MONTRÉAL VO2 #1O | OCTOBRE 2O17 LOUIS-JOSÉ HOUDE WILD WEST SHOW KARINE GONTHIER-HYNDMAN 10 ANS DE DHC/ART YANNICK NÉZET-SÉGUIN KEITH KOUNA MAUDE AUDET DARAN PIEDS NUS DANS L’AUBE FNC / DENIS CÔTÉ SUR LA LUNE DE NICKEL RESTOS ET GENTRIFICATION À LA TABLE DES PREMIÈRES NATIONS
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DENIS VILLENEUVE
YOGA AU SOMMET Tous les jeudis matins 7h30 Yoga & Brunch les dimanches matins à 10h 8-15-29 Octobre & 19 Novembre
Découvrez un contenu historique riche et inusité sur les racines et la modernité de Montréal ! Une visite guidée avec l’historien Laurent Turcot
Histoire du vin Les Whiskys Mixologie 101 Et bien d’autres !
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MONTRÉAL | OCTOBRE 2017
RÉDACTION
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PHOTO COUVERTURE Jocelyn Michel | leconsulat.ca
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«C’EST QUE LE FILM, EN SOI, VALAIT LA PEINE D’ÊTRE FAIT, POUR SA POÉSIE ET SA PHILOSOPHIE IDENTITAIRE PRESQUE PARANOÏAQUE.» Photo | Jocelyn Michel (Consulat) Assistant | Renaud Lafrenière Maquillage | Sophie Parrot Production | Martine Goyette (Consulat)
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SCÈNE Louis-José Houde Karine Gonthier-Hyndman Wild West Show
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MUSIQUE Yannick Nézet-Séguin Maude Audet Daran Keith Kouna
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CINÉMA Pieds nus dans l’aube Denis Côté (FNC) Sur la lune de nickel
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ART DE VIVRE À la table des Premières Nations Gentrification et restos
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LIVRES Du conte à la fable Julie Mazzieri: La Bosco Naomi Fontaine: Manikanetish
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ARTS VISUELS 10 ans de DHC/ART
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QUOI FAIRE CHRONIQUES Simon Jodoin (p6) Émilie Dubreuil (p18) Monique Giroux (p34) Normand Baillargeon (p48) Alexandre Taillefer (p66)
6 CHRONIQUE VOIR MTL
VO2 #1O
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SIMON JODOIN THÉOLOGIE MÉDIATIQUE
TAXI SPLEEN ILLUSTRATION | ERIC GODIN
Je suis d’avis que les chauffeurs de taxi ont besoin d’un peu d’amour par les temps qui courent. C’est que depuis quelques années, ils mangent toute une volée de bois vert. Ils sont devenus les punching bags d’une sorte de frustration de l’homo numericus qui s’indigne devant tout ce qui n’est pas branché sur ses préférences et son profil d’utilisateur. Moi, j’aime le taxi. Je ne vous le dis jamais, car vous me diriez que je me frotte sur mon boss, le Dragon, qui signe une chronique à la fin de ce magazine et qui est aussi propriétaire d’une entreprise de taxis. Comprenez mon désarroi, si je vous parle des taxis, on pensera que je lui fais une job de relations publiques. Si je ne vous en parle pas, on pensera que je suis contraint au silence. Allez choisir. Je suis mal foutu anyway. Vous penserez bien ce que vous voudrez, mais bon, j’aime le taxi, comme je vous disais. J’ai le même numéro de téléphone depuis près de 20 ans que je compose dès que je veux commander une voiture. Je me souviens même qui me l’a donné. Une amie, décédée trop jeune depuis, m’avait laissé une carte d’une compagnie collée sur la porte du frigo avec un aimant. Avant d’avoir ce repère affiché dans ma cuisine, j’ouvrais tout bonnement le bottin, toujours à la même page, pour trouver ces précieuses annonces qui épousaient souvent la forme des luminaires posés sur les toits des voitures. Hochelaga, Coop, Diamond, Champlain, des noms enracinés dans mon patrimoine. Ensuite, j’ai fini par apprendre par cœur le numéro de téléphone laissé par cette amie sur mon frigo. Je ne l’ai jamais oublié. Sans doute un effet de la providence, car le bottin téléphonique allait bientôt disparaître. Fin d’une époque. J’aime le taxi. Beaucoup. Dans toutes les villes où je vais, j’aime prendre un taxi. Je l’attends avec impatience à l’aéroport ou à la gare avec mes valises. C’est ma porte
d’entrée, mon premier contact. Le chauffeur, c’est le premier que je rencontre. Une sorte d’ambassadeur de la faune urbaine. Dans tous les endroits du monde où j’ai pu me promener, j’ai au moins un souvenir d’une course en taxi. Au Québec, j’en ai des centaines. J’aime regarder arriver dans la nuit les lumières de tou tes les couleurs sur les voitures. J’aime cette incertitude, faire un signe de la main, se demander s’ils ou elles vont s’arrêter, ouvrir une portière pour découvrir une sorte d’univers habité par son chauffeur, la musique, le match de sport qu’il écoute pour passer le temps. J’aime ce sentiment d’être étranger, de dépendre un peu du hasard, de ne pas être maître de la situation. J’aime de tout cœur cet inconfort. Puis-je vous dire, un peu, combien vous me faites chier avec tous vos gadgets qui fabriquent un monde à partir de vos préférences, vos algorithmes, votre géolocalisation qui ne laisse plus rien au hasard, vos applications qui me disent à l’avance le nom du chauffeur, sa couleur de peau, la taille de ses chaussures et le temps qu’il me reste avant d’arriver à destination? Puis-je vous dire comment je m’ennuie avec tous ces cossins intelligents, à la fine pointe de la technologie, qui m’appellent par mon nom, comme si on se connaissait, qui me demandent où je veux aller, d’où je veux partir et quelle est ma recette favorite de crêpes aux bananes au cas où on passerait devant un commerce participant qui vend justement du sucre en poudre? Dans toutes ces discussions sur l’industrie du taxi, ce qui me fatigue le plus, c’est cette suffisance qui s’exprime avec tant d’aisance lorsque vient le temps de gueuler au service à la clientèle du taxi traditionnel. Je ne sais plus comment ç’a commencé, il y a quelques années, mais toutes les doléances sont apparues en même temps. Le taxi est devenu, d’un seul coup, le véhicule de toutes les frustrations, le symbole même de notre retard sur ce grand projet du monde numérique qui est en marche.
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Dans ce torrent de plaintes, on pointe les voitures qui sont toutes croches, ces chauffeurs qui parlent trop fort, qui se trompent de chemin, qui parlent au téléphone. Ça brasse, ça rebondit, les amortisseurs usés comme ma défunte mère qui cognent dans les nids-depoule, ils ne sont jamais au bon endroit au bon moment et, allez, n’ayons pas peur des mots, il y a le bruit et l’odeur… Toujours le bruit et l’odeur... Et même le son des marteaux-piqueurs si vous ouvrez la fenêtre. Difficile de ne pas voir dans cette marée de lamentations une condamnation en règle d’un secteur d’activité qui en arrache, où les emplois sont précaires. Toute cette indignation envers les taxis est marquée par un refus catégorique d’entrer en contact avec quoi que ce soit qui nous bouscule dans notre confort singulier. Là où on serait en droit d’espérer un peu de fraternité envers ces aspérités du destin ordinaire, c’est le grand je-me-moi global et universel qui se braque, avec une certitude agaçante, pour passer la sableuse afin de créer un monde d’une platitude désarmante. Comprenez qu’il faut que ce soit bien lisse, bien lubrifié. Il nous faudrait une application pour les gouverner tous. Peu importe où vous débarquez, soyez rassurés, on vous promet la même expérience, on vous protège de l’in-
connu. Partout on vous appellera par votre prénom. Bienvenue à bord, Jimmy! Comment puis-je vous aider aujourd’hui? Je vois dans votre profil d’utilisateur que vous aimez le jazz fusion, laissez-moi rendre votre parcours agréable selon vos préférences. Et n’oubliez pas, en partant, de laisser une appréciation sur votre expérience. Il y a un mot pour ça: l’ennui. Et imaginez-vous donc, comme si ce n’était pas encore assez plate, qu’on nous explique que ce grand progrès ne sera finalisé que lorsqu’on sera parvenu à mettre sur la route des taxis sans chauffeurs. Aucun doute, l’humanité est en route et avance rapidement. Non merci. Moi, j’aime le taxi. Je l’aime comme il est, ou à peu près. Faut-il changer des règles qui datent d’une autre époque? Sans doute. Peut-on améliorer le service et soigner certains irritants? Bien sûr. Mais ce faisant, si au nom de l’efficacité numérique mondiale, nous devons javelliser toutes les bigarrures de l’humanité, pour créer un monde confortable, sans surprise, sans hasard, sans étonnement, oubliez-moi pour toujours. Je vais marcher. y
sjodoin@voir.ca
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ÉLOGE DE LA LENTEUR QUINZE ANS APRÈS SON ENTRÉE FRACASSANTE SUR LA SCÈNE HUMORISTIQUE QUÉBÉCOISE, LOUIS-JOSÉ HOUDE PROPOSE PRÉFÈRE NOVEMBRE, UN SPECTACLE «CRÉÉ DANS UNE URGENCE RAISONNABLE». MOTS | OLIVIER BOISVERT-MAGNEN
PHOTO | ANTOINE BORDELEAU
«Ça devient cliché à entendre, je sais, mais c’est l’œuvre qui me ressemble le plus, celle que je trouve la plus honnête», explique l’humoriste de 39 ans à propos de ce quatrième spectacle en carrière, qu’il considère plus près du récit intime de Suivre la parade, son deuxième, que du vigoureux feu roulant des Heures verticales, son subséquent. L’Apollinarois revendique ici son attachement au mois des morts, celui de l’indolence et du relâchement après l’été qui s’étire. Un paradoxe marqué pour un humoriste verbomoteur à l’énergie scénique bien connue: «C’est dur à croire, mais je suis pas quelqu’un d’euphorique. En m’écoutant parler dans la vie de tous les jours, je me suis rendu compte que j’étais toujours celui qui voulait pas aller à telle place, qui préférait rester chez lui. Je crois que c’est en pratiquant le métier d’écriture que je suis devenu comme ça. À travers les années, j’ai développé une grande capacité de solitude, un grand intérêt pour l’isolement.» Après une ode à la lenteur en introduction, Houde élargit sa thématique et décortique les raisons qui poussent l’humain à avoir peur de mourir. «Mon constat, c’est que cette peur-là vient probablement d’une peur de pas en avoir assez profité. Mais t’sais, c’est pas si simple que ça, en profiter. Qu’est-ce qu’il faut faire dans
la vie pour profiter de tout pis avoir du fun?» demande l’humoriste, avant de poursuivre sur le contenu de son spectacle. «Après ça, je m’intéresse à des sujets plus sociaux, une première dans ma carrière. J’ai même un numéro sur l’eau! Je pensais jamais que ça m’arriverait…» Bref, Préfère novembre n’est pas le spectacle conceptuel qu’il peut laisser sous-entendre. Loin de vouloir se cantonner à un seul sujet, l’artiste réfléchit aussi à la place des femmes dans sa vie, au célibat «passé 35 ans», à la monoparentalité. Des thématiques somme toute originales dans un style d’humour d’observation aux ramifications souvent redondantes. «Je voulais que ce soit personnel, mais y a des histoires là-dedans qui m’appartenaient pas à 100%. Y a un numéro, par exemple, que j’ai dû enlever parce que la personne impliquée dans le récit m’a pas donné l’autorisation de le raconter. Je me suis toujours fait un devoir de demander la permission avant de rendre ça public, à moins que ce soit une vieille anecdote qui s’est déroulée y a 16 ans à Alma à deux heures du matin», nuance-t-il judicieusement. Le plus épuré possible Comme d’habitude, Houde a fait appel à son fidèle metteur en scène Joseph Saint-Gelais.
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Repris à plusieurs sauces depuis, ce style d’humour sans artifices est toujours aussi populaire au Québec, autant dans les galas Juste pour rire qu’au comédie club Le Bordel. Copropriétaire de cette salle inaugurée il y a deux ans, Houde se dit plutôt heureux qu’un endroit comme celui-ci existe à Montréal, une ville qui a mis du temps avant de suivre la tendance des soirées d’humour hebdomadaires en vogue dans les banlieues et les régions depuis plus de 15 ans. «C’est un lieu qui favorise l’écoute. On l’a pensé pour qu’il soit physiquement sans failles. Je dis pas que les shows le sont, mais l’endroit, oui!» blague-t-il.
«C’EST MOI AVEC UN MICRO PIS UN RIDEAU D’OPÉRA EN ARRIÈRE. Ç’A L’AIR DE RIEN DE MÊME, MAIS UN RIDEAU DE QUALITÉ COMME ÇA, ÇA COÛTE CHER EN ESTI...»
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Fan de stand-up classique depuis l’adolescence, cette époque où il louait en boucle les deux seuls spectacles d’humour américain en VHS de son club vidéo, l’humoriste a encore une fois tenu à ce que le décor l’entourant soit le plus épuré possible. «C’est moi avec un micro pis un rideau d’opéra en arrière. Ç’a l’air de rien de même, mais un rideau de qualité comme ça, ça coûte cher en esti... Pas mal plus que des cristi de ballounes pis des cubes avec des trampolines!» Cette recette de spectacle simple, essentiellement axée sur le contenu des blagues et la présence scé nique de l’humoriste, Louis-José Houde la répète depuis son tout premier one-man-show, qui l’a révélé instantanément au grand public. Au tournant des années 2000, cette tendance héritée du comedy club new-yorkais n’avait toutefois pas la cote au Québec. Très précis, voire chirurgical, dans ses études des mécanismes humains, l’artiste s’est rapidement démarqué sur une scène humoristique à bien des égards sclérosée. «Je suis vraiment arrivé dans une transition, alors que l’humour à personnages était encore très fort. Mis à part pour des gars comme Patrick Huard, François Massicotte et François Morency, le stand-up d’observation, c’était relativement nouveau ici, se rappelle-t-il. J’essayais d’amener des nouveaux thèmes... J’avais pas de numéro sur le mariage, mais ça me dérangeait pas de parler de pâte à dents ou de pot de cornichons pendant quatre minutes.»
En manque de plateformes et d’espaces de diffusion il y a moins de 10 ans, la relève occupe une place de choix dans la dizaine de spectacles programmés chaque semaine au Bordel. En découle une proximité plus grande entre les générations d’humoristes. «On crée beaucoup de temps de scène, les gens se croisent beaucoup en coulisses. À titre d’exemple, avant Le Bordel, je devais connaître quatre humoristes de la relève au Québec, alors que maintenant, je dois en connaître plus de 50 par leurs noms, explique-t-il. Ce que j’aime tout particulièrement de la relève actuelle, c’est qu’elle tente pas de plaire à tout le monde. Beaucoup de jeunes humoristes ont construit leur public et se louent eux-mêmes des salles de 200, 300 personnes. C’est très différent de mon époque où tu faisais le tour des bars du Québec et que t’atten dais pendant sept ans de faire le Saint-Denis. Y a comme un entre-deux qui s’est créé, une classe dans le milieu.» Visiblement allumé par l’audace de ses collègues, Louis-José Houde se sert parfois de sa tribune au Bordel pour sortir de sa zone de confort. «J’y vais par essai-erreur, et ce que je remarque, c’est qu’avec moi, les gens ont le “honnnnnn!” très facile. À côté, t’as Mike Ward qui peut dire n’importe quelle obscénité et ça applaudit comme jamais, mais moi, je dis que quelqu’un est un peu grasset et les spectateurs sont déçus. On dirait que ça fait trop longtemps que je suis implanté dans le milieu pour changer de style, et de toute façon, c’est pas quelque chose que je voudrais faire, assure-t-il. Par contre, j’ai une anecdote scatologique que j’voudrais enregistrer et crisser dans une voûte pour que quelqu’un la ressorte à ma mort. J’ai 3, 4 numéros dégueulasses de même à mettre dans mon testament.» y
Préfère novembre 6, 7, 13 et 14 octobre, 3, 4, 10, 11, 17, 18 et 29 novembre, 1, 2, 8, 9, 15 et 16 décembre À l’Olympia
« C’EST DIFFICILE DE
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CENT FOIS SUR LE MÉTIER VOUS LA VERREZ PARTOUT CETTE ANNÉE. POURTANT, IL Y A 5 ANS, KARINE GONTHIER-HYNDMAN ÉTAIT INCONNUE AU BATAILLON. LA COMÉDIENNE DE 33 ANS A PRIS LES CHOSES EN MAIN POUR PROPULSER UNE CARRIÈRE QUI BATTAIT DE L’AILE. PORTRAIT D’UNE TRAVAILLEUSE ACHARNÉE. MOTS | PHILIPPE COUTURE
PHOTO | JULIE ARTACHO
Elle joue les névrosées dans Like-moi! ou la banlieusarde psychorigide dans Les Simone. Dans Toccate et fugue, la plus récente pièce d’Étienne Lepage, elle était la dépressive chronique, en mal d’amour. Cet hiver au Théâtre Denise-Pelletier, changement de ton: elle sera la jeune amoureuse shakespearienne dans Le songe d’une nuit d’été. On a l’impression que Karine Gonthier-Hyndman peut carrément tout jouer. «Ce que j’aime le plus de Karine, c’est cet éclectisme», nous dit son bon ami Jean-Philippe Baril Guérard, qui l’a notamment dirigée dans sa pièce Tranche-cul. «C’est vraiment une belle fille, elle est parfaitement typée pour jouer les femmes fatales, mais elle ne table absolument pas là-dessus; elle cherche vraiment et souvent dans des zones pas nécessairement flatteuses.» Ce qui est certain, c’est qu’elle a soif de jouer des rôles variés, craignant plus que tout d’être cantonnée dans un seul registre. «Quand on est acteur, dit-elle, on peut tout jouer et on veut tout jouer. Rien de pire que de faire à peu près toujours le même personnage.»
Il a pourtant fallu du temps à cette comédienne en pleine possession de ses moyens pour arriver à ce degré d’ouverture et de ferveur. «En sortant de l’école de théâtre, je ne travaillais pas du tout. Sans doute parce que je ne ressentais pas l’urgence et que je n’étais pas encore assez mature. Il m’a fallu des années à me trouver vraiment comme actrice et à trouver en moi le feu, la passion, l’engagement nécessaire à ce métier. À 29 ans, j’étais épuisée et malheureuse de ne pas travailler, j’en avais marre d’une carrière qui stagnait. Mais le feu est apparu, je me suis activée, j’ai trouvé une bonne agente, j’ai fait une tonne d’auditions et les choses se sont passées.» Être actrice, une évidence Du plus loin qu’elle se souvienne, Karine Gonthier-Hyndman a toujours voulu être comédienne. Faut dire qu’il y avait dans la famille un oncle acteur qu’elle observait travailler en se disant que c’était la chose la plus naturelle au monde. «Grandir avec James Hyndman comme oncle, ça m’a montré qu’il était possible de vivre ce métier sans
angoisse, dans la régularité et la sérénité. Il m’a coachée pour mes auditions dans les écoles de théâtre, parce que j’étais terriblement pas ancrée dans mon corps à cette époque, j’étais renfermée, je manquais de souplesse, j’étais complexée. C’était affreux. Il m’a sauvée. On a une belle relation, lui et moi, mais par la suite, on a cultivé une certaine distance professionnelle: je ne voulais pas qu’il se sente responsable de me faire entrer dans ce métier ou qu’il ressente une quelconque pression d’aider sa nièce aspirante actrice.» Née à Ottawa d’un père musicien qui travaille en développement international et d’une mère traductrice qui est aussi peintre à ses heures, la comédienne a pour ainsi dire grandi dans un environnement propice. «J’ai été par exemple initiée très jeune au cinéma d’auteur, dit-elle. C’était aussi très politisé chez moi, avec des discussions corsées autour de la table. Sauf que je n’avais pas le profil de l’étudiante brillante en sciences po; je n’ai jamais été très concentrée en classe, je suis plutôt hyperactive.»
