La villa comme amplificateur de territoire

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LA VILLA COMME AMPLIFICATEUR DE TERRITOIRE LILI SZABO

MÉMOIRE S9 - TPE 2019 ENSA-MARSEILLE



Couverture, Figure 00 : Pietro Ruga, Plan topographique de la campagne de Rome, da punicum al circeo, 1811


Figure 01 : Fresque du petit palais Gambara reprĂŠsentant la villa Lante Ă Bagnaia


LA VILLA COMME AMPLIFICATEUR DE TERRITOIRE Lili Szabo École Nationale Supérieure d’Architecture de Marseille Département « L’ART DE L’ARCHITECTURE » Enseignement de Master 2 - 1er Semestre 2018-2019 - Séminaire Les Villas romaines du XVIème siècle Dirigé par Jean-Marc Chancel, Jérôme Guéneau, Olivier Merrichelli et Gilles Sensini

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TABLE DES MATIÈRES

Bagnaia

Caprarola

Bassano

Tivoli Rome

Frascati Ostie

4 Figure 02 : Localisation des différentes villas étudiées (exception : Ostie est indiquée pour marquer la position approximative de la villa du Laurentin de Pline l’Ancien)


INTRODUCTION Conception non-archétypales

Les sources : un modèle issu des textes Le programme : la villa, programmer l’indéterminé La villa conçue au moment du développement urbain de Rome

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LA VILLA COMME AMPLIFICATEUR DE TERRITOIRE Le corps-villa

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Faces : Façades, l’expression montrée de la villa

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Déblai/Remblai : modeler la topographie

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Mises en scène : plans et perspectives

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La villa et le lointain : marquer le territoire

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CONCLUSION L’espace du projet

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Les villas «toiles de fond» Les façades duelles La villa non-orientée La villa Lante et la double orientation

Les jardins de la villa d’Este Le plateau à villa La stratégie du plateau variable

Perspective : de la poule ou de l’œuf Les éléments constitutifs de la scénographie Figures spatiales récurrentes et extraordinaires De la partie au tout

La visibilité dans le territoire Vues : transformer le territoire en paysage La villa transparente au territoire L’axe : se projeter dans le lointain Ingénieries de l’eau : se rattacher à un réseau territorial

Le tout de la partie Géométries et compositions Limites : présence et effacement

BIBLIOGRAPHIE 84 INDEX DES ARCHITECTES 86 ANNEXES 88 ICONOGRAPHIE 94

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INTRODUCTION CONCEPTIONS NON ARCHÉTYPALES

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CONCEPTIONS NON ARCHETYPALES Le type ne peut être décrit en termes architecturaux. Tout au plus un modèle dont les caractères seraient à la fois plus purs et plus solidaires peut-il en afficher un «archétype».1 Jean-Marc Lamunière

La typologie en architecture est un mode de classement d’édifices ou de projets selon des caractéristiques choisies. Tous les aspects ne peuvent être choisis, il y a donc une décision et un axe de lecture, ainsi qu’une portée critique même dans une approche qui peut paraître si « scientifique » que l’est la méthode d’analogie typologique. JeanMarc Lamunière dans son article sur le classement typologique en architecture, définit des familles de caractères permettant le classement typologique. Ceux-ci sont les caractères programmateurs, distributifs, dimensionnels, morphologiques, constructifs, historiques et stylistiques. Le type ne résulte pas de la seule correspondance d’un caractère récurrent dans les objets étudiés, mais bien de la relation entre deux caractères ou plus.

1 : Dans la revue Habitation : revue trimestrielle de la section romande de l’Association Suisse pour l’Habitat, 1988 Voir annexes

Les villas suburbaines du XVIème siècle de la région romaine, regroupent un ensemble de projets qui ont une cohérence intellectuelle mais des résultats architecturaux très divers. Elles ne sont donc pas le fruit d’une pure coïncidence chronologique. La cohérence intellectuelle découle de trois facteurs principaux : les sources, le «programme» et le contexte de Rome.

La villa ne sera donc pas définie de façon à en abstraire un quelconque archétype, mais elle ne sera pas étudiée non plus sous le prisme d’une stricte grille comparative des caractères listés par Lamunière. L’angle de lecture sur les villas choisi dans ce mémoire est leur mise en scène et leur conception dans le territoire, ainsi que la mise en scène du territoire dans la villa. Ceci entraine des questionnements : Comment la villa s’articule-t-elle dans le territoire ? Comment la

villa est-elle mise en scène et met-elle en scène le territoire ? Quels sont les outils spatiaux, visuels et techniques employés dans cette mise en scène ? Ce mémoire se lit donc comme un aller-retour permanent, de la villa au territoire et du territoire à la villa. Il y a une continuité des outils de conception à toutes les échelles, ce qui justement permet d’infiltrer le territoire. Cette déclaration sera développée et étoffée au cours du mémoire. Il est également une caractéristique importante des villas et qui permet ces analyses multiscalaires, c’est l’enchâssement efficace et évident des échelles. Pour pouvoir aborder le sujet, comme dans la conception de la villa, la lecture se fait du proche au lointain. Tout d’abord la villa est analysée comme un corps où s’articulent le bâtiment, les jardins, les annexes ainsi que le contexte proche, géométriquement et dans la topographie. Ensuite, les faces que présente la villa sont étudiées à part pour détacher certaines stratégies d’orientations et de mise en scène par le traitement des façades. Le mémoire est consacré aussi bien aux outils qu’aux résultats visuels de la scénographie des villas. Donc le déblai-remblai, soit le modelage du territoire topographique est aussi bien étudié que les dispositifs spatiaux et visuels de la scénographie des villas. Et enfin, la relation de la villa au lointain est étudiée. Les effets de visibilité depuis la distance mais surtout la récupération du territoire dans le projet de la villa et comment par les axes, les vues et l’hydrographie la villa transforme le territoire en paysage et l’intègre à son projet. La réflexion et l’analyse sont basées sur un corpus de villas analysées pour déceler les procédés, relever des récurrences et pointer certains phénomènes. Ce

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sont les villas Farnesina (Rome, 1509-1511), Lante (Rome, 1518-1531), Madame (Rome, 1525), Falconieri (Frascati, 1550), Giulia (Rome, 1550-1555), d’Este (Tivoli, 1550-1572), Farnèse (Caprarola, 1559-1630), Médicis (Rome, 1564-1576), Mondragone (Frascati, 1567 ...), Lante (Bagnaia, 1568-1578), Aldobrandini (Frascati, 1600), Giustiniani (Bassano, transformation d’un château du XIIème siècle durant les XVIème et XVIIème siècles).

Les sources : La villa, un modèle issu des textes

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La villa est un modèle qui se développe dès le début du XVIème siècle à partir du modèle de la villa romaine antique. A cette époque, presque aucune référence archéologique n’existe, Pompéi ne sera découvert qu’au XVIIIème siècle, ce n’est donc que par des textes que les architectes de l’époque peuvent reconstituer les modèles. Les textes majeurs concernant les villas sont le traité De Architectura de Vitruve et les lettres de Pline l’Ancien. Ces textes ont des caractéristiques communes. Ils évoquent la villa par une succession de pièces aux différentes caractéristiques, et parlent amplement de l’importance de l’orientation, de la course du soleil par rapport aux fonctions. Dans la lettre à Gallus c’est une narration, un travelling dans la villa qui montre une succession d’espaces avec des vues, des ensoleillements, des rapports intérieur-extérieur très riches. Certaines formes sont évoquées comme le portique en forme de D, mais généralement cela ne permet pas de donner une réelle idée des dimensions, des formes des espaces. C’est un parcours sensoriel qui est raconté. Dans le texte de Vitruve, certaines proportions et dimensions générales sont données, ainsi que l’agencement de certaines pièces entre elles. Mais il n’apparaît pas possible de définir un modèle précis à partir de ses écrits pourtant assez détaillés. Face à de telles références l’interprétation architecturale peut être très large formellement mais l’on comprend que la conception de la villa renaissante se construise comme une composition par parties assemblées.

Le programme : La villa, programmer l’indéterminé Le modèle de la villa romaine se fonde, de manière physique et également symbolique comme la création d’un monde, en coupure de la ville. C’est en effet la création du lieu de l’otium, en opposition avec le negotium, un havre de paix et de loisirs où il n’est pas question de travail et de politique mais bien plus de refuge de repli pour l’oisiveté, la luxure et la nonchalance. Les commanditaires de nombreuses villas étaient en effet des papes, cardinaux, gouverneurs et autres acteurs de la vie politique ou religieuse. Dans le même temps, c’est un lieu de représentation et de pouvoir. Loin d’une contemplation monacale, les propriétaires invitaient l’intelligentsia et utilisaient les villas comme des outils de démonstration de leur statut économique et social. La villégiature qui connaît un regain important au XVème siècle entraîne une extension du pouvoir urbain dans la campagne romaine. La villa est un espace qui prépare les conditions de son autonomie. La fonction nourricière de certains jardins correspond à une volonté de ne pas avoir de dépendance et de négoce avec la ville. Ce lieu hors de la ville est le lieu de l’hétérotopie1. Michel Foucault définit son concept d’hétérotopie comme le concept d’espace concret de l’utopie, des lieux qui existent hors de tous les lieux et qui s’opposent aux autres espaces du réel. La villa romaine peut alors être comptée 1 : Concept parmi ces hétérotopies et particulièrement développé en le jardin. Le jardin italien de la Renaissance 1966 par le philosophe Michel s’y prête totalement car il est conçu Foucault comme une juxtaposition, un assemblage d’éléments et de symboliques permettant de créer un nouveau monde. Dans l’ensemble de la pensée de la villa il y a une dualité de la fermeture et de l’ouverture. Cette dualité est à la fois matérielle et métaphysique, elle s’applique à toutes les échelles, d’une pièce à l’ensemble de la villa et ses jardins. La villa n’est donc pas pensée dans une logique de rentabilité et de construction d’un réel programme mais bien plutôt la création d’un lieu de la beauté et de l’harmonie. La part de «programme» est extrêmement minoritaire dans le projet des villas.


Figure 03 : Axonométrie de la villa Giulia - Circonscrire et définir une limite périphérique au projet.

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Figure 04 : Fresque du Studiolo de Ferdinand de Médicis, peint par Jacopo Zucchi - Recréer un monde, même dans un intérieur


La villa conçue au moment du développement urbain de Rome Si la structure urbaine de Rome, ainsi que son expansion a été en relative stagnation durant le Moyen-Âge (les papes étant à Avignon et la puissance de Constantinople détournant l’activité de Rome), la Renaissance fût l’époque de grandes réformes urbaines qui ont entraîné un nouvel élan de développement. Le plus significatif dans l’histoire de cette réforme urbaine est le plan urbain dirigé par Sixte V (15851590) et conçu par Domenico Fontana. Ce qui est si particulier est la manière dont est conçue la ville de Sixte V. Il est des théories qui énoncent que la réforme urbaine de Sixte V n’a pas une ambition formelle ou plastique mais l’unique but d’asseoir Rome de nouveau comme Caput Mundus Cristiani. Les raisons d’une telle réforme ne nous intéressent que peu au regard de l’influence qu’elle aura pour ses qualités spatiales, scéniques et symboliques. Contrairement à ce qui est communément admis, beaucoup des axes rectilignes avaient été dessinés et réalisés par ses prédécesseurs, mais l’art tient dans la connexion établie par les perspectives. La rue devient le verbe du langage urbain. La rue est l’espace de la perspective et du déplacement. La villa, au-delà de son caractère autarcique, accompagne cette transformation urbaine au même titre que le palais et participe de la conception de la ville en un réseau. Le plan de Sixte V porte également le nom de plan de réorganisation de la campagne. Il est en ceci novateur qu’il s’étend hors de la ville, avec des axes qui s’orientent vers le lointain pour indiquer une extension future. C’est une démarche intellectuelle, cette projection de la ville dans la campagne que l’on retrouve dans la conception des villas.

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La villa, dont nous avons montré le caractère autarcique dans les parties précédentes pourrait paraître un élément si ce n’est néfaste, tout du moins indifférent à la ville. Pourtant Jean Castex énonce dans Renaissance, Baroque et Classicisme que «la villa et le palais romain accompagnent une transformation de la forme urbaine marquée par des tracés rectilignes qui se constituent peu à peu en réseau et développent une nouvelle rationalité de l’ensemble urbain.»

Ce que nous essayons de dire est que la conception urbaine et la conception de la villa ne sont pas antinomiques à cette époque et qu’elles se rejoignent dans la création d’espaces nouveaux coordonnés par la perspective.


Figure 05 : Anonyme, Vue de la Rome de Sixte V, ca 1589-1590. Fresque, Bibliothèque Apostolique du Vatican

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LA VILLA COMME AMPLIFICATEUR DE TERRITOIRE Le corps-villa Faces : Façades, l’expression montrée de la villa Déblai/Remblai : modeler la topographie Mises en scène : plans et perspectives La villa et le lointain : marquer le territoire

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LE CORPS-VILLA

Un corps est un groupe d’éléments aux propriétés différentes formant un ensemble cohérent et structuré. Le corps-villa est une notion inventée dans le mémoire pour désigner l’ensemble comprenant le bâtiment de la villa, les différents jardins, les annexes ainsi que les éventuels éléments d’accroche urbaine (parvis, escaliers …). Cette analyse décrit tout d’abord l’inscription des différents éléments du corps-villa dans l’espace et la topographie. Elle montre l’articulation des différents éléments entre eux puis par rapport à leur contexte. Les questions du périmètre ainsi que de la position des éléments du corps-villa en périphérie ou à l’intérieur du périmètre sont très importantes. Et enfin, l’espace «touché», l’espace environnant la villa, est étudié. Le corps-villa s’articule-t-il donc de la même façon en contact direct avec un tissu urbain, avec une route, un champ, un fleuve ou une forêt. L’articulation et la disposition du corps sous-entend une certaine notion de posture1. Dans les pages suivantes, les corps-villas sont présentés un à un. Cela permet également de montrer le corpus d’étude sur lequel est basé le mémoire.

