Magazine Voir Québec V02 #07 | Juillet 2017

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QUÉBEC VO2 #O7 | JUILLET 2O17 LES DRONES LA BOLDUC FESTIVAL OFF MATT HOLUBOWSKI ANTHONY ROTH COSTANZO HOMMAGE À PLAMONDON RAP BELGE LE PLACARD CUISINE DE HAUT VOL LA NAISSANCE DE L’ART

MICHEL LOUVAIN Abonnement 12 numéros: 59$ + tx voir.ca/abonnement



Québec, ville d’événements

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V

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O2 O7 QUÉBEC | JUILLET 2017

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«LE LOUVAIN DES ANNÉES 1960 EST LE MÊME QUE CELUI DE MAINTENANT. C’EST CETTE CONSTANCE-LÀ QUI FAIT MA FORCE. J’AURAI TOUJOURS UN VESTON ET JE SERAI TOUJOURS COIFFÉ PAREIL.» Photo | Jocelyn Michel (Consulat) Assistante | Frédérique Duchesne Maquilleuse | Camille Sabbath Stylisme | Amanda Van der Siebes Production | Eliane Sauvé (Consulat)

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SCÈNE

Le placard

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MUSIQUE

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CINÉMA

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GASTRONOMIE

Anthony Roth Costanzo Matt Holubowski Hommage à Plamondon Festival OFF Rap belge

Les drones La Bolduc

Cuisine de haut vol

46 LIVRES

JFK: une histoire sexuelle Au grand soleil cachez vos filles L’ordre du jour

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ARTS VISUELS

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QUOI FAIRE

La naissance de l’art

CHRONIQUES

Simon Jodoin (p6) Mickaël Bergeron (p12) Monique Giroux (p30) Normand Baillargeon (p40) Alexandre Taillefer (p56)


6 CHRONIQUE VOIR QC

VO2 #O7

O7 / 2O17

SIMON JODOIN THÉOLOGIE MÉDIATIQUE

RÊVER LE CANADA On dit que plus on vieillit, plus le temps passe vite. Les heures deviennent des minutes. Les saisons des journées! Vous vous réveillez un bon matin et les enfants sont prêts à vous placer dans un CHSLD. La veille, vous les berciez encore. L’été vient de commencer. Aprèsdemain, ce sera le temps des conserves. À ce rythme, il faut se garder en forme pour avoir de la mémoire. Le souvenir est un sport de combat. Le 31 décembre dernier, on lançait en grande pompe les festivités du 150e de la Confédération canadienne. Mélanie Joly, ministre du Patrimoine, s’emballait sur Twitter, ce lieu virtuel où tout se vit dans l’urgence de l’immédiat. «Prenons le temps de rêver le Canada de demain, de créer des liens forts», écrivait-elle avec enthousiasme. Je dois vous avouer que je ne l’avais pas vu venir, mais lorsque Philippe Couillard a annoncé ce printemps qu’il souhaitait relancer le débat constitutionnel au Canada, je me suis demandé s’il n’avait pas entendu cet appel au rêve. Il m’arrive, comme vous j’imagine, de rêver la nuit, dans mon sommeil, à des trucs impossibles que je ne me risquerais même pas à vous raconter. Je n’ose même pas envisager une psychanalyse, par crainte de découvrir quelque chose de grave sur ma personne. Il y aurait là des désirs enfouis, des idées impensées, des pulsions inavouables. Philippe Couillard, lui, pour le coup, a le rêve modeste. Rien de très exotique. Voyons un peu... Imaginons cette chose incroyable: que le Québec puisse enfin signer la constitution canadienne, au terme de quelques discussions afin d’arriver à une entente avec les autres provinces et le gouvernement fédéral. Allez, bon, vous nous invitez à rêver le Canada de demain tout en créant des liens forts? Voilà une première idée facile qu’on pourrait envisager. Rien de trop fou. Moi, il m’arrive de rêver que je vole. Ici, on parle d’un rêve tout simple qui se résume à faire trois pas en marchant.

Justin Trudeau n’a pas tardé à répondre à notre ambitieux premier ministre provincial. Cessez ces extravagances et calmez votre appétit, le Canada de demain sera celui que nous a légué son père en 1982. Quelques mots ont suffi pour clore le débat: «On n’ouvre pas la constitution.» L’usage du «on» a un certain poids dans ce refus. Comme dans «on ne met pas ses coudes sur la table» ou encore «on n’attire pas les mouches avec du vinaigre». Il s’agit d’une prescription proverbiale, qui transcende les personnes et les époques: ça, on ne fait pas ça. J’entendais ce «on», brandi comme une maxime implacable, et me sont tout de suite revenus en tête les mots de Bourassa en 1990, après la mort de Meech: «Quoi qu’on dise, quoi qu’on fasse, le Québec est, aujourd’hui et pour toujours, une société distincte, libre et capable d’assumer son destin et son développement.» C’est ici ce même «on» qui est en scène… Exactement le même. Ce «on» canadien qui, bien qu’il puisse dire ou faire n’importe quoi, sera toujours devant un problème inéluctable: le Québec lui échappe. En attendant, c’est le statu quo: le Canada demeurera dans son état actuel, tel qu’il est présentement constitué. Or, constatons à tout le moins que le statu quo, c’est l’envers exact du rêve. Le Canada est comme il est, voilà, ça ne changera pas. Mélanie Joly a beau se lancer dans les appels sur Twitter, rien ne sert de rêver. On le savait bien. Qui s’en étonnera? Car le Canada est un pays qui, justement, ne se rêve pas. C’est un mythe. Un récit à l’abri de l’histoire qui scelle, en quelque sorte, le devenir humain. Ouvrir la constitution, ce serait accepter de remettre en question les textes sacrés et démêler toutes leurs contradictions et les malentendus qu’elles supposent. Ce serait comme vouloir modifier la bible pour aller y rajouter tous les arguments permettant de douter de l’existence de Dieu.

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Et ils sont nombreux, ces malentendus. Le premier qui saute aux yeux, c’est bien cette fameuse Confédération dont on fête le 150e anniversaire cette année. Que fautil fêter, au juste, puisque le Canada n’est pas et n’a jamais été une Confédération? Pour répondre à cette question, il faudrait revisiter la vision des pères fondateurs, qui voulaient bien faire un deal entre eux tout en préservant leur autonomie. Mais un pays tel qu’on le célèbre aujourd’hui? Voyons… Un chemin de fer, peutêtre, au mieux, mais pas un pays.

Il est de bon ton de parler de réconciliation avec les peuples autochtones depuis quelques années. Mais à quoi bon si le rêve est scellé à tout jamais et que, de toute manière, «on» n’ouvre pas la constitution. Toutes ces aspirations sont gommées par le mythe canadien: le Canada est comme il est, comme il a toujours été et il en sera ainsi demain et après-demain. De toute évidence, la ministre Joly n’a pas lu le catéchisme en nous invitant à rêver. Une homélie de six mots aura été suffisante pour Justin Trudeau afin de remettre les pendules à l’heure.

Ce faisant, dans cette quête des origines, on découvrirait que ce projet mis en branle en 1867 avait très peu à voir avec le Canada de Trudeau père mis de l’avant en 1982, celui de la charte des droits et du multiculturalisme. Pour s’en convaincre, il suffit de songer à la Loi sur les Indiens et aux politiques qui en découlent qui ont donné lieu à ce qu’on appelle désormais un «génocide culturel». Voilà une appellation très peu multiculturelle et peu empreinte de l’humanisme de la charte des droits. C’était pourtant ça, le Canada.

On le sait, notre jeune premier ministre a d’autres priorités. Si on lui demande, il dira que le seul souhait de nos contemporains, essentiellement les familles de la classe moyenne, c’est d’avoir de bons emplois afin de garantir un bel avenir à nos enfants. Excitant. Célébrons donc le Canada. Ce pays si grand et si moyen à la fois. y sjodoin@voir.ca



SCÈNE 9 VOIR QC

VO2 #O7

LE PLACARD: TRIANGLE D’OR TROIS CAMARADES DE JEU POUR AUTANT DE GÉNÉRATIONS, TROIS ACTEURS D’EXCEPTION QUI BRILLENT PAR LEUR NATUREL ET LEUR INTENSITÉ SANS PAREILS. CET ÉTÉ, LES GRANDS ESPRITS SE RENCONTRENT. MOTS ET PHOTO | CATHERINE GENEST

(DE GAUCHE À DROITE) JACK ROBITAILLE, CHARLES-ÉTIENNE BEAULNE ET HUGUES FRENETTE

La LNH a son match des étoiles, et Québec, son équivalent théâtral. Jamais réunis jusqu’ici, les membres du premier trio de l’équipe locale promettent de briller tout l’été durant dans Le placard. Dans le coin droit, sur la photo: Hugues Frenette. Bouleversant d’agressivité et d’émotions contenues dans À toi, pour toujours, ta Marie-Lou, à fleur de peau dans Dévadé, marquant dans les rôles-titres de Vania et Cyrano… Infiniment vrai, tout en nuances, le comédien est passé maître dans l’art d’afficher furtivement ce qui bout en dedans. La douleur comme l’excès de tendresse, cette espèce de magma intérieur qui rend l’humain si complexe et beau. À côté de lui? Charles-Étienne Beaulne. Le cadet de notre petit groupe, oui, mais pas une recrue pour autant. L’onirique «K» Buster, c’était en 2013, lui a permis d’étaler sa polyvalence. Viendront ensuite Trainspotting, adaptation scénique extrêmement solide, puis son impitoyable performance dans Les marches du pouvoir – cette pièce de Beau Willimon qui est venue remuer le cynisme ambiant en pleines élections américaines. Il est à l’interprétation ce qu’Alexandre Fecteau est à l’écriture: l’un de nos plus beaux espoirs. Jack Robitaille, le troisième mais assurément pas le moindre, n’a plus tellement besoin de présentations. Sa feuille de route déborde. Une force tranquille, un calme qui désarme, une rare générosité pour autrui, sur la scène comme dans la vie. C’est un gentleman, un sage au sourire encore moqueur.

Cette pièce comique, d’abord écrite pour le ciné en 2001, tranche dans leurs curriculum vitae d’éminents tragédiens. Se mettre du Francis Veber en bouche, c’est faire une pause de drame pour plonger dans la rigolade – sans se prendre la tête, précise Hugues. «C’est dur de faire de la comédie quand le texte est pas bon, et ça, ça arrive souvent…» Charles-Étienne le complète. «Et dans ces cas-là, il faut que tu travailles vraiment fort sur le punch, le timing, ces affaires-là. Parce que c’est pas écrit comme ça, parce que la musicalité du texte apporte pas ce genre de rebondissements-là. Mais là, Veber? C’est assez efficace!» C’est un auteur qui a fait ses preuves dans l’Hexagone comme chez nous, un nom synonyme de répliques savoureuses, d’un rythme soutenu. «C’est une mécanique bien huilée», conclut Jack. Le casting est génial: Robitaille incarne Kopel, le patron, Charles-Étienne est Guillaume, même s’il ne ressemble pas du tout à Thierry Lhermitte, et Hugues prête ses traits à Pignon dans le plus grand respect du texte. «Plus tu le fais simplement, plus ça marche. À partir du moment où t’essaies de calquer autre chose, là, ça devient compliqué. Il faut s’en tenir aux répliques et à la situation.»

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O7 / 2O17


ÉVÉNEMENT GRATUIT

la danse s’invite sur les quais et dans les airs ! QUÉBEC / LÉVIS Visitez lesgrandsfeux.com et découvrez les meilleurs points de vue pour vivre l’événement !

Mercredi 2 août DISCO

Mercredi 9 août Traditionnel

Samedi 12 août COUNTRY

Mercredi 16 août Hip-HOP

Samedi 19 août DANSE SOCIALE

MERCredi 23 août LATINO ©Photo : Sébastien Dion


Nouveau spectacle équestre

> Ici, dans le cas qui nous concerne, le personnage phare de l’œuvre de l’écrivain est comptable pour une compagnie de condom. Aussi pathétiquement attachant que dans L’emmerdeur et Le dîner de cons, le pauvre type est une fois de plus barouetté par la vie et soumis à ses limitations intellectuelles, à son estime de soi anémique. «C’est l’fun à jouer. À chaque fois que je me fais dire que je suis insignifiant ou que j’ai pas d’allure, je réponds que je le sais…» Cerise sur le sundae: l’histoire commence avec une tentative de suicide du personnage principal qui se sait condamné au licenciement. Aidé d’un collègue, il s’efforcera de simuler une homosexualité longuement refoulée, à sortir d’un placard où il n’est finalement jamais rentré, pour conserver son emploi au nom du politically correct. Une prémisse qu’Olivier Nicklaus des Inrocks avait, à l’époque, décrite comme improbable,

Dans le grand cirque planétaire, créateurs, artistes, chevaux et animaux rêvent de refaire le monde à la manière d’Ekasringa!

«C’EST L’FUN À JOUER. À CHAQUE FOIS QUE JE ME FAIS DIRE QUE JE SUIS INSIGNI FIANT OU QUE J’AI PAS D’ALLURE, JE RÉPONDS QUE JE LE SAIS…» «déconnecté[e] de la réalité» de la France «républicaine et contemporaine», ce même pays qui a flirté avec Le Pen et manifesté contre le mariage pour tous une décennie, presque deux, après la sortie du film. «C’est curieux, la France, dira Jack. T’as l’impression que les intellectuels sont 10 000 ans en avance sur nous autres, mais il y a une France conservatrice qui ne s’exprime pas beaucoup.» Une masse quasi silencieuse, peu éloquente, certes, mais mise en scène dans ce texte encore follement actuel, québécisé pour l’occasion, qui fait réfléchir aux inégalités ou aux préjugés qui perdurent à l’égard des homosexuels dans certains milieux de travail. y

Prenez le temps d’apprécier le magnifique site du Boisé du quai et de profiter de notre bistro ainsi que de la légère restauration!

Le placard Du 19 juillet au 26 août Théâtre Petit Champlain

PRÉSENTÉ GRÂCE À :


12 CHRONIQUE VOIR QC

VO2 #O7

O7 / 2O17

MICKAËL BERGERON ROULETTE RUSSE

LE POIDS DES MOTS Avant de participer à un panel à Radio-Canada, la recherchiste me demande pourquoi j’écris et m’intéresse à la grossophobie – la peur, le dégoût et le dénigrement envers les personnes obèses. «Parce que je suis contre la discrimination en général», réponds-je. Mais c’est vrai que ce sujet me touche particulièrement, le vivant directement, car étant moi-même obèse. Pendant cette table ronde, on a beaucoup parlé de la tendance de la société à individualiser la responsabilité de l’obésité. Cette image très forte que le surpoids n’est que le fruit de décisions personnelles, d’une innocence, d’un manque de conviction ou de paresse. Comment explique-t-on qu’une personne peut être la seule de sa famille à avoir un surpoids alors qu’elle n’a pas d’habitudes différentes de ses parents, de ses frères et de ses sœurs? Comment expliquer qu’une personne peut être sportive, bien manger, et avoir un surpoids quand même? Comment explique-t-on que certaines personnes mangent du fast-food tous les jours mais demeurent sveltes? Évidemment, il y a de mauvaises habitudes qui encouragent un surpoids, mais c’est rarement aussi simple. Ça ne découle pas toujours de mauvaises habitudes. Et lorsqu’il y a de mauvaises habitudes, celles-ci découlent peut-être d’autres problèmes que la personne n’a pas cherchés. Dans certains cas, c’est une forme d’échappatoire, comme l’alcool ou la drogue peuvent l’être pour d’autres personnes. Une fuite après un traumatisme, une dépression, un choc, un manque d’amour, une détresse, etc. Ridiculiser, rabaisser ou culpabiliser aide rarement la situation. La résilience passe déjà, souvent, dans le simple affrontement des regards, des commentaires et des discriminations systémiques.

Si je vous disais que ça m’a pris des années à réussir à me dévêtir devant une femme, malgré des relations sexuelles? J’ai longtemps été traumatisé, et je le suis encore, par des commentaires reçus depuis mon enfance, par des amis, des connaissances, la famille ou la culture populaire. C’était parfois un ami qui t’a comparé au Bonhomme Michelin. Ce sont des amies lâchant des «ark» en riant de tel ou tel gros. C’est une gang d’inconnus qui rit de toi, bien fort et bien gras, dans un lieu public, devant des amis qui ne savent pas comment réagir. C’est un propriétaire qui se permet de te donner des conseils de mises en forme pendant que tu signes son bail. C’est un employeur enthousiaste au téléphone et dédaigneux en personne. C’est aussi tous ces personnages de gros au cinéma qui sont presque toujours des imbéciles et des rejets. Tous ces commentaires et toutes ces références ont construit une forte image me faisant croire que j’étais un antonyme du mot charme. Je ne sais pas pour vous, mais la première fois qu’une personne m’a regardé et m’a dit que j’étais beau, j’étais trentenaire. Ç’a été une grosse lutte avec moi-même d’accepter ce compliment, tellement il était incongru, et de ne pas avoir l’impression qu’on me niaisait. Encore aujourd’hui, si je me dénude dans l’intimité, ça demeure un défi de le faire publiquement – je ne parle pas nécessairement de nudisme, mais simplement pour aller nager, disons. Même si j’adore nager. Depuis mon enfance, je me suis battu avec plusieurs hontes. Parce que mes parents se chicanaient sur mon surpoids, qu’ils voulaient tant que je me prenne en main, j’ai longtemps cru qu’ils avaient honte de moi. En plus d’avoir honte d’être une source de souffrance, d’inquiétudes et de culpabilité. Comme si j’étais un fardeau.

