Lisa Louison . Mémoire de Recherche

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mixité sociale & écoquartier une réalité tout en nuances




INTRODUCTION

SOMMAIRE

7-8

PREMIERE PARTIE : La mixité sociale 1.

Histoire de la ville / Chronologie

9-14

2.

Familles des modes d’habiter

15-16

3.

Définition du lien social

16-17

4.

Mixité sociale et controverse

5.

Proximité spatiale, Mixité sociale

21-22

6.

L’architecture participative de Lucien Kroll

22-27

18-20

DEUXIEME PARTIE : Les écoquartiers. 1.

Ecologie et développement durable

2.

Les débuts de l'écologie sous forme de militantisme 30-33

3.

L'institutionnalisation des Écoquartiers en France

33-37

4.

Les ratés du 1er écoquartier français

37-40

5.

Les innovations techniques des écoquartiers

41-45

29-30

TROISIEME PARTIE : Le terrain d'enquête.

4

1.

La virtuosité des habitants

47-48

2.

Le quartier de Clichy-Batignolles

49-52

3.

Concertations et ateliers

52-57


4.

Clichy-Batignolles, vitrine de la COP21

57-61

5.

Ce qui est recherché à travers l'enquête

61-63

6.

Préparation des entretiens

63-65

QUATRIEME PARTIE : L'enquête 1.

Une installation fortuite

67-74

2.

Une participation aux concertations toute relative

75-82

3.

Des espaces partagés inexistants ou délaissés

82-87

4.

Le détournement des innovations

88-103

CONCLUSION

104-105

ANNEXES 1. Fiche de lecture du livre Fabrication et usage des écoquartiers. Essai critique sur la généralisation de l'aménagement durable en France,Vincent Renauld

106-114

2.

Entretien avec Mlle Scarponi

115-120

3.

Entretien avec Mlle Marzof

121-126

4.

Entretien avec M Yuan

127-130

5.

Entretien avec Mme Durane

131-133

BIBLIOGRAPHIE

134-141

5


Photographie personnelle de la maquette du projet Clichy-Batignolles

6


INTRODUCTION Il existe au sein des écoquartiers une mixité sociale et une diversité d’usages. On peut dire d'un quartier qu'il est durable dès lors qu’est établit un lien social durable entre les habitants. Les concertations et l’implication des habitants dans le projet de la ZAC favorisent à priori la mixité sociale. En revanche les innovations techniques des écoquartiers ne sont pas vécues de la même façon par tous les habitants et peuvent présenter une forme de ségrégation. Nous verrons que les habitants font parfois preuve de « virtuosité »1 face à des situations qu'ils ne maitrisent pas. Tout au long de l'enquête, il s'agira de se demander si oui ou non le quartier durable joue un rôle dans la mixité sociale et de comprendre si les innovations techniques mises en place dans les logements sont à la portée de tous. Nous savons que des problèmes d'usage ont été observés dans l'écoquartier Caserne de Bonne à Grenoble. Cet écoquartier fait figure de pionnier en France et son aspect expérimental permet d'expliquer certains dysfonctionnement. Qu'en est-il des écoquartiers qui voit le jour actuellement, plus de dix ans après le lancement du premier écoquartier français ? Pour comprendre cela, cette recherche a été menée en deux temps. Dans un premier temps, il s'agit de redéfinir de façon générale mixité sociale et quartier durable. Concernant la « mixité sociale » il m'a paru nécessaire de faire un point historique concernant les politiques de la ville ainsi qu' une restitution de travaux en science sociale qui révèlent aussi le paradoxe de ce terme. Le concept même de la « mixité sociale » est flou et nécessite de définir une échelle pour en saisir le contenu. Nous verrons cependant que certains architectes ont déjà expérimenté le faire-ensemble capable de créer du lien social entre les habitants. Nous verrons aussi, comment ces dernières années, les écoquartiers ont 1 Fabrication et usage des écoquartiers. Essai critique sur la généralisation de l’aménagement durable en France, Vincent Renauld, édition PPUR, 2014

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pris une place importante dans la fabrique de la ville de demain. Issus de projets militants à la base, ces projets ce sont généralisés et remportent aujourd'hui l'adhésion des institutions. Ces projets sont nécessaire dans un monde où quatre cinquièmes de la population européenne vit en milieu urbain et suburbain. Mais pour que ces quartiers soient réellement durables, il faut veiller à ce que l'aspect social ne soit pas négligé. Dans un deuxième temps, cette recherche s'est tournée vers une méthode d'enquête au sein d'un écoquartier se trouvant dans le 17e arrondissement de Paris. Cet écoquartier est particulièrement intéressant parce qu'il est à la fois ambitieux et impliqué dans la méthode des concertations auprès des habitants. Cette enquête s'attache à comprendre l'arrivée d'habitants en logement social dans un écoquartier encore en construction. Ces habitants sont en quelque sorte « parachutés » dans un milieu dont, la plupart du temps, ils ignorent tout. Le but ici est de décrypter la façon dont ils s’intègrent au quartier et l'usage qu'ils font des innovations techniques écologiques. Pour cela, j'ai eu recours à la méthode des entretiens individuels semi-directifs et, lorsque c'était possible, à la visite commentée du logement par l'habitant. Les entretiens ont été menés dans trois immeubles de la Zone Est du quartier Clichy Batignolles, et plus précisément dans la ZAC Cardinet-Chalabre, auprès d'habitants « parachutés » dans le quartier. Ces trois immeubles présentaient des situations d’accession au logement différentes : le pourcentage patronal, une demande à la mairie pour un logement social et le cas de l'obtention d'un logement CROUS.

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PREMIERE PARTIE : la mixité sociale 1. histoire de la ville / chronologie En quarante ans, la politique de la ville s'est institutionnalisée. Ce sont les collectivités territoriales, des associations, des entreprises et d'autres organismes publics qui participent à la politique de la ville, chacun à leur échelle. Au niveau national, il existe un ministère de la politique de la ville depuis 1990. Les interventions dans les quartiers prioritaires ont pour objectif principal de lutter contre les situations d’urgence sociale et d’exclusion et de favoriser l’insertion professionnelle, sociale et culturelle des populations habitant des quartiers défavorisés. Voici une chronologie non exhaustive de la politique de la ville depuis 1977 et jusqu'à aujourd'hui. En 1977, le premier plan banlieue « habitant et vie sociale » est mis en place sous Valéry Giscard d'Estaing. Dans une lettre adressée aux préfets en 1977, Raymond Barre (alors premier ministre) affirme le besoin d'« enrayer la dégradation physique et sociale » des grands ensembles. Il craint qu'ils ne deviennent des « ghettos ». C'est le début de la politique de la ville. En 1981 de violentes émeutes éclatent dans le département du Rhône, d’abord aux Minguettes, à Vénissieux, puis à Villeurbanne et à Vaulx-en-Velin. Les incidents durent jusqu’au mois de septembre. Ces événements connaissent la première couverture médiatique de grande ampleur. C’est après les émeutes des Minguettes que des actions non-violentes ont émergé. En Octobre 1981, les articles 22 à 28 de la loi de 1901, qui interdisaient aux étrangers de créer des associations, sont abrogés. 9


Les «marcheurs pour l’égalite et contre le racisme» arrivent devant l’Assemblée Nationale le 2 décembre 1984 à Paris [Dominique Faget / AFP/Archives

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Puis, en Décembre, le gouvernement instaure une Commission Nationale pour le Développement Social des Quartiers (CNDSQ). Une vingtaine de sites sont alors classés « îlots sensibles ». Des Zones d’Education Prioritaire (ZEP) sont créées pour enrayer l’échec scolaire. Le 20 juin 1983, la police tire sur un jeune des Minguettes. Dans un climat de tension très forte, l'incident aurait pu dégénérer en émeute. Mais c'est la "Marche des Beurs" qui se met en route. Le 15 octobre 1983, la "Marche pour l’égalité et contre le racisme" débute à Marseille son long parcours à travers la France. À son arrivée à Paris le 3 décembre 1983, les organisateurs ont réussi à créer une très forte mobilisation. D’une dizaine de "marcheurs" au départ de Marseille, ils arrivent forts de 100 000 participants à Paris. Les "marcheurs" sont reçus par François Mitterrand. Entre 1989 et 1998 apparaissent les contrats de ville. Il s'agit d'un acte d’engagement par lequel une ou plusieurs collectivités locales et l’Etat décident de mettre en œuvre un programme de développement social urbain pendant cinq ans. Le contrat de ville s’intègre dans le contrat de Plan Etat-Région. Sur la période 19941998, 215 contrats de villes ont été signés : 1300 quartiers sont concernés. En 1991, sont aussi créés les Grands Projets urbains (GPU). Ce sont des programmes de restructuration lourde sur des sites en grande difficulté, dans lesquels l’intervention de l’Etat est importante. En 1999, le gouvernement Jospin lance un projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbain. Le contexte général en France est celui d'une croissance économique retrouvée. Lionel Jospin et Claude Bartolone, alors ministre délégué à la Ville, s'inquiètent de voir les quartiers où vivent les populations les plus

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défavorisées « manquer le train de la croissance ». 2 En 2000 l'apparition de la loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbain) va modifier en profondeur le droit de l'urbanisme et du logement en France. Adoptée sous le gouvernement de Lionel Jospin, la loi est publiée au Journal officiel du 14 décembre 2000. Son article le plus important est le numéro 55, qui impose aux villes de disposer d'au moins 20 % de logements sociaux. De 2002 à 2003 la politique de la réhabilitation devient la rénovation urbaine. Après un rapport très critique de la Cour des comptes, la loi Borloo du 1er août 2003 réoriente fondamentalement la politique de la ville : Le but est d’engager des opérations lourdes de démolitionreconstruction et de restructuration. En ce qui concerne le secteur de l’habitat social locatif, 200 000 logements doivent être détruits, 200 000 reconstruits et 200 000 restructurés. Le programme de rénovation de la ville qui est lancé doit s’étaler sur 5 ans et concerne 751 ZUS. L'objectif est d'aménager des espaces publics, de réorganiser les voiries, de rénover le parc de logements publics et privés. Afin de financer les projets, l’Agence nationale de la rénovation urbaine (ANRU), est créée. Le financement fait appel au "1 % patronal", à la Caisse des dépôts et consignations et aux fonds européens. En d'autres termes, ce qui est du ressort de l’accompagnement social et économique de la population relève désormais du droit commun. Parallèlement, 41 nouvelles zones franches urbaines sont créées et un observatoire national des zones urbaines sensibles est mis en place. Celui-ci est chargé d’évaluer l’efficacité des politiques suivies. En 2005 Sidi Ahmed, 11 ans est tué par deux balles perdues lors 2 Entre voisins Dispositif architectural et mixité sociale, M Eleb. JL Violeau,Edition de l’Epure, 2000.

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d'un règlement de compte entre deux bandes rivales à la cité des 4 000, à La Courneuve en Seine-Saint- Denis. M. Nicolas Sarkozy, promet de « nettoyer [le quartier] au Kärcher ». S'en suit une présentation d’un projet de loi visant à créer un pacte national pour le logement. Mais lors d'un déplacement dans un quartier d’Argenteuil dans le Val-d’Oise, M. Sarkozy est pris à partie par des jeunes, qu’il traite en retour de « racaille » et de « gangrène ». Puis, deux jeunes tentant d'échapper à la police meurent d'électrocution en se réfugiant dans un transformateur EDF. Des émeutes éclatent à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). La violence se propage, les incendies de voitures et les affrontements avec les forces de l’ordre gagnent la Seine- Saint-Denis et plusieurs villes de France. Le 8 novembre, le gouvernement proclame l’état d’urgence. Le calme revient à la mi-novembre. En 2008, Fadela Amara présente le « plan espoir banlieue ». Nicolas Sarkozy a choisi de mettre l'accent sur la responsabilité individuelle : "Ceux qui sont prêts à faire quelque chose pour euxmêmes, l'Etat les aidera. Ceux qui ne veulent rien faire, l'Etat ne fera rien pour eux", a dit le chef de l'Etat.3 Le plan "Espoir banlieue" prévoie de : - Créer 30 "pôles d'excellence" éducative dans les quartiers prioritaires, en ouvrant des sections internationales, des filières d'excellence et des "lycées des métiers". - Créer 4 000 places en cinq ans, dont 1 400 à la rentrée, dans des "internats d'excellence". Ouverture d'internats à proximité des quartiers sensibles et places réservées à des élèves de zones urbaines sensibles dans d'autres internats. - Accueillir dès la rentrée "5 % des élèves les plus méritants de 3 http://www.lemonde.fr/politique/article/2008/02/12/

ville-l-eternel-retour-du-plan-banlieue_1010340_823448. html#Ik736vOJKUQ0CSCM.99

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chaque lycée d'enseignement général et technologique" en classes préparatoires. - Proposer 45 000 "contrats d'autonomie", à des jeunes de moins de 26 ans, avec des entreprises ou des organismes spécialisés. Ces jeunes seront rémunérés en fonction de leurs résultats. - Placer 4 000 policiers supplémentaires dans les quartiers sensibles en trois ans. 4 En 2014, Cecile Duflot fait adopter la loi ALUR pour l'accès au logement et un urbanisme rénové. Alors que 450 000 logements sont classés « habitat indigne » ou « indécent » en France, la loi met en place un dispositif encourageant la rénovation des copropriétés. La loi permettra d'interdire aux personnes condamnées pour « hébergement contraire à la dignité humaine » l'achat de biens immobiliers destinés à la location pendant 5 ans. Et si un bailleur est condamné à faire réaliser des travaux dans un logement loué de manière insalubre ou indigne, il pourra avoir une astreinte journalière fixée à 1 000 euros par jour en cas de travaux noneffectués. Enfin, les pénalités seront renforcées pour les villes qui ne remplissent pas leurs obligations de construction de logements sociaux.5 Depuis 2015, Deux agences s'occupent également de financer la rénovation des quartiers dans les zones urbaines sensibles : l'ANRU (Agence nationale pour la rénovation urbaine) et l'ACSÉ (Agence pour la cohésion sociale et l'égalité des chances). Environ 1 300 quartiers populaires ont été ciblés en fonction du 4 http://www.lemonde.fr/politique/article/2008/06/20/les-

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principales-mesures-du-plan-espoir-banlieue_1061094_823448. html#4k7t45xmQtkJ30Q7.99 5 http://www.la-loi-alur.org


revenu par habitant. Parmi eux, Stalingrad-Riquet à Paris ou le centre-ville de Marseille.

2. FAMILLES des modes d'habiter Au delà de la prise en compte politique des problématiques sociales dans la ville, de nombreux sociologues ont engagé une réflexion sur les façons d'habiter à l’échelle d'un quartier. Barbara Allen, dans son travail de thèse6 distingue plusieurs familles de mode d’habiter qui varient selon la nature de l’investissement en jeu par rapport à l’habitat : - la famille de l’attachement - la famille du rejet - la famille du repli - la famille de l’investissement possible. La famille de l’attachement : L’habitant de cette famille vie positivement son installation dans un quartier donné même s’il ressent des problèmes, des difficultés. Le fait de s’installer dans ce quartier, représente pour l’habitant un projet de vie et par la même, une progression. L’individu de ce mode d’habiter est tourné vers les autres et accorde de l’importance aux relations sociales même s’il existe des conflits. Les relations que l’individu développe au sein de son quartier ne s’oppose pas à celles qu’il développe dans d’autres espaces. La famille du rejet : L’habitant est dans le rejet de l’habitat qu’il occupe. Il refuse le quartier en tant qu’espace social. Ce rejet est dû à plusieurs facteurs : les conditions de son installation ont été subies, certains aspects du quartier renforcent l’idée négative qu’il en a déjà. Mais le problème qui est au centre est celui du 6 Diversité sociale, ségrégation urbaine, mixité, M-C Jaillet, É

Perrin, F Ménard, Plan urbanisme construction architecture, 2008

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refus des autres et il se traduit le plus souvent par une stratégie d’évitement. La famille du repli : Cette famille de mode d’habiter possède trois caractéristiques majeures qui la différencie des deux précédentes. L’habitant met en place une stratégie de retrait vis à vis de la sociabilité du quartier mais aussi parfois vis à vis de sa famille. L’habitant opère à une sélection des échelles. L’enjeu pour l’habitant est de préserver le logement comme un lieu investi contrairement à tous les autres. Il oppose donc son logement à tous les autres espaces. Il entre dans une recherche de l’habitatcocon, de l’habitat-intimité, au détriment du reste. La famille de l’investissement possible : L’habitant de cette famille n’exprime pas clairement ses sentiments, ses ressentis, ses points de vues. Il agit comme s’il vivait dans un logement et un quartier «neutre». Ces différentes familles de mode d'habiter sont elles en mesure de cohabiter et quel peut être leur lien social ?

3. definition du lien social Les chercheurs en sciences sociales se sont penchés sur la nature des liens sociaux qui sont établis au sein d'une population et sur les moyens mis en place pour y arriver. Selon M. C Jaillet : «est mixte, du latin mixtus, mêlé, mélangé, ce qui est formé d’éléments de nature, d’origine, différents.»7 La mixité sociale est-elle seulement socio-économique ou concerne-t elle aussi les critères de handicap, d’ethnie, d’âge, de composition familiale etc ? 7 Mixité et ségrégation : de quoi parle-t-on?, M.C Jaillet, compte 16

rendu, 2000, p5, en ligne


Lorsque l’on parle de mixité sociale dans le champs de l’urbanisme, la définition la plus commune est celle qui consiste à dire que la mixité sociale s’installe du fait de la programmation des logements en faisant cohabiter différentes classes sociales dans une même unité urbaine. Il s’agit donc de lutter contre la ségrégation urbaine que l’on trouve sous forme de ghettos ethnico-sociaux. La mixité sociale urbaine doit permettre l’ascension sociale grâce au brassage de groupes sociaux différents. Dans les quartiers durables, des quotas de logements sociaux sont fixés afin de les rendre plus mixtes socialement. Mais imposer une mixité quantitative est-il suffisant? On remarque que les plus fragiles socialement (jeunes, personnes agées, pauvres, étrangers) sont souvent les moins actifs dans les concertations participatives. Quelles stratégies peuvent être mises en place pour modifier ce phénomène? La notion de lien social désigne l’ensemble des relations et des dispositifs qui rattachent les individus et les groupes les uns aux autres. Ces liens peuvent être directs (on parle de « relations primaires » qui reposent sur le lien familial, conjugal,et les relations amicales…) ou indirects (il s’agit de ceux qui passent par l’intermédiaire de vecteurs comme les associations, le monde professionnel…) Le lien social peut se partager en trois formes : - lien marchand qui concerne les relations économiques - lien communautaire qui touche l’ensemble des relations sociales et des contacts entre les membres d’une société - lien politique ou lien civique basé sur le sentiment de solidarité pouvant exister dans une Nation.

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4. mixite sociale et controverse Cependant, le terme de mixité sociale est en lui même un élément de discorde et il est important d'en analyser les limites. Du point de vue des chercheurs en sciences sociales français, le terme de « mixité sociale » n'est pas précis et sert souvent de « fourre-tout ». Ce terme largement utilisé dans les politiques de la ville n'a été défini par aucun texte. La définition implicite serait la suivante : « La coha­bitation sur un même espace ou territoire de fonctionnalités, de groupes divers par l’âge, l’ethnie, le statut professionnel, les revenus… » (Cavallier, 1999) Non seulement le concept est flou mais il se retrouve sous forme de synonymes dans nombre de discours. On lit fréquemment les mots suivants : cohabitation, coexistence, brassage, diversité, mosaïque, melting-pot, équilibre. Et jusque dans les textes officiels, la pluralité des expressions est étonnante. On parle de mixité sociale, d'équilibre social de l’habitat, de diversité de la com­position sociale, de diversification de l’habitat, de répartition équilibrée et diversifiée de l’offre de logements... Le terme de mixité est largement utilisé lorsqu'il s'agit de parler de la ville. Cette mixité est parfois « urbaine » parfois « fonctionnelle ». Dans l'optique de clarifier la notion de « mixité sociale », la ville de Lyon a par exemple construit un « indice de sensibilité ». Il est obtenu en croisant les différents indicateurs d’exclusion. Le ministère de l’Équipement et la Délégation interministérielle à la ville ont proposé des guides méthodologiques. Cette absence de définition de la mixité sociale montre bien qu'il s'agit d'un objectif qui relève de l'idéal pour la sphère politique. Il s'agit d'une réponse aux sentiments d'inégalité dans la ville et dans la société. Si l'on ne sait pas définir clairement la mixité sociale, on remarque qu'elle est utilisée en opposition à des termes négatifs tels que : l’exclusion, la ségrégation, la discrimination, la 18


division... Mais quelle est cette non-ségrégation ? Il s'agit de faire coexister les générations, les classes sociales, les français et les étrangers. Mais on peut se demander à quel moment la balance est équilibrée ? De plus, les classements d'appartenance à des catégories ne reflètent pas forcément la vision que l'habitant a de lui même. En outre, les chiffres concernant les écarts de revenus varient largement selon l’échelle d’analyse choisie. La région Île-de-France en est un bon exemple puisqu’il y est particulièrement difficile de connaître la réalité quant aux configurations socio-spatiales. « Les analyses conduites par l’équipe d’E. Préteceille (2003) sur l’évolution de la ségrégation sociale dans la métropole parisienne à des échelons fins (de l’ordre de 2 000 habitants ), invitent à relativiser le dia­gnostic du « décrochage » des quartiers de la politique de la ville. »8 Déterminer l’échelle spatiale est une difficulté méthodologique majeure suivant laquelle varient les effets de l’environnement et leur influence. Aujourd’hui, on remarque que les révolutions technologiques et les facilités de mobilités changent le rapport qu’entretiennent les habitants à leur quartier qu’elle que soit leur classe sociale. De plus, les villes qui recensent le plus grand nombre d’habitants appartenant aux classes très privilégiées ne sont pas celles qui sont montrées du doigt lorsque l’on parle de mixité sociale.Il s’agit pourtant de « ghettos de riches » . La préférence pour l’entre-soi est souvent observée aux extrêmes de la division sociale. Les classes moyennes sont généralement plus favorables à des quartiers économiquement mixtes. Il faut donc veiller à ne pas mélanger la ségrégation choisie des uns avec la ségrégation subie des autres. 8 Mixité sociale dans l’habitat : revue de la littérature dans une

perspective comparative de Thomas Kirszbaum, Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE), 2008

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La mise en place de logements sociaux ne rime pas forcément non plus avec mixité sociale. La loi SRU qui vise à obliger les communes en manque de logements sociaux à en construire 15% sur trois ans a été globalement bien respectée. Dans certain cas elle a même été dépassée sur l’ensemble de la France. Mais si l’on y regarde de plus près, on se rend compte que l’effort est fournit par les communes qui étaient déjà proche du chiffre des 20% exigés. En revanche, les communes qui étaient déjà opposées à la construction de logements sociaux, préfèrent payer l’amende prévue par la loi SRU. De plus, le montant de cette amende est contesté puisqu’il est le même quelles que soient les capacités économiques des communes. A savoir 150 euros annuels par logement manquant. Une autre critique fréquente quant à la loi SRU nous intéresse : La construction de logements sociaux suffit elle à garantir la mixité sociale ? Puisqu’au sein même des logements sociaux, on peu retrouver des différenciations sociales. On sait que 75 % de la population française est éligible au logement social. De ce fait, il convient de s’interroger sur leur attribution et sur la répartition des ménages au sein d’un quartier, d’un îlot voire d’un immeuble. Lorsque la proximité spatiale existe, les interactions entre habitants, elles, ne sont pas forcément présentes. D’ailleurs, le constat majeur révèle que les interactions de proximité sont très limitées. On remarque des clivages entre des populations dont les modes de vies et les valeurs sont très différents. Cette proximité spatiale est même parfois contre-productive puisqu’elle peut générer des conflits et produire des situations d’isolement. Pour toutes ces raisons, certains chercheurs en sciences sociales proposent d’améliorer la qualité de vie et des services dans les quartiers où personnes ne veut aller ni rester, plutôt que de déplacer les habitants et de prendre le risque de les mettre en situation discriminante. 20


