MONTRÉAL VO1 #O4 | MAI 2O16 PIKNIC PLANÉTAIRE SAMITO FESTIVALS MUSICAUX LE QUÉBEC À CANNES SOCIOPOLITIQUE DU SURHOMME FTA FRÉDÉRICK GRAVEL STÉRÉOTYPES CHORÉGRAPHIÉS 2FIK GASPILLAGE ALIMENTAIRE GORGONA
LE SON DU ROC
Danse + Théâtre
Le festival bouscule du 26 mai au 8 juin 2016
Cinq spectacles de l’étranger qui captivent
25 spectacles Réservez maintenant ! 514 844 3822 1 866 984 3822 fta.ca
L’autre hiver N. Chaurette + S. Jasmin + D. Marleau + D. Pauwels Gand + Mons + Montréal
Nos serments
1 + 2 juin Centre Pierre-Péladeau Salle Pierre-Mercure
Julie Duclos, Paris 31 mai + 1 + 2 juin Centre du Théâtre d’Aujourd’hui
« Le résultat est magique. » La Libre Belgique
«Un travail d’orfèvre magistral et sensible » Le Coryphée
The Black Piece Ann Van den Broek Anvers + Rotterdam
Jamais assez
27 + 28 mai Usine C
Fabrice Lambert, Paris 3 + 4 juin Usine C
« Une excitation envoûtante » Inferno
« Une phénoménale explosion de puissance » Théâtral-magazine.com
Gala Jérôme Bel, Paris 7 + 8 juin Monument-National « Un tour de force, férocement divertissant » New York Times
Logique du pire
Quatre créations québécoises qui cognent
Étienne Lepage + Frédérick Gravel 3 + 4 + 5 juin PDA / Cinquième Salle Création 2016 « Un laboratoire de théâtre désopilant » Le Devoir
J’aime Hydro Con grazia
Fin de série
Martin Messier + Anne Thériault
Manon Oligny
1 + 2 + 3 juin Espace Libre Création 2016 Une ode à l’agonie du monde matériel
4 + 5 + 6 juin Agora de la danse Création 2016 « Un univers d’étrangeté à la beauté inquiétante » Nightlife
Christine Beaulieu 6 + 7 + 8 juin Centre du Théâtre d’Aujourd’hui Création 2016 de Porte Parole « L’art ne cède pas au politique. » Trahir (blog)
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O1 O4 MONTRÉAL | MAI 2016
RÉDACTION
Rédacteur en chef national: Simon Jodoin / Chef de section musique: Valérie Thérien Chef des sections scène et cinéma: Philippe Couture / Chef de section restos, mode de vie et gastronomie: Marie Pâris Journaliste actualité culturelle: Olivier Boisvert-Magnen / Producteur de contenus numériques: Antoine Bordeleau Correctrice: Marie-Claude Masse
COLLABORATEURS
Ralph Boncy, Réjean Beaucage, Patrick Baillargeon, Christine Fortier, Julie Ledoux, Jérémy Laniel, Fabienne Cabado, Franco Nuovo, Monique Giroux, Alexandre Taillefer, Gildas Meneu, Normand Baillargeon, Émilie Dubreuil, Eric Godin
PUBLICITÉ
Directeur adjoint aux ventes: Jean Paquette / Ventes régionales: Céline Lebrun Représentantes aux ventes nationales: Isabelle Lafrenière, Nathalie Rabbat Représentants: Catherine Charbonneau, Antonio Genua
OPÉRATIONS / PRODUCTION
Directrice du marketing et des communications: Sylvie Chaumette Coordonnatrices marketing et projets spéciaux: Danielle Morissette Directeur du développement web: Simon Jodoin / Administrateur réseau et système principal: Derick Main Chef de projets web: Jean-François Ranger / Développeur: Mathieu Bouchard / Infographes-intégrateurs: Sébastien Groleau, Danilo Rivas, Thearron Sieng-you / Développeurs et intégrateurs web: Emmanuel Laverdière, Martin Michaud Développeur web: Maxime Larrivée-Roy / Commis de bureau: Frédéric Sauvé / Chef d’équipe administration: Céline Montminy Coordonnateur service à la clientèle: Maxime Comeau / Service à la clientèle: Sophie Privé Chef de service, production: Julie Lafrenière / Directeur artistique: Luc Deschambeault Infographie: René Despars / Impression: Imprimerie Chicoine
PHOTO COUVERTURE Jocelyn Michel | leconsulat.ca
DISTRIBUTION Diffumag 514 842-6809
COMMUNICATIONS VOIR
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LE SON DU ROC / LES ARTISTES FRANCOPHONES TALENTUEUX SONT DE PLUS EN PLUS NOMBREUX DANS LE «REST OF CANADA». Photo | Jocelyn Michel / Consulat Assistante | Stéphanie Davis Maquillage / coiffure | Laurie Deraps Styliste accessoiriste | Taos-Daphné Houasnia Production Consulat | Sébastien Boyer Décor | Télé Ciné Montréal
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SCÈNE (FTA)
Frédérick Gravel Stéréotypes chorégraphiés Le FTA en 5 arrêts
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MUSIQUE
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CINÉMA
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ART DE VIVRE
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LIVRES
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ARTS VISUELS
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QUOI FAIRE
Piknic planétaire Samito Festivals musicaux Cuvée québécoise à Cannes Sociopolitique du surhomme Gaspillage alimentaire Gorgona, le vin qui sort de prison Tout est histoire de cul... enfin presque 2Fik
CHRONIQUES
Simon Jodoin (p6) Monique Giroux (p26) Émilie Dubreuil (p36) Normand Baillargeon (p46) Alexandre Taillefer (p64)
6 OPINION VOIR MTL
VO1 #O4
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SIMON JODOIN THÉOLOGIE MÉDIATIQUE
QU’ILS MANGENT DE LA BRIOCHE C’est si mauvais que ça Les échangistes à Radio-Canada? Au point d’en faire tout un fromage? Plus plate encore que Stéréo Pop dont on a soudainement entendu parler depuis que Pierre Lapointe a pété sa coche à Tout le monde en parle? Je me demande parfois si vous ne parlez pas de météo, comme ce mois d’avril qui était vraiment le plus moche de tous les mois d’avril, comme tous les mois d’avril depuis la chute hors de l’Éden. J’aimerais dire, d’abord, que je suis radio-canadien depuis mon enfance. Je vais même vous avouer qu’on m’engage assez souvent à la radio de Radio-Canada et que j’en suis plutôt fier. Dans ce magazine, il y a aussi quelques Radio-Canadiens que j’aime beaucoup. Donc, ça m’agace un peu quand on parle de RadioCanada au grand complet, mur à mur, avec une scie à chaîne. Il y a, à la radio de Radio-Canada, en tout cas, ce qui se fait de mieux dans les médias. Je pense à Désautels le dimanche, meilleur magazine de société au pays, Les années lumière de l’excellent Villedieu, C’est fou... avec Jean-Philippe Pleau et Serge Bouchard, La librairie francophone qui nous décoince de la belle province littéraire qui pue trop souvent du nombril. Franco Nuovo, le dimanche matin. OK, il m’invite Franco, donc j’ai l’air de sucer un peu, mais quel autre morning man invite un philosophe, un linguiste et une historienne pour vous réveiller? Je ne vous parle pas de La soirée est (encore) jeune. Ils sont très bons, mais chaque fois qu’on prononce le nom de l’émission, je crains qu’on demande le lendemain à Wauthier d’animer la soirée électorale et les Olympiques. Tout n’est pas si pire qu’on le dit, mais oui, il y a cette fameuse télé de Radio-Canada, ce vaisseau amiral de cette flotte parfois un peu éparpillée. On ne fait pas que nous gaver de divertissement sucré à la télé de Radio-Canada. Il y a du bon. Du très bon. Mais quand même, du gâteau au fromage, il y en a beaucoup,
non? Je ne vais pas vous faire la liste au grand complet, vous le savez. On est quand même pas mal divertis, vous ne trouvez pas? Ça nous fait tout un bagage de variétés. J’ai beau parcourir cette grille horaire au gré des saisons, il manque quelque chose. Je lis les descriptions des émissions – on parle de «concepts» en langage médiatique – et si je vous mets tout ça bout à bout, ça donne une sorte de pain très moelleux. Un pain aux raisins. De la brioche. À la fois divertissante et indiscrète, la nouvelle Caméra 360i dévoile tout ce qui se passe autour de la table. Dans une atmosphère conviviale, deux équipes s’affrontent dans une variété de jeux intelligents et amusants. Une nouvelle émission quotidienne qui traite de la vie de tous les jours. Le public présent sera chouchouté. Un rendez-vous divertissant pour faire le point dans votre journée et traiter d’une multitude de sujets qui animent votre quotidien. Ti-Mé et son comparse Pogo continuent d’alléger les vendredis soirs. Un moment donné, ça ne peut pas être une simple question de compressions budgétaires et de pressions politiques. Ça ne peut pas être toujours la faute de Harper qui n’est même plus là. Il y a des gens qui prennent des décisions et qui, visiblement, aiment manger moelleux. OK, Marina Orsini ou Entrée principale, mettons. Qu’elles chouchoutent le public et se touchent le quotidien léger une fois par jour, ces émissions, ce n’est pas illégal. Mais est-ce qu’on est vraiment obligé de me les servir en reprise après le bulletin de nouvelles de 22 heures? Ça, c’est limite immoral, quand on a les mains dans l’eau savonneuse pour terminer la vaisselle, de nous forcer à chercher la télécommande en panique. Est-ce que ça coûterait si cher d’aller poser deux ou trois caméras dans un théâtre de temps en temps? Il y a une foule de pièces qui se jouent toutes les saisons au Québec. Nous payons collectivement le travail de ces artistes. Il est bien amusant et divertissant Fabien Cloutier.
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Est-ce qu’on aurait pu aller filmer, par exemple, sa pièce rude et tragique Pour réussir un poulet qu’il présentait en 2014? Il s’agissait de filmer cinq comédiens sans trop d’effets spéciaux. Un plan fixe aurait pu faire l’affaire. C’est un exemple qui me vient à l’esprit, mais il y a en a mille. Qui a pu voir le spectacle coup-de poing Mommy – non, ce n’est pas du Dolan – d’Olivier Choinière, un auteur incontournable de ma génération? Et Philippe Ducros – mon ami –, qui proposait L’affiche il y a quelques années à l’Espace libre et au Périscope, une pièce saluée par la critique sur le conflit israélo-palestinien? Pas si acrobatique, il me semble. On filme deux soirs et c’est emballé. Un petit montage, et hop! allez, on diffuse. Les technologies agiles et légères dont nous disposons désormais ne permettent aucune excuse. Trop compliqué? OK. Allons en coulisse alors! Discutons avec les auteurs, les comédiens, les metteurs en scène. Voyons leur travail en répétition. En décembre 2015, ARTV présentait en grande pompe Les Morissette en coulisse. Oui, ces Morissette-là, le couple Véronique Cloutier et Louis Morissette. «Un des spectacles les plus attendus des dernières années», disait-on. Une émission produite par, je vais vous étonner... la boîte de Louis Morissette! Qui d’autre a-t-on pu voir en coulisse à part ces deux-là? Quelle autre production théâtrale a eu droit à une telle forme de promotion? Je voudrais entendre des dizaines de noms. Ce mois-ci, ce sera le Carrefour international de théâtre à Québec et le FTA à Montréal. Des événements phares pour les arts de la scène au Québec. Qui le saura? Qui sera averti? Qui pourra voir?
Ce n’est quand même pas si exotique d’espérer que, parfois, en soirée, après les nouvelles du sport et la météo, on nous documente un peu sur ce qui se passe dans la tête de tous ces créateurs qu’on n’invite jamais dans les jeux télévisés. Et hormis ces productions théâtrales, de la même manière, il n’y aurait pas un petit spectacle de musique à filmer dans une petite salle quelque part? Au Divan orange ou au Cercle? Des musiciens à découvrir? Une visite dans leur local de répétition? Et qu’en est-il de la vie intellectuelle? Les discussions abondent dans toutes les sphères des sciences sociales. Depuis quelques années, des bataillons de jeunes intellectuels et auteurs publient des essais, des ouvrages collectifs, créent des débats. Nous payons collectivement des chercheurs dans les universités. Il n’y a même pas une petite heure et demie pour une discussion toute simple? Pas besoin de bancs qui tournent, de centaines d’écrans interactifs accrochés sur les murs, d’applications mobiles pour voter et choisir son angle de vue, de campagnes publicitaires qui valent plus cher que nos maisons imaginées par un stratège dans une agence de pub. Juste une discussion. Juste de la culture. Ce serait vraiment si compliqué? Inabordable pour un diffuseur public? Allons. Je n’y crois pas.Pas une seconde. y sjodoin@voir.ca
8 SCÈNE / FTA VOIR MTL
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VO1 #O4
L’ ANTI-HÉROS DE LA DANSE EN VISANT LA TÊTE, LE CŒUR ET LE SEXE, FRÉDÉRICK GRAVEL SÉDUIT TOUTES SORTES DE PUBLICS. DIGNE REPRÉSENTANT DE LA NOUVELLE VAGUE QUÉBÉCOISE SUR LA SCÈNE INTERNATIONALE, CE CHORÉGRAPHE ET MUSICIEN PREND DOUBLEMENT L’AFFICHE DU FESTIVAL TRANSAMÉRIQUES. PORTRAIT. MOTS | FABIENNE CABADO
PHOTO | ANTOINE BORDELEAU
Rares sont les chorégraphes de danse contemporaine qui réussissent à faire frétiller les ados autant que les critiques les plus férus du genre. En titrant sa toute première œuvre Plutôt divertissant, en 2003, Frédérick Gravel en annonçait la couleur. Comme bien des créateurs après lui, il voulait briser l’image élitiste de cet art méconnu. Il faut dire qu’avec deux grands-pères musiciens et une mère prof de danse, il associait naturellement la danse et la musique à des événements festifs, rassembleurs. Il n’avait pas imaginé devenir chorégraphe jusqu’à ce que, à 20 ans, au détour d’un cours en sciences politiques, il découvre le Département de danse de l’UQAM et s’y inscrive par curiosité. Il n’avait pas non plus imaginé passer des jams de sous-sol à la scène jusqu’à ce que, par manque d’argent, il décide de composer et d’interpréter lui-même les trames sonores de ses spectacles. En mettant en scène son band et en entrecoupant les séquences dansées de discours à la fois drôles et (im)pertinents, il a relevé le défi de marier intelligence et divertissement. Car, loin d’être légers, ses spectacles s’interrogent sur la société contemporaine et la place réservée à l’art tout en traduisant les désirs et errances des gens de sa génération. C’est notamment le cas de la pièce de théâtre Logique du pire, présentée au FTA par Étienne Lepage, avec qui il collabore pour la seconde fois.
Génération aux ailes coupées «Si on vient voir ce spectacle en se disant que c’est de la danse, on peut penser que le chorégraphe n’a pas beaucoup travaillé», lance-t-il, rieur, attablé dans un restaurant face au parc La Fontaine, à deux pas de son studio de répétition. «Le texte est beaucoup plus dense que dans Ainsi parlait…; il ne laissait pas de place à une écriture chorégraphique. Alors, on a travaillé la mise en scène de façon organique, comme en danse, en écoutant le texte et en décidant de la meilleure façon de le jouer et de développer la physicalité des acteurs.» Dans cette œuvre au verbe corrosif, les deux créateurs mettent en scène cinq trentenaires dépités face au monde qui s’écroule. Des êtres à l’identité incertaine et à l’ego chancelant qui cherchent comment voler sans ailes, comment tenir debout face à l’échec, on en trouve aussi dans les créations de Gravel avec des titres comme Tout se pète la gueule, chérie ou Usually Beauty Fails. «C’est assez représentatif de notre génération, reconnaît l’artiste de 38 ans. J’ai l’impression qu’on est nés dans une période avec un beau projet social, plutôt clair et optimiste, mais qu’un pessimisme s’est installé très vite et que nous avons vécu une
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DIRECTION ARTISTIQUE CLAUDE POISSANT
Théâtre Denise-Pelletier
Le Timide à la cour Assoiffés
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DE TI R SO D E MOL I NA M ISE E N SC È N E AL E X A N DR E F ECT EA U
DE WAJ DI M O U AWAD M IS E EN S CÈNE BENO ÎT VER M EU LEN
1984
L’avare
DE GE OR GE ORW E L L M ISE E N SC È N E E D I T H P A T EN A U DE
DE M O LIÈR E M IS E EN S CÈNE CLAU DE PO IS S ANT
UNE SA ISON OÙ R ÉP ER TOI R E E T C RÉ A T ION S’ATTI R ENT B ILLE T T E RIE 514 2 5 3 -8 9 7 4 D E NISE - PE LLE T I ER . QC. CA
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Partenaire de saison
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suite de pertes de confiance en l’avenir. Le référendum aurait pu apporter un renouveau, mais on s’est plutôt enfoncés dans une absence de projet social. On dirait qu’on essaye juste de gérer qu’on manque d’argent pour réaliser quoi que ce soit. Ça paraît dans mes shows. Je cherche où on en est rendu, comment on peut encore se parler, ce qu’on peut encore faire malgré ce constat d’échec. J’y mets une touche de réalisme qui rend les choses un peu croches; je trouve ça plus beau.» D’une génération à l’autre On le comprend en l’écoutant, Fred Gravel est un gars de gang. En 2004, il cofonde avec sa bellesœur, la chorégraphe Marie Béland, la plateforme de création chorégraphique La 2e Porte à Gauche (L2PAG) avec, entre autres, l’idée de repenser le rapport au public en présentant des œuvres dans des espaces publics, des appartements, des hôtels, des bars de danseuses… Produite par L2PAG et aussi à l’affiche du FTA, Pluton est composée de quatre courtes œuvres réunissant un chorégraphe trentenaire aguerri et un ou deux pionniers de la danse contemporaine québécoise. Gravel y est jumelé à Paul-André Fortier qui, comme lui, est membre de Circuit-Est centre chorégraphique, un autre collectif. Sa danse physique et sensuelle, tout en cassures et en déséquilibre, rencontre les lignes pures et le parfait contrôle de cet homologue de 30 ans son aîné. «Avec Paul-André, nous avons dû trouver une façon de concilier nos deux cultures chorégraphiques. J’ai aimé sa confiance et son ouverture d’esprit. Il est très comique, très à l’aise avec l’idée d’aller dans l’absurde. Son solo était d’abord assez clownesque, mais il est devenu minimal avec un passage où on voit les esthétiques se battre. Je voulais quelque chose qui se passe dans l’effort, qu’on sente la tension, la difficulté du projet. Qu’un danseur mature ose montrer cette vulnérabilité est ce qui est le plus touchant pour moi.» Un pour tous, tous pour un Fondé en 2006, le Grouped’ArtGravelArtGroup, dit le GAG, fonctionne évidemment en mode collectif. «J’ai toujours besoin d’être en dialogue. Cela me pousse à être meilleur. Je ne pourrais pas travailler avec quelqu’un qui penserait que je détiens toute la vérité. Mon écriture ne sert qu’à révéler la personne, à tenir un ensemble, à créer un rythme, un parcours quelconque que le public a envie de suivre. La vérité est dans la personne, pas dans l’écriture. Mes collaborateurs du GAG sont d’ailleurs tous meilleurs que moi. Et si d’être programmé au FTA en 2009 a donné un certain élan à ma carrière, la chance de ma vie a surtout été d’avoir
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une formidable équipe dès le départ. J’aime cette idée qu’ensemble, on finit par élaborer ce à quoi on tient et que je ne sois pas le seul garant de l’esthétique. De la même façon, les autres ont élevé les standards de La 2e Porte au fil des ans.» Au chapitre des projets communs, Frédérick Gravel est aussi membre du conseil d’administration des Prix de la danse de Montréal qui, depuis 2011, contribuent à mieux inscrire le Québec sur l’échiquier chorégraphique mondial. «Je pense qu’il faut absolument que la culture prenne plus de place dans notre quotidien à tous, qu’on prenne une posture plus intellectuelle pour éviter bien des problèmes. Les articles de fond disparaissent dans
LOGIQUE DU PIRE, PHOTO | STÉPHANE NAJMAN
les médias, la télé est plate, on reste dans l’anecdote, plus rien ne se passe. Nous devons, comme société, nous botter le cul pour devenir plus intéressants. C’est pour ça que je m’implique dans les Prix de la danse. Pour que ça se passe.» Avec 25 propositions au FTA, dont plusieurs sont gratuites, on a déjà des pistes intéressantes pour se déniaiser. Allez, go! y Pluton – acte 2 du 28 au 30 mai à l’Agora de la danse Logique du pire du 3 au 5 juin à la 5e salle de la Place des Arts Dans le cadre du FTA
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STÉRÉOTYPES CHORÉGRAPHIÉS ÊTRE FEMME OU ÊTRE HOMME, PAS SI SIMPLE. DANS UNE ÉPOQUE QUI MÉLANGE LES GENRES ET LES SEXES AUTANT QU’ELLE LES EMPRISONNE DANS LES STÉRÉOTYPES, LES CHORÉGRAPHES MANON OLIGNY ET PIETER AMPE CHERCHENT UN ESPACE DE LIBERTÉ AU FTA. MOTS | PHILIPPE COUTURE
Elle est québécoise. Il est flamand. Elle crée une danse frénétique qui s’interroge sur l’aliénation et la marchandisation du corps féminin. Il invente une danse libre et impudique qui expose l’intimité et la sexualité mâle. Mais Manon Oligny et Pieter Ampe réfléchissent tous deux à la question du genre, à leur appartenance à une féminité et une masculinité complexe, toujours enfermée dans des stéréotypes réducteurs même si l’époque encourage en apparence la liberté. Dans sa nouvelle pièce Fin de série, Oligny collabore avec l’essayiste Martine Delvaux pour explorer des identités féminines formatées à l’extrême, mais aussi entrevoir une émancipation possible. Dans So You Can Feel, Pieter Ampe débarque seul sur scène et fait de son corps nu le champ d’expérimentation d’une sexualité aussi libre et folle que vulnérable et parfois contrainte par les codes de la virilité. Des femmes en série Manon Oligny explore depuis longtemps, dans des pièces comme Icônes à vendre ou Blanche-Neige, l’enjeu de la standardisation du corps féminin, en réaction à une société qui fait de ce corps un espace de conformisme. «Ça passe depuis longtemps dans mon travail, explique-t-elle, par l’idée de la série, de la multiplication du corps féminin en clones ou en doubles quasi identiques les uns aux autres. Mais cette fois, tout en reproduisant le concept de la femme en série, dont l’identité profonde est disparue, dont le look conformiste est dicté par l’industrie, je m’intéresse à la série comme espace de solidarité entre les femmes, comme lieu d’une résistance en préparation.»