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> Elle est en train de devenir l’actrice polyvalente qu’elle a toujours voulu être, à force d’accumuler les rôles contrastés. Mais les rôles féminins complexes sont rares, pense-t-elle. «Les personnages féminins trentenaires, surtout à la télé, sont plutôt unilatéraux. Je rêve d’un rôle comme celui que joue Isabelle Blais en ce moment dans la nouvelle série Fait divers: un rôle infiniment complexe.» Une femme de méthode On pourrait la croire spontanée et explosive, vu son timing comique et les personnages excessifs qui nous l’ont fait connaître. Mais Karine Gonthier-Hyndman est en fait une actrice au labeur patient, qui prépare ses rôles longuement d’avance et de manière très méthodique. D’une part cérébrale: elle lit tout ce qui peut nourrir son travail et s’engage dans la réflexion; d’autre part très incarnée et très physique, dans un long apprivoisement et développement de son personnage avec un coach. «Les gens s’étonnent souvent quand je raconte ça, mais j’ai effectivement recours
«JE RÊVE D’UN RÔLE COMME CELUI QUE JOUE ISABELLE BLAIS EN CE MOMENT DANS LA NOUVELLE SÉRIE FAIT DIVERS: UN RÔLE INFINIMENT COMPLEXE.» à un coach chaque fois que je dois construire un nouveau rôle. Je trouve important d’avoir un regard extérieur, de me mettre en dialogue avec une per-
PONY GIRL
SPECTACLES À VENIR � OCT MOULETTES � NOV PONY GIRL �� NOV D-TRACK � FÉV CLAY & FRIENDS
BIENVENUE À CONFORMOPOLIS
�� FÉV ILAM HOPE
SCÈNE 15 VOIR MTL
sonne de confiance pendant mon processus de création, de chercher à déjouer mes réflexes, de faire du ping-pong verbal avec une autre personne, qui m’aide à exploiter plein de potentialités différentes du personnage à construire.» Et surtout, elle ne néglige pas le travail corporel: jouer, c’est avant tout physique, pense-t-elle. «Je suis à cet égard inspirée et admirative devant des acteurs comme Renaud Lacelle-Bourdon ou Sophie Cadieux, avec qui j’ai récemment travaillé, et qui ont une incroyable maîtrise de leurs corps, c’est passionnant à regarder.» Montréal la belle Arrivée à Montréal à l’âge de 15 ans, Karine Gonthier-Hyndman est une amoureuse éperdue de sa ville. «J’ai l’impression d’avoir seulement commencé à exister quand je suis arrivée à Montréal», lance-t-elle énergiquement. Dans le spectacle Jusqu’où te mènera Montréal?, créé au Festival TransAmériques et présenté à nouveau ce mois-ci aux Écuries, elle témoigne du foisonnement de la ville
LA
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DE SHAKESPEARE À MICHEL TREMBLAY... VIVEZ 10 SOIRÉES D’IMPROVISATION AUTOUR DE GRANDS AUTEURS ET DE LEUR ŒUVRE.
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en mode cabaret. «Le spectacle m’a fait réaliser à quel point la plupart d’entre nous ne connaissent qu’une infime partie de notre ville. C’est une ville énorme dont nous n’explorons presque jamais les extrémités est et ouest, et il y a là des tonnes de microcultures urbaines qui sont fascinantes à découvrir.» Montréal est passionnante, certes, mais elle a besoin d’amour. «Le spectacle explore notamment l’idée que Montréal a l’architecture triste et qu’elle aurait besoin d’une petite cure de beauté. C’est bien vrai.» Le goût de la beauté, voilà une autre chose qui motive Karine Gonthier-Hyndman à se dépasser sur scène et à l’écran. Une quête qu’on lui souhaite de poursuivre longtemps. y Jusqu’où te mènera Montréal Du 12 au 14 octobre Théâtre Aux Écuries
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Une œuvre pour raconter la lutte des Métis pour la reconnaissance de leurs droits, Gabriel Dumont en aura rêvé toute sa vie. Jean Marc Dalpé, Alexis Martin et Yvette Nolan l’ont créée, au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui. MOTS | MARIE PÂRIS
PHOTO | VALÉRIE REMISE
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> «C’est tout un pan de l’Histoire dont on n’est pas au courant. Le Québec s’est un peu fermé sur ses frontières, depuis le nationalisme des années 1970…» Pour l’écrivain et comédien Jean Marc Dalpé, l’histoire de la pendaison de Louis Riel, l’«Evil Genius», celle de Gabriel Dumont, capitaine de la résistance des Métis et général de Riel, sa fuite aux ÉtatsUnis et sa participation aux spectacles de Buffalo Bill méritent d’être connues au Québec, bien plus qu’elles ne le sont aujourd’hui. C’est un peu pour sa fille et le fils d’Alexis Martin que les deux acolytes se lancent dans ce projet. «On s’est dit: “Louis Riel, crisse, quelle bonne histoire!” Mais ça peut pas être écrit par deux gars de l’Est...» Pour l’écriture, ils décident donc de faire appel à des descendants des quatre communautés concernées: les Français, les Anglais, les Autochtones et les Métis. Un texte qui s’est tricoté pendant près de trois ans et à vingt mains, avec cinq auteurs francophones et cinq anglophones (Maureen Labonté, Yvette Nolan, Ken Williams, Geneviève Pelletier…). «Chacun arri vait autour de la table avec ses préjugés, etc. Tout le monde n’avait pas la même version de l’Histoire», rit Jean Marc Dalpé, qui a participé à l’écriture de cette pièce-monument. «Chaque auteur a sa partition, son moment. Comme tout est construit en numéros, la variété fait partie du genre: un sketch façon Saturday Night Live peut succéder à une lecture de poème.» Un vrai cirque Ils parlent d’abord de faire une télésérie avant de revenir à leur premier amour, le théâtre. La forme: un wild west show façon Buffalo Bill, justement. «C’est lui qui a inventé l’entertainment show en Amérique! affirme Jean Marc Dalpé. Pour notre spectacle, on s’inspire du théâtre populaire, cru, c’est proche du cirque et c’est organisé en numéros. Ce n’est pas une pièce historique à la Shakespeare; on n’a aucune prétention de faire du documentaire ou du révisionnisme historique… Au fait, on va sans doute vendre du pop-corn au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui. Ça sera un vrai cirque!» À la fois «spectacle à grand déploiement» et «dramaturgie contemporaine», Le Wild West Show de Gabriel Dumont mis en scène par Mani Soleymanlou se construit autour de ce pan d’histoire canadienne qui se déroule entre 1884 et 1885. Le but, en cette année du 150e anniversaire du Canada: briser le silence qui recouvre souvent l’histoire des francophones d’Amérique, particulièrement ceux qui sont hors du Québec. Il est question de nombreux enjeux dans cette pièce, dont l’identité, l’écologie, les relations avec les Premières Nations, la communication… «C’est incroyable! Dans ce pays un peu fou, on n’arrive pas à se parler…», lâche Jean Marc Dalpé. Pourtant, cette pièce, une coproduction du Théâtre français du Centre national des Arts d’Ottawa, du Nouveau Théâtre Expérimental de Montréal), du Théâtre Cercle Molière de Winnipeg et de La Troupe du Jour de Saskatoon prouve le contraire. Et plus de 130 ans plus tard, l’Histoire revient sur le devant de la scène. y Le Wild West Show de Gabriel Dumont Au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui du 31 octobre au 18 novembre
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ÉMILIE DUBREUIL SALE TEMPS POUR SORTIR
EILLE, POURQUOI TU NE LIS PAS MA CHRONIQUE? Je suis une maniaco-dépressive ordinaire. J’oscille, dans la vie, sur la houle entêtée, entre de gros moments de joie et de gros moments de peine grise enveloppée d’un bleu de poésie triste. Mais comme je ne suis pas toujours bénie du sentiment d’euphorie ou de son contraire, entre les orgasmes et le désespoir, il faut donc bien que je m’occupe l’esprit. Ces jours-ci, la mer est calme dans ma vie et, donc, j’ai développé une obsession (que ne semblent pas partager mes congénères) qui m’occupe jusque dans mes rêves. L’autre matin, je me suis réveillée en sursaut avec les images d’un songe encore en cours dans ma tête. J’étais dans le sous-sol du parlement avec Justin Trudeau, dans un bureau secret tout en béton. Notre premier ministre m’avait confié la mission secrète d’éradiquer un fléau qui sévit dans la sphère publique. J’étais, comme le diraient certains, «l’homme de la situation». La mission: enrayer le tutoiement dans la publicité. Dans mon rêve, je prenais cette mission très au sérieux, j’avais des espions qui me transmettaient en direct l’apparition de ces messages. J’ai fait ce rêve le lendemain d’une visite à l’Université de Montréal. Partout, on y voyait de jolies affiches avec un slogan jovial, un impératif enthousiaste: «Pars à la conquête de tes études.» Il y a plus de 60 000 étudiants à l’Université de Montréal. Pourquoi donc cet usage de la deuxième personne du singulier? Croit-on la population étudiante si puérile ou si simpliste que si on emploie le «tu» dans un message qui s’adresse à l’étudiant, il se sentira visé personnellement? Que cette injonction lui fera prendre ses
études au sérieux plus sérieusement? Qu’il se dira: «Eille, c’ta moi que ça parle, ça»? Prend-on les étudiants pour des cons? Si je ne m’abuse, on enseigne à l’université: la littérature, la linguistique, la sémantique, la sémiotique. Il y a des dictionnaires et des grammaires dans les bibliothèques et j’ose espérer que la qualité de la langue y est une prio rité… Et les étudiants qu’on y a admis ne seraient pas capables de comprendre l’usage du «vous» collectif? De la deuxième personne du pluriel? Comme beaucoup de dames, je suis des cours le lundi soir au centre sportif de l’arrondissement pour me donner l’illusion que je suis sportive, que je prends soin de mon corps, et de moi. Nous sommes une vingtaine de «toutounes» grisonnantes dans le gymnase à obéir à une sympathique jeune femme qui nous fait faire des exercices sur des chansons un peu insupportables. Je trouve le tableau plutôt attendrissant. Mais le poil me dresse sur mes jambes dénudées pour l’occasion lorsque la jeune femme s’adresse au groupe par des: «Tu lèves la jambe, tu lèves le bras. Bravo, continue!» Nous sommes plus de 20 madames… Pourquoi commet-elle cette faute de sens? Depuis quand dit-on «tu» à plus d’une personne? Depuis quand est-il correct de dire «tu» à un groupe? Et ça commence tôt. On induit cette horreur grammaticale dans la tête des enfants dès la garderie. Ça perdure au primaire et au secondaire. Une amie m’a fait parvenir une note du directeur à des élèves d’une école secondaire privée où je suis certaine que l’on se targue de châtier la langue: «Bonjour futur élève de 3e secondaire, je t’écris aujourd’hui ce message pour t’annoncer que le Pluriportail est
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maintenant passé à l’année scolaire 2017-2018 et qu’il est accessible à tous les élèves. Ainsi, tu peux déjà y voir ton groupe, ton horaire et le nom de tes enseignants…» Ces enfants-là n’ont pas 3 ans, ils ont 15 ans! Dans quel manuel d’éducation a-t-on décidé que les enfants n’étaient pas capables de faire la différence entre un groupe auquel ils appartiennent et eux-mêmes? Sans doute avons-nous décidé qu’ils n’étaient pas assez futés pour comprendre cette nuance. Et encore, «yo!», on s’adresse à des jeunes. Si seulement cette maladie langagière infectieuse se contentait d’affecter, comme les poux, les institutions d’enseignement, mais non! Ce matin, dans le journal La Presse, une publicité de VIA Rail. Ce sont de grandes personnes qui prennent le train. «Pourquoi tu prends pas le train?» Voilà le slogan de VIA Rail. La Banque TD vante un concours: «On t’amène à l’opéra!» Quoi? Moi, personnellement? Tu me parles à moi, VIA Rail? Tu me parles à moi, Banque TD? Tu sais quoi, toi, grande institution multimillionnaire? Je trouve ça assez infantilisant que tu penses que je suis assez nouille pour me sentir personnellement
interpellée par cette familiarité factice. Quelle agence de publicité t’a convaincu que le citoyen moyen était trop con pour comprendre que si le message n’est pas à «tu» et à «toi», il ne se sentira pas concerné? Et je crois, d’ailleurs, que c’est ce mot, infantilisant, qui explique pourquoi cet usage grammaticalement incorrect du «tu» m’écorche autant l’âme. Déjà, notre tendance à infantiliser les… enfants me semble être un wagon qui se dirige lentement sur une pente douce et vertigineuse de l’acceptation d’une certaine médiocrité intellectuelle: il ne faut pas que ce soit trop difficile. Il ne faudrait surtout pas que l’enfant éprouve le besoin de réfléchir. Mais cette tendance des grandes entreprises et des institutions à infantiliser des étudiants à l’université, des «travailleurs» qui utilisent les transports collectifs ou des «madames» dans un centre sportif me donne l’impression que le train est entré en gare. Faisons fi des règles de grammaire élémentaires et roulons-nous dans la boue de la joie collective où tout le monde est ton ami et te parle à… toi! Et si je téléphonais à Justin pour lui parler de mon rêve? T’en penses quoi, toi? Oui, toi, mon lecteur! y
N É Z E T-S É G U I N DU MÉTROPOLITAIN AU METROPOLITAN De Rotterdam à Philadelphie, en passant par New York, l’un des chefs les plus en vue de la planète s’arrête un peu chez lui, chez nous, le temps de faire le point. MOTS | RÉJEAN BEAUCAGE
Toujours chef principal de l’Orchestre philharmonique de Rotterdam et directeur musical de l’Orchestre de Philadelphie (jusqu’en 2026), Yannick Nézet-Séguin a passé un peu de temps à Montréal cet été et était évidemment présent pour ouvrir la saison de l’Orchestre Métropolitain (OM). Le chef est au sommet: il dirige les meilleurs orchestres dans les plus grandes salles et ses enregistrements sont publiés par les plus prestigieuses étiquettes (sept en 2016, dont l’un devant le Philharmonique de Berlin). Au début de l’année, un Dvořák avec le London Symphony Orchestra et un Mendelssohn chez Deutsche Grammophon venaient s’ajouter à une discographie qui compte déjà une cinquantaine de titres, dont une bonne partie nous arrive d’Europe. Rencontré le 7 septembre dernier, après la répétition de l’OM à la Maison symphonique et avant l’enregistrement de la Cinquième de Bruckner, qui viendra clore l’intégrale qui paraît chez ATMA, le chef commente: «Ma carrière s’est développée en Europe avant les États-Unis, et j’ai eu l’occasion d’y nouer des relations dans plusieurs villes, à Rotterdam, bien sûr, mais aussi à Amsterdam, Cologne, Vienne, Berlin, Hambourg ou Londres. Maintenant, j’y retourne à l’occasion, mais après 2018, je ne serai plus chef attitré à Rotterdam. Je ne suis plus chef invité principal à Londres [2008 à 2014], et je ne crois pas que ça me manquera, c’est un choix. On ne peut pas passer sa vie à traverser l’Atlantique continuellement. Je n’ai aucun regret, je ne veux certainement pas me plaindre, et ç’a été un temps merveilleux, mais je ne reviendrais pas en arrière. Le temps des débuts, c’est très excitant,
PHOTOS | ANTOINE BORDELEAU
mais c’est aussi très stressant! Maintenant, lorsque j’y retourne, c’est pour jouer dans des endroits et avec des gens que je connais.» L’expérience acquise auprès du public européen aura permis au chef de 37 ans de revenir sur le continent par la grande porte, c’est le moins que l’on puisse dire! En avril 2017, en effet, il dirigeait l’orchestre du Metropolitan Opera (Met) pour Le vaisseau fantôme, de Wagner; il avait déjà dirigé dans le temple new-yorkais (il y faisait ses débuts en 2009 avec Carmen), mais y revenait cette fois comme directeur musical désigné. Yannick sourit: «Oui, parlant de stress... Dans ce cas-là, ça m’a pris surtout avant la première répétition avec l’orchestre. Lorsque je suis à New York, j’adore traverser la Lincoln Center Plaza en me rendant au Metropolitan Opera, regarder la fontaine et admirer les colonnes en me disant: “Ça, c’est ma maison!” Ce matin-là, je ne voulais rien regarder et je n’arrêtais pas de penser que, peut-être, les musiciens allaient regretter d’être pris avec moi pour quelques années!» Évidemment, rien de tel ne s’est produit, et à la fin de la représentation, ce soir-là, les musiciens ont remercié le chef en lui lançant des roses! «Ce sont les répétitions qui me donnent le trac, parce que c’est vraiment là que j’ai l’impression de faire mon travail, tandis qu’au concert, c’est au tour des musiciens!» Yannick Nézet-Séguin a parlé de la saison 20172018 de l’OM comme de celle de la confiance, alors que l’orchestre s’apprête à vivre sa première tournée européenne. «Mon travail, c’est précisément de
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donner aux musiciens la confiance nécessaire pour exceller dans leur travail, et à l’OM, ç’a été un long apprentissage, parce que nous étions toujours l’underdog, le deuxième en ville. Il fallait trouver une façon de transférer cette énergie-là d’une manière positive.» On peut imaginer que le parcours de leur chef a dû inspirer les musiciens. «Ça s’est fait graduellement, et il y a trois jours, alors que je félicitais notre violon solo, Yukari Cousineau, et que je lui disais que je trouvais que l’orchestre sonnait déjà très bien à la première répétition, elle m’a répondu: “Oui, on est un band maintenant!” Et c’est aussi ce que j’ai senti à New York, et qui a fait fondre mon stress quand je suis arrivé devant l’orchestre.» Le directeur musical désigné du Met fait déjà des plans, bien sûr, et évoque le tri qui se fait actuellement pour des créations qui se feront en 2022-2023, avant le Graal d’une nouvelle production du Ring de Wagner en 2024. Mais, pour l’heure, le chef a pu passer un peu de temps chez lui, le travail l’ayant ramené à la maison au mois de mai (grand spectacle au Centre Bell pour célébrer le 375e de Montréal), puis en août, pour diriger l’OM au festival de Lanaudière dans Parsifal, de Wagner (avant de le reprendre en février 2018, au Met). «J’ai passé plus de temps que jamais l’été dernier à Montréal, j’ai pu être plus relax, moins éparpillé. Je ne dirais pas que ça m’a reconnecté, parce que je ne crois pas être déconnecté, mais ç’a
réaffirmé mon attachement à la ville. Je vais même déménager dans un endroit qui m’offre une vue sur Montréal, chose que je n’avais pas.» Le chef a développé une relation solide avec la prestigieuse étiquette Deutsche Grammophon, qui a fait paraître une douzaine d’enregistrements avec lui depuis 2009, alors lorsqu’on lui a proposé un disque avec le ténor Rolando Villazón et la basse Ildar Abdrazacov, il n’a pas hésité: «J’ai proposé de faire ça avec l’OM, parce qu’il a déjà joué avec Rolando et que ce dernier avait beaucoup aimé son expérience. Ils ont un peu râlé chez DG, parce que ça leur coûte cher de venir faire ça ici, mais ça s’est si bien passé que je peux dire qu’il y en aura d’autres!» Le disque paru en août est donc une autre première pour l’OM. «On s’appelle l’Orchestre Métropolitain, mais j’ai fait ajouter “de Montréal”, et pour notre tournée aussi, pour que ce soit clair, parce que nous sommes des ambassadeurs après tout.» Des ambassadeurs à surveiller chez nous aussi, à travers une quinzaine de programmes cette sai son, présentés dans plusieurs salles et dont plusieurs donnés avec un chef invité, mais desquels on pourra tout de même profiter en toute confiance. y yannicknezetseguin.com orchestremetropolitain.com
«CE SONT LES RÉPÉTITIONS QUI ME DONNENT LE TRAC, PARCE QUE C’EST VRAIMENT LÀ QUE J’AI L’IMPRESSION DE FAIRE MON TRAVAIL, TANDIS QU’AU CONCERT, C’EST AU TOUR DES MUSICIENS!»