1 : Posture : attitude du corps, volontaire ou non, qui se remarque, soit par ce qu’elle a d’inhabituel, ou de peu naturel, de particulier à une personne ou à un groupe, soit par la volonté de l’exprimer avec insistance. Définition du Larousse

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Figure 06 : Axonométrie générale de la villa Médicis

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Viale longo

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La villa Médicis (figure 06) :

1564-1576, Commanditaires : Cardinal Ricci da Montepulciano, Ferdinand de Médicis, Architectes : Giovanni et Annibale Lippi, Bartolomeo Ammannati

La villa Médicis est située sur le Mont Pincio, à Rome, le long du mur Aurélien. Le plateau de la villa est surélevé de 5 mètres par rapport à la voie. Le corps-villa est organisé en trois parties, le bosco, le piazzale et les carrés. Le bosco est surélevé sur une terrasse, densément planté de pins et terminé par le Parnasse, monticule dépassant les pins. Le piazzale est composé de la cour d’honneur et de la villa en forme de L, placée en bordure du plateau, entre la ville et le jardin. Les carrés sont des jardins à pièces, en parterres et haies. Une allée traverse ces trois parties sur toute la longueur, la viale longo, depuis l’entrée au sud. Les vignes situées à l’est du bosco ne sont pas intégrées à la composition générale.


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Figure 07 : Axonométrie générale de la villa Giulia 1. Parvis 2. Casino 3. Cour

4. Nymphée 5. Jardin secret

Axonométrie générale

La villa Giulia (figure 07) :

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1551-1553, Commanditaire : Jules III, Architectes : Jacopo Barozzi da Vignola, Giorgio Vasari, Bartolomeo Ammannati, Michel-Ange

La villa Giulia est située à Rome, dans un fond de vallon à proximité du Tibre. Conçue comme un paysagère complexe clos, elle estCoupe composée d’une succession de jardins et de bâtiments. Le premier bâtiment, par lequel se fait l’entrée, est un rectangle tronqué d’un demi-cercle. De ces côtés commencent des murs latéraux qui délimitent le premier jardin. Ce jardin est clos par un bâtiment-mur sur deux étages à la fonction purement séquentielle. Ensuite, un petit jardin-nymphée en exèdre est placé en contrebas. Ce jardin est fermé d’un mur-pièce qui crée une loggia en serlienne permettant l’accès au dernier jardin finalement ceint par le mur périphérique.

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projet initial

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Figure 08 : Axonométrie générale de la villa d’Este Axonométrie

La villa d’Este (figure 08) :

1563-1565, Commanditaire : Hippolyte d’Este, Architecte : Pirro Ligorio

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La villa d’Este se situe à Tivoli, à une vingtaine de kilomètres de Rome, elle est placée à flanc de colline, en limite de la ville. Le corps-villa est organisé en terrasses dans la pente traversées par un axe longitudinal central, la villa est placéeCoupe sur lepaysagère plateau le plus haut. Chaque plateau est organisé orthogonalement à l’axe général et s’ouvre sur la vue au sud tandis qu’il est clos par une fontaine au Nord. La villa est à l’intersection de la ville et du jardin, c’est un ancien couvent, avec une cour centrale converti en villa.


Figure 09 : Axonométrie générale de la villa Aldobrandini

La villa Aldobrandini (figure 09) :

1600, Commanditaire : Cardinal Pietro Aldobrandini, Architectes : Giacomo della Porta, Giovanni Fontana, Carlo Maderno Rome

Frascati

mer

La villa Aldobrandini, ou villa Belvédère, est située à Frascati sur le flanc nord de la colline. Le corps-villa est organisé le long d’un axe dans la pente la plus forte. La partie basse est organisée en patte d’oie avec une allée centrale plantée. Une double volée de rampes permettent de joindre la patte d’oie à la villa. La villa est assez longue et est placée perpendiculairement à l’axe principal, la villa fait la jonction avec le plateau haut des jardins. Le plateau haut des jardins est clos au sud par le théâtre d’eau. Enfin, au-dessus du théâtre d’eau, des escaliers et des éléments de fontainerie sont organisés en chaîne, coupés dans la masse végétale, le long de l’axe.

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Figure 10 : Axonométrie générale de la villa Madame

La villa Madame (figure 10) :

1525, Commanditaire : Cardinal Jules de Médicis, Architectes : Raffaello Sanzio dit Raphael et Antonio da Sangallo

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Partie non réalisée

Partie réalisée

La villa Madame est située sur le Mont Mario au nord de Rome. Le projet n’ayant jamais été terminé, l’ambition initiale est difficilement lisible. Le corpsvilla est composé sur une croisée d’axes dont le centre est la cour ronde. L’arrivée se fait par une allée au sud du bâtiment. Sur le premier axe sud-nord il y a une succession de pièces intérieures et extérieures (vestibule, cour, loggia, cryptoportique ...), le second axe se compose en revanche de partie plus extérieures (le théâtre de verdure, la cour et l’hippodrome)


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Figure 11 : Axonométrie générale de la villa Falconieri

La villa Falconieri (figure 11) :

Axonométrie générale

1550 (construction) 1628(restauration) Commanditaires : Alessandro Rufini (1550), Orazio Falconieri (1628) 1 - Entrée principale Architecte : Francesco Borromini 1628) 2 - Jardin haut 3 - Jardin bas

4 - Bassin La villa Falconieri est située à Frascati. Le corps-villa 5 - Loggia est composé de trois parties principales. La première est un jardin densément planté découpé en carrés, il s’ouvre sur un parvis semi-circulaire. La deuxième partie est la villa, très en longueur, avec un corps central en avancée sur le parvis, doté d’une loggia largement ouverte. Et la dernière partie est un jardin en carrés, placé orthogonalement à la villa, sur un plateau en contrebas, il avait autrefois une fonction nourricière pour la villa.

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Coupe paysagère 6

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Figure 12 : Axonométrie générale de la villa Mondragone

La villa Mondragone (figure 12) :

1567, 1576-1595, 1616-1618, Commanditaires : Cardinal Marcus Sitticus Altemps (1567-1613), Famille Borghese (1613-1618) , Architectes : Martino Longhi (1567-1595), Jan van Santen (16131618)

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La villa Mondragone est la plus grande villa de Frascati. Fruit de plusieurs extensions successives elle est caractérisée par un axe de 700 mètres de long qui relie le barco Borghèse1, grand carré planté, l’allée bordée de cyprès puis un énorme 1 : Le barco Borghese était le socle sur lequel se place la villa. La villa est parc de chasse composée d’un corps principal orienté vers fermé et boisé le paysage avec une loggia centrale puis installé sur des une galerie qui se replie en L pour créer une citernes du Ier siècle avant J.C. large cour. Au fond du plateau, s’enfoncent dans la colline la fontaine du dragon et un jardin en demi-cercle.


Figure 13 : Axonométrie générale de la villa Farnèse

La villa Farnèse (figure 13) :

1521-1559, Commanditaire : Cardinal Farnèse, Architecte : Giacomo Barozzi da Vignola

La villa Farnèse est placée en haut du village de Caprarola, Le projet de la villa marque le village par une longue rue tracée au moment de la construction. Au bout de cette rue, un parvis avec des escaliers permet de rejoindre la villa. La villa est un pentagone avec une cour ronde en son centre. Le pentagone induit la composition des jardins carrés dits d’hiver et d’été. Le reste du jardin est un bois au sein duquel se trouve le casino, un ensemble indépendant composé autour de l’eau.

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et Roxane Chigi). La é et la loge s murs de es quant à 50. Lors de création de nombreux lier appelé dernier, de e véritable veaux. En à lui seul de la villa servant les planchers ) auxquels accueillant n observe s cachées es par les nsi que les nier étage. qui résulte cipales, est achinerie.

ont liées uration, la e la loggia dans une 22 et de 1650, picturaux, erts sur les bre ont été Marrata qui ce dernier lusoire sur

le mur du fond de la loggia. La loggia d’Amour et Psyché est également fermée depuis la fin du 17ème siècle afin de protéger les fresques de la voûte de la détérioration. Cependant la fermeture actuelle réalisée avec de grandes fenêtres vitrées restitue à l’environnement la perméabilité visuelle et l’intégration perceptuelle avec l’extérieur. A partir de 1861, la villa connaît un autre projet de restauration de la part de l’architecte Antonio Sarti qui ne considère plus la loggia d’Amour et Psyché comme une pièce d’entrée mais comme un lieu de réceptions et de représentations d’événements. Par conséquent, l’entrée principale de la villa impose au visiteur d’accéder par la Figure 14: Axonométrie générale de la villa Farnesina façade Sud. 1. Fleuve du Tibre 2. Loggia sur le fleuve 3. Jardins 4. Verger 5. Cour 6. Jardin secret 7. Maison Farnese 8. Écurie de Raphaël 9. Palais Riario

La villa Farnesina (figure 14) :

1508-1520 , Commanditaire : Agostino Chigi, Architecte : Baldassare Peruzzi

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La villa Farnesina est située à Rome, dans le Trastevere, en bordure du Tibre, sur un terrain assez plat. Le jardin est pris entre la via Septimiana (aujourd’hui via della Lungara) et le Tibre. Sa composition a été modifiée depuis mais le plan ci-contre montre le corps-villa décomposé en rectangles, avec des jardins en carrés, un piazzale, la villa et un jardin secret à l’arrière de la villa. Le bâtiment est en forme de U avec la loggia d’Amour et de Psyché à l’intérieur du U, et la loggia de Galatée dans l’aile ouest.

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1. Plan situation première phase constructive,1511

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AXONOMETRIE

Figure 15 : Axonométrie générale de la villa Lante

La villa Lante (figure 15) :

1518-1531 , Commanditaire : Magistrat Baldassare Turini, Architecte : Giulio Romano LA VILLA DANS SES JARDINS

L’ensemble du corps-villa est placé sur un plateau, en surplomb sur le reste de la ville, en haut de la colline du Janicule à Rome. Le plateau est délimité à l’ouest par le mur Aurélien et à l’est par le mur de soutènement datant de l’époque romaine mais surélevé, au même titre que le plateau des jardins, au moment de la construction de la villa. Le jardin est organisé en deux parties séparées par une allée centrale. Au nord, le jardin est un simple parterre, tandis qu’au sud le COUPE PAYSAGÈRE 23 jardin est subdivisé par des haies et ponctué par des fontaines. La villa, au bout de l’allée, est juchée sur le mur de soutènement du plateau. La villa est caractérisée par sa loggia qui occupe toute la largeur de sa façade sur Rome et offre une vue des plus rares.

COUPE PAYSAGÈRE- RAPPORT À LA VILLA MÉDICIS


Figure 16 : Axonométrie générale de la villa Giustiniani

La villa Giustiniani (figure 16) :

1599-1610, Commanditaire : Vincenzo Giustiniani, Architectes : Carlo Maderno, Carlo Lambardi, Girolamo Rainaldi

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La villa Giustiniani est située dans le village de Bassano, c’est un château du XIIème siècle, reconverti en villa au XVIème siècle par la famille Anguillara. Mais les modifications les plus importantes et notamment l’intégralité du jardin furent réalisées sous la commande de Vincenzo Giustiniani. En traversant la villa, un pont passant au-dessus de la voie mène au jardin. Le jardin est en pente, sur la topographie de la colline. Il est organisé en plateaux reliés par des volées d’escaliers, dans l’axe central de la villa. Chaque plateau-palier est ponctué d’un élément singulier (fontaine, sculpture, nymphée, etc...) Sur le dernier et plus haut plateau des jardins est placé le casino.


Figure 17 : Axonométrie générale de la villa Lante à Bagnaia

La villa Lante à Bagnaia (figure 17) :

1566-1596, , Commanditaires : Cardinal Gianfrancesco Gambara (1566-1587), Alessandro Peretti di Montalto (1587 -1596) Architectes : Giacomo Barozzi da Vignola, Tommaso Ghinucci et éventuellement Giacomo del Duca

Barchetto Casins

La villa Lante est située à Bagnaia, à 4km de Viterbe. Le corps-villa est contenu dans un mur périphérique à la forme irrégulière. On peut très rapidement distinguer une partie principale, composée de façon symétrique le long d’un axe central puis un large barchetto, traversé d’allées diagonales et ponctué de fontaines, de labyrinthe et pavillons, récupérant la géométrie hasardeuse du terrain. La partie principale se déroule en plateaux successifs, tous reliés par des escaliers et un ensemble de fontaines, du premier plateau découpé en carrés de parterre et de fontaines, au plateau des deux casins de Gambara et Montalto, jusqu’à la dernière terrasse, le bosco où se trouve la source, encadrée par deux temples dédiés aux muses.

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On peut remarquer certaines récurrences dans l’organisation de ces 12 corps-villa. Toutes les villas, sont composées, situées en relation par rapport à leur espace extérieur. Il y a des corps qui sont structurés par un axe, ayant pour attache à la ville, une allée, puis la villa puis des jardins arrière, c’est le cas des villas Mondragone, Farnèse, Giustiniani et Aldobrandini. Il y a aussi les corps qui s’appuient sur une série de plateaux puis se terminent par le bâtiment de la villa en position haute. Cette figure est incarnée dans les villas Madame et d’Este. Enfin il y a les corps-villas qui créent un plateau et un mur périphérique les jardins et le bâtiment de la villa sont placés sur ce plateau. Ce sont, de façon très différente les villas Lante, Farnesina et Médicis. Les villas Falconieri, Lante à Bagnaia et Giulia sont des exceptions dans ce corpus. La villa Falconieri, de par son jardin latéral n’incarne pas une des postures générales définies. La villa Lante à Bagnaia pourrait s’apparenter à la première catégorie décrite, si l’on oubliait le barchetto. Et la villa Giulia est un objet autonome où le jardin est placé comme à l’intérieur du bâtiment.

