Mémoire

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Travail de Fin d’Étude

LOÏC ROSIN Conforter la vie locale de moyenne montagne dans le Haut Vallespir pour le diplôme Réinventer Arles-sur-Tech, entre l’exceptionnel caractère du fleuve d’Ingénieur Paysagiste méridional et les pentes habitées des contreforts pyrénéens LE RISQUE TORRENTIEL DANS École de la Nature et du Paysage de Blois

LA DERNIÈRE VALLÉE DU SUD


MEMBRES DU JURY Christophe DEGRUELLE - Président de jury Président de la communauté d’agglomération Blois-Agglopolys Professeur de politiques territotiales à l’École de la Nature et du Paysage

Catherine FARELLE - Directrice de Travail de Fin d’Étude Urbaniste et Paysagiste Professeure de projet paysage en 4ème année à l’École de la Nature et du Paysage

Vincent THIESSON - Enseignant encadrant Architecte Professeur de projet lumière à l’École de la Nature et du Paysage



Le Mondony, un affluent du Tech traverse AmĂŠlie-les-Bains. Source : cocomagnanville.over-blog.com


1

La vallée

pyréno-méditerranéene du Tech est le territoire parfait pour interroger le devenir des vallées françaises dans un contexte de déclin économique et démographique lent de ce milieu rural reculé. Ce mémoire retranscrit le travail que j’ai effectué pour découvrir, comprendre et interpréter les paysages du Haut Vallespir et se poursuit par des intentions de projet qui seront développées dans un projet détaillé pour la soutenance. De mes premières impressions paysagères à la rencontre des acteurs du territoire, en passant par l’analyse historique, scientifique, écologique et sociale, la démarche que je propose a pour objectif de mettre en exergue les forces et les faiblesses locales pour fonder un projet d’avenir durable à différentes échelles. Dans le milieu de moyenne montagne, l’Homme est indissociable de son environnement : la nature a toujours inspiré la vie quotidienne mais aussi imposé des contraintes météorologiques et physiques fortes souvent destructrices, parfois sources d’innovations technologiques et sociétales. J’ai construit ma réflexion sur ce dernier point, comment conforter la vie locale de moyenne montagne en utilisant le risque torrentiel comme médiateur prospectif pour le Haut Vallespir ?


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01

INTUITIONS

4

Quelle approche du territoire et dans quel contexte ? Le risque torrentiel comme fil conducteur Attentes vis-à-vis de la problématique

PREMIÈRES IMPRESSIONS Immersion dans le paysage Mêler intuitions et réalités du terrain Un site et un regard justifié

03

.

.

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.

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LA HAUTE VALLÉE DU TECH

ÉVOLUTION DES PAYSAGES

Introduction

Introduction

I. Le socle Le socle / Reliefs d’Arles-sur-Tech

50

18 22

1. Formation du socle La genèse de la géologie explique en partie certains phénomènes naturels

30

3. Aiguat de 1940 La crue torrentielle la plus dévastatrice / Arles-sur-Tech

34

4. Évolutions récentes Fermeture des paysages, étalement urbain, un risque continu

II. L’eau... Du ciel au fleuve / De l’aléa au risque / Arles-sur-Tech / Du risque à la ressource III. Espaces «naturels» Espaces «naturels» / Sylviculture & fermeture / Agriculture & ouverture

IV. Habiter la vallée Pôles d’attractions / Pôles économiques / Population / Formes d’habitats / Portraits de villages

2. Du Moyen-Âge à 1940 District / Arles-sur-Tech

52 56 60


3

04

05

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06

.

62

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80

VERS UN TERRITOIRE DURABLE

INTENTIONS DE PROJET

CONCLUSION

Les Acteurs Quelles sont les optiques des acteurs de ce territoire de montagne ? Quelles orientations sont envisagées pour conforter la vie locale ?

Pourquoi Arles-sur-Tech ?

À partir des éléments du paysage et d’une intuition exploratoire, ce TFE s’inscrit dans la volonté de proposer une entrée nouvelle dans la recomposition de la vallée du Tech avec l’objectif de conforter une vie locale durable de qualité.

Potentialités Cartographie des enjeux potentialités du site

et

68 des

Compositions et potentiels Les espaces d’Arles-sur-Tech Utopie fondatrice Le projet idéal pour Arles

72 74 76 78

Du projet idéalisé aux réalités In Situ Rendre possible et spatialiser le projet

Le rôle d’Arles-sur-Tech pour la vallée Retour à l’échelle du Haut Vallespir

BIBLIOGRAPHIE REMERCIEMENTS

82 85


4

01

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to

INTUITIONS & PREMIÈRES IMPRESSIONS Dès mes premières intentions de TFE, j’ai souhaité travailler sur l’eau et la montagne. Conscient des réalités contemporaines (environnement, économie,...), je me suis penché sur la question du risque naturel. Ce dernier, souvent considéré comme une contrainte a pourtant une influence positive sur notre société ou du moins, apporte des idées et est une ressource bénéfique aux territoires concernés. Le risque torrentiel ? Voilà vers quoi je veux amener ma réflexion de paysagiste. En partant du constat territorial suivant : les territoires de vallée de moyenne montagne, localisés dans des aires géographiquement reculées connaissent un déclin lent mais engagé, une sorte d’exode sociétale alors même qu’ils proposent un cadre de vie de grande qualité à l’image de cartes postales et une solidarité sociale exemplaire. Ces terrains aux reliefs accentués et aux micro-climats extrêmes sont contraints. La question globale peut-être formulée ainsi : «le risque torrentiel peut-il devenir un atout pour la revitalisation d’une vallée de moyenne montagne ?»

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CHANGEMENT CLIMATIQUE

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UNE APPROCHE GLOBALE... Pour répondre à la question essentielle du risque en tant que paysagiste mon approche est transversale : à travers les éléments de l’environnement (régime torrentiel et changement climatique) qui agissent sur la vallée, et les éléments issus de la société humaine (démographie et économie) je questionne les évolutions à venir du paysage montagnard en utilisant le risque comme support d’une démarche prospective.


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RÉGIME TORRENTIEL

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CLÉS DE LECTURE Société : ce qui touche au fonctionnement de la vie locale. La population connaît un déclin lent et l’économie s’est tournée vers le tout-tourisme grâce notamment aux stations d’hiver, alors même que ces territoires sont riches de savoir-faire. Environnement : les études scientifiques et les observations actuelles sont certaines, nous vivons un changement climatique qui amène à des évolutions météorologiques : des périodes de pluies plus courtes et plus intenses. Comment reposer ces enjeux humains au regard des façons de vivre et du changement climatique avec le risque torrentiel comme révélateur d’un projet d’avenir durable pour la vallée ?


6

01

.

Pour répondre à cette problématique globale j’ai cherché un site loin de chez moi et loin de l’école pour découvrir et proposer un regard différent, extérieur. J’ai choisi l’endroit qui est à la rencontre des montagnes (Pyrénées) et de la mer (Méditerranée). Ce territoire est riche d’une diversité à la fois géomorphologique et climatique sur une distance de quelques dizaines de kilomètres seulement : le fleuve du Tech s’avère être un sujet d’étude particulièrement redoutable au vu de son fort caractère déployé sur seulement 84 kilomètres de sa source (2 345m d’altitude dans le massif du Costabonne) à son embouchure (Argelès-sur-Mer 0m).

1940 : «L’AIGUAT» (Batlle M., Gual R., 1981, Revue Terra Nostra n°42.)

OCCITANIE CATALOGNE

PYRÉNÉES ORIENTALES PROVINCE DE GÉRONE

PAYS CATALANS

...POUR UNE RÉPONSE LOCALE Nous nous trouvons en région Occitanie, dans le département des Pyrénées Orientales (66). Cette région géographique partage une frontière avec l’Espagne et fait partie d’un ensemble culturel plus grand, celui des Pays Catalans. La vallée du Tech est donc la dernière vallée française avant la frontière espagnole. Ce terrain apparaît idéal pour expérimenter mes idées : un fleuve court et intense dans un cadre pyrénéo-méditerrannéen en plein changement climatique et dont la vie locale est reculée de part la géographie mais aussi de part les intérêts humains (l’attractivité du littoral). Une haute vallée à l’écart des grands enjeux départementaux, et qui paraît comme une impasse géographique vue de l’aval du bassin versant.


7 Il existe un vrai déséquilibre entre la vie de la plaine animée et de la montagne marginalisée. Dans la mesure où ces deux territoires possèdent des dynamiques d’évolutions contraires, il convient de requestionner le rôle de ce pays rural de moyenne montagne. Peut-il exister une complémentarité territoriale retrouvée à travers la revitalisation du Haut Vallespir ? Le Haut Vallespir (nom culturel donné à la haute vallée du Tech) ne jouit pas de l’attractivité du littoral, alors que l’embouchure se trouve à Argelès-sur-Mer, l’une des plus grandes stations balnéaires méditerranéennes. Elle ne jouit pas des terre fertiles de la plaine et de la basse vallée : cette dernière est traversée par l’autoroute A9 qui favorise une frontière économique très concurrentielle. Elle ne jouit pas non plus de l’influence métropolitaine de Perpignan et se voit même en sousconcurrence avec la vallée française voisine au nord qui est la vallée de la Têt, une vallée plus agricole et plus touristique. Dans cet environnement peu enclin à favoriser le territoire du Haut Vallespir, j’ai donc posé la problématique suivante :

COMMENT CONFORTER LA VIE LOCALE DE MOYENNE MONTAGNE PAR UN PROJET DE PAYSAGE FAISANT DU RISQUE TORRENTIEL UN ATOUT POUR RÉINVENTER LA RURALITÉ DU HAUT VALLESPIR ?

Si j’approche ce territoire par une grande échelle (presque celle du Haut Vallespir) qui permet d’avoir une compréhension générale du fonctionnement de la vallée, le site de projet qui se situe à Arles-sur-Tech sera tout au long de ce mémoire corrélé aux informations exposées.

Le risque torrentiel comme support pour réinventer Arles-sur-Tech


8

01

.

INTUITIONS & PREMIÈRES IMPRESSIONS

Je m’attendais à une vallée méditerranéenne, des paysages secs de garrigues et de maquis. Mais si le soleil du sud, celui des vacances fût au rendez-vous, point de jaune, de brun, d’orange. C’est une vallée certes fortement mouvementée de pentes et d’escarpes, mais c’est une vallée curieusement généreuse en bois et forêts qui s’offre à moi. Une déception peut-être, mais une étrangeté que j’ai envie de comprendre. Le fleuve ne se montre pas dangereux au contraire, mais c’est certainement parce que nous sommes l’été 2017, vigilance orange sécheresse. Il y a plus de cailloux que d’eau... Et puis l’eau et si souvent loin de la route, loin en contre-bas que je ne fait que deviner sa présence par les reliefs qui se croisent.

