La lettre des
écoles LA LETTRE DES ÉCOLES SUPÉRIEURES D’ART N°06 • NOVEMBRE 2011
Les écoles supérieures d’art. La tentation faustienne Pages 2-8
L’enseignement supérieur du théâtre en France/ Michel Corvin Pages 9 à 11
L’enseignement supérieur de la musique / Eric Sprogis Pages 12 à 16
Le projet européen Humart / Jacques Moreau Pages 16-18
Cours minimal sur la poésie contemporaine / Entretien de Jean-Charles Agboton-Jumeau avec Julien Blaine Pages 19 à 24
Canopéea / Assises nationales Oser... Pages 25 - 26
Brèves.
Ecoles d’art – EPCC, statuts des enseignants : rencontres techniques de l’AMF du 18 octobre 2011. Approfondir les collaborations entre Enseignement supérieur et Culture. Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture et de la Communication, annonce 15 mesures en faveur des arts plastiques. Le Rapport de synthèse de l’évaluation par l’AERES des cursus menant au Diplôme National Supérieur d’Expression Plastique (DNSEP). Programme doctoral “Science Art Création Recherche” (SACRe). Colloque international sur la recherche en art et dans l’enseignement supérieur artistique les 8, 9, 10 février 2012. Enseignement supérieur : arrêté du 1er août 2011 relatif à la licence, étudiants étrangers : circulaire Guéant, stages en entreprise, services des enseignants-chercheurs. Universités dans le monde : Etats-Unis. La crise en l’enseignement supérieur. Quebec - Angleterre - Hongrie - Chili... France : droits de scolarité. Franchises : quand l’université allemande copie McDo. Noter les profs ? Pages 27 à 33
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* Echanges ouverts ! Si les premières lettres partaient principalement de la situation des “écoles d’art”, c’est à dire des écoles des “beaux-arts” pour reprendre une dénomination plus classique, des écoles d’arts plastiques pour reprendre une dénomination plus courante aujourd’hui, et ceci au moment où la reconnaissance des diplômes au grade de master - avec les conséquences corrélatives sur le statut des établissements, la nécessité d’ouvrir le champ des préoccupations à l’ensemble des enseignements culturels est apparue très vite. Elle répondait à des nécessités de plus en plus urgentes. Dans tous les domaines, l’intégration à marche forcée des formations artistiques dans le cadre de l’enseignement supérieur pose des questions de valeur, d’organisation, de méthode, de projet politique... ARTe[F]act réunit une grande diversité d’acteurs. Elle s’est créée suite aux projets de réforme de l’enseignement supérieur artistique : le métier d’enseignant, la formation à ce métier apparaissent particulièrement menacées ; la diversité des pratiques, les variétés de profils, de parcours, de compétences ne sont pas prises en compte, etc. Depuis, ARTe[F]act participe aux actions et réflexions pour l’élaboration d’une réforme ambitieuse et concertée, pertinente et cohérente de l’enseignement supérieur artistique. Par exemple, avec neuf autres associations et fédérations d’acteurs sur l’ensemble du champ artistique (cf. page 25), ARTe[F]act a pris part à la fondation du CANOPÉEA (Collectif pour des Assises Nationales Ouvertes sur les Pratiques, l’Education et les Enseignements Artistiques), et contribue à ses travaux. L’objectif du CANOPÉEA est de questionner et d’apporter des réponses aux trois enjeux majeurs des pratiques, de l’éducation et des enseignements artistiques : - un enjeu sociétal et humain au croisement des politiques de l’éducation, de la culture, de la jeunesse, de l’orientation et de la formation professionnelle ; enjeu de construction de l’individu et du « vivre ensemble »... - un enjeu de développement économique, social et culturel des territoires, qui joue également sur leur rayonnement et leur attractivité ; - et enfin un enjeu financier, avec l’investissement important des collectivités dans ce domaine et les questionnements liés au contexte actuel, et la nécessité sans doute de revisiter les modes de coopération à différents niveaux pour construire l’avenir d’une offre publique adaptée et de qualité dans le domaine des pratiques, de l’éducation et des enseignements artistiques. Ce chantier de réflexions en vue de construire un programme d’actions, sera ponctué de nombreuses manifestations jusqu’à l’automne 2012. La première, nationale et ouverte, se tiendra à Brive et en Corrèze les 8, 9 et 10 décembre prochain. Les différents enseignements artistiques ont vécu jusqu’à présent dans des sphères à la foi spécifiques et bien délimitées. Ils se connaissent en fait peu, et, par voie de conséquence, ont du mal à échanger. D’où le projet de commencer avec cette lettre une présentation des différents enseignements supérieurs à la création artistique, dans une approche historique. Chacun pourra se repérer dans sa propre histoire et, à travers une écriture et une lecture croisées, enrichir sa réflexion et entrevoir un avenir dans lequel il sera sans doute associé à d’autres, sous des formes diverses. Dans un système uniformisateur, sinon normalisateur, les enseignements artistiques ont tout intérêt, s’ils veulent conserver leur âme, à cette réflexion. Tous les domaines n’ont pu être abordés dans cette lettre, d’autres le seront dans les prochaines. Les contributions ici présentées provoqueront des réactions, des réflexions, des informations complémentaires. Nous avons entrepris un “work in progress” ! Jacques SAUVAGEOT, La lettre des écoles Jean-Pierre SEYVOS, CANOPEEA Nicolas SIDOROFF, ARTe[F]act 1
La lettre des écoles supérieures d’art
Les écoles supérieures d’art
L’enseignement des écoles supérieures d’art Pendant longtemps, l’enseignement supérieur des arts plastiques ne semble pas avoir fait l’objet d’attentions ni d’intentions particulières. L’ouvrage de Gérard Monnier, “Des beaux-arts aux arts plastiques. Une histoire sociale de l’art” (Ed. La Manufacture, Besançon, 1991), ne lui consacre que deux séquences : l’une autour de la réforme de l’Ecole des beaux-arts de Paris, en 1863, réforme qui remet en question, à l’époque du développement technique et industriel, une formation académique classique, et l’autre, autour de l’action de Georges Pompidou, la Réforme des études artistiques de 1973 étant présentée dans le prolongement de la création du Centre Georges-Pompidou, lieu-phare d’un art moderne et pluridisciplinaire. Les ouvrages plus récents (Yves Michaud, “Enseigner l’art”, Ed. Jacqueline Chambon, 1993 - Thierry de Duve, “Faire Ecole”, Les Presses du réel, 2008 - Boris Charmatz, “Je suis une école”, Prairies ordinaires, 2009) concernent plutôt “l’art de transmettre”, pour reprendre le titre d’un dossier de la revue “Mouvement” (numéro 53, octobre/décembre 2009 que la question de l’organisation de l’enseignement de l’art, et notamment son inscription dans les enseignements supérieurs, les enjeux et les conséquences de cette inscription... qui sont au cœur des évolutions actuelles. L’idée que les enseignements artistiques sont des enseignements supérieurs n’est pas nouvelle. Mais, pendant longtemps, l’accent a été mis principalement sur le caractère particulier de l’enseignement des arts plastiques, lié à la pratique de l’art, plus que sur son inscription dans le système des enseignements supérieurs. En 1996 encore, l’introduction aux “Propositions pour l’enseignement artistique” (Délégation aux arts plastiques – Inspection générale des enseignements artistiques – Départements des enseignements artistiques) souligne : “Les enseignements artistiques sont d’actualité. Les paroles ou les textes qui s’organisent autour d’eux... sont autant d’occasions de dire et de redire qu’ils constituent une priorité engageant fortement la vie artistique et culturelle... Il nous semble que pour bâtir mieux nous disposons d’une base de réflexion qui tient à la spécificité des écoles d’art, à leur caractère unique dans le paysage de la formation. Cette spécificité a pour conséquence que se tromperaient lourdement ceux qui seraient tentés de leur appliquer des recettes qui ont prévalu ailleurs, là où le monde est volontiers réduit à des phénomènes sans ombres...”. Le paysage de l’enseignement des beaux-arts dans l’enseignement supérieur s’est construit progressivement, par petites touches, jusqu’aux années 2000, en articulant de fait deux démarches parallèles : l’adaptation des enseignements de l’art à l’évolution de l’art, et la nécessité de donner aux “élèves” la possibilité de bénéficier au cours de leurs études (Sécurité sociale, bourses, logements) et à l’issue de leurs études (équivalences et reconnaissance des diplômes) de conditions proches de celles
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des étudiants de l’enseignement supérieur classique. A cet égard, la réforme de 1973 (en fait 1973-1974 si l’on considère l’ensemble des textes qui la mettent en œuvre) peut être considérée comme étant la base fondamentale de cette évolution, dans la mesure où elle constitue le socle constitutif des enseignements actuels. La réforme de 1973 (cf. la Circulaire du chef de service des Enseignements de l’Architecture et des Arts plastiques, du 13 novembre 1973) est fondée sur la volonté d’adapter les enseignements artistiques “aux métamorphoses de l’art et à l’évolution des techniques contemporaines” ; “elle tend à adapter les enseignements artistiques anciens à ces changements profonds ou à en créer de nouveaux, suivant en cela, sans l’imiter, la Réforme de l’Enseignement de l’Architecture”... Elle prévoit la mise en place de trois cycles d’enseignement : - cycle d’initiation : années 1 et 2 (probatoire, post-probatoire) : communes à tous les étudiants, - cycle de spécialisation : années 3, 4 et 5 : approfondissement dans le cadre de départements ; trois départements (Art, Communication, Environnement - aujourd’hui Design - se substituent aux anciennes disciplines (peinture, sculpture, gravure, céramique, publicité et décoration) et conduisant au DNSEP Diplôme National Supérieur d’Expression Plastique (qui remplace le DNBA - Diplôme national des beaux-arts, créé en 1956), - cycle de recherche, qu’il faudra “élaborer ultérieurement”. Un enseignement dont l’art est le pivot. Le département Art propose une pédagogie expérimentale, “c’est-à-dire une recherche artistique sans contrainte professionnelle”. Les autres départements “sont plus adaptés à des finalités professionnelles en se donnant pour objectif de former des plasticiens de la communication ou de l’environnement”, étant entendu qu’une école d’art “ne peut mettre en place un département à finalité professionnelle que si elle possède déjà le département art”. Toutes les écoles ont donc, en principe, l’option Art ; certaines ont deux voire trois options. A côté de ce cycle long peut exister un cycle court (3 ans, dont une année commune avec le cycle long) conduisant au DNAT – Diplôme National d’Arts et Techniques dans les domaines des arts graphiques et du design/cadre bâti. A l’issue de cette réforme, les écoles d’art sous tutelle du ministère de la Culture forment donc sinon des artistes du moins des “plasticiens”, au sens le plus large ; leur mission principale est la formation à l’art contemporain le plus expérimental et non plus sur une formation technique et professionnelle (notamment dans les domaines de l’architecture et des métiers du bâtiment) ; les missions de sensibilisation, d’initiation à l’art du public le plus large (cours péri et post-scolaires) deviennent de fait sinon accessoires du moins secondaires ; les élèves sont de plus en plus systématiquement recrutés après et au-delà du secondaire. Cette évolution est d’autant plus marquée qu’elle s’inscrit dans le contexte de la fin des années soixante : l’enseignement de l’architecture s’est séparé de l’enseignement des beaux-arts, des sections d’arts plastiques se sont ouvertes dans le cadre de l’Université pour former les professeurs du secondaire, la notion d’arts appliqués est remise en cause. Les réformes et aménagements ultérieurs parachèveront ce système en le rapprochant de fait de la structuration des enseigne-
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Les écoles supérieures d’art ments universitaires classiques, avec notamment : - le renforcement des enseignements de culture générale, l’apprentissage obligatoire de langues vivantes, la création du DNAP - diplôme national d’Arts Plastiques, qui conclut, au bout de trois ans, le premier cycle de l’enseignement (décret et arrêté du 10 novembre 1988) ; - l’instauration d’enseignements communs et de parcours personnalisés à travers des ateliers de recherche et de création (ARC) (arrêté du 6 mars 1997) - l’établissement progressif d’un système d’équivalences entre enseignements du ministère de la culture et enseignements du ministère de l’éducation nationale (protocole d’accord du 11 septembre 2000). Mais, malgré toutes les transformations et évolutions, les écoles d’art ne sont pas juridiquement , à la veille de la mise en place du “processus de Bologne”, des établissements d’enseignement supérieur. Le qualificatif supérieur que beaucoup d’entre elles ont introduit dans leur dénomination n’est que le résultat, le plus visible et le moins coûteux pour l’Etat, des propositions du rapport de Jacques Imbert, Inspecteur général de l’enseignement artistique, finalement publié en 1998. L’intégration des écoles dans le “processus de Bologne” a été présentée comme permettant à la fois : - la reconnaissance des écoles comme des structures d’enseignement supérieur, - leur intégration dans un système d’équivalences tant au niveau français qu’à un niveau international, - l’occasion d’un ré-équilibrage des parties prenantes au fonctionnement et au financement des écoles, les collectivités territoriales étant dans la plus grande partie des cas les financeurs presque exclusifs des écoles (si l’on met de côté les bourses attribuées aux étudiants par l’Etat) dont le ministère de la culture détermine les objectifs et les contenus. Dans la mesure où les écoles préparaient à des diplômes nationaux, et dans la mesure où la structure générale des enseignements des écoles n’était finalement pas si différente... des UFR d’arts plastiques, cette “harmonisation” des enseignements ne semblait pas, à première vue, poser de gros problèmes, une fois résolue la question du remplacement des unités de valeur par un système de crédits, qui fut institué, à titre “provisoire”, dès 2005. En fait, il est apparu que la question des crédits n’était qu’un des éléments du dispositif plus large : la question du statut des établissements (ramenée de fait à une seule possibilité : l’EPCC), l’évaluation des enseignements (non par le ministère de la culture, ni même par le ministère de l’enseignement supérieur, mais par l’AERES) posent des problèmes d’une toute autre nature : ceux de la finalité, du contenu, et de l’organisation des enseignements actuellement sous responsabilité du ministère de la culture. Aujourd’hui, toutes les formations de second cycle (années 4 et 5, conduisant au DNSEP) ont été évaluées par l’AERES. Et, pour être habilitées, toutes les écoles ont dû passer sous statut d’EPCC. A l’issue de cette vague,
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En fait, depuis quelques années, plusieurs problèmes sont actuellement particulièrement préoccupants : 1. Les EPCC et leurs statuts. Les questions que l’on peut se poser sont de deux ordres : - Pourquoi les collectivités sont-elles tant attachées aujourd’hui à ce statut qui va en quelque sorte « externaliser » les écoles, tout en les contrôlant étroitement (puisque les collectivités publiques fondatrices sont majoritaires dans les CA), étant entendu que les objectifs annoncés – notamment économies d’échelle et nouveaux modes de financement – ne sont plus, de fait, d’actualité ? - En quoi, ou plutôt comment, ce statut peut-il être adapté à des établissements d’enseignement supérieur, établissements dont la caractéristique est, dans les principes, l’autonomie pédagogique, qui se manifeste dans la « gestion par les pairs » ? Donc, quel est le jeu qui se joue et dans quel(s) but(s) entre autonomie administrative et autonomie pédagogique ? Qu’est-ce qui va l’emporter et pour quelles finalités ? 2. Au sein de structures qui peuvent rassembler plusieurs établissements d’enseignement du même type, et, de façon générale au sein du réseau des écoles, comment affirmer à la fois le caractère pluridisciplinaire et transversal des enseignements et le souhait (pour des raisons financières ou de carte scolaire, ou de professionnalisation) d’une spécialisation, d’une mise en concurrence des formations ? Au-delà d’une préparation à “l’insertion professionnelle”, c’est-à-dire aux besoins – fluctuants et forcément indéterminés, du marché, de l’aménagement des territoires, quelles sont les missions des enseignements supérieurs, notamment sur le plan de la formation personnelle... qui devrait être à la base de l’enseignement et la culture... ? 3. La plupart des écoles ont plusieurs cycles d’enseignement (1° cycle, 2° cycle) et de formation (différentes options). Qu’est-ce qui peut fonder une division – ou une transversalité – optionnelle ? Quelles peuvent être les finalités ou les spécificités des différents cycles ? (Cette question n’est sans doute pas propre aux écoles d’art et semble d’autre plus complexe qu’il s’agit d’y répondre à un moment où, de façon générale – au moins en France – les positionnements du premier cycle (cycle « licence ») comme du 2° cycle (« masters » recherche / « masters » pro) sont particulièrement flous. Un nouveau texte organisant les enseignements est en cours de publication. Quels peuvent en être, dans ces conditions, les éléments constitutifs principaux ? 4. Dans l’immédiat également va se poser la question de la « recherche ». La possibilité de formations au-delà du diplôme se pose depuis un moment déjà, qu’il s’agisse de formations d’approfondissement, de spécialisations, de réalisation de projets… et des « postdiplômes » ont existé, ici et là, sous des formes variables, en petit nombre car le ministère ne voulait pas devoir les financer. Mais on voit bien qu’elle est aujourd’hui posée dans des termes nouveaux qui sont ceux – sinon d’une assimilation – du moins d’un parallélisme avec les 3° cycles universitaires classiques qui, tout en admettant la possibilité de pratiques variables, constituent en fait un cadre globalement assez contraignant. De fait, les projets actuels, en cours de multiplication, sont prin-
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cipalement, au-delà des formulations ambiguës, des projets dont la caractéristique est d’être conjoints avec l’Université et non des projets spécifiques à la création plastique. 5. Le système actuel d’évaluation, accepté par tous les partenaires, aboutit à des transformations en quelque sorte anticipées ou devancées par les établissements, dans tous le domaines, notamment le contenu des enseignements (par l’évocation de « spécialités » parfois problématiques, un discours axé sur la professionnalisation), le recrutement des personnels (appel à des « diplômés », à des administratifs-managers… : les projets – et encore moins les dossiers – artistiques ne sont plus visiblement un critère déterminant : c’est ce qu’il ressort de la lecture des appels à recrutement, non seulement pour les directeurs d’établissements ou pour les directeurs des études, mais également pour les enseignants !). 6. Ce qui n’est pas sans poser une question fondamentale : au sein d’un système d’enseignement supérieur qui a un caractère d’univers(alit)é, y a-t-il place pour des approches et des critères qui admettent les particularités, les originalités ? Si l’organisation des enseignements, le mode de délivrance des diplômes, le développement de la recherche, le recrutement des enseignants... s’alignent sur les modèles universitaires classiques, y a t-il encore place, dans ce système pour un réel enseignement à la création dans le domaine des arts plastiques ? Et quel peut être, à ce niveau, la place ou le rôle du ministère de la Culture ?
Les écoles d’art et la tentation faustienne 1
Chacun connaît la légende de Faust. Devenu docteur, le Faust de Goethe conclut, au bout de dix années d’enseignement, que l’on ne peut rien connaître. Alors, assailli de doutes, insatisfait de sa finitude, il se révolte contre la médiocrité de la vie à laquelle il est réduit, s’adonne à la magie et finit par passer un pacte avec le diable pour connaître les plaisirs de la vie. « Tentation, pacte et illusion », ces trois stations du destin de Faust auraient pu fournir le titre du présent exposé sur la traversée du processus de Bologne par les écoles d’art françaises. Après un état des lieux de la situation française, seront abordées la déclaration de Bologne et ses implications, puis posées la question de l’art et la manière dont la traversée du processus a contourné cette question centrale.
L’état des lieux
Jacques Sauvageot Le 22 juillet 2011 Directeur de la lettre des écoles supérieures d’art
En 2003, au tout début de la réflexion sur le processus de Bologne dans les écoles d’art, le paysage français compte 56 écoles de tailles diverses : 11 sont nationales et dépendent de l’Etat (ministère de la culture), 45 sont territoriales, c’est-à-dire des services administratifs des villes sur lesquels le ministère de la Culture exerce une tutelle pédagogique. Le financement des nationales est assuré entièrement par l’Etat, celui des territoriales provient à 92 % des villes et pour 8 %, voire moins encore pour certaines, de l’Etat. Les 56 écoles préparent aux mêmes diplômes nationaux, les candidats passent les épreuves devant des jurys dont la majorité des membres est extérieure à l’établissement. Rien, si ce n’est le statut juridique, ne distingue a priori les unes des autres. La diversité des tailles autorise une diversité des enseignements. La première opposition à la déclaration de Bologne (1999) laissa rapidement place chez les directeurs à adhésion stratégique en vue de la reconnaissance de leurs écoles comme établissements d’enseignement supérieur. Ainsi par une déclaration solennelle de juillet 2004, ils demandent : • l’inscription au Code de l’Education de la qualité d’enseignement supérieur des écoles d’art, • la reconnaissance du diplôme (Diplôme national supérieur d’expression plastique, Dnsep) au grade de master, • l’organisation des systèmes d’évaluation permettant d’intégrer le système européen des Ects, • un statut d’enseignant du supérieur reconnaissant 1 Conférence prononcée lors du colloque international sur l’éducation artistique Modelos Metodológicos à Veracruz, Mexique (31 août 2011).