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COMBUSTION LENTE LA CHANTEUSE ET MUSICIENNE FOLK ROCK MAUDE AUDET S’ENTOURE BIEN SUR CE TROISIÈME DISQUE PLUS PERSONNEL, COMME UNE ODEUR DE DÉCLIN. MOTS | VALÉRIE THÉRIEN
PHOTOS | ANTOINE BORDELEAU
«On voit parfois des artistes qui ont un gros succès et ensuite, ça fait un feu de paille. Personnellement, je préfère que ça prenne du temps, que les gens me découvrent plus lentement, mais qu’ils se tannent moins vite.» Maude Audet a un beau succès d’estime depuis quelques années, et la voici dans un nouveau cha pitre de sa carrière qui pourrait la mener loin. Entre deux contrats en scénographie dans la Vieille Capitale, elle a lancé Le temps inventé en 2013, puis Nous sommes le feu en 2015. Des liens avec l’influente étiquette de disques Grosse Boîte se sont formés alors qu’elle signait un contrat en booking et que ce deuxième disque sortait sur son label sœur, Sainte Cécile. Aujourd’hui, ce fort beau troisième disque de chanson folk, de rock et de grunge, Comme une odeur de déclin, paraît au catalogue de Grosse Boîte.
«Y a rien qui arrive pour rien, lance-t-elle. Y a trois ans, je trouvais ça très long de ne pas être signée avec personne. Mais j’ai jamais été négative par rapport à ça. L’envie de continuer était plus forte que la déception que ma carrière ne marchait pas tant.» Cette attitude a porté fruit puisque le petit succès de son deuxième album – sa diffusion sur les radios satellites, entre autres – lui aura permis de vivre de musique et de produire Comme une odeur de déclin. Maude Audet voulait une femme aux commandes de son troisième album. L’heureuse élue, Ariane Moffatt, signe d’ailleurs ici sa première réalisation de disque. On applaudit cette initiative trop peu commune. «D’avoir suivi plusieurs étapes de sa carrière, je sentais qu’elle pourrait comprendre qui j’étais. On a le même âge. J’aimais qu’on ne soit pas pareilles. Je ne voulais pas faire ce qu’elle fait non plus.» Si la chanteuse, qui habite maintenant Longueuil avec sa famille, s’entoure de musiciens connus sur ce nouveau disque – Marie-Pierre Arthur et Joe Grass, par exemple –, ce n’est certainement pas pour crier au loup. «J’ai pas choisi ces gens-là en me disant: “Ah! je vais faire un album qui coûte cher!” J’ai hésité à demander à Ariane parce que je voulais pas être racoleuse, la fille qui se colle aux autres pour profiter de leur succès. Quand j’ai commencé à collaborer avec elle, j’avais fait beaucoup de shows solo et je n’avais plus vraiment de band. Elle m’a dit: “Avec ces musiciens-là, ce serait vraiment l’fun.” Ce sont des gens qui ont des agendas très remplis, mais heureusement, ils étaient disponibles pour nos dates en studio.»
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Maude Audet signe avec Antoine Corriveau un magnifique duo, Dans le ruisseau. La voix ténébreuse du chanteur arrive en écho aux doux mots de la compositrice. «C’est une chanson sur le deuil et ça se prêtait vraiment bien à un duo parce que le narrateur est dans le souvenir et il y a la voix fantomatique qui lui répond. Antoine est le premier à qui on a pensé puisque ça colle bien avec ce qu’il fait.»
Comme une odeur de déclin reste dans les cordes des deux premiers albums, dans sa douceur folk et ses éclats grunge, tout en démontrant une évolution avec un côté classique, par exemple. «Je trouve ça important de rester moi-même, mais de décoller un peu de ma zone de confort, sans faire complètement différent», précise la chanteuse, avant de mentionner l’apport de l’auteure Erika Soucy
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aux textes. «Elle a fait ses études au Conservatoire comme moi. On vient du milieu du théâtre et on s’était croisées. J’ai toujours aimé ce qu’elle écri vait. Ç’a été ma première lectrice. Je ne voulais pas coécrire, mais je voulais quelqu’un qui allait avoir un second regard pour retravailler certains passages et pousser un peu plus loin certaines idées.» «Erika m’a fait réaliser que la plupart des chansons cette fois-ci sont écrites au “tu”, poursuit Maude Audet. Sur mon précédent disque, c’était beaucoup le “on” collectif. Si y a une chose qui diffère des autres albums, c’est que cette fois-ci, je voulais ça plus intimiste, quelque chose de plus personnel.» Quelques titres de Comme une odeur de déclin prônent l’amour et le couple avec grande sensibilité. En concert à Montréal récemment, Maude Audet disait trouver important de parler du couple même
SI Y A UNE CHOSE QUI DIFFÈRE DES AUTRES ALBUMS, C’EST QUE CETTE FOIS-CI, JE VOULAIS ÇA PLUS INTIMISTE, QUELQUE CHOSE DE PLUS PERSONNEL.» si ce n’est pas un sujet bien cool par les temps qui courent. «C’est pas à la mode être en couple en ce moment, dit-elle. Je comprends que c’est très attrayant, le fait d’être célibataire et libre, mais pour moi, être en couple depuis 15 ans et avoir une famille, c’est pas facile, mais y a vraiment quelque chose de beau et de profond quand on se retrouve avec quelqu’un en qui on croit. Je trouve que ça mérite de ne pas être laissé de côté.» En concert cet automne en solo ou en trio, dont un arrêt au Club Soda le 4 novembre en première partie de Saratoga dans le cadre de Coup de cœur francophone. y Comme une odeur de déclin (Grosse Boîte) En vente maintenant
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PHOTOS | NIC CANTIN
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> Le moins qu’on puisse dire, c’est que Bonsoir shérif est différent du Voyage d’hiver, album solo précédent de Kouna qui revisitait Winterreise, cycle de 24 lieder pour piano et voix composé par Franz Schubert. Cette fois, les arrangements complexes et méticuleux ont fait place à une force brute intraitable, enracinée dans un profond dégoût des imbrications sociopolitiques actuelles. D’abord, il y a la venue de Marine Le Pen au Québec en mars 2016, qui a influencé Poupée. Amorcée lors d’un séjour en France deux ans auparavant, la chanson a trouvé son élan au moment de cette visite. «On peut dire que Marine a été ma muse! blague Kouna. C’est pas mal cette pièce-là qui a précisé la position plus sociale de l’album.» Par la suite, les sources d’inspiration ont été nombreuses. «La campagne présidentielle, l’élection de Trump, le passage de Marine au deuxième tour, les sorties du KKK, les flics qui tuent des blacks, la tuerie de la mosquée à Québec», énumère le chanteur des Goules dans un élan d’indignation bien contrôlé. De par sa proximité, cette dernière tragédie l’a passablement affecté. «Quand ce genre de trucs arrivent dans ta ville, tu finis par croire que le monde est vraiment barjo. Je peux pas dire que ça m’a influencé directement dans l’écriture, mais chose certaine, ça m’a mis en câlisse», nuance le chanteur originaire de Saint-Augustin, avant de se rétracter. «Dans le fond, ouais... On peut voir ça comme une forme d’influence.» Au fil des mois, cette hargne s’est décuplée jusqu’à trouver sa porte de sortie à travers la création. «À un moment donné, j’étais embarqué dans une spirale de haine. J’allais lire les commentaires en dessous des articles du Journal de Montréal, j’allais lire les chroniqueurs, les osties de crétins... C’en était presque maladif, viscéral. J’allais là pour haïr tous ceux qui haïssent.» Décidé à ne plus maquiller ses textes engagés avec «des pirouettes poétiques ou humoristiques», l’artiste a troqué son «je» habituel contre un «il» venant illustrer une critique plus directe. «Le gros danger là-dedans, c’était de ne pas sonner cucul. J’ai jamais tripé sur des groupes engagés comme Tryo. Ce que je cherchais, c’était plutôt la hargne de Béru ou de Renaud. Ç’a pas été évident de trouver le ton.»
Sans détour À l’image des textes, les compositions n’empruntent pas de détour. On nage ici dans un punk garage aux contours stoner, pas si éloigné de l’esprit du dernier album des Goules, lancé l’an dernier. D’ailleurs, la récente expérience du chanteur avec sa mythique formation, qui reprenait du service après plusieurs années de pause, l’a poussé à créer Bonsoir shérif en communauté – avec le batteur P-E Beaudoin, le claviériste Vincent Gagnon ainsi que les guitaristes et bassistes Martien Bélanger et Jessy Caron (de Men I Trust). C’est une mini-tournée française au printemps dernier qui aura permis à Kouna de saisir l’étendue de la complicité qu’il entretenait déjà avec ses quatre acolytes. «Durant notre séjour de deux semaines, on avait un 4 jours off. À ce moment-là, il me manquait une ou deux tounes, et y a certains textes que j’avais pas finis. Au lieu de rien faire, on s’est spotté une grosse cabane de campagne dans le sud-ouest du pays pour jammer pis faire de la préprod», raconte-t-il à propos du bar culturel Le Maska, «un genre d’auberge espagnole avec ben du monde sur le party qui squatte». En retraite fermée, les cinq musiciens ont donné une nouvelle impulsion à Bonsoir shérif. «On a rectifié ben des affaires. On a notamment remplacé les backs vocals de filles par ceux des gars du band afin de donner un rendu plus live. Ça fait un bout que j’roule avec eux autres, et je trouvais ça cool de tous les faire chanter. Sérieusement, on a vraiment eu du fun. On faisait le party solide tous les jours, mais quand on se mettait à travailler, ça allait ben.» Créé dans une certaine urgence, ce quatrième album laisse tomber «les états d’âme et les ballades» comme Napalm ou Batiscan, deux pièces mémorables de Du plaisir et des bombes, l’album qui a donné à Kouna l’occasion de toucher un plus grand public en 2012. «En tout cas, c’est certain que c’est pas mon nouveau disque qui va m’ouvrir ce genre de portes-là», reconnaît le chanteur, sourire en coin. «En ce moment, j’aime mon positionnement dans l’industrie, car je peux vivre de ce que je fais, sans être pogné insidieusement par une recette. De toute façon, ça me tente pas d’entrer dans le créneau généralisé de la pop artsy très dull que j’entends toujours à la radio. Je trouve que ça brasse pas assez.» y Bonsoir shérif (Duprince) sortie le 6 octobre Lancement au Club Soda 2 novembre (dans le cadre de Coup de cœur francophone)
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TOUT, TOUT SEUL SUR ENDORPHINE, DARAN «DÉCORTIQUE LES MÉCANISMES HUMAINS» ET EXPLORE LE SAISISSANT CONTRASTE ENTRE LES SONS ORGANIQUES ET SYNTHÉTIQUES. MOTS | OLIVIER BOISVERT-MAGNEN
«Je fais tout tout seul», chante Daran sur son neuvième album en carrière. Tirade contre un politicien égoïste et surpuissant qui se croit tout permis («mon ode à Donald Trump»), la pièce représente aussi le processus de création de ce nouvel opus. «J’avais cette volonté de faire un album guitare-basse-batterie, joué par moi-même de A à Z. Je voulais une immersion totale», explique le Montréalais d’adoption. «Et puis, comme c’était le cas avec Le petit peuple du bitume [son septième album paru en 2007], j’ai voulu me mettre des contraintes de départ, des murs à ne pas dépasser. D’emblée, je me suis dit que tous les morceaux de cet album allaient être électriques et que j’allais les enchaîner avec des interludes uniquement électro.» Exigeant, l’exercice a été somme toute libérateur pour le chanteur de 58 ans. Conscient du trajet à emprunter pour arriver à destination, il s’est fié à son instinct, sans demander l’avis d’une oreille extérieure. «De toute façon, ça m’est impossible de faire écouter ma musique à quiconque avant le mixage et, même, le mastering. Je trouve ça trop personnel. En fait, je suis probablement la personne la plus secrète du monde. J’aurais pu travailler au KGB, je pense», blague-t-il.
PHOTO | ANTOINE BORDELEAU
Si la relation avec le premier, un membre du groupe belge Atomique DeLuxe, en est une d’amitié de longue date, celle avec le deuxième en est une de grande complicité artistique. Signant huit des dix textes, Lebert «ne fait qu’un auteur-compositeur-interprète» avec Daran – ce dernier incarnant avec une intensité transcendante les vers de son auteur. «Sans le savoir, les gens qui pensent que j’écris mes propres textes lui font le plus beau des compliments», indique le chanteur à propos de son fidèle ami qui réside en France. «À chaque album, on a toujours de longues discussions au téléphone au préalable. Quand il m’envoie un texte, je m’assure de le garder tel qu’il est, car j’aime bien les premiers jets. La beauté de son œuvre, c’est ce qui me touche le plus. Au départ, quand on a commencé à collaborer, je continuais à écrire de mon côté, mais à un certain moment, j’ai dû m’incliner devant le génie.»
En cours de route, le chanteur a toutefois révisé son plan de match et a appelé en renfort son batteur Marc Chartrain. «J’avais fait tout cet album seul jusqu’au bout, mais à l’arrivée, je me suis dit que Marc ferait mieux les batteries que moi. C’est le seul véritable intervenant de l’album.»
Que ce soit à travers le récit libérateur de Je repars, le triste constat social de Horizon ou bien la salve brute et bien sentie de Pauvre ça rime à rien, Endorphine dénonce l’inaction, sans nécessairement tomber dans le répertoire engagé et moralisateur. Le constat est ici plus fort que la critique. «J’ai toujours été intéressé à décortiquer les mécanismes humains et je n’arrive toujours pas à me détacher d’une certaine vision humaniste des choses. Ce qu’il y a de bien pour moi, c’est que les problèmes ne se résolvent pas, donc ça me fait du travail jusqu’à la fin de ma vie», ironise le musicien.
En amont, deux autres «intervenants» à consi dérer sont venus teinter la couleur de cet album: les paroliers Erwan Le Berre et Pierre-Yves Lebert.
Résident montréalais depuis maintenant sept ans, Daran a récemment eu l’occasion de se joindre à Jorane, Salomé Leclerc et Jean-Martin Aussant pour
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la deuxième tournée de Légendes d’un peuple, projet musical d’Alexandre Belliard revisitant l’histoire de la francophonie panaméricaine. Pour un artiste d’origine italienne ayant passé la majeure partie de sa vie en France, ce genre d’invitation reflète bien une forme d’inclusion à la scène musicale québécoise, même si elle avait de quoi surprendre au départ. «La phrase qu’Alexandre m’a dite et qui m’a convaincu de me joindre à son projet, c’est: “Nous, on en est Québécois de naissance, mais toi, ta voix est encore plus pertinente, car tu as choisi d’être Québécois”.»