Roc Colom La Preste

Prats-de-Mollo

Avellanosa

Col d’Ares La vallée est étroite, elle s’ouvre par endroit sur des prairies ou des méandres, elle se referme par des gorges. L’horizon quand il est lointain donne sur les arrêtes des grands massifs du Canigó au nord, du Costabonne à l’ouest. Au sud, il est moins net, il se dissout dans des reliefs moins aigus, une frontière certes géographique mais douce au regard des crêtes rocheuses du nord. À l’est, les dégradés de bleu se floutent et parfois depuis un sommet, on voit la mer. La forêt domine le paysage que quelques falaises viennent magnifier. Ce n’est pas un paysage sec de garrigue auquel je m’attendais en descendant dans cette région, mais bien de la végétation verte et volumineuse.


9

Pic du Canigó

Corsavy

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Gorges de la Fou

Riu

Amélie-les-Bains

Arles-sur-Tech Le Tech Amélie-les-Bains me plonge doucement dans un paysage resserré, où des affleurements rocheux surplombent les habitations. Le fleuve est en contrebas de hauts murs qui soutiennent la ville. Ici, beaucoup de touristes, beaucoup de passants. C’est entre Amélie-les-Bains et Arles-sur-Tech que commence pour moi la haute vallée, dans un pincement rocheux qui fait office de porte d’entrée naturelle. C’est aussi seulement à Arles que la route quitte le fleuve pour traverser un village en recul. C’est à la confluence du Riuferrer et du Tech que je reprend le cours de l’eau. D’ici, une belle perspective s’ouvre sur les paysages pyrénéens du Canigó, seule vraie ouverture depuis le fond de vallée. Passé Arles-sur-Tech, les courbes de la route s’accentuent, cadrées par des reliefs imposants. Un site touristique apparaît comme «les gorges les plus étroites du monde», ce sont les gorges de la Fou. Presque à mi-chemin, le petit village de Le Tech, s’accroche paisiblement à un versant raide. Un tunnel puis l’espace s’ouvre sur l’Avellanosa où des panneaux d’informations sur la crue de 1940 et le glissement de terrain gigantesque qui a eu lieu ici au même moment. Le fleuve s’élargit, méandreux jusqu’à Prats-de-Molló. Ce village fortifié et sa citadelle Vauban surveillent la route du Col d’Ares qui passe la frontière. Elle donne aussi accès, dans une impasse routière à la station thermale de La Preste.


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Des amers rocheux percent le manteau forestier et deviennent des repères naturels. Les boisements dominent le paysage mais des prairies ponctuent la découverte en offrant des vues dégagées sur les versants et permettent de se situer. Ces pâtures servent aux élevages ovins.


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Au petit village Le Tech, l’accès au fleuve est facilité par un stationnement prolongé d’un passage à gué. Les bâtiments sont construits sur un versant renforcé par des murs de soutènement. Ce village presque perché offre un bel exemple de rapport ville / fleuve.


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La D115 est l’unique voie de communication qui traverse la vallée et nous emmène vers l’Espagne. Cette itinéraire est apprécié des motards et cyclistes pour son aspect route de cols très montagnard pourtant à la portée des amateurs (la route donne la sensation d’être plate d’Arlessur-Tech à Prats-de-Molló et ne s’accentue qu’après).

Si les versants sont très boisés, une fois sur les hauteurs, les prairies et pâtures d’altitude dégagent des vues splendides sur les massifs. La vallée est imperceptible, noyée dans les creux des vagues qu’imitent les reliefs.


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Des ponts sur des ponts ? Les passages au-dessus du Tech à Prats-de-Molló témoignent certainement des crues du fleuve. Ces piliers pourtant très massifs ne semblent pas avoir résistés.


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Arles-sur-Tech vu depuis les hauteurs du Belmaig (prononcé «bellematche»). Les crêtes rocheuses du massif du Canigó forment l’ultime horizon nord et si je me tourne à droite, je devine les bleus brumeux de la Méditerranée. Arles se tient à ce basculement entre la basse et la haute vallée.


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C’est le Riuferrer qui me conforte sur ma démarche et m’interroge : pourquoi ce mince filet d’eau est-il emmuré aussi brutalement alors qu’il paraît inoffensif ? Là, j’ai été convaincu qu’il y avait quelque chose à découvrir.


16

02

.

LA HAUTE VALLÉE DU TECH Les crêtes rocheuses du nord définissent des limitent franches en touts points (visuel et administratif). Les limites se détendent au sud, moins nettes, pourtant frontalières avec la vallée espagnole du Ter avec laquelle elle a des liens (historique et géographique) très forts. Le périmètre d’étude que je choisi n’est pas défini sur une base administrative (qui aurait pu être la Communauté de Commune du Haut Vallespir). Elle est moins étendue et trouve ses bords dans les horizons vus depuis la vallée. Si le fleuve est le fil conducteur, ce périmètre s’élargit en partie à son bassin versant et donc, ses affluents qui jouent un rôle important dans la question du régime torrentiel. C’est un grand territoire en surface (350km2 sur les 750km2 du bassin versant total) pour être habité par moins de 10 000 habitants (soit une densité moyenne de 28 hab/km2). Ce chapitre analyse les éléments du paysage du Haut Vallespir selon l’ordre suivant : (du socle naturel aux modes de vie locale) IV. H abit er la III. E vallé spac e e s «n II. L’ a ture eau ls» I. Le socl e

COSTABONNE SOURCE

LA PRESTE

COL D’ARES


MASSIF DU CANIGÓ AMÉLIE-LES-BAINS

ARLES-SUR-TECH AVELLANOSA LE TECH

PRATS-DE-MOLLÓ

SAINT-LAURENT-DECERDANS

N 0

1

5 Km 1 / 100 000ème


18

I- LE

2784. PIC DU CANIGÓ

02

.

PUIG DEL TRES VENTS 2731.

SOC

LE

Gorges sinueuses et défilés profonds, à part quelques rares plateaux et élargissements du fleuve, la haute vallée du Tech est une vallée au profil contraint. La ramification des crêtes va de paire avec celle des creux. Ces mouvements de socle complexes, sont le support de ce vaste territoire et forment ainsi les limites de ce dernier. Ces reliefs érodés peuvent êtres divisés en deux massifs : sur la rive nord du Tech, le massif du Canigó et sur la rive sud, un massif entre les Albères et le Costabonne. Les principaux sommets du Haut Vallespir sont le Puig del tres Vents (2731m), Pic de Costabonne (2465m) et le Pic du Canigó (2784m). Les reliefs ne sont pas que des repères dans la vallée mais ils la font exister depuis toute la côte méditerranéene du département grâce aux sommets du Massif du Canigó qui peuvent-êtres visibles jusqu’à Marseille (notamment au couché de soleil).

Montagne sacrée du pays catalan, le Canigó («Canigou» en français) est un haut lieu du pyrénéisme dont il est aussi le berceau. Haut de ses 2 784 mètres d’altitude, il est couvert de neige parfois tout le printemps, contrastant ainsi avec les floraisons des vergers de cerisiers alentours. «Puig» signifie pic en catalan.

MASSIF DES ALBÈRES VALLÉE DU TECH

PUIG DE LA COLLADA VERDA 2282.

LE T

ECH

PIC DU COSTABONNE . 2 465

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LA PRESTE .1105

CH

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L

A

PIC DU CANIGOU

COL D’ARES 1 513M. VALLÉE DE LA TÊT

à 45 Km


.280 PUIG DELS SARRAIS .1830

LE TECH

ARLES-SUR-TECH

B’

B

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PRATS-DE-MOLLÓ .730

PILÓ DE BELMAIG .1280

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LE TEC

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SAINT-LAURENT-DE-CERDANS MONT CAPELL .690 1194.

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PUIG DEL TRES VENTS 2731.

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Gorges sinueuses et défilés profonds, à part quelques rares plateaux et élargissements du fleuve, la haute vallée du Tech est une vallée au profil contraint. La ramification des crêtes va de paire avec celle des creux. Ces mouvements de socle complexes, sont le support de ce vaste territoire et forment ainsi les limites de ce dernier. Ces reliefs érodés peuvent êtres divisés en deux massifs : sur la rive nord du Tech, le massif du Canigó et sur la rive sud, un massif entre les Albères et le Costabonne. Les principaux sommets du Haut Vallespir sont le Puig del tres Vents (2731m), Pic de Costabonne (2465m) et le Pic du Canigó (2784m). Les reliefs ne sont pas que des repères dans la vallée mais ils la font exister depuis toute la côte méditerranéene du département grâce aux sommets du Massif du Canigó qui peuvent-êtres visibles jusqu’à Marseille (notamment au couché de soleil).

Montagne sacrée du pays catalan, le Canigó («Canigou» en français) est un haut lieu du pyrénéisme dont il est aussi le berceau. Haut de ses 2 784 mètres d’altitude, il est couvert de neige parfois tout le printemps, contrastant ainsi avec les floraisons des vergers de cerisiers alentours. «Puig» signifie pic en catalan.

MASSIF DES ALBÈRES VALLÉE DU TECH

PUIG DE LA COLLADA VERDA 2282.

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PIC DU COSTABONNE . 2 465

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PIC DU CANIGOU

COL D’ARES 1 513M. VALLÉE DE LA TÊT

à 45 Km


Tour de Cos

GÉOLOGIE

1116 m

675 m

Les nombreuses failles géologiques quand à elles font émerger des sources d’eaux chaudes naturelles.

SCHISTES ET MICASCHISTES

Puig Fabre (1147m)

PUIG CABRES 1162m

FAILLES FAILLES C PUIG FERRÉOL .1314

250m

B’ GRANITE

SCHISTES ET MICASCHISTES Coupe géologique de principe 1 / 100 000ème

En montagne, l’érosion des versants est forte par l’action de l’eau et de la gravité. Elle varie selon le climat et la nature des sols. Ces derniers sont instables et fins, ils ne stockent pas ou peu d’eau et ne compensent pas l’imperméabilité du sous-sol.

B Coll Patry (1652m)

250m

En catalan «Picó» signifie pilone et «Coll» un col. Dans ce paysage, les pentes dépassent parfois les 60% créant des paysages fermés accentués par la grande présence de forêts.

0 Puig de Cagallops (1777m)

1131 m

PRATS-DE-MOLLÓ .730

700 m

ALLUVIONS DU QUATERNAIRE

LE TECH

B

C’

AVELLANOSA 1000 m

LE TECH

B’

C’

C

Le socle se montre fragile, au site de l’Avellanosa un pan entier de montagne s’est écroulé en 1940.

PRATS-DE-MOLLÓ

PUIG DELS SARRAIS .1830

475 m

GNEISS

Ravin du Caussol

LE TECH

La géologie de ce relief est massivement composée de roches métamorphiques. Les socles gneissiques, schisteux et granitiques sont denses et cette propriété accentue le phénomène torrentiel : quasiment imperméables, les socles empêchent l’eau de pluie de s’infiltrer en profondeur. Toute l’eau ruisselle vers les creux et nourrissent sans retenue le régime hydrologique.