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La tentation faustienne
l’activité de création et de recherche. Si la dernière revendication ne touchait que les professeurs des écoles territoriales, les trois premières valaient en revanche pour la totalité des écoles et les rassemblaient sur une base commune. Ces demandes rencontraient les faveurs du ministère de la culture, attaché qu’il était à mettre les écoles d’art en conformité avec les évolutions de l’enseignement supérieur dont les textes sur la création d’un espace européen de l’enseignement supérieur étaient parus deux ans plus tôt. Le pacte était tacitement scellé.
La déclaration de Bologne : ses liens avec l’économie Dans la déclaration de Bologne deux objectifs retiennent l’attention : la comparabilité et la lisibilité des systèmes facilitant la reconnaissance des diplômes, l’organisation d’un premier cycle d’enseignement de trois années permettant l’insertion dans le marché du travail. Instaurer une comparabilité des systèmes d’enseignement signifie pour les pays signataires adopter un système étranger à la cohérence des structures et des formations qu’ils ont mis des décennies à construire. En fonction de ces objectifs, les pays d’Europe doivent développer des critères pour la mise en conformité des curricula. Le système venu de l’extérieur a coupé tout lien avec la formation d’un sujet, la Bildung, il ne vise plus que le diplôme comme aboutissement d’une formation et la valeur de ce diplôme, à savoir sa valeur d’échange sur le marché du travail. Tout cela, la déclaration de Bologne le précise clairement en deux courts membres de phrase : la création de cet espace est un « moyen privilégié pour favoriser la mobilité et l’employabilité des citoyens et promouvoir le développement global de notre continent », et plus loin « l’indépendance et l’autonomie des universités sont garantes des capacités des systèmes d’enseignement supérieur et de recherche à s’adapter en permanence à l’évolution des besoins, aux attentes de la société et au progrès des connaissances scientifiques 2». C’est de la place de l’Europe dans la guerre économique mondiale qu’il s’agit avant tout. Désormais ce sera la compétitivité qui orientera la formation supérieure et déterminera la formation de chacun. Cette décision des ministres aboutissait à promouvoir la valeur marchande du diplôme — non la formation en tant que telle. Que devient alors, dans un tel contexte, la formation assurée dans les écoles d’art ? Traditionnellement on dit que ces écoles ont vocation à former des artistes. Les plus anciennes ont connu au cours des siècles des fortunes diverses. Mais, si au cours des temps, on a créé des filières en fonction de besoins identifiés, elles n’ont cependant jamais renoncé à leur vocation première de former des artistes. Pourtant dans les années 90, on commençait en France à s’intéresser au suivi des étudiants diplômés, à leur devenir « pro2 Traduction du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.
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fessionnel » : on prenait la mesure du fait que tous ne devenaient pas artistes, au mieux un infime pourcentage. A ces étudiants, il fallait donner un diplôme reconnu sur le marché du travail. C’est ainsi que l’on créa un diplôme et des certificats intermédiaires. On s’acheminait vers « la course au diplôme » qui n’était que la face visible de la professionnalisation à laquelle se préparait tout l’enseignement supérieur. Pourtant ce processus venait se heurter à la vie réelle des écoles et à ce qui s’y enseigne : l’art.
Art et monde, sensible et formation Une école d’art se construit autour d’artistes. On ne tentera pas ici de définir ce qu’est l’art, mais de préciser quelques aspects susceptibles d’éclairer combien la tentative faustienne des écoles allaient à l’encontre de sa spécificité. Dans sa réflexion sur l’art — son cours de 1958-1959 sur l’esthétique 3 —, Adorno en vient à s’interroger sur l’expérience esthétique. Elle diffère totalement, écrit-il, de ce qu’est la compréhension au sens traditionnel : on n’entre pas de l’extérieur dans une œuvre, on ne l’ouvre pas du dehors. C’est depuis une exploration immanente qu’on entre en elle. On la parcourt de l’intérieur comme on peut vivre de l’intérieur une langue, de manière directe. La réflexion sur le sens de l’œuvre n’est qu’un degré approfondi de l’expérience esthétique. Et, citant Hegel, Adorno rappelle que d’un concept on ne peut rien penser d’autre que le concept lui-même. Plus tard dans la Théorie esthétique , Adorno définit l’œuvre comme une « monade sans fenêtre 4 » (p. 15). Son unité s’oppose à toute saisie qui viendrait du dehors s’appliquer à l’œuvre. On ne peut pas non plus dissocier les uns des autres les différents éléments de l’œuvre, les couleurs par exemple, ni les analyser de manière singulière en faisant d’elles des symboles qui s’inscriraient dans un processus accumulatif. Au contraire, il s’agit de prendre la mesure de cette unité, de n’en point briser l’intégrité et de parcourir celle-ci par la pensée [mitvollziehen] dans un processus itératif de mise en relation des éléments entre eux, de tension. Toute œuvre d’art qui se veut telle renferme en effet, selon Adorno, un penser, un dire, un moment spirituel en relation dialectique avec son moment sensible. Dans l’atelier de l’école d’art, l’artiste ne fait guère autre chose avec l’apprenti artiste : il se transporte dans le processus de l’œuvre pour déchiffrer les différents moments qui s’y agencent. Adorno insiste sur l’aspect essentiel que constitue l’arrêt [Stauung], l’étonnement réflexif que l’œuvre suscite. Car, pour lui, le processus ne se fige pas, mais se reprend sans cesse dans un parcours interne aux relations, aux constellations qui font l’œuvre. L’expérience primaire de l’œuvre n’est pas celle de son sens, elle n’est pas non plus de l’ordre de la compréhension, elle tient plutôt 3 Theodor W. Adorno, Nachgelassene Schriften, section IV, vol. 3 : Ästhetik (1958/59), édité par Eberhard Ortland, Suhrkamp Verlag, Francfort, 2009. Voir notamment le cours du 13 janvier 1959, p. 201-215. 4 Theodor W. Adorno, Ästhetische Theorie, édité par Gretel Adorno et Rolf Tiedemann, Suhrkamp Verlag, Francfort, 1993, p. 15.
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d’un tâtonnement au risque de la bêtise, mais qui nécessairement dépasse ce stade. Le point d’orgue de ce processus est l’expérience des relations entre les différents moments en jeu dans l’œuvre. La monade sans fenêtre pourrait donner à penser que l’œuvre d’art se ferme au monde et n’entretient aucun rapport avec lui. Bien au contraire, l’œuvre d’art comme monade représente le monde, non en tant qu’elle en serait une copie, ou qu’elle le reproduirait à identique — selon le mot de Schönberg, on peint un tableau, non ce qu’il représente —, mais en tant qu’elle le reprend dans des agencements qui le rendent autre. L’œuvre est le monde, le monde extrait de lui même, le monde une seconde fois (Schopenhauer). Considérons par exemple la manière dont un artiste, Jérôme Boutterin, conçoit son propre travail. Il écrit : « Dessiner d’après l’observation revient justement à une déprise de l’image préalable ; autrement dit, dessiner ce que l’on voit est justement ne pas dessiner ce que l’on imagine. Dessiner un feuillage serait avant tout se détacher d’une image de feuillage que chacun possède et s’écarter du schématisme, de la réduction du feuillage à une image simple. Donc c’est aborder la complexité. C’est donc mettre à l’épreuve, voire contredire le mécanisme de la main et le mécanisme de la pensée pour aborder ce dessin. […] le rôle de l’enseignant est bien d’organiser ce détachement, cet abandon d’une convention confuse pour voir et uniquement voir. Dessiner ce que je vois revient à abandonner ce que je pense, c’est s’abandonner au motif. C’est donc une épreuve . 5» Adorno donne à sa réflexion sur l’art et le monde une inclinaison politique. L’écart par rapport au monde empirique, qui permet à l’art d’agencer une nouvelle fois les relations entre les parties, fait de lui un être à la seconde puissance et lui assure autonomie et liberté. La forme esthétique ne s’impose pas à la matière, elle en reconfigure les éléments. Selon les mots d’Adorno, la forme esthétique est du « contenu sédimenté ». Dans cette sédimentation, l’art tente de rendre compte de ce qui est laissé pour compte par la maîtrise croissante de la nature, de lui apporter ne serait-ce qu’un peu de justice, un peu du souvenir de ce qui est réprimé et sacrifié, un peu du souvenir des forces que le processus croissant de rationalisation détruit en l’homme 6. Il écrit ainsi une histoire à contresens, une histoire du point de vue des vaincus. De ce long exposé de la conception adornienne, il faut retenir ce qui peut aider à une formulation de quelques principes pour l’enseignement. Faire des études d’art, c’est travailler à des agencements du sensible, c’est d’abord se laisser inquiéter par celui-ci. L’enseigner, comme le font les artistes dans les écoles, c’est aider à cette émergence. Les études se fondent sur une recherche personnelle, qui est l’expérimentation sensible du monde, et sur l’expression de cette recherche, laquelle doit trouver une forme qui ne peut lui être imposée de l’extérieur. Le terme de « recherche » est employé ici à dessein pour souligner la parenté existant dans la démarche d’investigation menée par l’étudiant, même débutant, en école d’art et celle du chercheur. La progression des études n’est pas en effet celle d’un curriculum à suivre dans un temps donné, elle est propre à chacun et s’inscrit dans la durée. Elle est le résultat d’un désir singulier. Y a-t-il encore lieu de parler de formation ? Car si des éléments de connaissance, des mises en relation peuvent être apportés à cet apprenti-artiste qu’est l’étudiant, la majeure partie de la formation lui incombe cependant. Aussi la formation en école d’art passe-t-elle par le dialogue. Si j’expose ces questions, c’est qu’elles ont été passées sous si5 Jérôme Boutterin, « L’ai-je bien dessiné ? Maîtrise, abandon, composition… », in : La Lettre des écoles, n° 5, mars 2011. 6 Theodor W. Adorno, Nachgelassene Schriften, section IV, vol. 3 : Ästhetik (1958/59), op. cit., p. 79. N° 06 • Novembre 2011
lence dans le processus subi par les écoles. Reprenons donc dans une perspective plus longue l’advenue du pacte faustien qui préside à ce récit.
La chair est faible Si l’arrivée du processus de Bologne est apparue pour les écoles d’art françaises comme une opportunité, c’est que la rupture de la fin des années 60 les avait profondément marquées. Les sections d’architecture jusque là implantées dans les écoles des beaux-arts, comme à Paris, Toulouse ou d’autres villes, ont subitement quitté le giron de ces écoles dont elles estimaient l’enseignement trop réactionnaire pour se constituer en unités extérieures indépendantes. Peu après, l’université créa des départements d’art plastique pour la formation des professeurs et la préparation des mêmes concours que ceux existant dans les autres disciplines (capes, agrégation). Il ne restait donc plus aux écoles que la formation des artistes, une formation portée financièrement par les villes et dont ces dernières se souciaient peu. Si dans les années 2000, l’accueil de cette transformation se fit sans débat, et même sans critique, à la différence de ce qui se passa en Allemagne, c’est qu’il rencontra en la personne des directeurs une catégorie de personnels certes impliquée dans le devenir des écoles, mais dont la motivation était moins la transmission d’un contenu ou de leur propre expérience d’artiste — très rares étaient en effet ceux qui avaient une production artistique — que le désir de créer des conditions favorables à un enseignement de qualité et l’ambition de faire rayonner leur école au milieu d’un paysage de plus en plus concurrentiel. En mal de reconnaissance, la plupart des directeurs pensaient qu’il était hors de question de rester en dehors d’un processus qu’ils considéraient comme une avancée, d’autant que celui-ci était recommandé par l’instance ministérielle et qu’il allait, pensaient les directeurs, n’être qu’un ensemble de catégories n’entachant nullement structures et contenus d’enseignement. Cela paraissait d’autant probable que l’« harmonisation » des enseignements ne semblait pas à première vue poser question. Tout, en effet, s’insérait parfaitement dans un système français d’enseignement de l’art au sein duquel étaient déjà ancrées une forte croyance en l’évaluation possible de la production artistique et une pratique éprouvée de celle-ci en fin de chaque semestre. S’il n’y eut guère de débat, c’est, à vrai dire, que les réformes avaient éradiqué dans les années 70, 80 et 90, la tradition académique et que les écoles avaient été fragilisées et marginalisées par le départ des formations d’architectes et de professeurs qui leur assuraient auparavant un rôle important sur le plan régional. Bref, les écoles étaient désormais coupées de leur culture ancienne. Elles s’ouvraient à l’innovation et à la gestion, processus qui s’est aujourd’hui amplifié, comme on peut le lire à cet extrait d’un profil de poste de directeur quant aux compétences attendues des candidats : « Connaissance. Connaissance des milieux artistiques en général et de l’art contemporain en particulier. Connaissance des enjeux liés au nouveau statut juridique de l’école. Connaissance de l’environnement et des réseaux professionnels. Savoir faire. Savoir diriger et manager un établissement de même nature. Savoir travailler en réseau et animer des partenariats. Qualités requises. Grandes qualités relationnelles et managériales. » La formulation administrative exclut ici d’emblée le recrutement d’un artiste et énonce un profil « managérial ». Cette récente évo-
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Louis Baguenault, Anti-Mémoire, 4 kilos 33 grammes de silence, ensemble des documents d’un étudiant en art amassé pendant 5 ans, massicoté et relié sur le coté long, 2011
lution s’étend même aux profils des professeurs. Ainsi, plusieurs appels à candidatures (professeurs de volume, de multimédia) publiés récemment ne plaçaient plus même la qualité d’artiste ou la production artistique au nombre des exigences premières. Ces glissements progressifs, l’allongement considérable également des profils de poste ne seraient-ils que des détails ? — Sans doute. Mais des détails eu égard à l’ampleur des transformations qui affectent aujourd’hui nos sociétés et font oublier dans les écoles d’art que l’essentiel c’est l’art. Ne restait donc plus qu’à introduire la question de l’évaluation que nous lègue heureusement le monde de l’entreprise.
De l’art à l’art de l’évaluation Afin d’instruire le dossier d’accès au grade de master pour le Diplôme national supérieur d’expression plastique (Dnsep), deux conditions devaient être remplies : une évaluation des enseignements par une agence spécialisée et l’acquisition de l’autonomie juridique par les établissements territoriaux. Le ministère de la culture et le ministère de l’enseignement supérieur s’étaient entendus sur le fait que sept établissements d’enseignement artistique (Annecy, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Lyon, Nantes, Nice, Toulouse) seraient soumis à une évaluation de l’Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Aeres). Chaque établissement devait préparer un descriptif de ses enseignements faisant apparaître notamment l’adossement à la recherche, les partenariats et l’insertion professionnelle des étudiants. Fin 2008, une délégation composée à la fois d’artistes enseignant dans les écoles d’art et de professeurs d’art plastique enseignant à l’université se rendit dans les sept écoles, rencontra les professeurs, les étudiants et visita parfois les locaux.
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L’évaluation énonça cinq prescriptions : • la structuration d’un enseignement selon des séquences progressives ; • un affichage clair des procédures d’évaluation des travaux ; • un niveau de qualification des professeurs : un doctorat pour les enseignements théoriques ou une reconnaissance professionnelle attestée au niveau national et le plus souvent possible au niveau international pour les enseignements artistiques et techniques ; • l’adossement à des équipes de recherche au sens universitaire ; • la rédaction par les étudiants d’un mémoire de fin d’études d’une longueur significative (100 000 signes furent évoqués dans la première partie du rapport), selon des critères universitaires sous la direction d’un enseignant docteur et soutenu devant un jury composé en majorité d’enseignants docteurs. La situation dans laquelle cette évaluation plongeait les écoles et les collectivités qui les portent était inextricable. Les rendre conformes aux préconisations signifie leur faire adopter un modèle pédagogique fortement inspiré de celui des départements d’art plastique de l’université, alors que ces derniers n’ont jamais orienté leur enseignement vers la formation d’artistes. A l’inverse, refuser d’appliquer ces prescriptions signifie mettre les écoles hors champ d’application de l’accès au grade de master et ne pouvoir délivrer qu’un diplôme d’école. Au cours de la réflexion alimentée par les assemblées générales au sein des écoles, l’inquiétude se déporta de l’organisation pédagogique vers la structure administrative : la création de l’établissement public. Plusieurs éléments inquiétaient. La forme juridique de l’établissement public semblait d’abord propre à faire entrer des financements du privé. L’on se focalisa ensuite sur la gouvernance des établissement et la représentation des personnels : la loi exigeant que les parties publiques (villes, Etat) soient
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La tentation faustienne majoritaires au sein des conseils d’administration, les rédacteurs des statuts ont la plupart du temps opté pour une représentation faible des personnels (10 %). Se posait aussi la question fondamentale de la liberté de la recherche et de l’enseignement, à savoir comment « assurer les activités d’enseignement et de recherche dans des conditions d’indépendance et de sérénité indispensables à la réflexion et à la création intellectuelle 7» ? Après cette première étape, en vint une seconde : l’évaluation de chaque établissement à partir d’un dossier. Aux débats déjà évoqués, s’ajouta la question de la professionnalisation, ou de ce que Thierry de Duve nomme « l’adresse » (ou le destinataire). Très vite se manifestèrent de fortes divergences entre designers et artistes. Les premiers acceptaient de se conformer aux critères de l’Aeres, les artistes au contraire voyaient dans l’esprit de ces recommandations un danger important, soit, pour faire vite, la perte de la dimension critique de l’art et l’inféodation de la pratique à l’écrit. Ce qui peut également se traduire, ou se manifester, dans le déni de la pensée au sein de la forme, c’est-à-dire dans la mise en question du principe romantique, formulé par les frères Schlegel, que l’œuvre est à la fois production et réflexion sur la production et que la critique en tant que prolongement de l’œuvre est incluse en elle.
Il ne s’agit pas, cependant, de rester sur cette défaite, mais de reprendre le chantier à partir de nos propres armes, en allant par exemple puiser dans les ressources de l’art et de la philosophie, et opposer cette remarque que fait Wilhelm von Humboldt à propos de l’université : « C’est dans la philosophie et l’art qu’une telle aspiration [d’opérer selon principe et idéal] s’exprime le plus intensément et de la façon la plus singulière. Non seulement ces deux disciplines se dénaturent facilement, mais il y a peu à espérer d’elles si leur esprit n’est pas adéquat ou si elles se reconduisent seulement sur un mode formel logique ou mathématique dans les autres branches de la connaissance et domaines de la recherche . » Michel Métayer La Croix-Naslin, 11 août 2011 Directeur de l’école des beaux-arts de Toulouse
Chez les artistes, les positions se partageaient encore : entre les tenants d’une temporalité inhérente à la maturité de l’étudiant et ceux qui misaient sur la possibilité de maintenir l’excellence malgré les aléas de l’évolution. A l’automne 2010, le mouvement se précipita. Subitement le ministère de la culture annonça que le passage à l’Epcc devait avoir lieu avant la fin de l’année. En même temps, il exigea le regroupement de structures en vue d’une mutualisation des moyens ainsi que la présence de nouvelles collectivités. Il prévint que les retards risquaient d’entraîner une suppression des crédits d’Etat. — L’on se soumit à ces contraintes sans lancer de réflexion de fond sur les contenus et les projets, ni de concertation approfondie entre les collectivités. La contrainte juridique s’imposait. Elle s’imposait avant les exigences propres à l’art, oubliant les imbroglios juridiques et administratifs qui allaient se révéler plus tard. Le signataire du pacte se découvrait victime de son illusion. Faire à chaque étape la moitié du chemin vers l’université, comme l’ont fait les écoles, conduit certes à se rapprocher d’un certain enseignement supérieur, mais c’est aussi s’éloigner d’autant de ce qui fait le caractère propre de leur enseignement, c’est reléguer le sensible sur les marges et rétrécir le champ de leur enseignement. Les villes délibérèrent, toujours favorablement en faveur de la création d’établissements publics. La motivation profonde de leur décision allait au diplôme qu’il fallait conforter dans un système de plus en plus concurrentiel.
Quelles perspectives ? Le récit d’une tentation, d’un pacte et d’une illusion que ces lignes viennent de conter est le récit d’une défaite. 7
Code de l’Education, L 123-9.