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On peut de façon générale observer 1 : Citation de Pierre que les éléments, à la géométrie Caye dans Empire et assez élémentaire, sont organisés décor par juxtaposition ou par enfilement le long d’axes, de façon assez simple. Mais la composition générale n’en est pourtant pas rigide. «Le génie de l’architecture humaniste et classique est son plan clair et ordonné. L’architecture est l’art du dégagement des masses et du déplacement des lignes en vue de tracer des parcours libres et compossibles»1.


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FACES : FAÇADES, L’EXPRESSION MONTRÉE À LA VILLE DE LA VILLA

Pour comprendre la scénographie des villas, l’analyse des façades apporte des éléments très significatifs sur la posture et l’orientation des villas. Il est possible de détacher quatre différents types de villas quant à leurs façades. Ces types ne sont pas nécessairement les plus récurrents, mais ils apportent des éléments enrichissants du point de vue scénographique. Les villas «toiles de fond», les façades duelles, les villas non-orientées et le cas particulier de la villa Lante doublement orientée. Les villas «toiles de fond» : Sur la figure 19 représente la façade de la villa d’Este. La villa Madame appartient également à cette catégorie, mais le manque de dessins du projet initial (la villa étant inachevée) ne permet pas de proposer un dessin pour illustrer le propos. Ces deux villas sont mono-orientées, quant au traitement de leurs façades. Leur position dans la topographie avec la villa en partie haute des jardins et la façade arrière largement absorbée en soutènement, ou

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Figure 18 : Façades de la villa Falconieri

dans la ville existante pour la villa d’Este, facilitent et conditionnent cette mono-orientation. Cette façade unique est cependant complémentée d’une série de façades, celles des restanques qui ont la même orientation et complètent la perception des façades. Ceci est particulièrement remarquable dans la villa d’Este. Ces façades ne se limitent donc pas à la largeur du bâtiment mais viennent s’étirer pour marquer quasiment toute la largeur du terrain, le bâtiment devient lui aussi une restanque. La villa Falconieri, figure 18, est un autre exemple de villa «toile de fond» sans être totalement comparable aux villas Madame et d’Este. Le bâtiment très en longueur, de par sa morphologie présuppose déjà au maximum une double orientation. La façade ouvrant sur le parvis (place d’honneur) est la seule qui soit ornementée, celle de l’arrivée majestueuse avec une loggia qui marque la façade. A l’arrière, la façade qui ouvre sur le paysage lointain est travaillée de façon très rudimentaire, avec un rythme régulier et aucun ornement.


Figure 19 : Façade Villa d’Este

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Figure 20 : Façades de la Villa Giulia (en haut : façade urbaine, en bas : façade intérieure)

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10m


Les façades duelles : Les villas Aldobrandini (figure 22), Giulia (figure 20) et Médicis (figure 21) présentent une dualité entre les façades intérieures et extérieures. Ces villas ont donc une similitude dans la conception des façades alors que leur organisation générale du corps-villa est radicalement différente. Pour mettre en évidence le traitement dichotomique de ces façades, les surfaces de façades qui n’ont pas de relief ou d’ornement particulier sont indiquées en jaune. On peut donc très rapidement observer le renversement de la proportion entre une façade extérieure, presque austère et beaucoup plus plate et simple en opposition à une façade intérieure, extrêmement ornée. Un autre élément que l’on retrouve dans les trois villas, uniquement sur la façade intérieure, est la colonnade. Dans la villa Giulia c’est une arcade semi-circulaire qui embrasse les jardins, dans la villa Médicis, c’est une loggia en serlienne, ouverte sur le jardin et dans la villa Aldobrandini, ce sont trois loggias superposées, la première au niveau du jardin, la seconde donnant la vue sur le premier palier de l’escalier d’eau et la troisième donnant la vue sur la source de l’escalier d’eau. La façade d’arrivée, orientée vers la ville, pour les villas Aldobrandini et Médicis, est assez monumentale. A cause de la différence de niveau, mais surtout par le redécoupage de la façade par la composition, la façade côté jardin a une échelle beaucoup plus réduite. Le bâtiment exprime son intériorité par le traitement des façades

31


32

Figure 21 : Façades de la Villa Médicis (en haut : façade urbaine, en bas : façade intérieure)


33

Figure 22 : Façades de la Villa Aldobrandini (en haut : façade côté ville, en bas : façade côté jardin)


La villa non-orientée : La villa Farnèse (figure 23) est un exemple assez particulier quant à la conception de ses façades. En effet, elle n’est pratiquement pas orientée par le traitement de ses façades. Nous avons déjà vu dans la description du corps-villa (p21) que la villa était orientée par ses éléments adjacents (les jardins d’hiver et d’été et l’escalier d’entrée). Deux façades sont représentées ci-contre, un dessin représentant les quatre premières faces du pentagone (qui sont pratiquement identiques) puis la façade d’entrée en bas. Il est nettement visible qu’il y a un changement entre ces quatre façades et la façade d’entrée, mais contrairement aux villas présentées précédemment, il n’y a pas de changement de registre, de rupture d’échelle de la composition générale. La loggia est intégrée sans perturber la composition verticale contrairement à ce que l’on pouvait voir dans les villas Médicis et Aldobrandini. Finalement, ce sont encore une fois les éléments adjacents qui caractérisent particulièrement les différentes faces de cette villa. On remarque dès le premier coup d’œil, les escaliers et la succession de portes dans cet élément sur la façade d’entrée

34


35

Figure 23 : Façades de la villa Farnèse (façade représentant les quatre façades quasiment identiques puis façade est principale)


La villa Lante et la double orientation : La villa Lante est placée en bordure d’un plateau en surplomb par rapport à Rome. Les façades latérales, perpendiculaires au mur de soutènement du plateau, sont identiques, elles sont assez simples mais le rythme des pilastres se resserre au centre pour créer une centralité dans la façade. Les façades d’entrée et sur Rome sont plus courtes, seulement composées de trois travées de fenêtres. La façade d’entrée est marquée par la porte d’entrée et quelques balcons tandis que la façade côté Rome est caractérisée par la loggia ainsi que le mur de soutènement du plateau des jardins. On peut donc observer une double orientation, vers le jardin pour l’arrivée à la villa, puis vers Rome ce qui rend la villa reconnaissable depuis la ville.

Façade Nord 1/100 ème

36 Façade ouest 1/100 ème

Figure 24 : Façades de la villa Lante (en haut : façade latérale ; à gauche : façade côté jardin ; à droite : façade sur la ville)


37


DÉBLAI/ REMBLAI : MODELER LA TOPOGRAPHIE

Dans les dispositifs de mise en scène dans la villa, les différences de niveaux, les plateaux, les effets de surplomb ... sont essentiels. La génération de cette topographie du projet nécessite un modelage du terrain parfois très important. Le modelage topographique ne se limite pas à la seule bascule de volumes de terre en déblai-remblai (qui si elle doit être exacte est déjà un travail complexe). Il suppose également une conception ingénieriale et esthétique des murs de soutènement. Nous pouvons classer ce travail de modelage topographique en trois types principaux : la stratégie de l’intégrale topographie reconstituée, illustrée par la villa d’Este, la stratégie du plateau à villa illustrée par les villas Médicis et Lante et enfin la stratégie du plateau variable illustrée par la villa Aldobrandini. Les jardins de la villa d’Este :

38

La villa d’Este est un exemple majeur pour illustrer le déblai-remblai car le travail de plateau et de modification du territoire topographique a été colossal. Le terrain sur lequel s’étendent les jardins est en bordure de ville, encastré dans une pente naturelle qui n’est pas parallèle aux plateaux conçus mais tournée à 45°. La figure 26 illustre l’actuelle topographie des jardins de la villa d’Este en montrant en rouge la partie qui a été déblayée et en vert la partie remblayée. N’ayant aucune donnée précise sur la topographie antérieure au projet, il est impossible de formuler une quelconque hypothèse de parfaite équivalence du volume déblayé et remblayé. La pente naturelle (supposée) combinée avec la volonté de créer des plateaux parallèles à la façade de la villa (installée dans un couvent préexistant)

entraînent une asymétrie des jardins. Au nord, les plateaux se terminent par des annexes, orgues, fontaines ... qui sont encastrés dans la colline entaillée. En revanche, au sud, les plateaux sont décollés de la colline, maintenus par un mur de soutènement jusqu’à 10 mètres au-dessus du terrain naturel. Entre chaque plateau, un mur de soutènement est nécessaire, il est traité de différente façon à chaque niveau, avec notamment le mur aux cent fontaines. Une des plus belles réalisations de mur de soutènement dans la villa d’Este est le mur extérieur. Il a même fait l’objet d’une représentation en soi par Constantin Bourgeois (figure 25), où le pittoresque italien est incarné par cette architecture ingénieriale. Le mur de soutènement est composé en arches (parfois doubles quand le mur est haut) et les piliers de ces arches ont un fruit. Ce dessin du mur de soutènement permet de retenir un volume de terre important tout en économisant de la matière.


Figure 25 : Constant Bourgeois, Vue de l’extérieur de la villa d’Este, tiré de Recueil de vues et fabriques pittoresques de l’Italie, 1804

39

Figure 26 : Axonométrie du déblai-remblai supposé dans les jardins de la villa d’Este


Figure 27 : Coupe longitudinale des jardins de la villa d’Este

40

Figure 28 : Coupe transversale des jardins de la villa d’Este


41


Le plateau à villa : Cette autre stratégie du modelage du terrain est illustrée par les villas Lante et Médicis. Elle est designée ici comme plateau à villa car elle consiste en un plateau plat sur lequel sont placés le bâtiment et les jardins de la villa, en surplomb de la ville. Dans le cas de la villa Médicis comme de la Lante au Janicule, les villas sont placées en bordure du mur Aurélien (indiqué sur les coupes 29 et 30). Le mur Aurélien est ainsi utilisé comme mur de soutènement sur tout un flanc des jardins. Il est reconnaissable à ses postes de garde et ses angles aux harpages de pierre. Dans le cas de la villa Lante, il y avait déjà sur l’autre façade du plateau, côté Rome, un mur qui faisait partie du complexe de la villa antique antérieure à la villa Lante, qui a été rehaussé pour permettre de créer un plateau d’autant plus en hauteur. Dans le cas de la villa Médicis ce mur de soutènement en direction de Rome a été réalisé lors de la construction de la villa, y est intégré une rampe pour les chevaux, autrefois destiné à la sortie 1 : Casin principal : de la villa. Bâtiment de la villa, Ces deux villas ont également leur terme emprunté à casin principal1 placé en bordure de ce Percier et Fontaine dans leur recueil des mur, face à Rome. Le casin devient lui villas de Rome aussi édifice de soutènement et, dans le cas de la villa Médicis, le moyen de créer une double entrée, sur l’esplanade liée à la ville 42 et sur le piazzale directement au niveau des jardins. Dans la villa Médicis, il y a également un deuxième plateau qui est créé, celui du Bosco. Le mur de soutènement qui est visible sur la coupe 30 est travaillé comme une galerie, avec une succession de niches et de pilastres.

Mur Aurélien

Figure 29 : Coupe du plateau de la villa Lante 5m

Façade côté ville 1/150

RDC

ENTRESOL

R+1

R+2

R+3

R+4

toiture

Mur Aurélien

Figure 30 : Coupe du plateau de la villa Médicis Coupe transversale 1/300

5m

25m


43


La stratégie du plateau variable :

44

La villa Aldobrandini incarne la stratégie du plateau variable : les plateaux n’occupent pas l’intégralité du terrain mais sont stratégiquement plus ou moins larges. La villa Aldobrandini n’est pas la seule à avoir cette démarche mais elle l’illustre particulièrement bien. On peut détacher 3 différentes zones qui correspondent à trois façons différentes d’exprimer ce modelage. La zone A est la partie basse, d’entrée avec des allées qui se séparent en triangles depuis la place d’arrivée. Cette zone est une grande surface inclinée. La zone B est une succession de plateaux qui occupent toute la largeur du terrain. Ces plateaux sont liés par des rampes latérales, puis par la villa. Les murs de soutènement sont architecturés et complètent la composition de la façade de la villa. Le théâtre d’eau, qui est le dernier mur de soutènement avant le bosco, est une magnifique nymphée lourdement ornementée, composée de niches et de pièces. La zone C est l’allée du bosco, une série d’escaliers et de fontaines qui s’enfonce dans la colline densément boisée. Dans cette partie, seule la largeur de l’escalier et un petit élargissement au niveau des paliers sont creusés dans le terrain naturel. Le dégagement de la zone basse (A), et les quelques plateaux surélevant la villa permettent de lui donner plus de monumentalité, alors que l’étroitesse de l’axe dans le bosco permet d’utiliser la forêt voisine comme un élément direct du jardin et fait disparaître toute notion de limite du projet.


C

B

A

Figure 31 : AxonomÊtrie villa Aldobrandini avec les plateaux dans l’axe

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MISES EN SCÈNE : PLANS ET PERSPECTIVES

Perspective : de la poule ou de l’œuf La Renaissance correspond à la découverte de la perspective et de sa théorisation. Les écrits de Brunelleschi, Alberti et Piero della Francesca auront un impact immense dans la peinture. Les avancées de la perspective scientifique ont permis au XVème siècle de développer des images, principalement dans la peinture, qui correspondent à la vision qu’en a l’œil humain. Mais nous ne sommes que peu intéressés ici par la représentation en perspective, car ce qui est significatif pour la villa est le processus inverse. En effet, Brunelleschi, Alberti, parmi d’autres étaient des architectes qui voulaient également par le biais de la perspective pouvoir prévoir l’effet visuel de leurs projets avant la construction. L’impact qui est observé dans l’architecture n’est pas resté au seuil de la perception mais a bien infiltré le champ de la conception. Nous avons déjà évoqué par exemple l’espace perspectif de la ville de Sixte V. La connaissance des principes perspectifs chez les architectes de la Rome du XVIème ne fait pas de doute. Dans Empire et décor , Pierre Caye parle d’eurythmie1 comme la décision «d’adapter l’apparence de l’œuvre au regard du spectateur», et pour cela de «sacrifier la loi de l’œuvre au jugement de l’œil.».