A’

A


.588

.394

ENTRÉE A .492

.267

B

.429 .533

.272 .295

D

C

.648

N COURBE= 20M

0

200m

Source : géoportail.gouv, données cartographiques : IGN FEDER Région Occitanie

500 m

1 / 20 000ème


21 J’ai identifié sur la base de mes premières impressions Arles-sur-Tech comme la porte d’entrée de la haute vallée. Site de projet, Arles se définit globalement par une rive nord légèrement en replat sur laquelle s’est construit le village historique et dont le versant, qui s’accentue rapidement, était autrefois aménagé en terrasses cultivées de vergers et de jardins. La rive sud est très pentue, elle mène au sommet du Belmaig : sur seulement trois kilomètres on passe du Tech (altitude 270m) au Pic du Belmaig 1280m.

RELIEFS D’ARLES-SUR-TECH

312 m

290 m

LE TECH

Roca Foradada 483 m

C

Le bourg historique s’est installé sur un ancien méandre du fleuve. L’évolution urbaine a ensuite investi l’ensemble de la confluence du Riuferrer et du Tech.

660 m

270 m

D LE TECH

295 m Arles-sur-Tech Habitations individuelles et entrepôts

A

Étalement urbain

492 m

Anciennes terrasses

A

Arles-sur-Tech centre ancien

Logements et espace spotif

492 m

492 m

A

LE RIUFERRER

el Cortalet

B

Mas de la Guardia

Puig de Capell 607 m

LE RIUFERRER

C’est ce moment où l’on traverse le Tech par ce pont qui se tient entre deux avancés rocheuses. Le cadrage est naturel, dans quelques mètres la traversée du Tech marquera un passage, une porte d’entrée, un basculement dans les paysages de la haute vallée.

300m

300m

0

1 / 15 000ème


22

02

II- L ’EAU

.

...

La géologie métamorphique du socle du Haut Vallespir restant imperméable, la quasi totalité des pluies se retrouvent dans les cours d’eau (affluents et fleuve) nourrissant ainsi abondamment un régime torrentiel de par l’intensité des événements climatiques. La vallée du Tech connaît la plus forte pluviométrie du département. Ce climat est l’association de son orientation est-ouest qui favorise les vents humides et de son influence méridionale : les précipitations dans la vallée sont plus intenses et fréquentes qu’en plaine. Cette condition climatique soutient l’aspect plus généreux de la végétation.

DU CIEL AU FLEUVE

g Ora es

es

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Ma ir f d’a

Arles-sur-Tech

Amélie-les-Bains

6.0 920

889

Le Tech

Prats-de-Molló

La Preste

1.6

Altitude en mètres

A M

1 010

1 000

A M

1 118

10

500

5 Km

0.3 0.8

5

Débit moyen mensuel aux mois de Août et de Mai en m3/s

0

Pluviométrie annuelle en mm

500

s de

1 000

roi

COSTABONNE

Tracé supérieur : Altimétries du massif du Canigó jusqu’à la mer Tracé inférieur : Parcours altimétrique du lit du Tech de sa source à son embouchure


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En automne, les arrivées d’air froid rencontrent la masse d’air encore chaude de la Méditerranée, cette rencontre provoque des orages courts et intenses. Au printemps, les pluies sont moins intenses mais plus abondantes.

A M

650

chaudes

Argelès-sur-Mer

Cet été 2017, les cours d’eau sont en étiage c’est-à-dire à leur niveau le plus bas. À long termes, un étiage prolongé peut modifier les systèmes écologiques indispensables à la qualité des eaux.

2.4

726

Masses d’air

Arles-sur-Tech est dans un entre-deux climatique.

70KM

La pluviométrique moyenne annuelle décroit vers l’aval du bassin versant et inversement, le débit du fleuve qui récupère et accumule les eaux de ruissellement augmente.

MÉDITERRANÉE

13.1

7.9

3.0

A M

Le Boulou

On peut qualifier le caractère du fleuve de la façon suivante : «régime à influence nival» avec un régime nivo-pluvial pyrénéen jusqu’à Arles-sur-Tech dû au climat de moyenne montagne. En aval d’Arles-sur-Tech, on qualifiera plutôt un régime pluvio-nival méditerranéen de part la variabilité inter-annuelle très forte des débits. Ainsi, le Tech combine deux types de fluctuations saisonnières de débits importants : celle des cours d’eau méditerranéens (crues en automne/hiver avec pour origine les pluies) et celle des cours d’eau de haute montagne avec des crues de printemps (issues des pluies associées à la fonte des neiges d’altitude). L’étude sur l’eau RMC (agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse) de 2006 qualifie le cours d’eau du Tech «permanent Cévenol-Pyrénéen» avec un manque de soutien à l’étiage.

Sources : hydro.eaufrance.fr


24

02

RUISSELLEMENTS

II- L ’EAU

.

...

DE L’ALÉA AU RISQUE Climat et nature du socle vont de paire dans les multiples aléas qui contraignent la haute vallée du Tech : classée de moyenne à élevée pour les incendies, en zone de sismicité 4/5, de nombreuses zones de glissements de terrain, les inondations et autres phénomènes liés au régime torrentiel, la vallée décrite ainsi fait plus penser à un terrain de combat que de tranquillité. Ce sont les aléas directement liés à l’eau qui vont nous intéresser. La notion de risque émerge lorsque l’Homme ou ses activités peuvent êtres atteints par les événements climatiques. Les dégâts matériels mais aussi humains deviennent des enjeux à protéger.

ENJEUX

ALÉA

RISQUE

Naturellement la pluie s’infiltre en partie dans les sols et ruisselle en surface pour atteindre le point le plus bas. La faible couche de sol et la nature des roches et du socle limitent l’infiltration et la retenue des ces eaux. Associée à une urbanisation sur les replats, l’eau ne s’infiltre plus et les ruissellements s’accentuent en plus de rencontrer des obstacles (bâtiments, murs). Le risque est une inondation par le haut c’est-à-dire que les ruissellements ne s’évacuent pas assez vite et se stockent dans le village.

INONDATIONS L’inondation se fait quand le cours d’eau commence à occuper son lit majeur. Anciens méandres, ces espaces en montagne proposent des replats sur lesquels construire. Les crues espacées dans le temps peuvent êtres oubliées au détriment d’étalements urbains insouciants.

LAVES TORRENTIELLES

Ce sont les formes torrentielles les plus dangereuses : elles se définissent par une grande vitesse de charriage des matériaux solides pouvant générer des embâcles et débâcles qui déferlent puissamment. Les passages à gué, les piles des ponts sont susceptibles de bloquer des arbres et rochers et former un barrage (l’embâcle) qui cédera sous la pression (débâcle). Les laves torrentielles sont rapides et peu prévisibles, l’entretien des ripisylves et l’aménagement de traversés adaptées permettent d’en limiter les risques.


25

GLISSEMENTS DE TERRAINS

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Les glissements de terrain peuvent êtres principalement illustrés par le site de l’Avellanosa. Mais d’autres sites ont subi cet aléa comme en contre bas de la Roca Foradada à Arles-sur-Tech, le glissement de «Can Valent». Les processus en jeu sont expliqués dans le chapitre «formation du socle».

CARTOGRAPHIE DES RISQUES

D’INONDATIONS ET DES GLISSEMENTS DE TERRAIN 0

N

5 Km


26

02

II- L ’EAU

.

...

DE L’ALÉA AU RISQUE

ARLES-SUR-TECH

La nature des risques et leurs aires d’influence sont cartographiées par le Plan de Prévention des Risques qui fait source au document ci-dessous. On observe qu’Arlessur-Tech est fortement soumi aux risques (bleu les surfaces à risque fort, orange les surfaces à risque faible) et est sur un ancien méandre du Tech. On peut aussi se référer aux témoignages des habitants pour compléter ces informations comme par exemple le fort ruissellement qui parcours d’Arles et parfois déborde dans les rues.

0

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300 m


27

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EMBÂCLES

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2 HABITATIONS OBSTACLES 3


28

02

II- L ’EAU

.

...

DU RISQUE À LA RESSOURCE L’eau est au coeur des enjeux et pas seulement celui du risque. En parallèle, le Tech, ses affluents et les sources d’eaux chaudes forment une véritable ressource pour le territoire. La force hydraulique qui peut dévaster la vallée, lui fournit l’électricité grâce aux conduites à eau forcé. La géologie qui aggrave certains risques est composée de failles desquelles jaillissent des eaux chaudes. La ramification très développée des cours d’eau certes crée un bassin versant gigantesque pour le seul fleuve du Tech mais les continuités écologiques qu’elle tisse dans le massif sont essentielles pour la qualité environnementale. Cet ensemble d’atouts de l’eau et ses usages font de la vallée un territoire aussi viable que fragile que ce soit pour l’habitant et sa vie quotidienne ou pour l’éphémère touriste.

Le Haut Vallespir commence administrativement à Amélie-les-Bains, connu pour sa station thermale du Soleil, utilisant une source d’eau chaude produite par la présence de failles géologiques. Il y en a plusieurs tout le long de la vallée, et cette dernière se finit à la station de La Preste qui propose aussi des bains internationalement réputés. Entre ces deux bains, des nappes superficielles présentes dans la couche d’alluvions récentes du lit du Tech sont exploitées comme ressource en eau potable, tout comme le fleuve luimême. Certaines des ces aquifères sont isolées ou déconnectées ce qui en fait des ressources fragiles et limitées. Montagne thérapeutique Les stations thermales sont spécialisées dans certains traitements : Amélie pour les rhumatismes et voies respiratoires, La Preste pour les affections génitourinaires et la rhumatologie. Mais La Chaîne Thermale du Soleil développe des gammes de services de plus en plus larges pour proposer aussi à des curistes plaisanciers des activités de bien être.


25

Les paysages de l’eau sont des fils conducteurs à travers la vallée. Faisant partie de l’ensemble paysager du Haut Vallespir ils participent à l’attraction touristique en apportant un cachet «naturel» à la région. Que ce soit pour des préférences esthétiques ou sportives, le Tech et ses affluents sont moteurs des dynamiques touristiques.

Représentation numérique du Tech à Arles-sur-Tech, en amont du nouveau pont - travaux personnels


30

02

IIIES «NA PACES TUR ELS»

.

LE GRAND PAYSAGE DE LA HAUTE VALLÉE INHÉRENT DU RISQUE TORRENTIEL

ESPACES «NATURELS» Toute cette eau vient nourrir les ambiances naturelles de la vallée, très appréciées des touristes. L’image ainsi véhiculée est, comme je l’ai ressenti, très généreuse de «nature». Or, pour bien définir les termes, ce qu’on met derrière la définition de «nature» dans le Vallespir résulte à 80% de choix humains. Ces interventions au cours du temps sont notamment les conséquences de politiques de reboisement pour lutter contre le risque torrentiel et les glissements de terrain. De cette façon, les forêts ont été plantées et maintenues par l’effort des Hommes, les landes et grandes prairies existent grâce aux pâturages. Seuls les rochers des paysages pelés des crêtes et quelques garrigues dissimulées sont des paysages naturels, c’est-àdire complètement issus des éléments climatiques et géomorphologiques spécifiques à la situation géographique.