Très heureux dans sa ville d’adoption, Daran ne délaisse pas la France pour autant. Son exil aurait d’ailleurs ravivé l’intérêt pour sa musique. «Maintenant, il me traite comme un artiste international, donc je fais de belles tournées avec beaucoup de dates, dit-il. Et bon, tu connais les Français… Pour eux, si tu es rendu loin, ça veut dire que le truc est forcément bien.» y Endorphine (Le mouvement des marées) Disponible maintenant En concert le 8 novembre au Club Soda, dans le cadre de Coup de cœur francophone
À ÉCOUTER
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HHHHH CLASSIQUE HHHH EXCELLENT HHH BON HH MOYEN H NUL
ST. VINCENT MASSEDUCTION
(Universal / Loma Vista) HHHH
Ça aura pris une dizaine d’années d’explorations dans l’art rock pour que St. Vincent en arrive là: un album qui nous en met plein la gueule, en cinquième vitesse, cru et cynique au possible (dans les textes) et éclaté comme jamais (dans les musiques). Annie Clark y déballe sa peine d’amour, évoque le suicide et la dépendance aux pilules, mais – comme le titre l’indique – c’est avant tout le pouvoir et la séduction qui sont rois. Si les beats programmés et les guitares grinçantes augmentent résolument notre pouls, Masseduction offre aussi, heureusement, des ballades intéressantes en milieu de disque qui nous donnent le temps de respirer un peu. Voilà un album qui prend plaisir à nous prendre par la gorge et nous relâcher au bon moment. (V. Thérien)
SATOKO FUJII ASPIRATION
LAURA SAUVAGE THE BEAUTIFUL
(Libra Records) HHHH
(Simone Records) HHH 1/2
La compositrice Satoko Fujii s’entoure ici de trois improvisateurs chevronnés pour élaborer un programme diversifié de grande qualité. Son époux et collaborateur régulier, le trompettiste Natsuki Tamura, appuie cet autre trompettiste extraordinaire qu’est Wadada Leo Smith, tandis que les explorations électroniques d’Ikue Mori se faufilent dans les appels d’air dont est parsemé le tissu musical. Beaucoup plus introspectif que les envolées de l’autre quatuor que mène la pianiste, Kaze (qui compte également deux trompettes), le discours se fait onirique, et l’ordinateur de Mori, comme à son habitude, est étonnamment discret tout en étant pourtant très présent. La cohésion de l’ensemble est totale, mais chacun a aussi droit à de bons moments en solo. Enfin, l’enregistrement est superbe. Très réussi. (R. Beaucage)
Après Extraordinormal, un premier album solo qui est passé un peu sous le radar l’an dernier, mais qui a bien plu aux critiques musicales, Laura Sauvage revient avec un parfait mélange de rock’n’roll, de psychédélisme et d’ambiances rétro. La chanteuse (en réalité Vivianne Roy des Hay Babies) prouve ici qu’elle n’a rien perdu de son mordant et de son cran. C’est toujours un régal de l’entendre se défouler avec ses musiciens – dont Dany Placard et François Lafontaine. Elle ajoute quelques cordes à son arc ici avec des énergies variées: la pièce Alien est menée davantage par les claviers et Patio Living a des touches plus dreamy, par exemple. La deuxième partie de The Beautiful s’avère plus éclatée et surprenante et ça se termine en furie sur Song for DJT (Trump, on suppose!). (V. Thérien)
INSURRECTION EXTRACTION
QUADRO NUEVO & CAIRO STEPS FLYING CARPET
(Galy Records) HHH
(Justin Time) HHH 1/2
La première comparaison qui vient à l’esprit à l’écoute du quatrième album de la formation de Gatineau prend encore plus de sens une fois qu’on sait qu’il a été réalisé par le guitariste Pierre Rémillard (Voivod, Cryptopsy). L’influence d’Obliveon a toujours été présente dans le style death technique d’Insurrection, mais sur Extraction, elle s’exprime aussi à travers la production calibrée, qui évoque par moment la mécanique sonore de Cybervoid, paru en 1996 (écoutez Parasite). À cela s’ajoute la présence du chanteur d’Obliveon, Bruno Bernier, sur Data Extracted… End Transmission. Au-delà des parallèles avec le groupe culte des années 1990, Insurrection garde le cap en proposant des morceaux accrocheurs, qui s’inscrivent dans la continuité de l’album Prototype (2013). (C. Fortier)
S’il n’était pas déjà reconnu pour son intelligence, sa finesse et sa musicalité, le quatuor allemand Quadro Nuevo passerait peut-être pour quatre charlatans ou faiseurs de «trop beau pour être vrai». Au confluent de la valse, du jazz soufi et des musiques du monde, voilà ces illusion nistes qui s’associent avec la formation Cairo Steps, un nonette de musique de chambre à l’orientale, et partent en voyage de Cologne au Caire avec une escale à Alexandrie. Tout y passe: les berges du Nil, le rêve d’Icare, l’hommage au Sheik, l’Arabiskan et même les Gnossiennes de Satie. Un album somptueux qui regorge de splendeur exotique avec des cordes, du sax, du qanun, du duduk, de la harpe et de l’accordéon. Superbe, ce tapis volant. Mais des fois, trop c’est comme pas assez… (R. Boncy)
DISQUES 33 VOIR MTL
WEAVES WIDE OPEN (Buzz Records/Kanine/Memphis Industries) HHH À peine plus d’un an après la parution d’un premier album homonyme (qui s’est retrouvé sur la courte liste du prix Polaris), le quatuor torontois revient avec un deuxième, sur lequel il amène sa «bent pop» dans des zones polygonales et pyrotechniques toujours, et désormais plus immédiates, croisant indie pop mi-00s et street rock. Composé dans un blitz à la somme de plusieurs tournées en novembre dernier, Wide Open voit le groupe de Jasmyn Burke et Morgan Waters évacuer ses fulgurants collages sibyllins dans un désir de communication plus limpide. C’est encore tordu et téméraire parfois – surtout sur Scream, en duo avec Tanya Tagaq –, mais c’est comme si dans sa hâte et son bon vouloir de diffusion – qui lui vaut quelques beaux hymnes, comme #53 – la fauve formation s’était domptée. (B. Poirier)
MORTI VIVENTEAR LOVECRAFTSMANSHIP (Anette Records) HHH 1/2 En marge d’une scène hip-hop instrumentale montréalaise à l’emprise trap bien souvent redondante, Morti Viventear se distingue admirablement avec une proposition bien à lui. Sur ce quatrième album, l’inventif producteur revisite des échantillons rock progressif européens, tout particulièrement ceux de la scène de Canterbury, et fouille d’obscures trames sonores afin d’en retirer des ambiances flottantes, parfois lugubres. Aux commandes de son MPC60, une boîte à rythmes des années 1980 dont la mémoire ne peut contenir que 26 secondes de son, l’Arvidien d’origine donne un élan vigoureux à ses habiles compositions et les enrichit avec quelques notes bien tempérées de synthés. Si plusieurs de ses anciens travaux rappelaient directement les collages des années 1990 de DJ Shadow, Morti Viventear se livre ici à un étalonnage plus maîtrisé de ses influences. (O. Boisvert-Magnen)
VO2 #1O
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FRANCOIS JALBERT ET JÉRÔME BEAULIEU THIS IS A REAL PLACE (Multiple Chord Music) HHH 1/2 Concocté dans une jolie symbiose, ce disque plutôt doux va nous rendre bien rêveurs cet automne. Pourtant, s’il y a une chose qui n’est pas forcément évidente au départ, c’est bien un duo piano-guitare. Surtout avec deux solistes. Mais Jérôme Beaulieu et François Jalbert – qui se fréquentent depuis un bout, soit dit en passant – ont décidé de laisser momentanément de côté leurs trios de pointe respectifs pour s’aventurer en tête-à-tête comme dans une double introspection. Le résultat: onze tableaux cosignés par les deux compères. Une démarche qu’ils présentent comme «la conjugaison toute naturelle d’univers si semblables et pourtant si différents». Vrai. Car malgré des touches manouches, folk ou bluegrass çà et là, bien malin est celui qui collera une étiquette sur cette musique-là. (R. Boncy)
THE BARR BROTHERS QUEENS OF THE BREAKERS (Secret City Records) HHHH Le groupe montréalais nous fait cadeau d’un disque absolument somptueux. Après Sleeping Operator (2014), le EP Atlas (2015) et une pause bien méritée, son troisième long jeu prouve que The Barr Brothers est en parfaite maîtrise de ses moyens. Les guitares acoustiques ou électriques et la harpe de Sarah Pagé se font la cour, alors que la voix rassurante, tantôt éthérée, tantôt rugueuse, de Brad Barr nous chante des textes sensibles, parfois nostalgiques. Après un trio de pièces de folk alternatif délicieusement douces, le disque nous mène vers des titres plus énergiques, puis le groupe vire vers des musiques pop, sensuelles, mais aussi blues et très rock à la War On Drugs. Un disque d’une grande qualité qui devrait être magique sur scène. (V. Thérien)
GABRIELLE SHONK GABRIELLE SHONK
(Universal) HHH
Après avoir séduit la planète l’an dernier avec Habit, excellent premier extrait soul pop qui lui a valu une comparaison à Alicia Keys par Noisey, Gabrielle Shonk présente enfin son premier album, ce même qu’elle a terminé de préparer depuis des lunes et qu’elle a judicieusement attendu de faire paraître sous Universal Music Canada. Concocté de connivence avec le réalisateur Simon Pedneault, ancien membre de Who Are You et guitariste de Louis-Jean Cormier, cet opus n’est malheureusement pas le rendez-vous attendu. En quête d’un fil conducteur, Gabrielle Shonk touche au folk, au country, au blues et au jazz sans réellement en proposer des mélanges inventifs ou en offrir une mixture un tant soit peu originale. Bien sûr, la voix de la chanteuse de Québec impressionne à plusieurs moments, à l’instar de l’orchestration et des arrangements bien souvent impeccables (sur En équilibre, Raindrops et, évidemment, Habit), mais dans l’ensemble, ce premier effort manque de mordant et de vision. (O. Boisvert-Magnen)
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MONIQUE GIROUX SUR MESURE
ON VIENT TOUS D’AILLEURS OU DE QUELQUE PART La diffusion du documentaire Les Québécois de la loi 101 venait à peine de s’achever en août dernier que j’écrivais à mon collègue journaliste et chroniqueur, Stéphane Leclair, à l’origine de cette production, pour lui dire: «OK, on fait quoi? On commence par où? Quand? À quelle heure? Où est-ce qu’on a failli? À qui la faute? Comment faire pour se rattraper, pis vite à part de ça? Si on ne parvient pas à attirer nos amis issus de cette belle jeunesse québécoise, nés de parents immigrants, au TNM ou aux Francofolies l’été quand Ariane, Louis-Jean, Koriass chantent gratis à la place des Festivals devant 50 000 personnes ou au Salon du livre quand Michel Tremblay, Sophie Bienvenu, David Goudreault, Kim Thúy dédicacent leur nouvelle publication, je suis prête à faire du porte-à-porte pour partager les mots, les images et les notes qui, d’où qu’ils viennent, font la culture d’ici.» Je suis sérieuse, je tiens à le préciser. Je veux bien faire du porte-à-porte. Les effets positifs de la loi 101 sont tangibles. L’échec de la transmission de la culture québécoise à ces jeunes francophones de 16, 17 ans nés ici de parents immigrants est aussi tangible. Ils parlent français, sont nés ici, mais ne s’identifient pas à la culture québécoise. Le seul terme «Québécois» est pour plusieurs d’entre eux synonyme de Blanc, caucasien, catholique, francophone, tricoté serré en laine de souche depuis le 17e siècle. Si on n’est pas Québécois quand on est né au Québec, alors on est quoi? Dans le cadre de l’émission de Leclair, Louise Beaudoin, indépendantiste notoire, répond de manière excédée à cette question: «Cana dienne française catholique.» Ça m’a fait un choc.
Les jeunes interviewés déplorent d’être interpellés trop souvent par la question «Tu viens d’où?», alors qu’ils sont d’ici. Je peux comprendre leur lassitude, mais j’aimerais leur suggérer de se réjouir de cette question, plutôt que de s’en offusquer. Nos différences nous rendent plus riches et cette entrée en matière devrait ouvrir sur des échanges constructifs. Mutuellement, on apprendrait déjà à mieux se connaître si on se parlait. Quand en Europe francophone on me demande d’où nous vient notre accent bizarre, je commence par dire que le mien n’est pas plus bizarre que le leur et qu’il vient ultimement de France et d’Angleterre. Parce que le vieux Toussaint, dont je vous ai déjà parlé ici, est parti de France vers 1651, neuf ans après la fondation de Montréal. C’est là que mes interlocuteurs froncent les sourcils, dubitatifs et interloqués. Toussaint avait 18 ans quand il a immigré en Amérique. Son père s’appelait Jean Giroux, comme le mien. Il a eu avec sa femme, Marie Godard, 14 enfants et puis, 11 générations plus tard, je suis… de souche tricotée en babiche, en train de vous raconter ça sur mon ordi depuis mon bureau avec vue sur le mont Royal. Je répète ma question: si on n’est pas Québécois quand on est né au Québec, alors on est quoi, on est qui? Je propose une réponse qui vaut ce qu’elle vaut, mais honnêtement, il me semble qu’il y a là une solution. Imaginons une identité rassembleuse qui pourrait faire plaisir à tout le monde, qui permettrait à chacun de conserver son allégeance, ses croyances, sa couleur et qui valoriserait sa langue et donc sa culture. Et si nous étions des «francophones d’Amérique», des survivants sur un continent qui n’a pas toujours
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voulu de nous? Québécois, tricotés au sirop d’érable de souche depuis le 17e siècle, indépendantistes ou fédéralistes à gros grains fransaskois et acadiens, Franco-Ontariens, fils et filles de la loi 101, descendants de Mohammed, de Tian, de Mahala ou de Lan Fen. Scolarisés, causant, chantant, écrivant en français sur une terre qui, il y a à peine quatre siècles, était faite de bois debout et habitée par les Premiers Peuples. Nous venons tous d’ailleurs – à moins que ce ne soit de quelque part. «On est toujours l’étranger de quelqu’un», chantait Pauline Julien. À partir de quand y a-t-il prescription? Combien ç’a pris de générations pour que les descendants de Toussaint, l’immigrant français venu de Normandie, ne se fassent plus demander d’où ils venaient par des comme eux qui venaient des Charentes ou de Bretagne? Hochelaga, terre des âmes, film de François Girard (nous devons avoir un ancêtre commun, les Girard… Giroux, ça vient toutte de Basse-Normandie), propose une mise à jour, un rappel de notre histoire, celle des Français, des Anglais et des Premières Nations. Cette histoire qu’on n’enseigne plus, pas assez ou mal. Celle
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2017-09-21
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qui nous rappelle que les non-Autochtones sont tous d’ailleurs – à moins que ce ne soit de quelque part. Ghislain Picard, chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, juste avant la projection du film devant une Place des Arts bondée et après un long discours en innu plus émouvant que tous les autres, a ajouté en français: «Ce soir, vous allez voir la vérité. Or la vérité, nous, il y a longtemps qu’on la connaît.» À force de circonvolutions et de constatations, on devrait être en mesure de proposer des solutions pour que, ensemble, non seulement on parvienne à vivre tout simplement, mais qu’on assume aussi nos parcours, nos histoires, nos cultures et qu’on les partage. Et puis, pour ceux qui ne savent pas qui ils sont, «francophone d’Amérique», il me semble que ça sonne joyeux et fier. Pendant que je vous ai au bout du fil, je t’aime en mohawk, ça se dit: Konoronhkwa. Et bonjour en innu, ça se dit: Kuei. Je vous laisse, je m’en vais faire du porte-à-porte. y
«ILS M’ONT TENDU UNE ENVELOPPE DANS UN CAFÉ DU NOUVEAU-MEXIQUE, PIS C’ÉTAIT LE SCÉNARIO DE LA SUITE DE BLADE RUNNER QU’IL Y AVAIT DEDANS. JE PEUX MÊME PAS TE DIRE L’ÉMOTION QUE J’AI VÉCUE EN LISANT CES MOTS-LÀ SUR LA COUVERTURE!»
CINÉMA 37 VOIR MTL
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LE RÊVE ÉVEILLÉ LE PREMIER BLADE RUNNER EST UN CLASSIQUE INCONTOURNABLE, UN FILM ADULÉ TOUT AUTANT POUR SA POÉSIE VISUELLE QUE SON HISTOIRE ET SA MUSIQUE RÉVOLUTIONNAIRE. IL VA SANS DIRE QUE POUR LE CINÉASTE DENIS VILLENEUVE, LA TÂCHE DE RÉALISER UNE SUITE À CE CHEF-D’ŒUVRE PORTAIT UN ÉNORME POIDS. IL NOUS PARLE DE CETTE SECONDE VISITE DANS UN UNIVERS DÉCHIRÉ ET MYTHIQUE. MOTS | ANTOINE BORDELEAU
PHOTO | JOCELYN MICHEL (CONSULAT)
Denis Villeneuve, réalisateur montréalais maintenant dans les rangs des cinéastes les plus convoités par les studios hollywoodiens, n’est assurément pas un homme qui se plaît à chômer. Enchaînant les projets de taille sans cesse croissante, il livre maintenant, moins d’un an après la sortie de l’acclamé Arrival, son Blade Runner 2049. Ce projet de suite, qui devait d’abord être mené de front par le réalisateur de l’original, Ridley Scott, n’a pas atterri par hasard entre les mains de Villeneuve: «Quand Ridley a fait le premier, c’était à l’époque de Star Wars, Indiana Jones, on dirait que tout était des trilogies. Dans Blade Runner, il y avait beaucoup de potentiel pour poursuivre l’histoire. Au final, ç’a foiré avec la production, il s’est brouillé avec les producteurs, ç’a été un tournage très, très dur. L’idée d’une suite est morte là. Récemment, une équipe de producteurs a réussi un tour de force en sécurisant les droits et a remis le projet en branle, en demandant à Ridley [s’il voulait le réaliser]. Il était beaucoup trop occupé et a plutôt décidé d’aller vers Prometheus. Mais en parallèle, Harrison Ford insistait pour que le projet se fasse le plus rapidement possible. T’sais, à 73 ans, le temps n’a plus la même valeur. Alors, un peu pris entre les deux, ils m’ont contacté et m’ont dit: “On veut te rencontrer quelque part, il faut que personne ne nous voie et que personne ne sache qu’on se rencontre.” Ils m’ont tendu une enveloppe dans un café du Nouveau-Mexique, pis c’était le scénario de la suite de Blade Runner qu’il y avait dedans. Je peux même pas te dire l’émotion que j’ai vécue en lisant ces mots-là sur la couverture!» C’était, il faut le dire, une fantastique mauvaise idée. Retoucher à un film aussi légendaire vient avec son lot d’anticipation tant du côté des fans que de
la critique, et ce fait n’a pas échappé à Villeneuve. Bien qu’il y ait vu, après une première lecture, un film fort aux idées puissantes, il était toujours hésitant. «C’est un de mes films préférés à vie. Tu ne veux pas être celui qui l’a échappé, tu comprends! Mais là, j’ai eu une petite voix qui m’a dit: “Hey. Y a quelqu’un qui va le faire. T’as-tu vraiment envie que quelqu’un fuck it up?” Ça peut avoir l’air arrogant, comme ça. J’en ai refusé des films de grande ampleur, parce que le scénario ne me semblait pas assez fort. Ça, artistiquement, ça valait la peine de tout risquer pour le faire. Si tout foirait, au moins, ça avait du sens pour moi, cinématographiquement parlant.» Le réalisateur note au passage qu’il est complètement écœuré de la mode qui court actuellement à Hollywood de plonger dans la nostalgie pour ne sortir que des reboots et autres suites de piètre qualité. «J’haïs ça pis maintenant, j’en fais partie! Mais je ne pouvais pas dire non à ça. C’est que le film, en soi, valait la peine d’être fait, pour sa poésie et sa philosophie identitaire presque paranoïaque.» Justement, alors que certaines de ces suites contemporaines tombent dans la nostalgie à tout prix pour accrocher le public, Villeneuve a fait le choix de s’approprier complètement l’univers imaginé par Philip K. Dick. Tandis que le premier film semblait se dérouler sous la sombre pluie londonienne, le climat de 2049 est extrêmement différent, comportant notamment un élément bien connu du Québécois: la neige. «Ça m’a vraiment donné une vision. Le premier, c’était un Blade Runner noir, et là, je pouvais faire un Blade Runner blanc! Quand j’ai pensé à ça, que je l’ai exposé à Roger Deakins, il m’a dit: “Ouais! C’est en plein ce qu’on va faire.” Y a une chose que j’adore, c’est la lumière argentée du
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38 début de l’hiver, alors on a travaillé pour combiner l’univers avec une qualité de lumière comme ça, le tout dans la neige et la slush. C’était curieusement une manière aussi d’envahir cet univers-là avec quelque chose que je connais de manière intime. Notre rapport à l’hiver a été pour moi une manière de m’approprier ce film-là. Ça m’a aidé à définir la lumière, à comment j’allais faire le pont entre les deux films, à comment j’allais designer les vêtements, la technologie, les véhicules, l’architecture... tout s’est mis à faire du sens à partir de cette décision-là. J’ai pu m’amuser à des fantasmes de Montréalais en créant des machines qui enlèvent la neige et la subliment. J’avais un ancrage dans quelque chose qui venait de chez nous, aussi bête que ça puisse paraître.» Dans ce projet d’envergure, Villeneuve sait reconnaître l’aide inestimable que ses collègues lui ont apportée. C’est en discutant avec Hampton Fancher (qui a coécrit le scénario avec Scott) qu’il a pu se sortir d’un blocage important. «Je me demandais vraiment comment je pouvais rentrer dans cet univers-là. Je trouvais que le scénario avait quelque chose de curieusement plus contemporain, et je trouvais que c’était une erreur, car je me disais que le film devait vraiment être en continuité avec le premier. Il m’a simplement dit: “Arrête, tu te casses trop la tête. Le premier film, c’est comme un rêve. Faut juste que tu rêves
à nouveau.» Ça peut avoir l’air niaiseux, mais pour moi, ç’a vraiment été comme la clé de départ pour m’enlever de la pression. J’ai ensuite pu partir du premier et en faire une extrapolation, une poursuite du rêve dans cet univers parallèle. Parce que tu sais, Steve Jobs n’existe pas dans le premier film, pis c’est en 2019, y a pas de cellulaires, tu peux pas te baser sur la timeline qu’on connaît. Il faut que tu en réimagines une de toute pièce sans tomber dans l’excès, vu que l’original est quand même teinté d’un certain réalisme dans sa vision.» Ces coups de pouce lui ont été fort utiles, car Scott lui a littéralement laissé carte blanche pour faire le film. Heureusement, les deux hommes avaient une vision et une culture visuelle très semblables et se sont donc rapidement entendus sur la direction dès la première rencontre: «Il m’a parlé de beaucoup de choses, de ses inspirations, des peintres qui avaient guidé sa vision dans l’ori ginal. Curieusement, en étant Québécois, j’ai une culture nord-américaine, mais très influencée par l’Europe et qui peut être complètement étrangère à un Américain. La plupart n’ont aucune idée c’est quoi Métal hurlant, Bilal, Mœbius. C’est des créateurs qui nous ont connectés, Ridley et moi, et qui ont donné naissance au visuel du premier film. Quand tu regardes Blade Runner, c’est clairement inspiré d’une œuvre de Mœbius qui s’appelle A Long Tomorrow. Tu les mets un à côté de l’autre
RYAN GOSLING ET ANA DE ARMAS
pis tu reconnais tout de suite les références. C’est toutes des choses que je connaissais. Il m’a donné quelques clés, mais il m’a dit que c’était vraiment mon film. Il m’a dit: “Tu peux toujours m’appeler si t’as la moindre hésitation, mais c’est entre tes mains. Je te fais complètement confiance.” La dernière chose qu’il m’a dite dans le premier rendez-vous c’est: “Si tu fais tes devoirs comme il le faut, ça va être excellent. Sinon, ça sera un désastre.” C’est vraiment ce que j’avais besoin d’entendre.» Bien qu’il ne sache pas si le film sera bien reçu, Villeneuve ressort de la postproduction avec le sentiment du devoir accompli. «C’est un peu agaçant parce que ces projets-là sont annoncés super longtemps d’avance, les gens se construisent des attentes et tout ça. Moi, en général, j’aime mieux rester dans l’ombre avant d’annoncer des trucs. Personne n’avait entendu parler d’Arrival avant la première bande-annonce. J’aime beaucoup rester under the radar, mais ce n’est plus possible pour ce genre de films. Au final, je suis fier du résultat, et je sais que Ridley est très content du film. C’est un projet de passion sur lequel on a fait des choses qui n’ont jamais été faites avant, et peu importe la réception, je sais que j’ai réalisé ce qui était important pour moi, artistiquement parlant.» y Blade Runner 2049 sera en salle partout dès le 6 octobre
RYAN GOSLING ET HARRISON FORD
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(L’AUTRE) ÉCOLE DE LA VIE LE RÉALISATEUR FRANCIS LECLERC A TOUJOURS COSCÉNARISÉ SES LONGS MÉTRAGES. SON ALLIÉ DU MOMENT S’APPELLE FRED PELLERIN. UN DUO DE CHOIX POUR S’AVANCER, PIEDS NUS DANS L’AUBE, EN TERRAIN CONNU: CELUI DE L’ENFANCE, CELLE DE FÉLIX, PATRIARCHE DE LA CHANSON QUÉBÉCOISE. MOTS | NICOLAS GENDRON
PHOTOS | DOMINIC GAUTHIER
CINÉMA 41 VOIR MTL
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l va sans dire que leur premier contact avec Félix Leclerc, non pas l’homme, mais l’écrivain derrière ce roman phare qu’est Pieds nus dans l’aube, n’a pas été du même ordre. «Moi, c’était au cégep, se souvient Pellerin. J’étais inscrit en “tu checkeras plus tard ce que t’as le goût de faire”, et j’ai découvert la québécitude des Félix, Godin, Vigneault. Je cruisais les bibliothécaires pour avoir le droit d’amener plus de livres la fin de semaine, je dévorais tout. Pis Pieds nus dans l’aube, ça n’a rien perdu de son lustre, au contraire, ça prend de la dorure!» Aussi étonnant que cela puisse paraître, le fils de Félix, lui, n’a rencontré l’auteur qu’après sa mort. «J’ai tout lu l’année qui a suivi. J’avais 16 ans. Je savais qu’il écrivait, mais la lecture, c’était pas mon fort. Et il était pratiquement retraité de la musique. Son dernier spectacle, j’avais 6 ans, c’était avec Claude Léveillée à l’île d’Orléans.» Il reconnaît avoir attendu de se forger un prénom pour adapter les écrits du paternel. «Heureusement, je n’ai pas choisi la chanson. Mais sans doute ai-je ce talent de raconter des histoires, comme lui. Je me suis dit: ça fait longtemps qu’il est mort, il nous a laissé cette matière-là, alors prenons-la et poussons-la plus loin.» Le conteur de Saint-Élie renchérit: «Quand on s’est mis à flirter pour travailler ensemble, j’avais peur, parce que ça prend tout un front de bœuf pour aborder Félix. Mais comme Francis me parlait du roman de son père, ce n’était plus l’œuvre d’un intouchable. Tout à coup, c’est comme si on n’était plus invités chez Félix par la galerie, mais par la véranda, avec la permission de garder nos souliers dans la cuisine!» Pour qui n’aurait pas lu l’œuvre originale sur les bancs d’école, rappelons l’âme du récit – même si Leclerc et Pellerin ont bien sûr pris quelques libertés pour accentuer l’arc dramatique et fusionner quelques personnages. Le jeune Félix (Justin Leyrolles-Bouchard), 12 ans, y vit son dernier été à La Tuque, avant son départ pour un collège d’Ottawa. Au village gravitent autour de lui ses frères et sœurs, sa mère (Catherine Sénart) et son père (le fidèle Roy Dupuis, «mon noyau, avant même d’écrire», d’avouer Leclerc), son oncle Richard (Guy Thauvette), le forgeron (Claude Legault), le barbier (Mickaël Gouin) et une certaine Garde Lemieux (Marianne Fortier), qui lui fait tourner la tête. Sans oublier Fidor (Julien Leclerc), ce nouvel ami dégourdi issu d’une famille pauvre, qui fréquente «l’autre école», la buissonnière, celle de la nature et de la vie à la dure.