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1 : Voir Chapitre III L’eurythmie ou le redoublement du trait dans Empire et Décor de Pierre Caye 2 : Définition du Larousse 2018

La perspective nous permet de faire le lien avec le postulat que l’implantation et la composition des corps-villas relèvent d’une certaine scénographie. Il est intéressant de remarquer que dans son sens originel, la scénographie désigne l’art de représenter en perspective. (Dans la définition moderne2 : -art de concevoir les décors scéniques ; ces décors mêmes – ensemble

des éléments picturaux, plastiques et techniques qui permettent l’élaboration d’une mise en scène, notamment théâtrale ou d’un spectacle quelconque. – aménagement expressif d’un espace architectural complexe). Le XVIème siècle est également l’époque du théâtre de cour, et de la création de décors temporaires. Nous nous efforcerons de déceler et analyser de façon isolée certains dispositifs spatiaux entrainant des effets visuels. Seuls les dispositifs relevant du jardin ou du contexte direct avec les villas seront relevés. Les éléments constitutifs Voici une petite liste non exhaustive des éléments qui sont utilisés dans les jardins des villas : L’arbre en massifs, rangées d’arbres, arbre solitaire Le plateau en parvis, en surplomb, en longueur, carré, palier ... Le mur de soutènement, de façade, de périphérie ... L’eau fontaine, mur d’eau, bassin, nymphée, escalier d’eau ... Le trou dans le mur La serlienne, la porte, la loggia ... L’escalier à volée droite, long, en T, en exèdre... Figures spatiales récurrentes et extraordinaires Dans les prochaines pages, quelques figures spatiales sont décrites. Ces figures sont des assemblages d’éléments pour créer des figures assez simples générant des effets visuels.


Figure 32 : Brunelleschi et l’expérience de la tablette devant le baptistère de Florence

47


L'allée 72.37

15.92

L’allée de la villa Médicis

540.12

L’allée de la villa Aldobrandini

11.21

ondragone

L’allée de la villa Mondragone

rnese48

dobrandini

COUPE

L’allée de la villa Farnèse Figure 33 : les allées des villas

COUPE


L’allée d’entrée L’allée d’entrée est un dispositif que l’on retrouve sur presque toutes les villas. On peut observer la capacité de déclinaison de la même figure spatiale. Les éléments constitutifs de l’allée, les arbres, la topographie, la rue, les murs, ainsi que les dimensions changent, produisant des effets visuels variés. Certaines allées sont situées en dehors de la parcelle, comme un ancrage du projet dans la ville. C’est le cas de la villa Madame où l’allée est en fait une voie de 780 mètres depuis la viale Angelico. Cette allée «monte tellement doucement et de façon constante, qu’étant arrivé à la villa on réalise seulement que l’on est en hauteur et que l’on domine tout le 1 : «salisce tanto pays»1. L’allée de la villa Farnèse n’est pas à proprement parler une allée, bordée d’arbres, c’est une rue, planifiée et créée au moment de la construction de la villa. Cette rue très en pente et d’une longueur d’environ 630 mètres, installe la villa comme culmination du village entier.

dolcemente che non pare de salire, ma essendo giunto alla villa non se accorgie de essere in alto e di dominare tutto il paese» Dewez Guy, Villa Madama, memoria sul progetto di Raffaello

Les villas Aldobrandini et Mondragone ont des allées d’entrée assez similaires. Elles commencent par des portails desquels on peut déjà voir la villa, comme terminaison de la perspective. La densité d’arbres la longeant permet de véritablement cadrer et orienter. La villa Médicis a cependant une allée assez différente, celle-ci traverse les jardins dans toute sa longueur sans être interrompue par la villa. En effet, on découvre la villa de façon latérale, une fois arrivé sur le piazzale. De par son positionnement en limite directe en bordure de parcelle et la surélévation du bosco, l’allée est simplement bordée de murs.

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Ouverture sur le paysage Fontaine de la petite Rome Mur d'eau les 100 fontaines

4.00

3.17

Mur d'eau les 100 fontaines

5.29

3.26

2.87

Fontaine de l'ovale

Ouverture sur le paysage Fontaine de la petite Rome

Le T 2.87

Illustré par l’escalier qui mène aux cent fontaines de la villa d’Este, ce dispositif permet de rompre le déplacement linéaire ascendant, en forçant le déplacement sur un axe perpendiculaire qui présente des vues nouvelles (à gauche la fontaine de l’ovale et à droite, la petite fontaine de Rome). La transition entre ces deux axes est accompagnée par la théâtralisation du mur, ici par les fontaines.

3.26

Mur d'eau les 100 fontaines

Fontaine de l'ovale

Figure 34 : Plan et coupe du T de la villa d’Este

L’écrasement

27.8

27.8

L’entrée de la villa Farnèse est précédée d’une succession d’escaliers qui changent les perspectives sur le bâtiment. Ci-dessous est représenté en plan et en coupe, le dernier palier avant l’entrée avec le pont levis. Le rapport entre la distance maximale que l’on peut avoir à la façade (13,5 mètres) par rapport à la hauteur de cette façade (27,8 mètres), génère un effet d’écrasement.

13.5

13.5

50

7.2

7.2

13.5

Figure 35 : Plan et coupe de l’entrée de la villa Farnèse

13.5


Villa Farnesina

Villa Médicis

Figure 36 : Schéma de la latéralisation dans la villa Aldobrandini

La Latéralisation

Dans certaines villas, l’approche de la villa est latéralisée. Dans la villa Aldobrandini, si la villa avait d’abord été découverte de façon frontale dans l’allée, la rampe tourne et guide le visiteur à longer la villa avant d’y entrer. En revanche, dans les villas Farnesina et Médicis, c’est la découverte de la villa qui est latérale, avec un piazzale dans les deux cas, sur lequel s’ouvre la loggia. La différence dans le cas de la villa Médicis est que bien qu’il y ait un changement dans l’axe de parcours, la distance par rapport à la villa permet d’en avoir une vision frontale.

Via della Lungara

Figure 38 : Schéma de la latéralisation dans la villa Farnesina

Via della Lungara

51

Figure 39 : Schéma de la latéralisation dans la villa Médicis

Via della Lungara

Figure 37 : Barrière, Villa Aldobrandina Tusculana, 1647


Volées, façades et perspective Enjambement et distanciation par les escaliers On retrouve dans de nombreuses villas, des successions d’escaliers, elles sont dues à la déclivité du terrain mais sont exploitées pour permettre une scénographie plus complexe. Les volées ne s’enchaînent généralement pas en continu. Elles s’interrompent, sont décalées, remplacées par

des exèdres ... Le visiteur est amené à parfois voir à l’avance des éléments des plateaux supérieurs (enjambement), et parfois, le rapport de la hauteur fait que les plateaux supérieurs sont à découvrir dans l’ascension (distanciation). Le dispositif est illustré par trois exemples des villas Aldobrandini, d’Este et Farnèse. Dans la villa Aldobrandini, contrairement à ce que laisse suggérer la gravure (le point de fuite est trop haut), l’effet est

Colonnes d’Hercules

Fontaine

o

o o Correspond env. à la Ne permet pas vraiment de vue de la gravvure voir les fontaines à venir Figure 40 : Coupe sur la chaîne d’escaliers dans le bosco de la villa Aldobrandini

52

Figure 41 : Giovanni Battista Falda, Gravure de la cascade d’eau de la villa Aldobrandini et ses jeux sur les spectateurs

Source


celui de la distanciation, à la vue des arbres on devine les paliers mais on ne peut pas voir les fontaines, entraînant une nouvelle surprise à chaque plateau. Dans la villa d’Este, on a toujours une perception du mur de soutènement supérieur, mais pas de l’ensemble des fontaines, on a donc un enjambement tout en conservant un effet de découverte. Dans la villa Farnèse on a encore un jeu de superposition de façades qui se décalent au cours de l’ascension.

Figure 42 : Plan coupe et façade de l’axe central de la villa d’Este Figure 43 : Dessin de l’axe central de la villa d’Este

0 2

6

10

20

Coupe dans la villa

53


Figure 44 : Recomposition de la façade de la villa Farnèse selon la perspective au pied des escaliers (cette seule recomposition supose une vision statique, il ne faut donc pas la considérer comme absolue)

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Figure 45 et 46 : vues de la villa depuis le pied du parvis puis du pas-d’âne en exèdre


De la partie au tout La villa est conçue pour être découverte par le mouvement. La scénographie dans les villas est la résultante d’un assemblage organisé de dispositifs spatiaux relativement simples. C’est le contraire du baroque, qui déforme les éléments, bousculant la hiérarchie. Les dispositifs sont assez flexibles comme nous avons pu le voir dans la diversité des allées (p48) qui, bien que reposant sur le même principe, permettent des résultats infinis. Le génie de la mise à distance sur des axes de parcours pourtant droits réside dans la création de plateaux qui permettent d’occulter et de recomposer des visions de la villa à chaque niveau. Il y a un jeu de parcours d’axe longitudinal qui à chaque plateau est contrebalancé par l’axe transversal, c’est un espace en franges. L’axe est simultanément un outil de composition et de déplacement perspectif.

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LA VILLA ET LE LOINTAIN : MARQUER LE TERRITOIRE

La visibilité dans le territoire Avant de parler des moyens de la visibilité des villas dans le territoire, il faut présenter les caractéristiques morphologiques des sites dans lesquels elles s’installent. Avant toute implantation, qui est, rappelons-le, une décision primordiale du disegno, il faut décrire la nature de l’assiette sur laquelle se positionnent les villas.

et de la praticité de l’intra-muros tout en ayant de larges terrains disponibles. La plupart des villas sont implantées sur les flancs des collines du Mont Pincio (Villa Médicis et Borghèse), du Janicule (Villa Lante), du Mont Mario (Villa Madame).

Rome : La morphologie de Rome au XVIème siècle est fortement caractérisée par trois éléments, le Tibre qui créé une vallée, les sept collines historiques ainsi que le mur Aurélien. La ville, mises à part quelques collines plus abruptes comme le Janicule est doucement incurvée autour du Tibre, en amphithéâtre. La densité urbaine est principalement concentrée dans la vallée, sur la rive est du Tibre. Ce qui explique également l’implantation des villas, souvent en bordure du mur Aurélien qui pouvaient profiter de la visibilité

Frascati : La ville de Frascati est un lieu de villégiature depuis l’époque romaine, située à une vingtaine de kilomètres au sud-est de Rome. Au XVème siècle, elle devient le haut-lieu de la villégiature ecclésiastique. En surplomb de la ville, la colline du Pratone s’élève jusqu’à 200 mètres au-dessus de la ville. Une dizaine de villas de la Renaissance sont placées sur ce flanc de colline orienté vers Rome. La célèbre gravure de Matthaeus Greuter (figure 51) montre le paysage de villas qu’est la colline de Frascati.

Figure 47 : Plan topographique de Rome indiquant les villas étudiées

Figure 48 : Plan topographique de Frascati indiquant les villas

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Figure 49 : Warwick Smith John, Vue sur la Villa Médicis, 1831

La position de visibilité ainsi que de co-visibilité des villas est un atout important pour la dimension de représentation du pouvoir et de l’élite sociale des villas. Les villas toscanes des Médicis (villas Castello, Jardins de Boboli, Petraia, Poggio Imperiale, Pratolino, Marignolle, Lapeggi, Artiminio, Montevettolini) sont placées de sorte à ce qu’il soit toujours possible de voir à moins une autre possession depuis chacune des villas. La villa Lante est certainement l’exemple le plus brillant de cette visibilité dans Rome, voici une citation de Scàndola parlant de la villa Lante : «Quand la brume couvre les conques des vallées, elle brille solitaire d’une lumière particulière, le toit harmonieux de la villa haute s’élance doucement vers les étoiles pures.»1

1 : M. Scàndola, Marziale Eprigrammi, vol I, Millano 2000. Parlant de la villa antique qui était sur l’emplacement de la villa Lante, mais le dispositif n’a pas changé

Les coupes paysagères sur les pages suivantes permettent de comprendre comment les villas sont mises en position de visibilité.

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Figure 50 : Anonyme, Gravure du XVII siècle de la villa Lante


58

Figure 51 : Matthaeus Greuter, Gravure des villas de Frascati, 1620


59


Figure 52 : Coupe paysagère de la villa Lante

25m

Figure 53 : Coupe paysagère de la villa Madame

25m

Figure 54 : Coupe paysagère de la villa Mondragone

25m

60

Figure 55 : Coupe paysagère allant de la villa Lante à gauche à la villa Médicis à droite avec Rome au milieu


Plaine des Sabines

Rives du Tibre

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Vues : transformer le territoire en paysage La vue est un élément très important dans la villa, la position de la plupart des villas, comme nous l’avons vu sur les coupes précédentes, permet de larges vues sur le territoire naturel ou urbain. La villa Aldobrandini s’appelait notamment la villa Belvédère (de l’italien Bel Vedere, le «beau voir») et offrait une vue jusqu’à la mer. Mais le plus important est que dans le projet de la villa, la vue est intégrée au dispositif scénique général. La décision de l’orientation, du cadrage, du processus de découverte sont des choix qui transforment le territoire en paysage, en lui donnant une hiérarchie, une temporalité de l’observation ainsi que des rehauts sur certains éléments. Nous allons aborder successivement la façon dont la vue est travaillée dans quelques villas puis séparément le thème de la loggia. 1 : «salisce tanto dolcemente che non pare de salire, ma essendo giunto alla villa non se accorgie de essere in alto e di dominare tutto il paese» DEWEZ Guy, Villa Madama, memoria sul progetto di Raffaello 62

La vue dans la villa Madame : Dans la villa Madame, la position de la villa permettrait une vue très large allant de la plaine des Sabines jusqu’à Rome. Cependant, Raphael a choisi de n’orienter la vue que sur la plaine des Sabines comme on peut le voir sur la figure 56 (aujourd’hui urbanisée mais autrefois dans un état de campagne, traversée par le Tibre et close par la pente ouest des Apennins). Mais le processus de découverte est également assez habile, Raphael décrit dans une lettre à son commanditaire comment l’allée d’entrée boisée de part et d’autre «monte tellement doucement et de façon constante, qu’étant arrivé à la villa on réalise seulement que l’on est en hauteur et que l’on domine tout le pays»1.