Crêtes rocheuses Forêts

La montagne menaçante et bienfaisante La montagne nourrit les Hommes, elle donne du travail, soigne avec ses eaux, a offert ses entrailles ferrugineuses, ses forêts. L’Homme a exploité tous les trésors de ce massif et c’est ce qui en fait sa force et sa faiblesse : un équilibre fragile à conforter.

Prairies Ripisylves Bâtis


31

ARLES-SUR-TECH

0

N

5 Km


32

02

IIIES «NA PACES TUR ELS»

.

SYLVICULTURE & FERMETURE

Le paysage extrêmement boisé qui compose le Vallespir fait office d’écrin et d’écran. Il est peu exploité à cause des pentes qui rendent l’exploitation du bois peu rentable. Ces forêts sont le résultat de politiques de reboisement et de pratiques anciennes de châtaigneraies. Les forêts autour d’Arles-sur-Tech sont au sud des châtaigneraies abandonnées pour la plupart. Au nord, des mélanges de feuillus. Sur la carte cidessous, on constate que les châtaigneraies occupent principalement le massif sud alors qu’au nord, se sont les résineux qui dominent entre les fonds de vallée et les crêtes rocheuses. La faible proportion des pâtures (et d’activités agricoles) est marquante. Le paysage est fermé et se renferme sur lui-même : ces boisements plantés en partie pour limiter l’érosion et le risque torrentiel sont peut-être aussi à l’image de notre rapport à la nature. Un vrai enjeu se révèle : ouvrir le paysage et faire respirer la vallée.

OCCUPATION DU SOL ET TYPOLOGIES VÉGÉTALES

ARLES-SUR-TECH

Chêne vert Châtaigneraies Feuillus divers Résineux divers

Prairies

Landes rocheuses

Bâtis

0

N

5 Km


En Vallespir les surfaces cultivées sont des surfaces en herbe et ponctuellement des fourrages et de l’arboriculture. Tout comme l’urbanisation, l’agriculture est contrainte par la morphologie des terrains. Elle cherche les replats les plus stables pour implanter ses prés et fourrages, ils correspondent presque toujours à de petits plateaux de sommets. De cette manière, les espaces entretenus par l’agriculture offrent des panoramas extraordinaires sur les massifs et les horizons des crêtes rocheuses. L’agriculture / élevage en Vallespir contribue (d’un point de vue paysager) à l’ouverture des paysages dans les massifs montagneux (défrichements, pâtures,...). Elle permet d’un point de vue plus local une activité économique de proximité, et bien que faible, enrichit les marchés locaux de produits frais issus directement de la vallée.

Irrigation La basse vallée et la plaine se développent en vergers (cerisiers), vignobles et maraîchage. Cette évolution constante est facilitée par un système d’irrigation gravitaire ancien. Réseaux complexes de canaux «agouilles» et «regatiu», l’eau est cherchée au niveau du fleuve ou d’un affluent. Ces chemins de l’eau dessinent en grande partie l’identité agraire du bassin versant. On retrouve moins ce système en haute vallée. Il existe mais est décliné à l’usage des jardins et potagers. Un exemple de canal (Mas Plume) à Arles-sur-Tech :

Sources : http://www.ville-arles-sur-tech.fr

02

.

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CESLS» A P S III- «E NATURE

AGRICULTURE & OUVERTURE


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Pic du CANIGÓ

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IV- H ABIT LA V ER ALLÉ E

.

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PÔLES D’ATTRACTIONS

Source du Tech

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Les paysages dominés d’ambiances «naturelles» sont très attractifs pour le tourisme «vert». Il y a un petit côté «ressourçant» à cette vallée, entre les randonnées aux sources du Tech, l’écrin de végétation couronné des crêtes rocheuses et les sources d’eaux chaudes. Les itinéraires de randonnées sont nombreux, en plus du fameux GR10 qui relie la Méditerranée à l’Atlantique, le Haut Vallespir s’est doté du «Tour du Canigó» et du «Tour du Vallespir» qui traversent la vallée et longent la frontière. Le patrimoine naturel joue un rôle non négligeable ici, du symbolique Canigó aux gorges de la Fou (dites les plus étroites du monde). L’itinéraire du GR10 passe au coeur d’Arles-sur-Tech ce qui en fait un site de départ et d’arrivée potentiellement important. Un réseau de bus à 1€ est très développé à l’échelle du département et permet d’accéder à la vallée facilement. Ce service est à la rencontre entre un service touristique et un service de proximité puisqu’il permet inversement d’accéder sans grands frais à la plaine.

Présence d’un marché hebdomadaire

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IV- H ABIT LA V ER ALLÉ E

.

Les stations thermales attirent considérablement les touristes. Des petites et moyennes entreprises sont présentes un peu partout mais c’est en redescendant le fleuve, à partir d’Arles que l’on commence à trouver des entreprises plus importantes et cela s’accentue au fur et à mesure que l’on se dirige vers la plaine. Les marchés hebdomadaires sont bien répartis sur la vallée et s’enchaînent chaque jour de la semaine. Lors de ces marchés, ont retrouve des producteurs locaux (viandes, maraîchages) mais se sont aussi des vendeurs venus de la plaine qui viennent alimenter les habitants. On trouve à Arles, Prats et Saint-Laurent de petites supérettes sur lesquelles repose un important enjeu de proximité. Dès la sortie Est d’Amélie, les supermarchés s’enchaînent.

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PÔLES ÉCONOMIQUES

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13min 8,5Km

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Présence d’un marché hebdomadaire Trajet en voiture

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9 394 hab. en 2014

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IV- H ABIT LA V ER ALLÉ E

Positive Négative de 0 à -1% Négative de plus de -1%

- 1,25%

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POPULATION La Communauté de Commune du Haut Vallespir paraît concentrer plus de difficultés sur le plan des variations démographiques vis-à-vis du département des Pyrénées Orientales. Son évolution moyenne est de -1,25% de population dans la période de 2010 à 2014. Cette tendance est partagée entre les communes du Vallespir de façon inégale allant de +24% à Le Tech à -20% à Lamanère. La haute vallée compte un total de 9 394 habitants en 2014 aussi inégalement répartis sur ce territoire avec Prats-deMolló et Saint-Laurent qui concentrent 24%, les six petites communes qui réunissent en tout 10%. À partir d’Arlessur-Tech, la population augmente au fur et à mesure que l’on descend vers la plaine.

Source : Carte à l’échelle des Pyrénées Orientales réalisée par Stéphane Sicard sur la base de l’évolution démographique Insee entre 2010 et 2014 et publié sur l’indépendant.fr

Prats-de-Molló-la-Preste 1 099 hab

En pourcentage : Arles-sur-Tech sort du lot avec un pourcentage très important de résidences principales (71%). Cette composition de la population soulève l’intérêt d’y faire un projet pour la vie locale. La grande proportion de vacance (19%) montre aussi un déséquilibre du logement et des modes d’habiter la vallée.

Résidences principales Résidences secondaires Résidences vacantes Petites communes


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12%

58

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2

2.5%

3%

MONTFERRER 187 HAB

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Saint-Laurent-de-Cerdans 1 142 hab

12%

52 16

LAMANÈRE 43 HAB

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0.5%

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Répartition de la population calculée à partir des données sources de l’Insee, RP2009 et RP2014 exploitations principales en géographie au 01/01/2016 + Répartition des types de résidences calculée à partir des données sources de l’Insee, RP2014 exploitation principale en géographie au 01/01/2016

28% 71

39

CORSAVY 235 HAB

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39

AMÉLIE-LES-BAINS 3 554 HAB

38% 55 6

2 690 HAB ARLES-SUR-TECH

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5 Km

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IV- H ABIT LA V ER ALLÉ E

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FORMES D’HABITATS Deux formes d’habitats principales composent à leur façon le paysage : les villages et centres bourgs très denses, et les mas (fermes isolées) qui s’éparpillent dans les reliefs mais ont la particularité d’entretenir les espaces qui les entourent. Entre ces deux formes, des lotissements pavillonnaires se sont développés en marge des bourgs anciens ainsi que sur des replats plus isolés. Mais ces derniers se concentrent surtout en aval de ce que j’ai défini comme la porte d’entrée de la haute vallée.

MAS CARTE DE RÉPARTITION DU BÂTI

0

N

5 Km


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. Les mas n’ont plus tout à fait l’usage des fermes d’antan. La plupart ont été rachetés à des fins d’habitats secondaires ou par des néoruraux venus chercher un coin de paix dans un cadre plus «vert» que celui de la ville.

RUE ANCIENNE D’ARLES-SUR-TECH

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ER ÉE T I B A VALL H V I LA

PORTRAITS DE VILLAGES Les communes se sont développées depuis les berges du fleuve jusqu’aux versants. Les villages épousent les courbes du Tech et les dénivelés. Dans le Haut Vallespir, seule Amélie-les-Bains est construite sur les deux côtés du fleuve, les autres (Arles-sur-Tech, Le Tech, Prats-de-Molló et La Preste) sont seulement présents sur la rive nord. Les bourgs sont pris en étaux : le danger vient à la fois du creux de la vallée et des sommets. Le fleuve à caractère torrentiel se transforme rapidement en un courant large et puissant. Les sommets eux risquent de s’écrouler : les glissements de terrains sont possibles un peu partout avec en démonstration le site de l’Avellanosa. Toutes les communes sont intéressantes mais nous n’en verront que les principales car forts de leurs expériences de la montagne acquises au cours des siècles, ces villages se sont adaptés à leur environnement et à leurs besoins : en faisant leur portrait, chaque village révèle un caractère différent des autres avec ses propres spécialités. Les formes et les pratiques de ces lieux de vie contraints soulignent des relations au fleuve ou à l’eau plus ou moins particulières qui ouvrent des pistes de réflexion concernant l’aménagement de l’espace.


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LA PRESTE Commençons par le fond de vallée : à la fois fin et début, La Preste, station thermale isolée à l’extrémité de la route carrossable est accrochée aux rocs. C’est un lieu extraordinaire où les nuages se coincent, comme d’épaisses brumes entre les sapins et les rochers. C’est le seuil des chemins pour la source du Tech, un site parfait pour se «ressourcer». On apprécie les odeurs de bains qui se dégagent des fenêtres ouvertes. Un lieu isolé donc, mystique où la station est établie en hauteur du fleuve qui s’écoule comme un petit torrent serré. Les terrasses plantées d’arbres d’ornement ne sont pas vraiment accessibles, dommage car elles sont aussi très agréables à emprunter.


