pire est devant nous. La crise, pire que la guerre ? Oui, en quelque sorte, parce qu’elle nous précipite vers les incertitudes, elle
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nous décentre, nous donne le mal de mer, trop de mouvements, trop de dangers. La tempête nous rappelle la sentence de Paul Valéry : « Le temps du monde fini commence ». Mais, je ne sais pas vivre dans ce monde là, pas tracé, pas calme, peu éclairé. Les églises sont vides depuis longtemps ; Les psys débordés, et les apôtres de la pensée positive déroutés. Les Indiens ont leur karma, mais nous ? Que faire si l’on nous prive de l’extase de la consommation, la jouissance de la consommation. De notre doux leitmotiv protecteur : je consomme, donc je suis. La panique nous guette ou elle nous guide déjà. Mauvaise conseillère, déliant puissant, elle annihile toute sensibilité et plus que jamais nous devenons indifférents aux violences, « Le aux souffrances, aux humiliations d’autrui. du monde Personne n’apprend plus à être un humain, commence » car cela ne va pas de soi, mammifère d’abord, humain peut-être ? Pourtant, nous devons apprendre aujourd’hui à Paul Valéry affronter les incertitudes et pas seulement celles de toute une vie personnelle, mais aussi la vie de notre pays, de l’Europe, et du Monde. Il faut donc apprendre à vivre et aider les autres à vivre, affronter les problèmes de sa vie le mieux possible, le plus humainement possible.
temps fini
Alors on aime quand ? Car il s’agit bien de cela, une faculté d’aimer, de ne pas se laisser écraser par nos peurs, et nos angoisses. Nos peurs, salvatrices à petite dose, nous enterrent vivants en ce moment. En 2014, il est certain qu’il faudra encore d’avantage s’accrocher à l’existence. Il faudra savoir éviter ou modérer sa dose de chagrin, de culpabilisation, de désespoir. Sans rage, ni haine, ce n’est pas en voulant casser la figure à l’autre qu’on y arrive car telle une drogue, la haine détruit autant son prescripteur que son destinataire. Je ne dis pas qu’il faut laisser dire, laisser faire, non bien sûr que non ; toutefois je pense qu’il faut savoir réagir avec lucidité. Aimer encore plus sa vie au quotidien, et avec l’autre, voilà ou est la résilience. L’idéal est effectivement une société ou la solidarité primerait, on ne peut éliminer tous les conflits, ni toutes les incompréhensions. Le meilleur des mondes est impossible, mais un monde meilleur est possible, il dépend de nous, de chacun d’entre nous.
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RÉSOLUTION Les bonnes résolutions A chaque début d’année correspond les bonnes résolutions que l’on s’ordonne, pression douce ou beaucoup plus coupable de nouvelles nécessités que nous voulons infliger le plus souvent à notre corps, à nos désirs, à notre entourage. A fausse bonne résolution, les derniers frimas de février feront la peau. Que faire alors? Dans notre société aux libertés standardisées, il est difficile de tenir les désirs d’amélioration de Soi. Si c’est le fait de grandir qui fait de nous des êtres vivants, on confond souvent prendre de l’âge, et devenir sage. Aux exigences de performances physiques, sociales, financières, doivent succéder des exigences d’humanité, de compréhension, de sagesse. Exiger le meilleur de soi même, c’est prendre le risque de vivre sa singularité au plus près de l’autre. C’est être son propre changement au jour le jour, l’ancrer dans son quotidien modestement mais longuement. Comme le dit Alexandre Jollien « accepter la vie telle qu’elle se propose en nourrissant des outils: cet acte de forger des outils plutôt que des armes provoque, engendre une joie ». «
accepter
la vie
telle qu’elle se propose en
NOURRISSANT des outils: cet acte de forger des OUTILS plutôt que des ARMES provoque,
engendre
une joie »
Alexandre Jollien Combattre, affronter la vie est une vision profondément occidentale et néfaste pour notre nature d’être humain; car elle nous éloigne de nous même et des autres. Il y a à apprendre de chaque minute de vie, à comprendre, à se laisser porter au lieu d’aller contre. Cela ne veut pas dire laisser faire l’inacceptable, l’injustifiable, non bien sûr.