PHOTOS | YANICK MACDONALD
Inspirée par l’essai de Martine Delvaux, Les filles en série. Des Barbies aux Pussy Riot, et par des discussions avec l’auteure (qui agit comme dramaturge dans cette nouvelle création), la chorégraphe s’intéresse à une identité féminine en transformation dans l’espace public actuel, alors que se poursuit une quête du corps parfait de mannequin, mais que s’organise en parallèle une forte dénonciation. «Ce sont des femmes prises dans les exigences de la perfection et de la performance, certes, mais elles sont aussi de plus en plus capables d’exprimer une rébellion, à travers la solidarité qui les unit. Je pense que ça correspond au renouveau actuel du féminisme, un féminisme qui réunit de nouvelles communautés.» Fidèle à elle-même, Oligny offrira une danse explosive et agitée, mais cette fois également combative. «J’aime comparer ma danse à une chaîne de montage: ce sont des lignes qui s’enchevêtrent comme par glissements, comme du tricot dont les mailles se croisent sans cesse. On peut aussi voir ça comme de la course à relais: c’est une danse très athlétique. Les femmes en série tentent de survivre, de lutter contre leur propre finitude, de se libérer d’une aliénation, dans une danse qui agit sur plusieurs fronts simultanément.» Le mâle dénudé Les spectateurs montréalais connaissent Pieter Ampe pour l’avoir vu au FTA en 2011 dans Still Standing You, en duo avec son grand ami Guilherme Garrido. L’amitié au masculin, entre bromance et
FIN DE SÉRIE, DE MANON OLIGNY
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concurrence, y était décortiquée dans une danse brute et sexualisée, mais aussi dans une tonalité gamine et ludique. En se présentant cette fois seul en scène, Ampe évolue dans un territoire d’intimité radical: il se met à nu, au sens propre comme au sens figuré, dévoilant le corps et l’intériorité d’un mâle en pleine crise de sexualité. «Je crois, dit-il, que les contextes dans lesquels nous vivons influencent beaucoup ce que nous développons de notre sexualité, ce que nous affichons, ce que nous acceptons ou non d’explorer. Personnellement, je ressens une énergie féminine forte avec laquelle j’ai envie de connecter, mais, bien sûr, les codes de la masculinité que je perçois en moi et autour de moi créent parfois un mur entre moi et cette identité féminine qui m’habite. J’essaie, dans ce spectacle, de représenter cette tension et de confronter la masculinité.» Dans ce «strip-tease progressif», le performeur finira par tout dévoiler, par toucher au plus haut niveau d’intimité et de vulnérabilité, cherchant à «atteindre la sexualité la plus naturelle, la plus intrinsèquement humaine et quotidienne». Mais le
parcours vers cette forme de pureté sexuelle ne peut pas se faire sans un détour par les stéréotypes mâles auxquels la sexualité est toujours associée, pense Pieter Ampe, qui s’amuse d’abord à jouer les machos ou les sportifs de plage. «Ce parcours correspond en quelque sorte à différentes étapes de ma vie. J’ai déjà été ce gars stéréotypé, qui affiche sa masculinité clichée en maillot de bain au beach-volleyball, et je suis aussi aujourd’hui un mâle barbu qui célèbre des attributs virils. Mais plus le spectacle avance et plus j’embrasse mon ambiguïté sexuelle, plus le portrait se nuance et se complexifie.» Une expérience d’intimité profonde, pour un public complice. y Fin de série, du 4 au 6 juin à l’Agora de la danse So You Can Feel, du 5 au 8 juin au Théâtre Prospero Dans le cadre du Festival TransAmériques (FTA)
14 SCÈNE / FTA VOIR MTL
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LE FTA EN 5 ARRÊTS EN AMÉRIQUE DU NORD, LE FTA N’A PAS SON PAREIL: UN FESTIVAL ICONOCLASTE ET ALLUMÉ QUI FAIT NOTRE FIERTÉ ET NOTRE RENOMMÉE. LA PROGRAMMATION DE CETTE ANNÉE VA DANS PLUSIEURS DIRECTIONS. LAISSEZ-NOUS VOUS TRACER UN PEU LE CHEMIN. MOTS | PHILIPPE COUTURE
PHOTO | SIMON HALLSTROM
PHOTO | FALKWENZEL
PHOTO | ALEXI HOBBS
LE SPECTACLE INCONTOURNABLE / UNE ÎLE FLOTTANTE
L’INQUIÉTANTE ÉTRANGETÉ / THE VENTRILOQUISTS CONVENTION
LE THÉÂTRE DOCUMENTAIRE DE CHEZ NOUS / J’AIME HYDRO
Christoph Marthaler n’est pas venu présenter un spectacle à Montréal depuis 1997. Une honte. Car le grand metteur en scène suisse-allemand, qui a inventé une esthétique unique, sorte de torsion du vaudeville dans un espace-temps éthéré et dans de fabuleux décors rétro-kitsch, n’a pas cessé, depuis, d’ébahir les spectateurs européens avec des spectacles formellement jouissifs. Il était temps que nous ayons notre dose. Une île flottante (Das Weisse vom Ei) est une adaptation d’un vaudeville de Labiche dans lequel Marthaler s’amuse avec les langues, croisant l’allemand et le français dans de savantes incompréhensions. Ses acteurs sont aussi de fabuleux chanteurs: chez Marthaler, la musique et le chant arrivent de partout, se déployant dans un mouvement quasi indétectable.
Digne descendante artistique de Kantor et de son théâtre conviant les fantômes sur scène en croisant les acteurs et les marionnettes ou les poupées de cire, la Française Gisèle Vienne travaille depuis des années avec l’auteur américain Dennis Cooper. Cette fois, dans cette pièce qui reconstitue le congrès international annuel des ventriloques, elle convie sur scène les marionnettistes allemands du Puppentheater Halle, parmi les meilleurs en Europe. La marionnette, chez Gisèle Vienne, n’est pas qu’illusionniste: elle est au cœur d’un étrange ballet entre la présence et l’absence, entre la vie et la mort, entre l’ici-maintenant et l’infiniment archaïque.
La comédienne Christine Beaulieu joue à l’enquêteuse depuis plusieurs mois pour créer J’aime Hydro, dont la mise en scène sera signée Philippe Cyr. La première partie, présentée au dernier OFFTA, nous a permis de découvrir une forme théâtrale documentaire inusitée s’inspirant de la série radiophonique américaine Serial pour inventer une forme de théâtre sonore qui pourra être diffusée en plusieurs épisodes sur scène comme en baladodiffusion. Mais c’est le fond qui compte: Beaulieu cherche notamment à interroger le désir de surproduction d’Hydro et son appétit à installer de nouveaux barrages.
PHOTO | GUIDO MENCARI
LE THÉÂTRE EXPÉRIENTIEL DE CASTELLUCCI / GO DOWN, MOSES On ne sait jamais où va nous emmener l’Italien Romeo Castellucci. Son puissant théâtre d’images mais aussi de sensorialité, qui va parfois jusqu’aux limites des possibilités de la scène et flirte magnifiquement avec l’inconscient, est aussi auréolé de sacré. C’est le cas de cette nouvelle production inspirée d’un hymne religieux des esclaves noirs américains et du mythe de Moïse. On se prépare à l’ébranlement.
LA RÉVÉLATION DANSE / JAMAIS ASSEZ Gros succès du dernier Festival d’Avignon, cette chorégraphie de Fabrice Lambert a été notamment applaudie pour ses puissantes figures de groupe et son caractère explosif. «Danse de feu», ont dit les uns; «poésie futuriste», ont dit les autres. Ce sera assurément une importante découverte pour les spectateurs montréalais.
Le Festival TransAmériques (FTA) se déroule dans plusieurs lieux du 26 mai au 8 juin
PHOTO | CHRISTOPHE RAYNAUD DE-LAGE
piknic planétaire l’incontournable événement estival montréalais piknic électronik est devenu une marque commerciale sur les cinq continents de la planète et se développe à fond à l’international. MOTS | VALÉRIE THÉRIEN
PHOTO | ANTOINE BORDELEAU
17 musique VOIR MTL
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epuis un peu plus d’un an, Piknic Électronik fait beaucoup de bébés. En effet, le concept de Piknic Électronik est désormais présenté à Barcelone, Lisbonne, Melbourne, Santiago et Dubaï. Et ça continue: l’équipe travaille également à tenter de l’exporter prochainement dans les villes de Sydney, de Madrid et de Paris, par exemple.
PHOTOS | DE GAUCHE À DROITE CHARLES WILLIAM PELLETIER OLIVIER DROUIN PÉTÉ PHOTOGRAPHIE
Piknic Électronik, créé en 2003, est une messe du dimanche pour les mélomanes friands de musique électronique et pour les jeunes familles. Chaque jour du Seigneur, de mai à octobre, l’événement s’installe autour de la sculpture d’Alexander Calder sur l’île Sainte-Hélène et présente des DJ internationaux et locaux dès 14h et jusqu’au coucher du soleil. Le site est magnifique avec sa vue sur la ville, la musique est entraînante et la bonne humeur est omniprésente dans ce contexte généralement très relax et convivial. C’est cette même recette gagnante qui est maintenant implantée dans plusieurs autres métropoles du monde. «C’est le rituel, la récurrence, un rendez-vous hebdomadaire. Et le fait que ce soit le dimanche est aussi important dans le concept, parce que le samedi, t’as pas le même rapport avec la journée. C’est pour ça qu’on n’en fait pas une fête jusqu’à 3h du matin, explique Pascal Lefebvre, cofondateur et président de Piknic Électronik inc. Souvent, les fêtes en lien avec la musique électronique sont associées à ça. Ici, c’est pas ça l’idée, c’est un concept diurne. L’expérience qu’on propose semble avoir une écoute très favorable. Y a tout le phénomène EDM qui est arrivé, mais on est à l’antithèse de ce genre de rassemblement de 50 000 personnes. Nos événements attirent plutôt entre 5000 et 6000 chaque semaine, ce qui est beaucoup de monde, mais ça reste à échelle humaine.»
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LES GRANDS SPECTACLES
en collaboration avec
MAISON SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL, PdA – 20 H ͱͰЈͱͱ 9h.D
UNE CRÉATION ORIGINALE DES FRANCOFOLIES DE MONTRÉAL
GAINSBOURG SYMPHONIQUE AVEC L’ORCHESTRE SYMPHONIQUE DE MONTRÉAL SOUS LA DIRECTION DE SIMON LECLERC
TENDANCES
SAFIA NOLIN
PREMIÈRE PARTIE
ARTHUR H ET L’OSM INTERPRÈTENT
HISTOIRE DE MELODY NELSON
DEUXIÈME PARTIE
JANE BIRKIN ET L’OSM INTERPRÈTENT
LE MEILLEUR DE GAINSBOURG
L’ENVOL
CLUB SODA – 19 H
16 JUIN
ͱͱЈͱͲ 9h.D
17 JUIN
YANN PERREAU
LIMOILOU
THOMAS FERSEN SOLO
Première partie : Amylie
LES NUITS
GESÙ – 20 H 30
ALEXANDRE DÉSILETS
Première partie : Jeanne Rochette
Lancement de l’album orchestral
WINDIGO
MÉTROPOLIS – 21 H
en collaboration avec
11 JUIN
OXMO PUCCINO
ͱʹЈͱ͵ 9h.D
LOUISE ATTAQUE
Première partie : D-Track
Premières parties : La Bronze (14/06) Radio Elvis (15/06)
BILLETTERIE : PLACE DES ARTS Ё ͵ͱʹ ʹͲЄͲͱͱͲ ϥ ͱ ͶͶ ʹͲЄͲͱͱͲ ϥ ßÅ æ âíæϟ ÓË CLUB SODA Ё ͵ͱʹ ͲͶЄͱͰͱͰ ϥ Åò æÓ ϟ GESÙ Ё ͵ͱʹ ͶͱЄʹͰͳͶ ϥ ͱ ͵͵ ͷͰЄͱͲʹ͵ ϥ ˳ææ³ÓÌϟ ÓË MÉTROPOLIS Ё ͱ ͵͵ ͷͰЄͱͲʹ͵ ϥ í³ Â íË æí âϟ
FRANCOFOLIES.COM
15 JUIN
17 JUIN
KARIM OUELLET
Première partie : Claude Bégin
19
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Passer le test
Montréal laboratoire
La raison de cette récente exportation en série de Piknic Électronik est que son édition-test à Barcelone, créée en 2013, a eu le temps de mijoter. Et ça a plus que passé le test. Après sa troisième année, l’événement attirait autant de monde qu’à Montréal. «Et c’est exactement ce qui est en train de se passer à Melbourne où on a des foules de 3200 personnes par événement après une deuxième année», dit M. Lefebvre en précisant que les initiatives de Piknic telles que l’utilisation des verres réutilisables Ecocup sont transmises aux nouvelles éditions.
Si le concept fonctionne bien à l’international, serait-ce une avenue possible pour son petit frère, Igloofest, où les DJ réchauffent les foules en plein hiver au Vieux-Port de Montréal depuis 10 ans? «Oui, c’est sûr. Ce qu’on essaye, avec notre stratégie d’exportation et notre modèle d’affaires, c’est que Montréal soit un peu un laboratoire d’expériences. L’idée est qu’on arrive à développer d’autres expériences sociales, au-delà de l’expérience Piknic et Igloofest, qu’on teste à Montréal, et qu’ensuite les coproducteurs avec qui on travaille à l’international et qui connaissent notre modèle d’exploitation puissent les prendre et les développer dans leur ville pour qu’il y ait une contamination.»
«Barcelone a évolué plus vite. C’est sûr que la courbe d’apprentissage qu’on a eue à Montréal a été plus longue. On a mis du temps, du jus de bras et de la réflexion pour bien faire grandir le concept, pour ne pas que ce soit trop mainstream ou que ça devienne juste un party. On devait se demander aussi comment calibrer les fonctions: la fonction musicale, la fonction bouffe, la fonction environnement. Y a un contexte d’accueil qui est super important, et la recette, l’idée, c’est le rassemblement, le côté social. Y a des gens qui viennent pour la programmation, mais les gens viennent d’abord parce que c’est un dimanche agréable avec des amis.» Chaque nouvelle entité de la marque Piknic Électronik est un investissement, mais pour réduire le risque financier que cela représente, le président de l’entreprise explique qu’il est important de bien viser des villes dont l’ADN culturel ressemble à celui de Montréal. Ça commence par un formulaire sur le site web de Piknic Électronik où les villes peuvent postuler afin d’exporter le concept et ensuite il faut trouver un solide allié local. Tout ce processus de mise en place prend habituellement de 6 à 12 mois. «Quand les gens répondent au formulaire, on leur envoie une étude de marché. On veut comprendre le marché de la musique électronique là-bas. On veut comprendre la compétition, ça nous donne des balises. Ensuite, on va plus loin dans l’analyse. On va sur place, faire des études, feeler la place, la scène. Le terrain, y a rien qui parle plus que ça. Si on décide que c’est intéressant, il faut trouver un producteur avec qui travailler là-bas. On travaille en coproduction. Essentiellement, la production est assumée par le producteur local: trouver le lieu, les permis, toute la production. Et nous, on assure toute la communication et le marketing, les campagnes qui sont en lien. C’est la même image, le même logo, le même site web que Montréal et on gère les réseaux sociaux avec le partenaire local. C’est la campagne de Montréal qui se retrouve partout à travers la planète. Y a une alliance qui se fait avec le partenaire local pour la programmation parce qu’il y a un mélange d’artistes internationaux et locaux. Y a donc un sentiment d’appartenance local qui se développe. C’est pas Montréal qui débarque et qui s’en va faire un Piknic à Melbourne, c’est l’esprit du concept qui débarque et c’est Melbourne qui fait son Piknic.»
PHOTO | OLIVIER DROUIN
«C’est sûr qu’avec Igloofest, on est dans un autre rapport, un rapport à l’hiver. Déjà, on vient de s’enlever quelques villes, poursuit Pascal Lefebvre. Ça prend un contexte urbain, une ville où y a de vrais hivers. C’est un événement plus coûteux et avec des budgets plus imposants, donc on ne peut pas avoir les mêmes partenaires. À terme, on se concentre plus sur Piknic Électronik, mais on est en train de valider ce que serait le modèle d’affaires, quel type de partenariat on aurait besoin pour développer Igloofest.» On peut rêver à des éditions d’Igloofest dans les pays scandinaves, en Allemagne et au Japon. Mais entre-temps, il ne faut pas oublier ses origines. L’équipe de Piknic Électronik prépare activement sa 14e saison dans sa ville mère. La saison 2016 commencera par le traditionnel double Piknic des dimanche et lundi 22 et 23 mai. L’événement roulera ensuite tous les dimanches de l’été jusqu’au 2 octobre. y piknicelectronik.com
20 musique VOIR MTL
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métissage naturel samito s’inscrit dans une vague récente de musiciens fusionnant des sonorités électroniques et traditionnelles. il finalise actuellement son premier album homonyme pour le sortir à la mi-mai, alors qu’il devait initialement paraître en 2015. aux côtés d’artistes tels que pierre kwenders et king abid, il fait partie d’un métissage musical assumé mais en aucun cas forcé. MOTS & PHOTOS | ANTOINE BORDELEAU
> C’est au Studio La Traque, en plein enregistrement, que je rencontre le sympathique Mozambicain d’origine. Alors qu’il roule sa bosse dans le paysage musical québécois depuis maintenant 11 ans (notamment avec Radio Radio et Nom de Plume), Samito sera son premier album solo. Puisant tout autant dans la musique plus traditionnellement africaine que dans un électro moderne, Samito se veut un digne représentant d’une nouvelle école de pensée que l’on pourrait presque qualifier de post-world. Les savants mélanges musicaux ont le vent dans les voiles ces temps-ci, si l’on se fie aux succès récents d’autres artistes œuvrant dans la même veine.
Bien que les traditionnels chansonniers s’accompagnant à la guitare acoustique et les quatuors rock standards aient marqué le public québécois, Samito cite plutôt l’influence qu’ont eue des groupes comme Les Colocs ou Dobacaracol sur celui-ci. «C’est sûr que leurs mélanges étaient plus près d’un mix ethnique très traditionnel comme on le concevait dans les années 1990 et au début des années 2000, mais on ne peut pas ignorer que ces groupes-là ont eu assez de succès pour ouvrir des portes. Nous, on arrive au bon moment, l’Afrique commence à être vue comme plus cool, on parle de tissus africains, de l’art de ce continent… On est chanceux d’être ici à ce moment précis.»
Pour lui, la fusion entre world et musique électronique n’était pas un but en soi, mais bien une évolution naturelle: «Historiquement, on a souvent séparé la musique ethnique et le reste, mais je pense qu’on est rendus à un endroit où tout ça est tellement accessible, il n’y a plus de barrières précises.» Les notions qu’il soulève sont rudement intéressantes; l’époque actuelle est fortement marquée par un accès universel à des ressources et à de l’information venant de partout. C’est donc inévitable que des styles que l’on concevait anciennement comme hétérogènes finissent par se combiner pour créer de nouvelles classifications.
Lorsque questionné sur le retard inusité qui fait que l’on attend encore son opus initial, Samito l’explique en ces termes: «Le processus du premier album a été assez long. J’ai commencé à travailler dessus il y a cinq ans avec un autre réalisateur, et ça a été très formateur. Mais rendu à la fin, j’étais carrément dans une autre zone. L’album était fini, et on le lancera peut-être d’une autre façon, mais on a décidé de changer de direction l’an passé juste avant la date prévue initialement. Je venais de retrouver Benoît Bouchard, qui réalise maintenant... On a travaillé sur quelques chansons et c’était vraiment plus la direction que je visais. Au même moment, Costume Records a montré son intérêt pour moi, alors c’était comme le parfait timing pour repartir sur des bases neuves.»
Alliage cohérent C’est une chose de mélanger des genres musicaux, mais c’en est une autre d’y arriver avec brio et de percer l’industrie musicale saturée de la scène québécoise. Selon Samito, ce n’est pas par pur hasard que sa musique et celle de Kwenders charment: «Déménager à Montréal m’a amené à l’endroit où je devais être, selon moi. C’est une ville où le multiculturalisme est partout, et ma musique répond d’une façon à ce que je vois et ce qui m’entoure, je crois. Même ailleurs au Québec, l’accueil est chaleureux, et ça se sent dans la réception de notre musique, à mon avis.» Mais le passé musical de notre province n’est pas non plus étranger à l’acceptation à bras ouverts de cette world revisitée.
Au bon endroit au bon moment, cet album initiateur pour Samito fera certainement des vagues. Espérons que cette tendance de mixologie musicale ne s’essoufflera pas et que l’on aura droit à de nombreux métissages inusités dans le futur. y L’album Samito sera disponible dès le 27 mai 2016. Le lancement de l’album se tiendra le 26 mai au Bar le Ritz PDB en formule 6 à 8.
