Avis du rhumatologue et des autorités de santé sur la sécurité de vos traitements

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Du côté des traitements

Avis du rhumatologue et des autorités de santé sur la sécurité de vos traitements Entretien avec le Docteur Anne CASTOT Chef de service de la Surveillance du Risque, du Bon Usage et de l’Information sur les Médicaments, AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé)

Trois biothérapies utilisées dans la polyarthrite rhumatoïde sont dans la liste des 77 médicaments placés sous surveillance. Quelles sont les raisons de cette décision ? Il s'agit d'une nouvelle classe pharmacologique, avec des principes actifs nouveaux et des effets immunosuppresseurs nécessitant d'être très surveillés. Ces nouveaux médicaments très prometteurs étaient très attendus et on pouvait craindre des mésusages. Ils ont été mis sous surveillance dès leur mise sur le marché. Cette surveillance existe aussi pour les médicaments de la classe des anti-TNF, pour lesquels le groupe RATIO « Recherche sur les anti-TNF alpha et les infections opportunistes » a été constitué sous l'égide de sociétés savantes (en rhumatologie notamment), à cause du risque de survenue de tuberculose qui a été, au départ, la première inquiétude.

de partenariat. Les anti-TNF font l'objet d'une surveillance spécifique, dans le cadre d'une procédure centralisée, c'est-à-dire que s'y ajoute une surveillance européenne par l'EMA (Agence Européenne du Médicament). Les signaux d'alerte peuvent venir de France comme d'autres pays.

Les patients polyarthritiques traités par ces biothérapies doivent-ils être plutôt inquiets ou plutôt rassurés de cette surveillance ? Pourquoi ? Les patients doivent être plutôt rassurés du fait que tout nouveau produit fait systématiquement l'objet d'une surveillance renforcée ou, en cours de route, dès l'émergence d'un risque. Il faut retenir que tous les médicaments sont surveillés et que le bénéfice/risque d'un médicament n'est pas figé : il évolue dans le temps, davantage à cause du risque que de l'efficacité. En effet, ce n'est qu'en utilisation dans les conditions réelles que l'on peut vraiment évaluer un médicament. La publication de la liste des médicaments surveillés ne doit pas entraîner des arrêts de traitement et priver les patients de traitements qui sont efficaces. Le risque peut être minimisé à condition d'être informé, prévenu et de pouvoir détecter des signaux pour prendre des mesures. L'Association Française des Polyarthritiques peut être un bon relais d'information pour les patients. ■

Concrètement, en quoi consiste cette surveillance particulière ? Quelle différence avec les médicaments qui ne figurent pas sur cette liste ? Il existe deux niveaux de surveillance : une surveillance classique qui repose sur les déclarations des événements indésirables par les professionnels de santé. Ces événements indésirables sont analysés et évalués par les centres de pharmacovigilance afin de détecter d'éventuels signaux d'alerte. L'autre niveau est la surveillance renforcée : des objectifs et un calendrier précis sont fixés afin de refaire une évaluation qui est adaptée à chaque produit de santé et à ses indications. Il s'agit d'une surveillance proactive qui prend en compte les déclarations des événements indésirables des professionnels de santé, toutes les études réalisées par les laboratoires pharmaceutiques, des études de cas et toutes les publications, en France et à l'étranger.

Concernant les biothérapies, il y a déjà des registres, les informations qui y sont contenues sont-elles croisées avec vos critères de surveillance ? Les différents centres de pharmacovigilance croisent leurs données et la collaboration entre l'Afssaps et l'Observatoire RATIO est un bon exemple

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POLYARTHRITE INFOS

n°82

MARS

2011

Entretien avec le Docteur Jérémie SELLAM Rhumatologue au CHU Saint-Antoine, Paris

Quel est votre sentiment sur la décision de l’Afssaps d’établir une liste de 77 médicaments à surveiller plus particulièrement ? L’actualité récente concernant le Médiator® n’explique qu’en partie cette décision. Cette surveillance particulière donnée à la plupart des 77 médicaments s’intègre dans le Plan de Gestion des Risques (PGR) qui est un programme mis en place depuis 2005, à l’initiative de l’agence européenne du médicament (EMA). Pour tous les nouveaux médicaments arrivés à partir de cette date (dont certains utilisés dans la polyarthrite), une pharmacovigilance accrue est réalisée dans le cadre de ce PGR : le but est de s’assurer que ces médicaments sont utilisés correctement et que leur tolérance est satisfaisante. Ces médicaments ne sont donc pas sous surveillance accrue parce que l’on suspecte quelque


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Du côté des traitements

chose de particulier, mais parce que cela fait partie d’une stratégie globale de surveillance des médicaments à l’initiative de l’agence française des médicaments (l’Afssaps) et de l’EMA. Cette attitude existait donc bien avant « l’affaire Médiator® ». Le problème est la médiatisation de la liste sans informations bien claires pour les patients, et l’amalgame qui est malheureusement souvent fait avec le Médiator®.

Trois biothérapies prescrites dans la PR, Orencia®, Cimzia® et RoActemra®, sont ciblées. Est-ce justifié à votre avis ? Ce sont des biothérapies récentes, elles entrent donc dans le cadre du Plan de Gestion des Risques : il s’agit de la pratique habituelle depuis quelques années.