5. Proximite spatiale / mixite sociale C’est en ce sens qu’est remise en question la relation entre proximité spatiale et mixité sociale. En 1926, Robert Ezra Park, affirmait que la proximité spatiale n’était pas le garant de la mixité sociale. Car la distance physique n’est pas le seul obstacle à la communication entre classes sociales.9 Lorsque l’on compare les observations de quartiers sociaux hétérogènes en banlieue et dans le centre-ville, on se rend compte que la mixité sociale est plus conflictuelle dans les quartiers périphériques. Dans les quartiers urbains, les relations sociales paraissent moins conflictuelles. Bien que les différentes populations n’aient pas les même conditions de vie, elles peuvent avoir intérêt à cohabiter. Alors que les habitants de classes moyennes et supérieures cherchent un quartier multiculturel, les ouvriers français et immigrés y voient l’opportunité de renforcer leur place dans le quartier et de ne pas y être remplacés. C’est aussi pour eux un moyen de débloquer leurs trajectoires socioéconomiques. Pour que les relations sociales se créent, il semble nécessaire que les différences entre les populations soient claires et que la situation ne puisse s’inverser. Pour qu’une cohabitation pacifique se mette en place entre habitants d’un quartier socialement hétérogène, il semble important que chaque population ait un espace dans le quartier où elle puisse être elle-même. Le quartier doit pouvoir se délimiter en micro-secteurs. L’enquête de JC Chamboredon et M Lemaire10 montre que les populations les plus ouvertes à la mixité sociale sont celles qui ont une vie sociale qui n’est pas exclusivement centrée sur leur quartier : celles qui sont mobiles dans la ville. 9 Diversité sociale, ségrégation urbain, mixité, Les pratiques sociales de coprésence dans les espaces résidentiels, mixité et proximité, Jean-Yves Authier, 2008 10 Proximité spatiale et distance sociale : les grands ensembles et leur peuplement, Jean-Claude Chamboredon, Madeleine Lemaire, 1970

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Pour Michel Pinçon, « l’homogénéité des conditions de logement et d’habitat ne conduit pas à une homogénéisation des conditions d’existence, bien au contraire. » 11 La quête de l’entre soi est un phénomène majoritairement observé chez les grands bourgeois. Alors que la grande bourgeoisie a les moyens de s’installer où elle le souhaite dans Paris, elle privilégie essentiellement le nord du XVI°, le sud du XVII°. En d’autres termes, elle choisit son semblable. Si les plus pauvres se trouvent relégués dans les localisations les moins attractives, c’est parce que la chaîne de sélection sociale des populations résidentes commence au cœur des beaux quartiers. C’est la représentation que se font les habitants de leur propre place et de celle des autres dans la société qui influe sur les relations sociales. Plus les habitants auront l’impression d’avoir accès à un avenir social, moins les rapports seront conflictuels. On peut aussi se demander quelle est l’échelle pertinente pour apprécier la mixité sociale : est-ce l’immeuble ? l’îlot urbain ? le quartier ? la ville ? l’agglomération ? Quelle est l’échelle des découpages spatiaux permettant de saisir le mieux les relations sociales entre catégories ?

6. l'architecture participative de kroll Les habitants, qui sont les premiers concernés par ces études peuvent être considérés comme les acteurs de ces modifications des modes d’habiter. Il apparaît nécessaire que ces futurs habitants ne se trouvent pas dans une situation passive et qu’ils ne subissent pas les aménagements urbains qu’on leur impose. L’initiative d’un architecte qui sort du commun peu apporter des réponses pertinentes au sujet de la concertation participative et pourrai servir d’exemple aux ateliers encore timides des écoquartiers.

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11 Michel Pinçon sur le Sillon de Bretagne à Saint-Herblain en Loire Atlantique en 1980


Lucien Kroll est né en 1927, et a été formé à l’école nationale supérieure de La Cambre. Il vit et travaille à Bruxelles, où il a créé en 1956 son atelier, devenu en 1981 l’Atelier d’urbanisme, d’architecture et d’informatique Lucien Kroll, avec sa femme Simone, potière, coloriste, jardinière. Il se définit autant comme architecte que simple citoyen puisque l’architecture est pour lui une affaire de relations, liant les individus entre eux et à leur environnement. La participation des habitants est le point de départ de son travail depuis les années 1960. Simone et Lucien Kroll considèrent que la recherche du « sentiment d’habiter » est impossible sans la coopération collective. Dès les années 1960, Kroll s’est opposé à l’urbanisation massive et à l’industrialisation du logement. Il a aussi été l’un des premiers à poser la question de l’écologie. L’approche de ce couple est singulière, surtout au regard de l’époque à laquelle ils ont commencé à exercer. Lucien Kroll a énormément écrit sur sa pratique. Il concilie toujours théorie et construction. « Faire participer n’est pas un argument de vente ni une simple politesse envers les habitants. C’est les considérer comme éléments indispensables à atteindre cette complexité. » « Aux habitants participants je ne donne rien ; au contraire je leur demande de m’aider à trouver des formes qui les respectent, et avec lesquelles je cherche à faire une architecture. C’est un service que je leur demande. Je ne viens pas leur imposer des schémas à ma mode. »12 Dans le cas de la MéMé (Louvain-en-Woluwe) réalisée dans les années 1970, qui est certainement son œuvre la plus connue, le travail de recherche s’est fait conjointement avec les étudiants de 12 Texte affiché dans l’exposition Tout est paysage, Cité de l’Architecture et du Patrimoine

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la faculté de médecine, des étudiants qui ont eux-mêmes choisi l’atelier Kroll, ne voulant plus «être le produit fini d’une machineoutil ». Que ce soit au cours de repas partagés, durant des réunions de chantier, ou en travaillant autour des maquettes du projet, ces étudiants ont eu autant de poids dans les décisions à prendre que Simone et Lucien Kroll. Cette participation active a permis d’élaborer un programme diversifié, transformable, mutable. « L’habitant possède toujours un trésor perdu par les architectes, une culture de l’échelle domestique et de la complexité, une bonhomie qui fait les paysages aimables. Les architectes mettent de l’ordre et de la grandeur, et stérilisent le tout ».13 En abordant la commande des Vignes Blanches à Cergy-Pontoise (1976), la parole habitante était fondamentale, initiatrice du projet. La première réunion avec les potentiels habitants a regroupée quelques ménages intéressés et des habitants du village curieux devant la démarche de Kroll.14 S’en suivront plus d’une cinquantaine de réunions en deux ans, réunions enrichissantes dans la mesure où elles ouvraient la porte aux réels besoins des habitants, avec des intentions authentiques, modestes dont la mosaïque formera un paysage très cohérent. Sans plan préétabli, 43 maisons toutes différentes naitront de cette participation. L’expérience professionnelle de Kroll est telle, qu’il sait que ce sont précisément ces participations des habitants

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13 Texte affiché dans l’exposition Tout est paysage, Cité de l’Architecture et du Patrimoine 14 « Les Vignes Blanches, Cergy-Pontoise », in L’Architecture d’aujourd’hui, (avril 1978), n°196, p38-41


qui enrichissent le projet et qui créent la diversité.15 Les démarches plutôt alternatives de Kroll ont l’air bien modeste à côté de celles prônées par ces contemporains plus « en vogue ». Et pourtant, les « Lucienités » offrent bien plus à la société d’aujourd’hui. L’impact est subtil tout en étant réel, à l’échelle de l’habitant, de l’usager, de l’humain. La participation habitante va au-delà de la conception et de la réalisation du bâtiment. Elle concerne l’appropriation, la modification, l’amélioration du bâti. Elle implique une évolutivité dont peu de projets peuvent se targuer. «Une façon écologique de décider : par la participation continue, on apprend à marcher en marchant». Mais pour lui, l’écologie n’est surtout pas réductible à des normes, à des autocollants verts ; la HQE (haute qualité environnementale) est «holiste». Comme un écosystème, un tout où sont reliés l’humain, le paysage, où «la construction n’est jamais achevée, mais doit au contraire évoluer avec le temps et les divers habitants qui y laisseront leurs empreintes » Le dessin de Lucien Kroll (page suivante) est celui d’un projet à Berlin-Hellersdorf en Allemagne. Est imaginé un processus où les habitants seraient force de proposition pour ce qu’ils estimeraient nécessaire. Un grand nombre d’interventions est proposé. L’ordre rigide des barre HLM laisse place à une ville qui crée le paysage berlinois. L’objectif est de disloquer le béton préfabriqué en créant des événements de désordre. L’ajout d’architecture organique doit rendre l’architecture plus « aimable ». Le projet ne fut pas réalisé pour des raisons économiques. Dans cette vision de la conception, l’architecte serait le médiateur 15 « Bio Psycho Socio – Eco 1, écologies urbaines », Ateliers Lucien Kroll, éd L’Harmattan, 3 mai 2000, p22

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Lucien Kroll, Enfin chez soi, Réhabilitation de préfabriqués, Berlin-Hellersdorf, Allemagne, 1994 © Atelier Lucien Kroll

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mettant en forme les intentions désordonnées des habitants. Cette forme de participation n’a rien à voir avec les consultations qu’on observe aujourd’hui dans les projets de ZAC. L’écologie a besoin de la participation des futurs habitants pour fonctionner, puisque le but est d’arriver pas-à-pas à un projet social puis à un projet technique. Il faut passer par l’organisation des relations actives entre futurs voisins, sinon rien de stable ne peut être construit.

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Photographie personnelle du quartier Clichy-Batignolles

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DEUXIEME PARTIE : les écoquartiers 1. Ecologie, developpement durable Commençons par redéfinir quelques termes importants : L’écologie peut être définie de la façon suivante : il s’agit de « l’étude des milieux où vivent et se reproduisent les êtres vivants ainsi que les rapports qu’entretiennent ces êtres avec le milieu ». Le terme « écologie » et souvent utilisé comme un synonyme d’ « environnement » pour désigner ce qui se rapporte au vivant. Les mots « économie et « écologie » ont une origine grecque identique : oikos. C’est ce qui désigne la « maisonnée » au sens large, c’est à dire l’ensemble des habitants, des bâtiments, des animaux d’un domaine. De même, le mot « démocratie » vient du grec dêmokratia qui est constitué de dêmos : territoire et de kratein : commander. Ces termes sont donc spatialisés. Le terme développement durable provient de la première conférence intergouvernementale organisée par l’Unesco en 1968. Ce terme est à la fois vague et écologiquement correct. Le développement concerne à la fois l’économie, le social, l’individuel, le culturel et l’écosystème. Le terme d’écologie urbaine voit le jour en 1925 suite à un recueil d’articles intitulé « the city » auquel ont participé Robert E. Park, Ernest W. Burgess, et Roderick D. McKenzie. A l’époque, cet ouvrage avait eu un impact considérable pour la sociologie urbaine américaine. Les journalistes et sociologues ayant fondé l’école de Chicago avaient comme terrain d’expérimentation la ville. La grille d’analyse jusqu’alors utilisée pour les milieux naturels, est utilisée pour la ville. La ville est pensée comme l’écosystème de l’homme. Avec l’urbanisation planétaire nous avons vu notre rapport à la nature se modifier.16 Nous ne parlons plus d’une nature sauvage, 16 Ecologie urbaine, actes du colloque Écologie urbaine, ENSAPV, Dirigé par François Séguret, Henri-Pierre Jeudy, 1945

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indomptable... mais d’une nature gérée, contrôlée par les hommes. L’homme est aujourd’hui perçu comme le pollueur de la nature. Mais la ville occupée par les hommes est un produit de la nature humaine, c’est un milieu, un habitat. En tant que citadins, notre « nature » est aujourd’hui urbanisée. L’écologie est aujourd’hui défendue comme une espèce de bonne conduite et illustre le bien-penser sans que jamais il ne soit question de son importance sociale. L’écologie est essentiellement approchée par un raisonnement scientifique suscitant l’émotion, la peur de la catastrophe. Pourtant l’écologie urbaine suggère des transformations de comportements, de valeurs. Elle propose de déplacer nos centres d’intérêt vers la « relation » au cadre de vie, aux autres, au monde.

2. les debuts de l'ecologie : militantisme D’un point de vue historique, l’écologie est apparue d’abord sur la scène nationale comme une revendication militante et en marge des considérations politiques générales avant de s’institutionnaliser. En France, à la fin des années 60 apparaissent des groupements locaux (Survivre et Vivre, Maisons Paysannes de France, Nature et Progrès) ainsi que des filiales d’institutions internationales ( Les Amis de la Terre). Ces organisations sont ouvertement politisées. Elles se positionnent dans la lutte contre le nucléaire, prônent une économie alternative etc... Dans les années 70, le mouvement écologiste en France prend de l’importance. Il est largement représenté aux élections présidentielles, régionales, communales et européennes. On voit apparaître une presse écologiste avec par exemple La gueule ouverte et Le Sauvage.

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En France, Pierre Fournier est dessinateur dans Hara-Kiri, revue anticonformiste née en 1960 à l’initiative de François Cavanna et de Georges Bernier. Hara-Kiri est interdite en 1969 et change de nom et de forme pour devenir Charlie-Hebdo. Pierre Fournier


y coordonne alors la page « environnement ». C’est après les événements de mai 68 qu’elle serra le plus reconnue. Ce contexte permettra l’émergence d’une presse particulière, anticonformiste, libertaire et écologiste. Pierre Fournier demande à Bernier et Cavanna, une aide pour lancer un supplément mensuel qui sera entièrement consacré aux questions d’écologie politique. Dans les premiers numéros, on retrouve des personnes comme Isabelle Monin-Cabut, Philippe Lebreton, Roger Bernard, Arthur et des dessinateurs venant de Charlie-Hebdo comme Gébé, Cabu, Reiser, Willem, Wolinski, Hugot… En 1974, la revue devient indépendante des Éditions du square (Hara-Kiri, Charlie-Mensuel) et devient hebdomadaire. Au niveau international, dans les année 70 on voit apparaître de nombreuses initiatives communautaires écologiques. Par exemple, à Copenhague, un groupe de chômeurs du mouvement Provo (né aux Pays Bas à la fin des années 60) et d’artistes s’installe dans un ancien quartier militaire de 35 ha. Ils protestent contre la crise du logement. Ils créent alors la « ville libre de Christiania ». Ce quartier est organisé autour d’une charte de vie collective. Les principaux fondements de ce quartier sont : l’autogestion, la responsabilité individuelle du bien être de la communauté et le respect de l’écologie. A Christiania, 900 habitants se réunissent lors d’assemblées délibératives ouvertes à tous. Les pays germaniques sont les premiers à avoir lancé les « protoquartiers » : des habitants militants ont associé leurs volontés d’habiter des quartiers écologiques. Cependant il s’agissait d’initiatives ponctuelles et individuelles et surtout éloignées des centres urbains. Apparaissent dans les années 1990, les quartiers prototypes qui se déplacent dans les centres urbains, parmi lesquels nous pouvons citer : Bedzed à Londres, Vauban à Fribourg en Brisgau, Kronsberg à Hannovre, Bo01 à Malmö, Hammarby Sjöstad à Stockholm. Ces réalisations ont elles, été soutenues par la puissance publique et ont eu droit à un financement pour la conception. Il s’agit d’un type d’actions collectives.

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Vincent Renauld cite aussi l’exemple de la friche militaire de Vauban à Fribourg-en-Brisgau qui est occupé au début des années 90 par plusieurs centaines de militants écologistes et mal logés. Les habitants construisent eux même leur logement sous forme d’écoconstruction, ils fabriquent des installations solaires et des jardins partagés. Les premiers habitants de Vauban ont créé l’association Forum Vauban dès 1994. Le quartier de Vauban, est très souvent cité comme exemple de premier écoquartier européen.17 La ville de Fribourg, en Allemagne, est située à la limite entre la plaine de la vallée du Rhin et les hauteurs de la Forêt Noire. C’est une ville qui est constituée d’un petit centre historique, et d’une périphérie élargie comptant une majorité d’habitats collectifs, et bénéficiant d’ un excellent réseau de transports en commun. Elle est depuis longtemps engagée dans une démarche soucieuse de l’environnement. Le Quartier Vauban est situé à 3 km au sudouest de la vieille ville de Fribourg, Au début des années 90 la ville de Fribourg est confrontée à une sérieuse pénurie de logements. Elle s’engage alors dans deux projets d’aménagement urbain d’envergures. Le premier nouveau quartier de Rieselfeld prend place à l’ouest de la ville sur une parcelle qui est alors polluée par l’épandage des eaux usées de la ville. Une opération de dépollution a lieu sur 75 hectares dans le but de construire des logements et sur 200 hectares dans le but d’aménager une réserve naturelle. Le deuxième projet est le quartier de Vauban. Il prendra place au sud et occupera 38 hectares qui étaient réservés à la caserne des forces d’occupation françaises. Pour ces deux projets, la municipalité a imposé des règles environnementales ambitieuses et à placer au centre de ses préoccupations la participation de la population. C’est l’occasion pour un groupe de militant écologistes d’expérimenter leurs idées. C’est alors que voit le jour Le Forum Vauban. Il s’agit d’une plateforme associative très impliquée dans la 17 L’Ecoquartier Vauban à Fribourg : une démarche globale pour 32

une réalisation exemplaire, Joseph Rabie, Hesp’ère 21, 2009


planification urbaine de Vauban. Cette plateforme a été un soutient pour la ville mais aussi un contre- pouvoir. Le quartier Vauban à la particularité de compter de nombreux « Baugruppen » : des habitats groupés où chaque immeuble est conçu et construit en autogestion par ses futurs habitants. D’après Joseph Rabie , la comparaison avec Rieselfeld, qui a été bâti en majeure partie par des promoteur immobiliers privés, est flagrante : « Rieselfeld est certes très agréable et apprécié de ses habitants. Mais quand on voit l’exubérance et la richesse de l’environnement de Vauban, on découvre ce qui devient possible quand l’engagement populaire contrôle réellement le processus participatif. » La région de Fribourg est « n° 1 de l’énergie solaire en Allemagne », et on observe des initiatives du côté des énergies renouvelables avec les éoliennes et les « cogénération d’électricité et de chaleur » utilisant les déchets de l’industrie forestière locale. Par la suite en Europe, le choix a été fait d’investir dans de l’écoconstruction neuve plutôt que dans des réhabilitations. Les écoquartiers prennent place dans le cadre de projet de nouvelles zones urbaines. Il est plus facile dans ce cas d’arriver aux objectifs techniques des éco-quartiers.18

3. l'institutionnalisation des ecoquartiers en france C’est une dizaine d’années plus tard que ces initiatives spontanées d’écoquartiers ce sont institutionnalisées en France, sous l’impact de la médiatisation. En France, alors qu’il existe déjà un grand nombre d’éco-construction ayant la forme de maisons passives, l’ambition des écoquartier est autre : Il s’agit de créer un modèle d’habitat reproductible à grande échelle, dont la consommation énergétique est très faible. La démarche HQE (Haute Qualité Environnementale), a longtemps fait référence en la matière. Mais un véritable tournant a eu lieu avec la RT 2005 (Réglementation Thermique 2005) pour 18 http://www.eco-quartiers.fr

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la construction de bâtiments neufs résidentiels et tertiaires. Cette réglementation va plus loin que la précédente (RT 2000),puisqu’elle instaure des contraintes chiffrées. Les autorités locales françaises ont été assez lentes à intégrer le plan d’action « Agenda 21 ». Le Comité 21, créé en 1995 est un réseau d’acteurs engagés dans la mise en œuvre du développement durable. Sa mission est de faciliter l’échange et les partenariats entre ses adhérents afin qu’ils s’investissent à l’échelle d’un territoire.19 Ce comité réunit des entreprises (multinationales et PME), des collectivités (des communes aux régions), des associations (d’environnement, de développement, de solidarité locale, de défense des droits humains …), des institutions, des établissements d’enseignement supérieur et des médias. Il compte 500 adhérents. Le but du comité est de mettre en oeuvre l’Agenda 21 qui est un programme d’actions concernant 170 pays présents au Sommet de la Terre de Rio en 1992. L’Agenda 21 met à disposition des outils méthodologiques afin d’aiguiller les acteurs sur de bonnes pratiques sur les territoires. Deux nouveaux organismes ont été créés en France ces dernières années afin d’assurer un suivi : le Conseil National du Développement Durable (CNDD) et le Comité Interministériel pour le Développement Durable (CIDD) en 2003, dans le cadre de la Stratégie Nationale de Développement Durable. Vincent Renauld fait le constat que le Grenelle de l’Environnement qui s’est tenu en 2007 a encouragé la construction de plusieurs écoquartiers en France. « Les collectivités françaises sont plus de 500 à avoir rejoint le Club National Écoquartier ». Le pacte écologique de Nicolas Hulot a largement médiatisé cette planification. Entre octobre 2008 et mars 2009 le Ministère de l’écologie a lancé un « grand concours national écoquartier » qui comptait 21 prix : 160 dossiers sont déposés en 2009 et 394 en 2011. En 2010, plus de 300 000 logements de ce type étaient en chantier. 34

19 http://www.agenda21france.org


Le but étant d’amener la notion de développement durable dans les constructions urbaines. La démarche Écoquartier lancée par l’Etat s’est concrétisée en décembre 2012, par la création du label national EcoQuartier. Le but de ce label est de valoriser les opérations exemplaires françaises conçues selon les principes du développement durable. Depuis 2012, 32 opérations ont été labellisées “EcoQuartier” ( 19 en 2014 et 13 en 2013), soit 41 620 logements. « Un EcoQuartier doit respecter tous les principes du développement durable par : - la nécessité de faire du projet autrement, en impliquant tous les acteurs de la ville, du citoyen à l’élu, mais aussi par l’offre d’outils de concertation et de suivi pour garantir la qualité du projet dans la durée et à l’usage. - la contribution à l’amélioration du quotidien, par la mise en vie d’un cadre de vie sain et sûr pour tous les habitants et usagers de l’espace public ou privé, et qui favorise le vivre ensemble. - la participation au dynamisme économique et territorial. - la promotion d’une gestion responsable des ressources et de l’adaptation au changement climatique »20 Le label éco-quartier est prévu en trois étapes : Première étape : la collectivité signe la « Charte des EcoQuartiers » La collectivité doit signifier son engagement en devenant membre du « Club National EcoQuartiers ». En retour, elle a accès à un accompagnement technique et méthodologique par les services de l’Etat et la mise à disposition d’experts pour constituer le dossier de labellisation. Deuxième étape : le projet est reconnu « Engagé pour la 20 http://www.territoires.gouv.fr/les-ecoquartiers

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labellisation » Le ministère de l’Egalité des territoires et du Logement et de la ruralité évalue les objectifs mis en place lorsque le projet est en phase chantier. Troisième étape : le projet reçoit le label EcoQuartier Lorsque le projet est livré, ses résultats sont analysés et l’Etat les approuve s’ils sont à la hauteur des enjeux. En 2014, une deuxième campagne de labellisation est lancée. 108 opérations d’écoquartier sont retenues pour participer à cette deuxième campagne lancée en janvier. Le but est de valoriser l’exemplarité des collectivités françaises, ainsi que la diversité des projets. Une fois les opérations labellisées, c’est une évaluation qui est mise en place pour garantir la qualité dans le temps de ces écoquartiers et leur bon fonctionnement. La méthode nationale d’évaluation est en cours d’élaboration. Il s’agira par exemple de faire un point sur les engagements liés à l’eau, l’énergie et les déchets. Une fois ces évaluations faites, un guide national de l’évaluation ÉcoQuartier viendra compléter les outils de conception d’EcoQuartier. La publication de ce guide est prévu pour le second semestre de l’année 2015. Les premiers résultats de ces évaluations seront présentés à la conférence internationale Paris Climat (COP 21) en décembre 2015. 21 Les écoquartiers français sont encore récents puisqu’ils datent des années 2000. Il compte une forte proportion de bâtiments neufs et donc peu de rénovation ou réhabilitation. Ce sont des quartiers urbains de petite taille mais ayant une densité plutôt élevée et une grande hauteur. Il ne contiennent pas ou peu de maisons individuelles. 36

21 www.territoires.gouv.fr/les-ecoquartiers


Selon Vincent Renauld, ces nouveaux quartiers français s’éloignent sensiblement des projets des premières communautés écologiques militantes. Il soutient que les collectivités et les bailleurs sociaux tentent de banaliser ces nouveaux aménagements. C’est selon lui, là que réside le problème d’usage. Il existe donc un vrai décalage entre les pratiques sociales attendues et celles que l’on constate réellement sur le terrain.