22 musique VOIR MTL
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Ça vaut le déplacement la haute saison des festivals s’amorce le mois prochain, mais on vous propose ici trois festivals qui valent la peine de prendre la route en mai. MOTS | VALÉRIE THÉRIEN
fimav
fhosq
fgmat
19 au 22 mai, Victoriaville
19 au 22 mai, Sherbrooke
28 mai au 4 juin, Rouyn-Noranda
Le Festival de musique actuelle de Victoriaville est un vrai trésor pour les mélomanes avertis. La musique alternative est reine le temps d’un week-end autour du boulevard Jutras. On peut voir au FIMAV autant des légendes méconnues que des groupes émergents au grand potentiel. L’année dernière, par exemple, le multi-instrumentiste Jean Derome célébrait ses 45 ans de carrière au FIMAV lors de la soirée d’ouverture et, quelques jours plus tard, on pouvait y voir sur scène la puissante collaboration art-rock entre Jerusalem in My Heart et Suuns. Cette année, côté légendes, le FIMAV présente le trio italien Musica Elettronica Viva qui, 50 ans après sa création, tripe encore à faire de l’improvisation au piano et aux claviers. La lauréate du prix Polaris 2014 Tanya Tagaq y sera également, accompagnée d’une chorale expérimentale. Côté découvertes: les mondes enivrants de Fet.Nat (Hull) et Big Brave (Montréal). Une chose est certaine: si vous passez du temps au FIMAV, vous allez être subjugués par l’offre musicale. fimav.qc.ca
Grand événement annuel, le Festival des harmonies et orchestres symphoniques du Québec s’installe en Estrie. Chaque année, des harmonies, des orchestres symphoniques, des ensembles à cordes, des stages bands, des drumlines, des ensembles vocaux et des ensembles de guitares convergent sur le campus de l’Université de Sherbrooke pour participer à cet événement dont l’histoire est très riche. En 1929, le premier festival est mis sur pied à Sherbrooke par l’Association des fanfares amateurs de la province de Québec, mais à l’époque c’est un festival itinérant. En 1950, les organisateurs de l’événement réalisent que l’avenir est dans la préparation des jeunes musiciens et décident de miser davantage sur les formations juniors (il y en a près de 200 qui y participent cette année). Depuis 1988, le FHOSQ est installé définitivement à Sherbrooke et présente aussi une série OFF: des concerts extérieurs autour du lac des Nations. festivaldesharmonies.com
Le 12e Festival des guitares du monde en Abitibi-Témiscamingue prendra d’assaut la capitale nationale du cuivre ce mois-ci. Le FGMAT a une très bonne réputation auprès des artistes, ce qui lui permet d’avoir des invités des quatre coins de la planète. Le guitariste des Eagles Don Felder y était en 2013, tout comme Michel Rivard, l’Australien Kim Churchill, Benoit Charest (Triplettes de Belleville) et le maestro québécois de la six cordes, Steve Hill. Celui-ci y revient cette année, à l’occasion de ses 25 ans de carrière et de la sortie du troisième et dernier album de sa série Solo Recordings vol. 3. Daniel Lanois, producteur d’albums de U2, Peter Gabriel, Bob Dylan et Neil Young, et qui a une carrière solo plus qu’enviable, sera aussi du festival en cette 12e édition, tout comme le Torontois Jesse Cook, l’incomparable guitariste américain Steve Vai et le grand chanteur innu Florent Vollant. fgmat.com
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à écouter ★★★★★ CLASSIQUE ★★★★ EXCELLENT ★★★ BON ★★ MOYEN ★ NUL
plants and animals WALTZED IN FROM THE RUMBLING
little scream CULT FOLLOWING (Dine Alone Records) ★★★★ Le nom de scène que s’est donné Laurel Sprengelmeyer a encore plus d’écho sur ce second album: dans la délicatesse surgit l’éclat. On sent sur ce disque toute la force tranquille qui habite la chanteuse américaine établie à Montréal. Créé en étroite collaboration avec Richard Reed Parry (Arcade Fire), le disque, à la fois féérique et inquiétant, est une évolution parfaite de la pop-rock ouatée et céleste de son premier album. Épaulée par de nombreux collaborateurs hors pair (Sufjan Stevens, Sharon Van Etten), la musicienne mise aussi sur de subtiles touches de blues et de gospel. La voix chaleureuse et éthérée est parfois emportée dans un chaos d’instruments qui grondent, mais la cohue est toujours parfaitement contrôlée. Un disque chargé, somme toute, mais qui séduit. (V. Thérien)
bernhari ÎLE JÉSUS
(Secret City Records)
(Audiogram)
★★★★
★★★ 1/2
Très séduisante nouvelle parution que ce quatrième album du combo rock montréalais Plants and Animals. Dans la création, les musiciens ont pleinement fait confiance à leur instinct. En résulte un album avec de petites failles assumées, mais qui est délectable dans ce sentiment de liberté totale des musiciens. On retient surtout à quel point les instruments et les voix ont toujours l’espace pour respirer, comme une grande valse collective. À écouter immédiatement: la chanson au titre français Je voulais te dire, une vraie perle menée au piano, apaisante comme tout. Mais comme la plupart des chansons ici, elle vire vers autre chose plus tard, s’envolant dans deux ou trois directions. C’est néanmoins toujours un bonheur de se perdre dans l’univers de Plants and Animals. Encore et toujours l’un des meilleurs groupes à Montréal. (V. Thérien)
champion BEST SELLER (Bonsound) ★★★ 1/2
Champion sort d’un silence (sur disque) de presque trois ans avec ce nouvel opus, où il renoue assurément avec ses premières amours. Les chansons sont presque toutes composées de lignes de guitare jouées en boucles qui s’empilent pour finalement créer un tout cohérent et inventif. L’ajout de la voix profonde et sensuelle de la chanteuse Lou Laurence sur le titre Life Is Good est plus qu’appréciable, son timbre complétant l’ensemble avec sensibilité. On est dans le dansant d’un bout à l’autre, mais jamais dans la facilité. Les loops sont parfois extrêmement décalées, à la limite de la dissonance, particulièrement sur la lancinante Yeah-Eah et la très digitale Money Money Money. Champion signe un disque qui le place, une fois de plus, sur le trône de la musique électronique façonnée par la «six cordes». (A. Bordeleau)
Avec ses ambiances texturées, des guitares parfois bien acidulées, des claviers envoûtants, Bernhari propose un album pop-rock orchestré magistralement, tout en élévation, où c’est en survolant le commun des mortels que la vie prend vraiment son sens et que la musique progresse vers des expériences grandioses. Là où Bernhari excelle avec la création de paysages sonores progressifs et d’une grandiloquence assumée, il pourrait aussi se décomplexer, ses textes demeurant sages et simples, et dont l’expression n’atteint jamais le niveau de celui de ses musiques. Reste que ce deuxième album plaît (Lanaikea [Les yeux], Néroli, Les années dix), colle à la peau, et évoque des amours perdues, les écorchés vifs d’une génération, la solitude et une île Jésus enchanteresse. (J. Ledoux)
constantinople et ablaye cissoko LES JARDINS MIGRATEURS (Ma case) ★★★ 1/2
S’il est vrai que la musique adoucit les mœurs, elle permet surtout des voyages inédits… en classe économique. Comme celui-ci, où la tradition persane profane rencontre un vrai griot sénégalais investi de sa haute mission. Les membres de la formation montréalaise Constantinople, munis seulement d’un setar, d’un tombak et d’une viole de gambe, entourent ici la kora et la voix d’Ablaye Cissoko qui chante l’aube et la pluie, le pays de l’eau, le fleuve Saint-Louis, les grandes traversées et les amours compromises par la distance. Musique ni gaie ni vraiment triste, mais quelque part sereine et contemplative de la beauté profuse et intemporelle qu’elle engendre. Le flux rythmique du morceau Lountang nous ramène de l’Afrique de l’Ouest jusqu’à Cuba et le texte bref qui présente cet ouvrage parle d’une rencontre «entre les mystiques du désert et les poètes des anciens empires». Planant à souhait. (R. Boncy)
25 disques VOIR MTL
rymz PETIT PRINCE
phobocosm BRINGER OF DROUGHT
(Silence d’or)
(Dark Descent Records)
★★★ 1/2
★★★ 1/2
Trop longtemps ignoré par les médias québécois, malgré un imposant bassin de fans, le rappeur Rymz aura sans doute l’attention qu’il mérite avec Petit Prince, un saisissant deuxième album qui fait suite à Indélébile (2014), vendu à près de 6000 exemplaires. Déchiré par l’amour et les «mirages» qui se profilent à l’horizon (l’argent, l’alcool et la drogue en tête de liste), le rappeur au flow polyvalent y expose ses réflexions franches et intègres sur les idées préconçues de la vie, remettant en question ses réflexes troubles et ses habitudes de «voyou» avec une puissante poésie imagée. Même si certains refrains plus kitsch agacent (Des kilomètres et des ennuis, Uno Primo, Cicatrices), Rymz se tient majoritairement loin du format pop consensuel et signe ainsi une réalisation remarquable, appuyée par les compositions à la fois moroses et caustiques du talentueux Gary Wide. (O. Boisvert-Magnen)
anohni HOPELESSNESS (Rough Trade/Secretly Canadian) ★★★ 1/2
L’artiste transgenre Antony Hegarty a délaissé ses Johnsons et opté pour le nom de plume Anohni. Sous ce nouveau vocable, la chanteuse britannique opère un changement de cap, s’orientant vers une chanson beaucoup plus électronique, tout aussi intimiste que lors de son épopée avec les Johnsons mais avec un angle peut-être plus social et conscientisé. Sur Hopelessness, le ton est souvent grave, le constat est sévère, les propos sont parfois durs. Un regard cru et honnête sur une réalité qu’Anohni affronte de face. Appuyé par une trame sonore subtilement épurée dans la forme mais dense dans le fond, la voix d’Anohni domine, pure, limpide, pleine de soul et d’émotion, aussi belle qu’elle l’a toujours été, remarquable entre mille. Réalisé par Hudson Mohawke, Oneohtrix Point Never et Anohni, Hopelessness est un disque d’une sombre beauté qui rend le désespoir un peu plus joli. (P. Baillargeon)
Difficile de trouver meilleure description que celle proposée par le groupe montréalais pour décrire l’atmosphère qui se dégage de la musique de Phobocosm: chaos, noirceur et douleur. Ces trois ingrédients composaient la trame musicale de Deprived (2014) et ils sont encore bien présents sur Bringer of Drought, même si cette fois-ci le groupe, qui comprend des membres de Vengeful, Obsolete Mankind et Akurion, a davantage misé sur la noirceur pour déployer son mélange de death métal et de doom sur quatre morceaux oppressants et hypnotisants. Ça donne un deuxième disque techniquement irréprochable qui évoque l’image d’un rouleau compresseur qui écrase lentement tout sur son passage. (C. Fortier)
christine tassan et les imposteures ENTRE FÉLIX ET DJANGO
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ensemble dal niente & deerhoof BALTER/ SAUNIER (New Amsterdam/Naxos) ★★★★
(PDI-Select) ★★★ 1/2
Avis à tous ceux qui l’ignoraient: les musiciens Leclerc et Reinhardt ont vraiment été voisins de palier dans un hôtel de Saint-Germain-des-Prés, en l’an de grâce 1951. Comme il n’y avait à l’époque ni MP3 ni portable intelligent, l’Histoire n’a rien retenu de cette rencontre providentielle. Christine Tassan et ses copines Les Imposteures s’amusent donc ici à imaginer la trame sonore de cette brève amitié en jumelant deux par deux les plus grands succès des incomparables compères. Aucune arnaque: elles ont tout bon. L’humour et le swing font vraiment bon ménage dans cet album-concept (on disait ça dans l’temps) qui devrait permettre à ce très sympathique quatuor féminin d’atteindre enfin la notoriété qu’il mérite. «Maintenant Félix et Django, entre Paname et Montréal dans un sentier, près d’un ruisseau, font des chansons sous les étoiles», fredonne Christine. C’est joli, non? (R. Boncy)
On a pu voir le quatuor de San Francisco Deerhoof et son très exubérant batteur Greg Saunier lors du Festival international de musique actuelle de Victoriaville en 2015, et on retrouve ici l’un et l’autre dans un projet étonnant, qui les voit se mêler à l’ensemble instrumental Dal Niente, de Chicago. Tous ensemble, ils interprètent une œuvre du compositeur brésilien Marcos Balter spécialement composée pour leur rencontre; on est loin du feu d’artifice rock de Deerhoof en concert, mais plus près d’un jazz contemporain mêlé de passages vocaux qui rappellent étrangement le Tehillim de Steve Reich, mais avec la voix de Satomi Matsuzaki. Saunier offre quant à lui des Deerhoof Chamber Variations qui puisent dans le catalogue du quatuor, dans un arrangement pour l’ensemble. Réjouissant. (R. Beaucage)
26 musique VOIR MTL
VO1 #O4
O5 / 2O16
monique giroux SUR MESURE
pour pouvoir dire pourquoi j’existe J’aurais voulu être un artiste pour pouvoir dire pourquoi j’existe, chantait Claude Dubois dans le rôle de Zéro Janvier dans l’opéra rock Starmania créé en 1978. Cette œuvre a mis sur la mappe de la chanson un nombre impressionnant de succès: Le monde est stone, Les uns contre les autres, Le blues du businessman, Ce soir on danse à Naziland, Les adieux d’un sex-symbol, S.O.S. d’un Terrien en détresse, etc. Mais que sait-on de sa trame si on n’a pas vu le fameux opéra rock? Starmania est le titre d’une émission télédiffusée sur les ondes de Télé-Capitale au cours de laquelle un inconnu peut devenir une star en 15 minutes. Starmania, émission aux cotes d’écoute pharaoniques, est animée par une jeune vedette prénommée Crystal. Les Étoiles noires, groupe terroriste dirigé par Johnny Rockfort et sa complice transgenre Sadia, kidnappent l’animatrice et fomentent la destruction de Naziland, discothèque très fréquentée et sise au 100e étage d’un édifice qui est la propriété de Zéro Janvier, où il célèbrera son mariage avec une star de cinéma décatie, Stella Spotlight. La noce de vitrine qui doit servir à mousser la campagne électorale du businessman risque d’être explosive. Ziggy, le DJ gay de Naziland, fait battre le cœur de Marie-Jeanne, la serveuse automate de l’Underground Café, quartier général des Étoiles noires. Zéro Janvier, très riche homme d’affaires à l’ego démesuré, brigue la présidence de l’Occident dont la capitale est Monopolis. Crystal tombe amoureuse de Johnny, son ravisseur. Sadia, jalouse, dénonce le plan des Étoiles noires. L’histoire, on s’en doute, finit mal. Oufff… Les chansons de Starmania ont été écrites et composées par Luc Plamondon et Michel Berger avant 1978, alors que la destruction d’un édifice de 100 étages par des terroristes était de la pure fiction et que le mariage d’un politicien avec une vedette du cinéma ou de la chanson n’était pas si fréquent non
plus. Quant à l’ascension fulgurante d’un inconnu au sommet de la notoriété et du succès grâce à une émission de télé qui rive un québécois sur deux à son écran de télé, ce n’était guère plus courant. Les plus vieux diront qu’il y avait bien quelques concours de la chansonnette à CKVL. Ma propre mère a déjà concouru contre une jeune Ginette Raynault qui raflait toujours tout. Mais la moitié de la planète n’assistait pas en direct à la déconvenue de ma mère et encore moins à l’enlèvement d’une animatrice de l’émission. Quant aux Jeunes Talents Catelli que présentait le Canal 10, le TVA des années 1960, ils mettaient en scène des enfants de 4 à 15 ans à qui on ne promettait rien, si ce n’était une notoriété aussi furtive que locale. Si j’aborde l’œuvre de Plamondon et Berger aujourd’hui, c’est que je suis circonspecte et inquiète de constater que la projection presque divinatoire des auteurs prend, presque 30 ans après la création de Starmania, des proportions vraiment extraordinaires et confirme que la réalité dépasse parfois la fiction. Tous les intervenants du milieu de la musique, artistes et producteurs de tous pays confondus, s’interrogent sur les chances de survie du marché. On ne vend plus de disques, les sites de musique en streaming ne rétribuent pas correctement les ayants droit (et ça, c’est quand ils les rétribuent), on pirate, on pille, on copie, bref, ça va mal. Mais qu’est-ce qui va mal? Certainement pas la création. On ne vit plus de la chanson, mais de la chanson il en pleut. Nous avons des dizaines de milliers de titres dans nos iPhone, mais à quel rythme les écoute-t-on? J’ai dû faire des listes, ce printemps, devant la somme des artistes tout neufs dont on n’a pas encore entendu parler, ou si peu, qui lancent un album de chansons tout aussi neuves. Nous sommes,
Pour une carrière...
Collège O’Sullivan
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mes collègues et moi, sur le point d’atteindre un niveau de saturation inédit. On ne fournit plus à la tâche de tout écouter. Encore s’il ne s’agissait que d’écouter, mais il faut découvrir le parcours de l’artiste, ses références, ses intentions, lire ses textes. Je ne suis pas parvenue dans le but de cet article à colliger la liste exhaustive des artistes québécois ayant fait paraître un album francophone ces dernières semaines. En voici un aperçu: Aude Rey, Mélissa Ouimet, Benjamin Goron, Edouard Landry, Geneviève Binette, Antoine Lachance, Pier-Carl, MarieClaire, Fred Labrie, Portage, Fantômes, Bronswsick, Mathieu Bérubé, Jean-François Poulin, Jean-Fréderic Lafaille, Charles Robert, Saratoga, Catherine Servedio. Et je ne parle pas de Steve Veilleux de Kain qui propose un album solo, tout comme Marie-Annick Lépine des Cowboys fringants, Viviane Roy des Hay Babies, devenue Laura Sauvage en solo, Fréderic Giroux de Mes Aieux, Marie-Eve Roy des Vulgaires Machins, Laurence Nerbonne d’Hôtel Morphée. Et non plus de ceux qu’une notoriété précède comme Philippe Brach, Sarah Toussaint-Léveillée, ou de ceux qui ont déjà un ou quelques albums au compteur comme Moran, Fanny Bloom, Jason Bajada, Ariane Brunet, Geneviève Racette. Et je ne parle pas de Richard Séguin et Yann Perreau... D’ici les FrancoFolies qui seront présentées du 9 au 18 juin, Claude Vallières, Sylvie Paquette, Bernhari, Guillaume Arsenault, Joseph Edgar, Maryanne Côté, David Thibault, Claudelle, Amilye, Alexe Gaudreault, Boom Desjardins et Pépé lanceront un nouvel album comme le feront Daniel Lavoie et Luc De Larochellière dans les prochains mois. Faut suivre avec vigilance pour ne rien échapper. Et puis, dans cette longue liste, je ne crois pas avoir inscrit un des nouveaux talents de La Voix 2016 (jusqu’alors inconnus pour un bon nombre), dont l’album figure en première position des ventes depuis plusieurs semaines. Ne portons pas ici de jugement sur la valeur des œuvres, l’ampleur du talent des uns et des autres ou la qualité des chansons. Interrogeons-nous seulement sur la viabilité du nombre. Comment peut-on espérer, mathématiquement, que tous ces artistes qui ont besoin de dire pourquoi ils existent puissent, justement, exister, vivre de ce métier, se faire entendre, sortir du lot? J’aurais voulu être un artiste Pour avoir le monde à refaire Pour pouvoir être un anarchiste Et vivre comme... un millionnaire… Là, la fiction va l’emporter sur la réalité. Le titre suggéré ce mois-ci: Faut pas se fier aux apparences, de Yann Perreau y
APPROCHE WEB
Début Août 2016
AEC
12 mois TECHNOLOGIE DES MÉDIAS ET PLATEAU DE TOURNAGE
Préparez-vous à travailler sur un plateau de tournage !
Début Août 2016
AEC
COMPTABILITÉ FINANCIÈRE INFORMATISÉE
12 mois
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Collège O’Sullivan
514 866-4622 1191, rue de la Montagne, Montréal
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de 10h à 16h
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Lisa LeBLanc
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LE QUÉBEC un passage oBLigé? DE PONTEIX AUX HÔTESSES D’HILAIRE EN PASSANT PAR PANDALÉON, ARTHUR COMEAU ET MCLEAN, LES ARTISTES FRANCOPHONES TALENTUEUX SONT DE PLUS EN PLUS NOMBREUX DANS LE «REST OF CANADA» (ROC). AFIN DE POURSUIVRE LEUR ASCENSION, CEUX-CI DOIVENT-ILS, UN JOUR OU L’AUTRE, S’EXPATRIER AU QUÉBEC? SI LA RÉPONSE SEMBLAIT UNANIMEMENT POSITIVE IL Y A PLUS D’UNE DÉCENNIE, ELLE PARAÎT UN PEU PLUS NUANCÉE AUJOURD’HUI. mots | oLivier Boisvert-magnen
photo | JoceLyn micheL (consuLat)
Natif du tout petit village ontarien de SaintBernardin, le trio post-rock Pandaléon n’a pas du tout l’intention de déménager à Montréal, même si son rayonnement en Ontario reste somme toute modeste. «Il y a plein de gens qui nous disent d’aller à Montréal parce que ce serait supposément là que ça se passe. Nous, on ne croit pas à ça», indique le chanteur Frédéric Levac. «En ce moment, ça se passe partout, la musique. Des frontières, il n’y en a plus. Si les gens trippent sur ce que tu fais, ils s’en foutent d’où tu peux bien venir.» Des cas de figure de la sorte, il y en a plein dans le ROC. Et c’est particulièrement le cas en Acadie, là où plusieurs artistes (notamment Joey Robin Haché, Simon Daniel, Cy, Les Hôtesses d’Hilaire et Arthur Comeau) choisissent délibérément de rester fidèles à leur terre d’origine. «Ce sont des gens très attachés à leur région», résume Carol Doucet, gérante d’artistes installée à Moncton et directrice de la boîte Le Grenier musique. «Pour eux, venir s’installer au Québec n’est pas un gage de réussite.» Directrice de l’Association des professionnels de la chanson et de la musique (APCM), qui travaille à «l’épanouissement de la chanson et de la musi-
que francophones de l’Ontario et de l’Ouest canadien», Nathalie Bernardin remarque également un changement de paradigme: «Il y a 20 ans, le Québec était un passage obligé. Je pense, entre autres, aux filles de Hart rouge, qui avaient dû partir de leur communauté fransaskoise pour aller s’essayer à Montréal. Mais, depuis l’arrivée des nouvelles technologiques, qui a permis la démocratisation de la musique, il n’y a plus nécessairement de point central. Ça permet, par exemple, à un groupe comme Pandaléon de pouvoir vivre de sa musique tout en restant dans son patelin.» Résultat: l’industrie musicale francophone se développe plus largement dans certaines autres provinces canadiennes. «Ça a des effets directs sur les professions complémentaires, comme les gérants, les relationnistes et les producteurs. Il y en a maintenant beaucoup plus qu’avant en Ontario et au Nouveau-Brunswick», observe Nathalie Bernardin. «Généralement, la production musicale francophone est aussi plus stable partout au Canada. Il y a cinq ans, je l’aurais décrite comme cyclique et ponctuée de hauts et de bas. Maintenant, elle se nourrit d’elle-même. Les artistes qui restent dans leur communauté deviennent, en quelque sorte, des mentors pour la relève.»