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Ajoutons toutes les fois où la société te montre que tu n’en es pas un membre à part entière. Parce que le manège ne prend pas du monde de plus de 230 livres, parce que le magasin n’a jamais de morceaux à ta taille, parce que le passage est serré, parce que le médecin soupire en te regardant, comme si ça ne servait à rien de te guérir du truc que tu as et qui n’a aucun rapport avec ton obésité, parce que tout le monde se permet d’analyser tout ce que tu manges, parce que tu as l’impression de vivre dans une jungle où tous les animaux crient: «Hey! Crisse! T’es gros, toé!» J’ai longtemps eu de mauvaises habitudes, j’en ai perdu, j’en ai retrouvé, c’est une valse. Je sais aussi que mon surpoids n’est pas qu’une question de mauvaises habitudes. Et même si ce l’était, je vous félicite d’avoir, vous, de mauvaises habitudes qui ne se voient pas. C’est ben d’adon.

«JE NE SAIS PAS POUR VOUS, MAIS LA PREMIÈRE FOIS QU’UNE PERSONNE M’A REGARDÉ ET M’A DIT QUE J’ÉTAIS BEAU, J’ÉTAIS TRENTENAIRE.» Vous n’avez pas idée de la profondeur de mes cicatrices. Et je vous remercie de ne pas essayer d’en renier leur existence. J’ai longtemps rêvé non pas d’être mince, mais d’être aimé et accepté, simplement. Pendant la majorité de ma vie, j’ai cru n’avoir aucune valeur, être une sorte de monstre qu’on tolère parce que gentil malgré tout. Une sorte de Quasimodo. Ne cherchez pas une pitié ici, je sais que je pourrais trouver des vécus à la fois plus durs et plus moelleux que le mien. Je crois simplement que mon exemple peut aider à comprendre l’impact d’une ridiculisation acceptée socialement, lorsqu’une catégorie de personnes est ostracisée. Ici, c’est envers un corps atypique et l’obésité. Mais les résultats ne sont pas très différents du racisme, du sexisme, de l’homophobie et beaucoup trop d’autres discriminations socialement acceptées, voire encouragées. y

GEL TO



MUSIQUE 15 VOIR QC

VO2 #O7

UN CHANTEUR POPULAIRE PORTÉ PAR L’AMOUR INDÉFECTIBLE DE SES FANS, MICHEL LOUVAIN CARBURE À LA RECONNAISSANCE. SOIXANTE ANS APRÈS SES DÉBUTS DANS LES CABARETS, LE CHANTEUR DE CES DAMES SE CONSIDÈRE COMME PRIVILÉGIÉ D’ÊTRE «ENCORE LÀ». MOTS | OLIVIER BOISVERT-MAGNEN

PHOTO | JOCELYN MICHEL (CONSULAT)

La célébration sera grande le 12 juillet 2017. Le même jour que son 80e anniversaire de naissance, Michel Louvain chantera au Festival d’été de Québec sur la place D’Youville, à quelques pas d’un lieu fort en émotions et en souvenirs: le Palais Montcalm.

soir, le vendredi et le samedi. Vu que je fumais pas et buvais pas, j’étais en mesure de vivre avec 10 piasses par semaine et de donner mon 45 piasses d’étalagiste à ma mère. J’étais heureux, je demandais pas plus que ça.»

«Québec, c’est mon château fort» dit-il, visiblement excité. «Durant la conférence de presse [du FEQ], j’étais assis à côté des Cowboys fringants, qui racontaient ce qui allait se passer durant leur show: des projections énormes, des feux d’artifice projetés sur l’écran… Moi, j’ai dit que, pour mon show, il n’y aurait pas de flafla, mais que mon fond d’écran serait le Palais Montcalm, là où j’ai connu ma première grosse émeute de fans en 1959. Cette même émeute où j’ai dû sortir par le toit en échelle de pompier avant d’être ramené à mon hôtel. Les Cowboys m’ont regardé: “Hein! Ça t’est arrivé, ça?”»

Repéré grâce à son énergie et son charisme, Louvain déménage à Sherbrooke en 1957, à l’âge de 20 ans. «Je chantais avec un trio tous les soirs de la semaine à l’Hôtel Union. Là, j’étais dans mon élément! Après quelques soirs, j’ai remarqué que les gens ne dansaient plus. J’étais un peu inquiet jusqu’à tant qu’on me dise que les gens préféraient me regarder, comme si je leur donnais un spectacle! J’étais fier, mais en même temps, j’étais pas plus heureux que ça là-bas. Maintenant que j’avais quitté la maison, j’avais d’autres idées en tête. J’ai donné ma démission après trois mois et je suis allé rejoindre mon frère à Montréal.»

Si ce genre d’engouement exalté et frénétique paraît effectivement extraordinaire aujourd’hui, il a forgé le mythe de cette époque phare, qu’a d’abord symbolisé la Elvis Mania au milieu des années 1950. À ce moment, le jeune Thetfordois était toutefois loin de se douter qu’il connaîtrait lui aussi une popularité déferlante. Étalagiste avec son père le jour, il suit son grand frère, le chanteur André Roc, dans les cabarets le soir. «J’avais pas le droit de rentrer, donc j’me cachais dans un coin pour le regarder travailler. Un jour, il a accepté un contrat à Montréal, et j’ai pris sa relève. J’avais 18 ans», raconte celui qui a troqué son vrai nom, Michel Poulin, contre Mike Mitchell, Mike Poulin et Michel Paulin avant d’adopter Michel Louvain. «Le band me donnait 5 piasses par

Après avoir remporté un concours amateur au cabaret El Mocambo, où son frère se produit, il saisit la chance de devenir maître de cérémonie dans un hôtel de L’Abord-à-Plouffe, ancien village québécois qui fait maintenant partie de Laval. «Le même soir, je pouvais présenter Fernand Gignac suivi d’un numéro d’acrobates ou de chiens qui sautent dans un cerceau…» énumère-t-il, avec le sourire. «Je passais un peu inaperçu, mais ça n’a pas empêché le directeur des disques Apex, Yvan Dufresne, de me remarquer. Il m’a vu chanter un soir à l’hôtel et m’a demandé si j’voulais faire un disque. J’avais 20 ans, c’est sûr que j’allais dire oui!»

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16 MUSIQUE VOIR QC

VO2 #O7

O7 / 2O17

Buenas noches mi amor paraît la même année. Sans être un succès instantané, le 45 tours permet à Louvain d’attirer l’attention de l’animateur radio St-Georges Côté, qui le propose comme artiste invité pour le populaire Gala des Splendeurs. Retransmis sur les ondes de la télé de RadioCanada, l’événement a lieu le 3 mai 1958 au Colisée de Québec. «C’est là que j’ai connu mon heure de gloire!» s’exclame-t-il. «Tout ce dont j’me souviens, c’est Jean Coutu qui me donne une tape dans le dos avant que j’entre sur scène en me disant: “Enweille, p’tit gars, va les chercher!”» La prestation terminée, Louvain monte dans un taxi sans se douter que sa carrière vient de prendre son envol. Ensevelie d’appels pendant plus de deux semaines, l’équipe de Radio-Canada recontacte la jeune vedette. «On m’a demandé de venir m’installer à Montréal, car tout le monde voulait revoir “le petit gars” qui a chanté! Ma carrière venait vraiment de partir en flèche», raconte-t-il. «Faut dire que le timing était parfait: Presley était au sommet, et les jeunes filles d’ici se cherchaient une idole. Quand elles ont vu ce gars-là de 20 ans arriver avec son nœud noir, sa chemise blanche pis ses cheveux bien peignés avec du Brylcreem bien huilé, ç’a provoqué quelque chose…» «Encore aujourd’hui, je me demande “pourquoi moi?”», poursuit-il, avant de prendre une pause pour y réfléchir. «Je dois être né sous une bonne étoile.» Apogée, déclin et résurgence À son apogée au tournant des années 1960, la «Louvain Mania» précède la venue d’une toute nouvelle scène pop, que représentent à divers niveaux Pierre Lalonde, Tony Massarelli, Tony Roman, Donald Lautrec, Michèle Richard et autres groupes yéyé emblématiques comme César et les Romains, Les Sultans et Les Classels. Grâce à des émissions de télé comme Music-Hall et Jeunesse d’aujourd’hui, certains de ces artistes obtiennent un rayonnement beaucoup plus large, qui leur permet de se faire reconnaître au-delà des cabarets. «Cette période-là, ce sont des souvenirs extraordinaires», relate Michel Louvain. «On était souvent amenés à collaborer sur les mêmes scènes, les mêmes émissions. Ça pouvait m’arriver d’embarquer avec mes chansons d’amour juste après un groupe qui bouge pas mal comme César et les Romains.» Unie malgré ses différences, cette scène perd quelque peu de son lustre à la fin de la décennie 1960, au même moment où Louvain traverse des moments plus difficiles, notamment en raison de la fin de son contrat avec Apex. «On peut parler d’une période

creuse», admet-il. «Je suis pas resté assis dans mon appartement à compter les jours, je faisais des spectacles pareil, mais j’avais pas de chanson à la radio ni de disque hot sur le marché.» Plus largement, l’industrie change de façon assez radicale: l’époque faste des cabarets tire à sa fin, et différents espaces de diffusion ouvrent leurs portes et prennent du galon. «Le show-business changeait carrément. La mode était aux belles salles culturelles comme la Place des Arts», se souvient le Thetfordois. «Ensuite, quand la télévision a arrêté les variétés, le public a changé.»

«JE VAIS PAS PARLER AU NOM DE TOUS LES CHANTEURS, MAIS J’AI L’IMPRESSION QU’EN GÉNÉRAL, ON N’EST PAS TROP BONS POUR SAVOIR QU’ON A UN HIT ENTRE LES MAINS.» Au début des années 1970, le Québec vibre au rythme d’une nouvelle génération d’auteurscompositeurs-interprètes comme Beau Dommage, Harmonium, Robert Charlebois et Louise Forestier. Loin de se douter qu’il est sur le point de connaître son plus grand succès, Michel Louvain accepte avec plusieurs réticences une idée du producteur Pierre Boudreau: «Il vient me voir et me dit qu’il a un tango à me proposer. Je lui ai répondu que j’allais certainement pas chanter ça.» Le «tango» en question est une reprise du chanteur irlandais Joe Dolan, Lady in Blue. «Je l’ai quand même enregistrée, sans penser que ça serait le tube de ma carrière. Je vais pas parler au nom de tous les chanteurs, mais j’ai l’impression qu’en général, on n’est pas trop bons pour savoir qu’on a un hit entre les mains. C’est plus ton producteur et ton entourage qui vont être capables de te dire ça. Moi, j’ai toujours été un peu trop naïf.»


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> Paru en 1977, l’album La dame en bleu propulse Louvain au sommet des palmarès. La décennie 1980 s’amorce donc du bon pied pour le chanteur, qui propose plusieurs séries de spectacles très populaires, notamment celui des 3 L avec ses acolytes Donald Lautrec et Pierre Lalonde. Diversifiant ses activités, l’artiste accepte de se joindre au réseau Télé-Métropole à titre d’animateur de l’émission De bonne humeur pendant cinq saisons. Bien malgré lui, il devient la victime de railleries de plusieurs humoristes (notamment Rock et Belles Oreilles et les Bleu Poudre) qui le dépeignent comme un symbole d’une certaine culture kitsch. «Moi, je les regardais pas à la télévision, ces humoristes-là. C’est mon public qui venait m’en parler en me disant qu’ils étaient vraiment méchants», dit-il, en prenant bien soin de ne pas préciser de qui il parle. «Ça me faisait de la peine, je dormais mal, mais je fonçais la tête haute. Maintenant, ces mêmes gens-là, ils viennent me parler et m’invitent à participer à leur show. Ils ont essayé de me démolir, mais ça n’a pas marché. Je ne garde pas de rancune envers eux, mais quand ils viennent me donner la main, je sais très bien à qui j’ai affaire.» Accumulant les albums compilation et les tournées durant les décennies 1990 et 2000, le chanteur obtient depuis peu une reconnaissance à la hauteur de sa carrière d’exception. Nommé Chevalier de l’Ordre national du Québec en 2010 puis décoré de l’Ordre du Canada en 2015, il a finalement obtenu le convoité Félix hommage au Gala de l’ADISQ 2014. Se disant toujours aussi redevable à son fidèle public pour tout ce qui lui arrive, Louvain attribue son succès sur six décennies à son authenticité, au fait qu’il n’a jamais changé ou forcé son image. «Le Louvain des années 1960 est le même que celui de maintenant. C’est cette constance-là qui fait ma force. On me verra jamais sur scène en jeans, j’aurai toujours un veston et je serai toujours coiffé pareil. Une fois, j’ai essayé de me faire un afro à la Charlebois, et ç’a pas duré trois jours! Dans la rue, j’me suis fait dire: “Vous allez nous enlever ça, monsieur Louvain, c’est pas vous ça!” Je suis retourné direct chez mon coiffeur pour lui demander de me défriser.» C’est donc avec le veston et le pantalon bien repassés que le chanteur de 79 ans soulignera son passage dans la prochaine décennie. Symboliquement chargé, ce spectacle extérieur à la Place D’Youville vient avec son lot de nervosité. «Je vais avoir le trac, plus que d’habitude. Ça représente tellement de souvenirs pour moi…» renchérit-il. «Je souhaite seulement qu’il fasse beau.» y 60 ans de bonheur avec vous

Québec: 12 juillet Scène Hydro-Québec, Place D’Youville (Dans le cadre du Festival d’été de Québec)

Montréal: 25 novembre Salle Wilfrid-Pelletier, Place des Arts



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FONTAINE DE JOUVENCE SI ON ADAPTAIT PETER PAN À LA SAUCE LYRIQUE, C’EST FORCÉMENT À ANTHONY ROTH COSTANZO QUE L’ON CONFIERAIT LE PERSONNAGE-TITRE. UN CHANTEUR SANS ÂGE, PASSÉ DE PRODIGIEUX ENFANT STAR À SOLISTE AU MET, CAPABLE DE REPRENDRE LES AIRS ÉCRITS POUR LES CASTRATS D’AUTREFOIS. MOTS | CATHERINE GENEST

PHOTO | STEVEN LAXTON

Sa voix, que même la mue n’a pu lui voler, saisit par sa clarté et sa hauteur céleste. Un instrument que le trentenaire s’est efforcé de conserver intact, comme pour honorer sa carrière précoce. Anthony Roth Costanzo est de ceux qui ont commencé tôt, à 8 ans en fait, de ces rares qui ont chanté sur Broadway avant d’atteindre la Middle School de ses États-Unis d’origine, des infimes chanceux qui se sont vus offrir un premier rôle à l’opéra pendant leur adolescence. «Quand j’ai eu 13 ans, quelqu’un m’a demandé de faire The Turn of the Screw de Benjamin Britten à l’Opera Festival of New Jersey… Je l’ai fait à titre de boy soprano, mais mes collègues, les autres chanteurs, m’ont dit: “Peut-être que ta voix a changé. C’est possible que tu sois contreténor, que tu aies déjà traversé la puberté et que tu chantes juste en falsetto”. En gros, c’est pas mal ce qu’on fait comme contre-ténor. On chante avec notre voix de tête! À partir de ce moment, j’ai décidé d’emprunter cette voie-là et je n’ai jamais regardé en arrière.»