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PRATS-DE-MOLLÓ C’est dans un paysage plus ouvert que siège la «Capitale du Haut Vallespir». La citadelle Vauban qui surplombe le village offre un point de vue magnifique sur les reliefs du fond de vallée. Ce belvédère patrimonial facilite la lecture du paysage environnant.

Prats-de-Molló est un bourg fortifié où règne une curieuse et plaisante impression de bien vivre. Le village ancien est construit en hauteur par rapport au Tech, qui s’écoule assez bas au regard du niveau des hauts ponts qui le traverse. C’est grâce au pont que l’on accède à la route qui monte vers le Col d’Ares et vers la frontière espagnole. «Molló» signifierait «borne» en catalan, c’est le passage France/Espagne le plus facile de la vallée.


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SAINT-LAURENT-DE-CERDANS

Nous faisons un petit écart loin du fleuve, car ce village majeur s’est installé sur l’un des affluents principaux. À Saint-Laurent-de-Cerdans réside la dernière fabrication traditionnelle de tissage catalan et la confection des vigatanes (espadrilles portées par les danseurs). Mais ce n’est pas la seule chose que Saint-Laurent a su conserver de son passé : les terrasses plantées et jardinées (aussi appelés «horts perchés») sont des jardins familiaux qui entretiennent des ouvertures dans le paysage, même dans le centre bourg. Ces jardins utilisent aussi des canaux d’irrigation très utiles pour apporter l’eau jusqu’aux cultures. Cet assemblage urbain de jardins / bâtis s’intègre harmonieusement dans le paysage avec en fond, une grande visibilité sur les massifs.


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AMÉLIE-LES-BAINS

Plus qu’ailleurs, Amélie a un rapport à l’eau particulier. Effectivement, le Tech est à Amélie une sorte de jardin entre deux murs. Les berges sont entretenues comme des pelouses avec des arbres d’ornements. Les bâtiments installés sur un rehaussement solidement maçonné se bousculent sur les deux rives du fleuve. Un autre rapport assez strict à l’eau se présente : le Mondony (affluent) est calibré dans un lit bétonné qui serpente entre les hautes maisons. Plus en amont, il y a la station thermale d’Amélie anciennement appelée les Bains d’Arles. On découvre ici une façon spécifique de gérer les cours d’eau et leurs abords, les efforts réalisés sont impressionnants quand on voit le niveau très bas de l’eau en été.


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ARLES-SUR-TECH

Le fleuve s’élargit et en même temps se pince entre le versant raide sur la rive sud, et le village d’Arles sur sa rive nord. Arles-sur-Tech ne paraît pas éloigné du fleuve en hauteur contrairement à Prats, La Preste et Amélie. Des promenades le traverse d’ailleurs par des passages à gué qui donnent sur des espaces de loisirs isolés sur la rive sud. C’est là, la rencontre avec son affluent le Riuferrer (rivière de fer). Comme la plupart des bourgs, Arles s’est installé sur la confluence entre le Riuferrer et le Tech.

Et si la vallée renfermait des savoirs et des pratiques utiles pour Arles ? Nous l’avons vu, les pratiques des différents villages se répondent, certaines sont plus marquées que d’autres avec leurs avantages et inconvénients mais il apparaît judicieux de reprendre ces éléments de la vie locale pour les appliquer (ou ré-appliquer) à un site de projet.


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Toutes ces structures maçonnées (Riuferrer à Arles, Mondony à Amélie) paraissent surdimensionnées : ces aménagements raides dans le paysage interrogent, au vu des éléments précédents (risques, habitats, pratiques), comment en est-on arrivé là ? Pour répondre à cette question et comprendre les dynamiques du paysage il faut revenir dans le temps, étudier l’histoire de la nature et des Hommes pour saisir les éléments directeurs et accepter une évolution constante et par moment brutale des paysages.


03

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Les paysages sont des complexes en mouvement, en mutations constantes et ce par l’effet naturel des changements environnementaux ou (plus récemment dans l’histoire de la nature) par l’influence des Hommes qui habitent les territoires. Comme la nature, l’Homme change, il modifie ses pratiques, sa façon d’utiliser l’espace qui l’entoure, écrit et réécrit les compositions paysagères par son besoin essentiel de subsister. Dans cette partie, ce ne seront pas tous les moments de l’histoire du Haut Vallespir qui seront exposés mais ceux qui permettent la compréhension de l’état actuel de la vallée.

ÉVOLUTION DES PAYSAGES

Quatre temps forts marquent considérablement les paysages et forment les parties de ce chapitre :

1 FORMATION DU SOCLE

AVANT LE MOYEN-ÂGE

Début des thermes romains

SION

Colonies agricoles et abbayes

GÉOLOGIE

ÉRO

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NÉOLITHIQUE

PÂTURES


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Les Hommes qui vivent dans la vallée depuis le néolithique ont dû s’adapter aux changements, instinctivement innover pour vivre dans cet environnement hostile et géographiquement isolé qui offre aussi protection et ressources. Poser un regard sur les événements passés et les pratiques anciennes pourrait inspirer un projet plus contemporain.

2 DU MOYEN-ÂGE À 1940 Forges Catalanes Industrie du Fer

3

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AIGUAT 1940

ÉVOLUTIONS RÉCENTES

CRUE «AIGUAT» D’OCTOBRE 1940

FRONTIÈRE

MINES

FERMETURE


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1

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ÉVOLUTION DES PAYSAGES FORMATION DU SOCLE

Le socle explique en partie le phénomène torrentiel, la nature des roches et l’érosion sont les facteurs des aléas. Le socle est aussi une ressource : les couches ferrugineuses seront très appréciées mais déjà avant l’installation des premières grandes civilisations, le Vallespir est habité dès le néolithique comme le prouve le dolmen daté du IIIème millénaire avant J-C de la «Caixa de Rotllan» au dessus d’Arles-sur-Tech.

La plaque Ibérique poussée par rique e Ibé u q a la plaque Africaine rencontre la Pl plaque Eurasiatique :

Les plaques se soulèvent pour former la chaîne des Pyrénées. Elle révèle au droit du Canigó, une géologie métamorphique composée de schistes, gneiss et granites.

Les roches métamorphiques sont denses et imperméables. Les Pyrénées sont modelées par l’érosion glaciaire et gravitaire.

NÉOLITHIQUE

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51 Mélange de roches et de limons issus des froids quaternaires Restes d’anciennes érosions

Le socle métamorphique imperméable associé aux épisodes de pluies diluviennes agit comme un tapis roulant sur lequel les sols peuvent se déplacer et provoquer des glissements de terrain. Dans certains cas, les sols se retrouvent en travers d’un cours d’eau créant ainsi un barrage naturel qui peut céder.

ALÉAS RESSOURCES Dans les couches géologiques du Canigó, la présence de grandes quantités de fer ainsi que des filons d’argent vont changer le visage de la vallée dès le XIVème siècle. Le socle, aussi menaçant soit-il, devient une vraie valeur pour la société humaine. De plus, la grande présence de failles desquelles sortent des eaux chaudes sauront aussi attirer l’Homme.


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DISTRICT

ÉVOLUTION DES PAYSAGES DU MOYEN-ÂGE À 1940

Avant le Moyen-Âge, les romains venaient déjà dans la vallée pour y aménager les thermes : les Bains d’Arles à l’actuelle Amélie-les-Bains et La Preste. Pour cette dernière la création d’une route a permis à des moines cherchant des lieux isolés de construire des abbayes et y instaurer des colonies agricoles dans un environnement de paix propice à la prière. Comme la chaîne des Pyrénées est une barrière naturelle, la vallée deviendra lieu de frontière et donc, de conflits. Des tours à signaux seront construites et le fort Lagarde à Prats pour surveiller le passage du col d’Ares.

La notion de «district» est utilisée par Catherine Verna (professeur d’histoire médiévale à l’université Paris 8 Vincennes-Saint Denis) pour définir le territoire industriel autonome du Vallespir. Effectivement, dès le Moyen-Âge la vallée va exploiter toutes les ressources de la montagne et principalement se développer grâce à l’extraction du fer du Canigó et de sa transformation dans les forges (ce n’est plus de l’artisanat mais de l’industrie). Les villages vont se spécialiser dans la transformation du fer, le tissage et l’élevage. Ces complémentarités vont permettre aux habitants de se nourrir, de travailler et d’exporter. C’est l’Âge d’Or du Vallespir. On recense plus de 35 000 têtes de bétails rien qu’à Prats-de-Molló et Saint-Laurent-de-Cerdans possède sept forges.

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FORGE CATALANE Les forges catalanes sont l’exemple d’innovation dont est capable une société pour s’adapter à un territoire : utilisant la force de l’eau, les forges étaient installées proche du Tech ou des affluents, aidées par des canaux qui acheminaient l’eau de façon gravitaire. L’eau servait à refroidir le fer et à faire fonctionner le marteau. Avec l’arrivée des hauts fourneaux, la transformation du fer n’a plus besoin de se faire sur site et ces industries nouvelles sont gourmandes de grandes quantités de matériaux. Pour tenir ce pôle économique en déclin, il fallait accélérer la cadence : un transport aérien de 8 kilomètres partait d’Arles pour rejoindre la mine de Batère. Le métal arrivait au carreau de la mine puis était déplacé après transformation grâce à une petite ligne ferroviaire qui allait jusqu’à Saint-Laurent. Malgré ces efforts, l’économie du fer va s’arrêter, fortement affaiblit par l’Aiguat d’octobre 1940 qui emportera la voie de chemin de fer et de nombreuses entreprises.

Source : Site internet de la Fédération des Moulins de France http://www.fdmf.fr

Les paysages passent d’un état de formation naturelle de garrigues, de feuillus, et de landes à un paysage de montagne pelée par le surpâturage et le besoin de bois. Il y a 400 ans c’est donc un paysage pelé avec quelques cultures de châtaigners qui va dominer jusqu’en 1940. Les chênes verts étaient utilisés pour fabriquer du charbon de bois que dévoraient les forges. Mais avec le surpâturage des dizaines de milliers de bêtes, les versants étaient presque nus de végétations. Si jusque-là les évolutions du paysage apparaissaient se faire sur de très longs temps, on comprend qu’en moins de 80 ans (de 1940 à 2018) le paysage décrit dans les premiers chapitres ne ressemble pas à ce paysage pelé. Source : Site internet de la Communauté de Commune du Haut Vallespir : https://www.sudcanigo.com/item/coll-den-gros/


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ÉVOLUTION DES PAYSAGES DU MOYEN ÂGE À 1940 À ARLES-SUR-TECH

Le cadastre napoléonien raconte assez précisément la manière dont on vivait la vallée au début du XIXème siècle : dans l’extrait ci-dessous zoomé sur Arles-sur-Tech, on voit l’emprise du bourg ancien relié et traversé de «rivières d’arrosage» et de canaux aménagés pour les moulins. Sur cette carte, le Riuferrer est libre et les routes qui le longent suivent ses méandres. L’époque du fer a profondément marqué l’identité catalane locale : encore aujourd’hui, Arles-sur-Tech accueille la biennale internationale de la ferronnerie d’art. Une oeuvre est réalisée lors de ces deux journées et est offerte à une commune du territoire. Cette preuve de solidarité est héritée de ce passé révolu. Mais en arrière-plan des cartes postales on peut apprécier un paysage pelé, où l’une des anciennes pratiques étaient encore utilisée sur les grandes surfaces de terrain : les terrasses.