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«Si vous pensez que c’est Le p’tit bonheur et mon père avec une guitare, vous allez être déçus, prévient Leclerc. C’est un film scandinave, avec quatre saisons, et sa simplicité me plaît. Ça peut toucher tout le monde qui a eu 12 ans.» Au fond, on nous présente l’homme avant qu’il ne devienne l’artiste, pour mieux toucher à l’universel. Petits deuils et grands émois jalonneront «cette année où il découvre l’amitié, la nuque d’une femme, les rapports de force entre deux sociétés, avec la fête chez les Anglais», précise Pellerin. «Notre job, c’était d’équiper Félix pour qu’il soit capable de partir tout seul en train.» Quant aux Anglais, qui n’étaient alors pas très populaires, le cinéaste s’est permis un léger révisionnisme. «Le Félix que je dépeins, il défend les Anglais, contrairement à Fidor. Avant sa mort, quand il a relu son œuvre, mon père s’est dit: “Je les haïssais donc ben!” Et il a réalisé à quel point ce n’était pas nécessaire… C’est comme un Félix de 74 ans que j’ai saupoudré sur le Félix de 12.» Tourner aujourd’hui dans sa langue constitue déjà pour Francis un geste politique. Ce à quoi Fred ajoute: «Oui, il faut la chanter, l’écrire, la diffuser. Si tout d’un coup, c’est le fruit le plus beau du panier, c’est dans celui-là qu’on va mordre.»
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Campée dans la Mauricie des années 1920, cette sensible chronique d’enfance a été essentiellement tournée… au village québécois d’antan de Drummondville. «J’ai rien contre les gens de La Tuque, explique le réalisateur d’Un été sans point ni coup sûr, mais la maison familiale n’existe plus, le Manoir aux Anglais non plus. Avec la directrice artistique Marie-Claude Gosselin, on a fait en sorte de ne pas se sentir coincés dans un seul décor. C’était très important, l’espace, la nature.» Il y a d’ailleurs «une portion western» magnifique, filmée au parc de la Jacques-Cartier, qui évoque le canton Mayou, «au pays des ours, des bleuets et du vent neuf», là où Félix apprend à embrasser la forêt. À l’autre bout du spectre, il y a l’appel de la modernité, avec cette scène d’anthologie de l’oncle Rodolphe, sous les traits d’un Robert Lepage semblant tout droit sorti de la LNI. «Je voulais le Robert des débuts, confie Leclerc, quand il jouait Vinci avec ses lampes de poche et ses galons à mesurer. Il a été majeur dans mon parcours. À 24 ans, j’avais suivi sa troupe pour adapter Les sept branches de la rivière Ota. Ç’a été un gros déclic pour moi. Et trois ans après, je tournais mon premier long, Une jeune fille à la fenêtre, et il était mon conseiller.» S’ils s’attellent à de nouveaux projets – l’un adaptera le roman Le plongeur et l’autre planche sur un scénario autour de sa sorcière «arracheuse de temps» –, les deux ont éprouvé une grande joie à travailler ensemble. «On partage plusieurs valeurs, s’anime Francis. Comme Fred est aussi un fils de Félix, je me reconnais quand il parle du pays.» S’invitent à table l’identité, le territoire, la culture et l’appartenance. «Quand j’ai réalisé Mémoires affectives, mon personnage représentait un Québec complètement perdu. Tous ceux qui l’aidaient à se souvenir venaient d’ailleurs, un Africain, une Libanaise. Ça résonne toujours en moi. À la fin [très touchante!] de Pieds nus dans l’aube, Martin Léon, un autre fils de Félix, interprète Tu te lèveras tôt. Il chante le pays, ce qui s’en vient pour Félix. Ce n’est pas une œuvre politique, mais je serais heureux si ça pouvait brasser les plus jeunes sur d’où l’on vient.» Est-ce possible d’y arriver sans verser dans la nostalgie? Son ami conteur s’en défend: «La nostalgie, c’est à un millimètre de l’idéalisme. Pourquoi on se donnerait pas encore le temps de rêver à inventer des villages?» Pieds nus dans l’aube Sortie en salle le 27 octobre
LE POIDS DE LA DISCIPLINE LE CINÉASTE DENIS CÔTÉ OFFRE UN REGARD POÉTIQUE SUR LE QUOTIDIEN DE SIX CULTURISTES DANS TA PEAU SI LISSE. MOTS | VALÉRIE THÉRIEN
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a me fait tellement triper de brouiller les lignes!» Méfiez-vous. Ta peau si lisse pourrait être étiqueté «documentaire», mais il n’en est pas vraiment un. Le nouveau film du cinéaste Denis Côté observe le quotidien de six culturistes, sans les commenter ni les juger, et nourrit le mystère autour de ces hommes aux corps musclés au possible. «On a fait tellement de choix subjectifs au tournage et au montage pour appeler ça un documen-
taire, commente-t-il. Disons que je prends la réa lité de ces gars-là et je la tords pour en faire un film de Denis Côté. J’ai interviewé les gars sans caméra, ils m’ont dit ce qu’ils font de leur journée et on a recréé leurs journées sur des périodes de tournage de trois jours.» Jouer avec les attentes du public, c’est en quelque sorte le dada de Denis Côté. «Quelqu’un a déjà écrit: “Quand on regarde un film de Côté, on n’est jamais en sécurité”. Ça m’avait fait super plaisir. Si je faisais
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sujets. «J’avais besoin qu’ils comprennent ma démarche. Je leur ai dit: “Les stéroïdes, la diète, ça ne m’intéresse pas. J’ai comme envie de tourner autour de ta vie sans toucher au truc essentiel. Montrer ta vie privée sans essayer de la démystifier. Regarde, on va pas aller au gym, je vais t’observer faire la vaisselle.”» Cela provoque des scènes magiques et parfois absurdes. On se retrouve fascinés, nous aussi, à tenter de les comprendre. Au final, le regard de Denis Côté est poétique et son souhait est que l’on soit attendri par ces hommes forts. «Je me suis plus attaché à eux que je croyais. Je pensais que j’allais garder une distance intello sur leur monde, un peu comme l’artiste qui va filmer des gros gars avec un petit sourire en coin. J’avais peur d’être ça. Mais ç’a pas pris beaucoup de temps avant que je comprenne certains éléments de leur vie qui les ont menés jusque-là. Le truc qui m’a pris le plus à la gorge, c’est leur discipline. Tu regardes ces gars-là et tu vois un miroir qui est vraiment dérangeant et tu finis par les respecter.»
«J’AI PAS DE GRAND PUBLIC QUI SUIT MON CINÉMA, JE SUIS TOUJOURS DANS LES CERCLES CINÉPHILES, DONC JE DOIS NOURRIR ÇA.»
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un nouveau film et qu’il en rappelle un autre, je serais triste. Je voudrais tout le temps surprendre le public.» Ta peau si lisse s’apparente à une certaine catégorie du cinéma de Denis Côté: des plus petits films à budget moindre qui démontrent une fascination pour des environnements qui lui sont inconnus. «Bestiaire, Que ta joie demeure et celui-là sont des films un peu cousins. Ça se fait bien, vite, entre amis et ç’a sa facture originale. C’est moi qui rentre et me confronte à des univers que je ne connais pas – des animaux au zoo ou des ouvriers – et j’essaie d’aller trouver mes propres repères. Je ne suis pas là pour te les vendre ni les démystifier. Ça peut frustrer le spectateur parce qu’il veut des réponses, mais moi je fais des films avec des questions.» Qui sont ces hommes de Ta peau si lisse? L’un a une vie de famille, un autre est un ancien champion de culturisme devenu kinésiologue, un autre est lutteur et sa passion le dévore. Tentant d’apporter un regard frais sur le sujet du bodybuilding, Denis Côté a voulu s’éloigner des réflexes à la Pumping Iron et des clichés en créant des «microfictions» autour de choses plutôt banales de la vie des six culturistes. C’est ainsi qu’il a vendu le projet à ses
«Tu peux pas faire un film cynique, poursuit-il. Mon film est bien plus gentil que ce que j’avais prévu. Avec le monteur, on se disait: faut qu’on protège ces gars-là. Chaque fois qu’on sent qu’on rit d’eux, on coupe.» Ta peau si lisse a atterri en première mondiale au Festival international du film de Locarno en août. Il s’agissait d’un retour aux sources pour le cinéaste, puisque c’est à ce festival suisse que «ç’a un peu tout commencé», dit Denis Côté. Il y a été maintes fois primé pour son travail, et son premier long métrage, Les États nordiques, y était présenté en 2005. Il a aussi fait plusieurs escales à la Berlinale et à Cannes ces dernières années. «J’ai pu honte de dire que je me tiens dans les festivals et que si vous voulez voir mes films, c’est là que ça se passe», commente-t-il. «Si on m’appelle parfois un “cinéaste de festivals”, ben j’ai appris un peu à l’assumer. J’ai pas de grand public qui suit mon cinéma, je suis toujours dans les cercles cinéphiles, donc je dois nourrir ça. Il faut que je m’adresse aux gens qui sont d’abord inté ressés par le cinéma, parce que je rejoins difficilement les gens qui veulent juste se faire divertir. Il faut vraiment se mettre les deux mains dans le langage cinématographique et avoir envie d’une proposition plus surprenante.» y
Ta peau si lisse En première canadienne au Festival du nouveau cinéma (FNC), puis en salle le 8 décembre.
SOUS LA GLACE DE SIBÉRIE PRENEZ UNE ÉQUIPE DE TOURNAGE PASSIONNÉE PAR SON SUJET ET PRÊTE À TOUT POUR TOURNER. CATAPULTEZ-LA DANS UN GOULAG CONSTRUIT PAR STALINE POUR Y EXTRAIRE DES RESSOURCES MINIÈRES À L’AUTRE BOUT DU MONDE. LE RÉSULTAT VOUS DONNERA CE DOCUMENTAIRE D’EXCEPTION QUI SE PENCHE AVEC TENDRESSE ET MINUTIE SUR L’HISTOIRE OCCULTÉE D’UNE VILLE LONGTEMPS DEMEURÉE SECRÈTE. PHOTOS | CAMERA OSCURA
FRANÇOIS JACOB: «EN RUSSIE, IL EXISTE PLUSIEURS DIZAINES DE VILLES DE CE TYPE. ON LES NOMME ZATO ET C’EST LA POLICE SECRÈTE QUI EN GÈRE LES ALLÉES ET VENUES.»
MOTS | JEAN-BAPTISTE HERVÉ
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> La cité de Norilsk est une ville quasi inaccessi ble et qui a été découverte par le grand public à travers les clichés d’Elena Chernyshova à l’occasion de son exposition intitulée Days of Night/Nights of Day. Cette série de photos met en lumière l’étrange colonie d’êtres humains habitant un paysage tota lement désolé et dénaturé par l’exploitation humaine. Norilsk, en Sibérie, est l’une des 10 villes les plus polluées au monde (!). C’est à travers la lentille de Chernyshova que le réalisateur montréalais François Jacob a découvert l’existence de cet étrange petit bout d’Arctique. C’est ce qui a donné naissance à un documentaire sur une ville bâtie par des prisonniers à l’époque du goulag et qui devint ensuite le plus grand centre industriel métallurgique au monde. «À l’origine, je m’intéressais au développement du Nord canadien et aux impacts de l’activité humaine sur le territoire, dit François Jacob. En me rendant compte que cela serait beaucoup trop difficile à financer comme premier film, je me suis simplement intéressé à des exemples de colonisation du Nord. Je suis tombé assez rapidement sur le sujet de l’Arctique russe et Norilsk a alors surgi sur ma carte Google Earth. J’ai été fasciné par le destin de ces gens qui ont participé à la conquête de ces grands territoires blancs et hostiles.» En début de film, ce sont des images d’archives qui nous servent de guide, puis surgit Lev Netto, un ancien prisonnier du goulag qui fut condamné à 30 ans de prison pour s’être livré aux Allemands après avoir fièrement défendu son pays pendant la Deuxième Guerre mondiale. D’emblée, Jacob a la volonté de restaurer une histoire enfouie sous la glace de Norilsk. Ce document nous
emmène dans une ville longtemps inter dite; il faut la réhabiliter et en expliquer ses fondations, semble nous dire le documentariste, à travers la figure de Netto. La séquence suivante nous conduit dans la nuit glaciale de Norilsk, en compagnie de Grigaras Sipavitchus, l’un des personnages forts de ce film. Il fait froid, très froid, et le corps de Grigaras illustre très bien ce qu’est d’être un travailleur de la mine polaire. Lituanien, il est arrivé à Norilsk il y a plusieurs décennies et n’a jamais voulu la quitter; il s’y est ancré, ses amis et son milieu y sont là, car il y a bel et bien de la vie à Norilsk. «Pour trouver mes personnages et entrer en contact avec les citoyens de la ville, je suis passé par le club photo, nous explique François Jacob. Ce fut très facile d’échanger avec eux et j’ai développé une amitié en ligne avec son directeur, qui a accepté de faire toutes les démarches pour nous inviter sur place dans cette ville qui a un statut particulier de ville fermée. En Russie, il existe plusieurs dizaines de villes de ce type. On les nomme ZATO et c’est la police secrète qui en gère les allées et venues.» Norilsk est située à 2500 kilomètres de la ville la plus proche, les connexions internet sont opérées par satellite, l’isolement est donc presque total. Le film fut tourné en deux voyages de six semaines, avec beaucoup de procédures administratives kafkaïennes. Mais Norilsk, c’est aussi une population de plus de 170 000 personnes, qui ont presque toutes un rapport avec la mine de nickel ou les industries minières. François Jacob dresse un portrait de sa population à travers les figures de travailleurs ou d’anciens travailleurs de la mine,
du directeur du club photo passionné par l’histoire de sa ville, d’une metteure en scène de théâtre ou en suivant une bande de jeunes qui confient leurs ambitions pour le futur – peu envisagent leur avenir dans cette ville. C’est d’ailleurs le constat qui s’impose: Norilsk est une ville qui se dépeuple et qui n’a pas de mémoire. Tout le passé de camp de travail de la ville a été biffé des livres d’histoire – la Russie réinventant sans cesse son histoire à la lumière de son mythe prestigieux. Un mythe qui est bien symbo lisé par le plan de cette statue de Lénine en réfection, une belle réflexion à la volée sur ce pays, que l’on comprend de façon évidemment partiale. «L’imaginaire des Occidentaux par rapport à la Russie est toujours situé dans une époque post-guerre froide. Ce que je veux dire, c’est que nous sommes dans cette perception de l’autre un peu fantasmé, mais c’est aussi le cas en Russie. Par exemple, lorsque nous avons finalement eu les autorisations pour aller tourner là-bas (après deux ans de démarches), le FSB (la police secrète) nous a téléphoné directement pour savoir si nous étions réellement intéressés à venir encore tourner chez eux. C’était complètement surréel comme moment.» Avec une direction photo franche et un regard tout aussi sincère du réalisateur, Sur la lune de nickel réussit à se tenir en équilibre entre le film d’enquête et le documentaire intimiste à hauteur d’homme. Un film rempli d’intelligence. y Sur la lune de nickel À l’affiche le 20 octobre
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NORMAND BAILLARGEON PRISE DE TÊTE
RACISTE!… OU PEUT-ÊTRE PAS… Il est parfois facile de décider qu’une personne ou une société est raciste. Une personne raciste? Voyez cet homme blanc membre du KKK (ou d’une quelconque organisation suprématiste blanche) pour qui les Noirs sont des êtres inférieurs. Voyez encore Joseph Arthur de Gobineau (1816-1882), auteur de l’influent Essai sur l’inégalité des races humaines (1853), qui contribuera à propager le mythe de l’aryen: il existe selon lui trois races (noire, jaune, blanche); leurs capacités intellectuelles sont inégales et les Noirs sont au bas de l’échelle; il soutient encore que le métissage des races conduit inéluctablement à la dégénérescence. Une société raciste? L’Allemagne nazie, inspirée entre autres par Gobineau, en est un parfait exemple, tout comme l’Afrique du Sud sous l’apartheid, les États-Unis esclavagistes ou le Canada et les Autochtones. Là, le racisme a été institué, revendiqué, inscrit dans le droit qui proclamait des lois racistes. Mais c’est rarement aussi simple. Déjà, on aura deviné qu’une société peut être en droit raciste (ou non raciste) tandis que certains de ses membres peuvent ne pas l’être. La situation est en fait plus complexe encore, ce que la recherche en sciences sociales a abondamment montré.