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> Ça semble facile, quand on l’entend, le voit dans les captations d’Akhnaten de Philip Glass, dans ce numéro périlleux avec pirouettes et claquettes autour d’I Got Rythmn de Gershwin. Une détente qui cache en fait un dévouement entier à son art, une discipline presque olympique. D’aujourd’hui et d’hier Anthony Roth Costanzo est un contorsionniste. «Comme contre-ténor, on est coincé entre ce qui a été fait avant les années 1700 et ce qui a été composé après 1950. Donc, dans ma carrière, j’ai un répertoire à moitié baroque, à moitié contemporain.» Une flexibilité certes forcée, mais une soif sincère de nouveauté, qui pousse les virtuoses des Violons du Roy (ensemble qu’il a «toujours admiré»)

c’est presque méditatif. Haendel en est aussi capable, c’est une sensation similaire, ça te coupe presque le souffle quand c’est bien fait. C’est presque magique, comme si on te jetait un sort.» De passage au Festival d’opéra de Québec, le musicien étrennera également sa version de Liquid Days – un poème de David Byrne enrobé dans les notes de Glass. Un réarrangement spécialement créé pour sa voix si singulière, une relecture toute neuve cautionnée par la légende vivante qui l’a composée. Naturellement, le programme d’un vocaliste de sa trempe ne serait évidemment pas complet sans un segment dédié à Haendel. Friand des raretés, de pièces rarement jouées, le New-Yorkais cultive un goût pour l’oublié et les arias obscures comme Stille amare et Rompo i lacci, pièces qui lui ont permis de

«COMME CONTRE-TÉNOR, ON EST COINCÉ ENTRE CE QUI A ÉTÉ FAIT AVANT LES ANNÉES 1700 ET CE QUI A ÉTÉ COM POSÉ APRÈS 1950. DONC, J’AI UN RÉPERTOIRE À MOITIÉ BAROQUE, À MOITIÉ CONTEMPORAIN.» à se faire aller l’archet hors de leur zone de confort. En acceptant l’invitation de la star infiniment humble, Jonathan Cohen consent à entre dans l’univers bigarré d'un artiste bien de son temps. Choisi par l’English National Theatre de Londres pour camper Akhnaten l’an dernier, le chanteur est devenu quasi indissociable du pharaon androgyne et, ce faisant, d’une portion de l’œuvre de Philip Glass. «Je m’intéresse à son travail depuis que j’ai vu Einstein on the Beach, sa création phare, quand j’étais jeune. C’est avec Akhnaten, spectacle avec lequel j’ai connu beaucoup de succès, qui, je crois, est un chef-d’œuvre, que j’ai commencé à réaliser que le minimalisme de Philip Glass et son approche moderne à la composition de musique tonale peuvent avoir le même effet qu’Haendel. […] Pour moi, il y a comme une suspension, comme si, soudainement, le temps s’arrêtait. Philip Glass peut faire ça,

remporter le Metropolitan National Council Audition en 2009. Il offrira aussi Pena tiranna et Viva tiranno, toujours du grand maître allemand, des airs peu connus qui ont toutefois marqué son parcours «sur le plan artistique, oui, mais aussi humain». Les époques s’entrechoquent sur les cordes vocales d’Anthony Roth Costanzo. Un mariage entre les styles, les castrats d’Haendel et la coolitude intemporelle de David Byrne des Talking Heads, deux solitudes qui ont plus en commun qu’on ne pourrait le croire. «C’est important de se rappeler que la musique de la période baroque que je chante était, autrefois, chantée par des castrats, les rock stars de l’opéra.» y Le 5 août Au Palais Montcalm Dans le cadre du Festival d’opéra de Québec


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MATT HOLUBOWSKI POURSUIT SON VOYAGE LE QUÉBÉCOIS MATT HOLUBOWSKI A ACQUIS UNE SOLIDE EXPÉRIENCE DE SCÈNE DEPUIS LA SORTIE DE SON ALBUM SOLITUDES. IL VIENT PRÉSENTER AU FESTIVAL D’ÉTÉ DE QUÉBEC UN SHOW BIEN RODÉ AVEC DES MUSICIENS DE CONFIANCE. MOTS | VALÉRIE THÉRIEN

PHOTO | LEPETITRUSSE


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n le savait grand voyageur. Les histoires de Solitudes, son deuxième album sorti en 2016, avaient été grandement inspirées de ses explorations un peu partout dans le monde. Depuis que le succès lui sourit, Matt Holubowski n’a pas eu beaucoup de temps pour partir à l’aventure, car le public québécois en redemande, mais il compte bien voir du pays cet été. «J’ai des shows ici et là dans les prochaines semaines, donc je ne peux pas prendre de longues vacances, mais je me suis équipé en camping pour faire des roadtrips au Québec et au Canada, mentionne le chanteur en entrevue. Sinon, j’ai bloqué les mois de décembre et janvier dans mon calendrier et c’est à ce moment-là que je vais pouvoir faire le vagabond à nouveau!»

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Ses arrêts dans de gros événements, au Festival international de jazz de Montréal puis au Festival d’été de Québec, seront-ils complémentés de surprises ou d’invités? «Oui! Je ne peux pas trop en dire, mais ce sera une version embellie de ce qu’on fait en tournée présentement. Mes musiciens et moi rodons le show depuis plusieurs mois, donc on ne voulait pas chambouler la recette qui fonctionne, mais j’ai plein de petites surprises côté visuel et côté chansons sur certains arrangements. On interprétera aussi des chansons que j’ai jamais jouées en concert. Pour le FEQ, nous ne sommes pas en tête d’affiche, donc c’est à échelle réduite, mais c’est dans la même veine.» Le chanteur originaire de Hudson en Montérégie indique que la confiance règne au sein du groupe qu’il forme avec Stéphane Bergeron (batterie), Marianne Houle (violoncelle), Simon Angell (guitare) et Marc-André Landry (basse). Ils se sont connus en studio, lors de l’enregistrement de Solitudes, et ne se sont pas lâchés depuis, multipliant les dates de tournées et favorisant la camaraderie. «Le show a vraiment évolué, il s’est intensifié, indique le principal intéressé. L’album a été écrit et arrangé de façon assez rapide et c’étaient de nouvelles collaborations avec ces musiciens, mais là, après une soixantaine de shows ensemble, c’est sûr qu’il y a une symbiose qui s’est installée. On se connaît mieux personnellement et musicalement, et ça nous permet d’explorer plein de nouvelles choses dans les chansons. On a atteint ensemble une espèce de confort dans ce show.» Matt Holubowski a aussi évolué personnellement dans tout ça puisqu’il se dit désormais plus à l’aise dans son rôle de leader de groupe. «J’ai eu plus d’expériences en tant qu’auteur-compositeurinterprète solo en formule guitare-voix. Être dans un band dans les deux dernières années, c’était

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nouveau. Ç’a pris une période d’adaptation pour me rendre à un point où j’étais à l’aise. On a appris comment communiquer ensemble, et ça, c’est la partie la plus difficile.» Dans la semaine où Matt a discuté avec nous, il revenait d’un camp d’écriture à Paris pour sa maison d’édition. Il s’agissait d’un court retour aux sources, si on veut, puisque «c’était la première fois que je voyageais un peu pour m’inspirer», ditil. Est-ce qu’il y aurait déjà les balbutiements d’un prochain album? «Possiblement. Je contemple déjà un prochain projet. Je ne suis pas sûr encore si ce sera un EP ou un LP. Ça reste à voir. Et je suis encore en train de philosopher à savoir si je devrais rester dans le bilinguisme ou garder les projets séparés.» Ayant grandi dans un foyer bilingue, Matt Holubowski

«J’AI TOUJOURS VU MES DISQUES COMME UNE RÉPONSE À TOUTES LES QUESTIONS EXISTENTIELLES QUE J’AI EN TÊTE DANS LE MOMENT.» avait évoqué la question de la dualité des langues sur Solitudes, album sur lequel il chante une majorité de titres en anglais, mais aussi deux très belles pièces en français. La question de la langue doitelle être creusée à nouveau sur un prochain album? «J’ai toujours vu mes disques comme une réponse à toutes les questions existentielles que j’ai en tête dans le moment. Avec le premier album (Ogen, old man, sorti un an avant son passage remarqué à La Voix), j’ai réussi à y répondre, mais avec Solitudes, y a pas encore de réponse à cette dualité de langues. Plus j’y réfléchis, plus ça devient complexe, surtout considérant ma position actuelle, complètement immergée dans l’univers francophone musical. Ça reste toujours intéressant, cette dynamique-là.» À suivre pour la suite du voyage. y Le 12 juillet Au Parc de la Francophonie Dans le cadre du Festival d’été de Québec

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LES INCONTOURNABLES LE FESTIVAL OFF DE QUÉBEC, CETTE CÉLÉBRATION DE L’ÉMERGENCE QUI PREND CHAQUE ANNÉE D’ASSAUT LE COMPLEXE MÉDUSE ET QUELQUES SCÈNES DE LA HAUTE-VILLE, CÉLÉBRERA CET ÉTÉ SON 14e ANNIVERSAIRE. RAPIDE SURVOL DES PERFORMANCES À NE PAS MANQUER LORS DE CETTE ÉDITION. MOTS | ANTOINE BORDELEAU

PHOTO | SATY PRATHA


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FET.NAT FET.NAT est sans contredit ce que l’on pourrait appeler un ovni musical complet. Impossible à classer simplement, le quatuor de Hull s’aventure dans une fresque musicale passant du free jazz au art punk sans crier gare. Avec son plus récent EP Gaoler, la formation pousse encore plus loin ses explorations hétéroclites dans un 10 minutes d’une rare densité. En concert, FET.NAT est à tout casser et saura certainement captiver l’auditoire et l’emporter dans son univers tout à fait unique. Poirier Migration Soundsystem La réputation du producteur montréalais Poirier n’est plus à faire. Avec 10 albums lancés sur des labels aussi importants que Nice Up! Records et Ninja Tune, le musicien a toujours maintenu un son unique, fortement reconnaissable et teinté de couleurs tropicales. Avec son Migration Soundsystem, il ajoute deux chanteurs et deux danseuses à sa performance live, donnant une dimension d’autant plus festive à sa musique qui vogue du dancehall au dub en passant par le house et le reggae. Pour tout amoureux de la musique qui fusionne les cultures et les influences, c’est à ne pas manquer.

VULVETS, PHOTO | MATT SMILENOT

Hologramme

Vulvets

Pour les amateurs de synthétiseurs et de rythmes entraînants, la bande d’Hologramme saura certainement vous satisfaire. Avec un album homonyme paru en 2015, le quatuor électro-rock s’est taillé une place d’importance dans la scène électronique montréalaise et un peu partout au Québec. On a notamment pu entendre leur musique lors du grand spectacle d’illumination du pont Jacques-Cartier aux côtés de grands noms comme Kid Koala. Au volant de leurs (très) nombreux claviers, les quatre musiciens vous feront assurément taper du pied et bouger le corps.

Comme tout droit venues de l’époque yé-yé, les filles de Vulvets transportent l’auditoire dans un autre temps. Guitares noyées dans le reverb, harmonies vocales et rythmes surf-rock prédominants se mélangent pour former un tout homogène et extrêmement entraînant. Pétillantes et résolument sympathiques, elles occupent la scène de leur bonne humeur communicative et fendent inévitablement le sourire dans tous les visages de l’assistance. Une mention spéciale revient à la batteuse Marie-Ève Bouchard qui, le temps d’une chanson, arrache tout en hurlant de sa voix puissante. On en redemande! Yonatan Gat

POIRIER

HOLOGRAMME, PHOTO | NEIL MOTA

On a pu le voir il y a deux ans dans le même festival, et on peut dire que Yonatan Gat a marqué la mémoire de tous ceux qui y étaient. Ce véritable virtuose de la six cordes revient pour cette édition avec un nouveau projet préparé sur mesure pour l’événement. Accompagné de Greg Saunier (Deerhoof) à la batterie, il livrera une version revisitée du grand Quatuor Américain de Dvořák dans une performance qui sera, on peut le prévoir sans risque de se tromper, absolument mémorable. D’une musicalité inventive au possible, Gat sort toujours des sentiers battus et s’illustre comme l’un des artistes de notre époque dont on parlera encore longtemps après la fin de sa carrière. y

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LA CLASSE BELGE AFFRANCHI DES CODES ET DE L’HISTOIRE QUI PÈSENT SUR SON PENDANT FRANÇAIS, LE MOUVEMENT RAP BELGE SE DÉVELOPPE EN TOUTE LIBERTÉ, POUSSÉ PAR UN ÉLAN DE SOLIDARITÉ QUI N’EST PAS SANS RAPPELER CELUI QUI A CONDUIT À L’ÉMERGENCE D’UNE SCÈNE RAP ACTUALISÉE AU QUÉBEC. DE PASSAGE DANS LA MÉTROPOLE À LA MI-JUIN DERNIÈRE POUR QUELQUES DATES DE SPECTACLE, JEANJASS, CABALLERO, ROMÉO ELVIS, LE MOTEL AINSI QUE SWING, LOXLEY ET PRIMERO DE L’OR DU COMMUN ONT PRIS PLACE À NOS CÔTÉS AFIN DE DISCUTER DE CETTE DITE EFFERVESCENCE. MOTS | OLIVIER BOISVERT-MAGNEN

PHOTO | ANTOINE BORDELEAU


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J

eudi midi, au lendemain d’une soirée qui semble s’être terminée particulièrement tard, les sept camarades reprennent tranquillement leurs esprits, alors que s’engloutissent les cafés, les pains au chocolat et les tranches de melon d’eau. En plein cœur d’un séjour dans la métropole pour une série de spectacles dans le cadre de Mural et/ou des FrancoFolies, les Belges apparaissent décontractés. «C’est comme la classe verte», envoie Primero. «Ouais, c’est des bonnes vacances», acquiesce JeanJass. Si elle semble plus ou moins naturelle en ce réveil «hâtif», visiblement forcé par notre présence, la chimie qui opère entre les sept artistes est bel et bien tangible, en partie représentative de ce qui l’anime à Bruxelles. «Y a moins de compétition chez nous que dans le rap français. En tout cas, c’est ce que les Français nous disent», explique Loxley. «C’est un plus petit milieu, donc tout le monde se côtoie plus ou moins.» «Les gens respectent le travail des autres. C’est un détail important de ce qui a mené à tout ça», poursuit Caballero, en parlant largement de cette ébullition musicale. «Mais je crois qu’au-delà de cette solidarité, c’est surtout les réseaux sociaux qui ont joué un rôle primordial.» «Ça et l’accumulation de bonnes sorties», ajoute Roméo Elvis, qui aura 18 ans cet été. «Quand tu rassembles autant de bons projets en si peu de temps, ça crée forcément une effervescence, car il y a toujours de l’actualité.» Depuis le printemps 2015, les sorties importantes se sont succédé chez les Belges: H24 de Hamza, L’Odyssée et Zeppelin de L’Or du commun, les binômes Double Hélice de Caballero & JeanJass et Morale de Roméo Elvis X Le Motel, les deux percutants premiers albums de Damso… Tout ça sans compter les percées spectaculaires de Shay et Isha ainsi que le retour de La Smala. À défaut d’avoir un son précis, le vaste cortège belge a une façon de voir et d’approcher le rap d’une façon décomplexée. «On n’a pas de comptes à rendre à nos ancêtres, car il n’y a pas de présence institutionnelle aussi forte qu’en France», expose Roméo Elvis, alors que résonnent au loin les noms des vétérans bruxellois Benny B et Starflam. «Ça donne un rap plus libre.» Cette liberté artistique permet de varier les tons, les styles. Alternant comme ils l’entendent entre formules trap actuelles et composantes boom bap typiques des années 1990, ces artistes aiment l’autonomie que leur apporte cette hybridité des genres. «C’est pas quelque chose qu’on calcule. Même si on fait plein de trucs différents, il y a cette essence qui reste, car on vient de là», explique Caballero.