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L’enseignement supérieur du théâtre
L’enseignement supérieur du théâtre en France Michel CORVIN Depuis près d’une décennie, on distingue 2 types d’écoles supérieures de formation théâtrale : I. Les trois établissements nationaux : Conservatoire National d’Art Dramatique de Paris (CNSAD), l’école supérieure d’art dramatique du Théâtre National de Strasbourg (Ecole du TNS) ; l’Ecole Nationale Supérieure des Arts et Techniques du Théâtre (ENSATT) et les Ecoles supérieures publiques, parisienne ou régionales liées ou non à des Centres dramatiques de province, dont trois seulement sont des survivances de tentatives, par le passé, d’inscrire l’enseignement supérieur du théâtre dans les conservatoires : à Paris, par la Classe supérieure des conservatoires d’arrondissement (aujourd’hui l’ESAD), à Montpellier où l’école de Ariel Garcia Valdez garde des liens structurels avec le CNR de Montpellier, tout en agissant dans sa localisation comme au plan pédagogique de manière autonome, à Bordeaux, dans une liaison entre le centre dramatique dirigé par D. Pitoiset et le CNR. II. Les universités
I. Les établissements nationaux Le CNSAD : formé en 1784, réglementé par Napoléon Ier ; établissement public depuis 1946, entièrement subventionné par l’Etat, sous la tutelle du ministère de la culture. Durée des études 3 ans. Grande stabilité de l’enseignement de 1820 à 1946 : apprentissage de disciples comme la mythologie, l’escrime, la langue française…. De 1946 à 1955 : naissance du Conservatoire actuel avec 6 classes de formation individuelle sous la direction d’acteurs chevronnés transmettant leur propre expérience. Peu à peu adaptation aux nouveaux media (télévision, radio, cinéma), à de nouvelles disciplines (droit) et à de nouvelles écritures dramatiques (étrangères et contemporaines). 1968 y a été pour beaucoup. Depuis que les 2 conservatoires, de déclamation et de musique se sont séparés (1946), tout ce qui concerne la voix chantée a été négligé au CNSAD au bénéfice de l’interprétation. Seul Marcel Bozonnet a eu la volonté d’y remédier. On est soucieux de plus en plus de développer la créativité et la personnalité des élèves en les ouvrant à des connaissances autres que théâtres (musique, chant, cinéma : Marcel Bozonnet ; formation collective, multiplicité des intervenants : Claude Stratz ; sciences humaines : Daniel Mesguich) ENSATT : Fondée à Paris en 1941 ; transférée à Lyon en 1997, où elle bénéficie de locaux très vastes et très modernes, dépend du Ministère de l’Education nationale ; 3 années d’études ; délivre un
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BTS pour chacune des 6 sections : écriture ; comédiens ; régisseursadministrateurs ; décorateurs-scénographes ; costumiers ; éclairagistes–sonorisateurs et 2 sections d’enseignement secondaire : habilleur-réalisateur et machiniste-constructeur. Les enseignants sont des professionnels de chaque branche ou discipline. Ecole du TNS : née en 1954 sous l’impulsion de Michel de Saint-Denis, directeur du Centrer dramatique de Colmar ; école liée intimement au Théâtre de Strasbourg ; forme des acteurs, régisseurs, décorateurs et metteurs en scène destinés à alimenter (à l’origine) les centres dramatiques de province pour la création et la diffusion d’un théâtre d’éducation populaire hors Paris. 3 années d’études : professeurs permanents et intervenants ponctuels (metteurs en scène). Soucieuse de professionnalisation (présentation de spectacles en fin de 3ème année) et d’interdisciplinarité : regroupement en cursus commun de 3 sections distinctes : jeu, régie et scénographie. Le Directeur du TNS est également celui de l’Ecole. I bis. Les Ecoles supérieures publiques Elles sont prises en charge, aux côtés de l’Etat, soit par une ville (ESAD à Paris) soit par un département et une région (ERAC) ; leurs ressources varient considérablement ; la scolarité est gratuite ; les élèves ont le statut d’étudiant ; les écoles sont liées ou non à des établissements de création théâtrale (centres dramatiques : SaintEtienne, Rennes, Bordeaux, Lille). ESAD : Ecole Supérieure d’Art Dramatique de la Ville de Paris, fondée en 2001 (réunit le Pôle supérieur de Paris et Boulogne–Billancourt) ; 3 ans d’études ; concours d’entrée ; à vocation professionnalisante Ecole de la Comédie de Saint-Etienne, fondée en 1982 ; ses élèves sont intégrés intimement à la vie théâtrale du Centre dramatique ; concours d’entrée ; 3 ans d’études. Sa création, sur les fonds du Centre dramatique et avec l’aide de la ville de Saint-Etienne, a donné le branle à d’autres Centres dramatiques qui ont fondé leurs écoles, d’extension et de rayonnement plus ou moins grands Ecole Professionnelle Supérieure d’Art Dramatique de Lille (EPSAD), fondée en 2003 en liaison avec le centre dramatique du Nord ; une promotion tous les 3 ans ; concours d’entrée. Le directeur du Centre dramatique est aussi le directeur de l’Ecole ; il engage des élèves pour les spectacles du Centre Ecole nationale supérieure d’art dramatique de Montpellier émanant du Conservatoire National de Région Académie-école supérieure professionnelle d’art dramatique du limousin, fondée en 2004 et liée au théâtre de l’Union, CDN de Limoges Ecole supérieure de théâtre Bordeaux en Aquitaine (ETSBA), liée au et créée par le Théâtre national de Bordeaux en liaison avec le CNR Ecole supérieure d’art dramatique du théâtre national de Bretagne (TNB), fondée en 1991 et liée intimement au TNB (installée dans ses locaux) ; même directeur, mais autonomie des 2 structures : le directeur pédagogique est seul responsable d’une promotion pendant 3 ans. Travail axé sur la recherche et la jeune création.
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L’enseignement supérieur du théâtre Ecole régionale d’acteurs de Cannes (ERAC), fondée en 1990 par un ancien élève de l’Ecole de Saint-Etienne sous l’impulsion de la Région PACA, a pour spécificité de constituer à la fois un ensemble fermé sur l’étude avec interpénétration des divers enseignements (théoriques et pratiques) et ouvert sur la vie théâtrale (présentation de spectacles d’élèves au Festival d’Avignon et dans des théâtres de la région parisienne). Onze écoles supérieures (CNSAD, ENSATT, ERAC, école du TNS, Conservatoire national de région de Bordeaux, Ecole du TNB, Conservatoire national de région de Montpellier, Ecole du Centre dramatique de Saint-Etienne, l’Ecole professionnelle d’art dramatique de Lille, Académie de l’Union de Limoges, ESAD) ont été reconnues par l’Etat de 2002 à 2008 et ont signé avec le ministère de la culture une plate-forme concernant : une formation unifiée ; la qualification des enseignants ; l’insertion professionnelle ; les modes d’évaluation des élèves ; la mise en place des diplômes. 1 A noter également, le Jeune Théâtre National (JTN) : c’est une structure du ministère de la culture créée en 1971, chargé de faciliter l’entrée dans la vie professionnelle des étudiants sortant du CNSAD et de l’école du TNS. Il fournit des aides à la recherche d’acteurs et au financement de salaires pour des productions, à la présentation de maquette de spectacles, à la rencontre des milieux professionnels, etc... Depuis 2009, il est chargé aussi du développement et de la coordination des différents systèmes d’insertion de l’ensemble des écoles supérieures, mais une inégalité demeure entre les artistes issus de 2 écoles nationales “culture” (qui ont plein accès au JTN) et des autres écoles (qui ne bénéficient pas de l’essentiel de ces avantages : le financement des salaires de comédiens).
II. La formation théâtrale en universités Les universités n’ont pas vocation, traditionnellement pour s’ouvrir directement sur des professions ; mais c’est devenu le cas dans certaines qui ont crée des licences et des masters spécialisés et professionnalisants. L’ambiguïté réside dans la relative incompatibilité d’une formation théorique couvrant l’ensemble d’un cursus universitaire, de la première année de licence au doctorat (ce qui n’existe au complet et de façon autonome des autres disciplines que dans très peu d’universités) et d’une formation pratique désirée par les étudiants mais quasiment impossible à mettre sur pied étant donné le manque de locaux et de financements. Les enseignants sont des universitaires, spécialisées en théâtre théorique et (parfois) pratique, et des professionnels chargés de cours La plus ancienne est l’Université Paris III qui dès 1962 a séparé ses enseignements de théâtre de la littérature et qui a constitué, épaulée par sa Bibliothèque Gaston Baty (très bien pourvue), à l’Institut d’Etudes théâtres (IET) une filière complète d’enseignement et de recherche, y compris avec des formations professionnalisantes. Ont suivi les Universités Paris X-Nanterre, Paris VIII-Saint-Denis tournée vers la pratique et la créativité, et maintes universités de 1 cf. la “Plate-forme de l’enseignement supérieur pour la formation du comédien”, disponible sur le site du JTN: http://www.jeune-theatre-national.com/pdf/plate_forme.pdf Cette version n’inclue pas dans les signatures l’Académie de l’Union (Limoges) et l’ESAD (Paris)
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province dont les études théâtrales relèvent de départements intégrés, soit dans les arts (danse, cinéma, arts plastiques), soit dans la littérature. C’est le cas à Strasbourg, Lyon, Lille…
III. Regards et questionnement sur les chantiers des 10 dernières années Les chantiers principaux ont été le développement de l’enseignement initial (notamment avec la rénovation du Schéma d’Orientation Pédagogique et une meilleure qualification des enseignants avec les diplômes DE, CA) et un travail avec l’ensemble des écoles supérieures... D’une part un travail sur le Schéma d’Orientation Pédagogique SOP, qui concerne l’enseignement initial en conservatoires : Le premier avait été écrit dès 1992... Mais, n’étant ni une priorité ni un enjeu réel, il n’est sorti qu’en 1996, acte pionnier défendant l’existence de classes de théâtre face à l’énorme appareillage « musique ». Ce n’est qu’au début des années 2000 que l’on commence à parler “à égalité” des 3 enseignements (musique, danse, théâtre) au sein de la DMDTS et que peut s’engager une ré-écriture. Un groupe assez large (avec entre autres, administration centrale, Drac, directeurs de conservatoire, enseignants théâtre et différents acteurs de renom du monde du théâtre et de son enseignement) travaille pour arriver au “SOP” de 2001 qui peut être considéré comme le schéma fondateur de l’enseignement théâtral. Il sera légèrement mis à jour en 2005-2006 2 (suite à la loi de décentralisation de 2004). On travaille actuellement à sa ré-actualisation. Dans la même dynamique, se créent ensuite le D.E. : deux sessions en 2005 puis 2009 et 600 lauréats sur près de 1800 candidats, une nouvelle session du CA en 2008 (le dernier datait de 1992...), avec 100 lauréats sur 300 candidats. Pour le moment, il n’y a toujours pas de formation pour ces diplômes, elle est seulement en train de naître et s’organiser. D’autre part un travail sur l’enseignement supérieur puis des réformes : La première étape tient dans la “Plate-forme de l’enseignement supérieur pour la formation du comédien” de 2002, en amenant les écoles supérieures à parler d’un diplôme (pas la chose la plus facile 3 !), à penser ensemble ce qui les rassemble et ce qui les singularise, 2 Voir les schéma de 2001 et 2005-2006 : http://www.udem33.fr/images/stories/textes/scema_ theatre_2001.pdf http://www.culture.gouv.fr/culture/infos-pratiques/formations/schema-theatre2006.pdf Ainsi que le témoignage de Pascal Papini (journée “Renc’Arts”/ARTe[F]act du 24 mai 2011 (pp11-14) : http://www.sauvonslenseignementartistique.fr/phocadownload/JRrencartsDoc110524.pdf 3 Voir par exemple les échanges dans Le Monde à l’été 2009 à propos du DNSPC (diplôme national supérieur professionnel du comédien) et des distinctions d’appellation “nationale” vs. “régionale” qui n’ont plus de sens aujourd’hui mais qui sont encore très présentes dans les esprits. Ce n’est pas la même époque mais cela peut donner une idée des difficultés : http://www.anpad.fr/pages/index.php?id=750
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L’enseignement supérieur du théâtre à décloisonner et commencer la circulation de réflexions partagées, etc. Elle est signée aujourd’hui par 11 écoles et le Ministère. Un certain nombre d’actions étaient programmées telles que la conférence permanente des écoles pour continuer cette dynamique, alimenter la recherche artistique et pédagogique et organiser un discours commun, ou l’affichage des spécificités et particularités de chacune. Elles n’ont pas pu se concrétiser quand s’est imposée la réforme LMD à marche forcée, quand se pose maintenant la “nécessaire” intégration dans des EPCC, sur fond de RGPP...
IV. Plusieurs questions actuellement préoccupantes -Le rôle de l’Etat ? Sa position actuelle qui semble vouloir tordre le réel à sa volonté ne peut pas durer, il faut tenir compte de la réalité et du terrain, modifier les méthodes de prise de concertation et de décision,... Il est aussi nécessaire que l’Etat accepte que décentraliser, c’est changer de rôle. L’administration centrale ne peut plus gérer et maîtriser indépendamment ce qu’elle transfère aux différentes collectivités territoriales, mais doit plutôt s’occuper de péréquation sur l’ensemble du territoire et veiller aux possibilités de diversité des parcours et des profils. Se pose aussi la question de l’autonomie pédagogique dans les différents domaines au sein des grands regroupements pluridisciplinaires programmés (les EPCC) : il ne suffit pas de la proclamer pour qu’elle existe, elle a besoin de vraies garanties, y compris budgétaires. - La place du métissage des arts et la pluridisciplinarité ? Faire du théâtre regroupe tout un ensemble d’activités, souvent tenus en même temps, et/ou à tour de rôle par plusieurs personnes, et/ou par la même personne tout au long de son parcours. Et de plus en plus de créations mélangent les arts... Comment mieux prendre cela en compte dans l’ensemble des formations ?
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- La séparation entre écoles et lieux d’action et de création ? Le surajout de structures administratives (la création des EPCC) risque d’éloigner les lieux de formation de ceux de création quand jusqu’ici ces lieux (CDN) les accueillaient et encadraient. Ces liens sont extrêmement riches, que vont-ils devenir ? - La place de l’université ? Qu’on peut entendre de deux manières : l’université face aux écoles spécialisées comme évoquée au point II. Et aussi : l’université en lien avec les écoles spécialisées, relation rendue obligatoire par le niveau Licence. L’histoire française est assez différente des universités anglo-saxonnes où il existe une longue histoire partagée d’une liaison “naturelle” université / école d’arts. Michel Corvin – 6 novembre 2011. Professeur honoraire d’université (Sorbonne nouvelle, institut d’études théâtrales), enseignant à l’ERAC (Ecole régionale d’acteurs de Cannes), maître d’oeuvre du “Dictionnaire encyclopédique du théâtre” (Bordas, 2008).
“We need more fellowship for our students, and schools need to stop their grandiose expansion plans, consider their appropriate scale, and charge less for the education they provide as a civil act of cultural disobedience.” Ernesto Pujol, “On the ground, Practical Observations for Regenerating Art Education”, Art Schools (Propositions for the 21st century)”, Steven Henry Madoff ed., p. 8 « Nous avons besoin de plus de fraternité pour nos étudiants, les écoles ont besoin d’arrêter leur projets de développement grandiloquents, de prendre en considération leur échelle propre, et de moins faire payer l’enseignement qu’elles prodiguent, en guise d’acte de désobéissance civile. » Traduction JCBA ______________________________________________________________
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L’enseignement supérieur de la musique
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susceptibles d’être utilisées à l’identique dans ces succursales dans une logique d’égalité républicaine. Au-delà de nombreuses « méthodes » (au sens d’ouvrages écrits) 4 , l’un des dispositifs pédagogiques le plus connu issu de cette logique jacobine fut le « solfège à la française », dont il faudra attendre l’année 1977 avant qu’il ne soit officiellement revisité profondément sous le nom de « Formation musicale générale ». Ces succursales ne s’implantèrent en définitive que très progressivement sur l’ensemble du territoire national.
Eric SPROGIS L’enseignement supérieur en France (hors du champ artistique) se définit par rapport à celui qui le précède 1. Si l’on voulait retenir ce critère s’agissant de l’enseignement supérieur de la musique, au moins jusque dans la dernière partie du 20ème siècle, force est alors de constater…qu’il ne peut précisément pas être défini… En effet, dans la réalité et, dirons-nous, dans les idéologies à l’œuvre dans notre domaine, c’est pratiquement l’inverse qui a présidé à son développement et qui rend, aujourd’hui encore, profondément problématique, voire polémique, toutes les tentatives de le structurer, d’en définir les contours et les exigences. Nous choisirons, pour saisir les mouvements qui nous agitent aujourd’hui à ce sujet, de reprendre l’historique depuis la fin du 18ème siècle en inscrivant le propos dans le cadre global de l’ensemble des institutions d’enseignement musical dans la mesure où tout est lié, où tout fut lié jusqu’au début de notre siècle. Jusqu’à la fin du 18ème siècle, l’enseignement généralisé de la musique en France se présente de manière assez semblable à celui de l’ensemble de l’Europe avec un ensemble de maîtrises, essentiellement religieuses, réparties sur le territoire du royaume. Elles se chargent, sous l’Ancien Régime, de repérer et de former des enfants aux qualités vocales et musicales reconnues et touchent des « publics » de toutes catégories sociales, avec notamment des efforts particuliers pour les enfants dont les familles sont sans ressource. En 1789, la Révolution Française mit fin aux maîtrises 2. Fut alors conçu un nouveau système d’enseignement de la musique en créant le Conservatoire de Paris 3. Chargé à l’origine de fournir des musiciens aux orchestres parisiens (de la musique de la Garde nationale aux orchestres symphoniques et d’opéra), le Conservatoire de Paris privilégia l’enseignement instrumental et vocal soliste, ce qui caractérisa ensuite et pendant longtemps l’enseignement des conservatoires en France. La création du Conservatoire de Paris était accompagnée d’un plan de développement d’établissements sur le territoire, conçus grosso modo sur le même modèle pédagogique. On les nomma « succursales du conservatoire de Paris ». C’est pourquoi, outre sa mission de formation de l’ « élite des musiciens de la Nation », le Conservatoire de Paris élabora des méthodes d’enseignement 1 L’enseignement supérieur en France peut se définir comme l’ensemble des formations qui conduisent à une poursuite d’études après le baccalauréat, premier grade de l’enseignement supérieur 2
Elles seront restaurées en partie après le Concordat
3 Projet élaboré sous la Convention et fondé par un décret du Directoire le 3 août 1795 (16 thermidor an III).
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Création d’écoles de musique au 19ème siècle : 1802 : Lille 1806 : Douai 1818 : Abbeville 1820 : Roubaix, Toulouse 1821 : Marseille 1822 : Cambrai 1828 : Arras 1830 : Boulogne-sur-Mer, Clermont-Ferrand 1831 : Amiens 1832 : Bagnères-de-Bigorre 1835 : Caen, Metz, Nancy, Rodez, Valenciennes 1836 : Limoges, Saint-Omer 1839 : Saint-Etienne 1842 : Perpignan, Tourcoing 1844 : Nantes 1845 : Dijon 1849 : Aix-en-Provence 1852 : Bordeaux 1853 : Saint-Quentin 1855 : Strasbourg 1857 : Angers 1860 : Besançon 1872 : Lyon 1882 : Le Mans 1900 : Toulon En 1884, quatre écoles sont érigées en succursales du conservatoire de Paris (Avignon, Le Havre, Nancy et Rennes), quinze sont nationalisées (Aix-en-Provence, Bayonne, Boulogne-sur-Mer, Caen, Chambéry, Digne, Douai, Le Mans, Nîmes, Perpignan, Roubaix, Saint-Etienne, Saint-Omer, Tours et Valenciennes). (Source : Philippe Lescat, L’enseignement musical en France de 529 à 1972, Editions Fuzeau, 2001)
Ainsi, cet ensemble d’établissements « de province », que l’on appellerait « classés » aujourd’hui, étaient en quelque sorte des déclinaisons de celui de Paris. Ce dernier évoluera rapidement vers une unique mission de formation de musiciens professionnels dont ce fut bientôt la fonction principale sinon unique. Les conservatoires « nationaux » conservèrent pourtant cette référence qu’aucun texte n’imposait. Mais, pour autant le conservatoire de Paris ne devint « supérieur » que par son évolution historique puisque le baccalauréat, créé en 1808, ne le concerna pas jusqu’au début du 21ème siècle. 4 Lire à ce sujet l’ouvrage de Jean-Claude Lartigot, L’apprenti instrumentiste : la musique sur mesure ? Editions Van de Velde, 1999
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Dans la mesure où cet établissement fut unique en France jusqu’à la création du CNSMD de Lyon en 1979, que l’admission des « élèves » se faisait par le biais d’un concours de plus en plus sélectif et qu’ainsi, mécaniquement, leur profil était obligatoirement de haut niveau, son caractère « supérieur » n’était pas contestable dans les faits 5. Mais l’ambiguïté perdurera longtemps (et perdure encore dans l’esprit de certains) en ce qui concerne l’amont de cet enseignement. En effet, les conservatoires « de province », en particulier ceux que l’on appelait jusqu’en 2006 « conservatoires nationaux de région », construits sur le modèle hérité des « succursales du conservatoire de Paris », enseignaient à de nombreux élèves qui, de fait, auraient dû relever d’un enseignement supérieur mais dont les faibles capacités d’accueil des CNSMD de Paris et de Lyon ne permettaient l’accueil. Cette « mission » non officielle (certains parlèrent d’ « enseignement supérieur sauvage ») répondait à des demandes fortes de la part des usagers et à des besoins réels de la vie musicale. Nous savons par exemple qu’une grande majorité de professionnels (titulaires d’un diplôme national d’enseignement, artistes interprètes classiques permanents ou non…) ne sont pas « passés » par l’un des CNSMD, sans parler évidemment de tous les artistes qui exercent dans le monde des musiques actuelles, du jazz, de la variété, de la création multimédia auquel les conservatoires supérieurs ne se sont, pour l’instant, que timidement ouverts. Mais cette fonction assurée notamment par les CNR (CRR aujourd’hui) des plus grandes agglomérations, doit être confrontée au fait qu’ils sont, pour la plupart, en gestion communale ou intercommunale et qu’elle entrait indiscutablement en conflit avec leur mission d’accueil des ressortissants de la collectivité gestionnaire. Il faut alors rappeler une donnée invraisemblable : à l’exception du décret de fondation du Conservatoire de Paris (3 août 1795) aucun autre texte réglementaire et a fortiori législatif relatif à l’enseignement musical spécialisé ne fut publié…jusqu’à la fin des années 1960 ! Cela ne fut pas sans conséquence et, notamment, celle de reproduire dans les « conservatoires et écoles de musique de province » une conception de l’enseignement artistique calqué sur un modèle implicite, celui du conservatoire supérieur de Paris : enseignement prioritairement individuel avec la référence ultime de la perspective professionnelle, modalités sélectives d’évaluation des élèves, mise à l’écart des démarches d’invention et d’improvisation… Ce modèle est aujourd’hui remis en cause même s’il perdure dans certains établissements. En effet, ce modèle centralisé ne pouvait à terme qu’entrer en contradiction avec la gestion locale de l’établissement. Au fur et à mesure que l’enseignement artistique a commencé à être pris en compte dans les politiques culturelles des communes, l’insertion du conservatoire dans la vie locale, en appréhendant ses spécificités sociologiques, économiques voire politiques est devenue, notamment depuis une trentaine d’année, une préoccupation des élus et de beaucoup de professionnels, par exemple vis-à-vis de la pratique amateur. Ce n’est que par l’article 101 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, que, pour la première fois, 5 Même si, institutionnellement, cette reconnaissance mit du temps à se faire. On peut, par exemple, relever que le CNSMD de Lyon, lors de sa création en 1979, fut le premier à parler d’étudiants et non d’élèves à propos de ceux qui étaient admis. Ce n’est qu’avec la réforme récente de l’enseignement supérieur musical que cette qualification fut officiellement reconnue.