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Mais c’est aller vers la compréhension, vers la connaissance, vers la recherche de solutions d’englobement, plutôt que de destruction. Le non soi, n’est que du soi qui s’ignore. Au lieu de bonnes résolutions, je propose une ascèse douce au quotidien, tranquillement pour soi et vers les autres. Poser chaque jour un regard bon sur le monde même si celui-ci nous paraît avoir perdu la tête, le monde c’est nous, chacun d’entre nous.
RIDICULE « On ne peut pas tellement juger le ridicule des autres : vous observez un quidam, la tentation de le juger vos traverse, mais voilà qu’il se déplace de quelques degrés, de quelques centimètres, et la vitrine d’un magasin renvoie votre image ! Aussitôt, vous vous repentez de votre intension »
Sempé
ROSEAU « L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature, mais c’est un roseau pensant. Il ne faut pas que l’univers s’arme pour l’écraser; une vapeur, une goutte d’eau suffit pour le tuer. Mais quand l’univers l’écraserait, l’homme serait encore plus noble que celui qui le tue, puisqu’il sait qu’il meurt et l’avantage que l’univers a sur lui, l’univers n’en sait rien. Toute notre dignité consiste donc en la pensée. C’est de là qu’il nous faut relever et non de l’espace et de la durée que nous ne saurions remplir. Travaillons donc à bien penser: voilà le principe de la morale »
Pascal
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S SENS INTERDIT
sauvage
SAGE SCULPTEUR SINCERITE SCEPTIQUE
SERENDIPITY
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SAGE Et si on essayait de devenir sage? Regardant la nature Thomas Hobbes constatait que l’homme y est un loup pour l’homme. Regardant la sagesse, Baruch Spinoza constatait qu’elle donne à l’homme d’être un dieu pour l’homme. Lorsque j’étais enfant ma grand-mère m’avait gratifié d’un « cettte enfant est sage comme une image ». Enfant en mal de compliment, j’avais voulu me conformer à l’image de cette sagesse là, immobile et bien posée... Toute en modération. C’est en ces derniers termes, tempérance ou modération, que l’on peut rapprocher cette sagesse enfantine à la recherche de la sagesse des grandes personnes. Aujourd’hui bien plus tard, la sagesse a changé d’image. Elle se tient à l’écart des extrêmes, c’est à dire chercher à connaître objectivement la réalité, succomber aux élans de la passion, se laisser aller aux idées toutes faîtes. La sagesse c’est se questionner sans cesse, à l’inverse de la science dont la finalité est Diderot de fournir des explications, la sagesse fournit quantité de cheminements sur les raisons d’être. La sagesse, c’est notre pensée critique à l’égard du désir que nous avons de contrôler le réel. La sagesse ne sied guère aux hommes impétueux et impatients. Tel l’arcane de l’ermite, elle demande une nécessaire et souvent difficile élévation de l’esprit. Rechercher la sagesse, implique une attitude prudente et avisée qui consiste à s’exprimer en toute connaissance de cause, après mûre réflexion. Plus question de parler à tort et à travers, de juger sans avoir compris.
exiger cherche la vérité, mais non que je la trouve »
« On doit de moi que je
Il s’agit là de poser des actes en toute connaissance de cause, c’est à dire en s’informant, en réfléchissant.
vivre sans philosopher mais l’on vit moins bien » « On peut
Jankélévitch
La sagesse c’est une belle proposition de vie nous gardant de l’insignifiance de son sort de simple mortel et de l’autre à la tentation du monde des apparences. C’est nous permettre de nous rapprocher de nous même en nous offrant de cultiver les ressources spirituelles de la vie.