BATÈRE VERS 1930

Source : http://www.guideduvallespir.com

Autre élément marquant des paysages après les canaux d’irrigation, les terrasses servaient à cultiver des vergers et des vignes. Ces aménagements servaient aussi un autre dessein : ils stabilisaient les versants et limitaient l’érosion. Elles étaient simplement faites d’un mur en pierres sèches qui retenait la terre pour offrir une inclinaison plus propice aux cultures. Ces terrasses ont aujourd’hui disparu sous la terre ou les racines des forêts bien que potentiellement intéressantes dans un projet d’aménagement de versants.

Source : http://www.guideduvallespir.com

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ARLES-SUR-TECH VERS 1930

ARLES-SUR-TECH 2017


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ÉVOLUTION DES PAYSAGES AIGUAT DE 1940

«Aïguat» signifie «grande eau» en catalan, ce terme correspond aux crues historiques qui ont parfois boulversé la vallée et tout le bassin versant. En 23 heures, du 17 octobre 8h au 18 à 7h, 840mm de précipitations à la station de Llau (détruite par l’aiguat) et 1000mm à Saint-Laurent-deCerdans sont tombés.

1920

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Si la vallée a connu des crues, elle n’aurait su s’attendre à celle de 1940 : 200 victimes dans les Pyrénées Orientales. Une pluie torrentielle amende le fleuve qui atteindra des niveaux historiques : l’aiguat de 1940 devient la crue de référence sur laquelle sera instaurée plus tard le Plan de Prévention des Risques. La moitié du Haut Vallepsir est arrachée par les flots. La plupart des industries localisées proche du fleuve seront emportées, la voie de chemin de fer qui atteignait à l’époque Prats-de-Molló sera aussi détruite et des wagons entiers seront retrouvés en aval dans la plaine. C’est un coup non pas dur mais fatal : les entreprises sont rasées, l’absence de chemin de fer limite brutalement les transferts de matériaux et matériels. De plus, l’État vient tout juste d’entrer dans la seconde guerre mondiale et tous les efforts de la nation sont donc tournés vers les combats. La coïncidence de tous ces facteurs (économie, transport, main d’oeuvre) vont faire que jamais, la vallée ne s’en remettra. Peu de temps après, les dernières mines fermeront.

Source : crues-archives-aliaga.e-monsite.com


1952 C’est en 1940 que l’Avellanosa s’écroule : les pluies gorgent le versant instable. Ce dernier s’écroule et forme un barrage sur le lit du Tech. L’embâcle : les mémoires des habitants parleront d’un mur de terre qui s’avance sur eux. La RTM (Restauration des Terrains de Montagnes) va lancer une grande campagne de reboisement de ces paysages pelés pour diminuer le risque de glissement de terrain. Associée à la perte des dynamiques d’élevage, à la concurrence économique de l’Espagne, c’est l’entière vallée qui va fermer ses paysages, et se renfermer sur elle-même, loin de son passé glorieux. Il y a environ un aiguat destructeur par siècle:

1763 terrible aiguat, 1842 aiguat de «Sant Bartomeu», 1907, 1932, 1940 «la crue de référence», 1942. Aiguats intermédiaires :

1224, 1330, 1421, 1428, 1553, 1714, 1732, 1740, 1772, 1777, 1821, 1828, 1832, 1875, 1920, 1961, 1965, 1968, 1970, 1977, 1986, 1987, 1989, 1992, 1997, 1999.

Source : Panneaux d’informations du SIGA Tech

Les aiguats les plus importants :

AVELLANOSA



03

. La photo aérienne ci-contre a été réalisée en 1942, soit après la crue de 1942 et celle de 1940. Le lit du Tech apparaît comme un muscle large et il ne correspond pas à l’image aérienne récente, pincé, fin, restreint. On voit aussi bien la canalisation du Riuferrer dont le méandre a été remblayé et est aujourd’hui un camping. 0

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3

ÉVOLUTION DES PAYSAGES AIGUAT DE 1940 À ARLES-SUR-TECH

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ÉVOLUTION DES PAYSAGES

FERMETURE DES PAYSAGES 1750

ÉVOLUTIONS RÉCENTES

1975

2010 Source : CAUE Pyrénées Orientales

Si autrefois le massif était largement défriché et mis en cultures, la RTM (Restauration des Terrains de Montagnes) a favorisé la plantation et le développement des forêts pour lutter contre l’érosion. Cette politique menée par la RTM (ancien service Eaux et Forêts) a été conduite de 1944 à 1962. Elle débute donc juste après les crues torrentielles de 1940 et 1942. Sur le Haut Vallespir, la RTM va reboiser 10 000ha et créera ainsi la Réserve Naturelle de Prats-de-Molló.


61

ÉTALEMENT DU BÂTI

Source : Midilibre.fr en 2013

UN RISQUE CONTINU

L’abandon des terrasses, l’étalement urbain par la division des ménages, en seulement quelques dizaines d’années, la vallée change de visage. Elle oublie aussi certains usages et développe des conflits notamment sur la ressource en eau et la gestion des canaux d’irrigation. En perte de vitesse, la vallée pourrait se voir proposer un nouvel avenir, sans avoir la volonté nostalgique de retrouver un passé révolu mais bien de s’en inspirer.

Lui ne s’est pas épuisé. Le risque torrentiel est toujours présent malgré les efforts qui ont contribué à changer fondamentalement la vallée de visage. Les canalisations, les plantations, autant d’aménagements qui n’assurent pas le risque zéro. Requestionner avec les acteurs locaux cette notion de risque au regard des évolutions récentes (étalement urbain, fermeture des paysages) c’est initier un processus différent de ceux appliqués jusque-là.


62

04

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Niv. Europe + Niv. Pays

VERS UN TERRITOIRE DURABLE

LES ACTEURS

Niv. Région Niv. Département

CAUE

Je veux inscrire à la fois mon travail dans les orientations et dans les démarches actuelles locales pour accrocher à l’existant mes propositions, à la fois dans une démarche créative et inventive qui montre une possibilité de faire les projets autrement. CLÉS DE LECTURE Le schéma présente les acteurs de la vallée du Tech selon leur degré de proximité au territoire sur un axe vertical. L’axe horizontal montre plus globalement les influences des acteurs sur des proportions surfaciques. Le trait de coupe est théorique, il ne représente pas une réalité topographique. SCHÉMA 1 Le premier schéma fait état de la situation actuelle. Les acteurs les LÉGENDE : plus au bas sont les plus directement liés au socle de la vallée. Les acteurs les plus dynamiques liés à ma problèmatique sont le SIGA Tech, les forestiers, le Pays d’Art et d’Histoire, le PPM (Pays Pyrénées Méditerranée) et les communes. La Communauté de Commune du Haut Vallespir n’est pas une entité intéressante dans notre cadre d’étude car elle ne présente pas de compétences liées aux paysages bien qu’elle montre un effort de solidarité et d’organisation à l’échelle de la haute vallée. Mais on pourrait envisager qu’elle développe des compétences secondaires ayant un rôle dans la gestion des espaces (jardins familiaux par exemple). Bien que plus détachés du site, le PPM, le CAUE et la DDTM66 montrent un intérêt certain pour la vallée à travers des études qu’ils ont mené dans les domaines qui leur sont propres.

Canigo Grand Site de France

Échanges / Études collaboratives Échanges d’expériences transfrontaliers Espaces d’influence directe des acteurs Zone d’influence au-delà du territoire de la vallée Fin de zone d’influence de l’acteur

Agriculteurs / éleveurs


1

UNESCO Agence de l’eau Rhône Méditerranée et Corse

+ GÉNÉRALISTES

SCHÉMA D’ACTEURS

Territoires des acteurs de la vallée

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Ministère

DREAL Occitanie DDTM66 PPM Pays Pyrénées Méditerranée

SIGA Tech

Synd. Interco. Gestion et Aménagement du Tech Pays d’Art et d’Histoire Transfrontalier de la vallée du Tech et du Ter Communauté Commune Haut Vallespir

«Sud Canigó»

Forestiers Publics/Privés Camprondon ESPAGNE

Commune

d’Arles-sur-Tech

ONF AFM

Habitants, associations et professionnels locaux Campings, pêcheurs, Canaux, horts,...

+ LOCAUX

ASCGSC


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VERS UN TERRITOIRE DURABLE

LES ACTEURS

Niv. Europe Niv. Pays Niv. Région Niv. Département

Le PPM (Pays Pyrénées Méditerranée) est perçu comme un levier d’action. Il cherche des sponsors et des fonds financiers pour soutenir des projets locaux qui l’intéresse dans des objectifs promotionnels du territoire. Il soutient aussi les dossiers comme celui qui sera déposé prochainement à l’état sur l’inscription des fêtes de l’ours au patrimoine immatériel de l’UNESCO. Ce dossier est animé par le Pays d’Art et d’Histoire qui s’avère être une ressource importante et très active tant dans l’histoire passée de la vallée que dans son avenir (d’un point de vue du patrimoine). Arles montre des échanges intéressants avec les autres acteurs : contacts constants avec le Pays d’Art et d’Histoire pour des expositions par exemple. Elle est en lien avec le SIGA Tech sur les questions d’entretien et d’aménagement du Tech, mais aussi de projets et d’expérimentations. Par la situation topographique des bâtiments, la commune est géographiquement à la croisée des problématiques liées aux hommes et à la nature (le Tech). Le jeu d’acteur va plus loin puisque pour la plupart des communes, les acteurs politiques se retrouvent dans les comités syndicaux des acteurs plus techniques (SIGA Tech, Canigó Grand Site, Pays d’Art et d’Histoire,...). C’est le cas de René Bantoure par exemple, il est maire d’Arles-sur-Tech, Président de la Communauté de Commune, membre du comité syndical du SIGA Tech et du Canigo Grand Site.

CAUE

Canigo Grand Site de France

Agriculteurs / éleveurs

LÉGENDE : Échanges / Études collaboratives Échanges d’expériences transfrontaliers Espaces d’influence directe des acteurs Zone d’influence au-delà du territoire de la vallée Fin de zone d’influence de l’acteur Recherche de ressources et leviers d’actions


2

UNESCO

Agence de l’eau Rhône Méditerranée et Corse

+ GÉNÉRALISTE

SCHÉMA D’ACTEURS

Position du paysagiste et projection idéale des acteurs

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Ministère

DREAL Occitanie DDTM66 PPM Pays Pyrénées Méditerranée

SIGA Tech

Synd. Interco. Gestion et Aménagement du Tech Pays d’Art et d’Histoire Transfrontalier de la vallée du Tech et du Ter Communauté Commune Haut Vallespir

«Sud Canigo»

PAYSAGISTE

Commune

d’Arles-sur-Tech

Forestiers Publics/Privés Camprondon ESPAGNE

ONF AFM

Habitants, associations et professionnels locaux Campings, pêcheurs, Canaux, horts,...