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furent définis les niveaux de l’enseignement artistique du spectacle vivant, les établissements chargés de celui-ci et la responsabilité respectives des collectivités. Ainsi furent précisés trois niveaux : - L’enseignement initial : de l’éveil jusqu’à une pratique autonome (de type amateur) - L’enseignement à orientation professionnelle permettant aux élèves de confirmer ou d’infirmer leurs choix d’un futur enseignement supérieur - L’enseignement supérieur. La gestion, la conception, le financement des deux premiers niveaux sont confiés aux collectivités territoriales. L’habilitation des établissements d’enseignement supérieur et la qualification des diplômes nationaux supérieurs sont confiées à l’Etat (ainsi que le contrôle et l’évaluation des établissements chargés de l’enseignement initial). Il faudra ensuite attendre la fin 2006 pour qu’un décret et un arrêté définissent les conditions de classement par l’Etat des structures chargées de ce qui ne relève pas de l’enseignement supérieur. Par décrets, en 2007 et en 2008, l’Etat – enfin – précisait la nature et les modalités de l’enseignement supérieur musical : des établissements autonomes juridiquement, des diplômes nationaux supérieurs inscrits au registre national des certifications professionnelles, l’articulation avec l’harmonisation européenne (déclaration dite « de Bologne ») impliquant un lien structurel avec l’Université et entre les diplômes professionnels et les Licences/Masters/Doctorats.6 La construction de cet appareil nouveau d’enseignement supérieur ne fait que commencer, dans un contexte (ou une absence de volonté politique forte) marqué par de faibles dotations budgétaires. Elle est donc soumise aux moyens mis en œuvre par les collectivités territoriales (principalement les Régions) au prix de multiples concertations, compromis et aménagements selon la nature des projets (que l’on appellera, pour tenir compte précisément de cette nécessité de mobiliser et d’agréger de nombreuses ressources existant sur le terrain, des « pôles d’enseignement supérieur »). Cette dernière donnée est particulièrement problématique car elle amène, dans un nombre significatif de ces nouveaux « pôles » à ne pas identifier nettement les établissements relevant de l’enseignement initial et de l’enseignement supérieur proprement dit 7. Deux autres points, étroitement liés, d’analyse – et de polémique – sont à relever dans cette mise en œuvre quelque peu chaotique. Chargé par l’histoire des conservatoires d’un poids très lourd quant au modèle d’enseignement, l’enseignement supérieur de la musique reste marqué profondément en France, d’une part, par la référence culturelle « classique » alors que l’on sait que la majorité des métiers de la musique (et autour de la musique) sont aujourd’hui majoritaires dans les autres esthétiques. D’autre part, il semble très difficile de revoir la notion d’excellence (inséparable de celle d’enseignement supérieur) autrement que par la référence à celle qui préside dans les conservatoires supérieurs 6 A noter cependant que la question des correspondances avec le master et surtout le doctorat est loin d’être encore réglée 7 Ce que devrait cependant régler l’obligation faite à ces derniers établissements de se constituer en Etablissements Publics de Coopération Culturelle, autonomes vis-à-vis des collectivités territoriales…mais dont elles sont souvent les partenaires financiers principaux
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L’enseignement supérieur de la musique (dont nous avons dit comment elle était déterminée avant tout par la sélectivité qui préside à l’admission des étudiants). Tout se passe donc comme si l’on ne pouvait se résoudre à accepter qu’en France un enseignement supérieur « moyen » puisse exister à côté d’un enseignement « d’élite », à l’instar des grandes écoles littéraires ou scientifiques à côté des nombreux cycles universitaires. D’autant qu’un grand nombre de métiers et de fonctions (en particulier dans le secteur de l’enseignement) ne seront que rarement pourvus par ces « élites ». Dans ce contexte, il parait très important d’évoquer le cas particulier de l’orientation professionnelle. Dans le domaine musical, ce segment du parcours de formation doit être considéré comme fondamental. En effet la perspective professionnelle pour un « apprenant » en musique est très souvent un itinéraire personnel progressif qui ne devrait pas être trop précoce pour ne pas figer les objectifs dans la seule direction d’un métier aux débouchés incertains et, en même temps, nécessite un engagement, un travail personnel commencé très tôt (en tous cas pour les disciplines les plus « classiques »). Le processus d’orientation et l’accompagnement des choix des élèves doivent donc être particulièrement assurés. Si l’on répète par ailleurs que l’enseignement supérieur musical n’avait pas vu défini, pendant près de deux siècles, son seuil d’accès, on ne pouvait que se réjouir de voir fixé par la loi (13/8/2004) un cycle spécifique d’orientation professionnelle, le CEPI (cycle d’enseignement professionnel initial). Nous ne reviendrons pas ici sur les diverses raisons, bonnes ou mauvaises (plutôt mauvaises que bonnes d’ailleurs) qui ont empêché la généralisation de ce dispositif bienvenu sanctionné par un Diplôme National d’Orientation Professionnelle (DNOP) à l’exception de deux régions françaises (Poitou-Charentes et Nord-Pas-de-Calais). Il est patent cependant qu’une réforme de l’enseignement supérieur musical ne peut/ne pouvait être mise en place qu’après avoir réglé la question de son « amont », ce que permettrait la généralisation d’un véritable cycle d’orientation professionnelle, cadré dans un dispositif réglementaire comme cela était le cas pour le CEPI 8. Après bien des débats plus ou moins maitrisés, plus ou moins rationnels, engagés depuis 2000, les options déterminantes pour la structuration de l’enseignement supérieur sont désormais tranchées : - Autonomie juridique des établissements (pôles d’enseignement supérieur) - Articulation avec l’enseignement universitaire dans le cadre de l’harmonisation européenne des cursus et des diplômes - Référentiels nationaux des diplômes - Seuil d’admission (baccalauréat et DNOP ou Diplôme d’Etudes Musicales) Mais chacun sait que la clarification juridique (certes indispensable) ne peut devenir effectivement opérationnelle sans modification des cultures professionnelles latentes ou explicites. Sur ce point le chemin est encore long avant que l’on soit en mesure de présenter, de manière globale et cohérente, un schéma national de l’enseignement supérieur qui fasse consensus et qui lève tous les malentendus. D’autant que le statut et, tout simplement, la place des formations pédagogiques 9 (débouchant pourtant sur 8 Arrêtés du 25 février 2007 relatifs au cycle d’enseignement professionnel initial pour la musique, la danse et le théâtre. 9
Assurées, depuis la fin des années 1980, par des cen-
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les métiers les plus directement accessibles et les plus répandus) se heurtent encore à d’innombrables problèmes à la fois de reconnaissance et de compatibilité avec les statuts actuels de la fonction publique ainsi qu’à une véritable prise en compte des évolutions de la situation de la musique au 20ème siècle qui ont bouleversé les conditions de développement de ce mode d’expression. En effet, trois crises ont secoué au siècle dernier les certitudes pédagogiques des musiciens et de leurs enseignants… ou auraient dû les secouer plus tôt car il faudra en effet attendre la fin du 20ème siècle pour les voir prises en compte dans l’organisation, les méthodes et les contenus de l’enseignement spécialisé. La première crise, que l’on pourrait appeler « esthétique » s’est produite au tout début du siècle, avec, d’une part, la rupture possible avec le système tonal et le principe d’attraction et de polarité qui déterminait la plupart des langages musicaux jusque là ; et d’autre part l’arrivée en Europe de musiques issues d’autres cultures, d’Orient ou d’Afrique par exemple, et surtout du jazz et de ses divers dérivés. Si l’on met en perspective le fait que des musiciens comme Ravel ou Stravinsky – pour ne citer qu’eux – ont intégré des références au jazz dans des œuvres des années 25-30 et qu’il faudra attendre 1984 pour que cette pratique musicale ait officiellement sa place dans l’enseignement musical, on mesure combien le temps de réaction des institutions est long. La deuxième crise pourrait être nommée « démocratique ». On peut en placer le point de départ au début des années 1950, avec l’idée naissante que l’enseignement artistique doit être considéré comme un droit pour tous. Nous ne prétendons pas ici, bien entendu, que, par exemple en 1930, une règle réservait l’accès des conservatoires aux seuls enfants des classes favorisées socialement ou familialement, mais cette idée était largement répandue et presque acceptée. Nous ne disons pas non plus qu’aujourd’hui la plus large démocratisation de l’enseignement spécialisé est établie. Mais le principe est affirmé et l’action en faveur de cet élargissement est désormais inscrite dans tous les textes officiels et de nombreuses actions et dispositifs visent cet objectif. De ce fait, tout au long de ces cinquante dernières années, et tout particulièrement depuis dix à quinze ans, c’est un public entièrement nouveau – quantitativement et qualitativement – qui fréquente les conservatoires et les écoles de musique, avec souvent d’autres attentes, d’autres exigences, d’autres cultures. La troisième crise, dont les effets sont de brûlante actualité, pourrait être qualifiée de « technologique et économique ». C’est l’essor, toujours en cours, des moyens mécaniques puis informatiques de conserver, reproduire, créer, diffuser, vendre, télécharger, transformer la musique. De la bande magnétique au MP3, en passant par le microsillon et le disque compact, de la radio à l’internet en passant par la télévision, le modèle du professeur d’instrument dans sa classe, meilleur exemple de pratique musicale qu’il soit donné à l’élève d’entendre, a volé en éclat. C’est la possibilité d’entendre et de réentendre les musiques que l’on tres de formation spécialisée : Centres de Formation des enseignants de la musique (CEFEDEM, sous la tutelle du Ministère de la culture) et Centres de Formation des Musiciens Intervenants à l’école (CFMI, sous la tutelle conjointe des Ministères de l’Education Nationale et de la Culture)
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aime, de découvrir les œuvres de toute l’humanité à tout moment. C’est aussi l’inscription des produits musicaux dans une économie mondiale, une conception de la protection des auteurs en plein bouleversement comme le montrent les turbulences de l’adoption de la loi HADOPI par exemple. C’est aussi, grâce aux possibilités de créer et de diffuser sa propre musique de chez soi, la première fois que les élèves sont susceptibles de maîtriser une technique particulière mieux que leur professeur. A ces trois grandes révolutions qui touchent au plus profond la manière d’appréhender l’enseignement de la musique, il convient d’ajouter les évolutions importantes dans le pilotage des établissements avec le rôle grandissant – et parfois même exclusif – des collectivités territoriales qui, d’une part financent l’essentiel de leur coût (souvent même la totalité) et, d’autre part, contribuent à ce que l’enseignement artistique s’inscrive au plus près des réalités locales.
du Conservatoire de Poitiers puis responsable de l’enseignement artistique à la Région Poitou-Charentes. Aujourd’hui, entre la direction d’orchestre, la composition et des actions de formation et de consultant auprès de collectivités territoriales. Auteur de “Collectivités locales et enseignement artistique : enjeux pédagogiques, culturels et politiques” (Territorial Editions, 2010).
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Le système français de l’enseignement artistique paraît donc agité, presque dès ses origines, par un double mouvement contradictoire : une tradition (quasiment une culture professionnelle) de référence centralisée 10 et une prise en compte toujours plus grande des exigences locales. Le système français d’enseignement artistique est, on le sait, paradoxal. Conçu au 19ème siècle sur le modèle jacobin du conservatoire de Paris, il a de fait – pour l’enseignement de base – toujours été décentralisé entrainant des conflits de compétences, de pilotage, de financement, des contradictions entre missions d’intérêt national et enjeux locaux, des tensions fortes pour déterminer si les conservatoires devaient être d’abord au service de l’art ou à celle des individus qui viennent y chercher une formation et un épanouissement personnels. La loi LRL du 13 août 2004, dans son article 101, a, pour la première fois esquissé une clarification bienvenue après des décennies de réflexions sur le sujet. La création du CEPI a permis de définir enfin sur le plan national ce segment essentiel de l’orientation professionnelle avec un double effet volontaire et pertinent, à la fois en sortant de l’ambiguïté des anciens Diplôme d’Etudes Musicales, Chorégraphiques ou Théâtrales (DEM-DEC-DET) visà-vis de l’enseignement supérieur et vis-à-vis de l’enseignement initial. Cela aurait dû permettre de « dégager le terrain » pour (re)construire un enseignement supérieur à la fois cohérent et décentralisé. La légèreté avec laquelle la question des incidences budgétaires a été traitée explique pour une large part les blocages rencontrés. Mais c’est aussi parce que l’enjeu est une remise en question complète et positive des modèles historiques de gestion et de pilotage. Eric SPROGIS – 12 octobre 2011 Ancien professeur puis directeur des études musicales au CNSMD de Lyon, puis directeur délégué de l’Institut de Pédagogie Musicale et Chorégraphique. Pendant plus de 20 ans directeur
10 La création d’un deuxième Conservatoire Supérieur à Lyon en 1979 perturbera quelque peu cette référence, mais en partie seulement, dans l’imaginaire du milieu professionnel.
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“I would like to put forward the notion that art school should be the conscience of the art world.” Ernesto Pujol, “On the ground, Practical Observations for Regenerating Art Education”, Art Schools (Propositions for the 21st century)”, Steven Henry Madoff ed., p. 9 « J’aimerais avancer l’idée que les écoles d’art devraient être la conscience du monde de l’art. » “Here we might want to recall Theodor Adorno’s remark: ‘In every work of art something appears that does not exist.’ He elaborates: ‘Quite possibly the non-existent suddenly rises in works of art, but they cannot take hold of it bodily in one fell swoop. In art, the non-existent is mediated by fragments of the existent, gathered up in an apparition.’ We can teach Adorno’s text, but can we teach the ways in which the existent and the non-existent are gathered into a work of art?” Ann Lauterbach, “The Thing Seen, Reimagining Art Education for Now”, p. 88, Art Schools (Propositions for the 21st century)”, Steven Henry Madoff ed. « Nous aimerions ici, rappeler la remarque de Theodor Adorno : “Dans toute œuvre d’art apparaît quelque chose qui n’existe pas.” Il développe : “Sans doute le non-existant s’élève-t-il soudain des œuvres d’art, mais elles ne peuvent s’en saisir physiquement d’un seul coup. En art, le non-existant est relayé par des fragments d’existant ramassés dans une apparition.” Nous pouvons enseigner le texte d’Adorno, mais pouvons-nous enseigner la manière dont l’existant et le non-existant s’assemblent dans une œuvre d’art ? » Traductions JCBA __________________________________________________________
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Le projet Humart
HUMART projet européen Jacques MOREAU Par la Déclaration de Bologne signée par les ministres européens de l’éducation en 1999, l’espace européen de l’enseignement supérieur était créé. Afin de le structurer, des universitaires ont pris leur destinée en main et obtenu de la Commission de Bruxelles des financements pour lancer en 2000 un vaste projet à l’échelle européenne, le projet TUNING. Ce projet se poursuit toujours. Il a ouvert un volet particulier en 2010 pour s’intéresser plus particulièrement au secteur des sciences humaines et des arts, le projet HUMART. Au sein de l’université, ces disciplines sont souvent les parents pauvres - ou en voie d’appauvrissement - mais elles jouent un rôle important, alternative aux sciences « dures » pour la formation d’esprits créatifs. C’est cette dimension de « création » qui unit les disciplines des arts - Architecture, Beaux-Arts et Design, Danse et Théâtre, Musique – et c’est en l’affirmant que ces disciplines tentent de formuler une définition commune des compétences attendues de leurs diplômés. Ce travail est en cours.
Le projet TUNING Le projet européen HUMART, qui concerne les disciplines des humanités et des arts, s’inscrit dans le vaste projet européen dénommé TUNING. A la suite de la déclaration de Bologne, le monde de l’enseignement supérieur européen doit faire face à toutes les conséquences de cette déclaration et en envisager toutes les implications. Pour ce faire, dès 2000, le projet européen TUNING a été initié par l’Université de Deusto en Espagne, en partenariat avec l’Université de Groningen aux Pays-Bas et financé par la Commission Européenne. Son objectif était donc de mener un travail avec des universitaires représentants l’ensemble des pays concernés, afin qu’ils définissent ensemble les moyens permettant à l’enseignement supérieur européen de rejoindre les objectifs politiques du Processus de Bologne 1, auquel se sont ajoutés très rapidement ceux de la Stratégie de Lisbonne 2. 1 Pour le processus de Bologne, se référer au sites suivants : « www.ond.vlaanderen.be/hogeronderwijs/bologna/ » « europa.eu/legislation_summaries/education_training_ youth/lifelong_learning/c11088_fr.htm » 2 Pour la Stratégie de Lisbonne, se » référer au sites suivants : « ec.europa.eu/education/lifelong-learning-policy/doc28_ en.htm » « ec.europa.eu/education/lifelong-learning-policy/doc28_ fr.htm »
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Dans un premier temps, neuf disciplines ont été choisies pour participer à ce projet : Etudes commerciales (« Business »), Chimie, Sciences de la terre, Education, Etudes européennes, Histoire, Mathématiques, Formation des infirmières, Physique. De 2000 à 2004, les groupes de travail issus de ces disciplines ont mis au point une méthodologie qui définissait une approche des différentes phases nécessaires au développement des cursus des 1er, 2e et 3e cycles de l’enseignement supérieur : conception et développement, mise en œuvre, évaluation et amélioration de leur qualité. La question de l’attibution des points de crédits a fait l’objet d’une attention particulière, notamment pour ce qui concernait la notion de « travail de l’étudiant » : prise en compte non plus seulement du nombre d’heures de cours, mais de l’ensemble des activités (cours compris) que doit développer un étudiant pour réussir son cursus. Ainsi, il a été convenu qu’une année d’enseignement supérieur représenterait 60 ECTS, soit 180 ou 240 pour le 1er cycle (qui peut s’effectuer en 3 ou 4 ans) et 60 ou 120 ECTS pour le 2e cycle (qui, selon la durée du 1er cycle, peut s’effectuer en 1 ou 2 ans) ; de même, un ECTS représenterait environ 25 heures de travail-étudiant, soit un total d’environ 1500 heures par an. Le travail des groupes a également porté sur le notion importante de « cursus fondés sur des compétences » ; une méthodologie a été développée pour expliquer comment en mettre en œuvre les principes. En 2004, afin d’étendre la démarche entreprise, d’autres disciplines ont été ajoutées aux neuf premières, portant leur nombre à trente-trois. Parmis ces disciplines figuraient celles du secteur artistique : Architecture, Beaux-Arts et Design, Danse et Théâtre, Musique. Les disciplines des Arts visuels, la Danse et le Théâtre ont mené leur recherche de façon conjointe, étant déjà regroupées dans l’association ELIA (European Ligue of Institutions of Arts). La Musique est représentée par l’Association Européenne des Conservatoires (AEC), qui regroupe aujourd’hui environ 250 institutions européennes d’enseignement supérieur. Cette association avait, dès l’année 2000, conduit un travail important qui avait abouti à une définition d’objectifs pédagogiques communs pour le 1er cycle (Bachelor) et 2e cycle (Master) ; ces « objectifs pédagogiques de l’AEC pour les 1er et 2e cycles » avaient été adoptés en 2003 par tous les membres lors de l’Assemblée Générale de l’association ; ils ont été affinés et complétés par ceux applicables au 3e cycle. Chaque discipline a ainsi formulé dans un manuel ses caractéristiques propres, tant du point de vue des aspects professionnels des métiers auxquels elle pouvait préparer, que de la définition des cursus et formation y préparant, notamment en terme de compétences attendues par rapport aux Descripteurs de Dublin. Ont été également développés des sujets comme l’amélioration de la qualité, l’accréditation, les études de 3e cycle basées sur la recherche artistique, etc. Tous ces travaux ont fait l’objet de publication par le projet TUNING 3.