La vue dans la villa Médicis : Dans la villa Médicis, cela n’est plus observable aujourd’hui, cependant il était choisi de regarder le paysage naturel du Mont Pincio plutôt que la ville (figure 56). Un mur devait être construit sur le jardin bas pour empêcher la vue totale de la ville, seulement offerte par trois ouvertures dans ce mur. Le Parnasse était aussi un belvédère sur tout Rome, au-dessus de la canopée du bosco, l’ascension en est la condition sine qua non. La vue dans la villa d’Este : La villa d’Este est celle qui, dans notre corpus, incarne le mieux l’intégration de la vue dans le dispositif scénique. Les effets de retournement et de latéralisation que nous avons montré p50 sont accompagnés de vues. Contrairement à aujourd’hui, l’entrée dans la villa d’Este se faisait par le bas des jardins. Le visiteur était donc amené à monter la succession de terrasses. Presque à chaque niveau, une rupture de l’axe de déplacement ascendant amenait à s’orienter dans l’axe orthogonal et découvrir des vues différentes (figure 57). Ce n’est qu’après avoir arpenté l’entièreté du jardin et atteint le balcon que s’ouvrait une vue très large sur le jardin puis la plaine des Sabines et le Montecelio. La loggia comme canon à vue : La fonction de la loggia n’est pas nécessairement d’être un lieu de mirador. Par exemple, dans les villas Farnesina, Falconieri et Madame, elles n’offrent pas de vues particulières, elles sont des lieux d’apparat, servant d’entrée ou de pièce intermédiaire avec le jardin, ainsi qu’un lieu de l’ornement. Ce qu’elles sont en soi est bien plus intéressant que ce qu’elles laissent à voir de l’extérieur.


Mur non réalisé

Figure 56 : Schémas des vues dans les villas Médicis et Madame

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Figure 57 : Plan axonométrique des vues de la villa d’Este


Figure 58 : Loggia de la villa MĂŠdicis

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Figure 59 : Nicolas Didier Boguer, Vue de la loggia haute de la villa Aldobrandini Ă Frascati, 1823


En revanche, dans les villas Farnèse, Médicis, Aldobrandini et surtout Lante, la loggia est un espace de théâtralisation de la vue. Elle lie le paysage à la villa par la perspective. Dans la villa Farnèse, la loggia ouvre sur la ville de Caprarola, dans l’axe de la rue centrale, créée au moment du projet, elle montre la position de domination sur la ville. La loggia de la villa Médicis, prolongée par le palier et la fontaine de Mercure, est en surplomb sur le piazzale puis le paysage. Elle est en serlienne, le motif de la serlienne est répété dans la le pavillon d’Ariane. Dans la villa Aldobrandini, on a une superposition de trois loggias qui, à chaque étage, permettent une vue sur un élément différent du jardin (figure 60). La loggia du rez-de-chaussée ouvre sur le théâtre d’eau, la loggia du premier étage ouvre sur les colonnes d’Hercules alors que la dernière loggia ouvre sur la source. Enfin, la villa Lante est la loggia belvédère par excellence. La loggia ouvre sur une vue saisissante sur Rome. Elle occupe toute la largeur de la villa pour permettre le cadrage le plus large possible.

Figure 60 : Schéma des vues des loggias de la villa Aldobrandini

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Figure 61 : Vue de la loggia de la Villa Lante à laquelle est soustraite l’architecture de la loggia


La villa transparente au territoire De façon générale dans la villa romaine, il y a un jeu de perfection de la nature par la régulation et la représentation. Le bâtiment de la villa ne peut pas être étudié comme un élément étranger à cette conception du paysage. A l’intérieur de la villa, la fresque est un outil d’insertion de la villa dans le territoire par la projection du paysage sur son architecture. La salle des perspectives de Peruzzi1 dans la villa Farnèse est un chef d’œuvre de la reconstruction d’un paysage dans la villa. Dans cette villa, c’est la vue manquante qui est reconstituée, avec ses éléments urbains reconnaissables. Il est 1 : Il est intéressant très important de noter que le premier d’ajouter que Peruzzi plan de fausse architecture de colonnes était également est celui qui fait advenir le paysage. peintre et créateur de décors de scène La perspective est acquise par le dédoublement des plans. L’architecture n’est plus dissociable du paysage.

66

Dans la même villa Farnesina, la loggia d’Amour et Psyché, réalisée par Raphael, relève d’une approche assez différente. Une structure de guirlande de feuilles et de fruits laisse une grande visibilité sur un ciel paradisiaque. La voûte disparaît au profit de cette structure légère, on observe une dématérialisation de la loggia qui devient un objet véritablement intermédiaire entre le bâtiment de la villa et ses jardins. Dans le studiolo de Ferdinand de Médicis dans la villa Médicis, une salle est couverte de fresques de Jacopo Zucchi représentant une volière. La très fine structure peinte et la profusion ainsi que la vraisemblance des éléments de représentation de la faune et de la flore changent la perception de cette pièce d’environ 6

mètres de côté. On dépasse l’espace physique pour transporter le visiteur dans un imaginaire. Il y a un dernier aspect de la fresque dans la villa qu’il convient d’énoncer, c’est la prise de possession de totalité par la peinture. De façon plus explicite, ce sont des représentations qui sont totales et donc intègrent la villa dans un espace universel. Dans la villa Farnèse, il y a une salle dans laquelle les quatre murs sont couvert de mappemondes et le plafond est couvert d’une cartographie astrologique du ciel. Cette pièce entraîne un déplacement du monde dans la villa et l’ancrage dans la villa comme élément du monde. La démarche est très similaire dans la villa Falconieri. Des fresques de Pier Leone Ghezzi représentent l’allégorie des quatre saisons. La figure 68 montre la salle du printemps. La présence des quatre saisons dans un même bâtiment place la villa dans une certaine intemporalité. La non-contingence du contemporain place la villa symboliquement dans un espace-temps bien plus grand que sa simple architecture physique.


Figure 62 : Peruzzi, Salle des perspectives Villa Farnesina

Plan représenté par la freque

67

Plan de la salle Figure 63 : Plan imaginé et plan réel de la salle des perspectives


68 Figure 64 et 65 : Raphael, Loggia d’Amour et Psyché, Villa Farnesina


69 Figure 66 : Jacopo Zucchi, Fresque de la volière, Villa Médicis


70 Figure 67 : Giovanni Antonio Vanosino da Varese, Giovanni De’Vecchi et Raffaellino Motta da Reggio, Salle de la Mappemonde, villa Farnèse


71 Figure 68 : Pier Leone Ghezzi, Salle du printemps, Villa Falconieri.


L’axe : se projeter dans le lointain La symétrie ainsi que la centralité sont dans les canons de beauté de la Renaissance. En revanche, dans les villas, on observe rarement une symétrie parfaite. En effet, la situation, les bâtiments préexistants, la forme du terrain, les directions des vues, la topographie etc. sont autant de causes qui entravent la symétrie. Au-delà de notre corpus d’études, de nombreuses villas sont composées à partir d’un axe central, comme les villas Grazioli, Borghese et Belpoggio, toutes trois à Frascati (bien que l’axe de la villa Belpoggio subisse une inflexion). Dans notre corpus, les villas qui incarnent à proprement parler la composition dans l’axe sont les villas Mondragone, Aldobrandini, Giulia et Giustiniani. Les autres villas n’ont qu’une partie composée sur la symétrie axiale, comme le casino dans la villa Farnèse, la villa Médicis avec ses enchaînements de fontaines (figure 81), la villa d’Este qui a un axe, mais dont la symétrie est tout à fait élastique (figure 08), et la villa Lante à Bagnaia qui délimite un rectangle ou opère la composition symétrique pour laisser le reste en parc traversé par des allées diagonales (figure 17). Les exemples les plus représentatifs sont les villas Mondragone et Aldobrandini pour leur capacité à se prolonger dans les différentes strates du paysage. 72

Dans la villa Aldobrandini, on retrouve un axe extrêmement fort, qui marque le territoire. Mais dans le même temps, il y a un jeu de la rupture de l’axe pour rééquilibrer la composition et permettre des effets de surprises dans le parcours du visiteur : par exemple il est obligé d’emprunter une rampe elliptique pour atteindre la villa, puis il est impossible de traverser le théâtre d’eau par le centre. L’axe traverse l’allée

d’entrée, la villa, les jardins, le théâtre d’eau ainsi que le bosco, la diversité de sa composition dans le corpsvilla permet de ne pas s’interrompre brutalement au contact du territoire environnant. Cet axe, s’étend abstraitement jusqu’à Rome (figure 09). L’axe indique une direction et pas seulement une géométrie close, cela permet d’inscrire la villa et de l’étendre beaucoup plus loin dans le territoire. La villa Mondragone est un exemple très représentatif de ce concept. Le barco tourné à 90° par rapport à la villa qui fait comme une proue vers le paysage, une flèche de 700 mètres de long tendant la colline, la villa, l’allée, le barco et la plaine dans une même séquence. Le point virtuel de la fin de cet axe est la ligne d’horizon, où se dessine la silhouette de Rome.


Figure 69 : Vue de la villa Mondragone

73

Figure 70 : Matthaeus Greuter, Extrait de la gravure des villas de Frascati, 1620


Ingénieries de l’eau : se rattacher à un réseau territorial Les fastes jardins des villas du Lazio créent des besoins en eau très importants, il est donc primordial pour celles-ci de prévoir l’acheminement de l’eau. La villa d’Este consomme par exemple 1200 litres d’eau par seconde. Certaines villas se placent à un emplacement déjà desservi par un aqueduc, comme par exemple la villa Médicis qui s’implante au droit de l’aqueduc de l’Acqua Virgo. En revanche, lorsque le réseau n’existait pas, de grands travaux ont été mis en place. Par exemple dans la villa Montalto-Peretti (voir figure 71), le pape Sixte V commanditaire de la villa,

a fait construire l’Acqua Felice en 1587, lui permettant d’alimenter sa villa tout en le faisant avec les deniers de la cité car il a bien permis d’irriguer tout un quartier de Rome. Pour la villa Aldobrandini aussi, un aqueduc de 8km, l’Acqua Algida a été construit, il y a même une inscription en latin sur l’entablement du théâtre d’eau qui stipule : «Le cardinal Pietro Aldobrandini, S.R.E.CAM. Neveu de Clément VIII, après avoir restauré la paix dans la chrétienté et récupéré le duché de Ferrare pour les états papaux, construit cette villa comme un endroit de repos après sont travail dans la ville, et amena l’eau depuis le Mont Algido».

Villa Médicis

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Acqua Virgo

Salone

Villa Montalto-Peretti

Acqua Felice

Pantano

Figure 71 : Carte de Rome indiquant les aqueducs de l’acqua Felice et de l’acqua Virgo ainsi que les villas Médicis et Montalto-Peretti


Grotto

Colonnes d’Hercules Escalier d’eau

Atlas, Hercules et Tantale

Salle du Parnasse

Figure 72 : Axonométrie du parcours de l’eau dans les jardins de la villa Aldobrandini

75

Figure 73 : Barrière, Gravure de l’escalier d’eau et des colonnes d’Hercule

Figure 74 : Falda, Gravure d’Atlas, Hercule et Tantale

Figure 75 : Falda, Gravure de la Salle du Parnasse


Il est un aspect qui est essentiel à la compréhension de l’incroyable recrudescence de la fontainerie dans les jardins de la Renaissance : ce sont les progrès de l’ingénierie. En effet, de nombreux traités d’ingénierie hydraulique ont été écrits et largement diffusés durant le XVIème siècle comme ceux de Besson (1558), Isacchi (1579) ou Ramelli (1588). Les systèmes hydrauliques des villas sont hybrides, entre l’utilisation de la topographie pour un déplacement gravitaire et certaines pompes. Les sculptures sont largement utilisées pour camoufler la tuyauterie et mettre en scène l’arrivée de l’eau. La composition aquatique reconstitue un réseau dans le réseau, créant une succession variée avec une expression de la source, généralement par les grottos, puis des bassins des fontaines diverses, des cascades etc. L’eau dans les jardins des villas est utilisée comme un véritable outil de scénographie et de narration.