(DE GAUCHE À DROITE) CABALLERO, PRIMERO, ROMÉO ELVIS, JEANJASS, LE MOTEL, SWING ET LOXLEY

Plus jeune que ses compères, Roméo Elvis reconnaît également l’influence qu’a eue sur lui la scène rap alternative française de la décennie 2000, représentée par des artistes comme TTC, La Caution et Klub des Loosers: «Ces mecs-là, j’me reconnaissais dans leur musique détachée, éloignée de la culture rap traditionnelle. Venant d’un milieu plus aisé, je ne me suis jamais senti légitime de faire un rap dans les codes classiques.» Accueil chaleureux en France et au Québec Auparavant unidirectionnelle, l’influence entre les scènes française et belge se fait maintenant dans les deux sens. Happés par la sensation Stromae qui, indirectement, a contribué à leur ouverture pour la culture de leurs voisins, les médias français ont rapidement reconnu la légitimité et le talent des rappeurs cousins. «Les Français disent constamment que “l’école belge arrive en force”. On dirait qu’il faut parfois attendre que ce soit eux qui le disent pour gagner en crédibilité», constate Swing. «Certains médias belges ont attendu que la France nous mette de l’avant avant d’en faire de même», ajoute Roméo Elvis. «Ce qui est bien, c’est qu’on a encore cette position de rappeurs un peu exotiques. Ça reste assez neuf ce qui se passe pour l’instant, donc l’accueil est assez fort.» De ce côté-ci de l’Atlantique, la curiosité est également à son comble. Organisés au Belmont par les défricheurs de l’émission de radio Hip-Hop Café et du producteur et promoteur Smoking Camel, qui tissent des liens entre les scènes rap bruxelloise et montréalaise depuis plusieurs années, les spectacles Bruxelles arrive! et Bruxelles est là! ont permis de saisir une partie de l’ampleur du phénomène. Pour le producteur Le Motel, cet éveil québécois pour le rap de son pays a des liens avec les ressemblances stylistiques qui définissent ces deux scènes francophones. «On se rejoint beaucoup dans l’humour et l’autodérision d’un groupe comme Alaclair Ensemble. On ne se pose pas trop de questions, on mélange les styles. On aime partir dans des délires, sans nécessairement avoir à trop encadrer notre proposition.» «On a quand même beaucoup de points en commun avec le Québec», renchérit Caballero. «Nous vivons tous les deux dans des petites zones linguistiques, où le marché n’est pas super développé et où tout est à faire.» «À la base, je crois aussi qu’on prend les choses à la légère, car tout ça, c’est sans grands enjeux à côté du game français», poursuit Primero. «On a démarré ça comme un hobby, sans se faire d’idées de carrière, et maintenant, on a de la pression et de l’espérance, car ça évolue vite.» y


À ÉCOUTER

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★★★★★ CLASSIQUE ★★★★ EXCELLENT ★★★ BON ★★ MOYEN ★ NUL

DAPHNI FABRICLIVE 93: DAPHNI

ROGER WATERS IS THIS THE LIFE WE REALLY WANT? (Sony Music) ★★★★ Si certains artistes se répètent par manque d’idées, d’autres le font davantage pour le simple plaisir d’entretenir leurs obsessions, et c’est exactement ce que fait Roger Waters, toujours avec autant de talent. Après tout, ce n’est pas comme si son regard pouvait se poser sur autre chose que des horreurs, du cynisme et de la déprime... Eh oui, «If I had been God, I believe I could have done a better job»! Si la production est de Nigel Godrich (Radiohead), Waters reste Waters, et il n’a pas à être gêné de citer Pink Floyd («Wish you were here in Guantanamo Bay», dans Picture That), de ressortir ses effets sonores ou de faire des musiques qui rappellent beaucoup The Wall. Une suite parfaite à son solo précédent (Amused to Death). (R. Beaucage)

CAMILLE OUÏ

(Fabric)

(Because Music)

★★★ 1/2

★★★ 1/2

Lorsque Daphni (Dan Snaith de Caribou) s’est fait offrir de livrer un mix pour la série mensuelle Fabriclive, il a décidé de faire quelque chose de complètement différent de ses prédécesseurs. Plutôt que de mélanger des chansons d’autres artistes, Snaith a plutôt choisi de creuser dans ses tonnes de boucles et d’échantillons inutilisés pour créer de tout nouveaux morceaux. Il en résulte un long mix de 27 titres presque complètement inédits où l’on sent les influences multiples de cet artiste infiniment créatif. À travers des constructions sur de longues durées portées par des rythmes inventifs et résolument dansants, Daphni nous amène à explorer un disque où la variété s’accorde avec la cohérence. Bien que l’on y voyage à travers une vaste gamme de sonorités électroniques, on ne se sent jamais dépaysé et les compositions habiles de Snaith viennent lier le tout comme autant de mortier musical. (A. Bordeleau)

ALT-J RELAXER (Atlantic Records) ★★★ Pour son troisième album, le groupe anglais Alt-J offre encore une fois des paroles énigmatiques, jumelées à des mélodies singulières qui leur permettent de composer avec des couleurs musicales peu communes. Relaxer pousse plus loin le désir d’exploration du trio. Cependant, tiraillé entre le succès populaire et le désir d’innover, le groupe offre un album inégal: alternant entre la majesté cinématographique du London Philharmonic Orchestra (Adeline, Pleader) et les sonorités pop (In Cold Blood, Deadcrush), Alt-J propose une œuvre concise, intéressante, mais qui manque de cohésion. Pensons notamment à la psychédélique et agressive Hit Me Like That Snare qui ne cadre pas du tout dans l’ensemble. Relaxer reste toutefois un album courageux et introspectif où se côtoient à la fois le désir de plaire et la volonté viscérale de sortir des sentiers battus. (E. Guay)

Sixième album de la fascinante Camille, Ouï témoigne en 11 titres du formidable parcours artistique de la femme aux mille voix. Enregistré dans une vieille église du sud de la France, ce nouvel effort renoue plus ou moins avec le populaire Le fil, disque phare de la chanteuse parisienne paru en 2005. Sur Ouï, Camille entraîne l’auditeur dans un univers à la fois onirique et sensuel, envoûtant et transcendant. L’artiste joue avec les mots et les sons; ici, les voix se superposent et s’entremêlent, se fondant dans les rythmes et les notes, quelquefois sur des mélodies traditionnelles de la vieille France et d’Afrique ou des envolées cristallines aux airs sibyllins. Un disque hypnotique et chamanique, où limpidité rime avec pureté. Ouï, on l’entend bien, et on acquiesce. (P. Baillargeon)

JOWEE OMICIL LET’S BASH! (Jazz Village) ★★★ 1/2

Montréalais d’origine haïtienne, ce soul brother authentique fait d’abord de la musique à l’église, sur Pie-IX, où prêche Joseph senior, son papa pasteur. «J’ai le gospel dans le sang», proclame-t-il, survolté. Doué, on le prend à Berklee, la grande école du jazz, d’où il émerge avec saxes et clarinettes dans le groupe de Roy Hargrove. Mais après trois albums autoproduits et marginaux, il est plutôt content de vivre en France et d’être aujourd’hui à la tête d’une formation multiethnique. Dans Let’s Bash! – c’est son cri de ralliement –, Omicil trouve enfin sa voie. Pas d’esbroufe ni de virtuosité. Se baladant sur des grooves imprégnés de blues avec une démarche minimaliste, il propose des motifs mélodiques souvent embryonnaires (comme dans Sur le pont d’Avignon, ludique, avec trois bassistes). Il salue aussi au passage Miles et Tinariwen, Chaplin qui dodeline sur des tablas, le Capverdien Luis Moraes et la Martiniquaise Leona Gabriel, dont il reprend un air de la Belle Époque. Et si Jowee était le futur du jazz? (R. Boncy)


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BISON YOU ARE NOT THE OCEAN YOU ARE THE PATIENT

BENT KNEE LAND ANIMAL

(Pelagic Records)

★★★ 1/2

★★★ 1/2

Le premier album du groupe de Vancouver enregistré avec le bassiste Shane Clark (ex-guitariste de 3 Inches of Blood) est marqué par un changement de style qui ne devrait pas trop déstabiliser les fans qui ont entendu le EP One Thousand Needles (2014). Loin de renier les racines stoner sludge métal de ses débuts, Bison y ajoute des influences post-hardcore et des progressions rythmiques ambiantes à la Neurosis. Si cette comparaison est particulièrement évidente sur Water Becomes Fire, on entend aussi des similitudes avec Kylesa (écoutez Tantrum) sur la première moitié du disque réalisé par leur collaborateur de longue date, Jesse Gander (Japandroids, Anciients). Un bel exemple de progression ancrée dans la continuité. (C. Fortier)

OURI SUPERFICIAL (Make It Rain Records) ★★★ 1/2

À l’instar de son copain Cri, la productrice Ouri creuse le sillon du future garage, ce genre essentiellement britannique qui croise ambiances vaporeuses, synthés caverneux et rythmiques ingénieuses, tantôt dansantes, tantôt décalées. Sans délaisser les explorations house de son premier EP Maze, paru il y a deux ans, la Montréalaise offre ici une proposition plus uniforme et accessible, qui évite les motifs redondants dans lesquels se complaisent beaucoup trop d’artistes électro. Après une saillante entrée en matière, marquée par la progression ample de X-Float et la recherche sonore langoureuse de Left Me que parcourt la voix brumeuse et feutrée d’Odile Myrtil, Superficial vogue tout naturellement vers des sonorités entraînantes (Jungle, Distracted…) et déferlantes, quelque peu alambiquées mais bien menées (Switchy Loco, Iddun). (O. Boisvert-Magnen)

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(InsideOut/Sony) Dans l’ensemble, ce quatrième opus est plus «lumineux» que le précédent, ou moins dark, ce qui correspond peutêtre au désir avoué du groupe de rejoindre un plus grand public. On n’est pas dans la chansonnette pour autant, bien sûr, et on retrouve les ingrédients de base de Bent Knee: une touche de math rock par-ci par-là, un soupçon de métal dans la guitare de Ben Levin, des changements d’ambiance abruptes et, bien sûr, la voix aigüe de Courtney Swain, très présente. D’une manière générale, on est un brin moins enthousiasmé que par l’album précédent, mais ça reste un groupe que l’on voudra suivre. (R. Beaucage)

L’ORCHESTRE NATIONAL DE JAZZ AVEC CHRISTINE JENSEN UNDER THE INFLUENCE SUITE (Justin Time) ★★★★ La saxophoniste Christine Jensen mène plusieurs projets de front: avec les universités McGill et Sherbrooke, avec son propre groupe, avec sa sœur Ingrid (trompettiste) et avec l’Orchestre national de jazz qu’elle dirige ici de main de maître pour l’exécution de sa nouvelle création dans laquelle elle passe en revue ses mentors et ses idoles. Dans l’ordre: Kenny Wheeler, Jan Jarczyk (pianiste décédé récemment), Coltrane, Konitz et Wayne Shorter qui donne l’occasion à un bel affrontement épique entre André Leroux et Frank Lozano. Précisons qu’il n’y a aucune reprise dans ce disque ambitieux, homogène, nostalgique et lumineux, mais bien huit nouvelles pièces en cinq actes. On connaissait le talent d’arrangeuse de Christine, mais, cette fois, c’est la compositrice qui atteint un nouveau sommet de plénitude et de maturité aidé par la présence féminine, émotive et inspirée de la chanteuse Sienna Dahlen, captivante. (R. Boncy)

SUFJAN STEVENS, BRYCE DESSNER, NICO MUHLY, JAMES MCALISTER PLANETARIUM (4AD) ★★★ 1/2 Quand notre monde devient fou, vaut mieux se tourner vers les astres. Voilà une réflexion de Sufjan Stevens, qui s’est inspiré de notre rapport au système solaire pour livrer ici des textes sur la divinité, la société, l’identité. Le projet Planetarium a pris forme en 2012 après que le Muziekgebouw d’Eindhoven (aux Pays-Bas) eut commandé un spectacle sur les planètes au compositeur Nico Muhly. La voix céleste de Stevens était bien sûr tout indiquée pour ceci. Les amis musiciens – Muhly, Stevens, son batteur James McAlister ainsi que le guitariste de The National, Bryce Dessner – nous emportent sur leur grande épopée planétaire, qui alterne entre des passages plus orchestraux à des pièces instrumentales, à des moments prog-rock et électro. Voilà un album-concept bien touffu, une proposition incroyablement alléchante, mais qui demande du dévouement de la part de l’auditeur, sinon l’intérêt se perd. (V. Thérien)


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MONIQUE GIROUX SUR MESURE

LETTRE AUX FEMMES EN MUSIQUE Salut Lydia Képinski, les Sœurs Boulay, Frannie Holder, Betty Bonifassi; salut Amylie, Sarah Toussaint-Léveillée, Mara Tremblay, Beyries; salut Klô, Laurence, Ariane, Ingrid; salut toutes les femmes en musique dans l’ombre ou la lumière.

à avoir remporté le trophée d’auteure-compositrice de l’année à l’ADISQ était Francine Raymond, en 1993. Et c’est sans parler des inégalités salariales (selon certaines statistiques de l’Union des artistes, les femmes gagnent en moyenne 75% de ce que gagnent les hommes)…»

J’ai mis du temps à vous écrire, mais entre le moment de la parution de notre numéro de juin et votre sortie publique, j’ai été muselée du clavier pour cause de mensualité. Nous voici donc en juillet, en plein cœur des vacances et au pic de la «festivalite» virale, maladie contagieuse et saisonnière comme on le dit parfois des allergies.

En regardant comme vous les affiches des festivals, je me rends à l’évidence, mais une question demeure. Pourquoi? Le défunt magazine Croc avait pour devise: «C’est pas parce qu’on rit que c’est drôle.» J’inspire et m’en inspire.

Le matin de la publication de votre lettre, le 1er juin, j’ai reçu, en enfilade, deux coups de fil. Deux collègues, un homme et une femme, dubitatifs et curieux de connaître mon point de vue sur vos doléances, voulaient échanger sur la question. Pour être très honnête, j’étais sceptique sur la nécessité d’une telle sortie, ne pouvant pas figurer qu’un directeur de programmation de festival se lève un matin en décrétant avec fermeté entre ses bines et son bacon matinal: « Câlisse, c’est pas vrai que j’vas payer une fille pour chanter dans mon festival, non de non! Des filles, ça fausse, ça sait pas jouer de la guitare, ça connaît rien dans’ technique, pis ça attire pas l’monde, faque… pas de filles pis c’est toute.» J’ai par contre porté attention aux chiffres que vous évoquiez dans votre lettre: «Depuis la médiatisation récente du contenu de différents festivals québécois, nous avons aussi pris conscience avec consternation de la faible représentation des femmes dans les programmations (souvent moins de 30%, et même 10% dans certains festivals, alors qu’à la Société professionnelle des auteurs et compositeurs du Québec, dans le volet Chanson, on recense 42% de femmes inscrites et 49% à l’Union des artistes)… L’automne dernier, nous nous indignions également de constater que la dernière femme

Une ville de banlieue, disons Belœil, présente dans le stationnement du Mail Montenach son festival. Sur le site oeilregional.com, on lit sous la plume de Denis Bélanger: «Marc-André Bellemare [directeur de la programmation du Festival de Belœil] et toute son équipe mettent ainsi sur pied une programmation plus costaude.» Mike Ward, La Chicane, Philippe Bond, Jean-François Mercier… J’oubliais Arthur L’aventurier et Les Cowboys fringants qui en seront à leur quatrième passage à Belœil en 12 ans de festival. Mais, mais, mais il y aura UNE fille alors? Que faites-vous de Marie-Annick Lépine? De quoi vous plaignez-vous? Depuis 2006, le Festival de Belœil, qui a la malchance de faire ici office d’exemple, a accueilli Marie Mai, MarieChantal Toupin, Lulu Hughes, Andrée Watters, Marjo, Marie-Elaine Thibert et Diane Dufresne. Sept femmes en douze ans de Festival. Ça fait une femme et des poussières tous les deux ans. De quoi vous plaignez-vous? Même que Marie Mai et Marie-Chantal Toupin y sont allées deux fois. Forcément, les listes comme celles des festivals ou les programmations de salles sont créées de façon totalement subjective. Question de genre alors? Du rock de gars, c’est pas du rock de fille? De l’humour de gars, c’est pas de l’humour de filles? Demandez à Cathy Gauthier ou Mariana Mazza.