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Loin de rester enfermés dans leur coin de pays, certains artistes sillonnent de long en large les nombreux marchés francophones canadiens, notamment grâce au programme Vitrines musicales de MusicAction, qui favorise la circulation des artistes de minorité francophone en leur permettant de réduire considérablement les coûts de leurs déplacements.
chose. Autant j’aimais le Nouveau-Brunswick, autant j’avais besoin de faire un gros move qui allait me déstabiliser», se souvient la chanteuse acadienne. «Je ne crois pas que c’est une obligation de venir s’installer à Montréal, mais pour moi, c’était quelque chose de très naturel. Il fallait que je le fasse.»
Ainsi, il semble souvent plus simple pour un artiste francophone du ROC d’aller jouer dans une autre province que le Québec, souvent considéré comme un marché plus difficile d’accès. «Les alliances et les liens entre les diffuseurs et les gérants sont relativement étroits entre les autres provinces. L’APCM, par exemple, a des liens privilégiés avec des organisateurs de festivals des Maritimes», remarque Samuel Perreault, chroniqueur web à l’émission franco-ontarienne BRBR. «Au Québec, c’est différent puisque la compétition est déjà très forte. C’est un écosystème en soi.»
Signée sous l’étiquette montréalaise Bonsound, Lisa LeBlanc retourne tout de même souvent dans son patelin, ne serait-ce que pour prendre des vacances ou pour s’inspirer de nouvelles chansons. Son exode à Montréal lui facilite les choses de manière administrative et lui permet d’avoir un rayonnement plus large.
Montréal, l’écosystème C’est d’ailleurs pour cette raison précise que JeanÉtienne Sheehy, également chroniqueur à BRBR, croit que, dans la majorité des cas, les jeunes artistes franco-canadiens ont tout intérêt à venir s’installer dans un écosystème musical aussi vivant que Montréal. «Ça leur permet d’être à l’affût de ce qui se fait de bon sur la plus grosse scène musicale francophone du pays», fait-il remarquer. «Dans leur village, ils sont parfois uniquement exposés à ce que leurs amis font. C’est souvent pour ça qu’après, ça devient difficile de percer le marché québécois.» Pour le groupe indie rock fransaskois Ponteix, qui s’est rendu jusqu’en demi-finales aux Francouvertes 2016, l’expatriation montréalaise est une option de plus en plus tentante. «Il y a quelque chose à Montréal qui m’attire, qui m’excite. C’est sûr que c’est ici qu’on veut faire de la musique», admet le chanteur Mario Lepage. «Chez nous, il n’y a pas beaucoup de gens et encore moins de jeunes qui écoutent de la musique en français. Ça devient difficile de rejoindre notre public cible.» C’est également dans le but d’agrandir son auditorat que Lisa LeBlanc a, il y a cinq ans, fait le saut officiel dans la métropole québécoise, tout comme l’ont fait Damien Robitaille, Radio Radio et, plus récemment, Joseph Edgar. Le moins qu’on puisse dire, c’est que, pour Lisa, le jeu en a valu la chandelle. «Après avoir fait Granby, je savais qu’il fallait que je décolle et que je fasse autre
La clé: un pied-à-terre au Québec?
«Je ne crois pas que Lisa aurait eu la même visibilité si elle n’avait pas fait paraître son premier disque sous une étiquette québécoise», projette JeanÉtienne Sheehy. «En fait, dans tous les cas, les artistes franco-canadiens ont tout à gagner d’avoir un pied-à-terre au Québec.» Respectivement installés à Clare (Nouvelle-Écosse) et à Moncton (Nouveau-Brunswick), les artistes acadiens Arthur Comeau et Les Hôtesses d’Hilaire ont compris cette réalité. Alors que le premier est signé sous l’étiquette de Québec P572, le deuxième fait affaire avec la boîte de développement culturel montréalaise Let Artists Be (L-A Be). À l’instar de Pandaléon (signé sous Audiogram), ce «pied-à-terre» leur permet d’avoir un rayonnement médiatique notable à travers la province québécoise, sans avoir à déménager. «C’est avec des exemples de la sorte qu’on se rend compte que, oui, le Québec est encore un passage obligé, mais plus nécessairement de la même façon», analyse Samuel Perreault. «Avant, fallait partir de son village pour s’installer à Montréal et essayer de s’insérer dans le réseau montréalais. Maintenant, on peut rester dans sa ville, profiter des subventions de notre province, puis ensuite tenter d’intéresser le Québec.» Et au-delà du Québec, c’est bien entendu la multiplication des marchés possibles qui, à long terme, est le plus bénéfique. À cet effet, les nombreuses vitrines musicales canadiennes (ROSEQ, Contact ontarois, bourse Rideau, Contact Ouest, Francofête en Acadie) se présentent comme des lieux de rencontres incontournables pour tout artiste francocanadien désirant accumuler les spectacles partout au Canada et, parfois même, se faire repérer par un diffuseur français, belge ou suisse. y
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L’ACADIE DANS LES PROVINCES DE L’EST, LES COMMUNAUTÉS FRANCOPHONES SONT PLUS VOLUMINEUSES QUE DANS L’OUEST DU PAYS. IL Y A BEAUCOUP DE VARIÉTÉ CHEZ LES ARTISTES ACADIENS FRANCOPHONES, LE PUBLIC EST LÀ POUR EUX ET ILS PEUVENT PROFITER DES NOMBREUSES RESSOURCES EFFICACES À LEUR DISPOSITION. PETIT TOUR D’HORIZON SUR LA DIFFUSION DE LA MUSIQUE FRANCOPHONE EN ACADIE. mots | vaLérie thérien
Le Nouveau-Brunswick a plusieurs avantages à cet égard: c’est la seule province officiellement bilingue au Canada (donc il y a beaucoup plus de francophones), c’est à proximité des grands réseaux au Québec, mais il y a beaucoup de mouvements du côté de la Nouvelle-Écosse également. Autour de la baie Sainte-Marie, par exemple, on retrouve le quatuor de folk traditionnel Cy – participant aux 20es Francouvertes récemment – ainsi qu’Arthur Comeau (ex-Radio Radio, maintenant en solo). Son travail dans la communauté est notable puisqu’il est devenu en quelque sorte un mentor. «Avec son projet la Tide School [un projet de label qui regroupe des artistes acadiens de la NouvelleÉcosse comme Young Corleone et Denzel Subban], Arthur Comeau est allé recruter plein d’artistes émergents de la baie Sainte-Marie, explique JeanÉtienne Sheehy, journaliste à BRBR. C’est inspirant de voir ça, puisqu’en quelque sorte, il redonne à la communauté.» De l’entraide, il y en a chez les Acadiens. Avant de remporter le Festival de la chanson de Granby en 2010 à 20 ans et d’avoir tout le succès qu’on lui connaît, Lisa LeBlanc était imbibée de culture acadienne dans son village de Rosaireville au NouveauBrunswick. C’est l’appui de sa communauté qui l’a poussée vers les sommets des palmarès. «Ce qui est vraiment cool du Nouveau-Brunswick, c’est que les gens vont te faire jouer jusqu’à ce que tu aies une base, aussitôt que tu commences à faire de la musique, dit-elle. Un des premiers trucs que j’ai faits, c’est Accros de la chanson, un genre de Secondaire en spectacle pour auteur-compositeurinterprète en band ou solo [les Hay Babies et Caroline Savoie y ont également fait leurs dents]. C’est une première formation musicale pour les
Les hôtesses d’hiLaire
écoles francophones du Nouveau-Brunswick. Si tu fais les finales, tu fais un démo avec un réalisateur dans les studios de Radio-Canada à Moncton, t’as des formations, tu joues des shows et souvent t’as des prix associés à ça. C’est pas long que tu commences à jouer beaucoup. J’ai eu la chance d’avoir été bien entourée et de faire des shows dans des super salles au début de ma carrière. La communauté est forte à la base, au Nouveau-Brunswick, et la communauté en musique est extraordinaire. Y a tellement du bon monde qui travaille là-dedans. C’est comme une seconde nature d’aider, parce que tu veux que le talent se multiplie.»
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La communauté est tissée serré, les radios communautaires et les festivals locaux diffusent des artistes émergents et les concours les propulsent. Il y a plusieurs organismes comme La Fédération des jeunes francophones du Nouveau-Brunswick qui soutiennent aussi la relève. Carol Doucet fait partie de ces acteurs du milieu qui se consacrent à l’émergence acadienne, elle qui a notamment été gérante pour Lisa LeBlanc. «La meilleure organisation de musique francophone – après le Québec – est au Nouveau-Brunswick parce qu’on a tout ce qu’il faut: des réseaux de tournées, un très bon distributeur de disques (Distribution Plages), des grands événements comme la Francofête et beaucoup d’équipes. Dans les autres communautés francophones, les artistes ont des réseaux, mais c’est moins organisé, il n’y a pas beaucoup de labels ou de distributeurs. Nous, on a vraiment une industrie. On a des acteurs de l’industrie de la musique et l’industrie fonctionne.» Le succès n’est pas garanti pour tout le monde, bien sûr, mais on sent qu’il y a de la place pour toutes sortes de genres musicaux en Acadie. Si Lisa LeBlanc est l’emblème du folk-country qui a du
chien, Radio Radio l’est du côté du rap en chiac. Et aujourd’hui, Les Hôtesses d’Hilaire et leur rock psychédélique savoureux font rage. Quand la carrière des groupes est sur de bonnes bases, ils peuvent ensuite trouver les réseaux où ils pourront évoluer, que ce soit au Québec ou en Ontario ou encore dans les provinces de l’Est. Si Lisa LeBlanc est installée à Montréal, elle sera toujours Acadienne, et son public acadien qui la suit depuis ses débuts ne la lâchera pas de sitôt. Son conseil pour les artistes de la francophonie hors Québec? «Allez voir les gens dans les organismes et les gens du milieu qui diffusent la musique locale et posez des questions, parce que leur job c’est d’aider et ils sont super contents de le faire. Il faut aller voir des shows et connaître sa scène aussi. Si tu viens de l’Ontario, c’est qui les artistes ontariens? Connais-tu leur musique? C’est cool de commencer localement avant de voir le “big picture”. Tout le monde a sa façon de faire, mais moi j’ai commencé par ça. T’as tellement de bons groupes de soutien quand tu viens de minorités francophones. Y a des ressources, donc utilisez-les parce qu’elles sont là pour ça.» y
L’ONTARIO UNE DÉCENNIE APRÈS L’ÉCLOSION DE DAMIEN ROBITAILLE, LA SCÈNE MUSICALE FRANCO-ONTARIENNE SE PORTE PLUTÔT BIEN. SI, À ELLES SEULES, LES SUBVENTIONS GOUVERNEMENTALES NE PEUVENT GARANTIR UNE CARRIÈRE FLORISSANTE POUR LA GRANDE MAJORITÉ DES ARTISTES ONTAROIS, ELLES PERMETTENT, À TOUT LE MOINS, LEUR SURVIVANCE. mots | oLivier Boisvert-magnen
Le journaliste gatinois Samuel Perreault s’intéresse tout particulièrement à ce qui se passe de l’autre côté de la rivière des Outaouais. «Depuis cinq ans, il y a vraiment beaucoup de bon stock franco-ontarien qui sort. Je pense entre autres à McLean, Yao, Mehdi Cayenne Club, Pandaléon… » énumère-t-il. Gagnant de trois statuettes au gala des prix Trille Or 2015 (l’équivalent ontarois du Gala de l’ADISQ), Pandaléon est sans doute l’un des principaux leaders de cette scène revigorée.
Le chanteur du groupe Frédéric Levac a, lui aussi, remarqué un certain boom musical dans la province où il habite. «Les productions sont beaucoup plus nombreuses qu’avant. Je dirais même qu’on commence à avoir une certaine stabilité en terme de quantité», remarque-t-il. «Disons qu’on est loin des méchants trous noirs des années 1990, durant lesquels il se passait pratiquement rien.» Si l’énorme succès d’un Damien Robitaille a potentiellement influencé les jeunes Franco-Ontariens à choisir de chanter dans leur langue maternelle,
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il faut regarder dans les coulisses pour constater les principales raisons de cet essor. L’Association des professionnels de la chanson et de la musique (APCM) joue un rôle prédominant sur son territoire. En plus de contribuer à l’organisation de Contact ontarois, un événement incontournable pour les arts de la scène francophone en Ontario, c’est elle qui organise les prix Trille Or, le festival Quand ça nous chante! (s’adressant aux jeunes musiciens des écoles secondaires franco-ontariennes), ainsi que la résidence artistique Rond Point, destinée aux musiciens émergents de l’Ontario. Les avantages de l’Ontario Aussi variées soient-elles, ces initiatives n’ont qu’un seul et même but: donner de la visibilité aux artistes franco-ontariens. «On veut donner le goût aux musiciens d’ici de faire de la musique, tout en nourrissant leur amour pour la langue française», résume Nathalie Bernardin, directrice de l’APCM. Et signe que les résultats sont de la partie: c’est l’ancêtre de Rond Point, Ontario Pop, qui a été la rampe de lancement de Pandaléon en 2011. «C’est lorsqu’on a gagné ça que ça a véritablement commencé», se souvient Frédéric Levac, comparant le défunt événement à La Brunante, un concours provincial qui a lieu à Sudbury depuis 1983. Honnête, le chanteur est toutefois très conscient que ce sont majoritairement les bourses qui ont permis l’éclosion de son groupe, maintenant signé sous l’étiquette québécoise Audiogram. «En Ontario, c’est quand même simple d’aller chercher de l’argent puisqu’il y a beaucoup de subventions pour un nombre tout de même minime d’artistes», admet-il, citant majoritairement le Conseil des arts de l’Ontario. «Le revers de la médaille de ça, c’est qu’il y a certains artistes qui ont des subventions même si leur projet artistique n’est pas prêt. On verrait jamais des choses comme ça au Québec, par exemple.» Sillonnant les routes du Canada depuis environ cinq ans, Frédéric Levac remarque également qu’il est souvent plus gagnant pour son groupe de jouer dans sa province qu’au Québec. «Vu qu’il y a moins d’offres francophones en Ontario, la valeur des shows est souvent plus grande. On peut pandaLéon, photo | JuLien Lavoie
parfois vendre notre show trois fois plus cher à Ottawa qu’à Montréal», dit-il, comparant notamment le Festival franco-ontarien aux FrancoFolies. Certains programmes gouvernementaux permettent également à des groupes de faire la tournée d’une partie des écoles secondaires francophones de l’Ontario, que Nathalie Bernardin dénombre à environ 400. Le groupe métal alternatif AkoufèN a d’ailleurs fait cette tournée en 2012, à l’instar du mythique groupe pop-trad Deux Saisons, une décennie plus tôt. «C’est vraiment génial comme initiative», croit JeanÉtienne Sheehy. «Ça permet aux artistes de prendre de l’expérience sur scène et, surtout, d’être ensuite mieux outillés pour développer des plus gros marchés.» Deux choix pour évoluer Reste que, généralement, les occasions de jouer sont beaucoup moins nombreuses en Ontario qu’au Québec, même pour un groupe qui profite d’un engouement de plus en plus généralisé comme Pandaléon. «Nos prix Trille Or et notre passage à Contact ontarois, ça nous a donné à peu près cinq dates de show en tout», explique le chanteur et claviériste. «C’est là qu’on voit la différence entre vivre de la musique et en survivre. En tant qu’artiste franco-ontarien, même avec des subventions, tu peux pas survivre à long terme avec ta musique, sauf si tu vises un autre marché ou que tu commences à passer dans les radios.» Cette dernière option a notamment fonctionné pour Damien Robitaille et, plus récemment, pour Swing. Après avoir connu un succès imposant partout en Ontario francophone, le duo ottavien a réussi à obtenir une rotation radio considérable sur les ondes commerciales québécoises. Pour Pandaléon, cette option radio n’est toutefois pas envisageable. «On ne fait pas de la musique assez pop pour ça. Les diffuseurs ne voudront jamais jouer du post-rock comme le nôtre», croit Frédéric Levac. «Je crois qu’on a plus un style qui pourrait résonner dans les marchés anglophones. C’est ça qu’on vise prochainement parce que, même en incluant le Québec, le marché franco-canadien est trop petit.» y
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L’OUEST LES ARTISTES FRANCOPHONES ŒUVRANT ENTRE LE MANITOBA ET LE YUKON SONT CONFINÉS DANS DE TOUT PETITS MARCHÉS. MAIS POUR LES JEUNES ARTISTES QUI N’ONT PAS PEUR DE LA ROUTE OU DE L’AVION, IL Y A MOYEN DE S’ENVOLER VERS DE NOUVELLES SCÈNES GRÂCE AUX BOURSES ET AUX RÉSEAUX. mots | vaLérie thérien
Les communautés francophones de l’ouest du pays sont nombreuses, mais somme toute assez petites. En Colombie-Britannique, en Saskatchewan, en Alberta, au Manitoba, au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest, les Canadiens francophones sont situés surtout autour des grandes villes puisque les ressources pour eux (les centres francophones, par exemple) y sont. Si l’on regarde la diffusion de la culture francophone dans ces provinces et territoires, on note en premier lieu le fameux quartier Saint-Boniface à Winnipeg, où se tient chaque année le Festival du Voyageur, dédié à la culture francophone et à l’histoire de la francophonie. Son directeur artistique, Julien Desaulniers, nous donne tout d’abord quelques jeunes artistes à découvrir, qui travaillent fort en français dans leur communauté: Marijosée, Kelly Bado, Jocelyne Baribeau, Shawn Jobin, Rayannah, Mario Lepage. «Ma priorité est d’engager des groupes francophones hors Québec, explique-t-il. Outre le Manitoba, on travaille beaucoup avec l’Acadie et la Saskatchewan. Il y a beaucoup de bonne musique qui sort de la Saskatchewan en ce moment. Je pense que ça va bien et que les artistes commencent à réaliser qu’il faut traiter leur art comme une business et postuler pour les bourses qui sont là.» S’il y a présentement une vague d’artistes émergents excitants dans le centre et l’Ouest canadien, Julien Desaulniers croit toutefois que tout n’est pas
gagné pour ceux-ci, mais que dès qu’ils auront un peu percé, les bourses (de Musicaction et de Manitoba Music, par exemple) leur permettront de se payer quelques billets d'avion et, ainsi, de diffuser leur musique ailleurs. Mario Lepage, qui évoluait sous son nom jusqu’à l’année dernière, a la chance de pouvoir faire un genre de 2 en 1 – si on veut – en accompagnant le rappeur Shawn Jobin en tournée au Canada tout en faisant des spectacles et des vitrines pour son projet encore très émergent, Ponteix, dont les Francouvertes, où il s’est rendu en demi-finales cette année. Le chanteur et guitariste, qui s’entoure de musiciens anglophones dans cette nouvelle aventure, a déjà les yeux rivés sur Montréal puisqu’il ne voit pas assez d’opportunités dans son coin de pays. «La population de Saskatchewan, c’est un million de personnes, donc c’est pas beaucoup. On pourrait jouer plus souvent, mais on ne le fait pas parce que ce serait trop saturé.» Même son de cloche du côté de Julien Desaulniers: il n’y a pas beaucoup d’opportunités de concerts pour les groupes de ces régions parce qu’il n’y a pas assez de population. «S’ils jouent trop, les gens n’iront plus les voir. Il n’y a pas assez de monde pour aller voir des spectacles tous les mois, donc il faut penser à s’exporter. C’est pas seulement un problème francophone, c’est aussi le cas pour la population anglophone. Les groupes finissent par aller à Vancouver ou Toronto, par exemple. C’est la réalité de vivre dans une métropole de moins de 750 000 personnes.»