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« Je suis le taon qui, de tout le jour, ne cesse jamais de vous réveiller, de vous conseiller, de morigéner chacun de vous... Peut être juges, impatientés, comme des gens assoupis que l’on réveille, me donnerez-vous une tape, et... me tuerez vous sans plus de réflexion; après quoi vous pourrez passer le reste de votre vie à dormir»
Platon
SAUVAGE Moi, homme sauvage ? Dans ce monde incertain, on se sent perdu. Après la génération du tout politique des années 60, après la génération du tout moral ou du tout humanitaire, nous sommes entrés dans la génération du sens. En effet, les nouvelles générations d’occidentaux ont désormais à cœur de mettre en adéquation concrètement ce qu’ils pensent avec ce qu’ils vivent. En parallèle, l’argent s’est latéralisé, c’est-à-dire qu’il n’est plus vu comme une fin en soi mais un moyen. On a beaucoup parlé de l’égo sphère pour décrire le consommateur d’aujourd’hui, à cette notion doit être ajoutée l’individuation à ne pas confondre avec l’individualisation. L’individuation, ce n’est pas l’égoïsme, c’est mettre l’individu au centre, c’est-àdire : je suis attentif à la façon dont on se comporte à mon égard, mais je suis aussi attentif à la façon dont on se comporte à votre égard. Les individus d’aujourd’hui se concentrent plus que jamais sur le savoir être. L’homme moderne vit certes, à une époque bien plus libre qu’auparavant, mais devenu son principal centre d’intérêt, il perd parfois les repères de ce que qui fait son humanité. L’égo-sphère a entrainé une raréfaction des solidarités, et les progrès des nouvelles technologies celle d’une virtualisation des rapports. L’image plus importante que la réalité devient sa «mauvaise» raison d’être. Derrière les multiples progrès faits à l’homme, derrière l’amélioration de sa qualité de vie, se cache un ensauvagement moderne. C’est un mal-être diffus, un spleen
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du XXIIème siècle, une solitude plus présente. Après tant d’années à nier l’autre, à l’exploiter, à le classer, à le mépriser, à l’ignorer, on voudrait maintenant le retrouver et pourquoi pas l’aimer. Nous subissons aujourd’hui tous les méfaits de l’ensauvagement moderne que nous avons créé depuis trente ans, et ce sera dans notre capacité à REcréer des liens, à se RElier avec sincérité, et compassion aux autres, que nous pourrons aborder avec sérénité la vie qui s’offre à nous.
SCEPTIQUE Bienvenue aux sceptiques Le doute peut il nous aider à mieux réfléchir ? Le scepticisme a ses vertus pour séparer la vérité de l’illusion. Et depuis Montaigne, cela va bien à l’occident. André Comte-Sponville nous le confirme, sagesse et désillusion vont de pair car il n’est pas sage d’attendre de la vie ce qu’elle ne saurait donner. N’attendez rien et vous serez heureux ? oui car c’est un bonheur qui délivre des fausses attentes. Soyez comme le sceptique libre et heureux, car pour lui tous les chemins sont bons.
SCULPTEUR « Fais comme le sculpteur: il enlève, il gratte, il polit, il nettoie jusqu’à ce qu’il fasse apparaître un beau visage dans la statue. Toi aussi, enlève tout ce qui est superflu et ne cesse de sculpter ta propre statue »
Plotin
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SENS INTERDIT « Plus une société obtient un haut niveau d’organisation, plus les individus se désolidarisent » c’est sur cette constatation de N.Sartorius que l’on doit s’interroger. La société actuelle nous montre que plus les conditions de vie s’améliorent, moins chaque homme a besoin des autres; Au contraire, il trouve cela gênant dans son amélioration de soi de devoir s’occuper des autres. Mais de quelle amélioration de soi parle t’on? de moi, moi, moi. Ce moi qui fait la loi, être le plus, ou la plus... Dans ce monde ou la compétition est reine, ou être le plus fort, le plus riche, le plus puissant reste la panacée, il faut que le bonheur se voit sur soi. Tout va bien tant que l’on est dans la course, mais au moindre pépin de travail, de santé, ect, sans affect et sans sens, la vie devient affreusement insupportable et les déchirures traumatiques difficiles à recoudre. Dans ces moments là il nous faudrait une autre société non à l’image de soi, mais à l’image des autres qui s’occupent des autres: une société compassionnelle. C’est une société de rencontres des autres nous-même qu’il faut construire, une société qui comprend et soutient et non une société qui juge et qui exclut. Le monde qui vient ne sera supportable qu’à condition d’être métamorphosé. « Il n’est pas fou de vivre et d’entendre au fond du gouffre un léger souffle qui murmure... que le bonheur nous attend comme un soleil impensable »
Boris Cyrulnik
SERENDIPITY Serendipity, restons ouvert La plupart du temps, nous nous enfermons dans notre vie, nous nous protégeons dans nos habitudes. Vivre dans une société qui étiquette, trie, classe, nous aliène ; A chaque minute, il nous faut savoir ce que nous voulons, savoir ce que nous cherchons, ne pas perdre de temps, vite, vite. Performance, optimisation du temps, vite, vite.