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31 Le Grand Théâtre de Québec propose pour sa saison prochaine les spectacles de Fred Pellerin, Chris de Burgh, Damien Robitaille, Daniel Bélanger, Tire le Coyote, Alexandre Poulin, Edgar Fruitier et k.d. lang. Et que je n’en entende pas un me parler de l’orientation sexuelle de k.d. lang parce que là, franchement… Il y aurait sur la planète 60 millions plus d’hommes que de femmes. Faut bien les occuper et leur laisser un peu de place. On compte sur terre 102 hommes pour 100 femmes. Il naît 107 garçons pour 100 filles, mais il meurt plus de garçons que de filles, on ne sait pas pourquoi. Il arrive donc un âge où on est à nombre égal, soit autour de 25 ans. Huit centenaires sur dix sont des femmes. Ne perdez pas espoir, les filles. Un jour en 2067, on fêtera les 100 ans de l’Expo et dans le show vous serez 8 très vieilles madames pour 2 très vieux monsieurs. Cette année, j’ai perdu une amie française. Elle s’appelait Danièle Molko. En 1985, elle a créé dans l’ombre de Jean-Louis Foulquier, qui était animateur vedette à Radio France et qui en avait la paternité, les Francofolies de La Rochelle et subséquemment celles de Montréal. C’est à La Rochelle en 1993 que je l’ai connue. Plus tard, en 2005, elle a créé les Muzik’Elles de Meaux. Il n’y avait que

des filles en tête d’affiche de son festival. Quelquesunes d’entre vous y ont déjà participé. Il y avait bien sûr et heureusement des garçons invités, mais par les filles. Comme Brigitte Fontaine qui invite Arthur H. On n’est jamais mieux servie que par soi-même. Ce serait peut-être pas mal que Louve reprennent le flambeau des Muzik’Elles de Meaux. Je salue votre talent, votre élan et votre appel, qui sera certainement entendu et dont l’écho, j’espère, durera plus longtemps que ne durent les roses. Je rappelle aussi la détermination de celles qui vous ont précédées et qui ne l’ont vraiment pas eu facile tous les jours: Pauline Julien dont peu de gens savent qu’elle a signé la moitié de son répertoire, Louise Forestier qu’on a trop longtemps confinée dans l’ombre de Charlebois, Diane Dufresne qui fatiguée de tout ça a failli entrer au couvent, Renée Claude, Monique Leyrac, Lucille Dumont, la Bolduc dont on découvrira bientôt la vie étonnante sur grand écran, Alys Robi traînée dans la boue, Christine Charbonneau, Isabelle Pierre qui a abandonné le métier en pleine gloire. Soyez toujours au sommet, bien droites dans vos bottes, regardez loin et marchez fièrement jusque sur toutes les scènes et les publics qui vous aiment. y

LOUIS RIEL / HARRY SOMERS DON GIOVANNI / MOZART / STUDIO D’OPÉRA GALA D’OPÉRA SOUS LES ÉTOILES ANTHONY ROTH COSTANZO ET LES VIOLONS DU ROY SHAKESPEARE À L’OPÉRA LA BRIGADE LYRIQUE MASCARADE À VENISE / OPÉRA JEUNESSE QUARTOM / ACTE III VIENNOISERIES MUSICALES DIANA SOVIERO / CLASSE DE MAÎTRE

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ALORS QU’ON AVAIT AUPARAVANT BESOIN D’UN AVION OU D’UN HÉLICOPTÈRE POUR FILMER DU HAUT DU CIEL, L’ÉVOLUTION DES DRONES PERMET AUJOURD’HUI À DE NOMBREUX CINÉASTES D’OBTENIR CES PLANS PLUS FACILEMENT. PETITE HISTOIRE D’UNE ÉVOLUTION TECHNIQUE. MOTS | ANTOINE BORDELEAU

PHOTOS | PEXELS

Bien qu’il puisse sembler naturel aux yeux du public moyen, le mouvement de caméra est l’un des outils métaphoriques les plus puissants que possède un réalisateur pour faire parler ses images. Alors qu’au tout début on ne filmait que sur trépied, les premiers exemples de pan de caméra apparaissent dès 1903, dans le film The Great Train Robbery d’Edwin S. Porter. Dans les années qui suivirent, de plus en plus de réalisateurs se mirent à utiliser la caméra comme un élément actif dans leurs scènes. Lorsque bien manipulée, la caméra en mouvance peut effectivement jouer un rôle en soi, comme un personnage supplémentaire venant ajouter une charge émotionnelle au film. Alors que les pans et autres mouvements au sol ont leurs utilités, très rapidement on a voulu pouvoir déplacer la caméra de haut en bas. La raison en est fort simple. Un des buts premiers du cinéma est de suggérer à l’auditoire des émotions, de le subjuguer en l’introduisant dans un univers auquel il n’a pas d’attachement de prime abord. Conséquemment, des images filmées de très haut dans les airs ont un grand pouvoir sur la réponse émotionnelle du public. Souvent grandioses, ces plans peuvent avoir pour effet d’établir les lieux ou de suivre le mouvement dans une vue subjective déstabilisante (on n’a qu’à penser à la légendaire séquence d’ouverture du Shining de Kubrick). Alors que ces images filmées du haut des airs demandaient auparavant de fortes coûteuses opérations en avion ou en hélicoptère, les récentes avancées technologiques dans le domaine des drones (aussi appelés UAV ou RPAS) ont grandement changé la donne. Au cours des 10 dernières années, ces véhicules aériens sont passés de simples jouets équipés de caméras pour hobbyistes à de véritables monstres à 12 hélices permettant de soulever des caméras professionnelles et de les stabiliser suffisamment pour être utilisées dans des applications cinématographiques. Grâce à ces développements, de plus en plus de cinéastes et vidéastes au budget plus limité ont désormais accès à des prises de vues aériennes, un outil de taille pour raconter une histoire. Possibilités décuplées La venue des drones dans le marché professionnel a par ailleurs carrément modifié certaines professions. Romain Brot, directeur des opérations aériennes spéciales chez DroneBox (une compagnie se spécialisant dans les plans aériens), l’explique: «Ma femme et moi, on est tous les deux caméramans, et on s’est toujours spécialisés dans les prises de vue aériennes, un peu partout dans le monde. À l’époque, on le faisait à bord d’avions et d’hélicoptères, ce qui avait son lot de problèmes possibles. Tu es à la merci des intempéries, et en bien des cas, quand tu devais annuler, tu devais tout de même payer le plein prix au pilote. Ce n’était donc pas pratique pour les productions aux

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34 budgets bien limités. De mon côté, j’ai toujours été un passionné du modélisme, des petits engins téléguidés. Vers 2010, quand les drones ont commencé à avoir la capacité suffisante pour soulever une caméra comme une Canon 5D, on a tout de suite su que c’était la direction qu’on devait prendre.» Mais ce nouveau venu au rang des outils cinématographiques ne fait pas que reprendre le flambeau des avions et des hélicoptères. Le drone, en raison de sa petite taille et de ses fonctionnalités, permet des mouvements beaucoup plus libres et donc beaucoup plus intéressants. «Ç’a réellement changé la palette de plans possibles pour un directeur photo, poursuit Romain Brot. Maintenant, on peut partir directement du sol et s’envoler, ce qui n’était pas possible avant. Dès qu’on a mis un pied dedans, on s’est rendu compte des possibilités que ça avait. En fin de compte, le drone n’est pas seulement le successeur des shots en avion, mais également de tout ce qui est chariot, grue… Ça nous affranchit des contraintes physiques et ça permet de mettre des idées en images d’une toute nouvelle façon.» Une ère de prolifération Depuis leurs humbles débuts, les drones se sont répandus à une vitesse folle. Leur prix ne cesse de

«ÇA NOUS AFFRANCHIT DES CONTRAINTES PHYSIQUES ET ÇA PERMET DE METTRE DES IDÉES EN IMAGES D’UNE TOUTE NOUVELLE FAÇON.» devenir de plus en plus compétitif, de sorte qu’il est désormais très facile d’y accéder. En même temps, l’offre s’est énormément diversifiée. «Maintenant, si tu veux avoir un drone qui a du bon sens, il y a des options autour de 1000$, explique Robert La Salle (responsable de la section des drones chez Lozeau). Mais ça ne veut pas dire que c’est suffisant pour toutes les applications. Aujourd’hui même, j’en ai vendu un à 10 000$ à un jeune photographe d’architecture; évidemment, on ne parle pas de la


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même qualité d’image. Et ça, c’est juste en parlant des drones qui ont une caméra dessus. Quand tu te mets à vouloir utiliser des shots de drone dans un film, les prix montent en flèche si tu combines la caméra et le drone.» Il s’en vend tout de même comme des petits pains chauds. Stéphane Lauzon-Simard, pour sa part vice-président et directeur du développement de l’entreprise, explique leur popularité en ces termes: «Une chose est certaine, les drones, c’est le futur. Quand je dis “drone”, je réfère à la robotisation de l’humain et de tous les processus. Je crois qu’en général, la robotisation va amener la photographie à revenir à sa base de l’imagerie: c’est-à-dire de regarder, contempler une photo, plutôt que de simplement la scroller avec son doigt. C’est ce que les gens recherchent. C’est l’avenir.» Bien que leur accès soit plus facile que jamais, on ne peut pas simplement s’acheter un drone et commencer à filmer en ville sans conséquence. Les lois concernant ces appareils ont récemment changé et obligent les hobbyistes à faire voler leur drone à plus de 9 kilomètres d’un aéroport. Pour Romain Brot, cette nouvelle a été bien accueillie: «Tu sais, un peu comme avec la photographie, quand les drones se sont répandus, ç’a permis à beaucoup d’amateurs de s’improviser professionnels et de nous bouffer une bonne part de marché. Maintenant qu’ils ne peuvent plus voler légalement sans les certifications de Transports Canada, les vrais pros peuvent reprendre leur place. Ce n’est pas tout

le monde qui peut être certifié, et ça fait que des entreprises comme la nôtre sont des incontournables pour les milieux cinématographiques et promotionnels.» Le revers de la médaille Cette omniprésence de la shot de drone dans les productions n’est toutefois pas une bénédiction pour tout le monde. Didier Charette, réalisateur très talentueux dont le plus récent vidéoclip pour CRi se retrouve en nomination aux Much Music Video Awards, parle de sa relation amour-haine avec l’objet de cette façon: «Ça va avoir l’air con, mais si je pouvais ne pas m’en servir, je serais bien content. C’est cave parce que mon dernier clip est celui où j’ai le plus utilisé de drone, mais c’est ça pareil. L’affaire, c’est que dans mes réalisations, je trouve que ça peut vraiment tuer un mood. T’sais, à moins d’avoir la machine à 30 000$, une shot de drone, ç’a l’air d’une shot de drone. Pour moi, ça sort l’auditoire de l’ambiance que j’essaie de créer. Mais tout le monde en veut dans ses vidéos, ça fait que t’as pas le choix ben ben.» Ça ne veut pas dire qu’il faut l’éviter à tout prix, mais selon lui, l’idée est d’y aller avec parcimonie. Alors que le drone devient de plus en plus accessible, il ne faut pas non plus l’utiliser à toutes les sauces et sans recherche de signification légitimant son utilisation. Didier conclut: «Pour moi, une image de drone doit avoir une raison d’être. Si on s’en sert juste parce qu’on peut le faire, c’est pas de l’art.» y


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LA BOLDUC AU GRAND ÉCRAN LA BOLDUC AURA SON BIOPIC. DEBBIE LYNCH-WHITE CHANTERA ET TURLUTERA LES AIRS DE LA PREMIÈRE GRANDE CHANSONNIÈRE DU QUÉBEC SUR NOS ÉCRANS QUELQUE PART EN 2018. RENCONTRES AVEC LES ARTISTES DU FILM LORS D’UNE VISITE DE PLATEAU. MOTS | VALÉRIE THÉRIEN

PHOTOS | CARAMEL FILMS-LAURENT GUÉ R IN

«C’est quelque chose qui se présente une fois dans une vie, je pense, ce genre de rôle-là», avoue Debbie Lynch-White, très attachée depuis longtemps à ce film biographique produit par Caramel Films sur la vie de La Bolduc. «À l’audition, y a deux ans, j’avais lu le scénario au complet. Je me rappelle avoir braillé ma vie juste à découvrir la force de cette femme-là.» Ce printemps, la comédienne savourait donc chaque journée de tournage. «C’est fou comme actrice de pouvoir jouer autant, tous les jours, toute la journée pendant un mois et demi. C’est une espèce de condensé de gros carré de sable, de gros fun. C’est des grosses journées, mais c’est tellement de la bonne fatigue.» La Bolduc était une sorte de Louis Cyr à sa manière, une voix attachante qui racontait les maux du quotidien parfois avec humour en pleine période de crise économique. D’où l’importance, enfin, d’un long métrage à la hauteur de la grande artiste qu’elle a été pour le peuple québécois. «C’est une force de la nature. Elle a pavé le chemin, poursuit Debbie Lynch-White. Elle a ouvert la voie à toutes nos

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> chanteuses. Il faut se la rappeler, il faut savoir qu’il y a eu ça pour que nos jeunes sachent d’où on vient.» La chanteuse d’origine gaspésienne – Mary Travers de son vrai nom – a traversé des décennies de pauvreté et a élevé quatre enfants avant de connaître la gloire en chanson au Québec. «C’est un peu inattendu son affaire. C’est une mère de famille ben ordinaire qui n’avait pas de plan, explique le scénariste Frédéric Ouellet. C’est un peu comme si aujourd’hui une mère de quatre enfants remportait La Voix et devenait la nouvelle Céline Dion. Ç’a tout bousculé dans sa vie, dans son couple, dans sa famille et dans la société autour d’elle aussi – dans la perception que les gens avaient d’elle.»

Au cœur du film, il y a la relation entre Mary et sa fille Denise – aussi musicienne et qui jouait du piano sur tous ses disques. «La fille est témoin de tout ce qui se passait, donc c’est à travers son regard qu’on découvre La Bolduc», précise le scénariste. Le mari de Mary et père de ses enfants, Édouard Bolduc, a aussi un rôle important et intéressant dans cette histoire. Il est victime d’un accident qui l’empêche de travailler et «subit un méchant choc quand sa femme devient soudainement la pourvoyeuse en partant en tournée sur la route», affirme Frédéric Ouellet. Émile Proulx-Cloutier nous en dit plus sur ce rôle complexe et son apport à l’histoire de La Bolduc: «L’homme qui considère que ça fait comme partie de sa dignité de gagner les sous, c’est encore présent chez des Québécois aujourd’hui, mais au moment où l’histoire se passe, c’est complètement farfelu.» «C’est un homme humilié, poursuit-il. La part sombre ou fragile du film appartient beaucoup à cette trame-là, en contrepartie au plaisir qu’on a à voir La Bolduc chanter et raconter la vie des gens. C’est ça aussi qui est fort. C’est une figure culturelle importante à un moment où rien ne tient. On connaît ses tounes, mais on ne réalise pas le caractère profondément révolutionnaire que cette femme-là porte dans son action sans s’en rendre compte. Son projet n’était pas de changer la société, mais de manger.» Pour ce projet ambitieux, le scénariste Frédéric Ouellet a plongé dans la littérature autour de La Bolduc pour avoir une meilleure compréhension de la femme qu’elle était, mais aussi sur le contexte de l’époque. «Ce qui m’a frappé et ce que j’ai essayé de faire ressortir dans l’histoire, c’est la différence entre la société d’avant et la société d’aujourd’hui, surtout du point de vue de la condition féminine: La Bolduc a été une pionnière de l’émancipation des femmes en étant une des premières à sortir de sa condition, prendre la parole en public et dire ce qu’elle pense. C’est ce qui est devenu le thème central du film.» Qu’est-ce que ce récit nous dit sur la société d’aujourd’hui? «Ça nous dit qu’il y a encore du chemin à faire, tranche Debbie Lynch-White. Mais ça fait à peine 100 ans et je trouve quand même qu’il s’est passé beaucoup de choses pour la femme. Ça avance jamais assez vite à notre goût, mais on lui doit beaucoup. Ça résonne encore aujourd’hui. Il faut prendre le flambeau et continuer.» y

«CE QUI M’A FRAPPÉ ET CE QUE J’AI ESSAYÉ DE FAIRE RESSORTIR DANS L’HISTOIRE, C’EST LA DIFFÉRENCE ENTRE LA SOCIÉTÉ D’AVANT ET LA SOCIÉTÉ D’AUJOURD’HUI, SURTOUT DU POINT DE VUE DE LA CONDITION FÉMININE.»

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NORMAND BAILLARGEON PRISE DE TÊTE

YVON DESCHAMPS, LE PHILOSOPHE MOQUEUR L’humour est une chose sérieuse. Il l’est pour bien des gens, y compris pour les philosophes. À tel point qu’on a pu composer un manuel de philosophie complet dans lequel tous les concepts sont introduits et présentés par des blagues qui les illustrent (T. Cathcart et D. Klein). Vous ne me croyez pas? Voyez plutôt. Un concept expliqué par une blague Il arrive qu’un système de croyance soit infalsifiable, c’est-à-dire tel que rien ne pourra faire que la personne qui y adhère y renonce, puisque tout sera interprété à la lumière de ce système et de manière à le renforcer. Prenez les débats entre athées et croyants: ne donnentils pas parfois l’impression de ne jamais pouvoir aboutir, justement, pour cette raison qui fait qu’au fond ils n’ont jamais même commencé? La blague qui suit illustre cette idée et la rend inoubliable! Une vieille dame très pieuse s’installe dans un village, juste en face du domicile du bien connu athée fervent qui y habite. Le premier matin, la vieille dame, qui n’ignore rien de son voisin, sort sur son balcon et lance, les yeux au ciel: «Loué sois-tu, Seigneur!» L’athée, qui l’attendait, rétorque bien fort depuis son propre balcon: «Dieu n’existe pas!» La scène se répète tous les matins à la même heure et amuse le village.