4. les rates du 1er ecoquartier francais La Caserne de Bonne, premier éco-quartier français, se situe à proximité immédiate du centre ville de Grenoble. Avant sa réhabilitation, cet ancien site militaire, dont la ville a fait l’acquisition en 1990, était un vide immense entouré d’un mur monumental. C’est en 2005, que les travaux ont commencé. Les premiers habitants se sont installés en 2008. Les commerces de la ZAC ont ouvert en 2008. Le projet a été désigné lauréat du prix national écoquartier en 2009 décerné par le ministère du Développement durable. Pourtant, Le journal Le Monde titre le 10 novembre 2011 « A Grenoble, les ratés du premier écoquartier français ». Une étude « monitorée » a été menée dans ce quartier par le bureau d’étude Enertech pendant deux ans et présente des résultats contrastés. 500 capteurs ont été installés dans 45 appartements et dans les parties communes de 9 immeubles d’habitations. Grace à ces capteurs, il a été possible de mesurer régulièrement les températures et les consommations en énergies. « Plusieurs dizaines de millions d’informations ont été stockées et analysées. Nous disposons aujourd’hui d’un historique complet sur la façon dont fonctionne cet écoquartier. Cette base de données est unique et très précieuse pour comprendre et améliorer les performances de chaque immeuble », explique Olivier Sidler,

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Vue aĂŠrienne du projet Caserne de Bonne, Grenoble

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directeur du bureau d’études Enertech.22 Concernant la production d’eau chaude sanitaire, les objectifs initiaux ont été dépassés de 20%, ce qui est une réussite. Cependant, les résultats montrent que les performances de chauffage et d’isolation ne sont pas à la hauteur. Des défauts de réalisation en serait la cause. Les résultats attendus auraient dû être inférieurs à 50 kilowattheures par mètre carré et par an mais une mauvaise étanchéité à l’air est remarquée. Il s’agit d’un défaut de conception à la base du projet. Un facteur qui ne peut donc pas être modifié. Conséquence : les consommations de chauffage sont de 5 % à 70 % supérieures à l’objectif. L’explication est certainement la suivante : A l’époque de la construction du quartier Caserne de Bonne, les bureaux d’études ne maitrisaient pas encore ce genre de réalisation. Il s’agit d’un projet avant-gardiste, donc expérimental. Cependant, des mauvais résultats de ventilations double flux ont aussi été observés. Et dans ce cas, il s’agit plutôt d’un problème de maintenance. Les ventilations double flux sont des mécaniques d’aération qui servent à récupérer les calories de l’air sortant pour réutiliser leurs capacités chauffante servant pour l’air entrant. Pour permettre la réussite d’une telle innovation technique, il aurait fallu faire preuve de plus de pédagogie. Tout d’abord, de nombreuses erreurs ont été commises lors de la pose. L’accrochage des bardages d’isolation des façades ayant été mal prévu, la qualité thermique des murs a été dégradée. Ensuite, au niveau de l’usage quotidien, les pratiques observées révèle un non sens : les arrivées d’air sont régulièrement bouchées ce qui empêche le processus d’opérer. De plus, les habitants chauffent souvent au delà des 19 degrés préconisés. 22 A Grenoble, la caserne de Bonne n’a pas que du bon, Libération, par François Carrel — 2 avril 2012 http://www.liberation.fr/societe/2012/04/02/a-grenoblela-caserne-de-bonne-n-a-pas-que-du-bon_807499

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Enfin, au niveau de la maintenance, des réglages approximatifs ont été observés. « Peu habitués à ce genre de bâtiments, les syndics n’ont pas eu au début le réflexe de faire nettoyer régulièrement les filtres des ventilations. Or quand ils sont encrassés, ils majorent la consommation énergétique du système », précise Olivier Sidler. Pour s’assurer de la réussite des futurs écoquartiers, il faudrait mettre en place une vraie sensibilisation. A la fois pour les entreprises du bâtiment, mais aussi pour les promoteurs et les habitants. « Les gestionnaires, sous la pression des habitants, augmentent la température des chaudières. Là où les thermostats ont été bridés, certains habitants ont acheté des chauffages d’appoint, explique Christophe Bresson, directeur de l’union iséroise de l’association Consommation logement cadre de vie (CLCV). Avec le BBC, on a changé de dimension. Faire entendre à des gens habitués à vivre avec 23˚C ou 24˚C qu’ils doivent se chauffer à 19˚C, c’est compliqué. » Force est de constater que dans l’opinion public c’est majoritairement sur le bon fonctionnement de ces innovations techniques que repose le jugement de réussite ou non d’un écoquartier.

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5. les innovations techniques des ecoquartiers Paul Virilio affirme que dans chaque innovation technique il existe un accident probable. Si l’écoquartier mobilise le “vivre ensemble” et des changements culturels vis-à-vis de l’environnement, il n’implique pas nécessairement la participation des citoyens. De fait, dans l’opinion publique, ce n’est pas tant la participation citoyenne qui rend les écoquartiers plus intéressants que les quartiers classiques mais la montée en puissance de nouvelles techniques environnementales. L’énergie est un des principaux thèmes traités dans les écoquartiers en Europe. En conséquence nous tenterons de définir les innovations techniques majoritairement utilisées dans les écoquartiers. Le vecteur chaleur est la technique qui apparaît le plus fréquemment dans la conception à l’échelle du quartier. La chaleur issue de ressources renouvelables (solaire thermique, biomasse, aquifère) est généralement couplée à un réseau et consommée sur place dans le quartier. 23 L’excédent de chaleur récupéré est stocké par le bâtiment, par le sol ou dans les réservoirs. L’énergie renouvelable sous forme d’électricité (photovoltaïque et parfois éolien) est généralement injectée dans le réseau électrique. Il y a peu d’exemple de stockage d’électricité dans les écoquartiers existants. Stockage thermique simple dans/par le bâtiment ou le sol L’inertie thermique du bâtiment permet de diminuer le besoin de chauffage. Dans les cas de Bedzed à Sutton et de la Caserne de 23 Énergie en (éco)quartier, Gilles DEBIZET et Odile BLANCHARD , Publié en ligne le 02 février 2015

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Bonne à Grenoble elle est assurée de façon passive par les murs et les planchers lourds, alors qu’à Kronsberg à Hanovre elle l’est de façon active, par des réservoirs d’eau. Le stockage passif est capable de couvrir les variations journalières et peut être complété par des apports solaires directs (baies vitrées, serre …). C’est alors la conception bioclimatique du bâtiment et les matériaux qui jouent un rôle. Le stockage actif, lui, couplé à des panneaux solaires thermiques, permet de couvrir les intermittences de production (absence d’ensoleillement plusieurs jours consécutifs) comme c’est déjà le cas pour l’eau chaude sanitaire et parfois le chauffage. Centrales photovoltaïques : Aujourd’hui en France, l’énergie électrique des panneaux photovoltaïques est transformée en courant électrique par un onduleur. Elle est ensuite injectée dans le réseau électrique public. La plupart des acteurs de la ville sont en mesure de faire installer et de gérer des mini-centrales solaires. Pompe à chaleur notamment aqua- ou géothermique : La pompe à chaleur (PAC) est déjà utilisée de façon courante de la maison individuelle à l’ilot. Pour être performante, elle doit être utilisée avec la géothermie (utilisation du sous-sol et/ ou de l’eau de surface comme source chaude). Or les prélèvements de chaleur dans le sol sont limités pour des raisons écologiques. La performance est plus élevée lorsque le bâtiment est chauffé par des émetteurs basse température (plancher chauffant, caisson de ventilation). Ces émetteurs et la PAC peuvent aussi être utilisés pour rafraichir le bâtiment. La pompe à chaleur n’est pas utilisée si le bâtiment dispose de panneaux solaires thermiques suffisants. 42


Récupération de chaleur des eaux usées : Les eaux usées ont une température plus élevée que l’eau froide puisqu’elles sont issus des points d’eau et des appareils de lavage. Cette chaleur peut être récupérée au sein du logement, en pied d’immeuble ou sur les collecteurs horizontaux du réseau public. Elle peut-être utilisée pour préchauffer l’eau sanitaire ou comme source chaude de pompe à chaleur. Des expérimentations sont en cours pour récupérer la chaleur des égouts publics et l’intégrer dans le réseau de chaleur urbain. Chaufferie biomasse : La combustion directe de matière (paille, copeaux, granulé, plaquette, bûches, huiles ...) est la façon la plus courante de produire de la chaleur par combustion de biomasse. En France une centaine de réseaux de chaleur sont alimentés partiellement en biomasse, et pour moitié dans des communes de moins de 5000 habitants. Cogénération de chaleur et d’électricité : La cogénération a été mise en oeuvre dans plusieurs écoquartiers de l’échelle du logement à celle du quartier en passant par le bâtiment et l’îlot. Elle permet de maximiser le rendement énergétique de production électrique. L’énergie électrique produite par la cogénération est subtilisée directement ou réinjectée dans le réseau électrique. La chaleur dégagée est utilisée au plus près des besoins par l’intermédiaire d’échangeurs thermiques ajustant la température du circuit secondaire requise de chauffage des bâtiments et celle de l’eau chaude sanitaire. Tous les types de combustibles peuvent être utilisés : biomasse, gaz, fuel. Réseaux de chaleur : Un réseau de chaleur peut être créé par une collectivité sur le 43


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Photographie personnelle du quartier Clichy-Batignolles


domaine public pour livrer de la chaleur sous forme d’eau surchauffée à des usagers. Le réseau distribue la chaleur via de l’eau à haute température et sous pression. Certains réseaux de chaleur sont utilisés en période estivale pour le rafraichissement via un réseau spécifique d’eau glacée. Un nombre croissant d’écoquartiers urbains comprend un réseau de chaleur. Le solaire, la géothermie, la biomasse et, dans une moindre mesure, les énergies fatales et l’éolien constituent les ressources énergétiques situées sur place et mobilisées. Les quatre premières produisent de la chaleur qui est généralement consommée ou bien stockée dans des réservoirs, le sol ou les bâtiments pour être consommée ultérieurement sur place. L’électricité solaire ou éolienne produite est injectée dans le réseau public sans que soient annoncés les espaces où elle est consommée. Sur le plan énergétique les écoquartiers français sont moins autonomes que les écoquartiers européens.24 Les écoquartiers européens ont presque tous développé des moyens de production de chaleur qui leur sont propres alors que les écoquartiers français utilisent de la chaleur produite à l’extérieur de l’écoquartier (qui peut être d’origine renouvelable). La différence est très nette pour l’électricité puisque les écoquartiers français produisent beaucoup moins d’électricité locale que les écoquartiers européens et donc la proportion de renouvelable dans l’électricité consommée est beaucoup plus faible. L’ambition quant aux objectifs en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre est moindre. Il en est de même pour les objectifs d’efficacité énergétique. Enfin, les écoquartiers français ne sont pas très bien placés en terme d’innovations technologiques. Ils privilégient l’utilisation de technologies connues. 24 L’énergie dans les écoquartiers en Europe : premiers

éléments de comparaison avec la France, Philippe MENANTEAU , Odile BLANCHARD et Séverine PROST-BOUCLE, Publié en ligne le 02 février 2015

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Plan de situatuion du quartier Clichy-Batignolles dans Paris Š http://www.clichy-batignolles.fr

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TROISIEME PARTIE : LE TERRAIN D’enquête 1. la virtuosite des habitants Par virtuosité Vincent Renauld25 entend « la disposition qu’acquiert chaque habitant à manipuler les objets qui l’entourent selon les règles d’usage contingentes aux situations données ». C’est à dire que la virtuosité ne renvoie pas seulement au mode d’intériorisation des règles sociales, mais aussi à une connaissance de ce qui doit ou non se faire, se prévoir vis-à-vis des autres ou de ne pas prévoir. C’est selon Vincent Renauld surtout une forme d’habileté voire de dextérité par laquelle l’habitant est en mesure de se servir des objets familiers qui l’entourent selon les usages. Elle s’apparente au concept de « compétence de l’habitant » qu’Henri Raymond attribuait surtout à une compétence langagière. Donc la virtuosité est non seulement un savoir-vivre, mais également un savoir-faire technique qui rend possible à chaque instant l’habiter par l’utilisation des environnements techniques, spatiaux et temporels. « La virtuosité n’est pas le privilège de quelques-uns : elle est ce qui permet à tous ceux qui chaque jour habitent dans un monde devenu familier d’agir en usant des objets qui les entourent. » Par exemple : Prendre un repas en présence d’invités exige une multitude de savoir-faire que l’auteur appelle « techniques » au sens où ils prolongent des règles d’usage dans des environnements matériels. « Il faut savoir tenir son corps , sa tête, ses épaules, positionner ses coudes, ses regards, et attendre le moment approprié pour entamer le repas. Il faut aussi savoir converser tout en se servant de son couteau, de sa fourchette, de son verre, et réussir à 25 Fabrication et usage des écoquartiers. Essai critique sur la généralisation de l’aménagement durable en France, Vincent Renauld, édition PPUR, 2014

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conduire les aliments vers sa bouche sans les renverser puis enfin les mâcher de manière appropriée, ni trop vite, ni trop fort, selon les cas. Puis servir du vin aux invités, c’est habituellement un rituel qui consiste pour celui qui sert à positionner avec justesse la bouteille près du verre, et à éviter que les dernières gouttes ne viennent tacher la nappe (souvent par un petit geste du poignet, ou par un effleurement de la bouteille sur le bord du verre) tandis que celui qui se fait servir montre parallèlement une attention, que ce soit par un geste (tenir le verre), un regard ou une parole de remerciement. » Ces pratiques devenues inconscientes montrent une compétence technique que l’auteur appelle virtuosité. D’après cette définition, l’enquête interroge le rapport qu’entretient la virtuosité des habitants avec les nouveaux objets techniques de l’habitat environnemental. « Il peut s’agir d’innovations dont le fonctionnement technique escompté réduit, par exemple, la facture de chauffage (isolation par l’extérieur, étanchéité à l’air, ventilation double-flux, etc.), d’électricité (interrupteurs ou coupeurs de veille), d’eau (réducteur de débit dans la cuisine, baignoires adaptées à la forme du corps, sols écologiques etc.), ou limite les surchauffes en été, comme en témoigne le développement des façades végétalisées. » Ainsi, comment la virtuosité des habitants fait-elle face à ces nouvelles techniques de l’habitat ? Ce savoir-vivre permet-il aux habitants d’habiter sans y penser ?

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2. le quartier clichy-batignolles Le terrain d’enquête est situé à Clichy-Batignolles. Ce site occupe une position à l’articulation de plusieurs quartiers parisiens, dans le nord ouest de la métropole. Le projet Clichy-Batignolles se déploie sur 54 hectares entre la rue de Saussure, le boulevard périphérique, les avenues de Clichy et de la Porte de Clichy et la rue Cardinet. Le 17ème arrondissement où se situe la ZAC Clichy-Batignolles compte des quartiers anciens, à la fois bourgeois et tertiaires à l’ouest, plus populaires et essentiellement résidentiels au nord. Le quartier s’inscrit aussi dans un triangle reliant le quartier central des affaires parisien, La Défense et la Plaine Saint-Denis. Le quartier s’organise de la façon suivante : « - Au sud, le grand parc central - À l’est, on trouve un certain nombre d’immeubles conservés, et des programmes neufs de logements s’accrochent par leur géométrie aux îlots existants sur l’avenue de Clichy. - A l’ouest, la grande dalle parallèle au faisceau Saint-Lazare accueille une pièce urbaine dense à programmation mixte traversée par la voie principale du quartier. Les logements donnent sur le parc ou le square des Batignolles, tandis que les bureaux sont situés le long de la voie ferrée pour faire écran au bruit. Le relief créé par le remblai historique et la dalle confère à cet ensemble une position de surplomb évoquant une nouvelle butte dans le paysage parisien. De l’autre côté des voies, l’îlot Saussure reçoit également une programmation de bureaux le long du faisceau ferré, la fonction résidentielle étant tournée vers la rue de Saussure et le boulevard Pereire. - Au nord, entre le boulevard Périphérique, le boulevard Berthier et la Porte de Clichy requalifiés, autour de la tour signal du futur palais de justice de Paris (160 m) et d’une offre de transports en commun renforcée, une nouvelle centralité s’installe, rayonnant à la fois sur 49


Immeubles concernés par l’enquête

Nord

CLICHY

Gymnase Biancotto

n2

Terminal de collecte pneumatique

Lycée collège Balzac

n4 Parking autocars Syctom Centre de tri des déchets recyclables

n

n

3

1

Futur palais de justice de Paris Base Fret

Direction régionale de la Police judiciaire

Centrale à béton

n5

Odéon, Théâtre de l’Europe

Décors de l’Opéra de Paris

e e

10a

10b e

Odéon, Théâtre de l’Europe

3

0

Pôle culture loisirs

8

e

9

8 e

(cinéma)

e 0

5

9

e 0

3

4 e

6b e 0

0

6a

Parc Martin Luther King

7 0

Bureaux

0

e

1

4a

5 0

Logements privés et sociaux Futur palais de justice de Paris et direction régionale de la police judiciaire

Po nt

Services urbains Pôle inter-quartiers et « culture-loisirs »

2

4b 0

Pa ss er el le

Plan Programmation

e

7

6

0

3

2

Pôle commercial inter quartiers

1

2 0

1

Commerces, services, activités

M 1 2 3

3 Crèches 1 Halte-garderie 3 Groupes scolaires (maternelles et primaires) 1 centre PMI 1 collège 2 gymnases 1 centre d’animation 1 école maternelle

Transilien Pont Cardinet

Parc de stationnement résidentiel 1 parking rotatif de 200 places 1 parking rotatif de 250 places Nouvelles stations prévues

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Plan de programmation du quartier Clichy-Batignolles © http://www.clichy-batignolles.fr


Paris et Clichy. Les services urbains (centre de tri des déchets recyclables, terminal de collecte pneumatique, base fret, centrale à béton) seront nichés au plus près du boulevard Périphérique et des voies ferrées.»26 Concernant l’offre d’habitation, avec 3 400 logements, ClichyBatignolles promet de contribuer de manière significative à l’effort de production de logements en Île-de-France. La diversité de l’offre affichée semble aller dans le sens de la mixité sociale et intergénérationnelle : personnes âgées dépendantes, étudiants, jeunes actifs, familles ayant besoin de grands logements, ménages de condition modeste. Au moins la moitié des surfaces est destinée au logement social, accessible tant aux plus démunis qu’aux classes moyennes. 20% des logements restant seront à loyer maîtrisé et 30% destinés à l’accession. Les 3400 logements compteront 500 logements pour étudiants et jeunes actifs (dont 400 sociaux) et 200 chambres pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). «Tous les logements, qu’ils soient sociaux ou non, respectent les mêmes exigences de confort et de qualité environnementale. Les règles imposées par l’aménageur visent un très bon confort thermique avec une consommation énergétique limitée. Elles exigent des appartements à la fois bien isolés et laissant pénétrer le soleil, au minimum deux heures par jour en hiver ; l’été, des stores ou des brise-soleil protègent de la chaleur, tandis que la possibilité d’ouvrir les fenêtres sur plusieurs côtés, la plupart des appartements étant multi-orientés, permet d’assurer une ventilation naturelle qui rafraîchit l’air. Ces dispositifs visent à limiter fortement la consommation énergétique.» 27 Engagée en 2005 à l’issue d’une consultation et d’études préalables 26 http://www.clichy-batignolles.fr/les-secteurs-du-projet 27 http://www.clichy-batignolles.fr/demain-6-500-habitants-

clichy-batignolles

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initiées dès 2001, l’opération Clichy-Batignolles doit s’achever en 2018. Entre 2012 et 2014, les travaux se sont intensifiés du côté de l’avenue de Clichy et les livraisons des programmes de logement se succèdent jusqu’en 2015. Les trois premiers immeubles ont été livrés en 2012 et 2013. Ils accueillent les tout premiers habitants de Clichy-Batignolles. Il s’agit de deux immeubles de logements privés et sociaux qui comptent 179 logements, une crèche, une résidence étudiante de 155 chambres et un groupe scolaire. Entre 2014 et 2018, les chantiers battront leur plein sur les secteurs ouest et nord de l’opération : programme de bureaux/ logements/équipements, futur palais de justice, DRPJ, stations de métro et tramway, espaces publics. La date de mise en service du palais de justice est fixée à 2017, comme celle du tramway T3. L’achèvement des derniers chantiers, à l’ouest et au nord du site, est envisagé en 2018-2019. L’ouverture des stations Pont Cardinet et Porte de Clichy sur la ligne 14 du métro est prévue pour mi2019.