Biais
Des concepts à manipuler avec soin
Nous savons par exemple que nous avons tous des biais cognitifs: nous nous pensons volontiers objectifs (et croyons que les autres, eux, sont biaisés); nous méconnaissons les éventuels privilèges que nous confère notre situation; et nous nous pensons volontiers exempts de tout racisme.
Il faut ici être très prudent. Il y a, pour commencer, des frontières pas toujours nettes entre le racisme et divers autres concepts.
Vous aurez une idée de ces biais en visitant le Musée de la tolérance, à Los Angeles. Vous commencerez votre visite avec une présentation de tous ces groupes à propos desquels on peut faire – et on a effectivement fait – preuve d’intolérance. Tous ceux auxquels vous pouvez penser y sont, ou presque: les Noirs, les juifs, les Arabes, les homosexuels, les lesbiennes, les obèses… Vous devrez ensuite entrer dans le musée proprement dit par une ou l’autre des deux portes: celle pour les gens intolérants; celle pour ceux qui ne le sont pas. Certaines personnes n’ont toujours pas compris et tentent d’entrer par cette der nière porte, qui est verrouillée… À la question «êtes-vous raciste?», presque tous (et plus encore dans une société qui condamne explicitement le racisme ou en fait un délit) répondront non. Ce sera souvent de bonne foi. Et ce pourrait être vrai. Comment décider si ce l’est vraiment? Il n’est pas facile de répondre à cette question. Mais l’accusation est si grave qu’on ne peut l’éluder.
On pourra ainsi être intolérant à divers degrés sans être vraiment raciste. On pourra encore être mal à l’aise devant l’étranger qu’on ne connaît pas, en avoir peur, sans être raciste à proprement parler – et d’ailleurs, l’intolérance, la xénophobie et le racisme reculent avec les contacts et la familiarité avec les autres. On pourra aussi, cette fois en toute connaissance de cause, juger déplorables des us, des coutumes, des habitudes ou des religions sans être raciste et sans avoir à en recevoir l’accusation. D’autant que l’on entre ici dans le territoire, à soigneusement protéger, de la liberté d’expression. Tenir des propos racistes ou haineux est interdit par la loi, mais tout propos critique n’est pas nécessairement raciste ou haineux; dans le doute, il ne nous revient ni à vous ni à moi d’en décider, mais aux tribunaux. Et puis, sans être raciste ou avoir des intentions racistes, on peut défendre des politiques qui, dans les faits, ont des implications différenciées pour divers groupes: c’est le cas avec certaines conceptions plus républicaines de la laïcité. Ce serait un bien mauvais procès à faire à leurs défenseurs que de les présumer racistes.
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On m’accordera que ce n’est pas toujours simple. D’autant que d’autres biais entrent en jeu. Des biais à connaître C’est le cas de cette tendance naturelle et difficile à surmonter (et qu’il n’est pas toujours souhaitable de surmonter) à diviser le monde en «eux» et «nous». Des propos et des gestes nationalistes, xénophobes y prennent souvent leur source. Décider lesquels sont racistes ne sera pas toujours facile. D’autant qu’il peut aussi arriver que le racisme soit inconscient. Celui ou celle qui assure ne pas être raciste le serait alors en réalité; on le verrait, par exemple, dans l’écart entre ses paroles et ses gestes, qui détecterait ce biais raciste. Mais là encore, déterminer la présence de ce biais n’est pas facile. Ces temps-ci, par exemple, en psychologie sociale, on parle beaucoup d’un test (Implicit Association Test) assez ancien et longtemps tenu pour très fiable, destiné à déceler les biais racistes implicites (amusez-vous à vous tester ici: implicit.harvard.edu/implicit/ france). De plus en plus de voix s’élèvent pour mettre en doute sa valeur… Lutter contre la discrimination systémique On observe indéniablement dans notre société de graves discriminations systémiques et du racisme. Mais pour les raisons que j’ai dites (et quelques autres…), les réunir sous le vocable de racisme systémique me semble un pari risqué, même s’il se trouve certainement chez nous du racisme (et indéniablement systémique dans le cas des Autochtones…) qu’il faut combattre partout où on le trouve. Des consultations sur le sujet, certaines à huis clos, des consultations aussi facilement instrumentali sables par tant de groupes, y compris par des partis politiques à des fins électoralistes, ne me semblent pas la meilleure manière de lutter contre le racisme de notre société et ses discriminations systémiques. Elles risquent même, je le redoute, d’être contre-productives, de générer de graves tensions sociales et de ne pas faire grand cas du racisme systémique bien réel. J’aurais préféré que l’État intervienne par les moyens dont il dispose. Par exemple, en rappelant que le racisme et les discriminations systémiques sont inaccep tables; en travaillant sur l’insertion professionnelle des immigrants par la discrimination positive à l’em bauche ou par une meilleure reconnaissance des diplômes et des expériences des travailleurs étran gers. Et par d’autres moyens encore, que seul l’État a le pouvoir de déployer et même d’imposer.
VÉGÉ
FRAIS
&
FAIT MAISON
Le gouvernement a choisi une autre voie. J’espère que l’avenir dira que je me suis trompé… y
2020, Robert-Bourassa - 514 842.9494 111, Mont-Royal Ouest - 514 379.3228
fA l A f e l Av e n u e . c o m
«POURQUOI T’AS PAS VISÉ TIM HORTONS, MCDONALD’S OU DOLLARAMA? SI JE PEUX ME PERMETTRE UN JUGEMENT, T’ES UN PEU ÉPAIS. J’AIME MIEUX ME DIRE QUE T’AIMAIS JUSTE PAS LA DÉCO.»
ART DE VIVRE 51 VOIR MTL
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GENTRIFICATION: ET LES RESTOS DANS TOUT ÇA? ALORS QUE L’EMBOURGEOISEMENT URBAIN TOUCHE D’ANCIENS QUARTIERS POPULAIRES, DES GROUPES DÉNONCENT L’INSTALLATION DE RESTOS ET DE BARS PLUS CHERS QUI ATTIRENT LES BOBOS ET FONT MONTER LES PRIX… ON S’EST PENCHÉ SUR LE CAS DE SAINT-HENRI. MOTS | MARIE PÂRIS
PHOTOS | MAXIME TREMBLAY
Le 15 juin dernier, le restaurant 3734 est vandalisé: la baie vitrée qui fait le coin de la rue Notre-Dame est brisée par un extincteur rempli de peinture, lequel fait beaucoup de dégâts à l’intérieur. Un premier fait de vandalisme avait déjà eu lieu en mai 2016. Si des voitures de luxe ont également été incendiées dans le quartier, les attaques visent principalement des restos: Ludger, Henri Saint-Henri (aujourd’hui fermé), Tacos Victor… «C’est une question de symbole», pense Maxime Tremblay, propriétaire du 3734. «Un resto, c’est ouvert, c’est un lieu de rencontre, on essaie d’attirer l’œil... Et certaines personnes s’en sentent exclues.» Ces mêmes personnes qui dénoncent que SaintHenri devient un «désert alimentaire» où l’on ne trouve plus que des menus à prix élevés ou des épiceries fines pas abordables. «C’est un quartier qui est le fun et que les gens découvrent. On sent une effervescence comme dans les quartiers émergents. Il y a aussi la réalité des loyers peu chers», explique Maxime Tremblay, qui n’a pas hésité dans le choix du quartier pour son établissement. «En grande majorité, les petits restos et boutiques d’art de vivre de Saint-Henri s’installent dans des locaux vides et qui tombaient en décrépitude; on ne prend la place de personne.»
En mai dernier, l’arrondissement d’HochelagaMaisonneuve a tenu des assises sur la gentrification, pour dresser un portrait de la situation et trouver des solutions – le quartier a aussi connu quelques cas de vandalisme sur des restos (Le Lapin blanc, La Tannerie). «C’est un peu le même cas de figure à Hochelaga, mais dans le Sud-Ouest, ça s’intensifie vraiment», argue Romain Cavelier. Ça fait deux, trois ans que c’est devenu aussi agressif. Il y a toujours eu des clivages, mais à ce point…» Le mixologue, qui habite Saint-Henri et travaille avec plusieurs restaurateurs du coin, s’est fendu d’un long post Facebook public après l’attaque du 3734, s’adressant aux auteurs du vandalisme: «J’ai bien du mal à comprendre ton acharnement. Je comprends l’idée que tu ne veuilles pas que SaintHenri devienne une réplique du coin Sainte-Catherine/ Crescent. Je comprends aussi que des fois tu as sûrement l’impression que c’est la seule façon de te faire écouter. Ce que je ne comprends pas c’est pourquoi tu pitches des affaires dans les vitres de ces commerces. Ceux-là. Tu vas sûrement me dire que la pratique de leurs prix fait que ton quartier s’embourgeoise. Mais dis-toi que si les prix sont plus chers que chez Tim Hortons c’est parce qu’eux autres ils encouragent le commerce local en se fournissant chez des artisans et
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producteurs locaux, et qu’ils te servent pas une vieille galette de bœuf élevé en bataille par des industriels à l’autre bout de la planète. C’est parce qu’ils embauchent des gens du quartier (oui, tes voisins), pis au lieu de les payer au lance-pierre et de les faire travailler dans des conditions exécrables ils décident de leur donner des bonnes conditions de travail, ce que, je te rappelle, ne fait pas si bien le McDonald’s au bout de la rue. En gros, ils sont là pour que ton/notre quartier ne ressemble pas à une succession de business qui exploitent le monde, que ça soit ici ou de l’autre bord de la planète, et qu’il fasse bon vivre pour tout le monde, avec un portefeuille bien garni ou non. Pourquoi t’as pas visé Tim Hortons, McDonald’s ou Dollarama? Si je peux me permettre un jugement, t’es un peu épais. J’aime mieux me dire que t’aimais juste pas la déco.» Mauvaise cible, mauvaise méthode Avec l’augmentation de la population et des loyers à Montréal, des ménages plus aisés viennent s’installer dans ces anciens quartiers ouvriers plus populaires, où les loyers sont un peu moins chers qu’ailleurs et où il y a une belle vie de quartier. Si le phénomène fait monter le prix général des
logements et de la consommation, plusieurs me sures prises dans Saint-Henri permettent de contrôler cette augmentation. En attendant, les attaques récurrentes font peur aux restaurateurs. «Si je devais ouvrir un resto, j’aimerais le faire dans SaintHenri, mais c’est sûr que maintenant j’y réfléchirais à deux fois…», confirme Romain Cavelier. Mais si ces attaques visent à dénoncer l’embourgeoisement du quartier, elles se trompent de cible, argue le propriétaire du 3734, qui ne s’attendait pas du tout à du vandalisme en s’installant à Saint-Henri: «On n’est pas un commerce de luxe! Regarde mon menu: tous les plats sont en dessous de 20$. En fait, ils visent les petits restos pour les faire fermer et décourager les autres de venir. On n’est pas des grosses corporations! Mais quand les restos vont fermer, c’est pas les petits entrepreneurs qui vont nous remplacer. Les loyers vont encore monter, et les grosses entreprises vont venir. De s’en prendre volontairement à un maillon faible, c’est éthiquement questionnable.» Dans le contexte actuel de la restauration montréalaise, où les établissements font en moyenne 4% de marge de bénéfice, un cas de vandalisme peut
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coûter cher. «Attaquer les restos qui ne roulent pas sur l’or, qui emploient des gens du coin, qui font vivre le quartier, ça n’a pas de sens! s’insurge le mixologue. Ce sont ces gens-là qui encouragent les producteurs locaux et qui font vraiment vivre le Québec. Et à la fin de la journée, ils ne font pas d’argent. La restauration, ce n’est plus payant comme dans les années 1980. McDo ou Dollarama, s’ils sont plus abordables, ils exploitent les gens. C’est pas cohérent. Mais je ne pousse pas à les attaquer pour autant; il y a d’autres façons de se faire entendre.» Restaurateurs, commerçants et riverains, s’ils peuvent comprendre certaines des revendications des casseurs, dénoncent en effet la méthode employée. D’abord, le vandalisme fait monter le prix des assurances dans le quartier pour tout le monde. «En tout cas, on ne veut pas jouer leur jeu et se lancer dans l’affrontement, assure Maxime Tremblay. Casser, c’est des gestes extrêmes qui dépassent l’opinion.» Sa réponse: continuer à soutenir la communauté, à s’entraider pour faire rayonner le quartier. Il se souvient que, le lendemain de l’attaque sur son resto, des clients et des gens du quartier étaient venus sans hésiter pour aider à nettoyer. C’est aussi ça, Saint-Henri. y
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ART DE VIVRE 55 VOIR MTL
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À LA TABLE DES PREMIÈRES NATIONS QUE SAVONS-NOUS VRAIMENT DE LA GASTRONOMIE DES NATIONS AUTOCHTONES QUI PEUPLENT LE QUÉBEC, ET COMMENT LA CONCILIER AVEC LA CUISINE CONTEMPORAINE? UNE PREMIÈRE RENCONTRE DE CHEFS À QUÉBEC VIENT D’OUVRIR UNE BRÈCHE DANS UN PAN DE CE PATRIMOINE MÉCONNU MAIS PROMETTEUR. MOTS | SOPHIE GINOUX
Nous avons souvent une idée préconçue de la gastronomie des Premières Nations. Nous avons appris dans nos livres d’histoire que leurs modes de vie, tantôt nomade, tantôt sédentaire, faisaient d’eux des chasseurs, des pêcheurs, des cueilleurs et, pour certains d’entre eux, des cultivateurs. Nos ancêtres ont hérité d’eux des procédés de séchage et de fumage. Et les rares spécialités traditionnelles que nous leur connaissons, servies dans des pow-wow ou lors d’événements à caractère un tantinet folklorique, se résument la plu part du temps à la sagamité et à la banique. C’est à cette grande inconnue que s’est attaqué un petit groupe de passionnés de la ville de Québec en organisant La rencontre des grands chefs, tout premier événement jumelant 11 chefs québécois et 11 chefs issus des Premières Nations du Québec, les 2 et 3 septembre derniers au Fairmont Château Frontenac. 12 nations qui s’ignorent Malgré le succès manifeste des produits du terroir et de la cuisine à tendance boréale, on ignore tout, ou presque, de la gastronomie des Premières Nations et de sa réinterprétation contemporaine. Martin Gagné, ancien chef du restaurant La Traite à l’Hôtel-Musée des Premières Nations de Wendake, Arnaud Marchand, chef du bistro Chez Boulay à Québec, ou encore Christopher Parasiuk, ancien chef du Manitoba à Montréal, font partie des rares cuisiniers qui ont jusqu’à présent exploité ces racines pour les élever à un degré de recherche supérieur.
PHOTO | PEXELS
Pourtant, ce n’est pas l’intérêt qui manque. Les gibiers, champignons et algues sont de plus en plus présents dans nos assiettes, et des compagnies comme Gourmet Sauvage diffusent largement des produits sauvages de qualité. Mais cela ne représente que la pointe de l’iceberg. Des freins divers, qu’ils soient d’ordres légaux, sociologiques, géo graphiques ou même pratiques, n’ont pas encore permis aux Premières Nations du Québec de partager leur savoir-faire millé naire. Il est par exemple toujours interdit au Québec de servir de la viande sauvage dans les restaurants. Toutes les initiatives menées par des chefs pour amener les petits gibiers sur les tables se sont ainsi avérées vaines. Enfin, la majorité des réserves ne disposent pas des fonds nécessaires au développement de l’agrotourisme et sont encore isolées du reste de la population. «Si l’on considère que les Québécois forment eux-mêmes une nation, on se rend compte que nous avons 12 nations qui ne se connaissent pas», constate Frédéric Cyr, directeur culinaire du Fairmont Château Frontenac. Observer et comprendre Faire les choses différemment: tel a été le mot d’ordre du petit groupe des Grands évé nements de la ville de Québec, qui a réussi à réunir des représentants des 11 Premières Nations du Québec avec des chefs d’ici. «Nous avons souhaité amener un chef dans chaque communauté, favoriser la rencontre et le partage. Créer des liens entre des cultures qui s’ignorent encore. Et nous avons
pensé que l’expression culinaire était la meilleure voie pour le faire», explique le compositeur Steve Barakatt, qui a accompagné bénévolement le projet. Ne rentre pourtant pas qui veut dans les foyers des communautés autochtones. «Il faut arriver sur place avec l’esprit ouvert à une tout autre culture, et les portes s’ouvrent beaucoup plus facilement qu’on ne le penserait», dit l’organisateur, qui avoue que cette expérience a changé sa vision du Québec. Le chef Stéphane Modat (restaurant Le Champlain et bistro Le Sam), quant à lui, a tellement été touché par sa rencontre avec la communauté inuite d’Inukjuak qu’il s’est fait un nouveau tatouage sur le bras. «Je suis tombé en amour avec le paysage, les gens et la culture de cette nation. Il était fondamental pour moi d’aller là-bas, non pas comme un conquérant, mais comme un apprenti. D’arriver avec un sac vide et de repartir avec un sac plein. D’observer et de comprendre.» Et il a beaucoup appris, comme plusieurs chefs participant à l’événement. «Il faut envisager les choses autrement sur place, faire table rase de nos acquis. Ce n’est pas compliqué: quand la communauté inuite abat un caribou, elle mange ce caribou au complet en le partageant entre ses membres. Si elle en tue 10, elle en mangera 10. Et elle a réussi à composer au fil du temps avec les éléments qui étaient à sa portée. Par exemple, comme il pousse peu de plantes dans le Grand Nord en dehors du lichen, elle a utilisé pour cuisiner ce qui était à sa portée, comme de la graisse de béluga
56 (misiroq).» Il en résulte de surprenantes préparations comme le suvalik, une mayonnaise réalisée avec des œufs de poisson montés avec de l’huile, que le chef a marié avec de l’omble arctique pour la création de son plat combiné. La même philosophie a animé le chef Arnaud Marchand, qui a utilisé le maïs blanc central dans l’alimentation mohawk de Kahnawake pour le décliner de manière traditionnelle et plus moderne au sein d’une même assiette. Marie-Chantal Lepage (MNBAQ) a de son côté préparé avec son homologue de la nation Micmac, Norma Condo, du saumon boucané avec une mousseline de relish de mer, une algue cultivée au goût très délicat.