Mais la vieille dame connaît bientôt de sérieux problèmes financiers, et un matin, piteuse, elle sort sur son balcon et dit, les yeux au ciel: «Seigneur, viens à mon secours: je n’ai plus rien à manger.» L’athée, ému, ne dit rien. Le lendemain matin, la vieille dame, sortant sur son balcon, y découvre les nombreux sacs d’une grosse commande d’épicerie déposés là. Les yeux au ciel, elle dit alors, mains jointes: «Merci, Seigneur!» À ces mots, l’athée sort d’un buisson où il s’était tapi et lui lance: «Ah! ah! C’est moi qui ai acheté tout ça! Dieu n’existe pas!» La vieille dame lève de nouveau les yeux au ciel et dit tout doucement: «Loué sois-tu, Seigneur! Non seulement tu me procures de la nourriture, mais en plus, tu la fais payer par Satan!» Mécanismes et périls du rire Les philosophes ne se sont pas penchés sur le rire seulement pour ses vertus pédagogiques. Ils et elles ont aussi cherché à en comprendre les mécanismes, et ce faisant identifié à la fois ses bienfaits et ses possibles dangers. Voyez plutôt. Un des mécanismes du rire (et du sourire…) est cette satisfaction ressentie devant les carences, les travers, les défauts que l’on constate chez autrui. Le rire, disait le philosophe Thomas Hobbes (1588-1679), ponctue la victoire narcissique que nous procure le spectacle des faiblesses d’autrui. Vous trouverez très facilement de nombreux exemples de blagues reposant sur ce procédé.


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> Mais voilà, et c’est pourquoi tant de gens se méfient non sans raison du rire et de ses possibles effets, la ligne peut être mince entre rire de bon cœur et sans malice des travers d’un autre ou d’un groupe et les dénigrer d’une manière inacceptable, où il n’y a vraiment plus de quoi rire parce qu’on est alors tombé dans la haine, le racisme, la misogynie, et ainsi de suite.

Pale ale lime et framboise BRASSIN

Mais quand il échappe à de tels travers, le rire peut avoir des bienfaits appréciables. Il arrive par exemple qu’il puisse servir à dénoncer des travers collectifs, à esquisser des besoins de changement, à faire prendre conscience de défauts et de carences en donnant le goût de les corriger. Je pense qu’au Québec, un génie du rire pédagogique, du rire moral, du rire qui nous grandit, un véritable génie de l’humour a joué ce rôle pour nous. Il s’appelle Yvon Deschamps. Hommage à un grand monsieur Il aura été de ceux qui prennent le pouls de leur société, qui en disent en souriant les travers et qui esquissent modestement, avec un ton dans lequel on entend autant les doutes qui l’habitent que les valeurs profondes qui l’animent, une avenue vers laquelle on pourrait aller pour s’en débarrasser. Il aura réussi ce tour de force de nous tendre un miroir dans lequel on voyait simultanément nos défauts et ce que nous pouvions être. Un baromètre prenant la pression du Québec et une boussole indiquant notre Nord. Un barosol. Deschamps est un barosol. Travail, syndicalisme, mondialisation, médias, racisme, féminisme, guerre... il n’y a guère de sujets qui ont traversé nos sociétés qu’il n’a su traiter avec humour, sagesse et pédagogie. Louis Cornellier a dit ce qu’il fallait dire quand il a écrit que «Deschamps a su transformer la provocation en marteau philosophique pour édifier une œuvre sans équivalent dans notre univers culturel». Le 31 juillet, ce sera son anniversaire, l’anniversaire d’un immense monsieur à qui nous devons beaucoup, d’un bon génie qui nous a rendus meilleurs, d’un homme à qui je dois beaucoup moi aussi. Il aura encore 20 ans – cela fait quelques fois déjà qu’il a 20 ans. Je tenais à lui dire tout cela, en lui disant merci et en lui souhaitant de très nombreux autres 20 ans. Je regrette seulement qu’on ne le voie ni ne l’entende plus guère, depuis trop longtemps déjà.

Pale ale rafraîchissante à la robe d’un magnifique rose orangé, dont les arômes délicats de framboise se marient aux fragrances ensoleillées de la lime bien mûre.

Il me manque. À vous aussi, je parierais… y

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CUISINE DE HAUT VOL

POULET BASQUAISE

NAVARIN D’AGNEAU

POUR CONTRER LA RÉPUTATION DE MALBOUFFE DANS LES AVIONS, PLUSIEURS COMPAGNIES AÉRIENNES S’ASSOCIENT À DE GRANDS NOMS DE LA GASTRONOMIE… MOTS | MARIE PÂRIS

Le 1er mars dernier, les passagers des vols Air France au départ de Montréal, Toronto ou Vancouver se voyaient proposer un plat de Daniel Boulud, chef étoilé à l’origine du Café Boulud du Four Seasons de Toronto et de Maison Boulud au Ritz-Carlton Montréal. Au menu: saumon au fenouil, pois chiche et sumac, poulet basquaise, chorizo et poivrons avec riz au safran, ou encore navarin d’agneau et légumes de printemps. Ces plats signés Boulud seront proposés jusqu’en février 2018. Désireuse d’assumer son «rôle d’ambassadrice de la gastronomie française dans les airs», Air France a déjà travaillé avec de nombreux chefs français depuis 2009, dont Joël Robuchon, Guy Martin ou AnneSophie Pic. Avec Daniel Boulud, elle choisit cette fois un chef à la réputation bien installée en Amérique du Nord.

En optant pour Daniel Vézina, Air Transat voulait apposer sur ses menus une «signature locale et pancanadienne» et montrer sa volonté d’utiliser des produits typiquement canadiens. «On voulait s’associer à un chef d’ici qui partage nos valeurs, à savoir la cuisine de qualité et la responsabilité environnementale», souligne Dave Bourdages. «Un des points qui m’a encouragé à signer, c’est le fait que Daniel Boulud a fait avant le même type de contrat avec Air France, indique pour sa part Daniel Vézina, qui s’est engagé avec la compagnie aérienne pour plusieurs années. Et les gens se plaignent tellement de la bouffe en avion… Je me suis dit que je pourrais mettre mes connaissances au service de la cuisine de l’air.»

D’autres compagnies aériennes lui ont emboîté le pas afin d’améliorer la qualité des repas proposés à bord ou leur image marketing en s’associant à un nom connu de la grande gastronomie. Plus récemment, c’est Air Transat qui a annoncé avoir signé un contrat avec Daniel Vézina (à la tête des restos Laurie Raphaël de Québec et Montréal). Les plats imaginés par le chef québécois sont servis sur les vols de la compagnie depuis le 1er mai. «On veut rehausser l’expérience culinaire et gastronomique à bord, indique Dave Bourdages, vice-président, service en vol et commissariat chez Air Transat. Ça répond aussi à une vraie demande: les gens veulent connaître la provenance des produits et bien manger»; même en avion.

L’occasion pour Air Transat de montrer la gastronomie d’ici à la part européenne de ses 4 millions de voyageurs annuels. «Souvent, les gens ne sont pas au courant qu’on a une gastronomie au Québec, regrette le chef. Ces menus, c’est une belle fenêtre pour faire découvrir la cuisine locale.» Mais si Daniel Vézina veut faire découvrir les produits du Québec, l’imposant volume demandé par la compagnie aérienne limite forcément le choix des producteurs. Sur le plateau-repas (comprenant un dessert, un verre de vin et une sélection de fromages), six plats du chef sont proposés: blanquette de volaille, lasagne au confit de canard, braisé de gigot d’agneau, moussaka végétarienne, risotto végétalien et gnocchis à la patate douce.

Gastronomie surgelée

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Si le vice-président de la compagnie parle de «vivre vraiment l’expérience Daniel Vézina», le chef précise que «non, on ne mange pas du Laurie Raphaël à bord». L’agneau est un classique du Laurie Raphaël à Québec, un des premiers plats du chef, mais les recettes proposées à Air Transat sont plutôt du «Daniel Vézina comfort food bien assaisonné, de bonne qualité»: «En avion, les gens veulent une cuisine simple, réconfortante, où ils retrouvent leurs repères.» Des repères qui ont bien changé ces dernières décennies; le chef se souvient qu’il y a 15 ans, quand il était conseiller pour Canadian Airlines, on faisait encore le service à la pince à bord… «J’ai connu l’époque où on servait du caviar, nous confie une ancienne agente de bord, qui a travaillé pour Air Canada de 1979 à 2003. On faisait le service à l’assiette pour la première classe, et le rosbif était coupé devant le passager. Les plats étaient frais, les cuisines à l’aéroport préparaient tout au fur et à mesure des départs. Les portions étaient plus copieuses aussi! Maintenant, il y a plus de choix dans les plats, par exemple pour les végétariens – à l’époque, on avait juste des repas casher et halal. Mais les passagers se plaignent de plus en plus aujourd’hui, et je les comprends: c’est devenu du transport de masse...»

«LES GENS SE PLAI GNENT TELLEMENT DE LA BOUFFE EN AVION… JE ME SUIS DIT QUE JE POURRAIS METTRE MES CONNAISSANCES AU SERVICE DE LA CUISINE DE L’AIR.» Aujourd’hui, à l’heure des normes d’hygiène de plus en plus strictes, on signe une collaboration avec le spécialiste du surgelé Fleury Michon – lorsque le célèbre chef Joël Robuchon s’était associé à la marque française pour en faire la promotion, la nouvelle avait d’ailleurs fait un tollé dans l’Hexagone. Au sujet de la collaboration avec Fleury Michon,


GASTRONOMIE 45 VOIR QC

VO2 #O7

DANIEL BOULUD

En attendant, alors qu’il met actuellement au point le menu d’hiver, Daniel Vézina aimerait développer encore plus l’expérience gastronomique chez Air Transat: «Je veux maintenant travailler sur la sélection des fromages et des entrées, pas seulement sur le plat. J’aimerais aussi améliorer la qualité du repas dans l’avion au complet, pouvoir servir ces repas à tout le monde et pas juste pour la classe club. Le défi est là. En attendant, c’est déjà un beau changement pour Air Transat. La compagnie souligne ses 30 ans en nivelant par le haut!» Dans cette optique, le vice-président indique vouloir à l’avenir travailler avec des producteurs de vins canadiens (Niagara, Okanagan), pour pouvoir dès cet automne proposer des vins d’ici à bord. À défaut de manger du frais, on boira du local. y

le vice-président d’Air Transat assure que Daniel Vézina s’est impliqué tout au long du suivi de ses recettes pour être sûr qu’elles soient fidèles à ses exigences. Et le résultat est là, selon le chef québécois, qui se dit aussi surpris que nous de voir la qualité des plats surgelés. Reproduire en grand volume «J’ai visité leurs usines et j’ai vu qu’ils étaient capables de bien cuire le riz et les pâtes, donc je me suis dit que ça irait! plaisante Vézina. La surgélation des plats se fait en cinq minutes. Les couleurs et les saveurs sont préservées pendant le réchauffement. Le résultat est plus beau qu’avec une cuisson ou une pasteurisation sous vide, et on perd à peine 10% des saveurs. Fleury Michon a la capacité de reproduire en grand volume des plats, tout en les surgelant; c’est vraiment une marque spécialisée dans la standardisation qui respecte la qualité.» En créant ses recettes, le chef gardait en tête la volonté de préserver un bel aspect visuel dans les plats malgré la surgélation et le réchauffement. Pour le lancement du partenariat, le président de la compagnie aérienne et Daniel Vézina sont montés à bord d’un vol Montréal-Paris: «On a offert nos plats aux 370 passagers. Les Européens notamment étaient très satisfaits!» Mais le lancement mis à part, les plats Vézina ne sont proposés qu’à la classe club – on peut s’en procurer en classe éco, mais dans la limite des quantités disponibles et à condition de payer 25$ en sus. «C’est un rapport qualitéprix extraordinaire», commente le chef. Idem chez Air France, où le menu Daniel Boulud n’est proposé qu’en classe business.

(EN HAUT) BRAISÉ DE GIGOT D’AGNEAU (EN BAS) MOUSSAKA VÉGÉTARIENNE, DE DANIEL VÉZINA

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JFK, OBSÉDÉ? MOTS | FRANCO NUOVO

PHOTO | DREAMSTIME


LIVRES 47 VOIR QC

Au bureau, les livres s’accumulent rapidement. Sur la table, les nouveaux arrivages s’amoncellent. Dernières sorties du printemps ou premières de l’été… elles sont là. Des romans, des essais sur le droit à l’image, des récits sur les femmes pirates… sont empilés. Il y a beaucoup de «rejets» aussi. En général, je passe sans trop regarder. Or, là, mon œil a été attiré par une photo de couverture traitée au filtre bleu. Une des fameuses photographies où on voit John F. Kennedy et Jacky en bermudas accroupis sur leur voilier en gîte, les voiles bien gonflées. Les lettres JFK en blanc couvrent le tiers de la page, et en superposition, ce titre intrigant et un peu jaune: une histoire sexuelle. Toujours est-il que, humain curieux, attiré probablement par le mot «sexuelle», j’ai pris le bouquin dans mes mains pour voir de quoi il en retournait. Tellement de choses ont été dites et écrites sur ce président des États-Unis, que pouvait-on encore en révéler? En quatrième de couverture, entre autres ces mots: «Derrière la légende que célèbrent les magazines se cache cependant une réalité moins glamour: celle d’un don Juan prisonnier d’une véritable addiction sexuelle, qui collectionne de façon obsessionnelle les conquêtes.» Des potins? Nouveaux? Et je me suis mis à feuilleter comme on feuillette un peu honteusement le Gala au Kiosque à journaux. En fait, en m’y attardant, j’ai réalisé que cet ouvrage – cet essai, ce récit – était écrit par un ancien diplomate, avocat, docteur en science politique et ancien élève de l’ENA, Georges Ayache, qui s’est déjà commis en écrivant plusieurs ouvrages sur les États-Unis. Et j’ai mis JFK: une histoire sexuelle dans mon sac avec l’idée de satisfaire mon plaisir coupable. Avec qui John, dit Jack, avait-il couché à part quelques actrices et Marilyn? En fait, Ayache, si on en croit ce qu’il nous présente, s’est lancé dans une quête exhaustive des liaisons du président. Cet ouvrage qui n’est pas particulièrement bien écrit et plutôt bizarrement construit s’enfonce de chapitre en chapitre dans un va-et-vient quelquefois ridicule. Ce qui provoque, inévitablement, page après page, une certaine lassitude et une impression de déjà-vu. S’il y a cependant des éléments aussi intrigants qu’intéressants, il y a aussi cette amorce quelque peu dérangeante qui fait de ce coureur de jupons notoire «un malade sexuel… à la libido dangereusement hypertrophiée jusqu’à la maniaquerie sexuelle». On se calme! D’autant plus que, du coup, l’auteur écarte les liens troublants qui, bien souvent, que ce soit chez un Clinton ou un Berlusconi ou un empereur de la Rome antique, se tissent entre le pouvoir et un appétit démesuré pour le cul.

VO2 #O7

JFK: une histoire sexuelle pourrait être considéré comme un banal récit. Or, c’est plutôt un étalage des frasques du fils de Joe Kennedy, cet Irlandais catholique qui, semble-t-il, a élevé ses fils dans un esprit de compétition et de conquête féminine. Et on commence dès son plus jeune âge, en s’attardant sur ses grands amours, en se nourrissant au vivier hollywoodien qui fourmille de jeunes actrices, en stoppant la plupart du temps chez Sinatra à Vegas, en plongeant au passage dans une mer de mondaines et de strip-teaseuses, jusqu’à Jacky et après Jacky, jusqu’à la MaisonBlanche et dans la Maison-Blanche. Si par moment tout ça m’est apparu un peu répétitif, certains passages, et pas nécessairement ceux concernant sa relation avec Marilyn dont on ne nous a pratiquement rien caché, sont plus intrigants, voire fascinants. On a souvent fait référence aux liens étranges entre Kennedy et la Cosa Nostra. Probablement même que sans la mafia, le sénateur John Kennedy ne serait jamais devenu le 35e président des États-Unis, et ce, même si quelques années plus tard son frère Bobby, alors ministre de la Justice, devait déclarer une guerre sans merci au crime organisé. Bref, c’est certainement cette accession au pouvoir suprême de John Fitzgerald Kennedy et son rapport presque intime avec un des parrains de la mafia, Sam Giancana, qui demeurent les plus déconcertants. Là aussi, il s’agit d’une histoire de femme puisque les deux hommes ont conservé des liens étroits grâce à une maîtresse commune, Judith Campbell. Les chapitres mettant en scène cette jolie brune qui n’était guère très spectaculaire sont les plus captivants puisqu’ils étalent ouvertement la connivence entre le pouvoir politique et le pouvoir criminel. En fait, je comprends pourquoi, aujourd’hui encore, Kennedy exerce une fascination. Tous les ingrédients nécessaires à un scénario efficace étaient alors réunis: l’argent, l’ambition, des personnages horsnorme, les femmes, leur beauté, la cupidité, les magouilles, le pouvoir, le sexe et l’amour… Tout, tout, tout était là. Bon, je ne vous dis pas de vous précipiter sur ce curieux bouquin, mais il est étonnant de constater à quel point quelquefois, par le hasard ou la manipulation, la réalité dépasse la fiction. y

JFK: UNE HISTOIRE SEXUELLE GEORGES AYACHE Rocher, 2017, 260 pages

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Sur les rayons

Sur les rayons

AU GRAND SOLEIL CACHEZ VOS FILLES ABLA FARHOUD

L’ORDRE DU JOUR ÉRIC VUILLARD

VLB, 2017, 232 pages

Actes Sud, 2017, 151 pages

Près de 20 ans après Le bonheur a la peau glissante, Abla Farhoud entreprend le chemin inverse quant à ses origines. Elle qui a peaufiné une œuvre hautement littéraire sous le signe de l’immigration nous propose ici un roman ancré dans le Liban de son enfance et celui de sa redécouverte. Une famille installée à Montréal depuis plus d’une quinzaine d’années revient au pays pour y chercher l’ombre rédemptrice sous les cèdres de ce pays du grand soleil. Avec Au grand soleil cachez vos filles, Abla Farhoud livre ici un roman près d’elle, mais dont elle parvient pourtant à extirper l’universalité. À sa lecture, il nous semble évident que le roman est aussi important pour elle qu’il l’est pour son œuvre.