3. concertations et ateliers Une large concertation a été créée et se tient depuis 2008 avec les Parisiens et les Clichois. Parmi ces concertations, on compte : des ateliers, des journées « portes ouvertes », des promenades urbaines, des visites de chantier, des débats. Le but de ces concertations est de dialoguer avec les citoyens et de profiter de leur connaissance du quartier. Un «garant» est chargé de faire la synthèse des travaux des différents groupes et de s’occuper de leur restitution. Ainsi j’ai pu remarquer qu’il était très facile de télécharger les comptes-rendus de ces concertations sur le site internet de la ZAC. On peut aussi visionner les ateliers de sensibilisation qui ont eu lieu dans des écoles primaires. 52

Les acteurs des ateliers citoyens de concertation sont les équipes


d’architectes, paysagistes, sélectionnés et les habitants. C’est François Grether, architecte coordinateur de la ZAC qui a animé ces ateliers, en collaboration avec la ville de Paris, sur une durée de six mois de Juin à Décembre 2012. L’objectif était de finaliser les permis de construire avec les habitants. Quatre séances ce sont tenues : Séance 1 : Dialogue autour de la maquette de projet. Les enjeux urbains. Séance 2 : Visite de site et débats autour des conditions de réussite. Séance 3 : Visite de site et débats autour des conditions de réussite. (suite) Séance 4 : Premières propositions et dialogue avec les groupements de concepteurs. Lors de ces ateliers citoyens, les premières craintes des habitants sont verbalisées. Un membre du groupe souhaite savoir si une démarche est engagée pour faire participer les personnes généralement absentes des concertations. A cela, on lui répond qu’il peut émettre des suggestions pour rendre possible ce rapprochement. Dans cette réponse, on comprend que les acteurs du projets ne savent pas comment faire participer les populations absentes et que l’atelier citoyen se tourne exclusivement vers les habitant déjà intéressé par le projet d’écoquartier. Hormis cette question, la première phase du dialogue des ateliers fonctionne plutôt comme un question-réponse entre les citoyens et les aménageurs. Les questions sont à la fois urbaines, volumétriques, pratiques. Dans une deuxième phase, les citoyens sont invités à formuler sur des post-it les questions qui leurs semblent les plus importantes. Ces questions sont ensuite regroupées en cinq groupes : -

Développer la vie culturelle

-

La mixité, l’ambiance urbaine 53


Photographie personnelle du quartier Clichy-Batignolles

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-

Se déplacer. Accessibilité

-

Le dialogue logements / bureaux

-

le développement durable

La question de la mixité prend une place importante pour les citoyens. Ils s’interrogent sur la mise en place d’une mixité générationnelle mais aussi sur le rapport numérique entre les logements sociaux et les logements en accession. Extrait d’Atelier : « Question : Dans un même immeuble, peut-‐il y avoir des logements sociaux et des logements en accession Réponse : Oui, c’est possible. C’est ce qui a été réalisé dans le lot E1 où Nexity a réalisé 20 logements sociaux regroupés autour d’une cage d’escalier. Aujourd’hui dans la première phase du secteur Ouest, les immeubles sont distincts mais partagent des espaces extérieurs mis en commun. » De même que quand la question du développement durable est abordée, c’est finalement les espaces partagés qui suscitent la curiosité. L’appropriation est au cœur du débat. Extrait d’Atelier : « Remarque : L’idée d’éco-quartier est séduisante. Cela nécessite cependant une éducation des gens qui vivent dans cet environnement. Qu’est-il prévu pour sensibiliser les habitants pour assurer un bon fonctionnement des aspects « écologiques » et éviter les dégradations/les mauvais fonctionnements ? sur combien de temps cette sensibilisation est-elle prévue ? » 55


Photographie personnelle du quartier Clichy-Batignolles

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La réponse à cette question ne figurait pas dans les compte-rendus d’ateliers. Ces ateliers citoyens ont été prolongés de Mai 2013 à Janvier 2014.

4. clichy-batignolles, vitrine de la cop 21 La COP21 est l’événement majeur de réponse politique internationale aux changements climatiques. Elle s’inscrit dans le prolongement de la ‘Convention de Rio’ de 1992. Cette convention a développé un projet pour l’action visant la stabilisation des concentrations atmosphériques des gaz à effet de serre (GES) pour éviter une « interférence anthropique dangereuse avec le système du climat ».28 Plusieurs COP se sont tenues ces vingt dernières années : -

La première COP a eu lieu à Berlin en 1995

-

La COP3 où le protocole de Kyoto fut adopté

-

La COP11 où le Plan d’Action de Montréal fut produit

- La COP15 à Copenhague où un accord pour prolonger le protocole de Kyoto ne fut finalement pas réalisé -

La COP17 à Durban où le Fonds Vert pour le Climat fut créé.

En 2015, la COP21, qui se tient à Paris, vise à trouver un accord universel juridiquement contraignant sur le climat. Le but concret est de maintenir le réchauffement climatique endessous de 2°C. La conférence prévoit la venue de près de 50 000 participants, y compris 25 000 délégués officiels. A cette occasion, la France souhaite prouver son engagement en terme de politiques de la ville et de construction de bâtiments durables. Les Écoquartiers deviennent donc la vitrine de cette COP21. C’est 28 http://www.cop21paris.org http://www.cop21.gouv.fr 57


Photographie personnelle du quartier Clichy-Batignolles

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dans cette démarche que plusieurs visites d’Écoquartiers ont été programmées. Et le quartier de Clichy-Batignolles est évidemment concerné. 29 La visite de Clichy-Batignolles est organisée par l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie). Il s’agit d’un établissement public à caractère industriel et commercial placé sous tutelle conjointe du ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie et du ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. La visite du quartier est centrée sur deux spécificités de l’opération : la collecte pneumatique des ordures ménagères et le puits de géothermie réalisé par Eau de Paris. Il s’agit donc de mettre en avant les innovations techniques à l’attention des professionnels de la ville. Et c’est uniquement sous cet angle scientifique qu’est envisagée la visite. Il s’agit aussi de justifier les financements de la Direction régionale de l’ADEME en Île-de-France dont Clichy-Batignolles et d’autres Écoquartiers ont bénéficié. Voici un extrait de la présentation de la visite : « Les besoins énergétiques des bâtiments sont couverts en grande partie par des énergies renouvelables, grâce notamment à un puits de géothermie réalisé par Eau de Paris. Le projet d’un puits de secours dans le nord-ouest de Paris vient conforter en 2013 celui d’un puits géothermique pour alimenter le réseau de chaleur de l’écoquartier, en offrant l’opportunité de mutualiser les coûts. Ainsi, Eau de Paris se voit confier la réalisation d’un ouvrage innovant conjuguant chauffage des habitations et source d’approvisionnement en eau de secours. Aujourd’hui, 83% des besoins en chaleur de Clichy-Batignolles sont couverts par ce puits 29 http://www.clichy-batignolles.fr/visite-de-clichy-batignollesorganisee-par-lademe-pour-la-cop21

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à l’Albien. Sur dix ans, il en résultera une économie en émissions de 35 000 tonnes de CO2. Et pour tendre vers un bilan carbone encore plus faible du site, les consommations incompressibles (ascenseurs, éclairage public...) seront compensées par le développement d’électricité photovoltaïque avec 40 000 m2 de panneaux produisant 4 500 MWh par an. Concernant la gestion de l’eau, le projet vise à réduire de 50 % les rejets d’eau pluviale par système de récupération. Clichy-Batignolles se prête également aux technologies innovantes de gestion environnementale des déchets. Les habitants bénéficient de la première installation parisienne de collecte pneumatique de déchets. Déposés dans des bornes sélectives, ces derniers sont aspirés automatiquement et circulent à 70km/h dans un réseau souterrain de 5km jusqu’au terminal de collecte. Dépressurisés puis compactés, les détritus sont stockés dans des conteneurs qui seront par la suite acheminés vers le centre de traitement. Cette collecte par aspiration réduit considérablement les nuisances sonores et la pollution, d’autant plus qu’elle a démontré à l’étranger des changements de comportement bénéfiques concernant le tri des déchets ! Cette nouvelle technologie s’intègre dans un dispositif global de prévention, de recyclage et de valorisation des déchets. Elle permet de réduire de 42 % les émissions de gaz à effet de serre, de 98 % les émissions de monoxyde de carbone, de 86 % les émissions d’oxyde d’azote et de 90 % les émissions de particules.» Parallèlement à cette visite, il se trouve que des panneaux explicatifs concernant le quartier sont exposés sur le parvis de l’Hôtel de Ville de Paris dans le cadre du thème “Le Paris de l’avenir”. Il s’agit ici d’une opération de communication à destination du grand public. Les affichages présentent, sous forme d’axonométries simplifiées, les innovations techniques mises en place. On peut regretter qu’il ne soit jamais question des enjeux sociaux du quartier. Enjeux qui ont pourtant toute leur place dans le projet 60


du changement climatique et qui en sont même les garants.

5. ce qui est recherche a travers l'enquete En 2025, 85% de la population mondiale vivra en ville contre 50% actuellement. Les villes, qui ne représentent que 2% de la surface totale de la planète, concentrent 80% des émissions de CO2 et consomment 75% de l’énergie mondiale. La nouveauté des écoquartier réside dans le fait d’assumer de vivre en ville pour avoir accès au commodités tout en préservant un cadre le plus naturel possible et respectueux de l’environnement. L’image de pub des écoquartiers est toujours la même : on y voit des familles qui se promènent au milieu de la verdure, des transports en commun, des cyclistes... «L’écoquartier symbolise une certaine densité et un partage réussi des espaces publics mêlant gestion des flux de circulation et agrément»30 Mais les écoquartiers laissent-ils une marge de manoeuvre assez grande aux habitants pour qu’ils s’approprient leur cadre de vie? Pour Pierre Lefèvre, la dimension participative de la ville durable « (…) n’a de sens que si elle s’appuie sur la mobilisation des habitants eux mêmes » A quel point ce type d’urbanisme peut préserver, et valoriser la justice et la mixité sociale ? On constate que la ZAC Clichy-Batignolles a mis en place des moyens de concertation avec les habitants. Les autorités et les acteurs du projet se limitent-ils à ces concertations? Donne-t-on aux habitants les outils dont ils ont besoin pour participer à leur environnement quotidien? Quelle est l’égalité d’accès à la ville? Quel est le rôle de l’espace 30 Une autre ville sinon rien, E. Pélegrin-Genel, Les Empêcheurs

de penser en rond, 2012

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public? L’espace public est un lieu ouvert qui peut être fréquenté gratuitement et librement. Il appartient à tous : aux habitants, aux passants, aux touristes... C’est un espace non-bâti : une rue, une place, un jardin. C’est un lieu où l’on a la liberté de s’arrêter ou bien de circuler sans avoir l’obligation de consommer. C’est un lieu qui peut être support à des rencontres. De même que le jardin, que l’on voit fleurir de plus en plus en ville sous forme de jardin partagé, propose une gestion communautaire qui permet de créer du lien social. Néanmoins, d’après Jean-Louis Violeau et Monique Eleb : «(...) il faut remarquer que dans ces quartiers, les classes extrêmes, très privilégiées ou très populaires, ne sont pas vraiment représentées.»31 Jean Yves Authier explique qu’il n’existe pas nécessairement de rapport entre proximité spatiale et mixité sociale : «(...) les situations de mixités sociale, en dépit des effets bénéfiques que les pouvoirs publics leur prêtent volontiers, génèrent rarement dans les quartiers urbains des relations sociales forte entre les diverses catégories d’habitants, y compris quand ces situations sont le produit explicite de politiques volontaristes de mixité sociale.»32 Le but de l’enquête est donc de mieux saisir la réelle implication des habitants dans l’écoquartier Clichy-Batignolles ainsi que la relation entretenue aux différentes innovations techniques présentent dans l’immeuble ou dans l’habitat.

31 Diversité sociale, ségrégation urbaine, mixité, M-C Jaillet, É Perrin, F Ménard, Plan urbanisme construction architecture, 2008 62


6. preparation des entretiens PRESENTATIONS PRESENTATION DE L’HABITANT Sexe, âge, situation familiale Activité professionnelle Date d’emménagement dans le logement Part de l’achat, de l’emprunt ou de la location dans les revenus PRESENTATION DE L’HABITAT Numéro de l’appartement Situation de l’appartement dans l’immeuble Surface de l’appartement LES ANALYSES LE QUARTIER Les démarches éventuelles qui ont permise l’installation dans l’écoquartier : l’écoquartier a-t-il été choisit par l’habitant? Quel rapport entretient-il avec son ancien quartier? L’habitant peut-il délimiter spatialement son quartier? Comment définie-t-il le type de population du quartier? Quel utilisation fait-il des espaces publics ? Impressions de l’habitant : L’IMMEUBLE 63


Quelle vision a l’habitant de son immeuble et de sa rue ? Quel est l’éloignement du lieu de travail ? Quels sont les moyens de déplacement de l’habitant ? Les commerces fréquentés ? Loisirs fréquentés ? Quels rapports entretient l’habitant avec ses voisins ? Gestion des espaces communs dans l’immeuble : Impressions de l’habitant : L’APPARTEMENT Quel est le ressentie général de l’habitant ? Existe-t-il des espaces extérieurs ? Si oui sont ils utilisés ? Quelles sont les innovations techniques écologiques dans l’appartement ? Comment l’habitant les utilise-t-elles ? Les éventuels problèmes rencontré avec ces innovations ? Les points positifs ? L’habitant reçoit il des invités chez lui? Si non , pourquoi? LES INNOVATIONS TECHNIQUES Quelles sont les innovations techniques dans l’immeuble? Quelles sont les innovations techniques dans le logement ? Comment en a-t-il eu connaissance ? Comment s’en sert-il ? 64


Sont elles détournées ? Si oui, pourquoi ? Comment ? L’habitant a-t-il participé aux concertations du quartier avant d’emménager ? Et aujourd’hui ? Si oui, qu’en pense-t-il ? Se sent-il acteur du projet ?

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Residence CROUS © Agence Phileas

Immeuble Monts et Merveilles © Agence Jean Bocabeille

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Immeuble La Sablière © Agence Antonini et Darmon


QUATRIEME PARTIE : L’enquête

Les différents entretiens ont été menés au sein de trois immeubles de la zone Est de l’écoquartier Clichy-Batignolles. La Zone Est est actuellement la seule habitée et concerne la ZAC CardinetChalabre. Ces trois immeubles d’habitation sont les suivant : - Une résidence étudiante CROUS qui occupe un ilot situé entre le parc, l’Hôtel Ibis et l’impasse Chalabre. Cet immeuble accueille aussi un programme de groupe scolaire et une cuisine centrale des cantines. Les architectes du projet sont l’agence Phileas. L’immeuble est composé de deux entités de 7 étages. Les façades sont composées de brise-soleil en bardeau de terre cuite. L’école se trouve dans un socle de 3 étages dont une partie des parois est végétalisées. En terme d’innovation techniques, on compte par exemple 700 m2 de capteurs photovoltaïques en toiture, une végétalisation des espaces extérieurs avec façade et toiture végétalisées et le raccordement à une boucle d’eau chaude utilisant majoritairement les énergies renouvelables. - L’ensemble « Monts et Merveilles » de l’agence Jean Bocabeille. Il se situe à l’angle de la rue Cardinet et d’une nouvelle voie de desserte. On trouve dans cet ilot une grande diversité programmatique : logements sociaux et en accession, Etablissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), centre cultuel et commerces. Trois entités distinctes ont été créées. En bordure de parc, un premier ensemble accueille les logements en accession et le centre cultuel en rez-de-chaussée. En cœur d’ilot se trouve l’EHPAD de 128 lits. Le troisième ensemble concerne des logements sociaux et des commerces. Et c’est ce troisième ensemble qui est concerné par les entretiens. Parmi les innovations techniques on compte, des toitures en partie végétalisées, une isolation extérieure et une cuve de récupération des eaux de pluies. - Les deux immeubles de la résidence « La Sablière » des architectes Antonini et Darmon. Ces immeubles qui accueillent 67


exclusivement du logement social présentent un jeu de balcons taillés dans la façade ou traités en saillie et colorés. Les logements sont tous accessibles et adaptés aux personnes à mobilité réduite et les habitants bénéficient d’un parking en sous-sol. Concernant les innovations techniques, on peut citer les 450 m2 de panneaux photovoltaïques et solaires en toiture, une isolation par l’extérieur et un raccordement à une boucle d’eau chaude utilisant très majoritairement les énergies renouvelables. Enfin, nous pouvons noter que 74% des logements sont traversants, à double orientation ou triple orientation, ce qui permet une ventilation naturelle l’été. Les entretiens m’ont permis de mieux comprendre les trajectoires d’accession aux logements des habitants et de saisir le décalage qui existe entre le projet de la ZAC et le vécu des usagers.

1. UNE INSTALLATION FORTUITE Les différents habitants interrogés se sont vu attribuer un logement dans le quartier de différentes manières. Les entretiens présentent trois cas distincts : le pourcentage patronal, le logement CROUS et la demande de logement social. Le pourcentage patronal dépend de la société Action logement qui permet à un locataire à la recherche d’un logement d’avoir recours à l’Offre de logements locatifs. Via celle-ci, le Comité Interprofessionnel du Logement (CIL) recherche pour lui un logement dans les catégories concernées par l’offre. L’organisme fait ainsi figure d’intermédiaire entre le locataire et le bailleur.33 Pour accéder à un logement CROUS en résidence universitaire, l’étudiant doit constituer une demande de Dossier Social Etudiant (DSE). Les logements gérés par le CROUS sont prioritairement attribués aux étudiants dont la famille dispose de faibles ressources. Les critères retenus prennent en compte les revenus de l’étudiant et de ses parents, la composition de la famille, l’éloignement géographique du domicile familial et les résultats 68

33 http://www.actionlogement.fr


universitaires.34 Enfin, pour la demande de logement social il faut constituer un dossier à la mairie. Les logements HLM sont réservés à des personnes dont les ressources n’excèdent pas un plafond qui varie en fonction du nombre de personnes vivant au foyer et du lieu d’habitation. La demande est ensuite inscrite dans le système national d’enregistrement de la demande de logement social. Il compte actuellement 1,8 million de demandes actives en France. Les organismes et les réservataires de logements sociaux contactent les demandeurs lorsqu’un logement correspondant à leur profil se libère sur leur parc.35 Dans ces trois cas, le futur locataire est contacté pour une proposition d’appartement correspondant à ses voeux et ne choisit ni son quartier ni son logement. L’installation dans le quartier de Clichy-Batignolles est donc fortuite pour ces habitants. En ce sens, ils ne sont pas inscrits dans une démarche active et volontaire vis à vis de l’écoquartier. On comprend aisément que dans ce cas de figure, les habitants ne sont pas des experts en terme d’innovations techniques écologiques. Ce sont des habitants qui n’ont pas participé aux réunions de concertations post-projet puisqu’ils sont arrivés dans le quartier une fois que les appartements étaient disponibles à la location. La question est de savoir s’ils sont ensuite accompagnés dans l’appropriation des éléments techniques, et s’ils développent un intérêt vis à vis du mode d’habiter écologique. Le projet urbain, avant tout écologique, qui se targue de favoriser la mixité sociale est-il générateur de lien entre les habitants ? Extraits d’entretiens : « - Est ce que c’était une volonté pour vous d’habiter dans un écoquartier ? - Non pas spécialement. C’est plus l’occasion qui s’est présentée. Je savais même pas que c’était un écoquartier à la base... (rire) » (entretien du 02 décembre, Mlle Marzof) « - D’une façon générale comment trouves-tu la vie dans cet 34 http://www.cnous.fr 35 https://www.demande-logement-social.gouv.fr

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écoquartier ? - Avant d’y habiter, j’avais une mauvaise vision du quartier parce que je croyais que c’était un quartier périphérique et tout. Mais en fait même maintenant personne ne le sait que cet écoquartier existe ! » (entretien du 27 octobre, Mlle Scarponi) On remarque que les habitants interrogés garde pour la plupart un lien avec leur ancien quartier, et ce quelle soit la date de leur emménagement dans le quartier. Ils continuent de fréquenter leur ancien quartier pour des raisons pratiques mais aussi parcequ’ils y ont encore des attaches. Même s’ils ont déjà pris leurs marques dans ce nouveau quartier, le fait qu’il ne soit pas encore achevé rend l’appropriation difficile. Les commerces ne sont pas encore tous sortis de terre, le futur cinéma qui doit être implanté au Nord sur le Boulevard Berthier n’a pas encore vu le jour. Il devrait accueillir sept salles. Un centre d’animation de 1000 m² prendra place lui aussi à l’angle du boulevard Berthier et de la voie nord/sud. Les habitants y trouveront des salles d’activités (danse, arts plastiques…), une salle de spectacle, des espaces dédiés à la musique ainsi qu’une salle de pratique de la cuisine et un café-ciné. La livraison de cet ensemble est prévue pour fin 2018. Au niveau des commerces, dans la zone Est où ont été menés les entretiens, un Intermarché de 750 m2 va ouvrir. Extrait d’entretien : « - Au niveau des commerces, où est ce que vous vous rendez ? - Je vais plutôt de l’autre côté (signe montrant l’avenue de clichy) - Et concernant vos loisirs ? - Je vais au théâtre Hebertot, plus bas vers la place de clichy. Et sinon je vais donc à la piscine dans mon ancien quartier. » (entretien du 05 décembre, M Durane) 70


Les habitants interrogés bénéficient d’un logement dont le prix est adapté à leurs revenus. C’est cet argument qui a pris le dessus pour leur arrivée dans le quartier. Ils n’ont pas choisit leur appartement mais semblent tous satisfaits. A la fois parce que la superficie est suffisante au vu de leur configuration familiale mais aussi parce qu’ils bénéficient d’espaces extérieurs privatif et d’un ensoleillement privilégié dans les choix architecturaux et rendus possibles par la proximité du parc Martin Luther King. Extraits d’entretiens : « - D’accord... Maintenant on va parler de ton appartement. Est ce que tu l’as choisit ? - Non . Comme je te disais ils sont un peu tous différents ils font soit 20 m2 soit 23 m2. Mais moi je suis la première à coté de l’ascenseur alors il est un tout petit peu différent. En tout cas avec le CROUS tu peux pas visiter. On te dit « on a un appartement de libre ici. » et tu dis oui ou non.(...) - Est ce que tu trouves ça suffisamment grand ? - Oui c’est assez grand pour Paris. Et c’est cool parce que sous le lit il y a un autre matelas dans un tiroir. » (entretien du 27 octobre, Mlle Scarponi) « - Au niveau de l’appartement, est ce que vous êtes globalement satisfaite ? - Oui très ! - Parce qu’il est très grand ? - Bah oui, il fait 50 m2. Avant j’avais que 40 m2 donc ça fait quand même 10m2 de plus ! Il est au dernier étage donc c’est hyper lumineux et avant j’avais un immeuble à cinq mètres en face de moi. On a une super grande terrasse ! C’est top. Il manque juste une chambre pour qu’on puisse rester super longtemps mais c’est juste ça qui nous fera partir je pense. En plus on a une place de parking en sous sol. » (entretien du 02 décembre, Mlle Marzof) 71


« -

Quelle vision vous avez de votre immeuble ?

- L’immeuble en lui même est très agréable. Très lumineux, enfin en tout cas me concernant. Euh très bien agencé... Plutôt positif comme avis. Et puis je sais que tous les logements sont accessibles aux handicapés donc la mairie a attribué des logements aussi à des personnes handicapées. Je trouve ça bien. C’est rare les immeuble comme ça où tout est accessible. » (entretien du 05 décembre, M Durane) « -

Qu’est ce que vous en pensez ? Vous êtes satisfait ?

-

Oui, très

-

Vous avez des espaces extérieurs ?

- Oui, j’ai deux balcons. Un ici (cf rue René Blum) et un de l’autre côté (rue Bernard Buffet). Du coup j’ai la vue ici et là bas. » (entretien du 05 décembre, M. Yuan) On peut dire que selon l’étude sociologique de Barbara Allen, ils se situent à mi-chemin entre la famille du repli et celle de l’investissement possible. En effet, ces habitants s’investissent à l’échelle du logement dont ils parlent d’une manière positive et avec entrain. Et dans le même temps, aucun des habitants interrogés n’a d’avis tranché sur le quartier que ce soit de manière positive ou négative. Même si l’installation dans le quartier n’a pas été choisie, elle semble être globalement une bonne surprise pour les habitants. Tous semblent y voir un quartier en devenir dans lequel est installée une population très diversifiée socialement et comptant plusieurs générations. Cet aspect « mixte » du quartier est naturellement verbalisé et apparaît comme un atout à leurs yeux.