Un nouveau terroir? Gravlax de caribou aux baies sauvages et au thé du Labrador, cake au nard des pinèdes, perdrix rôtie et confite à la purée de maïs et aux croustilles de courge musquée sont quelques-unes des délicieuses créations qui ont marqué les jumelages de cette première rencontre gastronomique. Et l’exploration de ce patrimoine méconnu ne fait que débuter. «J’ai fait l’école hôtelière comme tous les autres, mais me suis plongé dans mes racines pour acquérir des bases solides sur les plantes sauvages», relate Maxime Lizotte. Ce jeune cuisinier-cueilleur malécite a combiné ces deux apprentissages pour concevoir ORJN,
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une gamme de mélange d’épices et de condiments aussi surprenante que raffinée. Son initiative, à l’image de celle des autres chefs participant à la Rencontre et de celles encore ignorées du grand public, nous permet d’entrevoir un bel avenir pour la cuisine autochtone moderne. Stéphane Modat est plus qu’enthousiaste à cette idée: «Là, on a servi du suvalik tel quel, mais les possibilités sont infinies! Si je fais par exemple frire les œufs de poisson utilisés dans la recette, ou si je déshydrate la préparation, où est-ce que cela m’amènera? Je suis fasciné par ce savoir-faire qui permet de se réapproprier la vraie cuisine traditionnelle du Québec et de la faire évoluer, de la réinterpréter avec l’esprit du voyageur, du découvreur. Savoir d’où on vient pour savoir où on s’en va, c’est essentiel en cuisine comme dans tout. Une cuisine doit être réfléchie, avoir du sens, sinon elle ne sert à rien. Et pour moi, maintenant, le terroir québécois, c’est ce que ces 11 nations font, pas ce que nous connaissons.» Steve Barakatt va encore plus loin: «Si on regarde les grandes gastronomies de ce monde, on se rend compte qu’elles ont toutes puisé dans leurs origines pour briller aujourd’hui. Nous avons commencé à le faire ici avec la cuisine boréale, mais nous sommes loin du degré de recherche que des pays comme la Norvège et la Suède ont atteint. Et je crois sincèrement que cet événement annuel servira de tremplin à la redéfinition de notre terroir québécois...» y
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DU CONTE À LA FABLE MOTS | FRANCO NUOVO
ILLUSTRATION | GEOFFREY GERSTEN
LIVRES 59 VOIR MTL
J
e ne suis pas certain que j’aurais ouvert un livre avec un titre pareil, La vie rêvée des grille-pain, mais j’étais intrigué. En plus, ma collègue Karine n’avait eu pour ce bouquin que des mots et des formules de rêve et d’imagination, ce qui a fini par me convaincre de le lire.
De plus, l’auteure, dont je n’avais lu aucun livre, avait, à mes oreilles, un vrai nom d’écrivaine: Heather O’Neill. Elle n’est pas la fille d’Eugene O’Neill. Eugene est mort il y a trop longtemps. D’ailleurs, sa fille s’appelait Oona. Elle était très, très belle et fréquentait la jet-society newyorkaise. Adolescente, mystérieuse et séduisante, elle était une cliente assidue du réputé Stork Club, où elle côtoyait Truman Capote et J. D. Salinger. Salinger, d’ailleurs, est tombé follement amoureux d’elle, mais pas elle de lui. Oona ne l’a donc pas retenu quand il a décidé de s’enrôler et de partir à la guerre. Et Oona est partie à Hollywood pour faire l’actrice. Elle a rencontré Charlot. Oui, Charlot: Charlie Chaplin. Oona a donc épousé Charlot et est restée madame Charlot pour le reste de ses jours. Ah! l’amour! Tout ça pour vous dire que c’est important le nom. Hemingway, par exemple, ne pouvait qu’écrire. Avec un tel nom, Camus, me direz-vous, aurait pu devenir fonctionnaire ou professeur; Genet, lui, peut-être acteur. Ne l’était-il pas d’ailleurs? Heather O’Neill, elle, ne pouvait donc être qu’écrivaine. Une écrivaine qui, étrangement, admirait Genet, Gorki, Duras et Marie-Claire Blais, oui, Marie-Claire Blais. De plus, ai-je appris en fouillant un peu, elle est née à Montréal et a étudié à McGill. Peut-être d’ailleurs, le hasard étant ce qu’il est, l’ai-je déjà croisée, blonde, ses cheveux courts au vent, le regard sombre perdu dans des pensées étranges, grimpant l’avenue des Pins vers l’Hôpital Victoria, son sac plein de feuilles sous le bras. Bref, Heather O’Neill a déjà, à l’heure qu’il est, écrit quelques livres, dont un en tout cas, La ballade de Baby, qui a connu un immense succès. Bizarrement, elle n’avait jamais été traduite ici, et la traduction française de son ouvrage La ballade de baby sonnait un peu comme du Mordecai Richler tartiné de foie gras et digéré par Bourvil. Or, un éditeur d’ici a confié ce voyage au cœur de la fantaisie à Dominique Fortier. Du coup, le français d’ailleurs a pris le goût et les saveurs de celui d’ici. Ce n’est pas un roman. Et comme, histoire de citer Alain Resnais, la vie est un roman, ce n’est pas la vie non plus. Ce sont des histoires, des nouvelles, des fables, des illusions couchées sur papier, l’irréel en mots, en phrases, en récit.
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Heather, je me permets de l’appeler Heather avec le «th» résonnant comme «de», Heather, donc, m’a tellement entraîné ailleurs, ailleurs, ailleurs que sur la pelouse, ailleurs que sur le bitume, ailleurs que dans les couloirs froids de Radio-Canada! Elle m’a fait rêver et m’a raconté, à moi qui vais bientôt être grand-papa (si ce n’est déjà fait), que l’océan déposait les bébés avant que ne se retire la marée. C’est con, parce que j’ai toujours cru que c’était les cigognes qui les emmenaient, ou qu’ils naissaient dans les choux, lesquels, cette année, en raison de ce septembre caniculaire, sont énormes. J’en conclus que les bébés, s’ils ne sont pas rejetés par la marée, sont énormes aussi. J’ai aimé aussi ce petit bonhomme tzigane et son ami l’ours, ces jouets qui, abandonnés un moment par le petit garçon qui devait aller souper, en ont profité pour prendre vie. Et en bon Tzigane, il est parti sur la route et a joué du violon. Et en bon ourson, l’ours a cabotiné. Une balade qui les a menés au bordel. Ne me demandez pas pourquoi. Le Tzigane avait besoin de dormir et avait besoin d’aimer. Et Jésus qui était en sixième année, et les Noureev clonés et reclonés qui, finalement, dans ce petit village du Bas-du-Fleuve, n’aimaient pas particu lièrement danser, et les anges descendus pour «sauver» les soldats débarquant sur une plage de Normandie, et la petite O qui flirte avec le désir plus qu’avec le sexe… Je vous entends: «Pourquoi La vie rêvée des grille-pain?» Parce que 4F6, une androïde qui aimait regarder les étoiles, s’est éprise de BX19, à qui elle a demandé de l’embrasser tendrement. Le choc fut grand, si grand qu’est tombé d’entre les draps «un petit personnage aux allures de bonhomme allumette»… Un enfant de l’amour, seul au monde… seul au monde… seul au monde. Je n’en dirai guère plus. y La vie rêvée des grille-pain Heather O’Neill Éditions Alto, 400 pp
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LES DALES HAWERCHUK THE GREAT NOVEL
Sur les rayons
GRIMSKUNK
LA BOSCO JULIE MAZZIERI
MONONC’SERGE
Héliotrope, 2017, 126 pages Le travail de l’écrivain en est un de patience et d’acharnement. Si certains parviennent à récidiver d’année en année, produisant ainsi un nouveau titre chaque automne – juste à temps pour les bas de Noël –, d’autres prennent le temps qu’il faut pour se battre avec les mots, avec les idées. Avec Le discours sur la tombe de l’idiot, premier roman publié en 2009 aux éditions françaises José Corti, l’écrivaine québécoise désormais installée en Corse avait remporté le prix du Gouverneur général pour un livre aussi étrange que fascinant, dépeignant la figure de l’idiot stigmatisé en plein cœur des Cantons-de-l’Est. L’auteure revient ici en ses terres, huit ans après son précédent livre, le temps d’une journée, pour assister à l’enterrement de la Bosco.
FRED FORTIN
DANY PLACARD FANNY BLOOM
LAURA SAUVAGE
ÉMILE BILODEAU
SAMEDI @ 21H PORTES 20h00
71, Montée Gagnon | Bois-des-Filion · THE GREAT NOVEL · ÉMILE BILODEAU 25 NOVEMBRE 2017 · DANY PLACARD 20 JANVIER 2018 · FRED FORTIN 17 FÉVRIER 2018 · ARTISTE SURPRISE 24 FÉVRIER 2018 · LES DALES HAWERCHUCK 31 MARS 2018 · GRIMSKUNK 14 AVRIL 2018 · LAURA SAUVAGE 28 AVRIL 2018 · FANNY BLOOM 26 MAI 2018 · MONONC’SERGE 30 SEPTEMBRE 2017 4 NOVEMBRE 2017
Billeterie : BIEREAUMENU.com
La Bosco est morte et c’est aujourd’hui qu’on l’enterre. Son mari, Jacques, ne pense qu’au chéquier. Son fils, Charles, ne pense qu’au billet de cinquante dollars si tôt gagné, si tôt perdu, alors que sa fille déplie lentement des caramels qu’elle s’engouffre en direct de la berline les menant au cimetière. Au moment où le chauffeur à la conduite médiocre s’engage difficilement dans l’entrée du lieu funèbre, le père pique une énième crise, lui demandant de partir, de conduire encore plus loin, sans s’arrêter. Tant qu’on ne la mettra pas en terre, les problèmes, eux, resteront. C’est ainsi que le périple de La Bosco se dessine, une cavale mortuaire qui brossera le portrait d’une famille grotesque, d’une fratrie qui semble avoir comme devise «chacun pour soi» tellement les liens les unissant semblent aussi ténus que malsains. Les arrêts seront aussi nombreux qu’étranges, le père s’engouffrant tantôt dans un champ de maïs, tantôt dans un débit de boisson, n’oubliant pas d’arrêter chez les Perrault, la richissime famille pour laquelle la Bosco a travaillé, cette même famille qui n’a pas daigné envoyer une seule fleur pour fleurir sa tombe. Court roman s’axant sur la détresse d’un clan en pleine perdition tant mentale que financière, La Bosco se déploie principalement par une maîtrise de la langue avec laquelle Mazzieri embrasse son histoire. La concision du roman, rappelant à quelques égards certains contes de Ferron, n’a d’égal que la précision des images que l’auteure parvient à créer au détour de ses phrases. (Jérémy Laniel) y
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Sur les rayons
MANIKANETISH NAOMI FONTAINE, Mémoire d’encrier, 2017, 150 pages
Situé devant le pittoresque canal Lachine, ce sympathique bistro sur trois niveaux, vous propose une réconfortante cuisine italienne dont les saveurs se transforment au g gré du marché. Profitez des délicieuses tables d'hôte offertes pour le lunch ou en soirée.
Que peut le théâtre contre la misère du monde? Combien de fois sommes-nous l’étranger alors que nous sommes entouré des nôtres? Quels événements nous projettent si jeune dans l’âge adulte? Six ans après son splendide Kuessipan, Naomi Fontaine revient avec Manikanetish, replongeant son lectorat au cœur d’Uashat, réserve innue au nord de Sept-Îles. Une enseignante fraîchement diplômée quitte Québec, laissant derrière elle son copain pour y prendre une charge d’enseignement secondaire. Cette idée de revenir à la maison pour redonner à la communauté qui l’a vue grandir s’effritera au contact de ses élèves; rapidement, ce sont ces derniers qui lui ouvriront les yeux. Manikanetish signifie «Petite Marguerite», c’est aussi le nom donné à l’établissement scolaire où Yammie s’installe pour l’année, baptisé ainsi en la mémoire d’une femme sans enfant ayant pourtant passé sa vie à en élever plusieurs dizaines. L’enseignante s’installe au premier jour devant la classe, tout aussi motivée qu’elle est terrifiée. Au fil des courts chapitres meublant le roman, on découvrira avec elle Mélina, celle qui sait trop bien écrire pour son âge, Rodrigue, le flanc mou qui l’affrontera devant tout le monde, Marc, celui qui s’absentera rapidement pour suivre sa mère malade à Québec, et tant d’autres. Sans fignoler un roman polyphonique, Naomi Fontaine tisse habilement un réseau d’impacts entre l’enseignante et ses élèves, chacun représentant une singulière chambre d’échos pour chaque misère nous habitant. Familles disloquées, fillesmères, enfants abandonnés et sœurs suicidées sont autant de drames qui forment la faune de cette classe, classe dans laquelle jamais personne ne semble se délester de ses tragédies quotidiennes en y entrant. Bien que le choc soit réel pour Yammie, elle conçoit très vite qu’elle ne peut les laisser tomber et entreprend de les embarquer dans un projet un peu fou: monter Le Cid de Corneille comme spectacle de fin d’année. Rythmée par un découpage concis, fonctionnant presque à la façon de vignettes, l’année scolaire se déroulera sous nos yeux, la confiance se bâtira lentement, menant petit à petit chacun de ces jeunes dans une entreprise dont ils ignorent eux-mêmes l’importance. Comme dans Kuessipan, l’écriture de Fontaine en est une lumineuse qui parvient à montrer et à nommer les détresses et la violence sans pathos aucun. En résulte une lecture tout aussi bouleversante qu’à échelle humaine, d’une grande efficacité comme l’est d’ailleurs son brutal incipit: «Revenir est la fatalité.» (Jérémy Laniel) y
1718, boulevard Saint-Joseph Lachine, Québec - H8S 2N2 514 634-3400 pastaandrea.com
Pour son 10e anniversaire, la fondation a rassemblé le travail de 9 artistes d’ici et d’ailleurs qui s’intéressent au concept de l’offre. C’est l’occasion de réfléchir à la notion de cadeau, un thème qui soulève de nombreux questionnements, que l’on soit artiste ou non. MOTS | ALESSANDRA RIGANO
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Offrir et recevoir accompagnent leur lot d’hésitations et d’angoisses: ce que nous offrons sera-t-il bien reçu ou aimé? Comment démontrer sa gratitude quand on reçoit un cadeau, comment agir si on ne l’aime pas? Ce thème résonne évidemment avec celui d’un anniversaire et de la mission d’une fondation ancrée dans la philanthropie. Il s’inscrit également dans l’engagement de son équipe à démocratiser l’art contemporain et à valoriser un autre modèle économique qui, en opposition à celui qui prévaut dans nos sociétés occidentales, pourrait favoriser l’idée d’une culture basée sur le bien-être commun, explique Cheryl Sim, directrice générale et commissaire: «Le modèle du profit pour le profit fera en sorte qu’à un moment donné, toutes les ressources seront épuisées. On est en train d’en vivre les effets. L’idée d’une culture du don basée sur un processus de création de connexions est primordiale. Il y a des sociétés qui le font depuis des siècles et nous avons besoin de voir que c’est possible. C’est un changement de paradigme majeur. La fondation est un microcosme de cette perception du monde.» Déjà présente en 2007, au moment où la fondation ouvrait ses portes sur la rue Saint-Jean du Vieux-Montréal, Cheryl Sim a vu se préciser l’orientation artistique de l’organisme. On y trouve des expositions d’artistes multidisciplinaires (deux ou trois par année, tout au plus) provenant majori tairement de l’international. Depuis les débuts, la fondatrice et directrice de DHC/ART, Phoebe Greenberg, contribue de très près à cette programmation. Son amour pour l’art contemporain est bien connu de tous. Un peu à l’instar d’un créateur, l’intérêt qu’elle développe pour l’œuvre d’un artiste est d’abord intuitif: «Pour moi, c’est très personnel, c’est une réaction de cœur et après j’espère que la tête suit.» À l’époque, elle avait choisi Montréal pour son contexte propice à l’émergence de jeunes artistes. On lui a souvent demandé pourquoi; la mécène voyage beaucoup et aurait pu bâtir une fondation au sein d’une autre ville: «Je pense qu’il y a une certaine
PHIL COLLINS, FREE FOTOLAB, 2009. PROJECTION 35MM, 9 MIN 20 S, AVEC L’AIMABLE PERMISSION DE SHADY LANE PRODUCTIONS, BERLIN ET TONYA BONAKDAR GALLERY, NY.
FELIX GONZALEZ-TORRES, ‘’UNTITLED’’ (ISCHIA), 1993 AMPOULES, DOUILLES DE PORCELAINE ET RALLONGE PHOTO: PETER MUSCATO. © THE FELIX GONZALEZ-TORRES FOUNDATION. AVEC L’AIMABLE PERMISSION DE ANDREA ROSEN GALLERY, NEW YORK
DORA GARCÍA, STEAL THIS BOOK, 2009. CENTRE POMPIDOU, PARIS, MUSÉE NATIONAL D’ART MODERNE / CENTRE DE CREATION INDUSTRIELLE. PHOTO: ROBERTO RUIZ
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énergie qui est très similaire à Berlin, c’est-à-dire qu’il y a des possibilités pour de jeunes artistes qui commencent leur carrière. Je trouve qu’on a une certaine liberté grâce à la jeunesse de la ville – Montréal a 375 ans –, comparativement à d’autres villes en Europe. On reste assez jeune, donc on n’a pas le même système qui parfois est difficile quand on commence notre carrière, comme c’est le cas à Londres ou à Paris.» L’Offre En réfléchissant à l’exposition-anniversaire, le don s’est rapidement imposé comme thème central pour Cheryl Sim qui, d’ailleurs, voit sa mission comme «un don que nous pouvons consommer pour transmettre davantage toute la richesse, la beauté, tout ce qui peut nous bouleverser avec l’art». Un geste qui, elle l’espère, fera grandir l’appétit du public pour l’art contemporain qui semble tranquillement se démystifier: «On est dans une bonne période, tout est permis, on a brisé tous les silos de médiums. Je peux encore avoir un moment où je suis touchée aux larmes et c’est à ce moment-là qu’on a besoin de partager la possibilité de faire vivre une telle expérience avec quelqu’un d’autre.» Sa réflexion a été amorcée il y a plus de deux ans. Elle s’est structurée autour de trois angles qui caractérisent le don: offrir, recevoir et transmettre. D’une part, l’œuvre Money for Art (1994-2010) de Lee Mingwei, artiste américain né à Taiwan, en est un bon exemple. Il a amorcé son processus alors qu’il était étudiant. Il avait l’habitude de faire de l’origami dans un café pour passer le temps, explique la commissaire. Un jour, il a commencé à en créer avec des billets de banque pour les offrir à des étrangers en échange de leurs coordonnées. Mingwei a ainsi pu suivre les traces de leur utilisation; les avaientils conservés intacts ou ont-ils servi pour consommer des biens? D’autre part, l’œuvre Love, Theft, Gifting and More Love (2009) du défunt plasticien américain Mike Kelley relate les péripéties d’un logo, de sa première application jusqu’à ses nombreuses réappropriations. On pourra partir avec un décalque de ce dernier et contribuer à la perpétuation de son histoire, nous confie Cheryl Sim: «L’exposition et la fondation servent de véhicule pour présenter ces œuvres. Le visiteur va, je l’espère, être nourri par ce don et faire rayonner ce qu’il a vécu pour que l’esprit du cadeau continue à circuler.» y L’offre Du 5 octobre au 11 mars 2018
LEE MINGWEI, MONEY FOR ART #1-5, 1994. ÉPREUVE CIBACHROME, 11 X 14 POUCES, CHACUN. AVEC L’AIMABLE PERMISSION DE L’ARTISTE.