Éric Vuillard est un homme brillant. Lui qui, sous l’égide de courts romans, réécrit l’histoire en la mariant à la fiction parvient pourtant à construire de publication en publication une œuvre incroyablement cohérente et intelligente sur notre façon de concevoir l’histoire et la vérité. Sans se peinturer dans un coin en tant que «déboulonneur» de mythes, il n’en demeure pas moins que Vuillard a cette façon d’entrer dans l’Histoire avec un angle social et humain qui fait exploser notre rapport aux faits. Après un livre sur le charcutage des frontières du continent africain, un sur la bassesse entrepreneuriale de Buffalo Bill, ainsi qu’un sur les errances de ruelles en plein cœur de la Révolution française, il récidive cette fois dans l’antichambre de la Seconde Guerre mondiale.

Ils arriveront au village par délégation, sur des vols séparés. Certains reviennent à la maison, d’autres découvrent le pays de leurs ancêtres. Youssef n’a jamais quitté le Liban, il est le cousin facilitant ce retour au bercail. Cousin du patriarche, il ira, une à une, chercher les cohortes à l’aéroport. Construit comme un roman choral dont on ne sent absolument pas la lourdeur du mécanisme, l’histoire se déplie sous différents regards, sous différentes vérités. Ikram n’a jamais connu le Liban dont son père parlait tant. Elle qui étudiait pour devenir actrice à Montréal n’a laissé ni ses rêves ni sa détermination de l’autre côté de l’océan, au grand dam de ses parents. Abid, lui, est un homme brisé, celui dont on parle peu, espérant ne pas faire ressurgir les erreurs du passé. Le retour au pays n’est pour lui qu’un automatisme du clan, dont il suit les directives sans mot dire. Et Faïzah, la sœur matrone, à qui on ne dit jamais merci, mais sans qui la maisonnée ne saurait survivre. Si plus on avance dans le roman d’Abla Farhoud, plus on se rend compte que ce qui semblait une quête initiatique se transformera pour tous en un chemin de croix aux conclusions bien personnelles, jamais les arcs narratifs ne sont dessinés au gros marqueur. La finesse de Farhoud dans la construction de ce roman concis est épatante. Au détour, on y retrouvera un Moyen-Orient où Nasser fait ses premières armes, ces années 1960 de tous les possibles, ainsi que ce choc extrêmement violent entre deux visions sociales et conjugales qui n’ont rien de complémentaire. (Jérémy Laniel)

Avec L’ordre du jour, Éric Vuillard s’intéresse à l’annexion de l’Autriche par l’Allemagne en 1938, un an avant le début des hostilités. Sans nécessairement présenter cet événement comme la seule bougie d’allumage du conflit comme certains sont tentés de le faire avec l’assassinat de François Ferdinand à Sarajevo, il souligne tout l’impact, mais surtout, il démontre à quel point la passivité des gouvernements européens de l’époque, jumelée à l’intelligence d’Adolf Hitler et d’Hermann Göring, ne formait qu’un cocktail des plus explosifs. S’intéressant ainsi à l’Anschluss, Vuillard nous ouvre les portes closes du pouvoir: des rencontres de 1933 regroupant les grands entrepreneurs allemands de l’époque pour asseoir une élection législative sur une bonne cagnotte électorale jusqu’aux réunions avec les leaders européens, l’auteur nous permet une entrée concise, mais hautement pertinente, dans les coulisses du pouvoir. Si l’Anschluss est un point de départ, cette union d’un grand Reich germanophone est d’une importance majeure et Vuillard l’a déconstruit avec brio. Il redonne aux acteurs et aux potiches de l’époque les rôles qui leur reviennent, proposant ainsi dans un concis roman une plongée en bonne et due forme au centre d’un événement nécessaire et trouble de l’histoire du 20e siècle. Sa force de synthèse est inégalée au cœur des lettres françaises et l’auteur parvient au détour d’une phrase à placer les pions, à désamorcer une situation avant d’y mettre le feu. Non pas sans style, l’œuvre de Vuillard en est une équilibrée, où tout semble reposer à sa place. Sans jamais tomber dans le jugement de ses protagonistes, malgré sa connaissance des conséquences, il laisse à l’intelligence de ses lecteurs le soin d’errer dans les méandres d’une catastrophe à venir. (Jérémy Laniel)


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(CI-CONTRE) LAGRENÉE, JEAN-JACQUES. LA MISE AU TOMBEAU, 1770. HUILE SUR TOILE, 155,2 X 205 CM. COLLECTION DU MNBAQ, ACHAT. RESTAURATION EFFECTUÉE PAR L'INSTITUT CANADIEN DE CONSERVATION DU MINISTÈRE DU PATRIMOINE CANADIEN (1970.115) PHOTO | MNBAQ, PATRICK ALTMAN

(EN HAUT, À DROITE) LOUIS II DE BOULOGNE (PARIS, 1654 – ID., 1733). LA PRÉSENTATION AU TEMPLE, 1688. HUILE SUR TOILE, 274 X 213 CM. MONCTON, MUSÉE ACADIEN DE L’UNIVERSITÉ DE MONCTON, NB (69-6-41) PHOTO | MONCTON, MUSÉE ACADIEN DE L’UNIVERSITÉ DE MONCTON, ADAM KARPOWICZ

(EN HAUT, À GAUCHE) JOSEPH LÉGARÉ (QUÉBEC, 1795 - QUÉBEC, 1855), D’APRÈS GIACINTO CALANDRUCCI (PALERME (ITALIE), 1646 - PALERME (ITALIE), 1707), L’APOTHÉOSE DE SAINT PAUL OU LE RAVISSEMENT DE SAINT PAUL, 1822. HUILE SUR TOILE, 220 X 150 CM. TROIS-RIVIÈRES, ÉVÊCHÉ. RESTAURATION EFFECTUÉE PAR LE CENTRE DE CONSERVATION DU QUÉBEC PHOTO | CCQ, MICHEL ÉLIE


ARTS VISUELS 51 VOIR QC

VO2 #O7

LA NAISSANCE DE L’ART C’EST BIEN PLUS QU’À UNE EXPOSITION D’ŒUVRES RELIGIEUSES QUE NOUS CONVIE LE MUSÉE NATIONAL DES BEAUX-ARTS DU QUÉBEC AVEC LE FABULEUX DESTIN DES TABLEAUX DES ABBÉS DESJARDINS: C’EST CARRÉMENT À LA NAISSANCE DE L’ART QUÉBÉCOIS. MOTS | CAROLINE DÉCOSTE

Avec les églises qui se vident (entre autres de leurs tableaux, on en parlera plus loin) et la baisse de popularité de la religion, il peut paraître surprenant de présenter une exposition de taille consacrée à l’art religieux en 2017. Pourtant, les tableaux présentés dans cette expo d’envergure au MNBAQ, et surtout la fascinante histoire qui se cache derrière, sauront captiver le spectateur contemporain, dévot ou pas.

susciter la dévotion chez les fidèles, ils cherchent une solution. Philippe-Jean-Louis, qui a étudié en France, y retourne pour acheter des œuvres. «Après la Révolution française, les églises ont été spoliées, vidées de leurs tableaux. Tout ce qui n’a pas été retenu par le Louvre ou les musées de province a été mis en vente. Il y a alors sur le marché de l’art français des centaines d’œuvres religieuses en vente», relate Daniel Drouin.

Petit voyage dans le temps

Le premier abbé Desjardins y trouve là la solution à son problème… et une belle occasion d’affaires. Entre 1802 et 1810, il achète près de 200 tableaux, peints aux 17e et 18e siècles, «ce qui constitue alors le plus important lot d’art religieux hors de France de cette époque», dans le but de les revendre aux églises québécoises. Philippe-Jean-Louis Desjardins devient alors, en quelque sorte, le premier marchand d’art au Québec.

2017-1817: voilà 200 ans que l’homme d’Église Philippe-Jean-Louis Desjardins a entrepris d’expédier au Canada les quelque 200 tableaux sur lesquels il a mis la main après la Révolution française. Comme le raconte avec passion Daniel Drouin, conservateur de l’art ancien au MNBAQ et cocommissaire de l’exposition, il faut replacer le tout dans le contexte de l’histoire du Canada et du Québec. «Jusqu’à la prise de Québec, tout l’art est importé de France. Quand les paroisses ont besoin de tableaux pour leurs fidèles, ils les commandent en France. Mais à partir de 1759, le Québec est coupé de la mère patrie. Les rares artistes locaux autodidactes qui prennent des commandes ne suffisent pas à la tâche.» Au début du 19 e siècle, les abbés Desjardins (Philippe-Jean-Louis et son frère, Louis-Joseph) occupent de hautes fonctions dans le clergé québécois. Conscients du manque d’œuvres propres à

L’histoire ne finit pas là Les 120 premiers tableaux arrivent dans le port de New York en 1816. Afin de les dédouaner, un émissaire de l’évêque de Québec est envoyé au port. Il les ramène en carriole, en plein mois de janvier. Pour faire New York-Québec, ça lui prendra des semaines… «Une fois les tableaux arrivés, en mars 1817, il faudra les décaisser, les dérouler, les restaurer, les remonter sur des châssis, les encadrer», énumère

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OBTENIR

PLUS

D’ARGENT POUR PROLONGER LA SOIRÉE CINÉ?

OUI C’EST POSSIBLE!


(EN HAUT) LAGRENÉE, JEAN-JACQUES. L'INCRÉDULITÉ DE SAINT THOMAS, 1770. HUILE SUR TOILE, 156 X 206,6 CM. COLLECTION DU MNBAQ, ACHAT. RESTAURATION EFFECTUÉE PAR L'INSTITUT CANADIEN DE CONSERVATION DU MINISTÈRE DU PATRIMOINE CANADIEN (1970.114) PHOTO | MNBAQ, IDRA LABRIE

(EN BAS) LOUIS DULONGPRÉ (SAINT-DENIS [FRANCE], 1759 – SAINT-HYACINTHE, 1843). LOUIS JOSEPH DESJARDINS, VERS 1802. HUILE SUR TOILE, 65,9 X 51,7 CM. QUÉBEC, AUGUSTINES DE L’HÔTEL-DIEU DE QUÉBEC (2010.1979) PHOTO | CCQ, GUY COUTURE

le conservateur. «Toutefois, il faut se rappeler la réalité artistique du 19e siècle: il n’y a pas d’académie, pas d’école des beaux-arts.» Les artistes responsables de ces tâches délicates proviennent de milieux surprenants: l’un des plus connus est Jean-Baptiste Roy-Audy, un peintre d’enseigne et menuisier, qui se fera la main sur ces tableaux, sans formation artistique. Puisque le frère de Philippe-Jean-Louis, Louis-Joseph, est aumônier des Augustines de l’Hôtel-Dieu de Québec, la chapelle est réquisitionnée pour la cause. Pendant des mois, des curés de province se succéderont dans la chapelle pour acheter des toiles. Un clin d’œil aux marchands du temple? Artiste et copieur Ceux qui n’ont pas les moyens d’acheter des toiles commandent des copies, sans gêne. «À l’époque, les copies sont acceptées par la société. Les artistes se forment en copiant les toiles de maître. Les œuvres ont une valeur didactique, de dévotion avant tout», explique Daniel Drouin. «C’est ainsi que les tableaux des abbés Desjardins permettent la naissance de notre art. Ils sont l’élément déclencheur de la naissance d’un art typiquement québécois, canadien-français.» C’est grâce à la restauration et aux commandes de copies que Jean-Baptiste Roy-Audy, Joseph Légaré, Antoine Plamondon et Théophile Hamel apprendront à peindre et poseront les premiers jalons de l’art en sol bas-canadien.

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PIERRE PUGET (SÉON, 1620 – MARSEILLE, 1694). DAVID CONTEMPLANT LA TÊTE DE GOLIATH, 1671. HUILE SUR TOILE, 206 X 141 CM. QUÉBEC, MUSÉE DE LA CIVILISATION, DÉPÔT DU SÉMINAIRE DE QUÉBEC (1991.635). PHOTO | CCQ, JACQUES BEARDSELL


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En regardant de plus près Ă la fois les Ĺ“uvres originales et les copies (souvent de tableaux dont on a perdu la trace ou qui ont ĂŠtĂŠ dĂŠtruits), on remarque certains dĂŠtails ĂŠtonnants. Plusieurs ont ĂŠtĂŠ ÂŤaugmentĂŠesÂť (on a prolongĂŠ la scène) pour s’accorder avec d’autres tableaux de grande taille, comme Saint François de Paule ressuscitant un enfant de Simon Vouet, peintre Ă la cour de Louis XIII. Jouxtant le tableau de Vouet, la copie de Joseph LĂŠgarĂŠ donne une idĂŠe des vraies couleurs de l’original, ayant ĂŠtĂŠ peinte avant que la toile de Vouet ne soit restaurĂŠe. De mĂŞme, les trois Marie-Madeleine cĂ´te Ă cĂ´te montrent qu’à la demande de l’Êglise, on a ajoutĂŠ des ÂŤrepeints de pudeurÂť aux copies, afin de cacher les bras nus et la forme des seins. Celle de Roy-Audy, la plus habillĂŠe, pleure beaucoup plus que ses deux comparses!

ÂŤAPRĂˆS LA RÉVOLUTION FRANÇAISE, LES ÉGLISES ONT ÉTÉ SPOLIÉES, VIDÉES DE LEURS TABLEAUX. TOUT CE QUI N’A PAS ÉTÉ RETENU PAR LE LOUVRE OU LES MUSÉES DE PROVINCE A ÉTÉ MIS EN VENTE.Âť Savoir bien dĂŠcrocher Pour prĂŠsenter la sĂŠlection d’une quarantaine de tableaux français et d’une vingtaine de copies quĂŠbĂŠcoises, le MNBAQ a dĂť rĂŠaliser une opĂŠration dĂŠlicate de dĂŠpose, c’est-Ă -dire de dĂŠcrochage de tableaux dans plusieurs ĂŠglises. Une tâche colossale: non seulement certaines Ĺ“uvres sont de très, très grand format, mais elles sont parfois accrochĂŠes Ă plusieurs mètres au-dessus du sol. ÂŤNous en avons dĂŠcrochĂŠ 32 dans des chapelles et ĂŠglises du QuĂŠbec, avec une ĂŠquipe de 10 personnes. Il a fallu enlever certains encadrements qui ne passaient pas dans les portes!Âť Une aventure si incroyable que le Monastère des Augustines a mĂŞme diffusĂŠ le dĂŠcrochage en live sur Facebook en mai dernier. Ou quand l’histoire rencontre la modernitĂŠ, surfant sur 200 ans de patrimoine artistique et religieux. y Jusqu’au 4 septembre au MusĂŠe national des beaux-arts de QuĂŠbec

0OUR BIEN COMMENCER LA SOIRĂ?E AVEC UN BON REPAS

UN IDĂ?AL POUR LES AMATEURS DE SPECTACLES 3ITUĂ? ĂŒ DEUX PAS DE LA 3ALLE !LBERT 2OUSSEAU


56 CHRONIQUE VOIR QC

VO2 #O7

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ALEXANDRE TAILLEFER DE LA MAIN GAUCHE

À LA PÊCHE AU SAUMON C’est assis dans la salle à manger d’un camp de pêche d’Islande que j’entame cette chronique. Entouré de presque tous mes copains les plus proches, je passe quelques jours chaque année sur une rivière, la plupart du temps québécoise, pour y pêcher le saumon. C’est une pêche sportive magnifique qui fait maintenant partie de mes traditions. J’ai la chance d’appartenir à ce groupe d’une dizaine de copains avec qui j’ai fait les 400 coups, avec qui je ne compte plus les fois où l’on a réinventé le monde autour d’un repas, sans avoir auparavant fait le tour de nos exploits de la journée. Je mouche aujourd’hui avec assurance. Le geste est franc, plus confiant. La mouche se dépose là où je le veux. Douze ans, peut-être quinze, ne m’ont toutefois pas apporté une plus grande garantie de succès. Le saumon est une espèce particulière. Les raisons sont multiples, toujours différentes: «Lève ta canne plus haut», «L’eau a monté trop vite», «Tire sur ta ligne doucement par gestes courts», ou l’inverse. Ça se conclut souvent par: «Viens, on va changer ta mouche.» Quand le saumon vient finalement mordre, le combat rend l’homme aux aguets, puis lorsqu’il le gagne, très fier. Les plus jeunes saumons sont souvent les plus combatifs. La dextérité et la patience feront la différence. Nous relâchons la majorité de nos prises, mais en conservons toujours une ou deux pour prouver à nos épouses que nous étions bel et bien à la pêche cette année et que nous aurions été utiles et donc bons à marier au temps des hommes des cavernes alors que la survie de la famille en dépendait. Ce sont des journées qui appellent à la contemplation et aux réflexions. L’air frais emplit mes poumons et impacte sur mon activité cérébrale. C’est l’heure des bilans, des pensées qui virevoltent et viendront nourrir mes idées et mes opinions.