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Il y a tout de même des options aussi pour des artistes qui désirent rester à la maison tout en continuant de faire des spectacles dans leur région. «Le Réseau des grands espaces, par exemple, donne une chance aux artistes de faire des concerts de maison. C’est juste 20 ou 30 personnes, mais ça donne quand même l’opportunité aux artistes de faire des spectacles à l’extérieur de leur communauté», explique Steve Marcoux de Coup de cœur francophone, dont le Réseau Coup de cœur permet la circulation des artistes de la francophonie. L’organisation a un partenaire culturel dans chaque province ou territoire qui s’engage à accueillir au moins trois spectacles en trois soirées avec au moins deux artistes qui ne sont pas de leur province. «Ça favorise la circulation des artistes du
Québec, mais aussi interprovinciale. En Saskatchewan, ça permet d’accueillir un artiste du Manitoba ou de l’Ontario parce qu’ils ont une certaine proximité. Y a cette capacité-là du Réseau Coup de cœur à travailler, justement, en réseau. Au Canada, on fonctionne plutôt bien grâce à cet engagement.» Si le Réseau des grands espaces tire un peu plus de la patte que ses homologues en Ontario ou en Acadie, selon Steve Marcoux, c’est une question de petitesse des marchés et des ressources de diffuseurs qui changent souvent. «Le marché est adapté aux réalités des artistes dans l’Ouest, mais l’organisation du spectacle, la masse critique de public qui peut soutenir une diffusion assez constante, est peut-être moins développée.» y
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ÉMILIE DUBREUIL saLe temps pour sortir
LE BLUES DE LA MÉTROPOLE Depuis les froidures de janvier et ses lumières descendues droit du Labrador jusqu’aux pluies interminables d’avril, je me suis nichée dans le cœur abîmé de Montréal. Quartier latin. À l’angle de la rue Saint-Denis et du désastre urbain. Depuis janvier, je marche donc beaucoup dans le quartier et j’ai les blues de la métropole, une sorte de peine d’amour municipale. Pas facile d’être amoureux de Montréal aujourd’hui. Le ciel est bas, la terre est grise, le fleuve est sale, le mont Royal est mal à l’aise… Je flâne dans un quartier qui ne semble pas avoir de présent, qui semble n’avoir qu’un passé, et les vieux arrangements de Beau Dommage s’installent dans ma tête. Mon juke-box personnel s’égare au rayon nostalgie. Chaque commerce fermé, chaque vitrine placardée, me chante la complainte en sol mineur d’une ville que je vois dépérir. Dans ma tête, je vois défiler la désolation et j’entends les premiers accords de Suzanne me guider vers le Saint-Laurent et notre Vieux-Port à l’air triste.
Il y a quelques années, j’ai séjourné dans la ville de Détroit au Michigan. Là, il y avait une raison historique à la désertification du centre-ville. En 1968, des émeutes raciales avaient provoqué la fuite des Blancs pour la banlieue. En quelques semaines à peine, ces Blancs, avantagés économiquement, ont abandonné, derrière eux, leurs maisons, leurs commerces. Ils n’y sont jamais retournés. La ville de l’automobile, de Ford, s’est retrouvée avec des maisons pourries, des édifices vides. Aujourd’hui, le centreville de Détroit est un lieu dangereux peuplé surtout de fantômes. Or quand je descends Saint-Denis, ces jours-ci, ça me rappelle Détroit. Ce sentiment pesant de vide, de désolation. À louer, à louer, à vendre, à louer, à vendre. Pourtant, il n’y a eu aucune émeute ici. Aucune rupture dans le tissu social, aucune justification historique simple, rien pour m’aider à comprendre comment et pourquoi le centre de ma ville est devenu synonyme de balades déprimantes parsemées de façades d’édifices à l’abandon.
La nostalgie vient sans doute, peut-être, du fait que je vieillis. Je n’ai pas connu l’époque de l’Expo, des Olympiques, encore moins celle de l’âge d’or du jazz et des cabarets dans le Montréal dans les années 1930 et 40. N’empêche, quand j’étais adolescente ou jeune adulte, il y a 20 ans, on venait ici avec les copains. C’était une destination, une aventure. On venait dans le Quartier latin! On sortait sur Saint-Laurent, sur Saint-Denis, sur Prince-Arthur. Peu importe la température. Le centre de Montréal, c’était le centre du monde, et Montréal, c’était ma ville, mon identité, ma fierté. Ma fierté, oui. Chaque fois que j’ai habité à l’étranger, je ne pouvais me défaire de cette envie de revenir à Montréal, de sentir le froid cristallin, l’hiver mourir au fond de chaque bière, de sentir ma culture vibrer dans les petits commerces, de sentir mon accent vivant de Québécoise habitant dans la deuxième ville francophone en importance dans le monde s’exprimer dans les bars, les librairies, les cafés.
Par négligence? Parce que personne ne s’en préoccupe? Parce que les travaux sont mal coordonnés? Parce que la corruption municipale? Parce que des politiques contraignantes de stationnement? Parce que des taxes trop élevées? Parce que des loyers trop chers? La technologie? Les temps qui changent? L’économie qui se transforme? Toutes ces questions me hantent. Qui est responsable? Qui peut changer les choses? On veut célébrer la ville et ses 375 ans, alors que son cœur même est à l’agonie. Suis-je la seule à souffrir de déambuler sur des pavés qui évoquent les visages pâles de cancéreux ayant abandonné leurs traitements? À ne pas me dire que, de toute façon, il y a Brossard, Laval, et des projets de super centres d’achats quelque part aux limites de la cité. Il faut dire que je viens d’une famille de petits commerçants. Mon arrière-grand-père avait un magasin général à Rosemont. Mon grand-père, lui,
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c’était une bijouterie dans Hochelaga-Maisonneuve. Ma mère, pendant plus de 20 ans, a vendu des articles de maison sur la rue Laurier Ouest où, aujourd’hui, un commerce sur deux est fermé. Je sais dans mon ADN à quel point, derrière la façade de chaque boutique, il y a des heures et des heures de travail, du stress, une hypothèque, les caprices de la météo qui font la différence entre une bonne et une mauvaise journée. Il y a aussi, bien sûr, le bonheur de monter sa clientèle, de lui faire plaisir, de faire partie de la vie de la ville, des rendez-vous quotidiens de ses habitants. Quand ma mère avait son magasin, souvent les clients arrêtaient en rentrant du bureau, simplement pour dire bonjour, pour donner des nouvelles, pour en prendre. Les petits commerces; le sang et l’eau dans le tissu de la ville. Un endroit où l’on se reconnaît, où l’on est reconnu. L’envers de l’anonymat. L’oxygène de l’urbanité. Hier, je suis passée chez une designer de la rue SaintDenis. Véronique d’Aragon, 40 ans. D’Aragon a toujours rêvé de mode, d’avoir sa boutique. Dès la petite enfance, elle fabriquait des vêtements. Avoir sa boutique, rue Saint-Denis, c’était ça son ambition. La rue
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Saint-Denis, quoi de mieux? Or il n’y a presque plus d’achalandage dans son petit rêve, dans sa boutique. Elle a dû vendre sa maison pour payer les taxes municipales de son local parce que l’argent ne rentre pas. Ça fait trois ans que sa devanture de commerce évoque Sarajevo ou Détroit. Elle songe à vendre en ligne, fermer boutique, fermer les portes de ce qui la définit, de ce qu’elle a toujours voulu faire. Et ça, c’est un drame. Pas seulement celui de Véronique, mais le nôtre. Car ce sont les Véronique d’Aragon de ce monde qui donnent une couleur à un quartier, à une ville. Et je me demande, en marchant sur Saint-Denis, sur SaintLaurent, sur Laurier, sur avenue du Parc, sur Côte-desNeiges, sur Prince-Arthur, si l’on prend la mesure de l’impact de ces catastrophes individuelles sur le collectif, sur l’âme même de notre cité. Faque. J’ai les blues de la métropole solide. Pis comme je ne vais pas déménager, ni à Toronto ni à Québec, je vais faire quelque chose de très «Montréalais désespéré» et aller à l’Oratoire et prier Saint-Joseph pour que quelqu’un, quelque part, allume. Qu’on allume plus qu’un lampion pour que le centre de ma ville guérisse de son mal avant qu’il ne soit trop tard. y
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Faste cuvée québécoise à cannes en mai, la planète cinéma ne vit que pour cannes. ce sera une année plutôt Faste pour le cinéma québécois, avec Xavier Dolan en compétition oFFicielle, Kim nguyen à la quinzaine Des réalisateurs et François Jaros à la semaine De la critique. coup D’œil. MOTS | PHILIPPE COUTURE
À quelques jours de l’annonce de la sélection officielle du Festival de Cannes, le suspense n’était pas bien grand au sujet de Juste la fin du monde, premier film de Xavier Dolan avec une distribution française étoilée, les Gaspard Ulliel, Léa Seydoux et Marion Cotillard trônant au sommet de l’affiche dévoilée au début avril. Le film commençait à se dévoiler doucement aux médias, signe que son montage a été terminé à temps pour Cannes et qu’il avait de bonnes chances d’être en compétition, vu l’amour que porte le festival à Dolan depuis ses débuts. Notre cinéaste prodige veut sa Palme d’Or et ne s’en est jamais caché, mais la compétition sera féroce avec, en lice, les nouveaux longs métrages des frères Dardenne (La fille inconnue), de Jim Jarmusch (une comédie cynique intitulée Paterson) ou de Pedro Almodóvar (Julieta). On a bien hâte de voir comment Dolan s’appropriera Juste la fin du monde, une pièce de Jean-Luc Lagarce qui raconte le retour au bercail d’un écrivain (Ulliel) venu annoncer à sa famille sa mort imminente. Peu connu au Québec, Lagarce est une étoile de la dramaturgie française des années 1980 et 90 qui figure encore, 20 ans après que le sida lui eut arraché la vie, parmi ceux dont l’œuvre est la plus jouée sur les scènes françaises. Artiste entier dont le théâtre intimiste était aussi et surtout un théâtre de langue et de non-dits, Lagarce a consacré ses dernières pièces (dont Juste la fin du monde) à la cellule familiale
PHOTOS | SHAYNE LAVERDIÈRE
et à des personnages partis au loin qui reviennent vers le berceau pour vivre leur drame final. Pas étonnant que Dolan s’y soit retrouvé, lui qui consacre une bonne partie de sa jeune œuvre à la famille et particulièrement à la relation mère-fils. Mais contrairement aux dialogues flamboyants de Dolan, l’écriture de Lagarce est hachurée, pétrie de silences et d’incapacités de dire. Louis, en débarquant dans le salon familial, se trouve plongé dans une série d’interactions laborieuses, qui achoppent presque continuellement. Une pièce sur l’incommunicabilité profonde d’un clan jadis tissé serré. «Toute la pièce, lit-on dans un essai d’Elisabeth Richard et Claire Doquet sur les représentations de l’oral chez Lagarce, met en scène les interactions difficiles entre les différents membres de cette famille, qui tout à la fois ont tant et rien à se dire mais qui ne se (re)connaissent pas. Le texte joue de l’immédiateté des interactions, sur un fond de déjà-dit, déjà-su, qui dispense de l’explicite.» «C’est pour moi un film qui, esthétiquement, n’a rien à voir avec les autres», a confié le cinéaste à La Presse. On s’attend assurément à une direction photo et à un montage moins frénétiques, mais surtout à une direction d’acteurs plus cérébrale, vu les particularités de la langue de Lagarce. Une chose est sûre, le Québec et la France auront les yeux rivés sur Dolan sur la Croisette.
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Kim Nguyen filme le Grand Nord Sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs, Two Lovers and a Bear est le premier film en anglais de Kim Nguyen, également la première œuvre lui valant une invitation à Cannes. On ne sait pas encore grand-chose de ce film hivernal, en partie tourné dans la région d’Iqaluit, dans des conditions difficiles. Le réalisateur du Marais et de Rebelle a insisté pour tourner dans le Grand Nord cette histoire d’amour mettant en vedette l’acteur américain Dane DeHaan et l’actrice canadienne Tatiana Maslany, d’après un scénario inspiré de souvenirs de voyages nordiques de Louis Grenier, fondateur des vêtements Kanuk. «Le film se déroule dans une ville contemporaine d’à peine 200 habitants, annonce Nguyen par voie de communiqué. Dans une zone arctique aux élans lunaires, là où la température tombe souvent sous les moins cinquante degrés. Ici, les routes ne font que s’effacer dans l’infini blanc. C’est dans ce décor extra-terrestre que Roman et Lucy, deux âmes torturées, sont tombés en amour. Mais Lucy garde un secret douloureux: un fantôme du passé la hante, la détruit. Elle doit le fuir, ou elle brûlera de l’intérieur. Ensemble, ces amants décident de fuir leurs démons, décident de prendre la route vers de meilleurs KIM NGUYEN, PHOTO | PHILIPPE BOSSÉ
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on s’attenD assurément à une Direction photo et à un montage moins Frénétiques. une chose est sûre, le québec et la France auront les yeuX rivés sur Dolan sur la croisette.
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tations diverses. La comédienne Karelle Tremblay, récemment vue dans Les êtres chers, d’Anne Emond, évolue doucement dans cette semi-pénombre, dans un film qui s’annonce impressionniste à souhait. Mentionnons aussi que, comme d’habitude, Téléfilm Canada débarque à Cannes au Marché du film avec quelques films dans sa besace. y
horizons. Ils foncent vers les espaces infinis de glace, où l’étrangeté peut parfois donner l’impression que le voyage est un voyage vers l’intérieur de soi-même.» Déjà applaudi sur la scène internationale grâce à Rebelle, qui s’est rendu jusqu’aux Oscars, Kim Nguyen change de ton dans ce film qui flirte aussi un peu avec le fantastique, faisant notamment d’un ours polaire un personnage parlant… Un mystérieux court métrage de François Jaros Au Gala du cinéma québécois, François Jaros a déjoué tous les pronostics en remportant deux années consécutives le prix du meilleur court métrage, d’abord pour le ludique et syncopé Toutes des connes (un scénario de Guillaume Lambert, également acteur-vedette du film), puis pour Maurice, un film plus calme qui raconte la lente acceptation de la mort par un homme d’âge mûr, atteint de la maladie de Lou Gehrig. Deux tons, deux rythmes, mais dans les deux cas, une signature forte et un humour intelligent: Jaros est issu de la pub et propose jusqu’à maintenant un cinéma accessible et efficace. Mais son nouveau film sélectionné à la Semaine de la critique, Oh What a Wonderful Feeling, semble se ranger du côté d’une plus grande étrangeté, cultivant le mystère et les ambiances nocturnes angoissantes. Un film qui scrute l’inconscient et se drape d’onirisme, invitant les spectateurs à des interpréOH WHAT A WONDERFUL FEELING, PHOTO | SÉBASTIEN RAYMOND
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sociopolitique Du surhomme la sortie De CAPTAIN AMERICA: CIVIL WAR est imminente. loin D’être un Film De superhéros comme les autres, ce nouvel opus marvel présente un schisme au sein même De la communauté Des surhumains, un combat iDéologique qui n’est pas sans rappeler la guerre que se livrent les DeuX principauX partis politiques américains en ce moment même. Devant ce constat, nous nous DemanDons: le Film De superhéros serait-il un reFlet Du conteXte sociopolitique qui le voit naître? MOTS | ANTOINE BORDELEAU
Dans les dernières années, les amateurs de comics ont été plus que servis au cinéma. Marvel et DC semblent vouloir bombarder le public de bandesannonces et de nouvelles sorties sans relâche, le style ayant fait ses preuves comme une vache à lait cinématographique efficace. Bien qu’il y ait eu de nombreux cafouillages par le passé (on n’a qu’à penser au désastreux Green Lantern), les cinéastes derrière ces blockbusters ont raffiné la recette au point
PHOTOS | MARVEL STUDIOS
où certains de ces films sont non seulement satisfaisants pour les fanatiques, mais aussi encensés par une critique somme toute néophyte en matière de comics. Pour quelqu’un n’ayant jamais lu un traître phylactère de Batman ou de Wolverine, l’attrait d’un tel film peut être au départ plus que mitigé. Comment expliquer, alors, le succès retentissant et l’engouement hors du commun que suscitent les X-Men et autres Iron Man? Une piste de réponse pourrait se trouver du côté de notre réalité sociale et politique. En effet, bien que les histoires dont ces films sont tirés proviennent des pages colorées publiées chaque semaine chez DC et Marvel, les adaptations cinématographiques de celles-ci pigent également dans des événements bien réels. L’explication en est simple: de tout temps, le cinéma a été une façon pour ses créateurs de refléter certaines facettes de la «vraie vie», de passer un message. Il en va de même tout autant pour les récits réalistes que pour les aventures rocambolesques de science-fiction ou de fantaisie. Le film de superhéros n’échappe pas à cette règle, et les studios savent pertinemment que ce qui fait vendre un film plutôt qu’un autre, c’est la réponse émotionnelle immédiate qu’il suscite chez le public. La notion d’une catastrophe meurtrière devant laquelle l’humain moyen est impuissant – pratiquement une constante dans le genre – vient faire vibrer la corde sensible de tout un chacun. Ce n’est donc probablement pas par pur hasard que l’on retrouve des scènes rappelant une actualité plus ou moins récente dans presque chacun des films qui mettent en vedette ces personnages surpuissants.
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BERNARD TURCOTTE, PHOTO | ANTOINE BORDELEAU
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Ressemblances consensuelles Dans le cas qui nous prĂŠoccupe, est-ce que la rĂŠbellion de Captain America, symbole ultime de la toute-puissance des Ă&#x2030;tats-Unis, pourrait reprĂŠsenter un sentiment de grogne prenant de plus en plus de place au sein de la sociĂŠtĂŠ amĂŠricaine? Bernard Turcotte, propriĂŠtaire de la librairie Les Bons DĂŠbarras et fanatique de comics, pense quâ&#x20AC;&#x2122;il pourrait y avoir un certain rapprochement Ă faire: ÂŤQuand lâ&#x20AC;&#x2122;histoire originale a ĂŠtĂŠ ĂŠcrite, en 2006, câ&#x20AC;&#x2122;ĂŠtait en plein dans les annĂŠes Bush. Le monde commençait Ă voir que la guerre en Irak ĂŠtait un peu nâ&#x20AC;&#x2122;importe quoi, et il y avait un genre de mĂŠpris grandissant du public face Ă la classe politique. Lâ&#x20AC;&#x2122;auteur Mark Millar en ĂŠtait certainement conscient. Dâ&#x20AC;&#x2122;un autre cĂ´tĂŠ, la position de Captain America dans la bande dessinĂŠe aurait pu aller plus loin. Il y a un conflit Ă savoir si on veut travailler avec le gouvernement ou pas, mais ça demeure en surface.Âť Selon lui, ce nâ&#x20AC;&#x2122;est pas sans une volontĂŠ implicite des gros studios qui les produisent que ces films sâ&#x20AC;&#x2122;axent souvent autour dâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠvĂŠnements proches de ceux qui se dĂŠroulent dans le monde rĂŠel: ÂŤFaut pas oublier quâ&#x20AC;&#x2122;ils sont lĂ pour vendre. On est tout le temps dans le consensuel, on ne veut pas lancer de grands dĂŠbats, mĂŞme si ça pourrait ĂŞtre un bel endroit pour le faire. Lâ&#x20AC;&#x2122;industrie a peur de prendre des risques, elle veut nous montrer quelque chose quâ&#x20AC;&#x2122;on a dĂŠjĂ vu. Elle veut nous montrer ce quâ&#x20AC;&#x2122;elle pense quâ&#x20AC;&#x2122;on veut voir, câ&#x20AC;&#x2122;est donc naturel que ce quâ&#x20AC;&#x2122;on y retrouve soit parfois très facile Ă associer Ă lâ&#x20AC;&#x2122;actualitĂŠ.Âť Un peu comme le film catastrophe en pĂŠriode post-9/11, le genre du superhĂŠros serait donc plus liĂŠ Ă la rĂŠalitĂŠ pour vendre que pour faire rĂŠflĂŠchir, selon lui. CoĂŻncidences profitables Une autre thĂŠorie vaut toutefois la peine dâ&#x20AC;&#x2122;ĂŞtre approfondie. PlutĂ´t que dâ&#x20AC;&#x2122;influencer directement les crĂŠateurs dans leurs Ĺ&#x201C;uvres, lâ&#x20AC;&#x2122;actualitĂŠ rĂŠcente pourrait plutĂ´t
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amener le public lui-même à s’intéresser particulièrement à un scénario qui y est analogue par pure coïncidence. Effectivement, les calendriers de production de ces méga-productions hollywoodiennes étant planifiés des années à l’avance, il serait très difficile pour un réalisateur de faire des choix en se basant sur les nouvelles des dernières semaines, hormis aux toutes dernières étapes du montage. En discutant avec Benoit Mercier et Gauthier Langevin, respectivement réalisateur et chroniqueur du podcast dédié à la culture geek Les Mystérieux Étonnants, nous approfondissons cette idée. «Le titre le dit, c’est Civil War, explique Mercier. C’est à l’intérieur même du peuple qu’il y a des enjeux, des oppositions de valeurs profondes. Il y a des schismes incroyables au sein de la population mondiale en ce moment, et j’ai l’impression que le film est un peu la résonance de ça, ou plutôt qu’il risque vraiment d’en profiter d’une certaine façon.» Langevin enchaîne: «Je trouve que Civil War représente bien le flou dans lequel on vit en ce moment. L’histoire montre une communauté de superhéros, qui normalement
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travaillent tous pour le bien de l’humanité, mais qui tout d’un coup s’opposent. On ne sait plus qui est 100% bon ou méchant… Il y a là quelque chose de proche de ce qu’on peut voir en politique, quand il y a un changement de parti. Ils sont tous censés être là pour faire avancer la société, mais ils ne s’entendent pas toujours sur les manières d’y arriver.» Au final, deux visions s’opposent. Que ce soit des choix conscients des créateurs qui attirent les gens en salle ou plutôt le contexte sociopolitique luimême qui pousse le public à apprécier un film, le constat est le même: le film de superhéros vit une sorte d’âge d’or en ce moment. Avec plus de 30 films prévus d’ici 2020 si on combine les univers de DC et Marvel, il sera intéressant de voir si la prochaine élection américaine aura une incidence sur le genre, ou si l’affluence en salle se verra affectée par cette passation de pouvoirs des plus importantes. y Captain America : Civil War sera en salle partout dès le 7 mai prochain.