+ PONCTUEL

ASCGSC


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VERS UN TERRITOIRE DURABLE

LES ACTEURS

LE CAS ISOLÉ DES AGRICULTEURS : un point d’honneur est mis par les communes sur les lieux touristiques et la valorisation des savoirs traditionnels oubliés (tissu catalan, ferronerie). Ce n’est pas le cas de l’agriculture qui, après avoir connue un fort déclin menant à la fermeture des paysages de la quasi totalité de la vallée, n’est plus organisée à l’échelle de la Communauté de Commune. Il n’existe pas de projet commun autour de la question de l’ouverture paysagère et de la valorisation des produits locaux issus du travail de la terre et des bêtes du Haut Vallespir. Cet acteur très important dans la formation des paysages de la vallée a un rôle économique et esthétique (jardinier des montagnes). Ce n’est donc pas un acteur à négliger car il peut servir un double objectif. SCHÉMA 2 Le second schéma est le projet du paysagiste au sein de la vallée. Ce projet a pour objectif de fédérer trois acteurs locaux autour d’un projet commun. Ces acteurs sont : le SIGA Tech, qui apporte au terrain son expertise fluviale et les dynamiques naturelles dans un esprit à la fois technique et écologique. La commune d’Arles pour le site de projet. Elle représente les besoins et les forces habitantes. Dans ce cas, une interaction avec les habitants viendra valider la volonté politique. Enfin, les agriculteurs qui sont peu nombreux dans la vallée peuvent tout de même jouer un rôle dans l’autonomie économique et alimentaire. Les entités ressources seront : le Pays d’Art et d’Histoire qui développe de nombreux projets à la rencontre entre patrimoine et histoire, ainsi que le PPM qui propose de nombreux documents et possibilités d’évolutions territoriales en plus d’être un levier économique. La haute vallée se sent délaissée par les pouvoirs publics : elle n’a ni littoral, ni station d’hiver qui pourraient être touristiquement attractifs comme dans les vallées voisines. Elle ne fait pas partie d’aucun SCOT (Schéma de Cohésion Territorial). Arles-sur-Tech possède un PLU (Plan Local d’Urbanisme) auquel peut se raccrocher le projet : les quartiers à densifier sont identifiés ainsi que les connexions. Des subventions permettent d’agir localement à Arles-sur-Tech : l’OPAH (Opération Programmée d’Amélioration de l’Habitat) réhabilite le centre bourg tandis que le POCTEFA (Programme Interreg V-A Espagne-France-Andorre) envisage la rénovation et la mise en valeur des sites industriels sur les bords du Tech. Le projet prendra en compte ces éléments non pas seulement pour ne proposer que des nouvelles interventions mais aussi pour valoriser les efforts existants, s’en emparer pour les associer et ainsi, basculer du projet idéal à un projet réaliste.


La communauté de Commune du Haut Vallespir (nom administratif) s’est nommée «Sud Canigó» en référence à leur appartenance territoriale au Canigó Grand Site de France, dans une volonté de promouvoir les qualités environnementales liées à ce label, mais elle ne s’occupe pas des problèmatiques paysagères : compétences des déchets, écoles, piste cyclable,... et une nouvelle compétence liée au tourisme : les gorges de la Fou. Le travail s’investit donc à l’échelle d’Arles pour devenir un exemple à suivre pour les autres. À ce niveau d’étude, les besoins de la commune sont considérés comme les besoins exprimés par les habitants et les acteurs ponctuels du paysage. Ainsi, travailler avec la commune revient à servir les intérêts locaux qui sont très bien représentés au sein de celle-ci.


04

.

VERS UN TERRITOIRE DURABLE

POTENTIALITÉS À l’échelle de la vallée, les enjeux explorés par mes recherches touchent plusieurs domaines de compétences. Le fils conducteur du risque peut aborder indirectement plusieurs thématiques comme celle de l’agriculture et de la forêt. Dans cette approche, révéler la vallée par une vraie politique d’ouverture pourrait aider l’économie et renforcer la vie locale dans des pratiques naissantes ou retrouvées en harmonie avec ce cadre de moyenne montagne. Ces pistes nous montrent que des secteurs ont des potentiels forts et d’autres vivent des contraintes encore plus intenses.

CARTE DES POTENTIALITÉS ET ENJEUX DU TERRITOIRE

Limiter l’étalement urbain Risques

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Développer les ouvertures Entretenir le fond de vallée Entretenir les crêtes des estives Maintenir les ouvertures par le pâturage


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INTENTIONS DE PROJET

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J’ai longtemps été convaincu que le projet se dessinerait en petites interventions ponctuelles et précises, localisées tout au long de la vallée (en suivant le cours de l’eau). Or, Arles-sur-Tech s’est révélé comme un lieu d’articulation entre les problématiques contemporaines de la vallée et ma ligne directrice du risque torrentiel. C’est pour cette raison qu’Arles est illustré à chaque thématique abordée dans ce mémoire. Penser une nouvelle ruralité à Arlessur-Tech, c’est interroger ses futures vocations en fondant un projet à partir d’une contrainte forte : celle du risque torrentiel. Ainsi, les intentions de projet visent un double objectif, celui de conforter la vie locale dans son contexte et celui de reconquérir la notion de résilience face aux risques.

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0

ARLES-SUR-TECH, LA RENCONTRE DES ENJEUX DE DEUX TERRITOIRES Si la commune n’est pas culturellement un lieu de basculement, au regard des données (physiques, scientifiques, économiques et sociales), Arles-sur-Tech est une vraie rencontre entre les enjeux de la basse vallée (inondations, étalements urbains) et de la haute vallée (torrent, fermeture des paysages). Ceci conforte mes premières impressions, quand le Riuferrer m’interrogeait déjà sur le risque et que le passage dans la haute vallée du Tech se révélait à moi un peu en aval du bourg ancien.

RÉSOUDRE UNE SOLUTION DE CONTINUITÉ RÉVÉLATRICE : L’EXEMPLE DE LA VOIE VERTE La voie verte (piste cyclable empruntant des itinéraires touristiques) se finit à Arles-surTech. Elle s’arrête à 600 mètres du bourg ancien d’Arles, au niveau de ce que j’ai défini comme la porte d’entrée de la haute vallée. Vrai effort de mise en réseaux touristique entre mer et montagne, il faudra emprunter la route pour rejoindre la Arles authentique et poursuivre dans le Haut Vallespir. Cet aménagement illustre une volonté de connecter et faire vivre le territoire part les circulations douces. Le projet s’inscrit dans cette continuité d’usage tout en mettant en scène la porte d’entrée de la haute vallée.

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RELÂCHER UNE TENSION ENTRE ARLES ET SES TORRENTS ? Comme les autres bourgs de la vallée, Arles-sur-Tech s’est construite à proximité, voir sur la confluence d’un affluent et du fleuve : avec les aménagements post-1940 et la topographie induite à cette localité, deux éléments sont particulièrement notables. D’abord le fleuve qui n’utilise plus du tout le méandrage qui l’a façonné pendant des millénaires contraint au sud par le versant raide et au nord par le village. En second, le Riuferrer qui est pincé dans un couloir maçonné et dont le lit mineur est fortement réduit. Le projet propose de laisser place à l’eau, par une reconstruction spatiale ciblée sur les rives, qui finalement touchent l’ensemble du territoire conduisant à reconsidérer les versants.


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COMPOSITION ET POTENTIELS ①

② ③ ④

Source : google.earth + PPR communal

La rencontre entre le Riuferrer et le Tech est aménagée de deux passages à gué en béton. Le chemin relie l’extrémité sud-ouest de la rue Carrer del Barri d’Amunt (existante au moins depuis Napoléon) à la rive sud où l’on retrouve un espace de pique-nique. En remontant le Riuferrer, se sont les murs de soutènement massifs qui dictent la conduite du mince filet d’eau. En descendant le fleuve, des entrepôts, délaissés, prairies et bâtiments industriels anciens, rythment une promenade discontinue, presque impossible si l’on souhaite rester proche de l’eau.


Zones à risque fort (tous aléas confondus d’après le Plan de Prévention des Risques). Zones à risque faible (tous aléas confondus d’après le Plan de Prévention des Risques).

Suite à l’aménagement du Riuferrer canalisé, un remblai important a été fait sur l’ancien méandre de l’affluent. Un camping ① s’y est installé pour accueillir en période estivale les touristes, il empreinte son nom à celui du cours d’eau lui-même. L’étalement urbain se développe lentement sur les versants de plus en plus pentus. ② Ce quartier récent doit faire l’objet d’une densification selon le PLU. À l’inverse, le centre ville ③ se vide mais des efforts pourront faire la différence : de nouveaux commerces se sont installés (chocolaterie et boucherie comme autrefois) et la rénovation complète de son espace public (revêtements) souligne une qualité de vie dans le centre bourg. Mais les maisons sont anciennes et doivent êtres rénovées. Ainsi desservie par le bus à 1€, on imagine facilement vivre sur cette petite placette au coeur du village. Deux vestiges patrimoniaux et symboles d’un passé glorieux révolu persistent le long du Tech : l’ancienne usine à tisser, aujourd’hui rénovée en ateliers d’artistes, et le carreau de la mine en ruine qui fait l’objet d’une réflexion pour reconvertir le site (utilisé notamment aux journées internationales de la ferronnerie d’art et pour quelques concerts).

05

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.

INTENTIONS DE PROJET

La partie historique a démontré que les enjeux du grand paysage (ouverture visuelle grâce aux pratiques agricoles, étalement urbain, entretien d’un fleuve corridor) se retrouvent à l’échelle zoomée à Arles-sur-Tech. Faire du projet au droit de cette commune, c’est aussi répondre de façon localisée aux enjeux d’un ensemble plus grand.

L’intérêt porté au bourg ancien et ses quartiers attenants a pour objectif de recentrer la vie sur le coeur du village : les lotissements qui se sont étalés en amont et en aval du fleuve ne sont pas l’objet du projet mais renforcent indirectement (en parallèle des orientations des politiques publiques visant à stopper l’étalement urbain) le besoin de conforter la ruralité dans l’existant et non sur les terrains périphériques et éloignés d’un coeur de vie.