Je réfléchis depuis quelques jours à l’identité. Philippe Couillard, qui est aussi un pêcheur à la mouche, a certainement dû passer quelques jours à taquiner des fosses à saumon avant d’établir les grandes lignes de ce que contient Québécois, notre façon d’être Canadiens, un livre bien étayé que j’ai lu en quelques heures et qui explique limpidement la position libérale quant aux conditions requises pour que l’erreur historique qui nous a exclus soit finalement corrigée. Ce que n’a vraisemblablement pas pris la peine de faire Justin Trudeau, qui a refermé le couvercle de la marmite constitutionnelle l’instant même de la publication du texte en question. Réuni au lunch avec mes copains pêcheurs, je lance le débat: «Qu’est-ce qui pourrait régler le débat constitutionnel et faire adhérer le Québec une fois pour toutes au Canada?» L’enthousiasme est mitigé, voire absent. On ne croit plus à cette possibilité, une révision constitutionnelle impliquant selon plusieurs de satisfaire d’innombrables autres réclamations de la part de nombreux tiers, qui rendrait une entente impossible. Le fils de Pierre Elliott Trudeau ne pourra pas corriger la gifle que son père a donnée au Québec en 1982. On préfère reparler de notre journée de pêche, des femmes de nos vies, avant de se raconter pour une énième fois ces fameuses histoires que l’on a vécues ensemble, en riant toujours davantage. Le vin aidant, on entonne quelques chansons que l’on connaît tous par cœur: Bélanger, Offenbach, Flynn... La radio a rempli nos têtes de leurs paroles. L’identité, ce sont ces traditions qui se développent, ces chansons que l’on fredonne à l’unisson en les ayant pourtant retenues individuellement bien avant que la pêche ne nous unisse. Avant-hier, dans un piano-bar de Reykjavik, nous constations la beauté et la richesse d’une culture différente mais tout aussi riche que la nôtre quand tous


CHRONIQUE 57 VOIR QC

VO2 #O7

> les Islandais qui s’y trouvaient ont entamé ensemble, comme nous-mêmes la veille, des airs qui nous étaient pourtant inconnus. Je suis retourné moucher, en réfléchissant à la différence entre une nation et une société distincte. J’étais pas mal mélangé. Et plus convaincu que jamais que la protection de notre identité ne passe pas par une reconnaissance juridique où nous chercherons à en obtenir plus que les autres provinces. Nous n’y arriverons pas. Parce que chaque province a une identité qui se forge au quotidien et ne comprend pas ce que nous cherchons à accomplir en demandant la reconnaissance de notre différence. Je suis heureux de mon voyage, heureux d’avoir pour une troisième fois visité l’Islande. Retrouvé Jón, mon ami qui gère le camp de pêche de la rivière Grimsa, que je n’avais pas vu depuis six ans. Et compris que la richesse du monde vient de toutes ces cultures qui nourrissent la diversité, que l’essentiel est de s’assurer que nous les protégions comme la prunelle de nos yeux. Comme nous cherchons à protéger toutes les espèces

animales. Le grand piège est d’éviter l’assimilation qui paraît de plus en plus imminente par une culture impérialiste qui détruit tout sur son passage. Je me dis que si le reste du Canada parlait l’islandais, la question constitutionnelle aurait été réglée depuis longtemps parce qu’il aurait compris l’importance de la différence. Le drame est que le reste du Canada parle la même langue que les États-Unis. Puis je me suis demandé si notre véritable objectif en tant que province ne devrait pas être de récupérer de façon administrative tout ce qui nous permettrait de maintenir et même de renforcer notre identité qui s’exprime à travers la culture et les médias, avec au premier rang le CRTC, puis Radio-Canada, Téléfilm et j’en passe. Je suis fier d’être Canadien, je crois à la force d’une confédération qui se distingue catégoriquement des États-Unis par ses valeurs progressistes communes, mais en même temps, je chéris mon identité francophone, et j’ai de plus en plus de misère à faire confiance au Canada pour la protéger. Je retourne maintenant pêcher, sachant bien que je viens peut-être de sortir l’un de mes plus gros saumons… y

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PHOTO | ANDRÉANNE GAUTHIER

QUOI FAIRE

MUSIQUE

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INGRID ST-PIERRE L’ A N G L I C A N E – 20 J U I L L E T

Ses chansons, même les plus tristes, sont gorgées de lumière et elle irradie de sa présence sur scène. Ingrid St-Pierre promet une fois de plus de nous émouvoir lors de ce récital articulé autour de Tokyo, sa plus récente offrande sur disque.


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FLUME P L A I N E S D ’ A B R A H A M – 12 J U I L L E T

Le compositeur, producteur et DJ (tout sauf statique, précisons-le) australien promet de secouer la plus grande scène du Festival d’été de Québec. Un mélodiste hors pair qui a su transgresser les frontières de l’EDM avec ses deux albums très accrocheurs.

VAL THOMAS F O U-B A R – 8 J U I L L E T

Un folk aigre-doux, des chansons livrées dans un mélange d’intensité et de douceur… L’auteure-compositrice-interprète Val Thomas nous touche droit au cœur avec sa musique introspective mais rassembleuse.

LE COULEUR P L A C E D E L’ A S S E M B L É E N AT I O N A L E – 9 J U I L L E T

Le Festival d’été de Québec, c’est aussi des spectacles gratuits de qualité supérieure. Le trio disco Le Couleur montera sur la scène voisine à la fontaine peu après le tour de chant du non moins excellent Geoffroy. Une belle soirée électro à prévoir!

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PHOTO | ANTOINE LA ROCHELLE


PHOTO | DRAGOS CHIRIAC

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GHOSTLY KISSES

GABRIELLE SHONK

M N B A Q – 26 J U I L L E T

P L A I N E S D ’ A B R A H A M – 10 J U I L L E T

Margaux Sauvé, chanteuse et violoniste, a transformé son chagrin en musique apaisante. Des compositions enrobées de bidouillages électroniques dans l’air du temps.

Maintenant signée sous Universal Music Canada, la folkeuse au bagage vocal jazz a le vent en poupe. Elle se produira juste avant Kelsea Ballerini, nouvelle coqueluche du country américain, et Lady Antebellum. Un triple plateau tout en voix!

D.R.I. I M P É R I A L B E L L – 30 J U I L L E T

Le retour des Dirty Rotten Imbeciles dans le paysage musical après presque 20 ans d’absence ravira les amateurs de thrash métal et de punk hardcore. Ce groupe, pionnier de la musique thrash, s’arrêtera pour une rare visite au Canada. Accrochez-vous, beaucoup de mosh pits sont à prévoir!

VANCE JOY SCÈNE DESJARDINS (LÉVIS) – 1ER AOÛT

L’auteur-compositeur-interprète australien inaugure le Festivent avec sa folk gentille mais accrocheuse à souhait. Un grand événement pop qui viendra rythmer la paisible banlieue, le quartier lévisien de Saint-JeanChrysostome.


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GALA D’OUVERTURE SOUS LES ÉTOILES C O U R D U P E T I T S É M I N A I R E – 24 J U I L L E T

Le 7e Festival d’opéra de Québec commence en force avec les solistes Lyne Fortin, Magali Simard-Galdès, Julie Boulianne Antoine Bélanger, Antonio Figueroa et Éric Thériault, Christopher Dunham et Jean-François Lapointe. De solides chanteurs réunis pour interpréter «les plus grands airs», rien de moins, du répertoire lyrique.

$ÏLICES

DgAILLEURS ET DgICI

JACQUES GREENE L E C E R C L E – 14 J U I L L E T

Feel Infinite, le premier album complet de Jacques Greene, fait suite à une série de EP, singles et remix géniaux. L’as de la house tantôt dance, tantôt oniriques se produira dans le cadre de l’événement Signaux de nuit. C’est gratuit!

AMADOU & MARIAM P L A C E D ’ Y O U V I L L E – 14 J U I L L E T

Ambassadeurs de choix pour le Mali, musiciens d’exception, le duo Amadou & Mariam fait des vagues partout où il passe. En raison de son engagement sociopolitique, bien sûr, mais aussi de son groove indéniable.

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PHOTO | HASSAN HAJJAJ

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62 QUOI FAIRE VOIR QC

VO2 #O7

O7 / 2O17

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CHOCOLAT IMPÉRIAL BELL – 13 JUILLET

Emmanuel Ethier, Jimmy Hunt et leurs comparses nous font Rencontrer Looloo, ce «genre de Dieu transgenre» qui leur inspire le hard rock négligé de leur troisième opus. Un autre spectacle, de fin de soirée celui-là, à voir dans le cadre du FEQ.

ANDY SHAUF IMPÉRIAL BELL – 15 JUILLET

L’auteur-compositeur-interprète saskatchewanais ne fait pas dans le folk ordinaire. Orchestrées avec goût et finesse, ses chansons apaisent le cœur autant qu’elles stimulent les oreilles.

LOUD LE CERCLE – 8 JUILLET

Membre du groupe Loud Lary Ajust, le rappeur montréalais a fait grand bruit en avril dernier lorsqu’il a fait paraître son EP New Phone. Propulsé par le succès estival 56K, le mini-album de quatre chansons figure parmi les meilleures parutions hip-hop locales de l’année. Dans le cadre de Signaux de nuit, il sera accompagné par Shash’U, David Lee et Morpheus’ Arms.


QUOI FAIRE 63 VOIR QC

VO2 #O7

O7 / 2O17

KING CRIMSON CENTRE VIDÉOTRON – 7 JUILLET

VĂŠritable groupe mythique du prog-rock qui a vu passer certains des musiciens les plus talentueux de leur gĂŠnĂŠration dans ses rangs, King Crimson offre en ce moment Ă ses fans une tournĂŠe mondiale dans une formation assez inusitĂŠe: en plus de la guitare, de la basse, des voix et du saxophone, c’est rien de moins que quatre batteurs qui seront sur scène. Ă€ ne pas manquer!

6OUS AVEZ UNE SOIRĂ?E ĂŒ ORGANISERx 0ENSEZ #AFĂ? DU -ARCHĂ?

JAZZ CARTIER PA R C D E L A F R A N C O P H O N I E – 11 J U I L L E T

Juste après Manu Militari, ce sera au tour du rappeur torontois Jazz Cartier de montrer l’Êtendue de son talent aux festivaliers du FEQ. Avec son flow intraitable, celui qui fait sensation partout au Canada depuis la parution de sa première mixtape Marauding in Paradise en 2015 mettra la table pour le populaire trio trap Migos, qui terminera cette soirĂŠe au parc de la Francophonie.

POIRIER M É D U S E – S A L L E M U LT I – 8 J U I L L E T

Les rythmes tropicaux du beatmaker montrĂŠalais promettent une soirĂŠe dansante et joyeusement dĂŠglinguĂŠe dans cette salle climatisĂŠe, le cadre parfait pour pareille manifestation de joie dĂŠgoulinante de sueur.

PIERRE FLYNN L’ A N G L I C A N E – 29 J U I L L E T

%NTRE AMIS OU EN FAMILLE 2Ă?SERVEZ LE RESTAURANT EN SOIRĂ?E 'ROUPES PRIVĂ?S DE ĂŒ PERSONNES

Le perfectionniste chansonneur nous prÊsente son quatrième bouquet de chansons, album longtemps mijotÊ et sorti en 2015, sans renier le reste de son considÊrable rÊpertoire.

MARIE-CLAIRE LINTEAU MNBAQ – 19 JUILLET ET LE 2 AOÛT

SCĂˆNE

Le jazz vocal est la spÊcialitÊ de cette chanteuse de QuÊbec qui compose aussi. Énergique, la voix emplie de soul, Marie-Claire Linteau se risque même à flirter avec le funk et le blues.

LOUIS RIEL G R A N D T H É ÂT R E D E Q U É B E C – 30 J U I L L E T, 1 E R E T 3 A O Û T

De figure controversĂŠe Ă hĂŠros national rĂŠhabilitĂŠ par certains historiens, le chef mĂŠtis Louis Riel inspire un opĂŠra ĂŠpique Ă la hauteur de son destin peu banal. Il sera interprĂŠtĂŠ par le baryton germanocanadien Russell Braun.

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64 QUOI FAIRE VO2 #O7

O7 / 2O17

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CINÉMA

VOIR QC

ATOMIC BLONDE E N S A L L E L E 28 J U I L L E T

Joyau de la couronne du MI6, l’agente Lorraine Broughton ne modère aucun de ses talents pour réussir ses missions, que ce soit l’espionnage, la sauvagerie ou la sensualité. Envoyée en solo à Berlin pour retrouver un dossier d’une importance capitale, elle fera équipe avec le chef de bureau local du MI6 alors que sa mission se compliquera grandement.


SPIDER-MAN: HOMECOMING EN SALLE LE 7 JUILLET

Sous l’œil vigilant de son mentor Tony Stark, le jeune Peter Parker doit développer ses talents en tant que Spider-Man pour trouver sa place au sein de la communauté des superhéros. Lorsqu’un nouvel adversaire redoutable nommé Vulture sort de l’ombre, le jeune héros devra faire ses preuves alors que tout ce qui lui est cher est menacé.

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DUNKIRK EN SALLE LE 21 JUILLET

Ce film historique raconte l’évacuation de soldats alliés belges, britanniques, canadiens et français qui ont été séparés du reste de l’armée et entourés par les Allemands sur les plages et le port de Dunkerque, en France. Le film relate les événements vécus entre le 26 mai et le 4 juin 1940.

A GHOST STORY EN SALLE LE 28 JUILLET

Dans cette exploration singulière de l’héritage, de l’amour, de la perte et de l’énormité de l’existence, un fantôme mort récemment et arborant un simple drap blanc revient dans sa maison de banlieue pour tenter de reconnecter avec sa femme dépourvue.

THE B-SIDE: ELSA DORFMAN’S PORTRAIT PHOTOGRAPHY EN SALLE LE 28 JUILLET

La photographe portraitiste Elsa Dorfman a découvert son médium en 1980: la gigantesque caméra 20x24 de Polaroïd. À travers les années, nombre de stars du rock, poètes beat et illustres personnalités d’Harvard sont passés par son studio de Cambridge. Alors qu’elle aborde sa retraite, elle livre au réalisateur Errol Morris les secrets de ses archives.

VALERIAN AND THE CITY OF A THOUSAND PLANETS EN SALLE LE 21 JUILLET

ARTS VISUELS

Dans cette adaptation cinématographique de la bande dessinée légendaire, une force sombre menace Alpha, vaste métropole abritant des natifs de 1000 planètes différentes. Les agents Valerian et Laureline devront agir rapidement pour découvrir la source de ce mal et protéger non seulement Alpha, mais l’Univers lui-même.

HERGÉ À QUÉBEC M U S É E D E L A C I V I L I S AT I O N D E Q U É B E C – J U S Q U ’ A U 2 2 O C T O B R E

Le père de Tintin est au cœur de cette exposition rétrospective qui a d’abord été présentée à Paris et à Londres, un corpus de documents rarement montrés comme des dessins et des photographies de l’illustre bédéiste belge.

EXPOSITION COLLECTIVE GALERIE 3 – JUSQU’AU 16 JUILLET

La galerie de la rue Saint-Vallier Est forme une dream team avec quelques-uns des meilleurs joueurs de l’art contemporain québécois: BGL, Cooke-Sasseville, Annie Baillargeon, Doyon-Rivest, Mathieu Valade et Martin Bureau. Tant pis pour vos REER!



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