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Nous avons fait de notre vie une autoroute où il est quasi impossible de prendre les chemins de traverse, les hors-pistes ; Vie - geôle où s’échapper n’existe pas, tant notre esprit n’arrive plus à prendre son envol, alourdit de trop de certitudes, obèse de pensée unique, castratrice de tout désir d’horizon. Un oeil sur la liste des choses à faire, l’autre sur la montre, optimisons, optimisons… C’est comme si tout à coup, l’infini faisait peur, se perdre devenait danger mortel ; ne pas savoir rendrait-il fou ? N’est-il pas temps de lâcher les cordes de notre esprit pour le laisser s’étendre dans des vides salvateurs, d’où sortent rêves éveillés et pensés nouvelles. Laisser une partie de nous libre de tout, vierge de tout, afin de laisser le nouveau, le différent, les divines surprises s’y poser. Trouver, ce que l’on ne cherchait pas. C’est aller toucher la densité de la diversité de la Vie. C’est devenir éponge d’un monde multidimensionnel, se laissait nourrir par lui en symbiose magnifique. Laisser la surprise, le questionnement, l’inconnu rentrer en soi , devenir récepteur afin de trouver ce qu’on ne cherchait pas, mais qui éveille à une autre vision, une autre approche.
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SINCÉRITÉ La sincérité en voie de disparition De notre époque moderne, de notre société de consommation, naissent parfois de curieux phénomènes dans le comportement des gens. «Se la raconter», «se prendre pour quelqu’un d’autre», «essayer d’être quelqu’un d’autre» sont devenus d’usage fréquent. Les petits arrangements avec la vérité sont pléthores dans les vies d’aujourd’hui. On dit ce que l’on a et l’on invente ce que l’on est. Les apparences sont plus importantes que la réalité. Tout le monde veut être quelqu’un d’autre, mais qui sont nos modèles ? des idéologues ? des philosophes ? des sages ? non, des modèles de la publicité, des modèles de la société du spectacle, des modèles sans valeur à la moralité bancale. A force de vouloir ressembler à ce que l’on n’est pas, l’être humain se perd, s’y perd. On pourrait parler de folie moderne, tant il y a folie à mentir toujours sur ce que ce l’on est vraiment, il y a folie à préférer les apparences à la vérité de soi. Peut être est il bon de rappeler ce qu’est la sincérité. La sincérité est étymologiquement, pureté, absence de mélange. La pureté de la sincérité c’est une absence de duplicité. La sincérité, c’est l’accord de la conduite et des paroles avec nos sentiments profonds, c’est dit La Rochefoucauld, «une répugnance à se déguiser», une ouverture de coeur qui nous montre tels que nous sommes». Il y a dans la sincérité, je sais qui je suis, je vis qui je suis. N’y a-t-il pas plaisir à se regarder en face et à se reconnaître vraiment ? À vivre sa propre aventure avec son moi authentique, loin des caprices d’un ego animal dressé aux sucess story publicitaires ? Retrouver la lumière de la sincérité, c’est reconnaître et vivre enfin en fidélité profonde à soi.
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T TRANQUILLITE
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TRANQUILLITÉ Une vie sobre et tranquille, pour mieux vivre ma vie, chercher la tranquillité, c’est chercher une vie légère, humble, et appliquer la belle proposition de Ralph Waldo Emerson : « Vivre satisfait avec peu de moyens, rechercher l’élégance plutôt que le luxe, et le raffinement plutôt que la mode. Etre digne et non respectable, comblé plutôt que riche. Ecouter les oiseaux et les étoiles, les enfants et les sages avec sincérité. En résumé, laisser le spirituel caché en nous, transparaître dans nos actes quotidiens ».