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Extraits d’entretiens : «


- C’est (aussi) la valorisation d’un ancien lieu périphérique. Et puis les habitants sont tous différents et ça c’est bien. Ici c’est multiculturel. Contrairement à certains quartier de Rome où j’habitais avant et même comparé au 5ème arrondissement.» (entretien du 27 octobre, Mlle Scarponi) « - Comment vous définiriez le type de population qui habite dans cet écoquartier ? - Assez mixte je trouve. Enfin... Pour moi c’est un quartier qui est en train de vachement changer en fait. J’pense qu’à la base c’était un quartier qui était pas hyper euh... Enfin c’est un peu un stéréotype mais pas très bien fréquenté. Je sais que vers Porte de Clichy c’est un peu plus craignos et ils sont en train de faire plus de mixité entre les populations ici. Contrairement à l’autre côté qui est au contraire hyper riche. Donc j’pense qu’ils essayent plus de mixer les populations ici. » (entretien du 02 décembre, Mlle Marzof) « -

Quel type de population habite ici selon vous ?

-

Mixte. Très mixte » (entretien du 05 décembre, M Durane)

Au delà de l’aspect mixte du quartier, le fait de se trouver dans un quartier écologique intrigue les habitants qui ne disposent pas de beaucoup d’informations mais leur en donne aussi une vision positive du quartier. Ils ont la sensation d’habiter un lieu innovateur même s’il ne le ressentent pas forcément au quotidien. Et le fait d’habiter de façon écologique sans s’en rendre compte est peut être quelque chose de positif. Cela signifie qu’il est possible, jusqu’à une certaine limite, de vivre selon ses habitudes sans en être empêché par les dispositifs écologiques de l’immeuble. Comme si les installations type panneaux photovoltaïques travaillaient parallèlement à fournir les logements en énergies sans que les habitants n’aient à se préoccuper d’avoir suffisamment 73


d’électricité par exemple. Extraits d’entretiens : « - En tant qu’étudiante qu’est ce que tu en pense d’habiter dans un écoquartier ? - Je pense que c’est le commencement d’un nouvel activisme des conscience. » (entretien du 27 octobre, Mlle Scarponi « - Etes-vous contente finalement d’habiter dans un quartier écologique ? - Bah en fait moi j’aime bien le concept mais au sein de l’immeuble je trouve qu’on est pas impactés. En fait, l’autre fois j’ai découvert qu’il y avait des panneaux solaires mais je ne le savais même pas. C’est en allant à la maison du projet que je l’ai découvert. Mais si j’avais pas fait la démarche je pense que je ne m’en serrai jamais aperçue alors que au final ils sont juste au dessus de mon appartement. » (entretien du 02 décembre, Mlle Marzof) On s’aperçoit donc que malgré l’installation fortuite des habitants, ils ont une vision positive à la fois de leur quartier et de leur appartement. Ils ne se sont pas encore totalement approprié les lieux mais on peut imaginer que l’arrivée des commerces et des différents lieux de cultures rendra le quartier plus vivant et qu’ils le découvriront au fur et à mesure de sa construction.

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2. UNE PARTICIPATION AUX CONCERTATIONS TOUTE RELATIVE Si l’arrivée post-projet ne semble pas poser de problème quant à l’attribution du logement, elle est un vrai frein à la participation des habitants aux concertations et même à la bonne diffusion des informations relatives au quartier. Les habitants interrogés n’ont pas participé aux réunions de concertations puisqu’elles ont eu lieu avant leur emménagement. Ce qui pose problème c’est que les habitants les moins bien informés au départ restent les même une fois le projet terminé. En effet, les participants des concertations sont ceux qui étaient déjà sensibilisés aux questions écologiques et qui désiraient s’investir dans le projet. Ce qui engendre un profond déséquilibre dans l’investissement du quartier entre habitants. De plus, même si les zones sont maintenant définies et les choix actés, la maison du projet continue de mettre en place des actions qui pourraient permettre de créer du lien social entre voisins. Comme la mise en place d’une AMAP (Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne) par exemple. Or les habitants interrogés n’ont pas connaissance de ce qui se passe à la maison du projet. La seule information qui arrive globalement jusqu’à eux tous, est le bulletin d’information relatif aux voiries et aux problèmes qu’engendrent les travaux en cours. Extraits d’entretiens : « - Est ce que tu as déjà participé aux concertations du quartier ? - Non mais j’ai toujours eu envie d’aller aux visites et aux conférences - Comment as-tu été informée de l’existence de ces concertations ? 75


- On reçoit la mise à jours des travaux dans nos boites aux lettre et il y a les dates des conférences. » (entretien du 27 octobre, Mlle Scarponi) « - Est ce que vous avez participé aux concertations qui sont organisées par la maison du projet pour faire se rencontrer les habitants? - Non a part euh... le truc d’une association pour les légumes avec des agriculteurs... ça je m’étais renseignée. -

C’est une AMAP ?

-

Ouai c’est ça.

(...) - D’accord. Et est ce que vous recevez dans votre boite aux lettres les petits bulletins d’informations sur l’avancement des travaux ? - Ouai, ça par contre ouai. Surtout que notre rue ils viennent de la faire donc on voulait savoir parce qu’ils bloquaient les accès. Et aussi vers Porte de Clichy pour le tram. -

Donc ça vous intéresse ? Vous le lisez ?

- Bah oui parce qu’on utilise pas mal la voiture donc ça impacte pas mal notre quotidien. - Et vous ne participez pas aux concertations parce que ça ne vous intéresse pas ou alors parce que vous n’avez pas le temps ? - Bah j’étais pas au courant. Mais même maintenant que je suis au courant, je sais pas si je m’impliquerai parce que je suis en location. Je pense que ce serait un autre engagement si j’avais acheté en fait. Parce que là je sais que je ne vais y rester que quelques années. »(entretien du 02 décembre, Mlle Marzof)

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Le fait que les habitants se soit installés dans le quartier par le biais d’intermédiaires tel que la mairie, ou le CROUS explique aussi la distance qui existe entre eux et la maison du projet. Si les habitants rencontrent un problème dans leur quartier ils se tournent vers ces institutions. Ce mode de fonctionnement encourage l’entre-soi. De plus, on remarque que le statut de locataire n’encourage pas les habitants à s’investir dans le projet ou à se renseigner d’avantage. Ils ont la sensation que ça ne les concerne pas puisqu’ils n’ont pas acheté. Il ne s’agit pas pour eux d’un projet de vie dans lequel ils s’engageraient. Mais plutôt d’une étape de leur vie qui les a amenés, un peu par hasard, dans cet écoquartier. Extraits d’entretiens : « - Il y a un gardien qui est très sympa là bas vers la maison du projet. C’est quand même une sécurité quand on rentre tard. Parce qu’on a eu un problème avec la lumière ! Les lampadaires fonctionnaient que vers l’hôtel IBIS. Et le soir tu vois même si le parc est fermé, y a des gens et sans lumière tu peux pas savoir qui c’est... ça peut être dangereux. Du coup moi j’ai envoyé un mail au CROUS et ils m’ont dit de contacter la mairie. Alors j’ai contacté la mairie, qui m’a dit de contacter le CROUS... Bon au final je suis allé voir l’hôtel IBIS avec une copine et deux jours plus tard ça fonctionnait... » (entretien du 27 octobre, Mlle Scarponi) « - Et vous ne participez pas aux concertations parce que ça ne vous intéresse pas ou alors parce que vous n’avez pas le temps ? - Bah j’étais pas au courant. Mais même maintenant que je suis au courant, je sais pas si je m’impliquerai parce que je suis en location. Je pense que ce serait un autre engagement si j’avais acheté en fait. Parce que là je sais que je ne vais y rester que quelques années. » (entretien du 02 décembre, Mlle Marzof) « -

Qu’est ce que vous en pensez d’être dans un quartier

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écologique ? - Je trouve ça bien. C’est le propriétaire qui nous a expliqué l’organisation. -

Vous voulez dire les personnes chargées des HLM ?

-

Oui voilà » (entretien du 05 décembre, M. Yuan)

Le sujet qui intéresse tous les habitants (ou presque) et sur lequel ils se renseignent reste les transports en commun. La ligne 13 est très mal vue par l’ensemble des habitants interrogés et ils tentent tous de trouver des alternatives pour ne pas l’utiliser. C’est pourquoi l’arrivée de la ligne 14 et du tramway est attendu avec impatience. A ce sujet, ils font en sorte d’être bien informés. La mobilité, comme le souligne Jean-Yves Authier36, permet aux citadins de conjuguer des pratiques de sociabilité dans le quartier et en dehors de celui-ci. Et le fait d’entretenir des relations dans d’autres territoires urbains peut favoriser les rapports avec le voisinage. Les habitants qui entretiennent des relations diversifiées, et non-dépendantes sont ceux qui voisinent le plus. L’attachement au quartier va de pair avec un rapport cosmopolite à la ville. Un quartier est une petite partie d’un système plus large et faciliter les liaisons spatiales est crucial pour la vitalité d’un quartier. On sait que l’isolement spatial renforce l’isolement social. La mobilité physique rendue possible par les moyens de transports encourage les rencontres dans l’espace public et l’échange social en général. Le fait d’avoir le choix de passer ou non du temps dans son quartier donne à l’habitant une vision non-subie de son intégration dans le quartier. Extraits d’entretiens : «

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36 Diversité sociale, ségrégation urbain, mixité, Les pratiques sociales de coprésence dans les espaces résidentiels, mixité et proximité, Jean-Yves Authier, 2008


- Est ce que tu trouves qu’il y a assez de transport dans ton nouveau quartier ? - Oui parce qu’on est pas loin de la place de Clichy et là bas y a tout. Mais ce sera encore mieux quand il y aura la ligne 14. T’as vu là bas ils construisent le nouveau métro !? - Oui oui j’ai vu, ils prolongent la ligne 14. » (entretien du 27 octobre, Mlle Scarponi) « - La ligne 13 c’est juste un cauchemar. Moi j’évite au max de la prendre parce que c’est horrible. Je laissais passer deux métros avant de pouvoir rentrer et quand on rentre on est collés comme des sardines. Moi je déteste ça. Surtout le matin, c’est le truc qui met de mauvaise humeur. J’préfère limite prendre le bus qui emmène direct à Saint Lazare aussi. -

Vous avez vu qu’il y a un nouveau métro là qui va arriver ?

- Ouai ouai ouai ! On a hâte tous c’est clair ! En plus la 14... Avant j’habitais dans le 13e et c’est une ligne que j’avais l’habitude de prendre dans l’autre sens. Bah pour aller travailler je la prenais jusqu’à Châtelet et puis jusqu’à Bibliothèque. Enfin bon j’aime bien cette ligne (rire) (...) -

Et quand vous sortez le soir ?

- On va au cinéma qui est place de Clichy c’est pas très loin et sinon je prends le métro. Les bars ici c’est pas...top » (entretien du 02 décembre, Mlle Marzof) « - Vos moyens de déplacement sont donc... le vélo et le métro ? - vélo

Bah quand il pleut. Vraiment quand je peux pas prendre le

-

Du coup vous n’attendez pas spécialement l’arrivée de la

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Plan des transports du quartier Clichy-Batignolles Š http://www.clichy-batignolles.fr


PORTE DE CLICHY

13

10 DUROC

CLUNY - LA SORBONNE UNIVERSITÉ PARIS LA SORBONNE

Plan du trajet université-domicile pour Mlle Scarponi

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ligne 14 ? - Bah ça va rien changer pour moi, après c’est bien si ça désencombre la ligne 13 » (entretien du 05 décembre, M Durane)

3. DES ESPACES PARTAGES INEXISTANTS OU DELAISSES Au sein des immeubles, la promesse de multiplier les lieux partagés n’est pas toujours respectée. Malgré la revendication du projet, on observe que les immeubles « La Sablière » et « Monts et Merveilles » ne disposent pas de lieux partagés destinés aux habitants. En revanche dans la résidence du CROUS, il existe en effet une salle commune à tous les étudiants. Elle se situe au 3eme étage mais un problème généralisé à tout l’immeuble fait que le wifi ne fonctionne pas et que dans cette salle en particulier, il n’y a pas non plus de routeur internet sur lequel se brancher. Cette salle commune qui pourrait servir aux étudiants pour travailler est donc délaissée. On y trouve du mobilier et un babyfoot mais l’ambiance ne prend pas. Au delà des dysfonctionnements, il me semble qu’une « timidité d’utilisation » est aussi la cause d’une non-appropriation. Les habitants n’ont pas l’habitude de partager des espaces au sein d’un immeuble : ils ne se sentent pas aussi à l’aise que s’ils étaient dans un espace d’intimité et ils ne sont pas non plus à distance comme dans un lieu public. C’est un entre-deux qu’ils n’ont pas encore apprivoisé . Il leur faudrait peut être un prétexte pour se rendre dans cette salle et faire la connaissance des autres étudiants. Par exemple l’utilisation de leur ordinateur si la wifi était installée. Mais d’autres dispositifs pourraient être imaginés. Enfin, des terrasses étaient initialement prévues pour un usage collectif à différents niveaux des immeubles: il y en a 5 en tout, elles sont différenciées en façade par un habillage vert qui tranche avec l’ensemble du bâtiment. Mais ces terrasses sont en réalité fermées. Aucune raison à cela n’a été communiquée aux habitants. 82


« - Est ce qu’il y a des parties communes ? Des espaces de rencontre ? - Oui au 3ème étage mais c’est pas utilisé. Tu vois c’est là ( elle montre la façade du doigt) sur tout l’étage. En fait ici, des représentants des étudiants sont élus et ils organisent des trucs. Par exemple on a eu un pot de bienvenue et puis là, bientôt il va y avoir la fête d’Halloween. Mais le problème, et c’est quand même dingue, c’est que dans ce nouvel immeuble, y a pas de wifi ! Même dans les studios on doit se brancher avec le câble, ça marche pas. Du coup la salle commune même si elle est grande, on peu pas travailler là bas sans internet. En plus y a même pas de routeur pour se brancher. Donc voilà c’est pour ça que personne y va. » (entretien du 27 octobre, Mlle Scarponi) Ces espaces communs étaient selon moi une bonne idée qui n’a pas été concrétisée correctement. Ils auraient pu permettre aux habitants de créer du lien social plus facilement que dans un espace public. A l’échelle de l’immeuble, l’appropriation est plus facile et cela aurait pu permettre aussi aux étudiants de trouver un prolongement à leurs studios. Les petites surfaces des appartements seraient mieux vécues si les vrais espaces de vie étaient mutualisés, ouvert à tous. Dans chacun des trois immeubles où ont été menés les entretiens, les habitants avaient un local à vélo à disposition. Cet espace commun rencontre un vrai succès. Les locaux à vélo sont tous complets. La proximité du parc et l’attente de la ligne 14 du métro pousse les habitants à se déplacer en vélo. Et finalement, cet espace devient un lieu d’échange. Ce support là fonctionne mieux que la salle dite commune car chacun à un raison pratique de se trouver là. De plus, le fait d’être des cyclistes est porteur d’un intérêt commun qui peut permettre d’engager plus facilement la conversation. «

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Photo de l’espace commun de la Residence CROUS © S. Garzia

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Photographie personnelle du Jardin de Perlimpimpin, Clichy-Batignolles

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- Oui oui j’ai vu, ils prolongent la ligne 14. Si tu devais délimiter ton quartier spatialement, tu donnerais quels repères ? - Euh... je dirais Porte de Clichy, place de Clichy et... l’Arc de Triomphe. Au début pour l’arc de triomphe j’avais pas remarqué qu’on était à côté, c’est depuis que je me suis baladé en vélo ! (…) Le local à vélo qui est bien grand. » (entretien du 27 octobre, Mlle Scarponi) Aux abords du Parc Martin Luther King, deux jardins partagés ont pris place. Ces deux espaces de 320 et 170 m2, sont gérés par des associations et ouverts à tous. L’un d’eux est géré par l’association « Le jardin de Perlimpinpin ». Il s’agit de celui qui a une surface de 170 m2. Il compte 20 parcelles individuelles pour les membres de l’association, une parcelle de 17 m2 qui est attribuée à une classe maternelle du quartier et une autre de 30 m2 qui est réservée à un usage collectif. Le jardinage fait partie du projet de deux classes dans l’école Maternelle Brochant. Les enfants viennent environ toutes les 5 semaines pendant 1 h. Le montant de l’adhésion à l’association est tout à fait raisonnable et cet espace est un vrai lieu de rencontre. Mais là aussi on observe une contradiction : Les habitant du quartier ne sont pas prioritaires. Et les places sont prises d’assaut par tous les parisiens qui viennent parfois en métro pour pouvoir cultiver des légumes. Encore une fois, cet espace pourrait être le socle de rencontres pour les gens du quartier mais il est plutôt le résultat d’une gentrification à petite échelle. L’accès au jardin pour l’école Maternelle Brochant reste un bon moyen pour que les enfants du quartier en profitent.

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4. LE DETOURNEMENT DES INNOVATIONS L’utilisation des innovations techniques est certainement l’aspect le plus préoccupant de l’enquête. Même si certaines choses fonctionnent, j’ai pu observer de vraies aberrations. Les immeubles sont tous raccordés à un système de collecte pneumatique des déchets. Au rez-de-chaussée des immeubles, les habitants trouvent des trappes de différentes couleurs. Chaque couleur correspond à un type de déchet trié. Ces bornes sont accessibles aux personnes à mobilité réduite. L’usager doit seulement appuyer sur un bouton pour déclencher l’aspiration de sa poubelle. Ce système d’aspiration appelé turbos-extracteurs permet d’acheminer les déchets dans des conduits souterrains jusqu’au terminal qui se trouve dans la zone Nord du quartier, boulevard Douaumont. Les déchets recyclables sont ensuite acheminés vers le centre de tri voisin, les autres sont compactés avant transport vers le centre d’incinération de Saint-Ouen. Ce système plutôt simple d’utilisation implique que les habitants fassent préalablement le tri de leurs déchets. Or la bonne volonté des habitants est parfois contrariée : les étudiants de la résidence CROUS ont chacun dans leur studio trois compartiments pour trier leur poubelle. Les sacs poubelles leur étaient fournis jusqu’à ce que la société VEOLIA arrête sous prétexte que le tris était mal fait par les étudiants. Au lieu d’organiser une réunion d’information pour leur expliquer ce qu’ils ont à faire, la réponse au problème est tout de suite répressive. D’autant que le fait de supprimer les sacs leur fait peut être faire des économies mais le problème n’est pas réglé pour autant puisque les poubelles partent toujours dans le système de collecte pneumatique. Dans l’immeuble de La Sablière, le problème concerne la taille des sacs. Ils ne sont pas fournis aux habitants et ne devraient normalement pas excéder 30 litres sans quoi les bornes se bouchent. L’entreprise est alors obligée de se déplacer. En attendant sa venue, les habitants doivent se débrouiller avec leurs poubelles. Dans ce cas de figure, on se dit que les sacs poubelles 88


devraient être fournis aux habitants pour qu’ils puissent habiter sans y penser. Extraits d’entretiens : « - Maintenant si tu devais donner les points positifs et les points négatifs de ton immeuble? - En positif, je dirais que les poubelles c’est cool : en fait tu les met dans la machine, tu appuies sur le bouton et ça tombe ! Enfin je te montrerai c’est un peu dur à expliquer. Avant on faisait le tri, on avait trois sac différents avec chacun une couleur. Mais depuis cette année, la société qui donne les sacs à arrêter de nous les donner parce qu’ils disent qu’on fait pas bien le tri. Ils disent « les étudiants ils font n’importe quoi ils mélangent tout » et puis ils ont dit aux gens du CROUS que ces sacs là sont chers. Apparemment pour une année ça leur coute 6000 euros. Bon, moi j’ai trouvé chez Super U des sac à peu près pareil, avec des trous sur le coté aussi. Mais c’est sur que ça donne moins envie. Avant on avait nos sacs de trois couleurs à disposition, là il faut faire l’effort... » (entretien du 27 octobre, Mlle Scarponi) « - Est ce que vous disposez d’innovations techniques écologiques dans votre logement ? - Bah il y a le tri des poubelles en bas. Donc les trois compartiments et puis donc on met les poubelles directement dedans et elles sont... aspirées. Enfin je ne sais pas trop comment ça marche mais je crois que ça va directement au tri. Mais d’ailleurs les poubelles ça pose un problème. -

Ah bon ? Lequel ?

- Et bien normalement on doit mettre des sacs de 30 litres maximum et puis les gens mettent des trop gros sacs. Alors je ne sais pas si c’est parce qu’ils sne sont pas au courant... Mais en tout cas ça bouche les compartiments. Alors après il faut attendre

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Axonométries des innovations techniques écologiques © http://www.clichy-batignolles.fr


qu’une entreprise vienne déboucher. Donc en attendant, soit on garde les poubelles dans l’appartement, soit elles stagnent en bas. » (entretien du 05 décembre, M Durane) Enfin, dans l’immeuble Monts et Merveilles, l’habitante interrogée signale que l’eau met beaucoup de temps à chauffer chez elle. Elle suppose que cela est du au fait qu’elle habite au 9ème étage. C’est elle qui souligne que ce n’est pas très écologique et que malgré leur bonne volonté, ils sont obligés de laisser couler l’eau pour qu’elle chauffe. Extraits d’entretiens : « - Est ce qu’il y a des innovations techniques écologiques dans votre appartement ? - Les poubelles en bas, on a le tri en fait. C’est des trappes carton/plastique, poubelle normale, et verre. Et sinon, non il n’y a rien d’autre. C’est du chauffage central. Au final c’est pas du tout écologique parce que pour l’eau par exemple, on est obligés de faire couler l’eau cinq minutes avant d’avoir de l’eau chaude au neuvième étage. Sinon on a pas d’eau chaude donc c’est un peu a galère. De ce côté là c’est un peu dommage. C’est du gaspillage. Mais on a pas le choix si on veut se laver avec de l’eau chaude malheureusement... - Est ce qu’il y a des petites affiches dans l’immeuble pour vous sensibiliser à l’écologie ou ce genre de choses? - Euh pour le tri en bas dans les poubelles mais encore il y a des choses que je ne sais pas. Par exemple les cartons qui sont gros, les encombrants, je sais même pas où il faut les mettre. Enfin il y a une pièce dédiée mais la gardienne ne veut pas qu’on les mette là parce qu’elle dit que ce n’est pas son travail de sortir les poubelles. Donc je crois que le lundi tous les quinze jours il faut mettre les objets au coin de la rue et ils passent. Mais bon en attendant... Nous ça va on a un balcon mais ceux qui ont pas de balcon ils doivent garder tous leurs cartons chez eux » (entretien du 02 décembre, Mlle Marzof)

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Axonométries des innovations techniques écologiques © http://www.clichy-batignolles.fr


Au delà de cette bonne volonté contrariée, il existe aussi un vrai manque d’information et de sensibilisation. Dans la résidence Monts et Merveilles, l’interrogée souligne qu’elle a découvert très récemment l’existence des panneaux photovoltaïques sur le toit de son immeuble. Et les habitants de l’immeuble La Sablière l’ignorent certainement puisqu’ils ne m’en ont parlé à aucun moment. Il est dommage qu’ils ne soient par informés sur le fonctionnement énergétique de leur immeuble. D’autant que cette innovation ne modifie en rien leur quotidien et qu’il s’agirait simplement de faire preuve de pédagogie pour leur expliquer ce qui a été mis en place. « - Et vous êtes contente finalement d’habiter dans un quartier écologique ? - Bah en fait moi j’aime bien le concept mais au sein de l’immeuble je trouve qu’on est pas impactés. En fait, l’autre fois j’ai découvert qu’il y avait des panneaux solaires mais je ne le savais même pas. C’est en allant à la maison du projet que je l’ai découvert. Mais si j’avais pas fait la démarche je pense que je ne m’en serrai jamais aperçue alors que au final ils sont juste au dessus de mon appartement. » (entretien du 02 décembre, Mlle Marzof) L’habitante interrogée dans la résidence du CROUS explique elle, qu’une salle entière est réservée aux machines à laver et que cette laverie est accessible à tous. Les machines sont déjà équipées en produits écologique et la gardienne de l’immeuble les recharge régulièrement. Or l’habitante rajoute son propre produit avant de lancer sa machine car sans ça elle ne retrouve pas l’odeur de lessive dont elle a l’habitude. Là encore, un vrai travail de sensibilisation reste à mener pour expliquer aux habitants que même sans l’odeur chimique de lessive, leurs vêtements sont correctement lavés. 93


«

- Il y a une salle avec des machines à laver. Elles sont déjà équipées avec du produit écologique donc normalement on a pas besoin de rajouter de la lessive mais j’en achète quand même parce que je trouve que sinon ça sent pas bon - Est ce que quelqu’un est venu vous expliquer chacune de ces innovations techniques ? - Non personne ne nous a expliqué. » (entretien du 27 octobre, Mlle Scarponi) Les différents habitants font preuve d’une certaine virtuosité, comme le remarque Vincent Renauld dans son enquête. En d’autres termes, ils sont capable de s’adapter voir de détourner ce qui ne leur convient pas dans leur logement. A titre d’exemple, l’étudiante vivant dans la résidence CROUS, a installé une table à proximité du branchement internet, lui permettant ainsi d’avoir un vrai espace bureau même sans wifi dans le studio. Dans ce même studio, les architectes avaient prévu un caillebotis métallique reliant l’espace extérieur au studio et faisant figure de marche pied. L’habitante y a installé des coussins afin de s’en servir comme d’un banc lorsqu’elle reçoit des invités. De la même façon, l’habitante a installé un caillebotis en bois dans sa salle de bain car l’espace douche ne dispose pas de bac le séparant du reste de la pièce. « - (…) Sinon la salle de bain/toilette c’est comme une boite blanche et à l’intérieur il n’y a pas de séparation pour la douche. Enfin tu es direct sur le sol, il n’y a pas de bac. Et ça c’est pas agréable parce que après ta douche si tu dois te laver les dents par exemple, tu peux pas. L’eau elle stagne. Alors j’ai acheté un truc en bois surélevé pour pas marcher dans l’eau. » (entretien du 27 octobre, Mlle Scarponi) 94


Au delà de ces aménagements improvisés, on remarque un paradoxe entre les choix des architectes et le règlement imposé par les bailleurs. Concernant la résidence CROUS, les lits des studios bénéficient tous d’un tiroir accueillant un deuxième lit d’appoint. Or le CROUS interdit aux habitants d’inviter des personnes extérieures à la résidence. De ce fait, une incompréhension naît chez les habitants. Ils ne comprennent pas pourquoi des aménagements pensés pour leur faciliter la vie devraient rester inutilisés. Il y a un problème de coordination entre les bailleurs et les concepteurs. « - (…) Et c’est cool parce que sous le lit il y a un autre matelas dans un tiroir. -

Et tu invites des gens ?