Le projet HUMART (2010-2012) Afin de prolonger le travail entrepris, les responsables du Projet TUNING ont souhaité réunir les disciplines relevant des Humanités et des Arts avec un certain nombre d’objectifs. Ce pro3 Pour téléharger ces manuels, consulter le site : « www.unideusto.org/tuning/ »
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Le projet Humart jet rassemble des représentants d’institutions d’enseignement supérieur issus de 25 pays européens. Le projet est limité au 31 décembre 2011, ses conlusions doivent être formulées pour Mars 2012. Elles devraient être suivies alors d’une publication. Les objectifs posés au départ étaient les suivants : 1. Un référentiel de compétences sectoriel pour les Humanités et les Arts fondé sur des descripteurs agréés par tous, et couvrant les niveaux 3 à 8 du référentiel européen de qualification pour la formation tout au long de la vie (EQF for LifeLongLearning) ; 2. Un rapport présentant des informations détaillées au sujet de l’apprentissage formel, informel et non formel au cours de l’enseignement secondaire, qui préciserait les filières de formaiton du niveau 3 (fin du collège) au niveau 6 (Licence/Bachelor), ce à un niveau national pour chacun des pays participant mais aussi par comparaison au niveau européen (identification des différences et des points communs) ; 3. Une proposition d’une échelle de points de crédits pour les niveaux 3 à 6 de l’EQF pour la formation tout au long de la vie, en relation avec l’initiative européenne ECVET (European Credits for Vocational Education and Training : « Crédits européens pour la formation professionnelle ») ; 4. Un rapport proposant un lien entre les descripteurs de Dublin et les descripteurs de l’EQF pour la formation tout au long de la vie, pour ce qui concerne le domaine des Humanités et des Arts ; 5. Constitution de groupes de travail pour 4 disciplines non encore concernées par le projet TUNING ; 6. Identification par les disciplines impliquées dans le projet, de zones transfrontalières entre elles et/ou d’aires de recouvrement de différents de leurs champs d’études. Trois rencontres ont eu lieu : Thessalonique (Octobre 2010), Bilbao (Mai 2011) et Bruxelles (Octobre 2011), entre lesquelles les groupes ont poursuivi leur travail. Le projet a ainsi une durée extrêmement courte, faute de financements suffisants. Les travaux sont en toujours en cours ; ils doivent encore être poursuivis, complétés, et, avant d’être définitivement publiés, recueillir un assentiment au-delà des représentants de la communauté universitaire directement impliqués dans le projet. Néanmoins, il est possible d’évoquer certaines des avancées. L’objectif principal était donc, à partir d’un modèle qu’avaient formulé les sciences sociales, de tenter d’établir une définition commune de compétences pour les niveaux 3 à 8 de la grille des qualifications de la formation tout au long de la vie (EQF). Cette grille est organisée en huit niveaux : le niveau 4 correspond à la transition entre enseignement général et université – en France, le Baccalauréat -, le niveau 6 correspond à la Licence (Bachelor), le niveau 7 au Master et le niveau 8 au doctorat ; pour chacun de ces niveaux, elle précise les connaissances, savoir faire et compétences à acquérir. Rapidement, les participants ont compris qu’il serait très difficile, d’une part, d’atteindre l’ensemble des objectifs proposés 4, d’autre part, d’atteindre pour certains d’entre eux un résultat idéal en tenant compte de l’ensemble des disciplines présentes. Néanmoins, ils ont, dès le départ, insisté sur l’importance de 4 Ainsi, par exemple, le référentiel pour les Arts ne devrait être décliné que pour les niveaux 4, 6, 7 et 8 (soit : Baccalauréat, Licence, Master, Doctorat)
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cette démarche qui peut permettre de donner une cohésion à ce secteur, trops souvent mis en danger dans les universités. Ainsi en espèrent-t-ils un possible renforcement de leur position. En ce qui concernait la mise au point d’un référentiel de compétences commun, les participants ont décidé de diviser le travail : sciences humaines, d’une part, et disciplines des Arts d’autre part, ont donc poursuivi des réflexions parallèles. Au sein du secteur des sciences humaines – Histoire, Histoire de l’Art, Linguistique, Littérature, Théologie et études religieuses l’Histoire joue un rôle très actif auprès des nouvelles disciplines, du fait de son implication dès la première heure dans le projet TUNING, leur permettant ainsi de profiter de leur expérience pour avancer au mieux. Au sein du secteur des Arts, toutes les disciplines avaient un niveau d’avancement important, ayant toutes participé au projet TUNING à partir de 2004. Je n’évoquerai que quelques éléments de la réflexion en cours du secteur des Arts. Suite aux deux premières rencontres les groupes de ce secteur – Architecture, Beaux-Arts et Design, Danse et Théâtre, Musique - ont abouti à proposer une architecture spécifique pour un référentiel de compétences commun à leur secteur. Cette proposition vise à donner un sens plus proche de ce qui est au cœur des formations offertes par ce secteur. Cette proposition présente donc une architecture à plusieurs plans : Un cadre général valable pour tous les niveaux du référentiel, qui comprend : une appellation commune pour le secteur qui regroupe ces disciplines ; ensuite un concept spécifique définissant d’une part la finalité de tous les établissements de ce secteur et d’autre part concrétisant la source à partir de laquelle toutes les compétences seront in fine exprimées ; enfin sept dimensions qui déclinent ce concept spécifique. Ensuite, au plan de chacun des niveaux du référentiel, les savoirs, habiletés et attitudes seront à décliner à partir de chacune de ces sept dimensions. Précisons ce cadre général : 1) Appellation commune : « Disciplines des Arts de la Création et de la Scène (Creative and Performing Disciplines) ». Cette appellation commune a semblé aux disciplines de ce secteur correspondre effectivement à chacune d’entre elles ; elle projette ainsi une identité cohérente et reconnaissable. Un essai de définition de ce qu’est une « Discipline des Arts de la Création et de la Scène » a été formulé : Essai de définition des “Disciplines des Arts de la Création et de la Scène” - Ce qu’elles sont : le concept de “Disciplines des Arts de la Création et de la Scène” comprend un ensemble de champs de nature artistique et technique pour lesquelles la créativité, l’interprétation et l’exercice d’un jugement esthétique sont fondamentaux. Ces disciplines impliquent l’invention et la génération d’idées, de formes, d’images, de sons, de structures, de productions scéniques et de textes, qui peuvent être mis en oeuvre pour produire de nouveaux artefacts, espaces, produits ou procédés. - Ce qu’elles partagent et font : Les disciplines des Arts de la Création et de la Scène contribuent à l’expérience de vie en parité avec la science, la philosophie, la technologie. Elles ont la capacité à : persuader, subvertir, célébrer et confronter les traditions ; agir comme un agent culturel puissant ; fonder les aspirations individuelles afin d’aider les individus à apprécier les différences et construire un système
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Le projet Humart cohérent de valeurs. - Spécificités (ce qui les unit et les sépare) : La reconnaissance de ces valeurs communes signifie également, pour chacune des disciplines des Arts de la Création et de la Scène, la reconnaissance des spécificités et caractéristiques propres à chacune d’entre elles.
seront confrontés » qu’il est possible de mettre en œuvre une « conception de la compétence comme mobilisation d’un ensemble de ressources ». Poser dans cet ordre la finalité de ces enseignements, puis les « dimensions » nécessaires pour sa mise en œuvre et seulement après les savoirs attendus relève bien de cet esprit.
2) Concept unifiant, « Création et Créativité . Toutes les disciplines de ce secteur sont convenues de considérer que le cœur de leur activité touche à la création ou la créativité. L’ensemble des compétences qui sont posées comme objectifs de formation découlent de ce concept, à travers les sept dimensions qui sont évoqués ci-dessous, raison pour laquelle il a semblé très important aux représentants des disciplines de ce secteur, d’afficher clairement que toutes les institutions qui appartiennent à ce secteur sont, en premier lieu, consacrées à la création ou la créativité.
Cette proposition des Disciplines des Arts et de la Scène devra être confirmée par les promoteurs du projet Humart. Elle nécessitera d’être complétée par un travail qui, pour chaque niveau, précisera les savoirs correspondants et le niveau de performance attendu. Il appartiendra ensuite à chacune des disciplines de compléter, si nécessaire, ce référentiel commun par des éléments spécifiques à leur domaine.
3) Sept « dimensions » : elles expriment les domaines de compétences indispensables pour réaliser ce concept de « Création et Créativité » : . Fabriquer ; réaliser sur scène (to perform), dessiner, conceptualiser, . Repenser, considérer, et interpréter l’Humain, . Expérimenter, innover et rechercher ; . Théories, histoires et cultures, . Aspects techniques, environnementaux et contextuels ; . Communication, collaboration et interdisciplinarité . Esprit d’initiative et d’entreprise. 4) Les « Savoirs » : à partir de ces « dimensions » - ou domaines de compétences - sont déclinés les Savoirs/Habiletés/Attitudes 5 (savoirs déclaratifs/procéduraux/transférables) qui participent à leur acquisition et à leur réalisation. La démarche ainsi décrite peut sembler anodine, pourtant elle a son importance. Jusque là, il était posé que le référentiel indique, par niveaux, les Savoirs/Habiletés/Attitudes (Knowledge/Skills/Competences) correspondants, avec indication du niveau de performance attendu. La démarche entreprise par les disciplines des Arts et de la Scène illustre le principe « qu’une compétence ne se définit pas à partir de savoirs prédéterminés [mais qu’il faut] partir des situations et des pratiques sociales [pour] en inférer des compétences et identifier les savoirs, habiletés et les attitudes que ces compétences exigent comme mobilisation d’un ensemble de ressources » que souligne Philippe Perrenoud 6. Philippe Perrenoud 7 précise par ailleurs que c’est en cherchant « à savoir à quels problèmes les futurs adultes
Par cette proposition d’architecture, les participants ont cherché à donner un sens à ce tableau, à montrer comment il est issu de la réalité de leurs métiers et l’exprime de façon plus évidente. Par cette démarche qui tentait de trouver ensemble une cohérence nouvelle pour cet exercice, ces disciplines ont posé le principe fondateur d’un terrain de rencontre au niveau de la formation supérieure. Par l’affirmation de définitions et d’un discours communs, les représentants de ces disciplines ont tenté de mettre en valeur ce qui les unissait, ce qui constituait la spécificité de leur secteur. Ce processus a ce mérite, non des moindres… Jacques Moreau Directeur des études du CNSMD de Lyon de 2002 à 2007, et son représentant à l’Association Européenne des Conservatoires (AEC), collaborateur du projet Polifonia 1 (dans le cadre du projet Tuning) de 2004 à 2007. Directeur du Cefedem Rhône-Alpes depuis 2007, et son représentant à l’AEC en participant au projet Polifonia 2 (2007-2010), ainsi que collaborateur régulier du projet INVITE (International Network for Vocal and Instrumental Teachers Education, groupe de travail européen consacré à la formation des enseignants de musique et de chant). Actuellement participant au projet HUMART (2010-2012). Par ailleurs, examinateur externe au Royal College of Music de Londres pendant 4 ans (2007-2011).
5 Selon la terminologie employée par P.Perrenoud (Cf notes suivantes). Proche de la terminologie anglo-saxonne - Knowledge/Skills/ Competences - employée par le projet Humart, cette terminologie traduit bien le sens que les participants concernés ont donné à ces termes. 6 P. Perrenoud (2011), Quand l’école prétend préparer à la vie… Développer des compétences ou enseigner d’autres savoirs ?, Pédagogies, ESF, p.26 Philippe Perrenoud, sociologue, est professeur à l’Université de Genève et co-animateur avec Monica Gather Thuder du laboratoire de recherche Innovation-Education-Formation (LIFE). 7 Ibidem. N° 06 • Novembre 2011
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Cours minimal sur la poésie contemporaine Entretien Jean-Charles Agboton-Jumeau
Julien Blaine Jean-Charles Agboton-Jumeau : Ton dernier ouvrage est significativement intitulé : Cours minimal sur la poésie contemporaine. Mais il est expressément sous-titré Manuel à l’usage des étudiants des facultés de lettres et ceux des écoles des beauxarts. Sous entends-tu d’emblée qu’en ces lieux d’enseignement, poésies visuelle, sonore, action et autres performances ne sont pas ou peu enseignées ?
Julien Blaine (déclamant) : Introda©tion C’est à partir de ce texte ou en rapport avec ce texte ou en opposition à ce texte (*ci-dessous) que le plus important courant de la poésie contemporaine s’est positionné, que ce soient les poètes de la première génération encore fortement impliqués selon les avant-gardes historiques (futurisme, dada, cobra ou fluxus) : poésie concrète, poésie visuelle ou poésie sonore ; puis ceux de la génération suivante qui développèrent leur poésie par l’articulation aussi bien celle des voix que celle des corps (happening, poésie élémentaire, poésie action) qui amèneront la poésie essentielle de la fin du XXe siècle et du début du troisième millénaire : la performance. Enfin ceux de la nouvelle génération qui restent dans leur corps et qui disent par la bouche et écrivent par leur langue ou celles et ceux qui ont prolongé leurs vieilles prothèses, magnétophone et microphone par les ordinateurs et les nouveaux outils électroniques. La performance* C’est un corps dans un espace et c’est un son dans un corps, ce son est celui de mon corps ou celui de cet espace, c’est un son de nature : voix, viande, &c. ou un son d’artifice : musique, bruits, &c. Puis c’est un geste du corps et un mouvement de cet espace et comment jouent ensemble le geste du corps
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et le mouvement de l’espace. Le mouvement de l’espace est proprement celui de l’espace mais aussi du peuple de cet espace : du public. 1 Là, tout va bouger : le corps, l’espace, le son, le geste... Et la rencontre sera ou s’évaporera. Là, aux entrepôts frigorifiques, sous les voûtes dans cet espace en bord de Seine aux frontières d’une friche industrielle qui sera une université parisienne (l’université Denis-Diderot) la rencontre s’est établie... Quant à l’enseignement : l’université future ne pourra jamais faire mieux. -------------------------------------------------octobre 2002 *Post-Scriptum c’est un art désespéré
Jean-Charles Agboton-Jumeau : Si je te suis bien, ergo : en matière de poésies visuelle, sonore, action et autres performances, l’université est en tout état de cause disqualifiée ?
Julien Blaine : Procédons par ordre : ces poésies ne sont Jamais enseignées dans les écoles primaires Jamais dans les collèges Jamais dans les lycées Quelquefois dans les écoles des beaux-arts avec une grande confusion et une énorme méconnaissance entre les diverses origines de la performance • celle qui vient du Pop Art • celle qui vient du happening • celle qui vient de la chorégraphie • celle qui vient du politique : révolte individuelle et démonstrative contre l’ordre établi, les impérialismes ou l’hégémonie... • celle qui vient des pays de l’Est où c’est désormais une discipline dominante (Hongrie, Pologne, ex Tchécoslovaquie, ex Yougoslavie, Roumanie, Bulgarie, etc.) • celle qui vient des pays asiatiques enthousiaste, dominante et dynamique (Nippon International Performance Festival – NIPAF – qui a essaimé partout en Asie à partir de Nagano, la ville du fondateur Seiji Shimoda, au Japon y compris en Chine...) • celle qui vient de la poésie et donc des avant-gardes historiques qui ont toutes étaient inventées par des poètes (futurisme, cubisme, dada, surréalisme, cobra, etc.)
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Cours minimal sur la poésie contemporaine Rarement dans les universités à part quelques très rares enseignants comme Jean-Pierre Bobillot surtout pour la poésie Sonore, Jean-Marie Gleize surtout pour les suites pongiennes, Claude Debon pour tout ce qui vient d’Apollinaire ou y retourne, Montserrat Prudon grâce à sa passion pour les mouvements poétiques en Catalogne, Arlette Albert-Birot comme son nom l’indique, veuve du poète cubiste Pierre-Albert Birot ; je crains – hélas – de n’en avoir oublier aucun... Mais paradoxalement elle est présente dans la quasi totalité des dictionnaires de poésie et la plupart des anthologies. Et dans beaucoup d’albums sur l’histoire de l’art. Et, depuis une dizaine d’années quelques jeunes thésards commencent à développer des recherches sur ces mouvements. Mais ce sont surtout, pour ne pas dire exclusivement, l’enseignement de la performance et de la facette poésie sonore. Dans les poésies contemporaines, la poésie visuelle, qu’elle se nomme concrète, élémentaire, visive selon les pays n’est, elle, enseignée nulle part et elle est pourtant source de nombreux mouvement contemporains comme Fluxus (Dick Higgins, Emmet Williams) ou l’art conceptuel (Joseph Kosuth, Lawrence Weiner, John Baldessari) par exemple.
Jean-Charles Agboton-Jumeau : Mais d’où cette indigence
et des formes contemporaines ou mieux, contemporaires – comme je préfère dire désormais –, de la poésie ?
Julien Blaine : Plusieurs raisons à cela : l’université française a toujours été conventionnelle, toujours conformiste, Le Livre de Mallarmé a été enfin ”livré” de manière correcte au lecteur par Bertrand Marchal (La Pléiade) en janvier 1998 ! Et les Calligrammes d’Apollinaire par Michel Decaudin avec Claude Debon et Jean Burgos en 1956 (La Pléiade) et en1998 ! Les instituteurs sont généralement incultes en matière de poésie, et je sais de quoi je parle : je suis allé à maintes reprises dans leurs écoles de formation ; idem pour les professeurs d’enseignement secondaire à quelques rares exceptions près, idem pour les enseignements supérieurs où les exceptions sont encore plus rares et, où se mêlent à leur inculture quand ils connaissent 2 ou 3 choses à propos de la poésie, un amusement méprisant pour ce que nous faisons. Là aussi je suis allé “militer” dans ces espaces réservés poétiquement à Prévert et Aragon et je parle donc, là encore, en connaissance de cause. Mais c’est comme ça il faut 2 siècles pour que la chose soit développée par les auteurs et perçue puis entendue et enfin comprise par les récepteurs : les T’ang en Chine, les troubadours en Occitanie, la Renaissance en Europe. Nous n’en sommes qu’à mi parcours...