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U UBUNTU
UNIVERS
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UBUNTU Ubuntu, la lumière du Monde Qu’est ce qu’une belle idée dans un monde « très occupé, très pressé », c’est une idée qui fait du bien à l’âme autant qu’au cœur, c’est une idée pleine d’Amour. « Devant moi, il y a
deux routes J’ai choisi la route la moins fréquentée Et cela a fait toute la différence »
Comme ces vers de Robert Frost, faire avancer de « belles idées » peut se révéler certes périlleux mais surtout passionnant, quoi de plus exaltant « que de réveiller l’humanité qui est en l’être humain »
Robert Frost
Il y a un mot que j’aime : Ubuntu, découvert dans une préface d’un homme d’ailleurs Desmond Tutu. Ubuntu est dans la culture de cet homme, un mot puissant puisqu’il s’agit d’une référence à sa conduite envers ses frères humains, à la manière dont il les considère et dont il se voit, lui dans les relations personnelles, familiales mais également au sein de la communauté élargie. L’ubuntu est l’un des pivots de la philosophie africaine : la qualité d’humanité dans son essence même. Cela reprend les pensées d’Albert Jacquard qui nous dit, on ne naît pas Homme, on le devient dans sa capacité à aller vers d’autres hommes. Nous ne pouvons être humain qu’ensemble. Œil pour Œil et le monde devient aveugle… « Le réel quelquefois désaltère l’espérance. C’est pourquoi contre toute attente l’espérance survit »
René Char
Et si nous avions un penchant naturel à l’entraide et à la coopération ? Le concept d’ubuntu se définit suivant deux axes distincts. D’après le premier, faire preuve d’ubuntu signifie se montrer amical, hospitalier, généreux, attentif à autrui et compatissant. En d’autres termes, mettre sa force au service de son prochain - du faible, du miséreux, du malade – sans profiter de personne.
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Le traiter comme on voudrait être traité. Ce qui revient à exprimer le deuxième volet du concept, lequel implique l’ouverture, la magnanimité, le partage. Dans la communication, utiliser Ubuntu, c’est ne plus prononcer que des mots dont nous n’aurons pas honte plus tard, que nous ne regretterons pas. Il est facile, bien trop facile de décourager, de critiquer, de protester. C’est vouloir être toujours du côté de la lumière, du petit peu de bien qu’il y a en chacun parce qu’on ne sait jamais tout ce qu’il y a à en savoir. Pour progresser, il ne faut pas répéter l’histoire, mais en produire une nouvelle.
UNIVERS « Considère
l’Univers , et apprends que c’est là ton pays »
Rabindranath Tagore
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VACANCES
VIE
voyager VISAGE
VENISE VILLE
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VERTU
VACANCES Les vacances, dernier refuge? À l’heure où le stress et les tensions sont le lot quotidien, il est fondamental de se sentir bien chez soi. À l’époque où la vie moderne s’accélère et se complique, chaque lieu de vacances doit agir encore d’avantage comme des antidotes au stress et aux tensions, des lieux où se détendre et être soi-même : en somme des lieux de bien-être. Le lieu de villégiature, et encore plus la chambre, la salle de bain, sont devenus un refuge, un nécessaire contrepoint au monde du travail. La liberté psychologique de faire des choses simplement comme lorsqu’on est chez soi. Le refuge laisse la place à l’expression de soi et aux plaisirs, lorsque l’on sent qu’elle est à nous. Aujourd’hui en matière de bien-être, les règles ne font que brouiller le tableau. Noyé de conseils et dérouté par une myriade de possibilités qu’offre le monde de la consommation, il n’est pas facile de définir ce que l’on veut ni ce que l’on aime. En quête d’authenticité, on observe chez les consommateurs une tendance au recentrage vers les plaisirs simples qui font que la vie mérite d’être vécu.