- Normalement on a pas le droit. Enfin je sais pas ils nous ont envoyé un papier comme quoi on devait être seul dans l’appartement mais bon quand j’invite des gens pour un weekend end, il dorme sur ce matelas. » (entretien du 27 octobre, Mlle Scarponi)

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LAVERIE COMMUNE. LES MACHINES À LAVER SONT DÉJÀ ÉQUIPÉES EN PRODUIT ÉCOLOGIQUES MAIS MLLE SCARPONI RAJOUTE SON PROPRE PRODUIT AFIN D’AVOIR UNE ODEUR DE LESSIVE SUR SES VÊTEMENTS

SALLE COMMUNE IMAGINÉE COMME UN ESPACE DE RENCONTRE MAIS INNOCUPÉE EN RÉALITÉ PUISQU’AUCUN ACCÈS WIFI N’Y EST INSTALLÉ

PASSERELLE RELIANT LES DEUX BATIMENTS D’HABITATION

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COUR DES ÉCOLES ÉLÉMENTAIRES ET MATERNELLES. DES ÉLÉMENTS DE LA “FAÇADEEBABOU” SE SONT DÉCROCHÉS ET SONT TOMBÉS DANS CETTE COUR. DEPUIS, DES FILETS DE PROTECTION ONT ÉTÉ INSTALLÉS À CERTAINS ENDROITS SUR LA FAÇADE.

Plan commenté des espaces partagés dans la Résidence du CROUS

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AJOUT D’UN CAILLEBOTIS EN BOIS POUR NE PAS MARCHER DANS L’EAU

LIT D’AP DES INV

ABSENCE DE BAC DE DOUCHE

SUR LA PORTE : TABLEAU AVEC DES RÈGLES POUR VIVRE DE FAÇON ÉCOLOGIQUE

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PPOINT “TIROIR” POUR ACCUEILLIR VITÉS MALGRÈ LE RÉGLEMENT

BOX INTERNET QUI NE FONCTIONNE QU’AVEC UN CABLE RELIÉ AU PORT DSL

TABLE INSTALLÉE POUR POSER L’ORDINATEUR ET POUVOIR SE SERVIR D’INTERNET VIA LE CABLE DSL COUSSINS INSTALLÉS POUR POUVOIR S’ASSOIR SUR LA GRILLE INTÉRIEUR / EXTERIEUR

SOUS L’ÉVIER : 3 COMPARTIMENTS DE POUBELLES DISTINCTS DÉSTINÉS À FAIRE LE TRI. SACS POUBELLES SPÉCIFIQUES QUI NE SONT PLUS DISTRIBUÉS AUX HABITANTS

Plan commenté du logement de Mlle Scarponi

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Photographie d’un studio type de la Résidence CROUS © S.Grazia

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Et on fait le même constat du côté de l’immeuble Monts et Merveilles puisque l’habitante explique qu’il n’y a pas de coordination entre la gardienne de son immeuble et le service responsable des déchets. Le problème se trouve au niveau des cartons d’emménagement, puisqu’ils ne peuvent pas être mis dans les poubelles classiques. La mairie de Paris a mis en place un Écopoint Mobile qui est une sorte de déchèterie itinérante. Elle comporte différents contenants qui permettent de trier les déchets qui ne sont pas acceptés par la collecte pneumatique. Cet Écopoint Mobile n’est accessible que quelques heures par mois à chacun de ses emplacements. Le plus proche de l’immeuble Monts et Merveilles se situe sur le trottoir à l’angle de la rue Cardinet et de la rue Lemercier. L’Ecopoint a été mis en place depuis le samedi 6 septembre 2014 et il est ouvert le 1er et le 3ème samedi de chaque mois de 9h à 13h. Mais les habitants ne sont pas suffisamment informés. « - Est ce qu’il y a des petites affiches dans l’immeuble pour vous sensibiliser à l’écologie ou ce genre de choses? - Euh pour le tri en bas dans les poubelles mais encore il y a des choses que je ne sais pas. Par exemple les cartons qui sont gros, les encombrants, je sais même pas où il faut les mettre. Enfin il y a une pièce dédiée mais la gardienne ne veut pas qu’on les mette là parce qu’elle dit que ce n’est pas son travail de sortir les poubelles. Donc je crois que le lundi tous les quinze jours il faut mettre les objets au coin de la rue et ils passent. Mais bon en attendant... Nous ça va on a un balcon mais ceux qui ont pas de balcon ils doivent garder tous leurs cartons chez eux » (entretien du 02 décembre, Mlle Marzof) Le dernier point concernant la relation des habitants à leur immeuble écologique est celui que je qualifierais de méfiance. En effet les habitants observent des dysfonctionnements dans leurs 102


immeubles, qui sont pourtant neufs, et ils se disent qu’ils n’ont pas été correctement réalisés. Un habitant de l’immeuble La Sablière m’expliquait qu’il avait déjà eu trois dégâts des eaux depuis son emménagement. Selon lui, l’explication était le fait qu’il y ait trop de sous-traitance dans la construction des immeubles et que les matériaux utilisés n’étaient pas de qualité. Dans la résidence étudiante, un élément de la façade s’est décroché et est tombé dans la cour d’école. L’habitante interrogée est elle aussi perplexe quant à la qualité de son immeuble qui est pourtant neuf. « - D’ailleurs l’année dernière y a un morceau de la façade, qui est tombé dans la cour de l’école en bas ! Du coup là ils ont mis des filets, je sais pas si ça va rester. -

Ah bon il y a une école ? Et c’est tombé au milieu de la cour ?

- Oui mais ça va ce jour là il y avait personne mais bon quand même pour un bâtiment neuf... » (entretien du 27 octobre, Mlle Scarponi) Ces épisodes installent de la méfiance chez les habitants vis à vis de la construction. Il devient alors difficile de les convaincre du bon fonctionnement des innovations techniques écologiques alors que des éléments de base ne paraissent pas bien mis en place.

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CONCLUSION Au cour cette recherche, nous avons pu voir que la démarche des écoquartiers tend à se banaliser et se généralise en France. Les institutions politiques françaises font preuve d’une vraie volonté quant à la diffusion de ce modèle de projet. Bien que très différents des premières initiatives militantes, ces projets sont de plus en plus tournés vers la démarche participative. En cela, on peut dire qu’une certaine attention est portée à la dimension sociale nécessaire dans ces quartiers. De plus, les aménageurs favorisent une mixité intergénérationnelle en prévoyant des programmes d’habitat diversifiés : locatif et accession, logement social, logements adaptés aux personnes âgées ou handicapées, logements de tailles variées pour permettre un parcours résidentiel sur le quartier. Cependant, un paradoxe persiste : Les concertations de ce type se déroulent en amont du projet sur plusieurs mois et s’arrêtent dès lors que le projet sort de terre. Selon moi, au delà de la conception avec les habitants, un vrai accompagnement est nécessaire pour permettre à tous d’utiliser les innovations techniques écologiques correctement. Car une mauvaise utilisation n’est pas seulement contreproductive au niveau écologique, elle entraine aussi une forme de ségrégation. Les habitants ne sont pas tous égaux dans la maitrise de leur appartement. Un accompagnement pourrait être mis en place tout au long de la vie de l’écoquartier pour accueillir les nouveaux arrivants et leur permettre une meilleure intégration. En ce sens, il serait pertinent de mettre en place une association des premiers arrivants dans le quartier qui facilite l’accueil des nouveaux locataires et se place en interlocuteur responsable. Cela permettrait de créer du lien social entre les habitants d’un même immeuble. La collectivité qui a réalisé le projet devrait aussi se tourner vers ces nouveaux habitants et leur proposer des réunions d’informations 104


afin que chacun sache en quoi le quartier est innovant et comment accompagner sa réussite à petite échelle. Actuellement, la Maison du Projet a plutôt un rôle de communication tourné vers les personnes extérieures aux projet (qui veulent acheter un logement par exemple) : elle informe, explique et s’attache à promouvoir les qualités du quartier. Il serait intéressant de lui donner un rôle éducatif et de conseil auprès des habitants. Elle pourrait devenir un lieu d’accueil qui permettrait de renforcer les relations sociales entre voisins. Ce type de projet demande d’être exigent et de chercher une amélioration continue des pratiques mises en place. L’accès aux jardins partagés des classes d’une école maternelle du quartier me semble être une très bonne chose. L’éducation des enfants du quartier à l’environnement est nécessaire et peut permettre de sensibiliser les parents par ce biais. En revanche je trouve dommage que les jardins partagés n’établissent pas un nombre de place réservé aux habitants du quartier. D’une manière générale, les habitants qui sont « parachutés » dans une projet en pleine construction, manquent d’informations. Même s’ils n’ont pas fait de démarches volontaires pour vivre de façon écologique, il me semble que les responsables du projet devraient aller vers eux, les informer, les sensibiliser. Une approche égalitaire des innovations techniques écologiques est le garant d’une bonne cohésion sociale dans le quartier.

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ANNEXE FICHE DE LECTURE Fabrication et usage des écoquartiers. Essai critique sur la généralisation de l’aménagement durable en France, Vincent Renauld, édition PPUR, 2014 Vincent Renauld est docteur en aménagement de l’espace et urbanisme, et ingénieur de l’Institut National des sciences appliquées (INSA) de Lyon. Il est également enseignements en environnement et aménagement durable à Paris 7, à l’ENSA Paris La Villette, à l’ENSA Paris Val de Seine, et à l’INSA de Lyon. Ses travaux portent sur les différents modes de fabrication et usage des aménagements et habitats contemporains, notamment sur les problématiques de transitions écologique. LE LIVRE Cet ouvrage de Vincent Renauld interroge le rapport que les habitants entretiennent avec le savoir-habiter, avec les nouveaux objets techniques de l’habitat écologiques. Le développement s’appuie sur une enquête de terrain dans un bâtiment à Grenoble qui se situe dans le nouveau quartier de la Caserne de Bonne. L’analyse consiste à interroger l’appropriations des habitants vis-à-vis des éco-techniques de leur logement. Vincent Renauld découvre que ceux-ci détournent les nouveautés techniques des habitations dans leur vie quotidienne. L’ENVERS DU DECOR. CASERNE DE BONNE. Vincent Renauld a choisi comme terrain d’étude le bâtiment Le Pallium situé au sein de l’écoquartier Caserne de Bonne à 106


Grenoble. On y compte 52 logements sociaux. Ce bâtiment « s’inscrit sur le plan énergétique dans le cadre du programme européen Concerto dont les objectifs de consommation sont fixés à 42,5 kWh/m2/an pour le chauffage, 17 kWh/m2/an pour l’eau chaude sanitaire et à 10 kWh/m2/an pour l’électricité des espaces communs ». C’est à dire qu’il vise des performances énergétiques largement supérieures à celles de la Réglementation française de 2005. Cette ambition se traduit par l’installation de dispositifs techniques particulièrement innovants, que l’on trouve dans les logements et dans les espaces collectifs. 1. LE MARMOLEUM Dans les logements du Pallium, le sol des logements est composé d’un matériau écologique spécifique appelé marmoléum. Ce matériau est issu de la famille des linoléum. En apparence, il ressemble à un lino plastique mais il est fabriqué à partir « d’huile de lin, de farine de bois, de jute, de résines, de calcaire et de pigments minéraux ». Ses propriétés écologiques sont d’une part les faibles émissions de produits toxiques prévus au cours de sa durée de vie et d’autre part par son caractère autonettoyant. Ses propriétés antibactériennes doivent permettre aux habitants de faire des économies d’eau et de produits détergents lors du nettoyage. Les habitants du Pallium sont censé avoir une bonne connaissance du mode d’emploie de ce sol. Cependant, « dans les pratiques la très large majorité des foyers utilise de l’eau couplée à des produits ménagers pour nettoyer le sol écologique de leur logement, que ce soit en passant la serpillère ou encore par l’intermédiaire de lingettes commerciales spécifiques ». Si les usagers se tournent vers de telles pratiques, c’est parce qu’ils ont une certaine représentation de la propreté. L’utilisation de produits détergent ou de lingettes représente pour eux le fait de désinfecter une surface sale et ils l’associent 107


généralement à l’odeur dégagée par ces produits. Exemples d’entretiens : « Moi je mets quand même un produit, pour que ce soit propre mais il nous disait qu’il fallait pas mettre de produit. Mais moi je mets toujours un peu de produit. » (Foyer 2, entretien enregistré, 2010) « Ils disent qu’il faut le nettoyer à l’eau claire ! Mais moi y a du produit. […] il me l’a bien dit quand il m’a livré l’appartement. Ils veulent qu’on nettoie uniquement avec de l’eau claire. Déjà, au début, le gars, il me dit, faut nettoyer à sec. Je dis : « pardon ? » Il me dit : « coup de balai ». Je lui dis : « oui au bout de 2 ans, c’est dégoutant, non mais vous rigolez ». Moi je lave comme je lavais à l’Arlequin, voyez au bout de 10 ans, que de l’eau ! C’est dégueulasse ! Moi je suis désolé. Je lave pas à la javel pour pas l’abîmer. » (Foyer 6, entretien enregistré, 2010) « Moi je le nettoie bien. La serpillère, moi je passe d’abord pour la poussière, dès fois je passe la machine pour la poussière, après je lave, avec de l’eau et du produit. » (Foyer 10, entretien enregistré, 2011)

Ce qui est aussi relevé lors de l’enquête est que les habitants trouvent le sol terne et qu’ils éprouvent de la difficulté à le faire briller. Donc dans la représentation mentale des habitants, l’aspect mat des matériaux est associé au sale. C’est en cela que plusieurs foyers se justifient de l’utilisation de la javel. Mais lorsqu’ils s’aperçoivent des conséquences (apparition de tâches blanches irréversibles), ils décident de ne pas renouveler l’expérience. De plus, le fait de nettoyer le marmoléum avec des produits ménager provoque une réaction chimique avec les matériaux qui le composent et dégage une odeur spécifique dont les habitants ont une image négative. Cette odeur renvoie l’image d’un sol sale, souvent assimilée à une odeur de « colle » ou encore de « poisson ». De fait, la majorité des usagers concernés augmente alors la quantité de produit lors du lavage afin que le parfum commercial prenne le dessus sur l’odeur de colle. Certains installent des diffuseurs électriques de parfum dans leur salon. 108


2.

LES INTERRUPTEURS DE VEILLE

Chaque logement du Pallium est équipé d’un interrupteur coupeur de veille situé à l’entrée du salon juste à côté de l’interrupteur du plafonnier. Son utilisation provoque la coupure d’une des trois prises situées dans la pièce là où les concepteurs ont imaginé l’emplacement de la télévision. Il était donc projeté que les habitants l’ utilisent pour couper les veilles de sa télévision, son magnétoscope, son décodeur, ou encore sa chaîne Hi-Fi par exemple le soir avant de se coucher. Or dans la réalité, la moitié des foyers interrogés n’utilise pas du tout l’interrupteur pour ne pas avoir de coupure électrique sur leur ordinateur ou encore leur box internet. Les habitants expliquent qu’ils veulent rester joignables à toute heure de la journée et qu’il télécharge sur internet, ce qui nécessite une connexion ininterrompue. Les habitants ont mis en place au sein de leur logement, des règles liées à cet interrupteur : ils interdisent par exemple aux enfants d’y toucher pour ne pas avoir de coupure involontaire. Les enquêtés relève aussi un problème lorsqu’ils ont des invités qui se « trompe d’interrupteur » pour allumer la lumière. Certains foyers ont bricolés l’interrupteur en question en utilisant du scotch de manière à condamner son utilisation. L’autre moitié des foyers interrogés utilise quotidiennement cet interrupteur de veille mais pour un autre usage : par exemple pour y brancher une lampe d’appoint. Un foyer a ainsi déplacé sa lampe halogène lorsqu’il a découvert le fonctionnement du dispositif pour l’utiliser dans son salon. Dans un autre registre, certains foyers utilise cet interrupteur au moment des fêtes de Noël pour y brancher la guirlande électrique du sapin afin de pouvoir l’éteindre facilement le soir en allant se coucher. Exemples d’entretiens. « Du coup j’ai branché là bas, avec la lampe. Voilà, une fois qu’on sait, on connaît ses interrupteurs, c’est comme quand y en a deux, c’est lequel

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qui allume le couloir, c’est lequel qui allume la cuisine, et puis au bout d’un moment, on les connait. Donc là ça éteint la lampe. Parce que si ça éteint la veille, ça éteint le téléphone, c’est le problème de la Free box. » (Foyer 1, entretien enregistré, 2010) « Moi j’ai mis une lampe d’appoint dessus pour que ça serve mais au début je m’en servais pas, je branchais rien dessus pour éviter qu’on coupe tout en voulant allumer la lumière. » (Foyer 3, entretien enregistré, 2010) « M. : Nous, on s’en sert. Au début, on savait pas à quoi ça servait… Mme : On a cherché… M. : Je me suis dit mais il marche pas, il allume pas la lumière. Au début, on avait mis la lampe de ce côté et puis quand on a su pour la prise, on a changé la lampe de côté pour que ça serve à quelque chose. » (Foyer 7, entretien enregistré, 2010) « Pour allumer la lampe qu’on a mis là on s’en sert du coup c’est pratique, ça évite de se baisser pour allumer quand on arrive et puis moi j’aime bien les petites lumières, comme ça. Avant j’avais la télévision là-bas. Mais maintenant j’ai mis une lampe une lampe pour que ça serve. » (Foyer 10, entretien enregistré, 2010)

3. FACADES VEGETALISEES La façade végétalisée du bâtiment Le Pallium est constituée de lierre et de vigne vierge plantés dans des pots installés sur les balcons des habitants. Pour ces plantes, le système d’arrosage est automatique. Il fonctionne par l’intermédiaire d’un tuyau goutteà-goutte. Les habitants ne sont pas censés arroser eux-mêmes et doivent laisser le balcon libre d’accès pour l’entretien annuel. Des filets métalliques se trouvent sur toute la hauteur du bâtiment et servent de tuteurs aux plantations grimpantes pour former une façade végétalisée. Cette façade végétalisée a pour but de créer un confort thermique l’été dans les logements et de limité la surchauffe due à l’isolation du bâtiment (double peau, étanchéité de l’air...). Les plantes doivent absorber le rayonnement solaire par photosynthèse et créer un mécanisme d’évapotranspiration 110


(évaporation par transpiration des plantes donc climatisation naturelle). Mais dans la vie quotidienne, les usagers ont une vision différente de cette façade végétalisée selon qu’elle se trouve à l’extérieur du balcon ou à l’intérieur. Les entretiens révèlent que les habitants se sentent envahis par les feuilles qui tombent, les petites bêtes ou simplement visuellement. La façade végétale dans l’inconscient collectif renvoie une image de nature sauvage et réveille les phobies dans la sphère privée (insecte, araignées). La réaction des habitants réagissent de plusieurs façons. Ils taillent le lierre qui se trouve sur leur balcon, utilisent des insecticides ou dévient le système d’arrosage pour ralentir la croissance des plantes. Le discours des habitants sur la façade végétalisée est différent selon qu’elle pénètre dans leur espace privé ou pas. Ils la définissent comme « jolie », « esthétique » voire « colorée » uniquement lorsqu’elle est un élément extérieur. Elle agrémente la vue lorsqu’elle fleurit, comme en témoigne par exemple cette habitante : « Ben moi, les plantes je trouve ça joli, mais tant que c’est pas devant chez moi ! (rire) non, de l’extérieur c’est pas mal, c’est joli quand ça fleurit un peu mais par contre moi j’ai pas trop envie d’avoir les araignées et les petites bêtes sur mon balcon, quoi ! ». Exemples d’entretiens. « C’est magnifique, du lierre, on a du lierre qui pousse de partout, il m’envahit mais bon c’est un mur végétal, il paraît que c’est très beau mais bon en attendant il y a plein d’araignées, plein de bestioles, et puis moi ils se sont plantés il m’ont planté un pied de vigne, du coup j’ai du raisin qui tombe sur le balcon. Ils auraient dû me mettre un lierre, mais ils se sont plantés, ils m’ont mis un pied de vigne, du coup j’ai du raisin. Ça fait franchement crade. Et toutes les petites bêtes qui vont avec, donc moi, ben je mets du produit spécial, parce que franchement les araignées sur le balcon super, quoi, c’est un peu flippant. - Et vous auriez préféré avoir un lierre ? - J’aurais préféré avoir rien du tout. Moi j’aime pas trop ça, je suis pas