Avez-vous remarqué des changements dans le comportement de vos patients depuis la publication de cette liste ? Oui, certains de mes patients ont arrêté leur traitement d’eux-mêmes, d’autres viennent en consultation en souhaitant arrêter leur biothérapie. Mon rôle est alors de les informer, de leur expliquer que c’est une bonne chose que leur traitement soit surveillé de manière scrupuleuse à l’échelon national et européen et que, si on isolait un réel problème avec un traitement, il serait rapidement retiré. Les patients qui s’inquiètent concernant leur traitement doivent absolument en discuter avec leur rhumatologue ou leur médecin traitant, et en aucun cas arrêter brutalement leur traitement d’eux-mêmes. J’explique à mes patients les bénéfices pour eux des biothérapies et les conséquences s’il fallait reprendre les traitements d’il y a 20 ans !

Si on arrêtait de prescrire les médicaments dont certains sont sur cette liste, ce serait un retour en arrière dans la prise en charge de la polyarthrite… Cette décision de médicaments sous surveillance apporte-t-elle quelque chose en plus par rapport au principe de précaution déjà mis en place pour la prescription de ces traitements ? Pour nous, rhumatologues, la publication de cette liste par l’Afssaps ne change rien dans notre manière de traiter la PR, car nous pratiquons au quotidien une médecine adaptée à chaque patient. Notre choix thérapeutique est toujours raisonné et personnalisé. On connaît les effets secondaires des médicaments (même si on ne peut jamais être à l’abri d’effets secondaires inconnus) et on adapte nos indications en fonction de l’évaluation du rapport bénéfices / risques pour chaque patient. Nous avons à notre disposition des recommandations de bonne pratique d’utilisation des biothérapies établies par des experts du Club Rhumatismes et Inflammations (CRI) de la Société Française de Rhumatologie (SFR). Ces recommandations sont d’ailleurs remises à jour régulièrement.

En quoi consiste cette attitude de bonne pratique ? Pour un patient donné, on recherche systématiquement s’il existe des contre-indications à la biothérapie, on liste les antécédents du patient et plus particulièrement s’il existe des maladies associées qui feraient prendre un risque au patient avec ce traitement. La mise en route d’une biothérapie ne peut se faire qu’à l’hôpital, après un bilan complet, bien standardisé. C’est alors une équipe de rhumatologues qui confirme la prescription de la biothérapie. Par ailleurs, une fois la biothérapie prescrite, le rhumatologue traitant surveille régulièrement non seulement l’efficacité du traitement, mais aussi s’il est bien toléré. Nous faisons donc très attention pour chaque patient, mais nous avons également une vision plus globale de la tolérance de ces traitements grâce aux études épidémiologiques qui regroupent des milliers de patients sous biothérapie suivis pendant plusieurs années, une fois les médicaments commercialisés. Ce type de surveillance épidémiologique est réalisé en France, mais également dans le monde entier, et intéresse donc un très grand nombre de patients.

Peut-on finalement imaginer que les biothérapies sont trop « puissantes » du fait de leurs effets secondaires potentiels ? Face à une maladie parfois agressive, il est nécessaire d’avoir des médicaments puissants capables de bloquer l’évolution de la polyarthrite. D’ailleurs, la puissance des biothérapies est justement l’effet recherché pour les patients qui n’ont pas répondu suffisamment aux traitements conventionnels tels que le méthotrexate. Effectivement, c’est cette même « puissance » qui peut être responsable d’effets secondaires. On évalue donc pour chaque patient le bénéfice que peuvent apporter de tels traitements sur les douleurs, la qualité de vie, la mobilité, la fatigue. Ceci sera mis en balance avec les effets secondaires potentiels. Il faut bien garder à l’esprit d’une part que les autres traitements plus anciens, tels que la cortisone au long cours à dose élevée, ne sont pas non plus dénués d’effets indésirables, et d’autre part que ces biothérapies constituent une véritable révolution dans le traitement des rhumatismes inflammatoires. Nous ne sommes pas dans une situation où ces médicaments seraient peu efficaces et responsables de nombreux effets secondaires : en effet, ils sont efficaces, voire très efficaces, et ont radicalement changé le cours évolutif de la polyarthrite !

Le Di-Antalvic®, largement prescrit en rhumatologie, a été retiré de la vente en France le 1er mars 2011. Le Nexen® devrait également être retiré du marché. Que pouvez-vous dire aux patients qui prennent ces traitements ? Les effets secondaires graves rencontrés avec le Nexen® sont heureusement exceptionnels. Cependant, le retrait du Nexen® ne pose pas réellement de problème, car il y a d’autres anti-inflammatoires de substitution, tout aussi efficaces et qui présentent moins de risques, notamment hépatiques. Personnellement, je trouve que le retrait du Di-Antalvic® et du Propofan® est plus compliqué à gérer. En effet, ce type de médicaments est globalement bien toléré et efficace comme traitement d’appoint contre les douleurs de la polyarthrite. Le retrait du Di-Antalvic®, du Propofan® et des génériques apparentés a été décidé par l’EMA pour des effets secondaires graves, parfois fatals, mais survenus dans le cadre d’intoxications, accidentelles ou non. Le choix d’un traitement de remplacement est donc restreint : on peut prescrire de la codéine, du tramadol ou de la morphine, mais ces traitements ne sont pas toujours bien tolérés, surtout chez les sujets âgés. ■

POLYARTHRITE INFOS

n°82

MARS

2011 / 21


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