VENISE Des îles habitées Connaissez vous Venise ? Tout le monde a son avis sur la cité flottante, aux émerveillés font face les désœuvrés considérant l’endroit comme un cloaque pour amoureux transis, aux ennuyeuses files touristiques, et aux mélancoliques dépressifs. Qui a dit voir Venise et mourir ? Il y a décidemment trop d’aveugles et de sourds de part le monde… pourquoi ne sont ils pas muets ? Avez-vous vu Venise ? l’avez-vous vraiment vu, sans cliché et sans bavardage. Venise m’enchante, c’est un paradis pour mes yeux ébahis. Elle offre un dépaysement humain incroyable, construite par les hommes, cette cité s’appelle ville car
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les hommes y vivent mais c’est autrement qu’on devrait la nommer tant elle est habitée. Il faut y arriver humble, presque clandestin pour la déflorer lentement au grès de longues promenades, de grandes respirations, de regards prolongés. Venise prend du temps et tout son temps, tellement plurielle: architecture, peinture, roman, musique, poésie, air, pierre, lune, étoile. A Venise, les églises à chaque pas, sont lumineuses; comment ne pas Croire devant leurs opulentes beautés et leurs volées de cloches. Les églises sont ici vivantes, et l’on prie toujours. Cela me fait du bien de voir des Hommes vivants et morts prier encore dans ces si jolis boudoirs. Quelques noms à vous faire rêver qu’il faut lire tout haut: Gesuati, San Giovanni e Paolo, Santa Maria Gliorosa dei Frari, San Rocco, San Trovaso, San Sebastiano... Répétez.. juste pour savourer. Par gros temps de misère spirituelle, Venise est un antidote, mieux une rédemption. Venise c’est un mille feuilles clair-obscur de sensations, à déambuler, à s’enfoncer plus loin, à vivre par tous les temps. Neige magnétique, pluie romantique, brouillard fantastique, soleil magnifique... Que de chance, que de chance de vivre Venise par tous les temps. Il y a les bateaux dans la nuit, le bercement de mon coeur au fond de lagunes silencieuses, il y a moi toute petite sous des plafonds immenses et animés, il y a le gothique, le baroque, l’hier et l’aujourd’hui, il y a mes larmes devant tout Cela. Venise c’est un catalyseur d’émotions, d’éblouissements. Que peuvent dire d’autre mes yeux comblés devant les ciels de Saint Marc, de Tiepolo, de Giorgione? à Venise on prend l’habitude de regarder vers le haut la bouche ouverte... Venise est un refrain dans ma vie, une vocation, y retourner et y retourner encore gourmande de vie et d’aventure. Définitivement... il s’agit de VOIR VENISE ET VIVRE ! Un dernier mot, Venise vous tente ? je vous conseille l’excellent dictionnaire amoureux de Venise par Philippe Sollers et Alain Bouldouyre.
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VERTU Remettre les vertus au cœur du Monde On ne parle plus à l’heure actuelle des vertus, pourtant plus que jamais nous en avons besoin. Spinoza disait « mieux vaut la joie que la tristesse, mieux vaut l’admiration que le mépris, mieux vaut l’exemple que la honte ». La plaie de ce monde se résume aujourd’hui à l’absence de valeurs, les gens sont coupés de toute spiritualité, ignoblement matérialisés et mécanisés. Tout le monde a peur, vit dans une fuite perpétuelle, incapable de s’élever. Il faut donc des gardes fous, des hommes qui veulent voir où palpite l’âme, et qui s’approchent si prés des gens avec les yeux grands ouverts pour regarder là ou ils en sont. Les habitants du monde, doivent aujourd’hui tendre vers le meilleur, s’élever, déplomber leur âme. Le domaine de l’action et de la communication doit s’éloigner d’un code de conduite stéréotypé, sorte de conventions sociales, de petits arrangements entre gens. Il ne s’agit pas là de donner des leçons de morale mais d’aider chacun à devenir plus humain. Et finalement plus heureux. Sur terre, il n’y a plus de place pour la lassitude raisonnante, la résignation du peu. Il y a des hommes et des femmes de bonne volonté qui pensent pouvoir repousser les montagnes. Des enthousiastes, des tenaces, qui même si leur action est une goutte d’eau dans l’océan, savent que ça en vaut la peine. Aujourd’hui les hommes se battent pour protéger, partager, aider, nourrir, instruire, aimer… Plus de qualité, d’équilibre avec la terre, de Sens et de simplicité pour un avenir où dès aujourd’hui la relation avec les autres reprend toute sa saveur.
