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« Un mix électrique décarboné est essentiel pour le développement de la filière hydrogène »
Interview de Thomas Branche - publiée le 29.03.2021
Thomas BRANCHE
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Vice-président Senior Transition Énergétique & Infrastructures chez Assystem, deuxième groupe d’ingénierie mondial.
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Le gouvernement a réaffirmé ses engagements pris en faveur de la transition énergétique lors du plan de relance, notamment avec l’enveloppe de plus de 7 milliards d’euros d’ici à 2030 allouée à l’hydrogène, dont 2 milliards entre 2021 et 2022. Pour Thomas Branche, Senior Vice President Energy Transition & Infrastructures chez Assystem, il est essentiel que les mix électriques des pays européens soient décarbonés pour développer la filière. Interview.
Quels sont les défis majeurs pour que décolle une filière hydrogène en Europe en général, et en France en particulier ?
L’hydrogène se développera en Europe et en France aux conditions suivantes : qu’il soit décarboné, qu’il soit compétitif et qu’il puisse être produit massivement.
Le défi principal est la réduction des prix pour la filière hydrogène décarboné et cela pour l’ensemble des pays européens. Ce défi est identifié et le taureau est pris par les cornes.
Il y a deux facteurs clés pour diviser les coûts d’un peu plus de moitié, ce qui est l’objectif : améliorer l’efficacité et les coûts de la chaîne hydrogène (électrolyse, piles à combustible, stockages…) ; disposer d’une électricité décarbonée plus compétitive (renouvelables et nucléaire).
Pour ces raisons, l’Europe a décidé l’été dernier d’injecter 450 milliards d’euros pour faire émerger une filière européenne de l’hydrogène.
Il y a également un défi majeur d’industrialisation. La technologie est là, mais il y a un passage à échelle qui est important. Enfin, il y a un fort enjeu sur le transport de l’hydrogène et sur le réseau de distribution pour un usage B to C.
Pour finir, il existe également un enjeu important sur la source d’électricité utilisée pour l’électrolyse.
Cette électricité doit être décarbonée, et compétitive, et cela implique donc pour l’ensemble des pays européens d’avoir en amont un mix électrique décarboné, comme c’est le cas en France.
Outre la réduction des coûts de production, quel est l’autre point clé ?
Le deuxième point-clé sera celui de la capacité à produire en masse, couplée des infrastructures d’acheminement et de stockage.
L’Allemagne, qui mise sur l’hydrogène pour verdir son mix énergétique, ne vat-elle pas faire de l’ombre à l’ambition française appuyée par Bruno Le Maire ?
Nous avons un challenge collectif qui est de faire émerger massivement la filière de l’hydrogène décarboné. C’est un sujet de mobilisation mondiale. La France seule n’y parviendra pas. Nous devons donc nous réjouir de l’engagement de l’Allemagne, comme d’autres pays.
Concernant l’Allemagne, son plan est comparable au plan français en termes d’investissement public. Il faut le voir comme l’opportunité de projets conjoints plutôt que comme une menace pour les ambitions françaises.
Une coopération Berlin-Paris, comme pour le développement d’un Airbus de la batterie, est-elle envisageable ?
Bien sûr, une coopération Berlin-Paris est envisageable mais il faudra trouver des usages qui fédèrent des deux côtés. De plus, une vision Paris-Berlin est restrictive. L’hydrogène doit se développer partout où l’électricité est abondante et à bas prix.
Ainsi le solaire du sud de l’Europe (Italie, Espagne) et l’éolien offshore dans le nord de l’Europe peuvent permettre des coopérations multinationales. L’un des avantages que nous avons en Europe est notre réseau de gazoducs interconnecté pour le transport de l’hydrogène.
Mais ce réseau ne suffira pas, il faudra le développer.