76

Nous n’avons jusqu’alors pas évoqué la dimension symbolique, religieuse, mythologique ou païenne, inhérente aux jardins et aux représentations picturales dans la villa. C’est un sujet très large et parfois difficilement interprétable, bien que l’on sache par exemple que dans la villa Lante à Bagnaia, les 16 carrés plantés sont une allusion aux 16 cités idéales. Cependant dans la fontainerie des villas, il est assez évident, de par la figuration et la dénomination des éléments, qu’il y a une narration, principalement mythologique. On retrouve par exemple de façon récurrente le mythe du Mont Parnasse illustré par le Parnasse dans la villa Médicis, la fontaine du déluge dans la

villa Lante à Bagnaia ou la salle des vents dans la villa Aldobrandini. Le mont Parnasse aurait été le seul lieu sur terre épargné par le Déluge décidé par Zeus. Deucalion et sa femme Pyrrha, seuls survivants, auraient recréé les nouveaux humains en jetant les pierres (os de gaïa) derrière eux. Il est aussi appelé le mont des muses. La villa Aldobrandini (figure 72) fait de nombreuses références bibliques et historiques au cours de ces différentes fontaines, et ce souvent pour placer le cardinal Aldobrandini dans cette grande histoire. L’eau arrive par un grotto en position haute du bosco. Les colonnes d’Hercules, marquées de l’inscription Nec Plus Ultra de Charles V, montrent le dépassement du monde connu. Puis suite à l’escalier d’eau, l’eau disparaît un moment pour réapparaître par le globe des cieux porté par Atlas, aidé par Hercules, comme décrit par Philostrate l’Ancien, irriguant tout le théâtre de l’eau. Et enfin, la salle des vents dans le théâtre de l’eau représente le mythe du Mont Parnasse. La villa Lante à Bagnaia (figure 80) fait également référence à ce mythe, en illustrant sa source par la fontaine du déluge. Suivent la fontaine des fleuves, un escalier d’eau, la fontaines des Titans, la table de pierre, la fontaine des lumières puis la fontaine des Maures, tandis que sont dispersés dans le barco, les fontaines de Pégase et un labyrinthe et d’autres éléments périphériques mais tout autant symboliques. Dans la villa d’Este (figure 76), on ne retrouve pas aussi nettement ce caractère narratif, il n’y a pas non plus de linéarité des installations hydrauliques. Les différents éléments rivalisent d’extravagance et de splendeur pour transformer l’expérience du visiteur


Bassins rectangulaires

Fontaine de l’ovale

Mur des cents fontaines Fontaine de l’orgue

Fontaine de la petite Rome

3 Fontaine de l’ovale 4 Cent fontaines

Figure 76 : Axonométrie du parcours de l’eau dans les jardins de la villa d’Este

Gravure, Percier et Fontaine, 1809

C

77

Figure 77 : Dessin de la fontaine de l’orgue

Figure 78 : Dessin des cent fontaines Dessin

Figure 79 : Dessin de la fontaine de l’ovale Dessin

Croquis axonométrique

Croquis axonomé


Table de pierre Fontaine des Maures

Escalier d’eau

Fontaine des Lumières Fontaine des Titans

Fontaine du déluge

Fontaine des Fleuves

Figure 80 : Plan de la succession des fontaines dans la villa Lante à Bagnaia

Mont Parnasse

Fontaine de l’Obélisque

Fontaine du Piazzale 78

Fontaine de Mercure

Fontaine de la Trinité des Monts

Figure 81 : Plan de la succession des fontaines dans la villa Médicis


en véritable aventure. Les fontaines de la villa Médicis (figure 81) marquent l’axe de l’entrée de la villa. L’eau est d’abord pompée depuis l’Acqua Virgo sous le Mont Parnasse, dans le bosco, puis irrigue toutes les fontaines de façon gravitaire.

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CONCLUSION L’ESPACE DU PROJET

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L’ESPACE DU PROJET

Le tout de la partie La villa a finalement une dimension presque fractale : à différentes échelles, on peut reconnaître un ensemble, recréant un système, un tout cohérent. Le territoire, jusque-là non différencié, est en fait envisagé de façon distincte que ce soit un territoire urbain ou naturel. La notion de naturel est à relativiser car c’est principalement de la campagne qu’il s’agit, donc d’une nature déjà grandement projetée, contrôlée, forgée par l’homme et l’agriculture. Les villas font écho à cette trinité du site dans leur constitution générale. Si la villa et le piazzale font référence à une certaine urbanité, les carrés seraient la campagne, un jardin à la végétation régulée et même souvent nourricier alors que le bosco (ou barco1) est l’insertion de la «nature» dans le projet. Cet ensemble cohérent peut également être créé par le récit mythologique et religieux comme on a pu l’observer par le réseau des fontaines de la villa Lante à Bagnaia (p 78). La villa Médicis est l’exemple parfait de l’effet de collection, peut-être la conséquence d’une certaine manie des Médicis mécènes. La façade est couverte d’éléments rapportés, des basreliefs qui créent un univers étrange et composite. Le jardin du bosco servait à l’époque de Zoo particulier des Médicis, tandis ce que les carrés, partie nord des jardins, regroupaient des espèces végétales de tous les pays. Ce processus de collage se décline bien à toutes les échelles, par exemple dans le studiolo de Ferdinand de Médicis, les fresques de Jacopo Zucchi (figure 04) représentent une volière et la pièce entière reconstitue un monde végétal et animal dans l’intériorité de ce petit pavillon.

1 : Le bosco et le barco sont tous deux des espaces boisés libres proches des villas, en revanche on utilise normalement barco pour ceux où l’on pratique la chasse

Quant à la villa Farnèse, le monde entier est peint sur les cinq faces d’une seule pièce (figure 67), c’est bien un déplacement en position de globalité qui est effectué, c’est représenter sa présence dans ce monde mais surtout sa capacité à le dominer. Géométries et compositions Dans la villa c’est la géométrie qui met en tension les éléments et les échelles. De la même façon que le plan de Rome de Sixte V prolongeait ses axes monumentaux pour réorganiser la campagne, c’est par la création d’axes physiques, visuels et même parfois mentaux que des connexions sont établies et la villa devient l’épicentre d’un réseau qui la dépasse. C’est une architecture qui s’étend horizontalement prolongée par ses orientations. La villa tient sa splendeur de son assise. La composition de la villa ne se contredit pas selon les échelles. Ainsi les jardins sont composés par la subdivision en pièces comme le sont les plans des casins. Les éléments de composition sont assez élémentaires. Les formes employées sont en général le rectangle, le carré, le cercle (ou le demi-cercle), et plus rarement des figures comme la patte d’oie des villas Négroni ou Aldobrandini. Il n’y a donc pas un effort d’organicité pour pouvoir intégrer le projet au site, on assiste plutôt à une géométrisation du territoire pour pouvoir intégrer le site au projet. La villa Mondragone montre de façon assez claire la géométrisation du territoire. L’axe d’entrée est démesurément long et connecte un grand plateau en pointe, datant de l’époque romaine qui est transformé en Barco Borghèse, enclos avec des animaux pour la chasse, en surplomb sur le paysage. (voir figure 69)

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Limites : présence et effacement

ne s’étend que sur une partie de la propriété, mais suffisamment en profondeur pour finalement en agrandir la perception.

«Finir, limiter et borner le territoire, c’est en définitive l’embellir. Ce qui contient et réserve, tempère et dispense l’agir et son travail est la beauté qui naît de la finition du paysage.»1 Pierre Caye

La villa Farnèse est un bel exemple de la récupération du territoire dans le projet. Maintenant cela n’est plus visible, mais à l’époque le bosco était densément planté, comme le bois voisin et au centre était placé le casino. Comme cela on pouvait avoir l’impression de se promener dans les bois et de découvrir par surprise le casino. C’est une façon de faire illusion sur la taille de la propriété, le bois entier devient symboliquement la propriété du Pape. La figure 83 illustre d’abord la véritable limite foncière de la villa Farnèse, puis la limite si l’on considère seulement le bâti, et enfin la limite perçue.

Le déclin de la féodalité dès le XVème 1 : Citation tirée de siècle ainsi que du sentiment d’insécurité Empire et décor, le a permis un changement formel dans site de l’homme de l’expression architecturale de ces villas Pierre Caye ainsi que dans la réalité de la protection des domaines. Mais il serait réducteur de circonscrire la question de la limite à la seule perte du besoin défensif. La villa Giulia est celle que l’on pourrait qualifier de plus enclose, placée en fond de vallon, elle est entièrement contenue dans un mur périphérique. Dans le projet initial, il y avait cependant une intrication de l’intérieur-extérieur, qui est uniquement partielle dans le projet réalisé. En effet, la multiplication des espaces intermédiaires entraine un effacement de la limite par la transition d’un intérieur complet (le casino), d’un espace couvert mais ouvert (la galerie) à un jardin clos mais ouvrant sur un deuxième jardin périphérique.

82

PLAN COMMANDÉ

1

2 3

4

4

5

Dans la villa d’Este, la propriété a des limites bien définies, le jardin de forme rectangulaire s’étend pourtant par les axes de vues découverts en glissière de façon successive jusqu’au balcon haut d’où l’on domine tout le paysage (figure 57). Dans la villa Aldobrandini, le périmètre de la propriété n’est visible qu’en partie basse. En partie haute, la chaîne d’escaliers et de fontaines s’enfonce dans la colline boisée. On prend conscience que le projet

1. Parvis 2. Vestibule 3. Galerie 4. Aile de service 5. Cour 6. Loggia 7. Nymphée 8. Loggia 9. Jardin secret 10. Jardin d’apparat

10 6

7

8 8 9

10 m

10

Figure 82 : Plan du projet initial de la villa Giulia


83

Figure 83 : Plan masse de la villa Farnèse En haut : en rouge est indiquée la limite foncière Au milieu : est cerné le bâti En bas : est indiquée la limite perçue


BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES

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INDEX DES ARCHITECTES

• AMMANNATI Bartolomeo (Settignano 1511- 1592), Villa Médicis, Villa Giulia

• Della PORTA Giacomo (Porlezza 1532 - Rome 1602), Villa Aldobrandini

• BORROMINI Francesco, né Francesco Castelli (Bissone 1599 - Rome 1667), Villa Falconieri

• RAINALDI Girolamo (Rome 1570-1655), Villa Giustiniani

• Del DUCA Giacomo (Cefalù 1520 - Messine 1604), Villa Lante ) Bagnaia

• RAPHAEL, Raffaello Sanzio (Urbino 1483 - Rome 1520), Villa Madame, Villa Farnesina (fresques)

• FONTANA Giovanni (Melide 1540 - 1614), Villa Aldobrandini

• ROMANO Giulio, né Giulio di Pietro di Filippo de Gianuzzi (Rome 1492 - Mantoue 1546)

• GHINUCCI Tommaso (Sienne), Ingénieur hydraulique, Villa Lante à Bagnaia

• da SANGALLO Antonio, dit le Jeune (Antonio Cordiani) (Florence 1484 - Terni 1546), Villa Madame

• LAMBARDI Carlo Francesco (Arezzo 1545 - Rome 1619), Villa Giustiniani • LIGORIO Pirro (Rome 1500 - Ferrare 1583), Villa d’Este

• Van SANTEN Jan (ou Giovanni Vansanzio) (Utrecht 1550 - Rome 1621), Villa Mondragone • VASARI Giorgio (Arrezo 1511 - Florence 1574), Villa Giulia

• LIPPI Annibale, Villa Médicis • LIPPI Giovanni di Bartolommeo, dit Nanni di Bacio Bigio (Florence 1511 - Rome 1568), Villa Médicis • LONGHI Martino, l’Ancien (Viggiù 1534 - Rome 1591), Villa Mondragone 86

• MADERNO Carlo (Capolago 1556 - Rome 1629), Villa Aldobrandini, Villa Giustiniani • MICHELANGELO di Lodovico BUONARROTI SIMONI (Caprese 1475 - Rome 1564), Villa Giulia • PERUZZI Baldassare Tommaso (Sienne 1481 Rome 1537), Villa Farnesina

• VIGNOLE, Jacopo Barozzi da Vignola (Vignole 1507 - Rome 1573), Villa Giulia, Villa Farnèse, Villa Lante à Bagnaia • VITRUVE, Marcus Vitruvius Pollio (env. 90 av. JC env. 20 av. JC)


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HABITATION : REVUE TRIMESTRIELLE DE LA SECTION ROMANDE DE L’ASSOCIATION SUISSE POUR L’HABITAT, N° 61, 1988 LE CLASSEMENT TYPOLOGIQUE EN ARCHITECTURE JEAN-MARC LAMUNIÈRE Ein Dienst der ETH-Bibliothek ETH Zürich, Rämistrasse 101, 8092 Zürich, Schweiz, www.library.ethz.ch Tentative d'explication

La typologie est l'un des fondements les plus précis du projet architectural. Nous pourrions dire qu'elle est, exprimée ou non, l'essence centrale même du projet de l'architecture (de son projet unique en quelque sorte). Le terme de typologie intervient de plus en plus fréquemment dans le discours architectural. Dire cependant d'un projet qu'il appartient ou pas à telle ou telle «typologie» n'éclaire pas forcément 'objectif critique que l'on voudrait ainsi poursui¬ vre. En effet, la plupart du temps le terme de «ty¬ pologie» fait appel indifféremment à une référen¬ ce formelle, à un contenu, comparable à une pé¬ riode historique donnée, à l'analogie d'un sys¬ tème constructif, etc. Dans cette direction, le ju¬ gement se pare d'une terminologie qui n'annonce pas de nouvelles observations, mais reste limité à une démarche conventionnelle d'analyse com¬ parative. La typologie est un mode de classement d'objets. Ce mode est déterminé par la recherche même des filiations précises, ascendantes et descen¬ dantes, que les objets entretiennent entre eux. Ce

sont ces filiations et leurs ramifications qui cons¬ tituent des classes dont le type serait l'invariant. Mais cet effort patient ne se borne pas à décrire une linguistique généalogique que l'on pourrait assimiler à une linguistique architecturale histo¬ rique ou génétique. Le travail typologique s'est souvent développé davantage sur les embran¬ chements à la fois diachroniques et synchroniques, dont parle Saussure notamment à propos des règles de la langue.