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trop bestioles donc j’aurais préféré ne rien avoir et à la rigueur planter des tomates dans mes jardinières. » (Foyer 9, entretien enregistré, 2010) « C’est de la vigne, normalement, on n’a pas le droit d’arroser, ça se fait automatiquement, mais chez moi, comment dire, j’ai mis le tuyau là comme ça, l’eau elle coule pas, c’est pour ça, ça a séché. Moi j’aime pas là, à la limite ça aurait pu cacher la vue des gens là. Mais moi j’aime pas trop les plantes là sur le balcon. Et puis quand ça pousse ça jaunit comme ça, c’est bizarre. » (Foyer 12, entretien enregistré, 2010)

OUVERTURE METHODOLOGIE L’investigation par entretien semi-directif au sein du bâtiment Le Pallium s’est déroulée entre septembre 2010 et mars 2011. Elle a été menée sur 16 foyers. Cette enquête repose sur les discours que les habitants produisent à la fois sur leur perception et leur usage des éco-techniques de leur logement. Chaque entretien s’est déroulé selon trois phases bien distinctes. La première phase était dédiée à la conversation et permettait d’obtenir la confiance du locataire. Elle était réalisée suite à un premier contact que l’auteur a majoritairement mené au porte-àporte et plus marginalement par téléphone. Puis, dans la seconde phase, l’entretien était systématiquement enregistré et sa durée variait entre 30 minutes et 2 heures selon les cas. Enfin, la troisième phase (entre 5 et 30 minutes) débutait lorsque l’auteur coupait l’enregistreur. Il signalait la fin de l’entretien mais continuait la discussion. « L’analyse dénotative » utilisée par l’auteur cherche à identifier au sein des descriptions symboliques des récits les différents objets techniques mobilisés. L’auteur a aussi eu recourt à l’observation de la vie sociale dans le bâtiment Le Pallium (balcons, terrasses, paliers de porte). Cette observation s’est déroulée pendant une semaine en octobre 2010. Le protocole d’observation se focalisait sur les emplois du temps urbains rythmés par le travail et l’école la semaine, puis les loisirs (courses, divertissement, réception d’invités, etc) le week-end. 112


Donc les prises de notes avaient lieu sur les créneaux horaires suivants : du lundi ou vendredi, nous sommes attentifs le matin de 7h à 9h, l’après-midi de 15h à 17h et le soir de 20h à 23h ; puis le week-end sur des temps plus continus avec le déjeuner de 12h à 14h, l’après-midi de 14h à 18h et la soirée de 18h à minuit. CONCLUSION Vincent Renauld dénonce le clivage entre la pensée technicienne de l’aménagement et les pratiques réelles des habitants. Comme il l’explique, les innovations se heurtent aux pratiques des usagers, qui diffèrent largement de l’imaginaire des maîtres d’ouvrage. Ce nouvel habitat demande de modifier les comportements. L’habitant ne peut plus simplement ouvrir les fenêtres pour aérer, passer la serpillère pour faire briller son carrelage… Il existe des formations, de la sensibilisation, de l’éducation environnementale. Sous un idéal bucolique prôné par tous les acteurs des nouveaux écoquartiers, se cache une réalité d’encadrement des usagers. L’habitant doit contrôler la température ambiante, maîtriser la circulation de l’air etc. Mais les habitants ne se plient pas à ce que l’on attend d’eux. Pour certains « habiter » ne peut s’apprendre. Selon moi, la demande qui est faite aux habitants de maîtriser parfaitement les nouvelles innovations techniques présente un danger social. Les acteurs des projets utilisent une rhétorique excluante : certaines « mauvaises » habitudes sont relevées dans les comportements des habitants ce qui induit une image péjorative de leur statut d’habitant. La sensibilisation, la responsabilisation sont systématiquement utilisés pour apprendre aux habitants à habiter mais pas dans un but social de rencontre. Le risque se trouve dans une forme d’exclusion de certains habitants. Il me semble que selon le parcours de chaque habitant, les innovations techniques ne représentent pas le même problème. En effet dès lors que l’habitant a choisit d’accéder à la propriété dans un nouvel écoquartier, il semble que celui-ci s’intéresse de près ou de loin à l’écologie. La situation est totalement différente 113


quand il s’agit d’habitants qui se sont vu attribuer un logement social sans le choisir. Les foyers interrogés dans ce livre sont tous bénéficiaires d’un logement HLM dans ce bâtiment du Pallium.

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RETRANSCRIPTION BATIGNOLLES

DES

ENTRETIENS

DE

CLICHY-

Entretien du 27 Octobre 2015. Mlle Scarponi Sexe, âge, situation familiale : Féminin, 22 ans, vit seule Activité professionnelle : Etudiante Date d’emménagement dans le logement : Octobre 2014 Part de la location dans les revenus : 1/2 Immeuble concerné : Résidence Etudiante Transition Programme : Résidence étudiante de 152 logements + 1 logement de gardien, cuisine centrale de production de 1250 repas/jour, école polyvalente de 12 classes et centre de loisirs + 2 logements de gardien Client : RIVP Prix : 22,12 M€ HT Surface : 9065 m² Performance : Label BBC Effinergie - Certification HQE NF Bâtiments tertiaires - H&E profil A option Architectes : Atelier PHILEAS « - Je m’appelle Euridilia, j’ai 22 ans euh...je suis italienne, de Rome et j’suis étudiante. -

Quand est ce que tu es arrivé dans le quartier ?

-

En octobre dernier

-

Et c’était un choix ?

- Un choix ? Non, avant j’étais dans une autre résidence à Mabillon, rue Mouffetar dans un studio. Mais c’était horrible tu vois, y avait de la moisissure partout, franchement c’était plus possible. Du coup j’ai demandé à changer, je suis allée voir le CROUS et là ils m’ont proposé de venir ici. -

Comment est ce que tu vis le changement de quartier ?

-

Ici c’est tranquille. Au début, franchement, j’avais une mauvaise

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intuition. C’est la périphérie et puis la ligne 13... Mais en fait c’est cool -

As quelle distance es-tu de l’université ?

- En métro je suis à 35 minutes. Bon ici à Paris c’est une distance normale. C’est sûr c’est plus loin que là où j’étais avant... Je pouvais aller à la fac à pied - Est ce que tu trouves qu’il y a assez de transport dans ton nouveau quartier ? - Oui parce qu’on est pas loin de la place de Clichy et là bas y a tout. Mais ce sera encore mieux quand il y aura la ligne 14. T’as vu là bas ils construisent le nouveau métro !? - Oui oui j’ai vu, ils prolongent la ligne 14. Si tu devais délimiter ton quartier spatialement, tu donnerais quels repères ? - Euh... je dirais Porte de Clichy, place de Clichy et... l’Arc de Triomphe. Au début pour l’arc de triomphe j’avais pas remarqué qu’on était à côté, c’est depuis que je me suis baladé en vélo ! - D’accord. Maintenant on va parler de l’immeuble. Est ce que tu as choisit d’habiter dans cet immeuble ? - Non non en fait c’est le CROUS, ils m’ont dit « si vous voulez on a une place dans un immeuble à Clichy-Batignolles ». A Mabillon c’était plus possible alors j’ai dit oui tout de suite. -

Quelle image as-tu de ton immeuble ?

- Je le trouve cool. Il y a du mouvement. Bon c’est vrai il est un peu étrange, la couleur verte c’est bizarre. On dirait qu’ils ont voulu faire comme des bambous. Mais dedans c’est la galère... - On va y venir. Est ce qu’il y a des parties communes ? Des espaces de rencontre ? - Oui au 3ème étage mais c’est pas utilisé. Tu vois c’est là ( elle montre la façade du doigt) sur tout l’étage. En fait ici, des représentants des étudiants sont élus et ils organisent des trucs. Par exemple on a eu un pot de bienvenue et puis là, bientôt il va y avoir la fête d’Halloween. Mais le problème, et c’est quand même dingue, c’est que dans ce nouvel immeuble, y a pas de wifi ! Même dans les studios on doit se brancher avec le câble, ça marche pas. Du coup la salle commune même si elle est grande, on peu pas travailler là bas sans internet. En plus y a même pas

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de routeur pour se brancher. Donc voilà c’est pour ça que personne y va. -

D’accord. Et entre voisins, vous vous rencontrez ?

- Bah un peu dans l’ascenseur quoi « bonjour, ça va ? » mais sinon il y a pas beaucoup de relations entre voisins. -

Dans cet immeuble, vous êtes tous étudiants ?

- Oui on est tous étudiant ou stagiaire du CROUS. Il y a la secrétaire aussi qui habite là parce que il y a les bureaux du CROUS en bas. -

Et les appartements sont tous les mêmes ?

- En fait il y a deux types de studio. Un où il y a un couloir plutôt long et un autre où il y a plus de place dans le salon... enfin dans la pièce. Y a qu’une seule pièce à chaque fois. Je te montrerai tout à l’heure si tu veux. - Oui je veux bien, ce serait super. Maintenant si tu devais donner les points positifs et les points négatifs de ton immeuble? - En positif, je dirais que les poubelles c’est cool : en fait tu les met dans la machine, tu appuie sur le bouton et ça tombe ! Enfin je te montrerai c’est un peu dur à expliquer. Avant on faisait le tri, on avait trois sac différents avec chacun une couleur. Mais depuis cette année, la société qui donne les sacs à arrêter de nous les donner parce qu’ils disent qu’on fait pas bien le tri. Ils disent « les étudiants ils font n’importe quoi ils mélangent tout » et puis ils ont dit aux gens du CROUS que ces sacs là sont chers. Apparemment pour une année ça leur coute 6000 euros. Bon, moi j’ai trouvé chez Super U des sac à peu près pareil, avec des trous sur le coté aussi. Mais c’est sur que ça donne moins envie. Avant on avait nos sacs de trois couleurs à disposition, là il faut faire l’effort... - D’accord... Maintenant on va parler de ton appartement. Est ce que tu l’as choisit ? - Non . Comme je te disais ils sont un peu tous différents ils font soit 20 m2 soit 23 m2. Mais moi je suis la première à coté de l’ascenseur alors il est un tout petit peu différent. En tout cas avec le CROUS tu peux pas visiter. On te dit « on a un appartement de libre ici. » et tu dis oui ou non. Moi avant j’étais au 9 ème étage dans le bâtiment B. J’avais une super vue sur Paris ! On voyait La Défense ! Mais là j’ai changé, je suis au 6ème étage, ici (elle montre du doigt). D’ailleurs l’année dernière y a un morceau de la façade, qui est tombé dans la cour de l’école en bas ! Du

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coup là ils ont mis des filets, je sais pas si ça va rester. -

Ah bon il y a une école ? Et c’est tombé au milieu de la cour ?

- Oui mais ça va ce jour là il y avait personne mais bon quand même pour un bâtiment neuf... -

Oui c’est bizarre...Quelle est la part du loyer dans tes revenus ?

- Moi je travaille pas, c’est mes parents qui paye mon loyer mais c’est parfait ! C’est pas cher du tout le loyer c’est 395€ avec possibilité de toucher les APL. Moi je touche 170€ d’APL. Donc pour Paris c’est pas cher. -

Donc tu vis seule ?

-

Oui oui

-

Est ce que tu trouves ça suffisamment grand ?

- Oui c’est assez grand pour Paris. Et c’est cool parce que sous le lit il y a un autre matelas dans un tiroir. -

Et tu invites des gens ?

- Normalement on a pas le droit. Enfin je sais pas ils nous ont envoyé un papier comme quoi on devait être seul dans l’appartement mais bon quand j’invite des gens pour un week-end end, il dorme sur ce matelas. -

Ok. Et en résumé qu’est ce que tu penses de ton studio ?

- Bah je le trouve bien. Par contre le sol il est bizarre. C’est du linoléum tu vois ? -

Oui oui je vois. Qu’est ce qui te dérange concernant ce sol ?

- Bah j’aurais préféré du parquet en fait. Et puis avec les travaux, on a de la poudre sur les fenêtre donc ça rentre à l’intérieur. Sinon la salle de bain/toilette c’est comme une boite blanche et à l’intérieur il n’y a pas de séparation pour la douche. Enfin tu es direct sur le sol, il n’y a pas de bac. Et ça c’est pas agréable parce que après ta douche si tu dois te laver les dents par exemple, tu peux pas. L’eau elle stagne. Alors j’ai acheté un truc en bois surélevé pour pas marcher dans l’eau. - Tu me montreras ça. Concernant l’écologie, est ce que tu peux me parler des innovations techniques dans l’immeuble et dans ton logement ?

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- Alors sur les portes d’entrée de nos studio, on a un affichage : c’est un tableau avec les règles pour vivre écologiquement. Ensuite on a une pièce entière pour les poubelles. Ah oui et aussi des jardins verticaux ! Et du coup il y a des insectes qui rentrent dans les studios mais c’est pas trop dérangeant. Après, en bas de l’immeuble il y a un espèce de panneau où tu peux lire combien d’énergie est sauvée tout les jours. Le local à vélo qui est bien grand. Il y a une salle avec des machines à laver. Elles sont déjà équipées avec du produit écologique donc normalement on a pas besoin de rajouter de la lessive mais j’en achète quand même parce que je trouve que sinon ça sent pas bon - Est ce que quelqu’un est venu vous expliquer chacune de ces innovations techniques ? -

Non personne ne nous a expliqué.

-

Est ce que tu as déjà participé aux concertations du quartier ?

- Non mais j’ai toujours eu envie d’aller aux visites et aux conférences - Comment as-tu été informée de l’existence de ces concertations ? - On reçoit la mise à jour des travaux dans nos boites aux lettre et il y a les dates des conférences. - D’une façon générale comment tu trouves la vie dans cet écoquartier ? - Avant d’y habiter, j’avais une mauvaise vision du quartier parce que je croyais que c’était un quartier périphérique et tout. Mais en fait même maintenant personne ne le sait que cet écoquartier existe ! Quand j’en parle à mes amis ils sont pas du tout au courant. Après sinon j’ai rencontré quelques personnes dans le quartier. Il y a un gardien qui est très sympa là bas vers la maison du projet. C’est quand même une sécurité quand on rentre tard. Parce qu’on a eu un problème avec la lumière ! Les lampadaires fonctionnaient que vers l’hôtel IBIS. Et le soir tu vois même si le parc est fermé, y a des gens et sans lumière tu peux pas savoir qui c’est... ça peut être dangereux. Du coup moi j’ai envoyé un mail au CROUS et ils m’ont dit de contacter la mairie. Alors j’ai contacté la mairie, qui m’a dit de contacter le CROUS... Bon au final je suis allé voir l’hôtel IBIS avec une copine et deux jours plus tard ça fonctionnait...

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- Et en tant qu’étudiante qu’est ce que tu en pense d’habiter dans un écoquartier ? - Je pense que c’est le commencement d’un nouvel activisme des conscience. Ca se dit ça en français ? -

Je comprends ce que tu veux dire.

- C’est aussi la valorisation d’un ancien lieu périphérique. Et puis les habitants sont tous différents et ça c’est bien. Ici c’est multiculturel. Contrairement à certains quartier de Rome où j’habitais avant et même comparé au 5ème arrondissement.»

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Entretien du 02 Décembre 2015. Mlle Marzof. Sexe, âge, situation familiale : Féminin, 26 ans, habite en couple Activité professionnelle : En recherche d’emploi Date d’emménagement dans le logement : Fin septembre 2015 Part de la location dans les revenus : 1/3 Immeuble concerné : Monts et Merveilles Programme : 86 logements en accession, 46 logements sociaux, 2 commerces, 1 Centre Cultuel Surface : 11 750 m² shon Coût des travaux : 25 M€H.T. Performance : BBC Effinergie, CERQUAL H&E Profil A, Plan Climat Ville de Paris, RT 2012 Architectes : Jean Bocabeille Architecte « - Quelles sont les démarches qui ont permis votre installation dans le quartier ? Avez vous choisit d’habiter ici ? - Bah en fait c’est grâce à mon 1% patronal. C’est du hasard en fait, enfin, j’ai choisi mais euh... pas vraiment - Est ce que c’était une volonté pour vous d’habiter dans un écoquartier ? - Non pas spécialement. C’est plus l’occasion qui s’est présentée. Je savais même pas que c’était un écoquartier à la base... (rire) - Si vous deviez définir les limites du quartier, vous diriez que ça va de où à où à peu près ? - Euh moi j’dirais que, en fait ça part de... l’avenue de Clichy et après ça va jusqu’à Pont Cardinet -

D’accord

- Plus ce côté là en fait (signe montrant l’ouest) pas l’autre côté. Plutôt jusqu’au chemin de fer - Comment vous définiriez le type de population qui habite dans cet écoquartier ? -

Assez mixte je trouve. Enfin... Pour moi c’est un quartier qui est

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en train de vachement changer en fait. J’pense qu’à la base c’était un quartier qui était pas hyper euh... Enfin c’est un peu un stéréotype mais pas très bien fréquenté. Je sais que vers Porte de Clichy c’est un peu plus craignos et ils sont en train de faire plus de mixité entre les populations ici. Contrairement à l’autre côté qui est au contraire hyper riche. Donc j’pense qu’ils essayent plus de mixer les populations ici. - Euh est ce que vous utilisez les espaces publics comme le parc par exemple ? -

Euh oui de temps en temps

- Je ne sais pas si vous avez vu mais il y a des jardins partagés aux abords du parc - Ah non j’ai pas vu, j’ai pas du tout fait attention. J’ai pas trop la main verte - Ensuite par rapport plus à votre immeuble, Quelle vision vous avez de votre immeuble et de la rue ? - Euh bah l’immeuble moi personnellement je le trouve pas très beau. Mais bon quand on est dedans... Enfin je sais pas, en fait c’est les couleurs et les volets j’aime pas trop les façades en métal aussi. Je trouve pas ça très esthétique en fait. Après la rue ça va. -

C’est pas trop passant ?

- Euh dans cette rue là non. Après l’autre rue, je pense que les gens qui sont côté rue Cardinet ils doivent avoir plus de bruit mais içi ya que les gens qui habitent là en fait, qui passent. - D’accord. Quel était l’éloignement de votre précédent lieu de travail ? -

Avant je mettais une heure.

-

Vous preniez le métro à la station Brochant?

- Non je prenais Pont Cardinet vers Saint Lazare. Ca va plus vite et y a moins de monde aussi. La ligne 13 c’est juste un cauchemar. Moi j’évite au max de la prendre parce que c’est horrible. Je laissais passer deux métros avant de pouvoir rentrer et quand on rentre on est collés comme des sardines. Moi je déteste ça. Surtout le matin, c’est le truc qui met de mauvaise humeur. J’préfère limite prendre le bus qui emmène direct à Saint Lazare aussi.

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-

Vous avez vu qu’il y a un nouveau métro là qui va arriver ?

- Ouai ouai ouai ! On a hâte tous c’est clair ! En plus la 14... Avant j’habitais dans le 13e et c’est une ligne que j’avais l’habitude de prendre dans l’autre sens. Bah pour aller travailler je la prenais jusqu’à Châtelet et puis jusqu’à Bibliothèque. Enfin bon j’aime bien cette ligne (rire) -

Est ce que vous fréquentez des commerce là dans le quartier ?

- Bah la boulangerie, après il y a les supérettes. Le supermarché est un peu plus haut. Le pressing... Oui un peu tout en fait. -

Il y en a assez selon vous ?

-

Moi une boulangerie j’aimerai bien une plus près...

-

Elle se trouve avenue de Clichy ?

- Oui elle est plus haut mais bon c’est juste parce qu’avant j’avais l’habitude d’avoir ma petite boulangerie en bas de chez moi donc c’était assez sympa. Mais non ça va. -

Et au niveau des loisirs ?

- Bah je vais à la salle de sport au bout de la rue et sinon le parc pour se balader de temps en temps. -

Et quand vous sortez le soir ?

- On va au cinéma qui est place de Clichy c’est pas très loin et sinon je prend le métro. Les bars ici c’est pas...top -

D’accord. Quel rapport vous entretenez avec vos voisins ?

- Euh bah le peu que je les vois, ils sont très gentils. Mais on les a pas tous vu en fait. Enfin les gens arrivent un peu au compte-gouttes donc j’ai pas eu l’occasion de faire le pot d’entrée qu’on fait avec tous les voisins. -

Il y en a eu un ?

-

Oui il y a eu une soirée début octobre

-

Tout le monde est arrivé début octobre dans l’immeuble ?

- Non non il y a des gens qui viennent juste d’arriver, il y a encore un appartement vide. -

Est ce que vous disposez d’espaces communs dans l’immeuble ?

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-

Non il n’y a que le hall où on se croise.

- Au niveau de l’appartement, est ce que vous êtes globalement satisfaite ? -

Oui très !

-

Il est très grand ?

- Bah oui, il fait 50 m2. Avant j’avais que 40 m2 donc ça fait quand même 10m2 de plus ! Il est au dernier étage donc c’est hyper lumineux et avant j’avais un immeuble à cinq mètres en face de moi. On a une super grande terrasse ! C’est top.Il manque juste une chambre pour qu’on puisse rester super longtemps mais c’est juste ça qui nous fera partir je pense. En plus on a une place de parking en sous sol - Pour revenir à la terrasse, il y avait des aménagement à la base? - Il y a juste du bois. C’est une terrasse en teck en fait. Et il y a une petite loggia au fond pour ranger des trucs. Il y a l’électricité, l’eau et des lampes. - Est ce qu’il y a des innovations techniques écologiques dans votre appartement ? - Les poubelles en bas, on a le tri en fait. C’est des trappes carton/ plastique, poubelle normale, et verre. Et sinon, non il n’y a rien d’autre. C’est du chauffage central. Au final c’est pas du tout écologique parce que pour l’eau par exemple, on est obligés de faire couler l’eau cinq minutes avant d’avoir de l’eau chaude au neuvième étage. Sinon on a pas d’eau chaude donc c’est un peu a galère. De ce côté là c’est un peu dommage. C’est du gaspillage. Mais on a pas le choix si on veut se laver avec de l’eau chaude malheureusement... - Est ce qu’il y a des petites affiches dans l’immeuble pour vous sensibiliser à l’écologie ou ce genre de choses? - Euh pour le tri en bas dans les poubelles mais encore il y a des choses que je ne sais pas. Par exemple les cartons qui sont gros, les encombrants, je sais même pas où il faut les mettre. Enfin il y a une pièce dédiée mais la gardienne ne veut pas qu’on les mette là parce qu’elle dit que ce n’est pas son travail de sortir les poubelles. Donc je crois que le lundi tous les quinze jours il faut mettre les objets au coin de la rue et ils passent. Mais bon en attendant... Nous ça va on a un balcon

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mais ceux qui ont pas de balcon ils doivent garder tous leurs cartons chez eux - Est ce que vous avez participé aux concertations qui sont organisées par la maison du projet pour faire se rencontrer les habitants? - Non à part euh... le truc d’une association pour les légumes avec des agriculteurs... ça je m’étais renseignée. -

C’est une AMAP ?

-

Ouais c’est ça.

-

Prévue uniquement pour le quartier ?

- Apparemment oui. Y a que les habitants qui ont le droit. Il y a 90 places je crois et il n’en reste qu’une vingtaine. Donc ça doit être intéressant. Surtout vu le prix des légumes à Paris. Mais je voulais aller voir d’abord ce qu’ils proposent. - D’accord. Et est ce que vous recevez dans votre boite aux lettres les petits bulletins d’informations sur l’avancement des travaux ? - Ouais, ça par contre ouais. Surtout que notre rue ils viennent de la faire donc on voulait savoir parce qu’ils bloquaient les accès. Et aussi vers Porte de Clichy pour le tram. -

Donc ça vous intéresse ? Vous le lisez ?

