Comment explorer une densitométrie osseuse ? Mickaël ROUSIERE Service de Rhumatologie Hôpital Saint-Antoine, Paris
L’ostéoporose : un problème de quantité… mais aussi de qualité osseuse Diminution de la masse osseuse (aspect quantitatif)
Altération de la micro-architecture des os (aspect qualitatif)
Fragilité osseuse
Augmentation du Risque de Fracture
L’ostéoporose : épidémie silencieuse… Aucune douleur Aucun symptôme … jusqu’à la fracture…
Pourquoi s’intéresser à l’ostéoporose en 2010 !
I- Les fractures ostéoporotiques sont très fréquentes Risque fracturaire durant la vie restante Population caucasienne à l'âge de 50 ans Type de fracture
Hommes
Femmes
Avant-bras Hanche Rachis Humérus proximal
4,6 10,7 8,3 4,1
20,8 22,9 15,1 12,9
Autres
22,4
46,4 Johnell et al. Osteoporos Int 2005
Les fractures ostéoporotiques sont très fréquentes • 1 femme sur 2 et 1 homme sur 5 de plus de 50 ans aura une fracture au cours de sa vie • 55 % des sujets de plus de 50 ans ont un risque accru de fracture du fait d’une faible densité osseuse • A 50 ans, le risque de fracture chez la femme est supérieur au risque combiné de cancer du sein,de l’utérus et de l’ovaire • A 50 ans, le risque de fracture chez l’homme est supérieur à celui d’avoir un cancer de la prostate Johnell et al. Osteoporos Int 2005
II- Le pronostic des fractures
ostéoporotiques est mauvais Après une fracture de l‘ESF
20% des patients décèdent dans l'année (contre 7% des témoins même âge)
50 % des « survivants » ne retrouvent pas leur autonomie Dargent-Molina P. Rev Med Interne 2004
L’ostéoporose est une maladie mortelle…
Risque majeur de surmortalité dans les 5 années suivant la fracture, pouvant rester élevé jusqu’à 10 ans Bliuc D et al. JAMA 2009
III- Le taux de récidive est très élevé Risque de fracture consécutive Site de la fracture précédente
Hanche
Rachis
Avant- Fracture bras mineure
Hanche
2,3
2,5
1,4
1,9
Rachis
2,3
4,4
1,4
1,8
Avant-bras
1,9
1,7
3,3
2,4
Fracture mineure
2,0
1,9
1,8
1,9
Un antécédent de fracture augmente de 2 à 5 fois le risque de nouvelle fracture Klotzbuecher. J Bone Miner Res 2000
L’année qui suit la première fracture : une zone à haut risque
Cohorte de Maastricht 4140 femmes ménopausées de 50 à 90 ans avec fracture
Débuter le traitement rapidement, dès la survenue de la 1ère fracture,lorsque le risque de récidive est le plus élevé ! Van Geel TA et al. Ann Rheum Dis 2009
IV- L’ostéoporose coûte très chère Etude FOP (FESH, FEIR, FESF) Chez les hommes et femmes Sources : donnée du PMSI
Maravic M et al. Osteoporosis Int 2008
V- Les traitements efficaces existent ! Les traitements sont nombreux, variés et efficaces 7 molécules actuellement disponibles… et bientôt 8 ! Etudes randomisées, contrôlées Larges études internationales Portant sur de grands effectifs Avec des critères solides : survenue des fractures Réduction de 40 à 65 % du risque fracturaire
Quand rechercher une ostĂŠoporose ?
Dès lors que l’attention est attirée par l’existence
d’une fracture non traumatique +++++ (fracture spontanée ou après une chute de sa hauteur)
Priorité : Ne jamais ignorer une ostéoporose devant une fracture de l’ESF +++ ou fracture vertébrale +++
Sauf crâne, orteils, doigts, métacarpiens, métatarsiens
Dès lors que l’attention du médecin est attirée par l’existence
de facteurs de risque
Trois exemples cliniques : 1. Femme, 30 ans, RCH, prednisone 20 mg/j depuis 1 an 2. Femme, 62 ans, ATCD maternel de fracture de l’ESF 3. Femme, 51 ans, ménopausée depuis l’âge de 37 ans, sans THS
Comment rechercher une ostĂŠoporose ?