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La typologie présuppose deux actions: celle d'une sélection (le choix des objets) et celle de combinaison (les relations que les objets entre¬ tiennent entre eux). Parce que ces deux actions sont démontrées simultanément par un discours, la typologie prend le caractère d'une rhétorique, même lorsqu'elle ne paraît présenter que l'énoncé d'une série d'hypothèses. De ce fait, la typologie architecturale appartient à la fois au projet architectural, sur le plan des pré¬ cisions qu'elle focalise, et à la théorie architectu¬ rale, sur le plan des systèmes qu'elle déploie. Par conséquent, la typologie doit être entendue à la fois comme méthode et comme discours. Dans ce sens, le raisonnement critique de la typologie im¬ plique une rationalité et une poétique (ce double processus a été évoqué encore récemment par Alberto Sartoris). La typologie architecturale ne peut prétendre à la rigueur scientifique absolue que l'on pourrait at¬ tendre d'elle, notamment lorsqu'elle procède à des opérations globalisantes ou encyclopédiques. Une histoire universelle de l'architecture dont le classement serait typologique semble illusoire. Car la sélection même des objets ne peut se dé¬ terminer à partir d'un nombre fini, ou supposés tels, de ceux-ci. Le choix ne s'opère qu'à partir de caractères précis que les objets démontrent et qui

les affirment en tant que «modèles». Elle hérite ainsi des modes de classement spécifiques com¬ me la taxinomie. Il est légitime de reprocher à l'approche typologique l'évacuation trop fréquen¬ te d'objets ne présentant pas les caractères affir¬ més qui permettent plus facilement de les mettre en relation les uns et les autres. Le défaut est tou¬ jours latent de ne pas donner suffisamment d'at¬ tention aux caractères «ambigus et complexes», pour reprendre l'expression de Robert Venturi. Ces lacunes peuvent être compensées par une étude plus éloignée des sélections propres à une histoire de l'esthétique architecturale, et plus at¬ tentive à la «production courante» qu'un taux de répétition suffisamment élevé rend exemplaire.

La typologie comme recherche La recherche typologique interprète les objets dont elle se saisit. Elle est par conséquent une herméneutique. Elle décrypte, en les codifiant, les objets architecturaux pour les regrouper selon des classes hypothétiques. Curieusement, la recherche typologique a pour but de retrouver les «types générateurs» (abs¬ traits) de séries de formes qui, elles-mêmes, se présentent comme des «modèles» concrets. Ainsi les objets de son étude sont des «modèles» con¬ crets, les seuls visitables, alors que les finalités qu'elle poursuit sont des «types» abstraits, invisitables si ce n'est à travers quelques modèles plus cohérents que les autres: les archétypes. Toute la difficulté de la recherche typologique est de traduire à travers la permanence de certains modèles une antériorité primaire qui les domine et qui en est comme la «matrice», pour reprendre la définition quatremérienne. La typologie est un répertoire La typologie offre des répertoires primaires dans lesquels peut se situer, et se distinguer, le projet architectural. Elle ouvre ainsi un éventail de solu¬ tions qu'un processus spontané d'invention ne recouvre et n'approfondit pas. Elle délimite ainsi la frontière entre le processus de l'imitation et celui de la copie, dans le sens que Quatremère de Quincy donne à ces termes. Nous pourrions mê¬ me dire que le désir d'imitation stimule la créati¬ vité alors que l'envie d'inventer provoque le plus souvent la copie, tout simplement parce que le désir de s'exprimer nous vient des autres, de l'écoute de l'autre. La typologie est un enseignement La typologie est une leçon. Parce que la typologie présente des classements, elle définit plutôt des ordres que des hiérarchies. Elle est donc un sup¬ port pour l'enseignement de la théorie et de l'his¬ toire de l'architecture. Qu'elle soit implicite ou ex¬ plicite aux œuvres écrites, dessinées ou construi¬ tes, elle génère automatiquement ses propres fi¬ liations, c'est-à-dire ses dépendances et indé¬ pendances, enracinant tout projet architectural dans l'histoire de l'architecture. Mais l'enseigne-


ment de la typologie doit évidemment emprunter des parcours étroits et rapides. Sa rhétorique peut devenir souvent réductrice, un peu comme celle, pourtant utile, de Neufert. C'est ainsi qu'en Italie, après la guerre, l'enseignement de la typologie prenait justement le titre modeste et instrumental de «caractères distributifs des édifices».

Architecture pliquant par là que le scénario de la recherche se moule sur les concepts mêmes que l'auteur veut dégager ou projeter. Toute délimitation entre les «caractères» à travers lesquels se décrypte l'objet architectural peut ap¬ paraître excessive, voire arbitraire. Si cette critique peut paraître pertinente au niveau des définitions réductrices que nous sommes contraints d'énoncer, elle n'a plus de sens dès lors que la recherche s'emploie précisément à re¬ lier les caractères entre eux, de manière structu¬ rale pourrait-on dire. Ce sont précisément ces re¬ lations, unilatérales, étoilées, accentuées ou floues qui structurent typologiquement l'œuvre et dégagent son appartenance à une «classe» ty¬ pologique dont le «type» est le paradigme. Il est nécessaire de décrire les limites de chaque caractère, en essayant d'élargir la perspective de leur analyse et de leur emploi. Il n'est pas utile de répéter que tous les auteurs ne considèrent pas ces caractères d'une égale importance et qu'ils suppriment le plus souvent un certain nombre d'entre eux.

La typologie est une méthode critique Etant un enseignement, la typologie est obligatoi¬ rement un instrument critique. Elle peut vérifier le degré de légitimité des références au lieu, à la commande, à la culture, à l'histoire, à la pratique sociale, à la production économique, etc. Elle mesure les processus imitatifs et d'interprétation. Elle repère les caractères distributifs, dimension¬ nels, constructifs, voire historiques et stylistiques, qui autorisent et précisent l'analogie, la compa¬ raison, la référence ou la citation.

Fig.

Les caractères: la typologie et les classements Il importe de définir ces mêmes caractères que l'on attribue aux objets architecturaux pour les sélectionner et les classer en leur attribuant ainsi la fonction de «modèles». Tout typologiste ac¬ centue ou diminue les rôles de l'un ou l'autre de ces caractères; il privilégie ou néglige certaines relations à établir entre les caractères. Il déter¬ mine ainsi l'idéologie dominante de sa recherche, sur le plan de sa pratique projectuelle comme sur celui de sa pensée critique. La typologie est par conséquent toujours une «typologie d'auteur: im-

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J.-M. Lamunière, B. MarchandCaractères typologiques d'un plan de logement (1932) de M. Braillard, à Vieusseux, Genève. FORME URBANE N0MÜHE DE LOGEMENTS

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quissés dans le découpage «thématique» de cer¬ tains ouvrages historiques ou monographies. Mais si nous voulons dépasser la notion de réper¬ toire et assumer le programme comme l'un des invariants typologiques, nous devons davantage envisager le caractère programmateur comme is¬ su de celui de la commande, c'est-à-dire des for-

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aujourd'hui étendre cependant le champ de ces caractères distributifs à l'analyse, notamment his¬ torique, de la pratique sociale des espaces. On évacuerait de cette manière certaines notions fonctionnalistes dont la réalité ne nous apparaît plus intangible et à retenir des usages et des jouissances sociales dont la permanence est évi-

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ces dominantes qui agissent sur l'énoncé même des fonctions auxquelles une série de modèles est supposée répondre. C'est ainsi que pourra être posée une question importante. Un «type» émerge-t-il d'une série de modèles (qu'il les génère ou qu'il en soit déduit n'a pas d'importance) parce qu'une même idéologie en ordonne le processus simultané ou continu de production répétitive. D'ailleurs, il semblerait que l'exaltation, de tout temps, du caractère programmateur des œuvres comme moyen premier de leur classement typo¬ logique manifeste toujours une intention opératoi¬ re en fournissant les instruments d'une production souhaitée.

Caractères distributifs Les caractères distributifs des édifices ont consti¬ tué le «noyau dur» d'une recherche typologique

liée aux phases les plus épiques du mouvement moderne (nous en avons déjà parlé à propos de l'enseignement italien). En fait, l'analyse des ca¬ ractères distributifs a souvent concerné les liai¬ sons fonctionnelles entre les espaces et l'orien¬ tation de ceux-ci (ensoleillement). Nous pourrions

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dente. Mais une première réduction des caractè¬ res distributifs à leurs aspects fonctionnalistes et hygiénistes reste légitime, car elle manifeste une indépendance nécessaire par rapport aux con¬ traintes locales qu'une situation sociale et éco¬ nomique a parfois dévoyé. Dans ce sens, la rela¬ tive autonomie des caractères distributifs évoque effectivement le problème de la relation réelle du «type» au lieu. C'est ainsi que le lieu, et notam¬ ment la ville, à la fois subit un type et en impose un autre, selon des règles extrêmement concrètes comme celles qui unissent les caractères distri¬ butifs de la ville elle-même (orientation de ses ré¬ seaux et dimensions de ses lotissements) et ceux de ses bâtiments.

Caractères dimensionnels

Les caractères dimensionnels interviennent dans

l'analyse typologique lorsqu'ils ont clairement dé¬ terminé la configuration des objets. En fait, ils dé¬ pendent d'autres caractères liés à la nature du programme (comme par exemple un système de proportion, un dimensionnement des lieux, la mé¬ trique minimale moderne, etc.) ou à des systèmes de construction (comme par exemple les con¬ traintes des matériaux, les portées assumées par les structures portantes, etc.). Cependant, nous pourrions avancer l'hypothèse que la recherche d'invariants dimensionnels n'aboutit que rarement à des types, sauf peut-être dans «L'Art de bâtir»,

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Caractères morphologiques Les caractères dits morphologiques ont souvent pris une importance considérable dans l'analyse typologique. Si l'on s'en tient à leur définition éty¬ mologique, il faut convenir que l'analyse de la «forme» des objets conduit très vite le chercheur

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à des impasses, parce que précisément la forme architecturale peut difficilement s'abstraire des caractères distributifs qui la dominent. La plupart du temps, une analyse primaire des caractères morphologiques fait dévier les objets vers des ca¬ tégories stylistiques liées à des systèmes compositifs préconçus (l'enlevé/le rapporté, vertical/ horizontal, les prismes élémentaires, linéaire, pa¬ villonnaire, articulé, etc.). Les caractères mor¬

phologiques offrent un intérêt majeur lorsqu'ils sont observés sous l'angle des significations im¬ plicites ou explicites que les formes évoquent à travers leurs geometries apparentes ou secrètes.

Caractères constructifs Les caractères constructifs, toujours impliqués dans les traités et manuels d'architecture, sont en partie estompés dans les travaux typologiques du

rattache ne l'est pas. En effet, si nous acceptons ia définition quatremérienne du type, la forme ellemême en est exclue: le type en est uniquement sa matrice, c'est-à-dire, pour reprendre l'expression de Louis Kahn, sa pensée. Mais comme la métho¬ de typologique a l'obligation de traverser préci¬ sément les modèles matériels pour rejoindre des types conçus comme des pensées immatérielles, elle doit comprendre cette matérialité qui est jus¬ tement à l'articulation de ce passage, nous pour¬ rions dire de ce transfert de la pensée de la forme à la forme.

Caractères historiques Les caractères historiques situent les objets dans leur contexte social, économique, culturel et po¬ litique de l'espace physique et du temps de leur conception. Mais ils établissent également un

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mouvement moderne. Alors que les principales monographies des architectes pionniers de cette période font apparaître clairement les principes constructifs de leur grammaire compositive, les tableaux et classements des typologistes contem¬ porains ou disciples de ce même mouvement re¬ transcrivant graphiquement, de manière relati¬ vement neutre et abstraite, les structures portan¬ tes et les matériaux utilisés. La volonté d'attribuer aux caractères distributifs la fonction d'assurer de nouvelles pratiques sociales et aux caractères stylistiques une nouvelle esthétique l'emporte sur l'examen des modes de construction employés dont la variété est peut-être troublante. Les ca¬ ractères constructifs jouent un rôle déterminant en typologie. Ils nous interrogent sur le principe même de la matérialité d'un type. Car si nous pouvons admettre que la nature du modèle est ef¬ fectivement matérielle, celle du type auquel il se

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10

champ de référence extérieure à l'espace et au temps considérés pour offrir des comparaisons (des différences comme des similitudes) hors du corpus opéré par une première sélection. Les ca¬ ractères historiques ou a-historiques relativisent ou confirment le degré de pertinence des modèles choisis qui les rend, comme dit Bertolt Brecht, plus ou moins «typiques»... La difficulté provient des visions différentes que l'on peut avoir de l'histoire, la restreignant parfois aux histoires de l'architecture comme l'étendant souvent excessivement à des domaines de l'his¬ toire trop à l'écart des motivations de l'architectu¬ re examinée. Une vue purement chronologique des modèles est tout aussi problématique, notam¬ ment lorsqu'elle veut démontrer des filiations se¬ lon des principes déterministes. Plus intéressan¬ tes sont les permanences de certains caractères, que la profondeur historique révèle, qui peuvent


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Caractères stylistiques Les caractères stylistiques peuvent sembler très éloignés des préoccupations de la recherche ty¬ pologique. Le terme même de stylistique peut d'ailleurs sembler inopportun. Peut-être celui de linguistique serait-il mieux adapté, d'autant plus que la sémiologie apporte dans ce domaine des contributions utiles. Car il s'agit bien de ne pas li¬ miter les caractères «stylistiques» à la configura¬ tion des objets analysés, puisque cela nous ren¬

verrait aux propos que nous avons tenus sur les caractères morphologiques. Les caractères stylistiques peuvent être observés lorsqu'ils illustrent une volonté préméditée d'ex¬ primer d'une manière plutôt que d'une autre la forme. Une linguistique reposant essentiellement sur le plan de l'expression utilise un système connotatif que l'on peut aussi examiner et décrire typologiquement. Mais aujourd'hui de «nouvelles» stylistiques semblent échapper à des règles grammaticales explicites. Elles apparaissent plus isolées parce que leur image visuelle s'exhibe de manière à la fois plus agrandie et plus focalisée. La récurrence de certaines figures fait naître une emblématique d'auteur dont l'intérêt typologique reste modeste si elle est évaluée pour elle-même.