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UTOPIE FONDATRICE

Source : google.earth + PPR communal


Vivre avec le risque En rendant au fleuve et son affluent méandres et espaces de liberté, on réduit durablement la vulnérabilité des habitants. De plus en adaptant les pratiques de ces nouveaux espaces convertis, on élargit le champs des possibles en termes d’activités dans le lit majeur du Tech. Les pistes envisagées sont : HORTS (jardins familiaux) AGRICULTURE/élevage Ripisylve Promenade et patrimonialisation Habiter les versants Avec la division des ménages et les modes d’habiter contemporains, difficile de valoriser le centre-ville dépris d’habitants qui préfèrent construire dans de nouveaux lotissements au péril des pratiques anciennes et de la qualité des paysages qu’offrent ces bourgs de montagne. Au regard du PLU notamment, il est possible d’enrayer ce phénomène d’extension urbaine en densifiant un quartier qui a commencé à s’ancrer dans une partie plus raide du versant nord. Cette densification peut se faire avec tout le savoir local (canaux d’irrigation, horts,...) et des techniques écologiques et esthétiques qui permettront de développer un quartier non pas déconnecté du bourg ancien mais bien dans son prolongement, comme une annexe qui pourra réinvestir ce flan de montagne autrefois cultivé en terrasses jardinées.

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.

INTENTIONS DE PROJET Avant de développer un projet pragmatique, je souhaite imaginer ce village d’Arles sur les bases théoriques d’une évolution positive. On sait que le déclin démographique menace l’authenticité de la vie locale ainsi que certains modes d’habiter (résidences secondaires par exemple). On sait aussi que de nouvelles façons d’habiter émergent comme le télétravail (grâce au développement numérique). Ainsi, en montrant une solidarité sociale forte et en proposant un accueil adapté, on peut envisager une stabilisation de cette fuite des ménages, voir une inversion de la tendance. Il y a vivre ensemble mais aussi vivre dans un contexte particulièrement contraint : les arlésiens pourraient réinventer le village à l’image des anciennes et nouvelles pratiques en harmonie retrouvée entre l’Homme et la Nature. Je propose donc, au regard du changement climatique et du risque torrentiel, ainsi que des ressources disponibles d’innover en terme d’urbanité montagnarde sur la base d’un recul stratégique, pour rendre à la contrainte ce qu’elle risque de reprendre par la force et d’en faire un renouveau dans la vallée du Tech.


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05

.

DU PROJET IDÉALISÉ AUX RÉALITÉS IN SITU Afin d’approcher au plus près ces envies de projet, ce dernier devra être développé dans le temps avec un phasage pour le rendre réalisable. Commencer par le lit majeur : le premier espace déclencheur du projet est celui du risque lié au caractère torrentiel. Je propose de repenser toutes les interfaces eau / village pour servir l’intérêt commun d’abord par la réduction de la vulnérabilité puis par la conversion de ces espaces à des fins diverses au profit des pratiques quotidiennes. Un intérêt particulier sera porté au Riuferrer au regard de son ancien cours (avant rectification). Afin de contrôler le risque d’inondation de ce dernier, le reméandrage de son lit pourra permettre de maîtriser son débordement sur la rive ouest et ainsi éviter que l’eau n’entre vers le centre-bourg côté Est.

Le recul stratégique des habitations se fera dans un temps long : avec la dévalorisation des biens immobiliers présents dans ces zones à risque, une valorisation du centre-bourg peutêtre possible. Associée à cela, tout en répondant à des modes d’habiter contemporains, la densification du quartier Nord est envisagée avec dans son prolongement, la réouverture des anciennes terrasses. Ce quartier deviendra une annexe harmonieuse à un bourg authentique comme quartier d’innovation de l’habitat de montagne.

Le phasage de projet sera développé pour consolider ce dernier dans sa faisabilité lors du jury de projet (deuxième temps du TFE).

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Projets associés au lit majeur du Riuferrer

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LE RÔLE D’ARLES-SUR-TECH POUR LA HAUTE VALLÉE

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De l’expérimentation à l’exemple...

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Exemple à l’échelle locale Exemple pour les situations similaires dans les Pyrénées (françaises et espagnoles) et autres régions montagneuses

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Si on revient à l’échelle du diagnostic, essayer de solutionner Arles-sur-Tech n’est plus seulement une question locale précise mais un vrai potentiel d’exemplarité régionale. L’objectif de ce travail est de proposer à ce territoire une piste possible pour se réinventer . Proposer un projet à Arles vient illustrer les possibles d’un territoire à moyenne et grande échelle. Le fait de prendre en compte les atouts paysagers des différents villages de la haute vallée, de les associer, les conforter et leur permettre de s’exprimer (canaux à Saint-Laurent-de-Cerdans par exemple) dépasse le simple fait esthétique du paysage et propose d’investir, d’habiter la montagne, et donne l’opportunité à ses habitants de s’impliquer dans une ruralité confortée.


80

06

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CONCLUSION

Le risque torrentiel au coeur d’un projet de paysage peut largement contribuer à susciter une réinvention d’une ruralité fragile. C’est ce que j’ai souhaité montrer à travers ce travail de fin d’étude. Il en résulte une transversalité disciplinaire et bien que je ne soit ni sociologue, ni écologue, la croisée des informations disponibles permet dans cette projection globale du territoire de répondre à de multiples enjeux : proposer une alternative à la vulnérabilité face au risque tout en répondant aux changements vécus par ce territoire (aggravation des risques, ruralité en perte de vitesse). La compréhension de l’actualité va de paire avec la prise en compte des pratiques anciennes au regard d’une volonté d’imaginer le Haut Vallespir de demain. Arles-sur-Tech apparaît comme un sujet non pas seulement d’expérimentation mais aussi d’exemple. Réinventer la vie d’Arles au profit d’une urbanisation maîtrisée et assumée, d’un rapport équilibré avec son environnement, de pratiques montagnardes retrouvées et innovantes permet de proposer une alternative durable à ce territoire.


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Le schéma d’introduction de ce mémoire continue de se confirmer.

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BIBLIOGRAPHIE OUVRAGES AGNÈS FERNANDEZ ALAIN MARGUERIT. La montagne en projets. Grands territoires. Éditions parenthèses. 2013. ÉRIC RAIMBAULT ET CHRISTEL CAILLIS. Fa Temps autrefois, Amélie-les-Bains Palalda-Montalba. DL 2014. GASTON BACHELARD, L’Eau et les Rêves. Biblio essais, Le Livre de Poche,1993. LES CARNETS DU PAYSAGE. La Montagne n°22. Acte Sud et l’École Nationale Supérieure de Paysage. Avril 2012.

PUBLICATIONS ET REVUES RIBAS PALOM ANNA. Les inondations historiques dans le bassin du Ter (Catalogne). Histoire, patrimoine et développement territorial. In Sud-Ouest européen, tome 25, 2008. pp. 65-75 PAUL ALLARD, SABINE GIRARD, CHRISTINE LABEUR, ANNE RIVIÈRE-HONEGGER. « Fleuves et territoires » La Drôme, un exemple des liens multiples entre cours d’eau et territoire et de leur évolution du début du XIXe siècle à aujourd’hui, Colloque à Mâcon les 13 et 14 septembre 2012

FILM Échappées Belles. Week-end à Collioure. France 5. https://www.france.tv/france-5/echappees-belles/37997-week-end-a-collioure.html

RADIO PODCAST sur FranceCulture - Métallurgie médiévale : entretien avec Catherine Verna : 17 novembre 2017 https://www.franceculture.fr/emissions/la-fabrique-de-lhistoire/actualite-en-histoire


83

SITES INTERNET ACTEURS & RESSOURCES SIGA du Tech, http://www.eau-tech-alberes.fr/ DREAL, http://www.occitanie.developpement-durable.gouv.fr/ PPM, http://www.pyreneesmediterranee.com/ CAUE, http://www.caue-lr.fr/caue-des-pyrenees-orientales Services de l’État, www.pyrenees-orientales.gouv.fr Pays d’Art et d’Histoire du Tech et du Ter, http://www.valleescatalanes.org/fr/les-vallees-catalanes Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse, https://www.eaurmc.fr/ ATLAS DES PAYSAGES http://paysages.languedoc-roussillon.developpement-durable.gouv.fr/pyrenees-orientales/Default1.html ASSOCIATIONS ET ACTUALITÉS http://www.ville-arles-sur-tech.fr http://vallespirterresvivantes.blogspot.fr/ http://www.lindependant.fr/ DOCUMENTS D’URBANISME http://www.ville-arles-sur-tech.fr/ FONDS DE PLAN https://www.geoportail.gouv.fr/ http://infoterre.brgm.fr/viewer/MainTileForward.do https://www.google.fr/intl/fr/earth/ données IGN diverses BASE DES DONNÉES HYDROLIQUES http://www.hydro.eaufrance.fr/selection.php BASE DES DONNÉES DÉMOGRAPHIQUES https://www.insee.fr/fr/accueil


Méandres du Tech à L’Avellanosa


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REMERCIEMENTS Je tiens à remercier mes deux professeurs encadrants, Catherine FARELLE et Vincent THIESSON pour l’intérêt qu’ils ont porté à mon travail, pour leurs implications et leurs aides dans mes recherches et mes questionnements. Leur temps et leur soutien ont permis d’écrire ce mémoire, depuis l’analyse jusqu’à la formulation du projet. Je remercie les acteurs qui ont pris le temps de me rencontrer, Marine Cressy paysagiste au CAUE des Pyrénées Orientales, Aurélia Greiveldinger directrice du Pays d’Art et d’Histoire Transfrontalier, Magali Marimon et Aurélien Chabannon du SIGA Tech, René Bantoure maire d’Arles-sur-Tech et président de la Communauté de Commune du Haut Vallespir et Flora Brousse du bureau d’urbanisme d’Arles-sur-Tech. Je remercie les nombreuses personnes que j’ai rencontré sur ce territoire formidable du Haut Vallespir que ce soit par des entrevues organisées ou des rencontres inopinées (je pense tout particulièrement à Joëlle Landais et un architecte de passage né à Prats-de-Molló).



ARLES-SUR-TECH, ÉTÉ 2017


La vie locale de moyenne montagne est destabilisée : métropolisation et risques naturels contraignent la ruralité de ces territoires reculés. Dans ce contexte je me suis demandé comment conforter ce mode de vie en utilisant le risque torrentiel comme support de réflexion et de projection pour la vallée. Ce mémoire de TFE retrace mon travail sur la vallée du Tech fortement soumise au risque torrentiel, notament dans la haute vallée aussi nommée Haut Vallespir. Ce territoire est idéal : du socle pyrénéen au climat méditéranéen, les enjeux sont forts (risques naturels, changement climatique, étalement urbain, fermeture des paysages, déclin démographique, frontière...). Au fur et à mesure des mes recherches, Arles-sur-Tech s’est révélé comme un site exemplaire pour proposer en finalité de ce mémoire, des intentions de projet de paysage basées sur le risque comme atout : réinventer Arles-sur-Tech pour ancrer la ruralité de moyenne montagne au regard de son régime torrentiel et en réponse aux grandes problématiques contemporaines.

Mémoire de Fin d’étude / 2018 / Loïc ROSIN

Arles-sur-Tech vu depuis des pâturages vers le Massif du Canigou

RÉSUMÉ


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