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comment vraiment se salir les mains L’action politique exige parfois de faire des accrocs à ses convictions. Quand on l’a noté, on est sensible à l’argument qui souligne que les commentateurs, les intellectuels, les journalistes, les philosophes l’ont facile en jouant la carte de la pureté, eux qui ne sont pas dans l’action, laquelle exige souvent, comme le disait déjà Machiavel, des compromis, des calculs et même des mensonges. En un mot: de se salir les mains. L’actualité politique nous fournit d’ailleurs bien des exemples de ce salissage de mains donné pour nécessaire. Voyez plutôt. Des exemples La ministre fédérale de l’Environnement et du Changement climatique, Catherine McKenna, sait bien, on peut le présumer, qu’il faut lutter, et rapidement, contre les changements climatiques. Mais elle vient de consentir à l’accroissement de la production de pétrole albertain, de ce pétrole sale dont la communauté scientifique nous dit qu’il doit rester sous terre. Elle ne ferme pas non plus la porte aux projets de pipeline, invoquant chaque fois tous ces emplois qu’on ne peut se permettre de perdre. La ministre dirait probablement qu’elle est une politicienne, pas une moraliste, et qu’à ce titre elle doit, conformément à ce que réclame l’action, se salir les mains et poser parfois des gestes qui vont à l’encontre de ses propres convictions. Le gouvernement Trudeau avait promis de mettre fin aux subventions au secteur des énergies fossiles. Il n’en a rien fait dans son premier budget: cela se fera, dit-on, mais sur une plus longue période. Cette fois encore, les exigences de l’action sont invoquées pour justifier ces décisions.
La France vient tout juste de faire Grand Officier de la Légion d’honneur le prince saoudien Mohammed Ben Nayef. L’homme sera sans doute le prochain roi et on a, semble-t-il, jugé important de renforcer sa stature internationale et ses liens avec la France – et donc de se salir les mains en faisant pareil honneur à un homme qui sera possiblement demain chef d’un pays au si déplorable bilan en matière de droits de la personne. Mains salies par «éthique de la conviction responsable» De son côté, Stéphane Dion vient de confirmer qu’il maintient la décision du gouvernement Harper de vendre, durant une décennie et plus, des véhicules militaires canadiens à l’Arabie saoudite – une transaction de quelque 15 milliards de dollars. Or ce pays est non seulement une horreur absolue en matière de droits de la personne, mais il finance aussi à tour de bras le terrorisme islamique que nos gouvernements disent combattre. Tout cela répugne certainement à M. Dion, à toutes les personnes qui ont voté pour lui et plus généralement à la majorité des Canadiennes et des Canadiens. S’inspirant d’une distinction entre éthique de la conviction (celle de la pureté et des principes) et éthique de la responsabilité (celle qui considère les conséquences possibles d’une action pour décider ce qu’il est souhaitable de faire), M. Dion justifie sa décision en créant un néologisme: il invoque une «éthique de la conviction responsable». En son nom, il se salit les mains. Mais que penser de cette invocation de la nécessité de se salir les mains ou de cette «conviction responsable» qui la justifie?
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Il me semble qu’on ne peut les prendre au sérieux qu’à certaines conditions qui feraient en sorte que l’on n’invoque pas n’importe quand et à tout propos l’obligation de se salir les mains (ou d’être un homme de conviction responsable), ce qui reviendrait hypocritement à justifier tout et n’importe quoi – et le lendemain son contraire. Ce que se salir les mains devrait signifier Pour commencer, qui dit devoir se salir les mains doit être placé devant un véritable dilemme: je dois faire ceci ou ne pas le faire; je dois faire ceci ou cela. De plus, ce dilemme ne laisse pas le luxe d’attendre et de reporter la décision. Enfin, l’un des deux termes me répugne, mais je dois m’y résoudre en vertu d’une évaluation des conséquences qui montre que si j’agis selon mes valeurs, je causerai du tort, tandis que si je me salis les mains, je causerai du bien et même beaucoup de bien. Cette conclusion me désole, mais je me résous à agir selon ce que demande ce calcul. Revenez sur les récents exemples que je citais. Je soutiens que ces conditions ne sont pas réunies dans ces cas et me risque à avancer qu’elles ne le sont que rarement quand on invoque les exigences de l’action devant des choix indéfendables, de sorte que les invocations de la nécessité d’agir par nos politiciens ne sont trop souvent que couverture hypocrite pour justifier des choix faits pour des raisons qu’on ne dévoile pas, mais qui ont certainement beaucoup à voir avec les intérêts économiques dominants qu’ils et elles servent. Bref: l’éthique de la conviction responsable ne me convainc pas vraiment. Allons plus loin. Imaginons que pareils calculs aient été invoqués contre la décision autrefois prise par l’Angleterre – mais économiquement coûteuse – de mettre fin à l’esclavage… Inutile de souligner où le progrès moral et l’Histoire pointaient: dans la même direction qui nous commande aujourd’hui de ne pas vendre d’armes à des pays comme l’Arabie saoudite, qui nous rappelle que rien ne nous y contraint; dans la même direction qui nous commande, comme nous le rappelle le consensus scientifique, de laisser dans le sol le pétrole albertain; dans la même direction qui nous commande de commencer à entrer dans l’ère de l’après-pétrole. Posons maintenant qu’un politicien, en toute bonne foi, nous avoue ne pas avoir eu le choix de se salir les mains, de poser des gestes qui répugnent à sa conscience et à la nôtre. Qu’estce qui devrait s’ensuivre? J’avais posé la question à Michael Walzer, un philosophe qui a écrit un article fameux sur les mains sales en politique. Il m’avait répondu que nous voulons que ces gens sachent que nous les jugeons moralement répréhensibles et que nous ne voulons pas qu’ils agissent trop souvent de la sorte; que nous voulons qu’ils posent ces gestes, mais aussi qu’ils ressentent du repentir pour les avoir commis et qu’ils cessent de les poser dès que cela est possible. À moins d’une formidable mais improbable pression populaire, je pense qu’il est illusoire d’attendre de nos politiciens qu’ils se repentent véritablement d’avoir vendu des armes à des États ignobles, couronné leurs dirigeants et accéléré l’arrivée de ce moment où il deviendra bien difficile de mener une vie décente sur Terre ou de préserver ce qu’il y restera de civilisation. y
BOUTIQUE
av. Mont-Royal/Fabre www.lebalconier.com
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GASPILLAGE ALIMENTAIRE SUIVONS LES CHEFS? ALORS QUE PLUS DE 1,3 MILLIARD DE TONNES DE NOURRITURE PAR AN SONT PERDUES DANS LE MONDE, DE PLUS EN PLUS DE CHEFS LANCENT DES INITIATIVES CONTRE LE GASPILLAGE ALIMENTAIRE; LES PROFESSIONNELS DU MILIEU SERAIENT UN FACTEUR D’INFLUENCE IMPORTANT SUR LE CHANGEMENT DES MENTALITÉS. ET LES CITOYENS S’Y METTENT AUSSI. SERAIT-ON (ENFIN) SUR LA BONNE VOIE? MOTS | MARIE PÂRIS
PHOTO | DREAMSTIME.COM
«Rien ne se perd, tout se récupère.» Cet adage copié sur la célèbre phrase du chimiste Lavoisier donne bien le ton: même dans l’alimentation, il est possible de recycler des produits et de les faire durer plus longtemps. Car jeter des aliments à la poubelle reste un réflexe assez prégnant dans nos sociétés. Au Canada, selon les données du Conseil national Zéro déchet, le gaspillage alimentaire annuel équivaut à des pertes de 31 milliards de dollars – soit 2% du produit intérieur brut… C’est en constatant le volume d’aliments jetés dans l’hôtel où il travaillait que le chef Jean-François Archambault a décidé de créer La Tablée des Chefs, un organisme qui a pour mission d’éduquer la population sur le gaspillage et de nourrir les plus démunis grâce à des surplus alimentaires. Il a mis en place un système de récupération dans sa cuisine, avant de l’étendre à d’autres hôtels; aujourd’hui, une vingtaine d’établissements sont concernés. Au Centre Bell, par exemple, ce ne sont pas moins de 60 000 portions alimentaires par an qui sont récupérées et redistribuées.
Le but de La Tablée des Chefs est ainsi de mobiliser les acteurs du secteur de l’alimentation et de les sensibiliser au gaspillage alimentaire. Parce que dans les restos, les poubelles sont vite pleines... «On utilise beaucoup d’aliments transformés; il en résulte par exemple des quantités de pelures de légumes jetées», acquiesce Daniel Vézina, chef du Laurie Raphaël. «La plupart des chefs ne respectent pas leurs produits, regrette Antonio Park, à la tête du restaurant montréalais Park. S’ils cuisinent du poisson, ils vont jeter les arêtes, la tête ou les parties internes, alors que ça peut servir pour un bouillon…» Ça gaspille dans les familles Mais il y a des chefs modèles en la matière: «Massimo Bottura, cite Antonio Park. Il joue un grand rôle dans le monde de la cuisine et il est un exemple à suivre contre le gaspillage.» Justement, le chef italien sera à l’honneur fin mai au Centre Phi, où une série d’événements contre le gaspillage alimentaire seront organisés – notamment des
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démonstrations culinaires orchestrées par Antonio Park et Massimo Bottura. Et puis, il y a les jeunes: «La relève en restauration a vraiment à cœur de faire attention à l’environnement», indique Patrick Emedy, chef formateur à la Tablée des Chefs, qui cite en exemple les Montréalais Jonathan LapierreRéhayem du Laloux ou Étienne Huot et Denis Vukmirovic de La Récolte – Espace local. Si un tiers des aliments produits finissent à la poubelle, les statistiques montrent que le plus gros du gaspillage se passe chez les gens. «Le travail de sensibilisation est plutôt à faire sur le grand public, pense Patrick Emedy. Les professionnels de la restauration peuvent avoir un grand pouvoir de persuasion, c’est à travers eux que peut passer la prise de conscience.» Avec son programme d’éducation, la Tablée s’adresse ainsi à des ados de 12 à 17 ans, qui seront bientôt responsables de leur épicerie. Pendant les Brigades culinaires – des cours de cuisine donnés au secondaire –, les chefs évoquent
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produit, on devient créatif, et finalement on met de l’originalité dans les plats en maximisant les aliments, raconte-t-il. Si j’achète du céleri, avec les feuilles je fais de l’huile, du pesto, du beurre...» Le plus difficile dans tout ça, c’est de changer nos habitudes, dans une société où on nous incite à acheter beaucoup trop. «Ça demande de réfléchir, de s’organiser et de planifier plus en cuisine, et, oui, c’est du temps en plus, reconnaît le chef. Mais c’est aussi un gain financier.» Et finalement, on revient aux techniques de nos grand-mères... Mais Québec est à la traîne par rapport aux autres provinces du Canada, regrette Daniel Vézina. «C’est une grande roue qui a besoin d’être poussée, notamment par nous les chefs. On est au début de ce mouvement, on est encore dans un discours avant-gardiste, mais que les gens sont prêts à entendre.» En effet, ça bouge aussi hors de la restauration. Ainsi, le quartier montréalais de Rosemont a accueilli en avril dernier un frigo où les
«IL FAUT REMETTRE EN AVANT LA NOTION DE TEMPS DANS NOTRE ALIMENTATION.» la pêche durable, les conséquences de la surconsommation de viande rouge ou encore le développement durable. Lutter contre le gaspillage passe aussi par de petits gestes simples. Comme rédiger sa liste d’épicerie en amont pour n’acheter que ce dont on a besoin pour ses plats et faire attention au roulement – «la marche en avant», comme on l’appelle en restauration –, en cuisinant d’abord les produits les plus vieux. Et puis, il y a le «savoir quoi faire» aux fourneaux: «Avoir des habiletés en cuisine permet de savoir comment recycler ses ingrédients pour les garder plus longtemps, leur donner une autre durée de vie. Il faut remettre en avant la notion de temps dans notre alimentation...», souligne Patrick Emedy. Un discours avant-gardiste Dans son dernier livre, La cuisine réfléchie, Daniel Vézina donne des techniques pour récupérer les aliments, en ciblant notamment des périodes de l’année où on en jette le plus (Halloween et les citrouilles). «Quand on essaie de récupérer un
passants peuvent laisser leurs restes du restaurant ou de garde-manger, pour nourrir les plus démunis au lieu de jeter les aliments. Citons aussi Eatizz, cette nouvelle application lancée par un jeune diplômé de HEC Montréal qui localise les épiceries offrant des rabais sur les produits proches de la date de péremption ou moins frais. Suivant cet élan, certaines lois évoluent pour permettre aux magasins d’éviter le gaspillage forcé par les normes réglementaires. Ainsi, le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec va changer le texte classant les produits selon leur apparence, permettant aux chaînes d’alimentation de vendre des récoltes «horsnorme» (soit actuellement les fruits et légumes présentant une longueur ou grosseur supérieure au standard ou plus de 5% d’altérations sur la surface). Et à Sherbrooke, la Ville a appuyé une proposition du Conseil national Zéro déchet de faire un crédit d’impôt aux entreprises faisant don d’aliments invendus. Le Québec à la traîne? Patrick Emedy est optimiste: «J’ai l’impression qu’on va dans le bon sens...» y
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LE VIN ITALIEN QUI SORT DE PRISON CE CRU QUI COMPTE MAINTENANT QUATRE MILLÉSIMES A UNE HISTOIRE PARTICULIÈRE: IL EST PRODUIT PAR DES DÉTENUS SUR LA DERNIÈRE ÎLE-PRISON DE L’ITALIE… MOTS | MARIE PÂRIS
Le Gorgona vient d’arriver dans les SAQ Signature: un vin blanc riche, avec un côté beurré mais une note très fraîche, des arômes d’agrumes et de thé vert. Il provient du Marchesi de’ Frescobaldi, un des plus vieux vignobles d’Italie – la maison familiale existe depuis le 14e siècle. Le vin tire son nom de la petite île où il est produit, au large de la Toscane, une île «dont il est difficile de s’échapper à moins d’être un très bon nageur...», sourit Stefano Benini, directeur de l’exportation chez Frescobaldi. C’est que Gorgona abrite une prison depuis 1869. En 2012, à la suite d’un rapport du ministère de la Justice italien sur le taux de récidive des anciens détenus et leur difficulté à se réinsérer dans la société, le domaine viticole décide de se lancer dans un projet social: former des prisonniers à la viticulture pour soutenir leur réhabilitation. C’est ainsi que des professionnels de la maison sont arrivés avec leurs équipements sur l’île de Gorgona, où deux hectares de vignes avaient été plantés en 1999. «Les conditions dans les prisons italiennes sont souvent déplorables… Le taux de récidive atteint 60% après la sortie, indique Stefano Benini. Il est donc très important de bien prendre en charge les détenus.» Frescobaldi s’est ainsi mis au défi d’apprendre aux prisonniers les techniques de vinification, sous la supervision d’œnologues et de vignerons.
Vignerons sobres Et ça marche: les détenus ont produit cette année le quatrième millésime de Gorgona – en agriculture biologique s’il vous plaît. Ils travaillent les cépages vermentino et ansonica, très caractéristiques des vins de la région. «Travailler la vigne, collaborer avec les agronomes et les œnologues, constater le succès du projet et du produit final a créé un enthousiasme énorme chez les prisonniers, qui sont très heureux d’avoir pris part à un projet pareil», assure Santina Savoca, la directrice de l’établissement carcéral de Gorgona. Mais s’ils produisent du vin, les détenus n’ont pas l’autorisation de boire de l’alcool en prison – on les autorise quand même à goûter. Comme ils n’avaient pas de références en matière de vin leur permettant de comparer arômes et parfums, Frescobaldi leur a organisé une petite formation d’œnologie pour leur apprendre à parler du vin. «Voulant décrire l’amertume, un des prisonniers a dit: “C’est amer comme la vie”, se souvient Stefano Benini. Il était en prison depuis 15 ans déjà...» Parmi les détenus, se trouverait notamment l’assassin de Maurizio Gucci – de la maison de couture. «Certains ont fait des choses terribles. Mais rien en rapport avec la mafia, soutient le directeur de l’exportation, il s’agit plus souvent de crimes
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passionnels...» En attendant, le projet fonctionne, et 3 des 50 détenus ont déjà trouvé du travail dans l’industrie du vin, dont un chez Frescobaldi. Œnologie et crimes passionnels «La possibilité de récidiver est très élevée, surtout dans les prisons très dures où il n’y a pas de possibilité de travailler, indique Santina Savoca. Le travail donne une responsabilité aux détenus, et leur inculque aussi le respect de certaines règles. Sur l’île, tous les prisonniers travaillent et sont très respectueux des horaires; c’est selon nous la meilleure façon de les préparer à se réinsérer dans la société civile. Le projet a été un vrai outil, car il a aidé à l’éducation et à la préparation de prisonniers moins dociles, et qui se sont bien comportés une fois sortis de prison.» De son côté, la ministre de la Justice italienne pense que ce programme pourrait être copié dans d’autres prisons. L’initiative de Frescobaldi, qui a signé avec le centre pénitentiaire un partenariat de 15 ans, lui a en tout cas valu de passer dans de nombreux médias, attirant jusqu’au New York Times dans son vignoble. Alors, gros coup de pub ou vraie initiative sociale? Sans doute un peu des deux. En attendant, si 3656 bouteilles du dernier millésime ont été produites (dont 90 sont en vente au Québec), la maison réfléchit à agrandir le vignoble de Gorgona. Et elle aurait un autre projet du même acabit au sud de l’île d’Elbe; avec ses 220 km, il y aurait de quoi embouteiller… y
OÙ MANGER
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LES BONS PLANS POUR DES SORTIES AU RESTO CE MOIS-CI. BON APPÉTIT!
NOTKINS 1101, rue de Bleury 514 866-1101 Notkins, c’est le nom du fondateur du festival d’huîtres Oysterfest. Amateurs de fruits de mer, ce bar à huîtres est donc pour vous: en plus de toutes les variétés d’huîtres venues des côtes est et ouest de l’Amérique du Nord, on peut y déguster homards, pétoncles, ceviche ou tartares, et la carte des vins diversifiée et bien faite propose de bons accords mets-vins. Si les clients sont souvent assis le long des bars, quelques tablées plus intimes permettent de profiter du repas en face à face. Le plus, c’est l’architecture tout à fait spectaculaire du restaurant, tout en poutres métalliques, formes brutes et immenses vitres. Pour les événements privés, une mezzanine avec bancs suspendus a été aménagée.
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CAFÉ INTERNATIONAL
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6714, boulevard Saint-laurent 514 495-0067 Sous cette enseigne au néon se rassemblent des habitués depuis 1968. Dans ce café-restaurant qui a pignon sur rue, on peut venir dès le matin pour un espresso rapide. Le menu italien propose des plats simples, mais qui mettent l’accent sur le fait maison et le choix des ingrédients. Panini au prosciutto, saucisse maison, salade fraîche garnie de poulet grillé s’invitent dans l’assiette le midi, et le soir on opte pour des arancinis, risottos, boulettes de viande, plats de pâtes ou pizzas, qui mêlent mozzarella fraîche, roquette, pesto et mortadelle. Les plats en portions généreuses s’accompagnent à merveille d’un verre de vin au choix dans la carte, qui met l’Italie en vedette. L’intérieur intime, feutré et convivial du resto est complété l’été par une terrasse animée.