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VIE Une vie réussie La vie ne vaudrait-elle d’être vécue, que si elle apporte le bonheur? Mais alors qu’est ce qu’une vie réussie? Y a-t-il des recettes? Où se cache la réussite? Dans l’argent? Dans la réussite personnelle? La santé? Les plaisirs? L’espérance d’un jour meilleur? Alors? Vie réussie et bonheur sont-ils dans ce que nous avons ou dans ce que nous sommes?
« connais toi, toi-même »
Je me suis aperçue qu’il y avait autant de définitions d’une vie réussie qu’il y avait d’êtres humains. Prendre le bout du fil et dérouler le début de réponse : « connais toi, toi-même » nous dit Socrate. Socrate Me connaître me permet de vivre une vie à ma mesure, qui me convienne et que je puisse atteindre par moi-même. Cela modifie, la question initiale « qu’est ce qu’une vie réussie: définition » en « ma vie réussie à moi: définition ». A chacun d’inventer sa vie, selon ses propres envies, désirs, rêves et de la vivre en moment de tous les jours. On rencontre autant de jouisseurs de «choses» que d’adeptes du bonheur moral. Des gens qui rétrécissent tandis que d’autres grandissent. Des chrysalides et des papillons. Certains passent d’une étape à une autre parce qu’en VIE, on tâtonne, on hésite, on fonce, on change, et c’est sans doute ce qui fait la valeur d’une vie: sa qualité de remplissage en émotions, souvenirs, rires, larmes; être vivant reste une formidable chance. A travers ces derniers exemples on voit à quel point il n’existe pas de définition, c’est en vivant que nous pouvons dire ce qu’il en est. Une vie réussie reste un idéal sans chemin balisé, tout au plus pouvons-nous chercher les conseils, sagesses et autres philosophies. Et le seul conseil que je pourrai donner c’est: vivez! oui, n’oubliez pas de vivre et d’être. Restez vivant !
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Le XXIème siècle sera celui de l’être. La vie réussie ne semble plus être dans les possessions (réussite, argent, beauté) mais dans les dispositions (sérénité, quiétude, harmonie). Et ma vie réussie à moi, me direz vous? J’aime ma vie parce qu’elle est vivante, bien sûr le chemin est cahotant, approximatif, difficile, et alors ?!. La vie n’est pas de tout repos. C’est un effort qui réussit ou un échec que l’on surmonte. C’est du courage, de la désespérance autant que de l’espérance, de la persévérance autant que de la présence. Le monde est extraordinaire, je persiste à chercher. Ma vie c’est un peu d’avoir pour plus d’être, de l’action, du plaisir, de l’amour. J’aime la vie à la manière de Christian Bobin: désespoir, amour et gaîté. Alors, Chenille ou papillon, quelle importance tant que la vie est belle !
VILLE Ville aimée, ville rêvée C’est quoi une ville aimée, c’est quoi une ville aimée ? C’est tout le contraire de l’enfer moderne d’Aragon, c’est une ville avec nous et notre curiosité d’apprendre, notre goût de la vie, avec un grand « V » : vie profonde à la recherche de plaisirs et de spiritualité. En ce sens la ville doit chercher à encourager une nouvelle donne des valeurs pour les citoyens comme par exemple l’altruisme valeur qui motive la réalisation de transfert entre les hommes et bien sûr entre les générations, parce qu’elle est source de cohésion sociale et de lien entre groupes aux modes de vie très distinctes. Voilà pourquoi une ville doit être responsable. Partant du principe que nous sommes tous inéluctablement destinés à disparaître, nous cherchons à tirer profit de notre existence. il faut que la ville soit un espace à habiter plutôt qu’à loger. Pour cela la ville doit remettre l’homme au cœur de sa politique. « l’action la meilleure est celle qui procure le plus grand bonheur au plus grand nombre » pourrait être une des phrases résumant cette politique. A laquelle on pourrait ajouter : contre tout ce qui joue en faveur de la séparation,
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nous devons encourager cet enjeu premier, relier les hommes entre eux, relier, parce qu’il y à l’absolu nécessité d’une société plus fraternelle. Mais il n’est pas question de lancer de grandes idées inopérantes parce qu’utopiques, ou encore désespérantes parce qu’impraticables. C’est pourquoi un des grands enjeux d’une ville aimée est de développer des événements « utilitaristes », tout public, encourageant la curiosité.