crasse voire cette haine larvée des avant-gardes en général
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Cours minimal sur la poésie contemporaine
Alors : Pour Georges Ribemont-Dessaignes Pierre Albert-Birot Ghérasim Luca Boris Gamaleya Adriano Spatola & Christophe Tarkos Si c’est par cynisme, j’encule leurs chiens. Si c’est par stratégie, je rouille leurs armes. Si c’est pour être à la mode, je déchire ou recouds leurs fringues. Si c’est par inculture, je vais les éduquer. Ils ne savent rien ou font semblant de ne rien savoir ou pensent que ça fait bien de faire comme si on ne savait rien. Ils croient ça, que l’histoire est finie, qu’on ne va pas échapper à la disparition de l’espèce humaine au profit de clébards à deux pattes et à station debout, la bouche pleine de merde et de certitudes. Que nous devons tous vivre heureux dans des sociétés géniales au libéralisme avancé. Qu’il faut éliminer l’art au profit de la sécurité. Que la poésie doit être remplacée par le journalisme, le vrai, celui aux photos truquées et aux mots mensongers. Qu’on arrête de les faire chier avec Rimbaud et Rutebeuf. Qu’on ne les emmerde plus avec Van Gogh et Goya et avec ces crétins de musiciens, d’architectes, d’écrivains, tous ces fainéants inutiles. Une exposition annuelle dans un beau grand palais, ça suffira. Un concert de gala toutes les années bissextiles pour admirer notre patrimoine, et basta ! Des livres, oui ! mais des best-sellers, pour faire encore plus de fric destiné aux marchands d’armes et aux bâtisseurs d’autoroutes, écrits par des femmes de caractère abonnées aux émissions culturelles de la télé, et des hommes de lettres qui s’exilent pour être plus souvent photographiés dans les magazines et interviewés dans les radios. Nous ne les laisserons pas nous réduire à être des chiens en attente de leur os dégarni et de leur eau poisseuse. Nous continuerons à réfléchir, à inventer et à faire. Nous nous battrons pour continuer à produire en luttant pied à pied contre cette expression et cette communication limitées à la distraction : le sport et les jeux, les flics et la télé, le totalitarisme déguisé en démocratie. Nous voulons voir vivre et mourir ceux de notre espèce. Les voir vivre... Là, il y a ceux qui travaillent et qui ont du temps pour se distraire (voir supra) et ceux qui sont au chômage et qui cherchent à se distraire pour oublier leur merde. On peut vivre, on doit vivre, qui que nous soyons, quoi que nous vivions. Les voilà, ceux qui croient, malgré tout et malgré tous les conards encore au pouvoir ou qui espèrent bientôt en avoir (du pouvoir), les voilà, ces artistes, ces poètes, ceux qui croient que c’est encore possible : vivre & faire. Certains de ces riches distraits avides de distractions ne sont devenus de riches et grands collectionneurs que pour pouvoir échapper encore mieux aux impôts et par conséquent : risque zéro n’achetant que des valeurs sures assurés par eux et entre eux. Eux, les chiens dociles et leurs dresseurs molletonnés, faut pas trop les faire chier avec la Renaissance et les troubadours, avec l’art pariétal préhistorique et les poètes pré islamistes, avec les romantiques et les dadaïstes, avec Cobra et les ânes de Giordano Bruno, avec l’aube et le crépuscule, avec les couleurs et la lumière, avec la vie et la mort, la géographie et l’histoire. Seulement voilà, ce modeste petit texte est fait pour les
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emmerder, les doués du pouvoir démago, de la distraction de masse et de la connerie des loisirs à la portée de tous. 60 ans, tout rond, que je fais de la poésie : j’ai écrit mon premier poëme à 8 ans et j’ai 68 ans. + d’1/2 siècle d’attention à ça, pour moi, + d’1/2 siècle d’inattention à ça, pour eux, je m’égosille (syn.) je m’essouffle (syn.) je me tétanise (syn.) 45’ + 45’ = 1 h 30 de football (une heure et trente minutes) 1’30” de poésie (une minute et trente secondes) Pour 1 heure 30 minutes de foot 1 minute 30 secondes de poésie : cela suffirait pour que la poésie – la vraie – devienne un spectacle populaire comme au temps de Hugo ! populaire plus (+) encore que le vélo & + encore que le rugby (Syn.) Tous ceux qui ont la haine (syn.) de la poésie, hostilité, répulsion, répugnance. ou le mépris (syn.) de la poésie, dédain, condescendance, dégoût. ou un réflexe d’hilarité (syn.) à propos de la poésie, moquerie, dérision, sarcasme. ne connaissent que Prévert et Aragon et quelques surréalistes mais ne connaissent rien à la poésie. Rien. Rien à la poésie vivante (syn.), animée, résistante, énergique, vive. Rien à la poésie criante (syn.), vociférante, hurlante, rugissante. Rien à la poésie remuante (syn.), instable, grouillante, agitée. Irritée ! Rien à la poésie d’hui (syn.), moderne, actuelle, en cours. Rien à la poésie en chair et en os. Je leur ferai rentrer dans la gorge et dans le cul leur haine (syn.), leur mépris (syn.) ou leurs rires (syn.) jusqu’à ce qu’ils débordent d’amour. À tous ces conards qui confondent la poésie et la récitation, la poésie et le journal intime, le poëme et la littérature ; À tous ces conards qui, pour être sûrs que la poésie est morte, l’assassinent ; À tous ces conards, je chierai sur la gueule jusqu’à ce qu’ils se délectent de ma merde. Tu as raison, mon frère : vivent le foot et Canal+, les stars T.V. et les top-modèles. Vivent leur impresarii : nos chers présidents de la république made in Italy & made in France ! Tu as raison, mon frère : les politiques et les nouveaux philosophes, seuls, méritent ton respect. Tu as raison, mon frère : les éructations (syn.) cyniques du président passé des Etats-Unis, les promesses fallacieuses du président présent des Etats-Unis, (Guantanamo est toujours là, sais-tu ?) et les gazouillis (syn.) impérialistes de l’un et de l’autre sont bien plus intéressants qu’un enfilage de mots qui engendrent vie au lieu de ces aboiements qui accouchent mort. Tu as raison, mon frère : les borborygmes (syn.) du gâteux et défunt Pinochet, les jérémiades (syn.) du sucreur de fraises Jean-Paul II et de son successeur, le berger allemand, les roucoulades (syn.) du sénile Eltsine, du chien Poutin et du doux éliminateur de ses minorités, Dmitri Emetdévœux, les sourires
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Cours minimal sur la poésie contemporaine en coin et les propos crétins et malins de nos chers princes européens le Sarko et le Berluscon ; Tous ces gargouillis, gémissements, balivernes, fadaises, méritent plus tes commentaires que les mots en chair et en os de la poésie en vie. Tu as raison, mon frère : fais confiance aux bons étudiants, aux bons professeurs, aux excellents critiques littéraires, aux bons éditeurs français du Quartier latin, eux, oui ! savent écrire, lire et choisir la bonne poésie. Tu as raison mon frère : tu es de ce monde, de leur monde et tu ne seras qu’un peu de pourriture quand, enfin, tu crèveras. De manière plus générale, je confirmerai que toute la société occidentale est ainsi ignorante, inculte, infantile et globalement vulgaire. N’ont droit de cité et de citations que les sportifs, les stars TV et plus généralement les héros people like Paris Hilton, the big never-made star !
Jean-Charles Agboton-Jumeau : Décidément, j’entends en effet que, comme tu l’écris dans le Manuel..., s’il vocifère, il faut s’y faire ! Je veux dire que nolens volens, il faut s’y faire, à ton élocution en général : vaticination opulente et énumérative de style vétérotestamentaire : listes interminables de noms propres + souffle prophétique... Quoi qu’il en soit, si, comme tu le dis, "En ce début de millénaire / la performance est partout avec le théâtre, la danse, la musique, les arts plastiques / et c'est tant mieux... / Mais elle est aussi enseignée dans les Ecoles d'Art / et là c'est tant pis", alors serait-ce que ton Manuel... n'est destiné qu'à des non-étudiants voire des antiétudiants ?
Julien Blaine : Mais non ! Il n’est destiné qu’à des étudiants, des oui-étudiants voire des pro-étudiants, curieux et intéressés par ça ! Ça dont on parle, dont on discute : un modeste ouvrage pour pallier les carences de l’enseignement des enseignants titularisés. J’ai fait ce petit manuel pour répondre à leurs questions ayant fréquenté à maintes reprises les écoles des beaux-arts de nos belles provinces. Et si j’y ai rencontré – souvent – des enseignants qui avaient ce désir d’enseignement, il devait se battre contre les autres professeurs, leurs collègues ! et leur hiérarchie administrative pour en parler et pour inviter des artistes et des poètes de cette sorte... À part, et c’est aujourd’hui rentré dans leur ordre : Nantes, Besançon, Cherbourg + 1 ou 2 oubliées dans ma précipitation !
Jean-Charles Agboton-Jumeau : Mais ne crois-tu pas que, par-delà la mauvaise foi (au sens sartrien) plus ou moins inquisitoriale des uns ou en deçà de l’inculture ou de la stupidité des autres, qu’à côté de ces paramètres conjoncturels, il y a aussi une difficulté d’ordre structurel ? Tu dis expressément que « c’est comme ça il faut deux siècles pour que la chose soit développée par les auteurs et perçues puis entendue et enfin comprise par les récepteurs : les Tang en Chine, les troubadours en Occitanie », etc. Tu le dis aussi dans ton entretien avec Toni Negri 1. C’est peut-être parce que, comme tu l’écris 1 - Julien Blaine, Mais 2009, Marseille, Dernier télégramme,
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toi-même, on n’est qu’à mi-chemin de cette histoire en cours et donc, d’après moi, nous même qui sommes pourtant contemporaires n’avons pas même commencé à lire et entendre Mallarmé... Dès lors, il me semble que l’avant-garde est en soi (in)enseignable sinon l’(in)enseignable même, du moins dans les formes académiques, "titularisées" ou démagogiques de sa transmission. Deuxième écueil connexe, je veux nommer l’équation, avant-gardiste par excellence : art = n’importe quoi (et inversement) = n’importe qui. Je dis bien équation. Pas équivalence pure et simple. Or cette équation occupe une place centrale dans ton Manuel...comme l’œil au milieu du cyclone. Tu en déclines remarquablement toutes les nuances à travers Ready-made, Nouveau Réalisme, Art brut, Arte Povera, Pop Art, Happening, Fluxus, Poésie sonore... Ne crois-tu justement pas que la paresse, l’indifférence ou la haine à enseigner l’avant-garde vient sans doute du fait que la plupart des enseignants refusent d’être ou mieux, de devenir... n’importe qui ? Et permets-moi d’étoffer ma question en faisant un détour par Du Bellay qui s’adresse à ce « Nouveau venu qui cherches Rome en Rome » autant qu’à tous ceux qui ont renoncé à la honte d’être un homme tels que tu les cites : journalistes, marchands d’armes, bâtisseurs d’autoroute et autres média(teur)s de tous poils. Je n’ai cessé en effet d’y penser en lisant ton Manuel... D’abord parce que la poésie sonore révèle ou réveille après coup la dimension acoustique de ce poème. Qu’il me suffise à cet égard de proférer la merveille de ces deux vers, exemplaires de concision : Rome de Rome est le seul monument, Et Rome Rome a vaincu seulement. Ensuite, poursuit Du Bellay : Le Tibre seul, qui vers la mer s'enfuit, Reste de Rome. O mondaine inconstance ! Ce qui est ferme, est par le temps détruit, Et ce qui fuit, au temps fait résistance. Où l’on entend non seulement que Du Bellay est à sa façon un poète sonore mais qu’il parvient ainsi à réduire l’empire romain, monument cinq fois centenaire, à la pure et simple rumeur d’un fleuve : le Tibre. Donc là où toi tu distingues : Courant 1 : l’itinéraire vers le « N’importe quoi ». Courant 2 : le discours théorique et plein sur rien. Du Bellay assimile d’autant plus la poésie à une résistance qu’elle... fuit. Mutatis mutandis, tes Courants 1 et 2 correspondent respectivement au Tibre (poésie) et à Rome (réification théorique). Je récapitule donc : le poète, passé, présent ou à venir, ne doitil pas dès lors (s’en) tenir à son anachronisme constitutif, c'està-dire laisser couler le Tibre ? Autrement dit, persévérer dans 2010. 6
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Cours minimal sur la poésie contemporaine son devenir n’importe qui et dans la honte d’être un homme comme devenir révolutionnaire ? Ou si tu préfères, et pour citer ici un fragment de cette merveille d’Apollinaire que tu m’as découverte en ton antre de Ventabren selon laquelle, si « la vie, forte, vit quand nous avons passé » alors en effet, Au bord des fleuves vierges nous irons pêcher Pi-mus allant par couple en profondes eaux tristes Et nous comme des dieux, débarrassés des lois, Nous irons sur la route avec les anarchistes Et nous vaincrons d’amour la vie qu’on désaima.
Julien Blaine : Mais sincèrement, Jean-Charles que puis-je ajouter à ta démonstration et à tes commentaires ? Qu’ajouter ? Que c’est difficile de faire parti des invisibles qui sont au milieu d’une histoire déjà commencée il y a plus d’un siècle et incomplète à un siècle de son aboutissement... Avant que le débit ne commence, l’auditeur-lecteur intéressé comme l’auditeur-lecteur curieux en l’occurrence, toi ! me permettra de mettre l’accent sur ceux qui ont permis que cette histoire — jamais — ne disparaisse, ceux qui, sans cesse, se sont battus pour dire que cette poésie était la poésie. Certains, dans leurs pays totalitaires d’Amérique Latine ou d’Europe de l’Est, y ont perdu la liberté, d’autres, dans leurs pays occidentaux, y ont perdu leur fortune, d’autres, nombreux, un peu partout autour du monde, y ont perdu la vie (Mais oui !) Tous ont lutté et luttent pour leur dire, leur faire ; pour changer le verbe et le monde. Aux carrefours de la planète, bien qu’éparpillés tout autour de la terre, ils ont permis aux poètes des quatre coins du globe de se connaître et de dialoguer : grands fabricants de revues, de festivals, d’expositions, de disques, de films, de livres, ils n’ont jamais renoncé, jamais déposé les armes : leurs mots, leurs gestes, leurs voix. Articulateurs de frontières, leurs revues ont paru sans jamais s’interrompre vraiment : De Tafelronde, Tam-tam, Lotta Poetica, Doc(k)s, Inter, pour ne citer que les principaux titres, ces titres qui ne sont — ils le savent — que le faible reflet de tous les autres aspects d’une poésie qui ne peut se contenter de l’aspect résiduel du seul texte imprimé, ces titres qui n’ont été ou ne sont qu’un des fragments d’activités beaucoup plus considérables, leurs éditions ne sont que le symptôme, l’indice, les prodromes et syndromes du poëme et du poète, le commentaire de tout ce qui se passe ailleurs, ailleurs sur le plan géographique et ailleurs, du livre. Car un mystère demeure, si ce que tu affirmes est vrai pour la poésie pourquoi est-ce faux pour les autres disciplines artistiques ? Rappelle toi ce que je confirme dans ce petit manuel : c’est un poète qui inventa le futurisme, c’est un poète qui inventa le dadaïsme, c’est un poète qui inventa le surréalisme, c’est un poète qui inventa le cubisme et c’est un poète qui inventa Cobra...
Le marché serait-il plus puissant que l’histoire ?
Jean-Charles Agboton-Jumeau : Mais n’écris-tu pas toimême que « nous serons bientôt à jour avec Dada et, demain, nous remettrons les choses en désordre avec les Futuristes russes, comme on le verra bien » ? Comme quoi, Dada, futurisme et autres Fluxus – bref, l’avant-garde – toujours se conjuguent au futur antérieur ; nous sommes décidément loin d’être à jour ; ainsi par exemple, ton sentiment d’être au milieu d’une histoire en cours, n’a-t-il pas déjà été conjugué au futur antérieur par Dante et ce, rien moins que dès le premier vers de sa Divine comédie : « Nel mezzo del cammin di nostra vita » !? Poursuivons : « mi ritrovai per una selva oscura / ché la diritta via era smarrita : je me retrouvai dans une forêt obscure, ayant perdu le droit chemin ». Donc, primo : tout poëte ou tout artiste authentique, toujours se retrouve au beau milieu de sa vie comme de l’histoire (de l’art) – et inversement ; en cela, toute œuvre comporte une dimension anhistorique ; secundo : je ne sache aucun artiste qui ne soit environné d’une selva oscura, esta selva précise Dante, selvaggia e aspra e forte / che nel pensier rinova la paura!, soit de l’obscurantisme des non-artistes c’est-à-dire, de la société ou du marché, des politiciens et de « tous ces autres qui passent leur temps à dire moi » comme dit Godard. Tertio : ce sentiment d’être au milieu c’est que, la poésie comme l’herbe, pousse entre ou au milieu des choses (ou des époques) et c’est aussi soi-même, pousser par le milieu. De fait, ton Manuel... est à la fois une histoire de l’art et un art de l’histoire. Et c’est précisément ce que tu fais, en répondant en quelque sorte ici à la terrible question de Gherasim Luca – Comment s’en sortir sans sortir ? – quand tu écris : Pour le moment encore, il importe qu’« untel » celui-ci égo l’identifiable l’identité fiable fasse n’importe quoi c’est moi qui fais En effet, la question, dernier vestige des cultures anciennes en voie de dépassement demeure : Moi, c’est quoi ? Toi c’est qui ? Je qui ? Quel je ? A ces questions j’aurais tendance à répondre : « il ». « Il » veut dire simultanément Moi, c’est quoi et Toi c’est qui ? Réponse : ni toi ni moi mais certes n’importe qui. Cet « il », c’est aussi ce que tu appelles l’indigène par opposition d’une part, au pionnier (ou au découvreur) et d’autre part, au colon (toujours précédé de militaires et suivi de fonctionnaires précises-tu.)
Ergo, tu conclus : L’institution, et c’est normal, a toujours préféré le colon
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Cours minimal sur la poésie contemporaine au pionnier. L’avant-garde, et c’est justice, le pionnier au colon. L’avant-garde du troisième millénaire rejettera aussi bien le colon que le pionnier, pour se tourner vers l’indigène, Celui qui est sur sa terre inconnue, dans sa langue incompréhensible, avec ses rites secrets et son comportement mystérieux. [...] Voici venir le temps où les indigènes sortent de leur clandestinité et de leur réserve. Pour ma part, une école d’art est précisément un tel peuple d’indigènes, alors même que la plupart d’entre elles préfèrent désormais, soit le colon au pionnier, soit se contentent de singer ce dernier. Crois-tu une telle école possible en ce début de troisième millénaire ? Et question corrélative, crois-tu possible de créer une école de poésie, mais de cette seule poésie hors de l’écriture où il y a « le dire et le faire, il y a le geste et la voix, la sortie du livre et la fuite des cimaises », poésie donc « qui aime par-dessus tout les ébauches et les brouillons » et qui émane de : ceux qui pratiquent le début, ceux qui fabriquent les genèses, ceux qui ne savent pas achever ceux qui sont mal à l’aise avec ce qui finit et ce qui est fini. Car en effet, comme tu le prétends, Même si la poésie a le temps, Il est temps de lui redonner la parole et l’espace. Ce que tu fais d’ailleurs littéralement avec ton Manuel... Qui est à lire oralement et non pas « dans la tête » comme le dit Saint Augustin, lequel passe pour avoir promu la lecture en silence qu’aurait inventée l’évêque Ambroise de Milan. Enfin et à mon sens, ceux-là dont tu te réclames, ces indigènes qui, quelque part dans l’inachevé, ne fréquentent jamais que l’ombilic des limbes, ont-ils vraiment intérêt à sortir de leur clandestinité ou de leur réserve ? Ne leur suffit-il pas, pour citer Deleuze, de « la seule spontanéité du désir : ne pas vouloir être opprimé, exploité, asservi, assujetti » ?
Julien Blaine : C’est vrai, et tu me redonnes espoir comme l’avait voulu et finalement réussi à me l’imposer, en quelque sorte, Toni Negri, dans ce livre mais 2009* qui commence par un dialogue entre lui et moi et que tu as cité...
les machines modernes et les outils anciens, les installations et les livres, la lecture et la performance ; ils sont désormais présents, je devrais écrire présentes car ielles sont en majorités femmes. Ielles ont entre 25 et 45 ans, 20 pour les plus jeunes, 50 pour les plus vieux : ielles sont là. Et en vivant, ielles nous ont sauvé la vie à nous les sexa., septua., octo. & +, Comme jadis avait tenté de le faire auprès de nous, nos amis, après le fracas de nos espoirs et désirs de 68. Eux, ils avaient atténué notre douleur, elles l’ont effacé... Pour ce qui est de l’école, je me souviens... En ce temps là (février 1993), j’avais organisé des États Généraux de la Poésie 2 dans la cour de la Vieille Charité à Marseille, ce fut une réussite. Nous avions posé à tous ta question, cette question... Et : Mais de cette réussite (?) qu’en est-il vraiment, comment vit-il [le poète], de qui, pour qui, comment ? Mais qu’en est-il vraiment de ce succès (?) : dire, écrire, faire, quoi, qui, comment ? (conclusion du préambule aux actes de ce colloque) Des réponses en pagaille opposées, stupides ou excellentes ! Quelques années après, avec “l’expérience”, comment répondre ? Que puis-je affirmer ? Oui, une école serait possible, une école sans aucun professeur, un seul Directeur-Coordinateur (D.C.) avec un/e excellent/e assistant/e, un D.C. au fait de tout ce qui est et fait les poésies contemporaines d’ici et d’ailleurs et qui connaît l’histoire des poésies d’hui et d’hier. Et il inviterait pour des ateliers de brèves périodes (une semaine ou deux) des poètes en exercice. Évidemment, je dirai, en ce qui me concerne, qu’il pourrait privilégier cette poésie : hors de l’écriture où, « le dire et le faire, il y a le geste et la voix, la sortie du livre et la fuite des cimaises». Mais vraiment je crois que cette école devrait s’ouvrir à toutes les poésies même celles à la queue leu leu ! Même les cuculsla-praline, même les fleurs bleues... Ce sera alors à l’étudiant à choisir, à se décider, à faire, à être...
Julien BLAiNE est né en 1942, à Rognac, au bord de l’Étang de Berre, flaque de mer jadis bleu-azur, aujourd’hui marron glacé. Il vit à
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, à Ventabren et à Marseille et nomadise le plus possible. Jean-Charles Agboton-Jumeau est critique d’art (http://issuu.com/jcajcriticavit)
Et cette dernière série de tes questions trouve mes réponses dans tes citations – judicieusement choisies – de mes textes ou de quelques autres complices magnifiques ou partenaires superbes ou du divin comédien ! L’autre source de ré espoir, malgré l’incapacité à dire de l’ensemble des média et de l’inaptitude désormais affirmée et confirmée de la quasi totalité de la critique, c’est l’arrivée massive de deux générations d’artistes-poètes maniant le son et la voix, le geste et la parole, le dit et l’écrit, le livre et les cimaises,
,à
2 - Etats généraux de la poésie, Marseille, Centre international de la poésie Marseille, 1993
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Canopéea
CANOPÉEA COLLECTIF POUR DES ASSISES NATIONALES OUVERTES SUR LES PRATIQUES, L’ÉDUCATION ET LES ENSEIGNEMENTS ARTISTIQUES Présentation Le CANOPÉEA est une démarche collective et ouverte, basée sur la coopération et la mutualisation, dans laquelle la force des propositions repose autant sur la nature de celles-ci que sur la manière dont elles sont construites. Le collectif développe une concertation et une réflexion de fond sur l’ensemble du champ des pratiques, de l’éducation et des enseignements artistiques (musique, danse, théâtre, arts plastiques et visuels, arts du cirque, marionnette…). Cette réflexion se veut suffisamment large et transversale pour pouvoir questionner les relations entre éducation, enseignement, pratiques artistiques et culturelles, territoires et habitants, au service de l’intérêt général.