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PÉGASE 1831, rue Gilford 514 522-0487 Une petite salle à l’atmosphère conviviale, située au cœur du quartier du Plateau depuis 25 ans, et qui propose une cuisine tout en élégance, bien apprêtée et dosée. On commence avec des profiteroles de fromage de chèvre avec joue de veau et betteraves, un tataki de thon ou bien des calmars farcis aux escargots et à la crème fraîche. La présentation des assiettes et le choix des accompagnements sont particulièrement soignés. En plat, on se laisse tenter par le magret de canard, le lapin de Stanstead, le carré d’agneau ou le filet de bœuf… Le resto est notamment connu pour sa sélection de viandes cuites à la perfection. Un plus pour le service, particulièrement courtois et agréable. Et c’est un apportez votre vin.
photo | NejroN, Dreamstime.com
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TOUT EST HISTOIRE DE CUL... ENFIN PRESQUE mots | fraNco Nuovo
Nous avons été critiqués, attaqués, blâmés, dénoncés, incriminés, accusés de tous les maux et de tous les problèmes de la terre, inculpés la plupart du temps par les générations subséquentes, surtout celle qui nous a emboîté le pas et qu’on a baptisée X, telle une génération sans nom, sans identité, inconnue au bataillon. Sommes-nous vraiment coupables, votre honneur? Il m’est arrivé, à la suite de toutes ces récriminations et de la lecture de tous ces pamphlets qui réclament notre tête, d’avoir envie de crier: «Baby-boomers de tous les pays, unissez-vous». De lever le poing bien haut. De scander: «Arrêtez de nous emmerder». Or ce poing, on l’a déjà assez levé et, après toutes ces années, le garder si haut fait mal au bras et à l’épaule. Coupables de quoi d’abord? Jean-Marc Piotte, professeur émérite du Département de science politique à l’UQAM, vient d’écrire un essai * des plus instructifs traitant de la révolution des mœurs qui «est le fait des baby-boomers» et de la Révolution tranquille, ici, au Québec, dont ils ne sont pas tout à fait
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> responsables, puisqu’«elle a été animée principalement par des acteurs provenant des mouvements de l’Action catholique à partir et au cours de la Seconde Guerre mondiale». Sur les rayons
LE CONTINENT DE PLASTIQUE DaviD turgeoN Le Quartanier, 312 pages Avec ses deux premiers romans, Les bases secrètes et La revanche de l’écrivaine fantôme, l’auteur et bédéiste David Turgeon nous avait déjà démontré un désir littéraire éclatant des cadres, s’inspirant au passage de Calvino et Borges. Avec son nouvel opus, Le continent de plastique, Turgeon nous livre ici son roman le plus linéaire, qui n’en est pas moins étrange. Dans une ville fictive avec un personnage sans nom, le lecteur suivra les tergiversations d’un universitaire. Lorsqu’il devient l’assistant d’un écrivain célèbre, au succès tant critique que populaire, il laissera lentement se transformer ses volontés d’écriture en simples velléités. Incursion dans un milieu tant littéraire que d’initiés. Chaque chapitre s’articulant autour d’une parution du maître, ces avancées littéraires nous seront livrées par son assistant, nous guidant à travers maints digressions et changements de cap, accompagné par ses amis universitaires – modestement surnommés les cavaliers de l’apocalypse–, qui eux-mêmes tenteront de trouver leur place dans ce milieu littéraire. Avec Turgeon, rien n’est jamais simple. Les petites histoires forment la grande: celle d’un homme heureux dans un certain anonymat. Délaissant sa copine pour une exilée allemande, il ne cessera de s’interroger sur le seul milieu dans lequel il semble se trouver une pertinence. Bien que certains des pans narratifs de Turgeon peuvent sembler parfois bancals, parfois banals, il n’en reste pas moins qu’il dresse au détour de ce livre un portrait tantôt cinglant, tantôt cynique, d’une faune littéraire tant fantasmée que bien près du réel. Que ce soit dans ses digressions – qui peuvent se perdre en longueur – ou à même sa trame narrative, il lance des regards, si ce n’est des flèches, à ses contemporains. Du manifeste Reality Hunger de David Shields, remettant en question l’utilité du roman, en passant par le destin tragique de Nelly Arcan, les clins d’œil sont tantôt subtils, tantôt évidents. Un roman comme un continent de plastique, où s’agglutinent dans une marée littéraire différents mensonges, réflexions, digressions, histoires, vérités, formant un tout à la fois homogène et hétéroclite, conséquence inhérente à notre modernité. Et l’assistant de répondre: «[…] je pense qu’il faut revenir à l’essai. À tout le moins à une forme hybride en essai et fiction. Il faut se mesurer à la réalité en éliminant les filtres narratifs. Autrement on n’arrive à rien.» (Jérémy Laniel)
On se rend compte plus que jamais dans le livre de Piotte que les révolutions s’entrecroisent, mais surtout à quel point le Québec, tout en faisant partie d’un mouvement international, est depuis toujours une société distincte. Je dis distincte parce qu’outre les enjeux des mœurs à l’échelle de la planète, il y avait en plus l’affranchissement du clergé, l’identité nationale, l’éducation, la langue, etc. Dans ce sens, l’ouvrage de Jean-Marc Piotte est une réflexion, un cours d’histoire, portant sur notre transformation sociale autant que sur ce qu’on a appelé les «trente glorieuses». C’est fou comme on oublie vite, probablement est-ce dû à l’âge qui nous a rattrapés, eh oui, même nous. Alors, coupables de quoi? D’être nés de plus en plus nombreux au lendemain de la guerre jusqu’à la fin des années 1960? D’avoir inventé le rock’n’roll, la Beatlemania et la minijupe dont certains donnent le crédit à Mary Quant et d’autres à Courrèges? D’avoir admiré Twiggy? D’avoir cessé de danser en couple pour enfin danser seul et libre se privant ainsi quand même de quelques plaisirs démodés? D’avoir été les enfants gâtés du système? D’avoir fait mai 1968 en cherchant sous les pavés la plage? D’avoir pris et occupé tous les jobs ouvrant la porte à la précarité d’emploi? D’avoir laissé derrière nous des dettes et un monde plus pauvre? D’avoir donné à manger au monstre capitaliste? D’avoir engendré ce que certains ont appelé le Baby Bust en raison du faible taux de natalité? Eh oui! Nous avons fait tout ça. Coupables, votre honneur! Mais qu’est-ce qu’on s’est marrés! Et ne me traitez pas d’individu sans morale. Boomer entre les boomers, je reconnais avoir vécu avec mes pairs les plus belles années de l’histoire de l’humanité. Avoir, dans notre soif de liberté, fait sauter la serrure des plaisirs. Avoir expérimenté l’interdit, les mondes parallèles, ceux de Castaneda tout comme ceux de Timothy Leary. Et surtout, surtout, avoir fait exploser les tabous en déverrouillant les cadenas de la sexualité. On parle ici de la vraie liberté, celle qui a affranchi les femmes de l’esclavage «sans être contraintes à la maternité et sans s’assujettir à un homme par le mariage». La liberté qui a débouché sur un féminisme affirmé, surtout chez nous, celui de Québécoises deboutte! avec ce qu’il a eu de bon et de moins bon.
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Et comme l’explique Piotte dans son ouvrage, le legs principal des baby-boomers reste justement «la sexualité, la révolution sexuelle que les femmes ont poussé plus loin et qui a remis en question les rapports inégaux [...] l’acceptation de l’homosexualité même au point de vue juridique [...] aux devoirs préconisés par leurs parents, dit-il, les baby-boomers ont opposé leur droit de vivre librement [...] » Voilà l’héritage. Vous voyez, tout est histoire de cul. Les rêves des babyboomers se sont donc presque tous écroulés sauf cette liberté sexuelle dont profite toujours les générations subséquentes, X, Y et Z. Tout est une histoire de cul. Ouais. Nous nous sommes éclatés, faisant du même coup éclater règles et traditions. Bien. Or nous sommes tout de même coupables. Coupables d’avoir, dans le plus grand paradoxe, prôné une idéologie collectiviste et inventé dans le même élan la société de consommation et le marketing dont nous sommes devenus les premières victimes. Nous avons troqué nos idéaux de solidarité sociale pour un individualisme gangrené, nos joints de hasch pour des grands crus millésimés et nos t-shirts du Che pour une Mercedes de l’année. Votre honneur, nous plaidons coupables, mais dans un cas, du moins, avec circonstances atténuantes. Et je cite encore notre avocat, maître Piotte, qui s’élève quand X, Y ou Z nous accusent aujourd’hui de nous asseoir sur nos acquis. «C’est vrai de toutes les générations, plaide-t-il, qui en vieillissant deviennent plutôt conservatrices. Ce n’est donc pas l’effet baby-boomer, malheureusement. C’est l’effet du vieillissement.» Alors, tout est peut-être histoire de cul… Enfin presque. y *
LA RÉVOLUTION DES MŒURS: COMMENT LES BABY-BOOMERS ONT CHANGÉ LE QUÉBEC jeaN-marc piotte Québec Amérique, 120 pages
Sur les rayons
DE LA NATURE DES DIEUX aNtóNio Lobo aNtuNes Christian Bourgois, 528 pages Jamais la littérature n’est aussi loin du divertissement que lorsqu’elle émane de la plume de l’écrivain et psychiatre lisboète António Lobo Antunes. Depuis son entrée dans le monde des lettres, au tournant des années 1980, le Portugais martèle une langue complexe, inquiétante et dérangeante, cherchant à circonscrire la violence des hommes et la noirceur du monde en quelque 25 romans, tous abordant le thème de la filiation ainsi qu’une société bourgeoise portugaise révolue ou presque. Avec De la nature des dieux, titre emprunté à Cicéron, il poserait, semble-t-il, la dernière brique de son édifice littéraire. Et disons-le, le romancier de 73 ans s’est assuré de terminer en beauté. Il y a d’abord Fatima, libraire dans une bourgade pas très loin de Lisbonne, qui doit, semaine après semaine, aller porter des livres chez une femme habitant seule – malgré une horde de serviteurs – une immense propriété. Ces visites ne sont que prétextes pour discuter longuement avec cette libraire des chemins parcourus l’ayant menée à cette amère solitude. Il y a bien sûr cette femme, Madame, fille d’un richissime homme d’affaires aux mœurs douteuses, pour qui tout se monnaye. S’ensuivront divers monologues de serviteurs et compagnons de ce véreux patriarche, Monsieur, qui tantôt déverseront leur fiel, tantôt raconteront honteusement comment ils ont plié l’échine face à l’argent et au pouvoir, dont Monsieur était le seul fournisseur. Et il y aura cette danseuse de fado, qui, de par son innocence, est peut-être à l’origine du monde. Mais il y a surtout cette langue et cette verve, propres à Antunes, qui happent le lecteur dès les premières pages, comme un flot incessant de pensées, de réflexions, de haines et d’humanité. Ici, les voix luttent, crient, se croisent, chuchotent, s’entrecroisent, se répètent, mais jamais ne se taisent. La ponctuation n’existe pas, ou si peu. Non pas sans rappeler la fresque romanesque entamée en 1996 par Marie-Claire Blais avec Soifs, l’œuvre du psychiatre romancier portugais en est une totale, sans demi-mesure; des livres comme des performances, demandant abandon et confiance. Et si un lecteur ose se prêter au jeu, s’il ose s’y plonger au risque de s’y noyer, eh bien, il y découvrira une œuvre aussi grandiose que complexe, auscultant la violence inhérente au choc de nos passés et de nos présents, car chez Antunes, tout est multiple. (Jérémy Laniel)
2Fik monte un beau grand bateau il pose en talons aiguille, vous toisant de son regard viF. sa barbe touFFue et son hijab coloré vous Font de l’œil. voici 2Fik, artiste inclassable qui se démultiplie et se transForme dans des séries photo reconstituant des toiles célèbres. prochain projet: inviter sa Folle galerie de personnages dans le canot de la chasse-galerie, devant public pendant le Fta. mots | PhiliPPe Couture
Photos | antoine bordeleau
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Enthousiaste artiste autodidacte, 2Fik enfile perruques et robes ou tuniques et casquettes pour faire vivre Fatima ou Francine, Marco ou Benjamin: autant de personnages aux identités multiples qui, dans sa série 2Fik’s Museum, se retrouvent au cœur du Cri de Munch ou du Déjeuner sur l’herbe de Manet. «J’adore, dit-il, le bordel que ça crée dans la tête des gens quand ils voient un barbu avec un hijab et un maillot de bain moulant.» Il s’amuse beaucoup. Ses transpositions photographiques sont soignées – un travail de moine – mais ludiques, et visiblement réalisées dans le plaisir. Une œuvre accessible et divertissante, mais aussi hautement signifiante dans sa mise en scène d’un ballet d’identités contrastées, qui expose un monde pluraliste. Ses personnages d’immigrants un brin caricaturaux suscitent les sourires, mais l’œil cherchera vite à scruter plus en profondeur, à aller au-delà des étiquettes et des préjugés qu’ils peuvent inspirer a priori. D’origine marocaine, né et ayant grandi en France, 2Fik s’est épanoui comme artiste à Montréal, dans un Québec qu’il chérit profondément et où son identité multiple lui a semblé pouvoir s’épanouir naturellement. «Quand je suis débarqué ici, raconte-t-il, j’ai tout de suite été fasciné par le fait que le peuple québécois se pose les mêmes questions identitaires que moi, à l’échelle de la nation entière. J’adore que le Québec francophone se demande toujours qui il est, qu’il pose ces questions clairement, sans filtre, avec une grande maturité. La recherche d’une identité commune dans la multiplicité, c’est une quête dont le Québec est champion.» Le pouvoir de l’image Ça ne signifie pas que tout est bien dans le meilleur des mondes: 2Fik crée aussi pour déjouer un monde de préjugés, où l’on confine tout le monde dans des cases étroites, rangeant les homosexuels d’un côté, les musulmans de l’autre, les mères monoparentales francophones et les bourgeoises unilingues anglophones aux autres extrémités. Il utilise son corps et son physique, lui, l’«Arabe homosexuel barbu», pour représenter une société diversifiée dont il aime «questionner les stéréotypes et les préjugés». «Le mélange de tous mes personnages dans des environnements communs crée une diversité, un choc des identités, un gros party. C’est la manière dont on met en scène nos identités, dont on se performe, dont on se met en images, qui m’intéresse. Car on se met toujours en scène. Ces images de nous sont
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Montréalles-bains
inspirant DEPUIS 2000
Bai n s L avab os R ob in e tte r ie Toi l et t es Mob i lie r Cé rami q ue & Co mpt o ir s C é r a g r è s
2Fik Court la Chasse galerie. daPrès la Chasse galerie de henri Julien. Photo | PatriCk altman, mnbaq
parfois perçues par les autres de manière déformée ou accentuée; le message que notre image envoie peut être très décalé par rapport à ce que nous sommes. C’est en partie ce qui m’intéresse.» Adepte d’un art «transparent», «sincère» et «direct», 2Fik vise un public large. Il vient du monde de la pub, maîtrise les codes du marketing et en fait les principes d’un art signifiant qui parle à tous. «Je travaille avec le langage de l’image, car une image est comprise par tout le monde. Je veux que les analphabètes comprennent mon art. Je veux transcender la barrière des langues. Mes personnages, d’ailleurs, n’ont pas de voix. Ils ont un âge, une personnalité, un style, une façon de bouger, mais ils n’ont pas de voix. Ils vivent par l’image.» Artiste queer? Entièrement, mais pas seulement. 2Fik est surtout un habile manipulateur des identités de genre, qui flirte autant avec les codes de la virilité qu’avec une féminité assumée. «J’ai été élevé dans un environnement très macho, rigole-t-il. Mais je suis aussi homosexuel, j’aime me déguiser en femme, je m’intéresse à la diversité qui me compose. Je ne me questionne pas sur mon appartenance au genre masculin, que je célèbre d’ailleurs dans mon look en affichant les apparats de la virilité (notamment la barbe). Sauf que j’adore porter des talons hauts et ça me donne des jambes d’enfer.» L’art de désacraliser l’art
2174, av. du Mont-Royal est montreallesbains.com
Dans sa série 2Fik’s Museum comme dans son nouveau projet impliquant le tableau La chasse-galerie d’Henri Julien, 2Fik se met en scène et se démultiplie dans de grandes œuvres canoniques, cherchant à interroger le beau, à remettre en question ce qui est considéré comme chef-d’œuvre. «Je veux désacraliser ces œuvres, dit-il, car je ne supporte pas qu’elles soient intouchables.
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C’est normal que ces œuvres belles et gigantesques nous laissent bouche bée, mais je pense qu’il faut aussi, pour se sentir proche d’elles, être libre de se les approprier. C’est aussi une manière de leur rendre hommage. Il n’y a pas que l’observation attendrie et sage des tableaux qui peut les faire vivre en nous. Loin de là.» Pendant trois jours, sur la Place des festivals, il va donc faire prendre la pose à ses multiples personnages, laissant le public et les passants observer tout le processus de reconstitution, de l’étape de la plantation du décor jusqu’aux prises de vue et au montage de l’image finale sur Photoshop. Une performance qu’il tente pour la première fois en plein air, s’offrant à tous les regards. «Je veux montrer, dit-il, que créer, ça n’a rien de glamour. Que l’artiste n’est pas sacré. On va me voir me couper la barbe et sans doute m’arracher un peu la peau, on va me voir suer au soleil avec mes costumes, on va me voir devant mon ordi pour de longues heures – ce ne sera pas toujours captivant et on verra que l’art n’est pas glam, mais que c’est l’fun.»
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C’est la première fois qu’il utilise une grande œuvre québécoise comme base à ses savantes transpositions. Ce sera «un hommage au Québec», dit-il. «Ma chasse-galerie, je l’imagine comme le récit de boat people qui font un pacte avec le diable pour venir habiter au Québec. Le bateau atterrit à la Place des festivals avec ses passagers immigrants qui viennent rejoindre au sol un parterre de Québécois. Et ils vont rester, plutôt que de retourner au loin comme les vrais bûcherons de la chasse-galerie. Je souhaite évidemment par ce travail m’inscrire dans un héritage d’arts visuels québécois, continuer par filiation le travail d’artistes d’ici qui ont été là avant moi, honorer le folklore et la légende en m’inscrivant dans ses suites.» Parions qu’on ne pourra plus jamais penser à la chasse-galerie de la même manière. C’est assurément une bonne nouvelle. y 2Fik court la chasse-galerie, les 28, 29 et 30 mai à la Place des festivals, dans le cadre du FTA.
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alexandre tailleFer de la main gauChe
merci isabelle Ce mois-ci, je me suis demandé si j’avais envie d’être chroniqueur. En avril, j’ai accepté de parler du suicide de notre fils à Tout le monde en parle, devant plus d’un million de personnes. Je suis amoché, frappé dans le plus profond de ce que j’ai, envahi par une tempête médiatique qui a entraîné beaucoup d’encouragements, de commentaires positifs, de compréhension, mais aussi beaucoup de haine, de messages violents. J’ai beau dire «ça fait même pas mal», des fois ça fait mal quand même. Mais c’est injuste. L’important, ce ne sont pas les grands titres et les querelles qui font la manchette. Ce sont les petits messages. J’en ai reçu des centaines. Donc ce mois-ci, je ne serai pas chroniqueur. Je serai le correspondant d’Isabelle, qui m’a écrit le lundi 18 avril. Des mots qu’on ne lit pas dans les journaux, mais ce sont eux qui valent le plus cher. Merci Isabelle.
de: isabelle À: alexandre tailleFer sujet: Vous n’êtes Pas resPonsable du suiCide de Votre Fils Bonjour, Votre passage à Tout le monde en parle hier m’a émue, mais surtout interpellée. Votre question «Pourquoi? » m’a semblé un cri du cœur. Je ne sais pas ce qu’a vécu votre fils, mais si cela peut vous aider, je peux vous dire ce qui se passait dans ma tête dans ces moments-là. J’ai commencé ma dépression à peu près au même âge que lui. Je ressentais un mal de vivre incompréhensible. Je broyais du noir, au point de songer à la mort tous les jours, toutes les heures, voire chaque minute. Avant l’époque d’Internet, j’ai lu tous les romans d’horreur disponibles à la bibliothèque. J’ai découvert la mort sous toutes ses coutures, froidement étalée en toutes lettres. J’avais même étudié différentes méthodes, choisissant les plus expéditives. Me réveiller à l’hôpital constituait ma plus grande peur. Je ne voulais surtout pas rater mon coup.
En effet, je refusais de partager mes sentiments. J’avais honte de me sentir ainsi. Après tout, j’avais tout pour me sentir heureuse: une famille aimante, un petit ami, ma propre chambre. Première de classe, je ne fumais pas et ne consommais ni drogue ni alcool. Adolescente parfaite, n’importe quel parent aurait voulu m’avoir comme enfant. Je réussissais tout dans la vie. Demander de l’aide représentait un échec, et ça, c’était inacceptable. On peut dire que ça ne tournait pas rond dans ma tête. Je pleurais tous les jours et m’endormais chaque nuit en espérant ne pas me réveiller le lendemain. Je me sentais tellement mal que la mort me semblait la seule issue. Mes parents étant préoccupés par l’achat d’un commerce, je me disais que de disparaître ne pouvait qu’être une libération pour eux. Pourtant, je les aimais et m’entendais plutôt bien avec eux, comme avec mes frères plus âgés. Je ne vivais de conflits d’aucune sorte. Je n’avais tout simplement aucune raison de me sentir ainsi. Je crois que c’est ce qui m’a sauvée, en fin de compte. Si j’avais vécu la moindre contrariété, je serais passée à l’acte. J’ai eu de la chance. J’avais choisi de ne laisser aucune lettre. Pourtant, j’aime bien prendre la plume, mais dans ce cas-ci, je n’avais rien à mettre sur papier. Aucune cause extérieure ne semblait responsable de ce qui m’arrivait. Quant aux causes intérieures, je ne les comprenais pas moi-même, incapable donc de les exprimer. J’ai vécu ainsi près d’un an, à jouer mon rôle à la perfection. Personne ne s’en est rendu compte. Il ne le fallait surtout pas. Je n’ai jamais consulté, puis j’ai pris conscience que je ne pouvais continuer ainsi. Je ne sais pas ce qui a été l’élément déclencheur. J’ai décidé de m’en tirer toute seule. Ça m’a pris trois ans après cette décision avant de sortir du tunnel. Au début de la vingtaine, je me suis demandé ce qui m’était arrivé. Je suis tombée sur un article qui expliquait que les suicidaires avaient un débalancement chimique au cerveau. Certains ne réagissent à aucun traitement et refusent toute aide.