VISAGE Un visage dans le silence « Il y a une petite souche d’arbre. Que voit l’enfant? Un fantôme, les mains tendues, prêt à l’attraper. Imaginer un homme arrivant du coin de la rue à la rencontre de sa bien aimée; C’est elle qu’il voit dans la souche de l’arbre. La même souche d’arbre peut être vu de différentes manières. La souche d’arbre est la réalité, et les visions de la souche sont des projections des divers esprits »
Swani Vivekananda
C’est avec son regard que l’on voit le monde et les autres, changer de regard et vous changerez le monde. Le regard est forcément subjectif, toujours, mais au moins peut on en se connaissant, voir quelles lunettes déformantes nous avons mis. Voir la vérité et savoir regarder vraiment la réalité tel qu’elle est. Nous reprochons trop souvent aux gens de n’être que ce qu’ils sont, comme nous ne pourrons jamais aller vraiment rencontrer quelqu’un tant que l’on pense aux princes et princesses charmantes. Car d’abord on voit tout ce qui relie chez l’autre, de véritable ou de projeté et puis bien plus tard, trop tard, ce qui délie et qui devient source d’une incompréhension qui fait douleur. La part manquante n’existe pas, nous sommes nés complet et si l’autre peut être tuteur de résilience, c’est seul que l’on se répare. La rencontre, c’est entrer en terres étrangères de soi-même, dans ces zones frontalières où plus rien n’est voulu, ni pensé. L’autre, c’est une grande étendue terrestre nouvelle et un grand bloc de ciel à découvrir. Alors peut être se voit on vrai-
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ment l’un l’autre, car ce qui éclaire la vie de chacun ce n’est rien que l’on puisse dire ou tenir. Ce que l’on dit se tait. Ce que l’on tient se perd. « Nous n’avons guère plus de prise sur notre vie, qu’une poignée d’eau claire. Nous ne possédons que ce qui nous échappe et se nourrit de notre amour: un visage dans le silence, une lumière dans le ciel »
Christian Bobin.
La présence de l’autre qui par sa différence, nous habite d’un coup de tout ce qu’il tait et la peur de se perdre dans un vrillement de coeur. Parce que nous ne sommes jamais ce que nous croyons être . Notre volonté est sans poids lorsqu’on approche quelque chose, le battement des lumières sur un visage, la tombée de la foudre sur une vie vaine.
VOYAGER voyagez à l’étranger, abstenez vous de regarder toujours en arrière dans votre propre pays »
« Quand vous
Pythagore
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W WESTERN
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WESTERN La vie est-elle un western, avec les bons et les méchants, ceux qui gagnent et ceux qui perdent ? Des mots acerbes, des amertumes, des jalousies, de mensonges en méfiance, la haine s’insinue partout, comme autant de révolvers prêts au carnage final ?
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X XENOPHOBE
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Xénophobe « Aux totalitarismes de XXe siècle ont succédé la tyrannie d’un capitalisme financier qui ne connait plus de bornes, soumet Etats et peuples à ses spéculations, et le retour de phénomènes de fermeture xénophobe, raciale, ethnique et territoriale. »
Stéphane Hessel
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Y-ETRE
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Y-ÊTRE Y-être. Mais où ça ? Là où sont les autres ? ou pas? Non, Mimei, C’est où ? au point du jour. Dans la nuit, là où l’on pressent confusément l’arrivée de l’aube, sans que le noir du ciel se soit pour autant éclairci. Et Y-être, lucide choisir son sort faste ou néfaste. Pour soi et les autres…
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ZUT « Il ne faut jamais douter qu’un petit nombre d’individus ne puisse changer le monde. Il n’en a d’ailleurs jamais été autrement » Margaret Mead Alors zut ! oui zut aux mal-pensants pessimistes, cyniques, égoïstes, sinistrosés. Un nouveau monde est entrain de naître, de résistances, en contre-pouvoir, c’est vous qui décidez.
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COPYRIGHT LAURENCE 144 DUARTE MARS 2014