3– L’organisation d’Assises, nationales et en régions, pour permettre de convertir la réflexion en programmes d’actions applicables sur les territoires : Oser les pratiques, l’éducation et les enseignements artistiques ! Oui, mais comment ? Avec un premier temps national à Brive (Corrèze) les 8, 9 et 10 décembre. Les premiers groupes de travail permanents 1– « Recherche et expérimentations » Ce groupe est en charge du repérage des expérimentations existantes, en France mais aussi en Europe et au-delà, et de la méthodologie à imaginer pour la circulation de l’information et éventuellement de l’appropriation de ces expérimentations. Il travaillera également à déterminer ce qu’il serait utile de faire aujourd’hui sur la question de la recherche sur les pratiques. 2– « “Capitalisation” et synthèse » Ce groupe est en charge de permettre une “capitalisation” sur les productions intellectuelles existantes (actes de séminaires et colloques, articles, études, rapports, etc). En s’appuyant sur les observatoires et veilles existants, il repérera les productions utiles aux travaux du CANOPÉEA, et en réalisera (ou fera réaliser) des synthèses.
Créée par 10 associations et fédérations nationales (cf. la liste cidessous), cette démarche souhaite ainsi contribuer, avec l’Etat, les collectivités territoriales, les professionnels dans leur diversité, et les populations (praticiens, usagers, citoyens…) , à construire des réponses concertées et adaptées aux enjeux des pratiques artistiques et culturelles dans notre société, au plan national et/ou local. Dans l’esprit des agenda 21, cette démarche est participative et vise à produire de l’intelligence collective. Le CANOPÉEA s’inscrit ainsi dans une approche renouvelée des modes de concertation et de travail qui font référence aux droits culturels et à la diversité culturelle.
3– « Influences réciproques pratiques / formations » Ce groupe travaille à l’observation et à l’analyse des pratiques, et plus précisément à l’étude des relations d’influences réciproques entre formations et pratiques (en lien notamment avec le contenu des Assises).
Modes d’action
5– d’autres groupes ont aussi été mis en place, deux en charge des relations avec les associations d’élus et d’acteurs culturels, et un dernier qui porte un regard extérieur sur la démarche et fera le lien avec les « acteurs de terrain » (artistes, enseignants, intervenants…).
Pour nourrir la réflexion, le CANOPÉEA met en place 3 modes d’action : 1– La création et le développement d’espaces et d’outils de concertation permanents, en correspondance avec les enjeux de la démarche. Les deux principaux espaces sont : • l’Assemblée ouverte qui permet (deux fois par trimestre et selon les configurations) à l’ensemble des associations, fédérations, structures, professionnels, usagers et citoyens concernés, de pouvoir échanger et d’être force de propositions sur les thématiques traitées par le CANOPÉEA ; • le site Internet qui permet de faire des suggestions, des contributions, et comportera prochainement un espace forum après les premières Assises nationales de décembre 2011. http://www.canopeea.fr 2– La création d’espaces de travail, de “capitalisation” et de circulation d’informations sur ce qui existe en termes de productions intellectuelles et d’expérimentations pédagogiques. Des travaux de synthèse seront effectués progressivement par les différents groupes de travail (cf. ci-après) et mis en ligne sur le site.
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4– « Glossaire, langage et compréhension » Ce groupe étudie les mots et leurs représentations / significations dans différents contextes, histoires, habitudes... Il établira progressivement une cartographie des points et lieux de crispations, d’incompréhensions et des possibilités d’accord autour de ces mots.
Les 10 membres fondateurs du CANOPÉEA : • La Plate-forme interrégionale d’échanges et de coopération pour le développement culturel • La Fédération nationale Arts vivants et Départements • L’association nationale Culture et Départements • Le Conseil des CEFEDEM (Conseil national des centres et départements de formation supérieure à l’enseignement artistique) • Le Conseil des Centres de Formation des Musiciens Intervenants (CFMI) • Conservatoires de France • ARTe[F]act, (ART Et Formation en ACTes) • Le Collectif RPM (Recherche en Pédagogie Musicale) • La Fédération Nationale des Écoles d’Influence Jazz et Musiques Actuelles (FNEIJMA) • La Fédération Nationale des Associations de Parents d’Élèves des Conservatoires et écoles de musique, de danse et de théâtre (FNAPEC)
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Assises nationales
ASSISES NATIONALES
Vendredi 9 (après-midi) : Ateliers de mise en pratiques et sur des thématiques recueillies la veille
OSER LES PRATIQUES, L’ÉDUCATION, ET LES ENSEIGNEMENTS ARTISTIQUES ! OUI, MAIS COMMENT ?
Vendredi 9 (fin d’après-midi) : présentation festive des échanges de la journée (l’heure des rapporteurs) puis parcours artistique scénographié à partir d’expérimentations pédagogiques dans le domaine de Sédières
à Brive et au domaine de Sédières (Corrèze) les 8, 9 et 10 décembre 2011
Samedi 10 (matin) : “le marché” forum ouvert préparant les futures rencontres en région
L’ensemble du champ culturel est interrogé en profondeur par les bouleversements économiques et sociétaux actuels, en France et dans le monde. Bon nombre d’acteurs et de promoteurs des pratiques, de l’éducation et de l’enseignement artistique sont, aujourd’hui, fragilisés voire remis en question tant dans leur fonctionnement que dans leurs perspectives à venir. Les enjeux démocratiques, humains, culturels, sociaux et politiques des pratiques, de l’éducation et des enseignements artistiques imposent aujourd’hui une mobilisation de l’ensemble des élus et responsables des pouvoirs publics, des professionnels dans leur diversité, des usagers et des citoyens. La confrontation, l’enrichissement et le partage des points de vue et expériences sont plus que jamais indispensables. Le CANOPÉEA construit une démarche participative, basée sur le dialogue entre les différents niveaux d’acteurs, écartant les réflexes corporatistes, croisant les regards et les approches (artistiques, pédagogiques, disciplinaires, esthétiques, sociologiques, philosophiques, territoriales,…), dans le but d’avancer et de produire ensemble les conditions d’un renouvellement.
Le processus ainsi lancé se déclinera ensuite... -de janvier à septembre 2012 : des Assises en région, qui travailleront sur des thématiques issues du premier temps de décembre et alimenteront la réflexion au plus près des questions et des problématiques de terrain, en prenant en compte les dynamiques locales. -en octobre 2012 : des Assises nationales à Paris, qui restitueront l’ensemble du travail et déclineront des propositions et modalités d’actions possibles sur les territoires Pour tous renseignement, plus d’informations, le programme détaillé etc, s’inscrire : http://www.canopeea.fr contact@canopeea.fr
Les Assises nationales à Brive et au domaine de Sédières (Corrèze) les 8, 9 et 10 décembre prochain, doivent permettre de poser ainsi les bases d’une réflexion approfondie, pour élaborer, ensemble, des réponses adaptées au contexte et à ces enjeux. Ce temps fort favorisera la parole et les échanges lors d’ateliers et de forums. Différents modes d’intervention, de contribution et d’animation des travaux seront proposés en intégrant une dimension artistique et pédagogique au cœur même des débats.
Jeudi 8 (18h) : Accueil puis ouverture officielle Vendredi 9 (matin) : Travail en ateliers sur 4 thématiques : -Pratiques, éducation, enseignements artistiques pour tous et par tous : une urgence républicaine, les conditions d’une mise en œuvre. -Pratiques, éducation, enseignements artistiques : définir et construire ensemble un projet culturel et une politique de territoire. -Pratiques, éducation, enseignements artistiques : création, expérimentation, recherche, à l’épreuve des nouveaux outils et des nouvelles pratiques. -Pratiques, éducation, enseignements artistiques : des métiers, des emplois, des fonctions : la formation professionnelle et l’enseignement supérieur aujourd’hui, à l’échelle des territoires et de l’Europe.
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Brèves – infos Brèves - infos
Ecoles d’art – EPCC,
statuts des enseignants : Rencontres techniques de l’AMF du 18 octobre 2011
Le mardi 18 octobre 2011 se sont tenues les Rencontres techniques de l’AMF organisées par l’Association des maires des grandes villes de France avec la participation du ministère de la Culture et du ministère de l’Intérieur (DGCL). L’Andéa et la Cneea avaient été invitées à participer aux débats. Thème général : « Écoles territoriales supérieures d’art : des ETSA aux EPCC : que reste-t-il à régler ? » Deux grands points ont été abordés : d’une part un premier bilan de la constitution des EPCC, d’autre part la question des modifications du statut des professeurs d’enseignement supérieur d’art. 1. Bilan de la constitution des EPCC Le ministère de la Culture et les présidents des EPCC MetzEpinal et Bordeaux ont présenté un bilan à leurs yeux satisfaisant : regroupements d’établissements pluridisciplinaires, développement de l’international et des relations nécessaires avec l’université quant à l’adossement à la recherche et au conventionnement. ... Mme Le Guevel (adjointe au directeur général de création artistique) s’est réjouie qu’on soit passé de 58 écoles à 37 EPCC et a annoncé que cette logique de Pôle n’était pas terminée : la logique de travail, c’est les pôles d’enseignement supérieur, le rapprochement avec l’Université ou les autres établissements publics de la danse, du théâtre, ou du cirque (comme ce sera le cas par exemple à Chalon), l’entrée dans les PRES et le dépôt de projets de recherches LABEX..IDEX etc… Pour Mme Le Guével, aucun EPCC de moins de 250 étudiants ne pourra dans l’avenir être habilité, l’AERES regardant la carte géographique des offres de formations et voulant éviter la redondance des formations. Monsieur Michel Heinrich, député-maire d’Epinal, président de l’Epcc Metz-Epinal, a annoncé que la prochaine étape dans sa région était d’intégrer l’école des beaux arts de Nancy (école nationale) à l’ EPCC territorial. 2. Modifications du statut des professeurs d’enseignement supérieur d’art. La DGCL (Mme Mezel, direction générale des collectivités locales, ministère de l’intérieur) a d’abord rappelé les principales différences statutaires entre les professeurs des territoriales et ceux des nationales, tous délivrant le même diplôme. Dans les écoles nationales : les missions de recherche sont mentionnées dans les statuts, le temps d’enseignement est annualisé 446 h (avec un coefficient pour les cours théoriques : 12h), il y a un droit pour l’agent à un congé recherche rémunéré (tous les 6 ans), la grille indiciaire a été revalorisée (elle finit à 1015). Les textes de la fonction publique territoriale ne mentionnent
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qu’une mission (l’enseignement), et un temps d’enseignement de 16 heures hebdomadaires ; la grille indiciaire est bloquée à 966. Puis elle a rappelé les quatre schémas envisagés ou envisageables et les points de blocage des uns ou des autres : a) un corps unique pour les professeurs des écoles nationales et des EPCC ; b) la création d’un corps interfonction publique, comme il est aujourd’hui en cours de constitution pour certaines catégories ; cette solution est assez complexe ; c) la création d’un nouveau cadre d’emploi au sein de la fonction publique territoriale, semblable au cadre d’emploi des professeurs des écoles nationales, incluant la recherche ; d) l’adossement à un cadre d’emploi déjà existant, celui des directeurs, tels qu’il est proposé par le conseil supérieur de la fonction publique territoriale ; pour elle, cette solution manque de cohérence, notamment quant aux missions des professeurs et des directeurs, qui diffèrent sensiblement ; de plus, la grille de rémunération serait plus avantageuse que celle des professeurs de l’Etat, donc cette solution ne peut être envisagée. En outre, elle a rappelé qu’avec les EPCC, les directeurs occupaient des emplois fonctionnels (contractuels) et qu’ils n’étaient donc plus concernés par la réforme du cadre d’emploi des PEA. La question des financements peut être évoquée de façon contradictoire : certes, d’un côté, un changement de statut doit être accompagné d’un nouvel indice , or aucun financement supplémentaire de l’Etat n’est prévu. Mais d’un autre côté on peut dire que cette réforme concerne très peu d’agents (environ 650) et donc ne constitue pas une mesure économique sensible. La Cneea a rappelé que ce dossier date de bientôt dix ans, qu’il convient maintenant après 10 ans d’attente d’obtenir a minima une équivalence avec le statut des nationales, que la proposition d) a été adoptée par le conseil supérieur de la fonction publique territoriale en février 2008, et qu’il n’était pas acceptable de repartir dans des commissions techniques alors qu’il s’agit maintenant d’arbitrage et de volonté politique. L’Andéa demande un statut d’artiste-chercheur sur le modèle de celui des ingénieurs et propose de mettre en place qualification interne aux écoles sur le modèle de la CNU. Les présidents d’EPCC présents (Nantes, Toulouse) se sont déclarés favorables à un changement de statuts et demandent une aide financière de l’Etat. Pour la DGCL, la difficulté n’est pas de trouver une solution “technique” parmi les 4 proposées, mais de trouver le levier pour porter le dossier : il faut un « arbitrage », ce qui ne dépend pas de la DGCL mais du cabinet du Ministère de l’Intérieur et du Premier Ministre La DGCL s’est engagée avec l’AMF à proposer une solution technique rapidement. (Voir également dans la rubrique « enseignements supérieurs » la note sur le statut des enseignants chercheurs.)
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Brèves – infos
Enseignement supérieur et Culture Approfondir les collaborations Paris, le 18 octobre 2011 Les deux Ministres de la Culture et de la Communication et de l’Enseignement supérieur et de la recherche se félicitent de ce que l’enseignement supérieur Culture participe désormais pleinement à la dynamique lancée par les accords de Bologne et aux évolutions du paysage de l’Enseignement supérieur. Après l’accès en 2005 des écoles nationales supérieures d’architecture aux trois grades universitaires, puis des écoles du patrimoine et des deux Conservatoires nationaux supérieurs de musique et de danse de Paris et de Lyon au grade de master, toutes les écoles nationales et territoriales d’art ont été habilitées au cours des derniers mois par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche à délivrer à compter de juin 2012 un diplôme conférant le grade de master. Dans l’ensemble des secteurs, des partenariats des écoles supérieures Culture avec les universités ou les grandes écoles se sont développés, soit dans la conception des cursus, soit pour construire des projets innovants ou valoriser des complémentarités. Les deux ministres saluent ces initiatives, le développement de la présence des écoles supérieures Culture dans les pôles de recherche et d’enseignement supérieur et le succès que ces écoles ont rencontré dans les investissements d’avenir. Laurent Wauquiez et Frédéric Mitterrand souhaitent conforter ces démarches en approfondissant les collaborations entre l’université et les écoles supérieures Culture, dans le respect des différences et des spécificités, et à ce titre avancer dans plusieurs directions : • identifier et valoriser les apports des partenariats existants, par des bilans qui seront réalisés dans les différents secteurs et aux divers niveaux de formation concernés, • encourager les écoles supérieures Culture à entrer dans les PRES afin de renforcer la visibilité de l’enseignement supérieur français au niveau international, de conforter la recherche dans les domaines culturels, de proposer aux étudiants une offre de formation élargie et de leur ouvrir le bénéfice des services mutualisés, • accompagner les écoles supérieures Culture dans la construction de l’offre de recherche, en s’attachant prioritairement à conforter, en partenariat avec les universités, l’adossement de l’enseignement à la recherche, qui sera au cœur des prochaines évaluations de l’AERES. Les deux ministères accompagneront parallèlement la réflexion en cours sur la recherche en art • Améliorer la reconnaissance de l’offre de formation au niveau L du secteur des arts plastiques, après une analyse précise des parcours et de l’insertion professionnelle des étudiants pour chacun des deux diplômes concernés. • S’attacher à ce que l’ensemble des écoles supérieures Culture puissent s’appuyer sur le processus d’évaluation de l’AERES pour contribuer à la dynamique d’amélioration contin-
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ue de la qualité des formations aujourd’hui mise en œuvre par l’Enseignement supérieur. Frédéric Mitterrand et Laurent Wauquiez confient à Monsieur Jean de Saint-Guilhem, Inspecteur Général de l’Administration de l’Education Nationale et de la Recherche et ancien directeur d’administration centrale au ministère de la Culture et de la Communication, une mission sur la poursuite à plus long terme des évolutions de l’enseignement supérieur Culture. Ils souhaitent que des propositions opérationnelles soient faites rapidement dans ce cadre pour la création d’une conférence des établissements supérieurs Culture, lieu de partage d’expériences et de dialogue avec le ministère de la Culture et de la Communication Cette mission sera menée en lien étroit avec l’Inspection générale des affaires culturelles et les divers acteurs concernés, notamment les collectivités territoriales...” Communiqué du 18 octobre 2011
15 mesures en faveur des arts plastiques Frédéric Mitterrand a annoncé 15 mesures
“Paris, le 11 octobre 2011 Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture et de la Communication, a dévoilé, le 11 octobre 2011, quinze mesures en faveur des arts plastiques, conçues au terme des « Entretiens des arts plastiques » qu’il avait lancés le 11 février 2011, pour accompagner les évolutions du secteur des arts plastiques. Ces entretiens ont réuni plus de 450 participants répartis en quatre ateliers de travail, à l’initiative de la Direction générale de la création artistique, et en lien également avec le ministère des Affaires Etrangères et l’Institut Français. Alors que la mondialisation et la révolution numérique créent simultanément de nouvelles opportunités de développement et de nouvelles sources de déséquilibres, elles mettent surtout en évidence l’interdépendance et l’interconnexion de tous les acteurs de l’art. Plus que jamais, la vitalité et la visibilité des artistes est liée à la force du « monde de l’art » tout entier auxquels ils appartiennent : écoles, lieux d’exposition publics et privés, centres d’art, fondations, FRAC, musées, galeries, collections publiques et privées, nationales et internationales, organismes professionnels, revues d’art, réseaux sociaux sur internet, résidences en France et à l’étranger… Trente ans après le début de la politique de décentralisation du ministère de la Culture et de la Communication dans le domaine des arts plastiques, ces quinze mesures visent ainsi à renforcer le dynamisme des arts plastiques en France et le rayonnement de la scène française à l’étranger en relançant une politique d’irrigation du monde de l’art. Elle définissent une politique d’encouragement et de facilitation de l’initiative publique et privée. Elles se déploient à cet égard dans quatre directions : - Le soutien à l’effort de professionnalisation du secteur des arts plastiques, indispensable à sa croissance et à sa résistance ;
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Brèves – infos
- Le développement du marché de l’art ; - Le renforcement du réseau des arts plastiques en région ; - L’investissement de l’espace numérique et le développement des échanges internationaux, afin de diffuser l’art et la pensée de l’art de la scène française dans le monde.” (Communiqué)
AERES – Evaluation du DNSEP Le Rapport de synthèse de l’évaluation par l’AERES des cursus menant au Diplôme National Supérieur d’Expression Plastique (DNSEP) des écoles supérieures d’art pour l’attribution du grade de master de juillet 2011 reprend et conforte les attendus et conclusions du rapport précédent, notamment dans ses parties II et III. I – Evaluation prescriptive et cahier des charges II – Evaluation des DNSEP école par école III – Vue d’ensemble de la situation actuelle L’annexe 1 présente le Cahier des charges du dossier d’évaluation établi par le ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche et le ministère de la Culture et de la Communication L’annexe 2 présente un “Tableau récapitulatif des notes de l’évaluation des Ecoles d’arts (2010-2011) L’annexe 3 présente quelques données chiffrées sur les écoles d’art en France. http://www.plastgrandouest.net/index.php?cat=ecole:27&page=3726
Recherche Programme doctoral “Science Art Création Recherche” (SACRe) Le projet Science Art Création Recherche (SACRe) vise à développer un nouveau domaine de recherche en explorant les interfaces entre les différents arts, ainsi qu’entre les arts et la science (sciences dures aussi bien que sciences humaines et sociales). SACRe implique l’Ecole normale supérieure et les principales écoles françaises de création et d’art vivant, l’Ecole nationale supérieure des Arts décoratifs (ENSAD), l’Ecole nationale supérieure des beaux-arts (ENSBA), le Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris (CNSMDP) et le Conservatoire national supérieur d’art dramatique (CNSAD). D’autres membres de PSL (Paris Sciences & Lettres), comme le Collège de France, Chimie ParisTech, l’ESPCI ParisTech et l’Université Paris-Dauphine apporteront leur contribution au projet. Un nouveau type de doctorat en art
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SACRe représentera une nouvelle forme de doctorat en art, qui articulera fortement pratique artistique et réflexion théorique. Sa mise en place bénéficiera de l’expérience des doctorats en création développés par plusieurs universités anglo-saxonnes et se distinguera des approches exclusivement théoriques actuellement représentées dans les Ecoles doctorales françaises en art, musique et théâtre. Dix candidats Dix candidats seront sélectionnés chaque année sur la base de leur potentiel artistique et de leur intérêt pour l’interdisciplinarité. Ils recevront un financement d’une durée de trois ans. L’équilibre entre les champs artistiques – art, musique, théâtre, design – sera garanti, de même que la représentations des autres disciplines académiques. Dans un premier temps, les doctorants sélectionnés seront inscrits à l’Ecole doctorale de l’ENS et dans l’école de création la plus proche de leur domaine d’activité. Dans un second temps, une Ecole doctorale SACRe sera instituée. La thèse La thèse, supervisée par un universitaire et par un artiste, consistera : • Pour les artistes, dans un ensemble de travaux ou de performances artistiques, accompagnées par un document (texte, supports audiovisuels et multimédias) mettant en perspective leur travail. • Pour les universitaires, dans un travail écrit classique, qui prêtera attention au processus de création en tant que tel. Dans les deux cas, la participation à au moins un projet interdisciplinaire avec d’autres doctorants SACRe, artistes ou scientifiques sera requise pour valider le doctorat. Une formation commune Une formation commune sera organisée pour les doctorants SACRe, à partir de cours (théorie et histoire des arts), de séminaires et d’ateliers, dont certains seront délivrés en anglais. Cette formation encouragera l’interdisciplinarité et le sentiment d’appartenance des doctorants. Chaque institution y contribuera par des moyens propres. SACRe s’articulera harmonieusement aux programmes post-masters qui existent actuellement, en proposant de nombreuses synergies.