L’examen utile pour le dépistage de l’ostéoporose est l’ostéodensitométrie • Examen de référence • Méthode juste : précision de 1 à 3 % • Méthode reproductible (suivi) : CV 1 % • Méthode inoffensive : irradiation minime
• Examen indolore, non invasif, durée 15 mn • Enfin remboursée par l’Assurance Maladie… sous conditions • Mesure de la densité minérale osseuse sur 2 sites principaux • Rachis lombaire • Extrémité supérieure du fémur
C’est le T-score qui est utile pour prendre des décisions thérapeutiques Le T-score mesure l’écart (exprimé en déviation standard ou écart-type ) entre : • la valeur obtenue chez la patiente • et la valeur moyenne obtenue dans une population de femmes jeunes (20-25 ans) en bonne santé - Un écart-type = une DS = environ 12% - Un T-score = -2 signifie une densité osseuse plus basse de environ 25% par rapport à une femme jeune
Définition de l’ostéoporose selon l’OMS (1994) Définition validée chez la femme ménopausée d’origine caucasienne
T-score (Écart-type)
Résultats
> -1
Densité normale
-2,5 < T ≤ -1
Ostéopénie
T ≤ -2,5
Ostéoporose
T ≤ -2,5
Ostéoporose sévère
avec une ou plusieurs fractures
T-score : écart entre DMO mesurée et DMO théorique de l’adulte jeune de même sexe
Les avantages de la définition densitométrique de l’ostéoporose
Permet le diagnostic de l’ostéoporose avant la survenue de la fracture par fragilité : prévention primaire
La DMO reste à ce jour le meilleur facteur prédictif du risque fracturaire
Indications de l’ostéodensitométrie HAS 2006 Pour un premier examen (quels que soient le sexe et l’âge)
Devant la découverte d’une fracture vertébrale non traumatique ou antécédent personnel de fracture périphérique non traumatique
Corticothérapie systémique (> 7.5 mg/j, > 3 mois)
Devant des antécédents documentés de pathologies inductrices d’ostéoporose :
hypogonadisme prolongé (maladie, médicaments ou chirurgie)
hyperthyroïdie évolutive non traitée, hypercorticisme
hyperparathyroïdie primitive, ostéogenèse imparfaite
Indications de l’ostéodensitométrie HAS 2006 Indications supplémentaires chez la femme ménopausée
Antécédent de fracture du col fémoral sans traumatisme majeur chez un parent du 1er degré
Indice de masse corporelle < 19 kg/m²
Ménopause avant 40 ans quelle qu’en soit la cause
Antécédent de prise de corticoïdes (> 7.5 mg/j, > 3 mois)
Rachis : critères de qualité • Rachis centré • Rachis rectiligne • ≥ 3 vertèbres consécutives • Parties molles symétriques • Sont vivibles : – Les 2 crêtes iliaques – La moitié supérieure de L5 – La moitié inférieure de D12
Hanche : critères de qualité • Positionnement correct • Bonne reconnaissance des contours • La fenêtre d’analyse du col ne doit pas empiéter sur l’ischion • Ligne inférieure de l’ESF 10 pixels sous le petit trochanter • Pas d’artéfact ++
A l’extrémité supérieure du fémur, on retient les valeurs mesurées au col fémoral et à la hanche totale
Mesure de la DMO de l’extrémité supérieure du fémur chez une femme de 63 ans. T-score à – 3.6 au col fémoral et à – 3.2 pour la hanche totale.
Quand rechercher une ĂŠtiologie ?
Toujours ! 1. Pour s’assurer qu’il s’agit bien d’une ostéoporose ! Myélome ? Ostéomalacie ?
2. L’étiologie peut être curable Hyperthyroïdie Corticothérapie injustifiée
10 à 20 % des ostéoporoses de la femme ménopausée sont liées à une cause secondaire
Causes d’ostéoporose secondaires
Endocrinopathies et pathologies métaboliques
Maladies génétiques ou du collagène
Ostéoporose secondaire Traitements
Pathologies nutritionnelles
Comment rechercher une cause secondaire dâ&#x20AC;&#x2122;ostĂŠoporose ?
Une enquête clinique méthodique 1. Les ATCD pathologiques Allergie, asthme… corticothérapie 2. L’état général : évolution du poids ++ 3. La consommation d’alcool et de tabac 4. Les médicaments +++ 5. Les signes digestifs, génito-urinaires, cutanés… 6. L’examen clinique complet
L’aide apportée par la biologie Pourquoi une exploration biologique dans l’ostéoporose ? • pour éliminer une ostéoporose secondaire (ostéopathies malignes ou métaboliques) • pour aider à la décision thérapeutique et juger de l’efficacité des traitements dans l’ostéoporose primitive
La biologie ne fait pas le diagnostic d’ostéoporose et ne peut se substituer à la DMO
Une enquête biologique systématique Au minimum…
Dosages sanguins • NFS-plaquettes, VS-CRP, EPP • Créatininémie • PAL • Calcémie totale + albuminémie • 25(OH) vitamine D ± PTH 1-84, TSH • Crosslaps sériques à jeun (CTX) : à distance d’une fracture ! • Homme : testostérone totale (< 60 ans) ou biodisponible (> 60 ans)
Dosages urinaires • Calciurie + créatininurie des 24 heures
Les signes d’alertes devant une ostéoporose Femme non ménopausée Homme < 60 ans Amaigrissement, fièvre, signes viscéraux Cancer récent Signes neurologiques déficitaires CRP élevée, augmentation des α2 globulines Pic monoclonal ou Hypogammaglobulinémie < 6 gr/l Hypercalcémie ou Hypocalcémie < 2 mmol/l
Très bonne journée à toutes et tous !
Diaporama disponible sur : http://rhumato-saint-antoine-upmc.canal-medecine.com