> Lâ&#x20AC;&#x2122;adolescence reprĂŠsente une pĂŠriode difficile pour plusieurs personnes: changements hormonaux, sociaux. Certains dâ&#x20AC;&#x2122;entre nous semblent moins bien armĂŠs que dâ&#x20AC;&#x2122;autres. Je ne comprenais toujours pas trop ce qui mâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠtait arrivĂŠ, mais ça me rassurait de savoir quâ&#x20AC;&#x2122;il y avait une composante chimique, indĂŠpendante de ma volontĂŠ. Le message que jâ&#x20AC;&#x2122;aimerais vous laisser est que vous nâ&#x20AC;&#x2122;ĂŞtes absolument pas responsable de ce qui est arrivĂŠ. Personne ne lâ&#x20AC;&#x2122;est en fait. Votre fils avait sa personnalitĂŠ propre, mais surtout une vision du monde temporairement dĂŠformĂŠe. Je peux vous assurer que cette vision nous paraĂŽt bien rĂŠelle. Ne revenez pas en arrière sur une hypothĂŠtique chicane ou mĂŠsentente. Le problème est beaucoup plus profond. Si mes parents lâ&#x20AC;&#x2122;avaient appris, je me serais probablement enfuie au plus vite. Je nâ&#x20AC;&#x2122;aurais pas eu le courage de leur faire face. Sâ&#x20AC;&#x2122;il vous en avait voulu, il vous aurait laissĂŠ une lettre pleine de fiel. Il arrive parfois quâ&#x20AC;&#x2122;il nâ&#x20AC;&#x2122;y ait juste pas dâ&#x20AC;&#x2122;explication. Je suis dĂŠsolĂŠe pour votre perte et vous souhaite bon courage. Isabelle
de: alexandre tailleFer Ă&#x20AC;: isabelle sujet: Vous nâ&#x20AC;&#x2122;ĂŞtes Pas resPonsable du suiCide de Votre Fils Bonjour Isabelle, Merci du fond du cĹ&#x201C;ur pour votre tĂŠmoignage très ĂŠmouvant. Il mâ&#x20AC;&#x2122;a fait beaucoup de bien. Ce mal terrible que lâ&#x20AC;&#x2122;on ĂŠvite dâ&#x20AC;&#x2122;aborder est tellement triste. Ce vide se soigne sâ&#x20AC;&#x2122;il est diagnostiquĂŠ. Thomas a comme vous dĂŠcidĂŠ de ne pas nous en parler. Nous nous doutions bien que tout nâ&#x20AC;&#x2122;allait pas, mais jamais au point de choisir le suicide. Tout lui ĂŠtait possible. Il ĂŠtait beau, intelligent, avait de la rĂŠpartie, rĂŞvait de science et dâ&#x20AC;&#x2122;ingĂŠnierie. Jâ&#x20AC;&#x2122;aimerais, si vous le permettez, en retirant toute rĂŠfĂŠrence qui pourrait vous identifier, publierâ&#x20AC;&#x201A;ceâ&#x20AC;&#x201A;tĂŠmoignageâ&#x20AC;&#x201A;important.â&#x20AC;&#x201A;Jâ&#x20AC;&#x2122;ai
tellement reçu de messages de parents qui cherchent aussi Ă comprendre, qui veulent de lâ&#x20AC;&#x2122;aide. Sentez-vous bien Ă lâ&#x20AC;&#x2122;aise bien entendu, quelle quâ&#x20AC;&#x2122;elle soit, je respecterai votre dĂŠcision. Merci, merci, merci
de:Â isabelle Ă&#x20AC;:Â alexandre tailleFer sujet:Â Vous nâ&#x20AC;&#x2122;ĂŞtes Pas resPonsable du suiCide de Votre Fils
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Bonjour Alexandre, Je suis heureuse que mon tĂŠmoignage vous ait fait du bien. Je lâ&#x20AC;&#x2122;espĂŠrais. Comme je vous lâ&#x20AC;&#x2122;ai mentionnĂŠ, jâ&#x20AC;&#x2122;ai vraiment ressenti votre entrevue comme un appel du cĹ&#x201C;ur. Pour une fois, je ne pouvais pas rester muette. Vous pouvez utiliser mon texte si ça peut aider dâ&#x20AC;&#x2122;autres parents. Il y a quelques annĂŠes, il en aurait ĂŠtĂŠ autrement. Je ne sais mĂŞme pas si jâ&#x20AC;&#x2122;aurais rĂŠagi, tant câ&#x20AC;&#x2122;ĂŠtait profondĂŠment enfoui en moi. Pendant près dâ&#x20AC;&#x2122;une dĂŠcennie, mon conjoint mâ&#x20AC;&#x2122;a pressĂŠe dâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠcrire notre histoire (nous avons une façon diffĂŠrente dâ&#x20AC;&#x2122;expĂŠrimenter la vie, si je puis direâ&#x20AC;Ś). Jâ&#x20AC;&#x2122;ai abordĂŠ la rĂŠdaction comme une autobiographie. Jâ&#x20AC;&#x2122;ai bien sĂťr sautĂŠ ce passage, mais jâ&#x20AC;&#x2122;ai rapidement frappĂŠ un mur. Je tournais en rond et finalement, jâ&#x20AC;&#x2122;ai crachĂŠ le morceau en quelques lignes. Subitement, tout coulait de source. Jâ&#x20AC;&#x2122;ai pris conscience Ă quel point cet ĂŠpisode avait façonnĂŠ ma vie dâ&#x20AC;&#x2122;une manière tout Ă fait positive! En effet, la dĂŠmarche utilisĂŠe pour mâ&#x20AC;&#x2122;en sortir a transformĂŠ ma vision du monde et ma façon de lâ&#x20AC;&#x2122;aborder. Ă&#x2030;crire mâ&#x20AC;&#x2122;aura aussi servi de thĂŠrapie. MĂŞme si je pense toujours Ă cette ĂŠpoque avec ĂŠmotion, parce que je me rappelle bien la douleur que je ressentais, maintenant, je perçois cette dĂŠpression de façon plus sereine. Cela mâ&#x20AC;&#x2122;aura bien pris 30 ans, mais au moins me voilĂ prĂŞte pour le partager. Toutes mes pensĂŠes vont vers vous et votre famille. Isabelle
UXH *LOIRUG 0RQWUÂŞDO OHSHJDVH FD
66
QUOI FAIRE
MUSIQUE
photo | Christian Faustus
ISLANDS r i t z p D B – 1 9 m a i
Né des cendres du mythique et regretté groupe montréalais The Unicorns, Islands donne dans le art rock mélodique depuis plus de 10 ans maintenant. Sur scène: deux guitares, une basse, de la batterie, deux violons et un clarinettiste. Une formation indie rock tout sauf banale qui continue d’émerveiller.
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photo | Courtoisie pop montrĂŠal
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LAND OF TALK
DISTORSION
t h ĂŠ ât r e F a i r m o u n t â&#x20AC;&#x201C; 1 1 m a i Â
m ata h a r i l o F t e t e s C o g r i F F e D u  1 2 a u 15 m a i Â
On nâ&#x20AC;&#x2122;entendait plus beaucoup parler de Land of Talk depuis 2011. Puis, en dĂŠcembre dernier, la leader Elizabeth Powell mettait fin au silence radio et annonçait le retour inespĂŠrĂŠ de ce fabuleux groupe indie rock montrĂŠalais, six ans après la parution de Cloak and Cipher, son dernier album. La tout aussi fabuleuse Little Scream sera ĂŠgalement du concert.Â
Câ&#x20AC;&#x2122;est la toute première ĂŠdition de ce festival montrĂŠalais axĂŠ sur les arts psychĂŠdĂŠliques, Ă lâ&#x20AC;&#x2122;image des ÂŤPsych FestÂť prĂŠsentĂŠs un peu partout dans le monde. Mis sur pied façon DIY, Distorsion se veut une vitrine pour des groupes tels que Atsuko Chiba, Pawa Up First, UUBBUURRUU, I.D.A.L.G, Adam Strangler, en plus de proposer des projections et des expositions.Â
FINALE DES FRANCOUVERTES
COURTNEY BARNETT
9 mai - CluB soDa
m ĂŠ t r o p o l i s  â&#x20AC;&#x201C;  2 9 m a i Â
En cette 20e ĂŠdition du concours musical de la relève francophone, Mon Doux Saigneur, Caltâr-Bateau et La Famille Ouellette sont les trois heureux finalistes. Ils sont passĂŠs Ă travers toutes les ĂŠtapes cruciales du concours et tenteront le 9 mai de sĂŠduire le public et le jury afin de remporter la bourse de 10 000$ offerte au gagnant ou encore lâ&#x20AC;&#x2122;un des nombreux prix offerts aux finalistes.
Câ&#x20AC;&#x2122;est la nouvelle reine de lâ&#x20AC;&#x2122;indie rock. DotĂŠe dâ&#x20AC;&#x2122;une solide plume Ă lâ&#x20AC;&#x2122;humour très pince-sans-rire (Nobody Really Cares If You Donâ&#x20AC;&#x2122;t Go to the Party est lâ&#x20AC;&#x2122;un des excellents titres de son premier album), lâ&#x20AC;&#x2122;Australienne de 28 ans est capable dâ&#x20AC;&#x2122;inciter la foule au bodysurfing avec sa bonne dose de rock accrocheur et nonchalant, mais elle est aussi capable dâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠmouvoir.Â
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68 QUOI FAIRE VOIR MTL
VO1 #O4
O5 / 2O16
photo | nguyen
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MUTEK
SOLIDS
Q u a r t i e r D e s s p e C ta C l e s e t maC – Du 1er au 6 juin
r i t z p D B – 14 m a i
La grande messe de musique électronique et de créations audiovisuelles et immersives est de retour pour une 17e édition. Cette année, on promet une plus grande présence de femmes au festival. Parmi celles-ci, notons les DJ et compositrices Sonja Moonear de Genève, Dasha Rush de Russie et Kara-Lis Coverdale de Montréal. Aussi à MUTEK: Barac, Romare et Essaie Pas.
Désormais joint par Guillaume Chiasson de Ponctuation, le trio montréalais Solids continue son ascension sur la scène rock internationale avec Else, un nouvel EP paru le 15 avril dernier. En plein milieu d’une grosse tournée de plus de 40 dates, Solids prendra le temps de s’arrêter au Ritz PDB avec les deux groupes rock américains Stove et Clique.
BLACK LIPS
EAGLES OF DEATH METAL ET DEATH FROM ABOVE 1979
CluB soDa – 7 mai
métropolis – 5 mai
Dans le cadre de la quatrième édition du Festival Anachronik, la renommée bête de scène garage rock américaine Black Lips sera de passage au Club Soda, aux côtés de deux groupes rock montréalais bien en vue: Les Marinellis et The Hazytones. On peut s’attendre à une soirée de décibels plutôt relevée, qui fera danser massivement un parterre survolté.
Pour ce premier arrêt à Montréal depuis les attentats au Bataclan, le groupe garage rock californien Eagles of Death Metal assurera la première partie du duo dance-punk torontois Death from Above 1979. L’événement qui promet déjà d’être mémorable sera rehaussé par la présence du groupe torontois Biblical, qui propose un mélange aussi inventif que déchaîné entre David Axelrod et MC5.
69 QUOI FAIRE VOIR MTL
MYKKI BLANCO
VO1 #O4
O5 / 2O16
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t h ĂŠ ât r e Fa i r m o u n t â&#x20AC;&#x201C; 27 m a i
Chaque passage de Mykki Blanco Ă MontrĂŠal est mĂŠmorable. Sur album ou sur scène, cette figure de proue du queer rap amĂŠricain a de lâ&#x20AC;&#x2122;ĂŠnergie Ă revendre. MalgrĂŠ un engouement stagnant, Blanco continue son chemin et envoie ses charges incisives, pas toujours faciles dâ&#x20AC;&#x2122;approche, Ă tous ceux qui ont envie dâ&#x20AC;&#x2122;entendre un hip-hop diffĂŠrent, loin de toutes balises.
SAM PATCH ritz pDB â&#x20AC;&#x201C; 18 mai
Tim Kingsbury, le bassiste-guitariste dâ&#x20AC;&#x2122;Arcade Fire, se donnera en spectacle avec son projet Sam Patch, dont font ĂŠgalement partie Basia Bulat, Matthew Brown et le batteur Jeremy Gara. Pour lâ&#x20AC;&#x2122;accompagner, le groupe montrĂŠalais Commander Clark viendra offrir les chansons de son EP Assassin of Love, un mĂŠlange de soft et de psych rock paru en juillet 2015.
photo | jaCk mannix
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70 QUOI FAIRE
CINÉMA
VOIR MTL
VO1 #O4
O5 / 2O16
SNOWDEN
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D è s l e 13 m a i
Réalisé par Oliver Stone, Snowden revient sur les révélations faites à propos des programmes de surveillance américains et britanniques par l’informaticien américain, désormais réfugié en Russie, Edward Snowden. Mettant en vedette Joseph GordonLevitt, Shailene Woodley, Tom Wilkinson, Melissa Leo et Nicolas Cage, Snowden promet de faire couler beaucoup d’encre, tout particulièrement chez nos voisins du sud.
DEMAIN D è s l e 27 m a i
Connue comme comédienne mais surtout pour son remarqué long métrage Respire, Mélanie Laurent se lance avec le réalisateur Cyril Dion dans une aventure documentaire dans 10 pays pour comprendre les crises écologiques, économiques et sociales que traverse notre planète, mais surtout pour identifier les solutions qu’inventent chaque jour, partout, des enthousiastes qui veulent changer le monde. Pas une mince tâche.
71 QUOI FAIRE VOIR MTL
VO1 #O4
O5 / 2O16
MOUNTAINS MAY DEPART
GREEN ROOM
D è s l e 27 m a i
Dès le 6 mai
Très attendu auprès des cinéphiles, le nouveau film du réalisateur chinois Jia Zhang-ke, auteur du marquant Touch of Sin présenté à Cannes l’an dernier, oscille «entre une Chine en profonde mutation et l’Australie comme promesse d’une vie meilleure». Le cinéaste y suit le parcours hachuré de Tao, une jeune fille écartelée entre l’amour de deux hommes.
Réalisé par le talentueux Jeremy Saulnier, ce thriller d’épouvante prend place au fin fond de l’Oregon, alors qu’un groupe de punks, The Ain’t Rights, se retrouve piégé par une bande de skinheads violents. Après un désastreux spectacle, le groupe arrive nez à nez avec un cadavre et doit composer avec un patron qui veut éliminer tout témoin.
X-MEN: APOCALYPSE
LA LOI DU MARCHÉ
D è s l e 27 m a i
D è s l e 13 m a i
Épaulé par une brochette d’acteurs de calibre, notamment Michael Fassbender, Jennifer Lawrence et Oscar Isaac, ce nouvel épisode de la série de superhéros X-Men revisite le personnage d’Apocalypse, premier de tous les mutants, qui se réveille dans les années 1980. Après avoir recruté quatre cavaliers, il voit se dresser sur son passage Raven et sa toute nouvelle équipe de mutants.
Primé par le Prix d’interprétation masculine à Cannes 2015 et par le César du meilleur acteur, ce film met de l’avant le talent inestimable de l’acteur Vincent Lindon, dans la peau d’un quinquagénaire qui, après 15 mois de chômage, se retrouve face à un dilemme moral. Réalisé par Stéphane Brizé, La loi du marché est un percutant drame social.
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72 QUOI FAIRE
ARTS DE LA SCÈNE
VOIR MTL
VO1 #O4
O5 / 2O16
LES VOISINS 2
ÉLOGES DE LA FUITE
ANATOMIE D’UN SOUFFLE
D è s l e 20 m a i
D u 16 m a i a u 3 j u i n à l a p e t i t e l i C o r n e
Après un premier volet en 2014, Seth Rogen, Rose Byrne et Zac Efron reprennent du service. Prêts à déménager ensemble en banlieue, Mac et Kelly Radner voient leurs plans chamboulés lorsqu’une bande d’étudiantes néo-féministes prennent la place de l’ancienne fraternité de Teddy. Le couple n’aura ainsi guère d’autre choix que de faire appel à son ancien ennemi.
La compagnie de production théâtrale Qui Va Là présente Éloges de la fuite, une pièce mise en scène par le trio étoile Félix Beaulieu-Duchesneau, Justin Laramée et Philippe Racine. Reprenant la structure de l’œuvre d’Henri Laborit, l’œuvre raconte l’histoire d’un homme seul en forêt qui voit défiler ses amis et amours tentant de le «convaincre de rentrer à la maison».
6 et 7 mai à l a maison symphoniQue (proDuCtion Danse Danse)
Danse Danse et l’Orchestre symphonique de Montréal s’associent pour une soirée inédite célébrant la rencontre de la danse contemporaine et de l’orgue. La chorégraphe Danièle Desnoyers invente plusieurs courtes pièces arrimées aux morceaux du Grand Orgue Pierre-Béique.
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PÔLE SUD D u 10 a u 21 m a i à l ’ e s pa C e l i B r e
Depuis leur spectacle Vrais mondes, dans lequel ils ont inventé une nouvelle forme de théâtre documentaire à partir de confessions audio, Anaïs Barbeau-Lavalette et Émile Proulx-Cloutier s’attardent à raconter doucement quelques vécus extraordinaires. Ils se consacrent cette fois à des personnages rencontrés dans le quartier Centre-Sud: une faune «fascinante aux destins hors du commun».
POÉSIE, SANDWICHS ET AUTRES SOIRS QUI PENCHENT D u 8 a u 15 m a i à l a 5e salle De l a pl aCe Des arts
Voici une nouvelle mouture de ce festin poétique qui célèbre rien de moins que 10 années de représentations! Le banquet de mots de Loui Mauffette, puisant dans les textes de nombreux poètes d’hier et d’aujourd’hui et unissant un groupe d’acteurs engagés et frénétiques, crée chaque année un soulèvement.
PLYBALL
photo | luC seneChal
LES SPECTACLES ANNUELS DE L’ÉCOLE NATIONALE DE CIRQUE
D u 10 a u 14 m a i a u t h é ât r e l a C h a p e l l e
D u 31 m a i a u 2 j u i n à l a t o h u
Gabriel Plante est un auteur dramatique pas comme les autres. Pour ce spectacle qui tente de comprendre le phénomène de l’«institutionnalisation» et qui veut déjouer les règles de la société, il a carrément inventé un sport. Le plyball se joue à deux, avec un filet et une balle, mais aussi avec un arbitre qui, semble-t-il, n’a pas toujours raison.
Les traditionnels spectacles de l’ENC mettent en lumière «la maîtrise, la polyvalence et la créativité» d’une myriade de jeunes artistes de la relève aux multiples talents. Une grande partie des disciplines circassiennes y sont présentées, que ce soit la jonglerie, les sangles aériennes, le trapèze duo, la planche coréenne, le fil de fer ou la roue Cyr.
PHIL ROY EN RODAGE l e s 6, 13 e t 20 m a i a u m e D l e y s i m p l e m a lt
Diplômé de l’École nationale de l’humour en 2011, Phil Roy s’est rapidement taillé une place parmi la relève humoristique québécoise, grâce à son style d’humour mordant, autant destiné au grand public qu’aux fans d’humour un peu plus champ gauche. À plusieurs mois de ses avantpremières du mois de janvier 2017, l’humoriste montréalais présente son premier one-man-show en rodage.
FOCUS AUTOCHTONE AU OFFTA l e s 31 m a i , 1 e r e t 2 j u i n a u m o n u m e n t-n at i o n a l
LES FELUETTES s a l l e W i l F r i D -p e l l e t i e r D e l a p l a C e D e s a r t s 21, 24, 26 e t 28 m a i
Lâ&#x20AC;&#x2122;intensitĂŠ dramatique sera Ă son paroxysme durant cette nouvelle production de lâ&#x20AC;&#x2122;OpĂŠra de MontrĂŠal. En première mondiale, lâ&#x20AC;&#x2122;Ĺ&#x201C;uvre du dramaturge quĂŠbĂŠcois Michel Marc Bouchard et du compositeur australien Kevin March sera mise en scène par Serge Denoncourt et interprĂŠtĂŠe par le baryton Ă&#x2030;tienne Dupuis et le tĂŠnor Jean-Michel Richer. Lâ&#x20AC;&#x2122;un des ĂŠvĂŠnements artistiques de lâ&#x20AC;&#x2122;annĂŠe, sans aucun doute.
photo | Courtoisie maCm
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EDMUND ALLEYN musĂŠe Dâ&#x20AC;&#x2122;art Contemporain De montrĂŠal D u 19 m a i a u 2 5 s e p t e m B r e
Première rĂŠtrospective de lâ&#x20AC;&#x2122;artiste quĂŠbĂŠcois depuis son dĂŠcès en 2004, Dans mon atelier, je suis plusieurs met lâ&#x20AC;&#x2122;accent sur une cinquantaine dâ&#x20AC;&#x2122;Ĺ&#x201C;uvres (autant des peintures que des dessins ou des Ĺ&#x201C;uvres technologiques) crĂŠĂŠes par Edmund Alleyn entre la fin des annĂŠes 1950 et le dĂŠbut du troisième millĂŠnaire. Le MAC retracera les pĂŠriodes charnières de lâ&#x20AC;&#x2122;artiste nĂŠ en 1931.
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ARTS VISUELS
En marge du FTA, son insolent petit-frère, le OFFTA, ouvre cette annĂŠe la porte Ă des artistes autochtones dĂŠsireux de sonder leur identitĂŠ malmenĂŠe et de faire exister une parole autochtone par des moyens performatifs et interdisicplinaires. La sĂŠrie de spectacles chapeautĂŠe par les productions Onishka de lâ&#x20AC;&#x2122;artiste multidisciplinaire Emilie Monnet, dâ&#x20AC;&#x2122;origine anishinabe, convoque les Ĺ&#x201C;uvres de Daina Ashbee, Maria Hupfield, Soleil Launière et les productions Menuentakuan: de nouvelles voix autochtones Ă suivre de près.
74 QUOI FAIRE VOIR MTL
FAIT TOUT MAISON
VO1 #O4
O5 / 2O16
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LE SAINT-SAU PUB GOURMAND à travers sa brigade talentueuse de cuisiniers, et en plus de
CULTIVER SON POTAGER LOCALEMENT, s’approvisionne chez de nombreux producteurs de la région et encourage le talent d’ici à travers ses
200 SPECTACLES MUSICAUX ANNUELS.
Bienvenue Chez Vous!
236, RUE PRINCIPALE, SAINT-SAUVEUR
450-227-0218
< alexanDralevasseur, eau initiale. aCryliQue et Crayon De Couleur sur Bois
ALEXANDRA LEVASSEUR g a l e r i e C .o. a . – D u 2 1 av r i l a u 4 j u i n
Intitulée Casse-tête || Puzzle, la toute nouvelle expo d’Alexandra Levasseur «explore le spectre complexe des émotions humaines, toujours en mouvance». Pour l’illustrer, l’artiste québécoise offre des dessins à «l’apparente vulnérabilité», laissant entrevoir une transformation intime où le spectateur devient le témoin du meilleur et du pire de l’humanité. La nature et l’eau sont au centre de sa démarche.
CHROMATIC h a n g a r 16 – D u 19 a u 2 2 m a i
Happening incontournable, le festival pluridisciplinaire Chromatic poursuit sa mission de créer un pont entre l’industrie, la relève et le public, tout en réaffirmant sa place comme vitrine de l’inventivité montréalaise. Pour cette septième édition, le festival ouvrira ses portes à Toronto, «une ville-invitée effervescente». Entre installation, illustration, photographie, performance et musique, Chromatic pique la curiosité.
ELEGANZA musée mCCorD Du 26 mai au 25 septemBre
Organisée par le Victoria and Albert Museum de Londres, Eleganza met en lumière le travail des designers qui ont marqué la mode italienne, de la Seconde Guerre mondiale à aujourd’hui. On y retrouve notamment les créations de Valentino, Armani, Fendi et Prada, en plus de celles de designers émergents. Extraits de films, magazines et dessins sont aussi au programme.
Leader en postproduction audiovisuelle. En expansion au Technopôle Angus depuis 2002.
LE QUARTIER OÙ TRAVAILLER
«Imaginer, explorer, douter… jusqu’à l’épuisement. Recommencer, passionnément, intensément, jusqu’à devenir réel.»
Téo, le taxi réinventé. Imaginé et créé par des gens d’ici.
Iris Boudreau
teomtl.com