- Bah oui parce qu’on utilise pas mal la voiture donc ça impacte pas mal notre quotidien. - Et vous ne participez pas aux concertations parce que ça ne vous intéresse pas ou alors parce que vous n’avez pas le temps ? - Bah j’étais pas au courant. Mais même maintenant que je suis au courant, je sais pas si je m’impliquerai parce que je suis en location. Je pense que ce serait un autre engagement si j’avais acheté en fait. Parce que là je sais que je ne vais y rester que quelques années. - Et vous êtes contente finalement d’habiter dans un quartier écologique ? - Bah en fait moi j’aime bien le concept mais au sein de l’immeuble je trouve qu’on est pas impactés. En fait, l’autre fois j’ai découvert qu’il y avait des panneaux solaires mais je ne le savais même pas. C’est en

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allant à la maison du projet que je l’ai découvert. Mais si j’avais pas fait la démarche je pense que je ne m’en serrai jamais aperçue alors que au final ils sont juste au dessus de mon appartement. -

Du coup finalement vous vous trouvez bien ici ?

-

Oui oui je suis bien là. »

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Entretien du 05 Décembre 2015. M Yuan Sexe, âge, situation familiale : Masculin, 58 ans, famille avec 2 enfants Activité professionnelle : Employé de maison Date d’emménagement dans le logement : Décembre 2014 Part de la location dans les revenus : 1/3 Immeuble concerné : Immeuble La Sablière 8 - 10 Rue René Blum 75017 50 logements sociaux dont : 1 T1, 12 T2, 20 T3, 14 T4, 3 T5 38 Emplacements de stationnement Espaces Verts 450 m² de panneaux photovoltaïques et solaires en toiture inclinés à 5% Architectes : Antonini et Darmon « - Est ce que vous avez choisit d’habiter dans ce quartier ? -

Non, on est inscrit pour les HLM

- D’accord. Donc on vous a proposé un logement qui était disponible ? -

Oui

-

Et depuis quand vous habitez ici ?

-

Euh un an. Ils viennent juste de tout terminer

-

D’accord et avant ça vous habitiez où ?

-

J’habitais près de Porte Maillot

-

Est ce que vous y retournez de temps en temps ?

-

Euh oui parce qu’on a des amis là bas.

- ici ?

Et à votre avis c’est plutôt quel genre de population qui habite

-

C’est un mélange

-

Est ce que vous fréquentez les espaces publics ? Par exemple

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le parc ? -

Oui surtout l’été

-

Et pour l’école, les enfants vont où ?

-

Ils vont dans le quartier où on était avant

-

Ca vous fait pas trop loin pour les emmener ?

-

Non... C’est 10 minutes avec le RER

-

Le RER...

-

RER C à Porte de Clichy. C’est deux stations

-

Ah oui ça va

-

Il y a aussi le 31 mais c’est compliqué

-

Le bus ?

-

Oui mais il y a tout le temps des embouteillages

-

Quelle vision vous avez de votre immeuble ?

-

C’est très bien, ils viennent de faire construire

-

C’est agréable parce que c’est neuf ?

-

Oui c’est tout neuf

-

Et vous êtes loin de là où vous travaillez ?

-

Non pas très loin

-

Vous mettez combien de temps pour aller d’ici à votre travail ?

-

A peu près une demi-heure

-

Et vous y allez comment ?

-

En RER

- D’accord. Vous utilisez essentiellement le RER ou alors aussi le tram, le métro le bus ? - Le RER et l’autobus. J’aime pas le métro ici. Y a tout le temps beaucoup de monde sur la ligne 13 -

Et vous avez vu qu’il va y avoir la ligne 14 ?

-

Oui oui. Bientôt

128


-

Vous êtes content ?

-

Oui

- Concernant les commerces, où est ce que vous allez faire vos courses ? -

Je vais autour (signe en direction de l’avenue de Clichy)

-

Et pour les loisirs ?

-

Pour aller au cinéma on va aux Champs Elysées

-

Parce qu’il n’y en a pas ici ?

-

Si si il y a place de Clichy mais on préfère

-

Et vous profitez du parc ?

-

J’ai pas beaucoup le temps

-

Vous connaissez vos voisins un peu ?

-

Un peu, je les croise en bas.

- Est ce que vous avez des espaces communs où vous pouvez vous retrouver avec les autres habitants ? Par exemple une terrasse dans l’immeuble ? - Non... Seulement ici (geste montrant l’allée d’accès aux deux immeubles) - Ensuite j’ai juste quelques questions sur votre appartement. Il fait quelle surface ? -

Euh... 72 m2

-

Et il est à quel étage ?

-

Au 3ème étage

-

Qu’est ce que vous en pensez ? Vous êtes satisfait ?

-

Oui, très

-

Vous avez des espaces extérieurs ?

- Oui, j’ai deux balcons. Un ici (cf rue René Blum) et un de l’autre côté (rue Bernard Buffet). Du coup j’ai la vue ici et là bas. - Est ce que vous avez des installations écologiques dans votre logement ?

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-

Seulement le tri des poubelles. Il y a des affiches dans le couloir

- Qu’est ce que vous en pensez d’être dans un quartier écologique ? - Je trouve ça bien. C’est le propriétaire qui nous a expliqué l’organisation. -

Vous voulez dire les personnes chargées des HLM ?

-

Oui voilà

- Est ce que vous avez déjà participé aux réunions de la maison du projet pour les habitants ? -

Euh non

-

Alors vous êtes globalement satisfait ?

-

Oui je suis très content »

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Entretien du 05 Décembre 2015. Mme Durane Sexe, âge, situation familiale : Féminin, 46 ans, Couple avec un enfant Activité professionnelle : Salarié Date d’emménagement dans le logement : Avril 2015 Part de la location dans les revenus : 1/3 Immeuble concerné : Immeuble La Sablière 8 - 10 Rue René Blum 75017 50 logements sociaux dont : 1 T1, 12 T2, 20 T3, 14 T4, 3 T5 38 Emplacements de stationnement Espaces Verts 450 m² de panneaux photovoltaïques et solaires en toiture inclinés à 5% Architectes : Antonini et Darmon « - Quelles sont les démarches que vous avez faites pour vous installer ici ? -

Euh j’ai demandé un numéro à la mairie

-

C’est une demande de logement social ?

-

Oui

-

Et alors on vous a proposé ce quartier ?

-

Oui c’est ça

- Est ce que le fait qu’il s’agisse d’un écoquartier vous a encouragé à dire oui ? -

Non

-

D’accord. Et avant ça où est ce que vous habitiez ?

-

Près d’ici, dans le 17e, près de la piscine de la Jonquière

-

Et vous y retournez de temps en temps ?

-

Oui parce qu’il y a la piscine

- Si vous deviez délimiter spatialement ce nouvel écoquartier vous donneriez quels points de repère ?

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-

Je dirais de l’avenue de Clichy à la gare Cardinet

-

D’accord. Quel type de population habite ici selon vous ?

-

Mixte. Très mixte

-

Et vous utilisez les espaces publics ? Le parc par exemple ?

-

Euh rarement. Parce que ma fille est grande et … voilà

-

Quelle vision vous avez de votre immeuble ?

- L’immeuble en lui même est très agréable. Très lumineux, enfin en tout cas me concernant. Euh très bien agencé... Plutôt positif comme avis. Et puis je sais que tous les logements sont accessibles aux handicapés donc la mairie a attribué des logements aussi à des personnes handicapées. Je trouve ça bien. C’est rare les immeuble comme ça où tout est accessible. -

D’accord. Et est ce que vous êtes loin de votre lieu de travail ?

-

Non, une demi-heure à vélo

-

Vos moyens de déplacement sont donc... le vélo et le métro ?

-

Bah quand il pleut. Vraiment quand je peux pas prendre le vélo

- 14 ?

Du coup vous n’attendez pas spécialement l’arrivée de la ligne

- Bah ça va rien changer pour moi, après c’est bien si ça désencombre la ligne 13 -

Et au niveau des commerces, où est ce que vous vous rendez ?

-

Je vais plutôt de l’autre côté (signe montrant l’avenue de Clichy)

-

D’accord et concernant vos loisirs ?

- Je vais au théâtre Hebertot, plus bas vers la place de Clichy. Et sinon je vais donc à la piscine dans mon ancien quartier. - D’accord. Est ce que vous avez eu l’occasion de rencontrer vos voisins ? -

Un peu. On se croise en bas de l’immeuble

- Vous ne disposez pas d’espaces en communs pour vous rencontrer ?

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- Non, juste ici (signe montrant l’allée qui dessert les deux immeubles) - Je vais vous poser quelques questions sur votre appartement. A quel étage est ce qu’il se trouve ? -

Au 4e étage donc il est très lumineux.

-

Et sa superficie ?

-

60... Non 65 m2

-

De façon générale, vous en êtes satisfaite ?

- Oui, il est très agréable, il est suffisamment grand. Et puis c’est tout neuf. -

Est ce que vous disposez d’espaces extérieurs ?

-

Oui j’ai un balcon qui donne sur cette rue (cf rue René Blum)

- Très bien. Est ce que vous disposez d’innovations techniques écologiques dans votre logement ? - Bah il y a le tri des poubelles en bas. Donc les trois compartiments et puis donc on met les poubelles directement dedans et elles sont... aspirées. Enfin je ne sais pas trop comment ça marche mais je crois que ça va directement au tri. Mais d’ailleurs les poubelles ça pose un problème. -

Ah bon ? Lequel ?

- Et bien normalement on doit mettre des sac de 30 litres maximum et puis les gens mettent des trop gros sacs. Alors je ne sais pas si c’est parce qu’il ne sont pas au courant... Mais en tout cas ça bouche les compartiments. Alors après il faut attendre qu’une entreprise vienne déboucher. Donc en attendant, soit on garde les poubelles dans l’appartement, soit elles stagnent en bas. -

D’accord. Effectivement c’est un problème.

-

Je suis désolée mais je suis pressée. Est ce que vous avez fini ?

- Une dernière question alors : est ce que vous invitez des amis chez vous ? Je veux dire est ce que vous êtes plutôt fière de votre appartement ? -

Oui oui très fière. (rire) »

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BIBLIOGRAPHIE DETAILLEE Mixité sociale et quartier durable, quelles affinités électives? le cas de la ZAC de Bonne, Jeremy Cano, 2013. En menant une enquête sur le quartier durable de la caserne de Bonne à Grenoble, Jeremy Cano offre un éclairage sur les moyens politique mis en place pour répondre à l’instauration du principe de mixité sociale. Il s’interroge plus particulièrement sur le principe de la participation de la population, des acteurs associatifs et socioéconomiques, des élus, des constructeurs privés et publics. Il s’agit de démontrer en quoi mixité sociale et quartier durable présenteraient des «affinités électives » durables malgré les apparences. Ce livre m’a éclairé sur le rapport entre mixité sociale et écoquartier. En présentants différents exemples européens, Jeremy Cano montre que ce lien est plus ou moins présent selon les écoquartiers. Il se penche aussi sur les dimensions législatives et politiques de la préparation d’un tel projet. C’est la notion de durabilité sociale qui m’a le plus interpellé dans ce livre. En effet ce n’est pas parce qu’une mixité sociale quantitative existe au départ d’un tel projet qu’elle va perdurer dans le temps. On peut assister à des phénomènes de gentrification ou bien de délaissement par les catégories sociales les plus élevées. Fabrication et usages des écoquartiers, Essai critique sur la généralisation de l’aménagement durable en France, Vincent Renauld, 2012. (voir fiche de lecture) L’usage est le problème majeur qui se pose actuellement à la fabrication des écoquartiers. Car la généralisation de nouveaux types d’aménagement et de bâtiments « verts » peut entrainer des bouleversements sociaux. C’est un mode d’habiter qui demande aux habitants d’acquérir de nouvelles pratiques. Il existe un grand 134


décalage entre les attentes sur les comportements des usagers et la réalité de leurs pratiques. Ce phénomène peut rendre contreproductives les innovations techniques mises en place dans les logements. Vincent Renauld dénonce le caractère infantilisants des nouveaux dispositifs pédagogiques comme les concertations. Il relève aussi qu’ils sont encore souvent conçus en décalage avec la réalité. Cette mise en lumière des problèmes sociaux dans les écoquartier a orienté ma démarche de mémoire. Il me semble que c’est dans ces questions là que réside tout l’enjeu de la mixité sociale dans les écoquartiers. J’ai également apprécié que Vincent Renauld explique clairement sa méthodologie sur le terrain. Une autre ville sinon rien, E. Pélegrin-Genel, Les Empêcheurs de penser en rond, 2012. Comment « refaire la ville sur la ville » ? Architecte et urbaniste, Élisabeth Pélegrin-Genel cherche à faire découvrir ici des innovations spatiales, non pour leur ‘belle architecture’ mais pour les changements sociaux qu’elles génèrent. L’espace public, est métaphorisé par la figure de la ronde, associant « mouvement et circulation, rigidité et contrainte », intégrant ceux qui prennent part au jeux, excluant les autres. L’auteur s’intéresse à ce qu’elle appelle l’interstice : c’est à dire des phénomènes de détournement. Elle essaye de rendre compte d’une multitude d’initiatives qui permettent des appropriations et des utilisations de la ville axées sur le partage, la gratuité et l’égalité. Ce livre est résolument optimiste. Il se lie très facilement, et il est rédigé un peu comme un dictionnaire des nouvelles pratiques plus ou moins marginales dans la ville. Diversité sociale, ségrégation urbaine, mixité, M.C Jaillet, E. Perrin, F. Ménard, 2008. Ce livre est un ouvrage collectif. L’objectif est de présenter les contributions de chercheurs en Sciences de l’Homme et de la 135


Société qui tentent d’éclaircir les significations et les enjeux, des expressions telles que « diversité sociale » « ségrégation urbaine », « mixité sociale ». L’intérêt de ce livre est le fait qu’il revient sur des questions qui ont déjà été abordée pour analyser leur évolution. Cet ouvrage est pensé comme un compte rendu de séminaire. Ce séminaire ouvert aux praticiens, (animé par Marie-Christine Jaillet, directrice du CIRUS/CIEU, université de Toulouse Le Mirail, membre du conseil scientifique du PUCA et Evelyne Perrin), a comporté neuf séances entre janvier 2004 et janvier 2005 : Les différents chapitres sont donc écrits par des groupes de personnes différentes. Chacun y amène une vision de la diversité sociale, de la mixité et et du logement social. Ce qui est intéressant dans ce mode de rédaction est que le lecteur a l’impression de participer au séminaire. Les Écoquartiers, Pierre Lefèvre , Michel Sabard, Edition Apogée, 2009. Pierre Lefèvre et Michel Sabard se penchent sur l’art de gérer une ville durable. Ce livre présente quatorze projets d’écoquartier de façon assez complète mais factuelle, sans réelle analyse. On y trouve un récit d’opération et documents plus ou moins commentés. Le « manifeste de la coproduction participative » qui figure en épilogue est finalement la partie la plus intéressante est la plus développée. Entre voisins Dispositif architectural et mixité sociale, M Eleb. JL Violeau, 2000. Cet ouvrage rend compte d’une recherche, menée principalement sur la base d’entretiens, portant sur un immeuble récent de logements collectifs réalisé à Saint-Nazaire, la maison Radu.Pour ce projet, le maître d’ouvrage et l’architecte ont renoué avec les principes de la mixité sociale en mêlant les financements et en rassemblant des habitants d’origines, de conditions et de 136


statuts différents. Le but était de favoriser les échanges de tous ordres, de donner à cet habitat collectif des qualités de la maison individuelle. Les auteurs ont recueilli les réactions des habitants et ont cherché à faire ressortir l’intérêt de ce type d’expérience et les significations et manifestations de la mixité sociale. Une expérience d’écologie urbaine, JP Lefebvre, 1999 Deux mille logements sociaux aux espaces chaque fois différenciés, accompagnés chacun de terrasses plantées en étage, dans une douzaine de quartiers piétons peu denses, mixtes, aux formes diversifiées. Vingt collèges pourvus d’espaces ouverts aux pédagogies nouvelles, des centres commerciaux intégrés en centre ville, deux parcs, une zone d’activité à l’architecture maîtrisée par la collectivité, une première œuvre offerte à vingt jeunes architectes, tel est le bilan de la société d’aménagement de la Seine Saint-Denis animée de 1974 à 1994 par l’auteur. Dans les rapports complexes et parfois conflictuels avec les autres partenaires : architectes, Villes, Etat, banques, entreprises, cet outil d’économie mixte a expérimenté la construction d’un tissu de ville différent, des cités-jardins contemporaines, à la manière d’un laboratoire urbain. Ecologie urbaine, colloque, F Seguret et HP Jeudy, 1945 H.P. Jeudy se questionne : dans quelle mesure l’écologie est devenue un mode d’interrogation critique. Il avance qu’il s’agit d’un idéalisme qui se trompe car il se situe plutôt dans une quête de l’optimisation de la gestion d’elle-même. Selon lui l’écologie est une figure de la transmission fondée sur la peur. Tout est paysage, Lucien Kroll,1998 Lucien Kroll, dans cet ouvrage nous livre sa pensée d’une vision humaine et globale du paysage de l’architecture. Il s’oppose 137


à la vision de l’architecte qui ne fait que construire ses propres fantasmes. Il remet largement en cause le mouvement dit moderne. Sa vision de l’architecture à pour but de faire habiter, accueillir les revendications des habitants. Il raconte ses expériences de réunions participatives. Pionnier en la matière, il met aussi en avant les moyens d’une économie durable qui vise à développer les nouveaux conforts « climatiques » en allant dans le sens de la réglementation HQE (Haute Qualité Environnementale).

SUITE DE LA BIBLIOGRAPHIE - Diversité des modes d’habiter et appréciation de la gestion dans neuf quartiers d’habitat social, B. Allen, M. Bonetti, 1998 - Mixité sociale dans l’habitat : revue de la littérature dans une perspective comparative, Thomas Kirszbaum, Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, Ed. La Documentation Française, 2008 . Sur l’usage des classifications socioprofessionnelles dans les études sur la division sociale de l’urbain, François Madoré, Cahier de géographie du Quebec, vol. 49, 2005 - Ecoquartier mode d’emploi Charlot-Valdieu, C. & Outrequin, Ed. Eyrolles, 2009 - Secrets de fabrication : Analyse critique d’exemples européens, Taoufik Souami, Ed. Carnets de l’Info, 2009 - Les écoquartiers : l’avenir de la ville durable, P. LEFEVRE, éd. Apogée, 2009 - Vivre ensemble autrement – Ecovillages, écoquartiers, habitat groupé, Pascale d'Erm et Patrick Lazic, Ed. Ulmer, 2009 138


- Ecoquartiers en Europe Broché, Philippe Bovet, Ed. Terre Vivante Editions, 2009 - Le développement durable changera-t-il la ville ? Le regard des sciences sociale, Collectif Vincent Béal, Mario Gauthier, Gilles Pinson, Ed. PU Saint-Etienne, 2011

Articles - Mixité et ségrégation : de quoi parle-t-on?, M.C Jaillet, compte rendu, 2000, p5, en ligne - « Les Vignes Blanches, Cergy-Pontoise », L’Architecture d’aujourd’hui, (avril 1978), n°196 - L’écoquartier Vauban à Fribourg : une démarche globale pour une réalisation exemplaire, Joseph Rabie, Hesp’ère 21, 2009 - « Réflexions au sujet de la ville vue par en dessous », Colette Pétonnet, L’Année sociologique, Troisième série Volume 21, 1970 - “Citoyens de la ville-monde”, Paul Virilio, Le Monde Diplomatique, 1992 - L’énergie dans les écoquartiers en Europe : premiers éléments de comparaison avec la France, Philippe MENANTEAU , Odile BLANCHARD et Séverine PROST-BOUCLE, Publié le 02 février 2015 - “Énergie en (éco)quartier “, Gilles Debizet, Odile Blanchard, La revue | Numéro 2 : “Energies en (éco)quartier”, Publié le 02 février 2015. (http://innovacs-innovatio.upmf-grenoble.fr/index.php?id=207) - “Technologies de mobilisation des énergies renouvelables et de coordination énergétique dans les écoquartiers”, Gilles Debizet, Patrice Schneuwly, La revue | Numéro 2 : “Energies en (éco) 139


quartier”, Publié le 02 février 2015. (http://innovacs-innovatio.upmf-grenoble.fr/index.php?id=141) - Analyse géographique des écoquartiers, Xavier LONG, La revue | Numéro 2 : “Energies en (éco)quartier”, Publié le 02 février 2015 (http://innovacs-innovatio.upmf-grenoble.fr/index.php?id=115) - Atlas des Zac à Paris, Service urbanisme, environnement et prospective Pôle urbanisme, environnement, Ed. 2014 - EcoQuartier Notice explicative du dossier de candidature au concours écoQuartier, Ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire, 2009 - Quels espaces publics pour les écoquartiers ? Innovation et fondamentaux, C. Ansart, L. Der Madirossian, S. Martin et B. Vautrin en partenariat avec La FNCAUE (Fédération nationale des conseils en architecture, urbanisme et environnement), collection Dossiers n°261, 2013

Sites Internet - http://www.lemonde.fr/politique/article/2008/02/12/ville-l-eternel-retourdu-plan-banlieue_1010340_823448.html#Ik736vOJKUQ0CSCM.99 - http://www.la-loi-alur.org - http://www.eco-quartiers.fr - http://www.agenda21france.org - http://www.territoires.gouv.fr/les-ecoquartiers

- http://www.clichy-batignolles.fr/les-secteurs-du-projet - http://www.clichy-batignolles.fr/demain-6-500-habitants-clichybatignolle 140


vidéos CLICHY BATIGNOLLES ESPACES PARTAGES : http://www.dailymotion.com/video/x11jt70_imaginons-des-espacespartages-dans-les-nouveaux-logements-de-clichy-batignolles_news CLICHY BATIGNOLLES USAGES DES NOUVEAUX COEURS D'ILOTS : http://www.dailymotion.com/video/x11jw0f_imaginons-les-usages-desnouveaux-coeurs-d-ilots-de-clichy-batinolles_news CONCEVOIR UN ECOQUARTIER : http://www.dailymotion.com/video/xt0yog_concevoir-un-eco-quartier_ creation

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Il existe au sein des écoquartiers une mixité sociale et une diversité d’usages. On peut dire d’un quartier qu’il est durable dès lors qu’est établit un lien social durable entre les habitants. Les concertations et l’implication des habitants dans le projet de la ZAC favorisent à priori la mixité sociale. En revanche les innovations techniques des écoquartier ne sont pas vécues de la même façon par tous les habitants et peuvent présenter une forme de ségrégation. Nous verrons que les habitants font parfois preuve de « virtuosité » face à des situations qu’ils ne maitrisent pas. Tout au long de l’enquête, il s’agira de se demander si oui ou non le quartier durable joue un rôle dans la mixité sociale et de comprendre si les innovations techniques mises en place dans les logements sont à la portée de tous. Nous savons que des problèmes d’usage ont été observés dans l’écoquartier Caserne de Bonne à Grenoble. Cet écoquartier fait figure de pionnier en France et son aspect expérimental permet d’expliquer certains dysfonctionnement. Qu’en est-il des écoquartiers qui voit le jour actuellement, plus de dix ans après le lancement du premier écoquartier français ?


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