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Le type comme structure Ce ne sont pas les modèles ni les caractères qui en vérifient la pertinence mais bien les relations de ces caractères qui fournissent un corps con¬ ceptuel à un type. Par conséquent, le type se pré¬ sente comme une structure dont l'expression for¬ melle reste cependant absente des œuvres qui elles-mêmes n'en seraient que les expressions déviantes. La typologie fait resurgir les types de lignages de formes mais ces résurgences à leur tour fondent de nouveaux pré-textes, selon l'expression de Jean Starobinski, clefs de la composition et par conséquent de sa lecture. Le type comme non-dit Le type ne peut être décrit en termes architectu¬ raux. Tout au plus un modèle dont les caractères seraient à la fois plus purs et plus solidaires peut-il en afficher un «archétype». Dans l'attente de nouveaux systèmes de repré¬ sentation (peut-être des algorythmes) les méta¬ phores littéraires, picturales, cinématographiques, etc. parviennent parfois à exprimer des types. Le roman par exemple décrit des jouissances imaginairement attendues, vécues et refusées d'es¬ paces invisibles. Le type n'est peut-être qu'une métaphore qui évoque le sujet sans étreindre l'objet. Jean-Marc Lamunière

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11


ICONOGRAPHIE

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Figure 00 : Pietro Ruga, Plan topographique de la campagne de Rome, da punicum al circeo, 1811 ( http://www.luniversoeluomo. org/storia/imges/1811-ruga.JPG ) Figure 01 : Fresque du petit palais Gambara représentant la villa Lante à Bagnaia ( http://www.naturaeartificio.it/giardini/ villaLante.html ) Figure 02 : Localisation des différentes villas étudiées (Lili Szabo) Figure 03 : Axonométrie de la villa Giulia (Laurianne Crouzet) Figure 04 : Fresque du Studiolo de Ferdinand de Médicis, peint par Jacopo Zucchi ( http://florizelle.net/dfb/2013/5/6/stanza-degliuccelli ) Figure 05 : Anonyme, Vue de la Rome de Sixte V, ca 1589-1590. Fresque, Bibliothèque Apostolique du Vatican Figure 06 : Axonométrie générale de la villa Médicis (Lili Szabo) Figure 06bis : Schémas de la villa Médicis (Lili Szabo) Figure 07 : Axonométrie générale de la villa Giulia (Laurianne Crouzet) Figure 07 bis : Axonométrie éclatée de la villa Giulia (Ferdinand Fert) Figure 08 : Axonométrie générale de la villa d’Este (Marie Martel) Figure 08bis : Schéma de la villa d’Este (Lili Szabo) Figure 09 : Axonométrie générale de la villa Aldobrandini (Lili Szabo) Figure 09bis : Schéma de la villa Aldobrandini (Lili Szabo) Figure 10 : Axonométrie générale de la villa Madame (Lili Szabo) Figure 10bis : Plan reconstitué de la villa Madame ( https:// www.pinterest.co.uk/pin/290763719667213536/ ) Figure 11 : Axonométrie générale de la villa Falconieri (Vincent Levo et Louis David) Figure 11bis : Schéma de la villa Falconieri (Lili Szabo) Figure 12 : Axonométrie générale de la villa Mondragone (Lili Szabo) Figure 12bis : Schéma de la villa Mondragone (Lili Szabo) Figure 13 : Axonométrie générale de la villa Farnèse (Lili Szabo et Samuel Armange) Figure 13bis : Schéma de la villa Farnèse (Lili Szabo) Figure 14 : Axonométrie générale de la villa Farnesina (Roxane Troia, Vincent Peter et Samya Limam) Figure 14bis : Plan de la villa Farnesina (Roxane Troia, Vincent Peter et Samya Limam) Figure 15 : Axonométrie générale de la villa Lante (Cédric Bonnes, Julien Castello et Thibault Sale) Figure 16 : Axonométrie générale de la villa Giustiniani (Lili Szabo) Figure 17 : Axonométrie générale de la villa Lante à Bagnaia (Lili Szabo) Figure 17bis : Plan schématique de la villa Lante à Bagnaia (Lili Szabo Figure 18 : Façades de la villa Falconieri (Louis David et Vincent Levo)

Figure 19 : Façade Villa d’Este (Marie Martel et Flavie Bonhomme) Figure 20 : Façades de la Villa Giulia (Ferdinand Fert, Laurianne Crouzet, Sylvain Julien et Paul Nguyen) Figure 21 : Façades de la Villa Médicis (Laura Enache et Sirine Dridi) Figure 22 : Façades de la Villa Aldobrandini (Lili Szabo) Figure 23 : Façades de la villa Farnèse (Mathilde Dimper et Théo Chevret) Figure 24 : Façades de la villa Lante (Cédric Bonnes, Julien Castello et Thibault Sale) Figure 25 : Constant Bourgeois, Vue de l’extérieur de la villa d’Este, tiré de Recueil de vues et fabriques pittoresques de l’Italie, 1804 Figure 26 : Axonométrie du déblai-remblai supposé dans les jardins de la villa d’Este (Lili Szabo) Figure 27 : Coupe longitudinale des jardins de la villa d’Este (Flavie Bonhomme et Marie Martel) Figure 28 : Coupe transversale des jardins de la villa d’Este (Flavie Bonhomme et Marie Martel) Figure 29 : Coupe du plateau de la villa Lante (Cédric Bonnes, Julien Castello, Thibault Sale et Lili Szabo) Figure 30 : Coupe du plateau de la villa Médicis (Lili Szabo) Figure 31 : Axonométrie villa Aldobrandini avec les plateaux dans l’axe (Lili Szabo) Figure 32 : Brunelleschi et l’expérience de la tablette devant le baptistère de Florence ( http://artmathstpe.blogspot.com/2012/03/ brunelleschi.html ) Figure 33 : les allées des villas (schémas, axonométries, plans) (Lili Szabo) Figure 34 : Plan et coupe du T de la villa d’Este (Flavie Bonhomme, Marie Martel et Lili Szabo) Figure 34bis : Marie Martel, dessin des cent fontaines Figure 35 : Plan et coupe de l’entrée de la villa Farnèse (Samuel Armange, Théo Chevret, Mathieu Rabian, Mathilde Dimper et Lili Szabo) Figure 36 : Schéma de la latéralisation dans la villa Aldobrandini (Lili Szabo) Figure 37 : Dominique Barrière, Gravure, Villa Aldobrandina Tusculana, 1647 ( https://www.britishmuseum.org/ research/collection_online/collection_object_details. aspx?objectId=3411690&partId=1 ) Figure 38 : Schéma de la latéralisation dans la villa Farnesina (Lili Szabo) Figure 39 : Schéma de la latéralisation dans la villa Médicis (Lili Szabo) Figure 40 : Coupe sur la chaîne d’escaliers dans le bosco de la villa Aldobrandini (Lili Szabo) Figure 41 : Giovanni Battista Falda, Gravure de la cascade d’eau de la villa Aldobrandini et ses jeux sur les spectateurs ( http:// archivisionsubscription.lunaimaging.com/luna/servlet/widget/


detail/BardBar~1~1~4558~100611:-Water-cascade-above-thetheater-of?widgetType=detail&embedded=true ) Figure 42 : Plan coupe et façade de l’axe central de la villa d’Este (Marie Martel et Flavie Bonhomme) Figure 43 : Dessin de l’axe central de la villa d’Este (Marie Martel) Figure 44 : Recomposition de la façade de la villa Farnèse selon la perspective au pied des escaliers, tiré de REE van der Paul, SMIENK Gerrit, STEEBERGEN Clemens, Italian villas and gardens Figure 45 : Photo de la villa Farnèse (Samuel Armange) Figure 46 : Photo de la villa Farnèse ( http://marenostrum.overblog.net/2017/06/le-palais-farnese.html ) Figure 47 : Plan topographique de Rome indiquant les villas étudiées (Lili Szabo) Figure 48 : Plan topographique de Frascati indiquant les villas (Lili Szabo) Figure 49 : Warwick Smith John, Peinture à l’huile, Vue sur la Villa Médicis, 1831 ( https://www.rome-roma.net/rome-anciennepeintre.php?auteur=John%20Warwick%20Smith ) Figure 50 : Anonyme, Gravure du XVII siècle de la villa Lante, tiré de CARUNCHIO T. et ORMA S., Villa Lante al Gianicolo, Storia della Fabbrica e cronaca degli abitatori Figure 51 : Matthaeus Greuter, Gravure des villas de Frascati, 1620 ( https://www.abebooks.fr/servlet/BookDetailsPL?bi=22415 639788&searchurl=sortby%3D20%26an%3Dgreuter%2Bmatth %25E6us&cm_sp=snippet-_-srp1-_-title2 ) Figure 52 : Coupe paysagère de la villa Lante (Cédric Bonnes, Julien Castello et Thibault Sale) Figure 53 : Coupe paysagère de la villa Madame (Lili Szabo) Figure 54 : Coupe paysagère de la villa Mondragone (Lili Szabo) Figure 55 : Coupe paysagère allant de la villa Lante à gauche à la villa Médicis à droite avec Rome au milieu (Cédric Bonnes, Julien Castello et Thibault Sale) Figure 56 : Schéma des vues dans les villas Médicis et Madame (Lili Szabo) Figure 57 : Plan axonométrique des vues de la villa d’Este (Lili Szabo) Figure 58 : Photographie, Loggia de la villa Médicis ( https:// www.mariefrance.fr/evasion/mapetiteitalie/la-villa-medicisfete-ses-350-ans-11-12-13-fevrier-direction-rome-232521. html#item=1 ) Figure 59 : Nicolas Didier Boguer, , Peinture à l’huile, Vue de la loggia haute de la villa Aldobrandini à Frascati, 1823 ( https:// petrusplancius.livejournal.com/407786.html ) Figure 60 : Schéma des vues des loggias de la villa Aldobrandini, Extrait d’un document tiré de REE van der Paul, SMIENK Gerrit, STEEBERGEN Clemens, Italian villas and gardens Figure 61 : Vue de la loggia de la Villa Lante à laquelle est soustraite l’architecture de la loggia, Photomontage (Lili Szabo) Figure 62 : Peruzzi, Salle des perspectives Villa Farnesina,

Photographies des fresques de Jean-Pierre Dalbéra ( https://www. flickr.com/photos/dalbera/34242676046 ) Figure 63 : Plan imaginé et plan réel de la salle des perspectives (Rayan Bentabak) Figure 64 : Raphael, Loggia d’Amour et Psyché ( http://www. romatoday.it/eventi/villa-farnesina-loggia-di-galatea-e-loggia-dipsiche-10-giugno-2018.html ) Figure 65 : Raphael, Loggia d’Amour et Psyché ( https://www. photo.rmn.fr/archive/08-543695-2C6NU0T8WZAB.html ) Figure 66 : Fresque du Studiolo de Ferdinand de Médicis, peint par Jacopo Zucchi ( http://florizelle.net/dfb/2013/5/6/stanzadegli-uccelli ) Figure 67 : Giovanni Antonio Vanosino da Varese, Giovanni De’Vecchi et Raffaellino Motta da Reggio, Salle de la Mappemonde, villa Farnèse ( http://portal.visitlazio.com/fr/ dimore-storiche/-/turismo/617007/caprarola-palazzo-farnese ) Figure 68 : Pier Leone Ghezzi, Salle du printemps, Villa Falconieri, Photographie de Vincent Levo et Louis David Figure 69 : Vue de la villa Mondragone, Capture Google Maps Figure 70 : Matthaeus Greuter, Extrait de la gravure des villas de Frascati, 1620 ( https://www.abebooks.fr/servlet/BookDetailsPL? bi=22415639788&searchurl=sortby%3D20%26an%3Dgreuter% 2Bmatth%25E6us&cm_sp=snippet-_-srp1-_-title2 ) Figure 71 : Carte de Rome indiquant les aqueducs de l’acqua Felice et de l’acqua Virgo ainsi que les villas Médicis et MontaltoPeretti (Lili Szabo) Figure 72 : Axonométrie du parcours de l’eau dans les jardins de la villa Aldobrandini (Lili Szabo) Figure 73 : Dominique Barrière, Gravure, Villa Aldobrandina Tusculana, 1647 ( https://www.britishmuseum.org/ research/collection_online/collection_object_details. aspx?objectId=3411690&partId=1 ) Figure 74 : Falda, Gravure d’Atlas, Hercule et Tantale, Tiré de STEINBERG Ronald Martin, The Iconography of the Teatro dell’Acqua at the villa Aldobrandini Figure 75 : Falda, Gravure de la Salle du Parnasse, Tiré de STEINBERG Ronald Martin, The Iconography of the Teatro dell’Acqua at the villa Aldobrandini Figure 76 : Axonométrie du parcours de l’eau dans les jardins de la villa d’Este (Lili Szabo) Figure 77 : Dessin de la fontaine de l’orgue (Marie Martel) Figure 78 : Dessin des cent fontaines (Flavie Bonhomme) Figure 79 : Dessin de la fontaine de l’ovale (Marie Martel) Figure 80 : Plan de la succession des fontaines dans la villa Lante à Bagnaia (Lili Szabo) Figure 81 : Plan de la succession des fontaines dans la villa Médicis (Alexandre Guilalmon et Lili Szabo) Figure 82 : Plan du projet initial de la villa Giulia (Ferdinand Fert, Laurianne Crouzet, Sylvain Julien et Paul Nguyen) Figure 83 : Plan masse de la villa Farnèse (Lili Szabo)

95


Étudiante

Lili Szabo Jean-Marc Chancel, Jérôme Guéneau, Olivier Merrichelli et Gilles Sensini Architectes‑Enseignants Mémoire de S9 - 2019 ENSA-Marseille

Nombre de pages Nombre de caractères Texte composé avec les polices

95 64 931 Corbel (Jeremy Tankard) et Palatino (Hermann Zapf)



A travers une douzaine de villas de Rome, Frascati, Caprarola, Tivoli ou Bagnaia, ce mémoire illustre et analyse les relations de la villa à son territoire. S’appuyant sur les outils et les dispositifs de mise en scène de la villa dans le territoire et du territoire dans la villa, sautant d’une échelle à l’autre, ce récit se déplace dans différents espaces du projet de la villa renaissante. Ces exemples donnent des clefs pour requestionner ce que peut signifier le contextuel en architecture.


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