Colloque international sur la recherche en art
et dans l’enseignement supérieur artistique les 8, 9, 10 février 2011 à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Paris-Belleville Ministère de la Culture et de la Communication / Ecole Nationale Supérieure d’Arts de Paris-Cergy
Du fait de leur insertion dans un projet de réforme de l’enseignement supérieur en général, les objectifs du développement d’une recherche en art conduisent l’art à s’inscrire dans des critères de fonctionnement autres que ceux d’une logique de production et de diffusion. La production de la recherche est ainsi invitée à s’inscrire dans des protocoles scientifiquement
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validés afin de dialoguer avec les champs déjà constitués du savoir. Mais contrairement à ce que l’on pouvait craindre, cette contrainte n’a pas donné lieu à une activité réductrice quant aux ambitions de l’art d’incarner une dimension de résistance à l’univocité du sens. Elle a au contraire impulsé un renouvellement des savoirs techniques et scientifiques qui ne s’est pas limité aux seules technologies mais a pris des formes diverses selon les arts concernés. L’ambition de ce colloque est de faire le point, au sens optique et intellectuel du terme, sur le paysage de la recherche artistique en France et dans le monde. Loin de chercher à imposer une vision normative ou un modèle à suivre, il s’agit de donner une visibilité à une multitude de pratiques, de projets en cours, d’initiatives, d’en déployer un aperçu diversifié qui ne soit pas seulement un catalogue mais propose aussi une vision analytique qui permette à chacun de se doter d’outils et d’idées nouvelles pour continuer de faire vivre ce champ de la recherche en art. Coordination du Conseil Scientifique: Jehanne Dautrey
Enseignement supérieur Arrêté du 1er août 2011 relatif à la licence “Chapitre Ier : Dispositions générales Article 1 : La licence est un diplôme national de l’enseignement supérieur conférant à son titulaire le grade de licence. Il confère les mêmes droits à tous ses titulaires, quel que soit l’établissement qui l’a délivré. Les études universitaires conduisant à la licence sont régies par les dispositions du présent arrêté. Article 2 : La licence atteste l’acquisition d’un socle de connaissances et de compétences dans un champ disciplinaire ou pluridisciplinaire. La licence initie l’étudiant au processus de production des connaissances, aux principaux enjeux de la recherche et des méthodes scientifiques de ce champ. La licence prépare à la fois à l’insertion professionnelle et à la poursuite d’études de son titulaire. Elle sanctionne un niveau validé par l’obtention de 180 crédits ECTS (European Credits Transfer System). Article 3 : Des référentiels de compétences sont définis pour une discipline ou un ensemble de disciplines à l’initiative du ministre chargé de l’enseignement supérieur, qui associe les conférences mentionnées à l’article L. 233-1 du code de l’éducation, les associations mentionnées à l’article L. 811-3 du code de l’éducation, les communautés scientifiques et les professionnels des secteurs concernés, et sollicite l’avis du comité mentionné à l’article 24. La mise en œuvre des référentiels fait, au moins une fois tous les cinq ans, l’objet d’un examen par le comité mentionné à l’article 24 du présent arrêté. Cet examen contribue à l’évolution desdits référentiels. La licence s’appuie sur des objectifs nationaux établis par les référentiels. Ceux-ci déclinent les compétences
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disciplinaires, linguistiques, transversales et préprofessionnelles que doivent acquérir les titulaires de la licence.” La publication de cet arrêté a fait l’objet de nombreuses critiques, portant notamment sur la référence à l’”employabilité” (qui aboutit à mélanger temps de formation et temps économique, à survaloriser le rôle des stages), le recours aux « référentiels de compétence » (calqués sur le milieu industriel), le risque de dissociation entre recherche et enseignement (à travers notamment la possibilité de modulations de services, le recrutement de nouveaux types de contractuels)...
Etudiants étrangers : circulaire Guéant La circulaire dite “Guéant” du 31 mai 2011 énonce : “La procédure de changement de statut (étudiants demandant un titre de séjour professionnel) devra faire l’objet d’un contrôle approfondi. L’exception prévue pour les étudiants qui sollicitent une autorisation provisoire de séjour dans le cadre d’une recherche d’emploi doit rester rigoureusement limitée”. Cette circulaire a provoqué de nombreuses réactions : de la région Ile de France, de la Conférence des Président d’Universités, de la Conférence des Grandes Ecoles. Pour Laurent Wauquiez, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, cette circulaire ne change rien à l’Etat du droit. “Une politique d’attractivité”, a-t-il rappelé,”c’est aussi une politique d’attractivité qui est maîtrisée, faite dans le cadre de partenariats avec les universités, et pas en désordre.” A Paris, 12 novembre 2011, ils étaient 2.000 diplômés étrangers à manifester pour réclamer le retrait de la circulaire Guéant, qui restreint leur possibilité de travailler en France après leurs études. A la suite de cette circulaire du 31 mai, de nombreux diplômés étrangers, très qualifiés, n’ont pu obtenir un statut de salarié pour travailler en France, un sujet d’inquiétude relayé par les universités et grandes écoles depuis l’été. A l’appel du Collectif du 31 mai, de la CGT, de l’Unef et de la Confédération étudiante, plusieurs centaines d’étudiants se sont rassemblés à quelques pas du ministère du Travail, derrière une banderole proclamant : « Etudiants étrangers indésirables: diplômés, recrutés, expulsés. Le Collectif du 31 mai exige le retrait immédiat de la circulaire Guéant. Non à la mort de la mobilité internationale, oui à l’ouverture et au rayonnement de la France. » Le Collectif a fait remonter 500 dossiers au ministère de l’Intérieur et au ministère de l’Enseignement supérieur. Seuls 65 cas ont été débloqués. Ces chiffres contredisent ceux avancés par le ministre de l’Intérieur, Claude Guéant, qui a fait état sur France Inter de 300 cas remontés, et de 150 régularisés.
Stages en entreprise Un accord signé le 7 juin par les partenaires sociaux encadre une fois de plus les stages en entreprise afin que ceux-ci ne puissent plus être utilisés par certaines entreprises pour remplacer des embauches en contrats à durée indéterminée.
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Les stages doivent ainsi faire l’objet d’une convention entre l’entreprise d’accueil, le stagiaire et l’établissement d’enseignement dont il est issu, et ont obligatoirement lieu dans le cadre d’un cursus pédagogique scolaire ou universitaire (art. L 612-8 al 2 du Code de l’éducation). Les stages ne peuvent avoir pour objet l’exécution d’une tâche régulière correspondant à un poste de travail permanent dans l’entreprise (art. L 612-8 al 3 du Code de l’éducation). Cette mesure rappelle les termes de l’article L 1242-1 du Code du travail en matière de contrat à durée déterminée (quel que soit son motif, un CDD ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise). L’accueil successif de stagiaires, au titre de conventions de stage différentes, pour effectuer des stages à un même poste n’est possible qu’à l’expiration d’un délai de carence égal au tiers de la durée du stage précédent, sauf si le stage précédent a été interrompu, avant son terme, à l’initiative du stagiaire. Tous les stages d’une durée supérieure à deux mois, consécutifs ou non, au cours d’une même année scolaire ou universitaire, doivent donner lieu à gratification et ce, dès le premier jour (art. L 612-11 du Code de l’éducation). La gratification est versée mensuellement...
Services des enseignantschercheurs Le statut des enseignants-chercheurs est fixé par l’arrêté 23 avril 2009 (modifiant le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences et portant diverses dispositions relatives aux enseignants-chercheurs). L’article 2 de l’arrêté du 23 avril 2009 fixe le cadre général : Article 2. “Les enseignants-chercheurs ont une double mission d’enseignement et de recherche“… “Dans l’accomplissement des missions relatives à l’enseignement et à la recherche, ils jouissent d’une pleine indépendance et d’une entière liberté d’expression, sous les réserves que leur imposent… les principes de tolérance et d’objectivité”. L’article 7 précise le temps de travail : Article 7. I. “Le temps de travail de référence, correspondant au temps de travail arrêté dans la fonction publique, est constitué pour les enseignants-chercheurs : 1° Pour moitié, par les services d’enseignement déterminés par rapport à une durée annuelle de référence égale à 128 heures de cours ou 192 heures de travaux dirigés ou pratiques ou toute combinaison équivalente en formation initiale, continue ou à distance. Ces services d’enseignement s’accompagnent de la préparation et du contrôle des connaissances y afférents. 2° Pour moitié, par une activité de recherche reconnue comme telle par une évaluation…”. Lorsque les enseignants-chercheurs accomplissent des enseignements complémentaires,… ils perçoivent une rémunération complémentaire”. Les PRAG : le statut de PRAG est celui d’un “agrégé” détaché à
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l’Université sur un poste créé dans l’enseignement supérieur. Le statut de PRAG ne comprend pas de recherche, et leur charge d’enseignement est double de celle d’un Maître de conférences, soit 384 h eq. TD par an.
Universités dans le monde Etats-Unis. La crise dans l’enseignement supérieur.
C’est le titre d’une contribution de François Garçon, enseignantchercheur, dans le Nouvel Observateur. “Aux Etats-Unis, depuis maintenant deux ans, les budgets des universités, notamment les moins prospères, sont retrécis, les titularisations de professeurs repoussés, les chargés de cours remerciés. Les étudiants sont priés de se serrer dans des cours dont l’offre est réduite au motif imparable que l’argent manque. Dans la batterie des mesures de crise que prennent les universités, certaines méritent d’être citées. D’abord, il y a l’inévitable fermeture d’enseignements dont la rentabilité est problématique depuis longtemps. Parmi d’autres sont ainsi concernées des langues étrangères, et notamment le français, l’allemand étant globalement et depuis longtemps passé à la trappe. Ailleurs, des séminaires spécialisés insuffisamment fréquentés sont supprimés ou bien fondus dans des cours généraux, avec des seuils minima d’étudiants sous peine de fermeture. Vient aussi le train de mesures où, compte-tenu du licenciement ou de la non reprise de vacataires, les titulaires sont priés d’en faire plus. Ailleurs, le climat est identique. Le Canada qui vient de geler d’importants programmes de recherche dans l’Arctique, et la Grande-Bretagne dans une moindre mesure, sont pareillement placés à la diète...”. Pour François Garçon, la France semble en dehors de ce paysage dépressif. Mais il lui semble “évident que ce qui frappe les universités étrangères ne peut pas ne pas nous atteindre... au motif qu’il existerait une exception universitaire française”. (François Garçon a publié, Enquête sur la formation des élites, Paris, Perrin, 2011)
Quebec - Angleterre - Hongrie Chili... France Droits de scolarité Chili : Cet été, les étudiants, les lycéens et les enseignants chiliens se sont mobilisés pendant plusieurs mois, malgré l’arrestation de plusieurs centaines de personnes, pour exiger
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des moyens accrus dans l’enseignement public. Le 21 août près d’un million de personnes se sont rassemblés pour “un dilmanche en famille” au Parc Cousiño, dans la partie sud du vieux Santiago, pour une Education gratuite et de qualité. En Hongrie, plusieurs manifestations se sont tenues contre les réformes de l’enseignement supérieur. HÖOK, l’un des plus grands syndicats étudiants, dénonce « les plans drastiques du gouvernement afin de restructurer le financement des études supérieures et d’introduire des frais de scolarité cachés ». Les syndicats étudiants déplorent non seulement les coupes budgétaires importantes : 30 milliards de forints (101 millions d’euros) de moins pour le plan budgétaire de l’an prochain, mais ils contestent surtout le fait qu’elles contraindraient les étudiants à travailler un certain nombre d’années en Hongrie après l’obtention d’un diplôme, sans quoi ils se verraient dans l’obligation de rembourser à l’Etat leurs frais de scolarité. Berkeley-Californie : manifestation des étudiants de l’Université de Berkeley contre l’augmentation prévue des droits d’inscription le 9 novembre. Philippe Jamet, dans un blog Educpros (“Echo du pays où l’herbe est (dit-on) plus verte”) soulève le problème de l’endettement des étudiants : “De passage ces jours-ci dans mon ancienne patrie de Washington, District of Columbia, je prends connaissance d’articles de presse reprenant des données récemment publiées par le College Board à propos de l’endettement des étudiants du supérieur. Le College Board est une association de 5900 collèges, universités et écoles secondaires dont la mission est de promouvoir l’excellence et l’équité dans l’enseignement supérieur. Selon le College Board, les prêts étudiants ont plus que doublé dans la dernière décennie, passant de 48,7 milliards de dollars à 107,1 milliards. Pour la première fois, la dette étudiante cumulée dépassera en 2011 le trillion de dollars (1000 milliards, soit 7% de la dette des Etats-Unis et plus que la dette attachée aux cartes de crédit). La prochaine bulle du crédit aux USA pourrait bien être celle du crédit étudiant, même si cette dette est en principe « sans risque pour le contribuable et les bailleurs », car la loi américaine interdit le recours à la faillite personnelle dans ce cas, contrairement aux emprunts immobiliers et aux cartes de crédit. Il reste que tout le risque est supporté par des jeunes qui inaugureront leur vie active avec un lourd handicap financier...”. Londres : Des milliers d’étudiants londoniens ont manifesté le 9 novembre 2011 contre la hausse des frais de scolarité à l’université. Le Comité national contre les frais et les coupes budgétaires dénonce les plans du gouvernement, qui souhaiterait “privatiser” ses universités. “C’est un cabinet de millionnaires qui nous dit que l’on va devoir payer trois fois plus de frais universitaires”, s’insurge sur le site de la BBC Michael Chassum, le leader de la contestation. Depuis des mois, le gouvernement britannique tente de faire passer sa réforme des universités et de leur financement, inspirée du modèle américain. Cette réforme signifie un doublement voire un triplement des frais d’entrée : dès 2012 il en coûterait près de 10 000 euros par an à chaque étudiant. Montréal : Une large coalition de 130 groupes sociaux a appellé la population à se mobiliser, le 10 novembre, contre la hausse
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brutale des frais de scolarité prévue à partir de 2012. Selon François Saillant, du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), « on aurait tort de penser qu’il n’y a que les étudiantes et les étudiants qui s’appauvriront avec la hausse des frais de scolarité qui, à terme, atteindra 1625 $ par an ; leurs familles seront aussi affectées, en particulier celles ayant des revenus plus modestes ». Il ajoute que « la hausse pèsera d’autant plus lourdement sur ces familles qu’elle s’inscrit dans une série de mesures injustes comprenant la taxe santé de 200 $ par an, l’accroissement de 2 % de la Taxe de vente du Québec et l’augmentation prévue des tarifs d’hydro-électricité à partir de 2014 ». France : Financement des universités : l’Institut Montaigne (fondé en 2000 par Claude Bébéar) propose une hausse des droits d’inscription Selon cet institut, “trois arguments plaident pour l’augmentation des frais universitaires • le rendement des formations dispensées par l’enseignement supérieur est en grande partie privé puisqu’il bénéficie aux étudiants eux-mêmes ; • à travers les dotations allouées par l’État, l’enseignement supérieur est majoritairement financé par les impôts de tous. Or, en dépit de l’augmentation continue du nombre des étudiants et de la durée de leurs études depuis plusieurs décennies, ce sont majoritairement des personnes issues des classes moyennes et surtout supérieures qui suivent des études supérieures ; • enfin, des frais de scolarité plus élevés, se rapprochant du coût réel des formations supérieures, peuvent remplir une double fonction d’aiguillon de la concurrence entre les établissements et de responsabilisation des étudiants dans leurs choix d’orientation. Des étudiants sollicités pour financer une partie de leurs études sont enclins à attendre en retour des enseignements de qualité”.
Franchises : quand l’université allemande copie McDo Elles vendent la recette de leur succès en kit, louent leurs profs, parfois même leurs locaux et décernent un agrément universitaire au diplôme. De plus en plus, les universités allemandes cèdent certains de leurs cursus ou en créent d’autres à l’attention d’organismes privés qui ne disposent pas d’un grade de l’enseignement supérieur. Ce modèle de franchise tend à se répandre en Rhénanie-duNord-Westphalie et en Basse-Saxe, deux Länder dont la loi sur l’enseignement supérieur autorise de telles pratiques. Le Pr Harald Vergossen, qui enseigne les sciences économiques à la Fachhochschule de Niederrhein, préfère parler de PPP (partenariats public-privé). Une coopération qu’il qualifie « de fructueuse car chacun des partenaires donne ce qu’il a de plus positif ». « L’avantage est que nous disposons de plus de flexibilité qu’une université, notamment pour embaucher et rémunérer des chargés de cours », expose le Pr Vergossen, qui cer-
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tifie que son institut applique les mêmes normes qualitatives que l’enseignement supérieur. D’ailleurs, ajoute-t-il, « nous nous trouvons en concurrence avec d’autres universités et d’autres instituts semblables aux nôtres dans la région, et les étudiants font leur choix ! ». Il est vrai que le modèle essaime. La FH de Niederrhein dispose d’un autre institut « franchisé », spécialisé en expertise comptable. Les franchises se déclinent en Allemagne et même à l’étranger L’université de sciences appliquées de Cologne, la FH Köln, a été le précurseur de ces modèles de franchises. Dès l’année universitaire 2005-2006, elle a vendu une licence à la FOM, une école privée d’économie et de management portant sur un cursus de bachelor of arts en finances, management et marketing international. Aujourd’hui, l’université de Westphalie du Sud va même plus loin et compte désormais des franchisés aussi bien dans l’industrie (centre de formation de Siemens) qu’à l’étranger, tel l’ASET à Barcelone, ou encore les centres de formation du TÜV, le contrôle technique allemand !
n’a pas grand-chose à gagner en cédant à cette supercherie qui consiste à occuper la population entière en lui faisant croire qu’elle participe alors qu’elle subit pour l’essentiel. Cependant, dans une société telle que la nôtre où la consommation est reine, il n’est pas étonnant que le pendant des choix presque illimités (il suffit de songer à l’offre pléthorique pour un objet aussi banal qu’un téléphone, par exemple) soit le besoin presque compulsif de connaître le degré de satisfaction des consommateurs. Mais si les lois du marché et de la concurrence arrivent assez subtilement à autant tenir compte des goûts des personnes qu’à les dicter – ce qui n’est guère rassurant à contempler le monde actuel – il n’y a aucune raison pour que cette mainmise de l’économie dégouline sur le secteur de la formation.”
Noter les profs ? La notation au mérite des profs revient sur le devant de la scène. Le cabinet Alixio, dirigé par Raymond Soubie, ex-conseiller social de Nicolas Sarkozy, a rédigé, pour Luc Chatel, un rapport préconisant des modalités de mise en place d’une évaluation au mérite des enseignants pour décider de leur avancement, et non plus seulement d’un point de vue administratif et pédagogique (comme c’est déjà le cas). A Genève, l’évaluation des professeurs par leurs étudiants, est régulièrement relancée. Déjà plus ou moins obligatoire dans certaines universités et autres HES, elle vient d’être généralisée : désormais, tous les étudiants de l’université évalueront la qualité des cours en vue de les améliorer. Cette initiative serait bien accueillie : “Les étudiants aiment pouvoir donner leur avis, et les enseignants apprécient d’avoir un retour sur les cours donnés. Par contre, les élèves ont du mal à percevoir l’usage fait de ces évaluations. Comme ils ne revoient pas forcément l’enseignant d’une année à l’autre, le retour sur investissement n’est que peu visible pour eux et ils peuvent penser que leur avis reste lettre morte.” “Les résultats obtenus peuvent-ils mettre en péril la place des enseignants? Non, le simple questionnaire ne peut pas suffire à évaluer une prestation dans sa globalité. D’ailleurs, les questions ne portent jamais sur la personne, mais sur ce qu’il fournit en classe. Néanmoins, dans le cas où le questionnaire révèlerait des aspects très insuffisants, une évaluation approfondie peut être décidée.” (Site Le Courrier, Genève) Dans son blog de La Tribune de Genève, Olivier Baud s’interroge : “Sauf à vouloir démontrer l’absurdité de la frénésie autour des notes – rien de plus facile que d’attribuer des points aux joueurs d’une équipe de foot à l’issue d’un match, d’évaluer un vin, de noter des pots de yoghourt, de comparer le jambon cru espagnol et italien, de classer un produit quelconque, une voiture, un ordinateur par rapport à ses concurrents, etc. et qu’importe l’échelle utilisée, sur 10, 20 ou 100, le consommateur lambda, aussi peu averti soit-il, la comprendra immédiatement – l’école publique
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“tous les numéros de lalettredesecoles sont désormais accessibles aux adresses suivantes : http://issuu.com/lettredesecoles http://www.plastgrandouest.net/?cat=3277&PHPSESSID=4f f442a279a34296a9e480bc6c51a5f2
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