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ALEXANDRE TAILLEFER DE LA MAIN GAUCHE
PETIT TRAITÉ PHILOSOPHIQUE DE FISCALITÉ POUR LES NULS Ce qui est surprenant avec la fiscalité, c’est de voir à quel point est incompris et jugé inintéressant quelque chose de pourtant omniprésent dans nos vies – notre plus important partenaire, en fait. On envoie une grande partie de notre chèque de paye, mais l’allocation de ces dollars est floue. Quel quidam peut se vanter de connaître le budget annuel du Québec, l’allocation qu’il fait en santé et en éducation, et la provenance de ses revenus? J’ai reçu une invitation à donner une conférence lors du 6e Symposium en fiscalité qui a eu lieu à l’Université Laval à Québec en juin dernier. Moi? Parler de fiscalité? Je sais à peine en baragouiner... Je me suis interrogé sur les raisons et surtout ma légitimité à parler devant des experts. Puis j’ai compris qu’ils ne cherchaient pas de moi une analyse technique du dernier jugement de la Cour, mais plutôt une réflexion d’un citoyen observateur. Une idée que je retiens à la suite de la lecture des différentes présentations qui ont été données durant le séminaire à Québec est qu’une tendance semble émerger dans le monde de la fiscalité. Bien qu’elle doive continuer à appliquer la loi et la jurisprudence à la lettre, la Cour de l’impôt prendrait de plus en plus en compte la question morale afin d’alimenter son jugement. Bien
sûr, la définition de la morale peut être très élastique, mais c’est très intéressant de savoir que le débat se déplace peut-être ailleurs, dans une autre stratosphère, dans celle des intentions originales. Je vous mentirais si je vous disais que la fiscalité ne m’intéresse pas. Pour avoir été dirigeant d’entreprises depuis 25 ans, une compréhension de base des concepts fiscaux a toujours été importante. J’ai eu la chance de payer beaucoup d’impôts et de côtoyer des professionnels qui m’ont accompagné dans la mise en place de ce qu’ils appellent une optimisation fiscale. Optimiser, parce que la loi est si complexe, si épaisse (plus de 3000 pages) et si tortueuse qu’elle oblige l’embauche de milliers de spécialistes qui aident ceux qui ont les moyens de les rémunérer à diminuer leur facture fiscale. C’est évident qu’une entreprise qui paye des dizaines de millions de dollars en impôts annuellement serait folle de ne pas examiner ses autres options fiscales. En fait, un PDG qui ne se soucie pas de cette importante ponction annuelle est considéré comme ne faisant pas bien son travail. La plupart des commentaires et des opinions entourant la fiscalité sont souvent acerbes envers les riches et les entreprises. Entretenues par des écrits démagogues et souvent incendiaires (je pense entre
autres au livre d’Alain Deneault intitulé Une escroquerie légalisée qui commence avec la phrase suivante : «Lorsqu’on attend quarante minutes un autobus à moins 20 degrés Celcius, c’est à cause des paradis fiscaux.»). Ces prises de parole rendent la population très méfiante, voire méprisante envers le 1% et les entreprises, sans discernement, alors que ces derniers assument une part très importante de nos recettes fiscales. Nul besoin ici de rouler les yeux et de vous dire: «On le sait bien, un riche qui va nous expliquer qu’y en a pas de problème.» Il ne fait pas de doute que certains trichent. Certains trichent même beaucoup. Mais il est difficile de déterminer avec certitude de combien. Ce que je sais par contre, c’est que les médias amplifient les choses et laissent parfois croire que le Québec et le Canada n’auraient plus de dettes si les riches payaient leur juste part. C’est du grand n’importe quoi. L’effort doit provenir de partout. S’il y a des sommes non déclarées dans les paradis fiscaux, il y a aussi des milliards qui transitent au noir chaque année, particulièrement dans le domaine de la construction, puis d’autres milliards qui sont subtilisés par des déductions injustifiées. Il m’apparaît important ici de parler de deux éléments de base en fiscalité. D’abord, le principe d’intégration fiscale. L’intégra-
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tion fiscale cherche à taxer les revenus de façon égale, qu’ils transitent par une entreprise, un fonds de pension ou qu’ils soient gagnés directement par un citoyen. C’est la raison pour laquelle un dividende est taxé de façon moins élevée qu’un salaire. L’entreprise a déjà payé une partie des impôts. En d’autres mots, une entreprise pourrait ne pas être taxée du tout, à condition que le propriétaire qui reçoit les profits de l’entreprise le soit au même niveau qu’un employé. Et vice versa. Ce principe est important à comprendre. Les entreprises sont détenues par des citoyens. Et l’objectif est d’appliquer une table d’imposition équivalente pour tous, et ce taux doit être en fonction de leurs revenus totaux. Ensuite, il est important de comprendre la différence entre évitement et évasion. L’évitement est l’utilisation de structures légales (mais peut-être pas morales) permettant de diminuer et de reporter de l’impôt. Avoir de l’argent dans un paradis fiscal n’est pas toujours illégal. Des juridictions qui
offrent des taux d’imposition très bas attirent des entreprises qui vont y reconnaître des revenus. Ces revenus devront toujours par la suite revenir aux actionnaires et donc dans les pays d’origine. Mais l’impôt peut y être reporté pendant des décennies. En toute légalité. L’évasion c’est de l’argent non déclaré; ce sont des gestes illégaux qui permettent d’éviter de payer sa juste part. J’étais dernièrement l’un des signataires d’une lettre ouverte saluant les efforts du gouvernement Trudeau quant à la réforme fiscale que son ministre des Finances, Bill Morneau, compte mettre en place. Je ne suis pas d’accord avec toutes ses propositions, je m’oppose entre autres à une taxation plus importante des revenus passifs générés par les entreprises et à toute forme de rétroactivité liée à l’introduction de nouvelles règles fiscales. On ne peut pas changer les règles du jeu en cours de route et avoir ainsi un impact sur les finances de centaines de milliers de cotisants qui ont agi et planifié en fonction des règles d’alors. Mais je salue
la volonté d’ouvrir un dialogue et de cibler les iniquités et les incongruités. Nul n’est censé ignorer la loi, mais nul ne devrait avoir à lire 3000 pages pour la comprendre et la faire jouer en sa faveur. Je ne suis qu’un simple citoyen et mon opinion ne vaut sûrement pas grand-chose auprès des professionnels. On me traitera d’utopiste, mais je me demande si la Loi de l’impôt sur le revenu ne devrait pas être rapportée à sa plus simple expression, à quelques dizaines de pages, et que tout ce qui touche les mesures de développement économique et social devrait en être évacué afin de ne pas alourdir et complexifier inu tilement cette loi. Je demande en fait si on ne devrait pas faire table rase et établir ensemble ce que devrait être moralement le fardeau fiscal de tous afin d’atteindre des objectifs communs, dont l’amoindrissement des iniquités. Une vraie réforme n’aura de sens que si tous les volets sont atta qués sans complaisance. Me semble que ça constituerait une bonne base… y
Lequebecbio, en collaboration avec Aliments du Québec et ses partenaires, présente Le bio d’ici, ça vaut le coût!
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QUOI FAIRE
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PHOTO | RAPHAËL OUELLET
MUSIQUE
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PHILIPPE B PLACE DES ARTS – CINQUIÈME SALLE – 17 OCTOBRE
Grâce à son sublime cinquième album La grande nuit vidéo, qui fait écho aux expérimentations folk orchestrales de son acclamé Variations fantômes, Philippe B a une fois de plus confirmé son statut d’incontournable de la chanson québécoise. Dans le décor intimiste et magique de la Cinquième Salle de la Place des Arts, l’auteur-compositeur-interprète originaire de Rouyn-Noranda sera à son meilleur.
QUOI FAIRE 69 VOIR MTL
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DEATH FROM ABOVE THÉÂTRE CORONA – 20 OCTOBRE
Le duo dance-punk de Toronto revenait sur disque le mois dernier avec Outrage! Is Now. Notre collaborateur Antoine Bordeleau le qualifiait ainsi: «L’album redonne ses lettres de noblesse noisey aux deux comparses, qui semblent ici plus en forme que jamais.» Les murs du Théâtre Corona devraient vibrer intensément.
GABRIELLE SHONK MAISON DES ARTS DE LAVAL – 28 OCTOBRE
Environ un an après un premier succès, la pièce Habit, la chanteuse de Québec Gabrielle Shonk a été signée chez le major Universal et sortait tout récemment un premier album. La voix sublime et jazzée de Gabrielle Shonk et son énergie lumineuse (et contagieuse) sur scène font d’elle une star en devenir.
PHOTO | MAXYME G. DELISLE (CONSULAT)
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R E S TA U R A N T M A E S T R O . C O M
SA I NT SAU VEU R
PHOTO | VICTORIA DIMAANO
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DEAR CRIMINALS CLUB SODA – 6 OCTOBRE
Les inclassables musiciens de Dear Criminals sont habitués de sortir de leur zone de confort. Après avoir touché aux mondes du théâtre, de la danse, du cinéma et de la télévision, les trois complices s’intéressent à l’art numérique avec Stereoscopic, spectacle immersif durant lequel un VJ générera un environnement 3D en fonction de la performance du groupe et de l’énergie du public.
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JAPANESE BREAKFAST BAR LE RITZ P.D.B – 8 OCTOBRE
L’énergique bande américaine vient nous présenter son deuxième album en autant d’années, Soft Sounds from Another Planet. Au menu: pop-rock tantôt planante, tantôt dansante. La leader Michelle Zauner et ses musiciens se produiront sur les mêmes planches qui les avaient accueillis à l’été 2016. Plaisir garanti.
SUSANNE SUNDFØR CENTRE PHI – 3 NOVEMBRE
Évoluant depuis un peu plus de 10 ans dans sa Norvège d’origine, Susanne Sundfør propose un alliage musical unique qui défie les époques. Entre baroque, synth pop et folk, l’auteure-compositrice-interprète de 31 ans nous rendra une rare visite afin de présenter les pièces de Music for People in Trouble, son sixième album paru plus tôt cette année.
SOIRÉE MARIACHI
PHOTO | EBRU YILDIZ
FUTURE ISLANDS M TELUS – 7 OCTOBRE
Après un passage plus que remarqué au talk-show de fin de soirée de David Letterman en 2014, les mouvements de danse assassins du chanteur Samuel Herring se retrouvaient sur toutes les scènes. En plus de 10 ans de carrière, le groupe de Baltimore a fait ses preuves maintes fois sur disque. Le petit dernier, The Far Field, est sorti en avril.
TOUS LES PREMIERS VENDREDIS DU MOIS ET LES PREMIERS SAMEDIS DU MOIS
NICOLAS JAAR L’OLYMPIA – 12 OCTOBRE
Brillant compositeur électronique et improvisateur, Nicolas Jaar nous revient déjà, quelques semaines seulement après un passage au festival Osheaga. Il affirmait récemment que ce serait son dernier spectacle en ville avant un bon moment. A-t-il l’intention de prendre une pause bien méritée? À suivre.
1602 RUE LAURIER EST MONTRÉAL - 514.564.8858 765 SAINT-FRANCOIS-XAVIER TERREBONNE - 514.945.8688 D-TRACK THÉÂTRE OUTREMONT - SÉRIE MILE-OUT
CLOUD NOTHINGS ET JAPANDROIDS
18 NOVEMBRE À 20 H
THÉÂTRE CORONA – 21 OCTOBRE
On reconnaît l’artiste champion de slam québécois, David Dufour, alias D-Track, pour sa plume et son talent en « freestyle ». En 2015, il publie un 1er livre, Détroit. En 2016, Message texte à Nelligan est nommé à l’ADISQ dans la catégorie album hip hop de l’année. À voir absolument.
Deux des formations rock les plus pertinentes de la décennie actuelle croiseront le fer le temps d’un programme double à ne pas manquer. Alors que Cloud Nothings reviendra défendre les pièces de Life Without Sound, un honorable album qui manquait toutefois un peu de mordant, le duo vancouvérois Japandroids livrera son mélange de noise pop et de rock garage avec son intensité habituelle.
RETOUR EN BOURGOGNE
LA PASSION VAN GOGH
PIERRE LAPOINTE
EN SALLE LE 29 SEPTEMBRE
EN SALLE LE 27 OCTOBRE
THÉÂTRE CORONA - 14 ET 15 DÉCEMBRE
En apprenant la mort imminente de son père, Jean revient dans sa Bourgogne natale où il retrouve sa sœur, Juliette, et son frère, Jérémie, après dix ans d’absence. En l’espace d’un an, ils vont retrouver ou réinventer leur fraternité, s’épanouissant et mûrissant en même temps que le vin qu’ils fabriquent.
31E COUP DE CŒUR FRANCOPHONE
GRAND THÉÂTRE DE QUÉBEC - LE 8 DÉCEMBRE
En 1891, Armand Roulin est chargé de remettre une lettre au frère du défunt Vincent van Gogh. Sa recherche le mène de Paris à Auvers-sur-Oise, où il interroge ceux qui ont connu l’artiste et découvre la vie surprenante et passionnée du peintre. Premier film au monde en peinture à l’huile.
Pierre Lapointe présente un tout nouveau spectacle: La science du cœur. L’artiste sera de passage à Montréal les 14 et 15 décembre 2017 au Théâtre Corona et en supplémentaire au Grand Théâtre de Québec le 8 décembre. Toutes les dates de la tournée au pierrelapointe.com
HARRY POTTER ET LA CHAMBRE DES SECRETS MD EN CONCERT
LA LNI S’ATTAQUE AUX CLASSIQUES
DU 2 AU 12 NOVEMBRE
21 ET 22 OCTOBRE - PLACE DES ARTS
Axé sur l’émergence, #CCF17 c’est un carrefour de découvertes et d’artiste reconnus, une programmation éclectique qui présente un vaste panorama de genres. C’est plus de 100 spectacles et plus de 350 artistes d’ici et d’ailleurs présentés dans 19 salles montréalaises!
La série de films-concerts Harry Potter revient à la Place des Arts avec Harry Potter et la chambre des secrets, le deuxième film de la franchise Harry Potter. Le samedi 21 octobre et le dimanche 22 octobre 2017, le film sera présenté en haute définition sur un écran de 40 pieds, tandis qu’une grande symphonie jouera la musique inoubliable de Harry Potter et la chambre des secrets écrite par John Williams.
ESPACE LIBRE DU 28 NOVEMBRE AU 9 DÉCEMBRE
De retour à Espace Libre pour une troisième année. Un projet enrichissant et étonnant qui nous plonge chaque fois dans l’oeuvre d’un artiste majeur de la dramaturgie. Treize spectacles d’improvisation théâtrale complètement différents autour de Shakespeare, Molière, Ionesco, Robert Lepage, Michel Tremblay, Michel Marc Bouchard...
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GOLDLINK L’ASTRAL – 14 OCTOBRE
Fort d’un premier album solo acclamé, en partie produit par notre étoile locale Kaytranada, GoldLink marie hip-hop, soul et jazz fusion avec une énergie sans pareille et un groove exceptionnel. Le rappeur originaire de Washington s’amène à Montréal avec Masego Music, chanteur et musicien à la frontière du trap, du jazz et de la house.
LE 21 FÉVRIER, PASSEZ À
Participez à une conférence conçue pour vous aider à prendre de meilleures décisions et passer à l’action.
COMMENT TRANSFORMER LES ENTREPRISES AFIN DE PERMETTRE LE PLEIN ESSOR DES FEMMES ? Sophie Brochu Gaz Métro
Noémi Mercier L’actualité
Isabelle Hudon Sun Life
Alexandre Taillefer XPND Capital
Pour plus d’information :
lactualite.com/conferences
LA SÉRIE DE CONFÉRENCES L’ACT PROPOSE UNE APPROCHE INÉDITE
ateliers Une approche pratique où de nouvelles solutions seront discutées et élaborées en groupe.
conférences Un espace d’échanges pour s’informer, faire le point sur les dernières recherches et remettre en question ses prises de position.
terrain Des journalistes chevronnés qui nourrissent et facilitent les discussions.
AUSSI EN 2018 : LA SURCHARGE MENTALE L’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE
PRÉSENTÉ PAR
SCÈNE
76
LA FEMME LA PLUS DANGEREUSE DU QUÉBEC THÉÂTRE DENISE-PELLETIER – 10 AU 28 OCTOBRE
Sans être une biographie ou un récital des textes de Josée Yvon – «la fée mal tournée» –, cette pièce de la compagnie La Messe basse revient sur la vie et l’œuvre de la poétesse québécoise en donnant l’occasion d’entendre ses mots, notamment au moyen d’archives inédites.
LA NUIT DU 4 AU 5 CENTRE DU THÉÂTRE D’AUJOURD’HUI – JUSQU’AU 20 OCTOBRE
Cette nuit-là, une jeune fille est agressée. Depuis, alors qu’elle essaie de se souvenir des détails de la nuit et de l’agresseur, sa mémoire semble avoir perdu des morceaux... Cette pièce de Rachel Graton parle de la culture du viol et de la reconstruction de la victime. Comment se relever?
LA MORT D’UN COMMIS VOYAGEUR THÉÂTRE DU RIDEAU VERT – JUSQU’AU 4 NOVEMBRE
«Lorsque le rêve américain tourne au cauchemar»: Serge Denoncourt propose sa mise en scène de ce classique de la littérature américaine (Pulitzer 1949), qui dessine en filigrane une critique du capitalisme derrière l’histoire d’une relation père-fils. Avec Marc Messier dans le rôle principal.
JE DISPARAIS THÉÂTRE PROSPERO – 26 SEPTEMBRE AU 21 OCTOBRE
Deux femmes fuient leur pays. On ne sait pas quoi, on ne sait pas où, on ne sait pas comment. Ce texte d’Arne Lygre, c’est un beau «poème sur l’éloignement» que met ici en scène Catherine Vidal. Des mots qui évoquent aussi le sentiment d’insécurité de plus en plus prégnant dans notre société... >
Pour un délicieux smootie, un bon café ou pour le légendaire club sandwich
PHOTO | MAGALI CANCEL
LA FEMME LA PLUS DANGEREUSE DU QUÃ&#x2030;BEC
APPORTEZ VOTRE VIN!
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SIMON LEBLANC
LES ENFANTS D’ADAM
L’OLYMPIA – 28 OCTOBRE
MONUMENT-NATIONAL – JUSQU’AU 8 OCTOBRE
Révélé à En route vers mon premier gala Juste pour rire 2010 et sacré révélation de l’année au gala des Olivier en 2014, Simon Leblanc met de l’avant un humour d’observation aussi intelligent que délirant. Sur les scènes du Québec depuis près de trois ans avec son premier one-man-show Tout court, le Gaspésien s’amène à Montréal avec son énergie contagieuse.
Présentée en Amérique du Nord pour la première fois, cette pièce islandaise met en scène les membres d’une famille et le choc générationnel qui apparaît entre eux. L’auteure Audur Ava Ólafsdóttir (Rosa candida) confronte les incompréhensions des enfants et les secrets des parents.
LES BÂTISSEURS D’EMPIRE OU LE SCHMÜRZ THÉÂTRE DENISE-PELLETIER JUSQU’AU 21 OCTOBRE
Michel-Maxime Legault amène Boris Vian sur scène en choisissant cette œuvre phare de l’écrivain français, écrite en 1957 peu avant sa mort. Cette pièce à l’humour décalé et qui tend vers l’absurde dépeint une famille bourgeoise... avec un invité pas comme les autres.
PSYCHÉDÉLIQUE MARILOU
10% DE RABAIS SUR COMMANDE POUR EMPORTER RESTAURANT TORII SUSHI 2131, BOUL. LE CARREFOUR LAVAL, QC H7S 2J7 TORIISUSHI.COM 450.978.8848
LA LICORNE – JUSQU’AU 28 OCTOBRE
La Manufacture propose ce nouveau texte de Pierre-Michel Tremblay, une folle comédie qui mêle psychédélisme, histoire de famille et réflexion sur la société moderne. On retrouve à la mise en scène Philippe Lambert, qui avait monté l’excellente Baby-Sitter au printemps dernier...
LA BIBLIOTHÈQUE-INTERDITE THÉÂTRE DE QUAT’SOUS – 12 AU 14 OCTOBRE
Dans une ambiance qui rappelle la culture argentine, cet opéra-tango situé à Buenos Aires en 1941 oscille entre réalité et fiction. Un hommage de danse et de poésie aux écrivains qui se sont levés contre le fascisme. La pièce est une reprise, à la demande du public. À (re)voir donc.
PASCAL CAMERON BRASSERIE DES PATRIOTES – 14 OCTOBRE
Révélé aux côtés de Charles Deschamps et Colin Boudrias dans Humour noir, binôme de spectacles présentés à Zoofest, Pascal Cameron présente le «spectacle de blagues» Dépression, sa troisième aventure solo. Mettant de l’avant un humour trash, juste assez acerbe, le Montréalais reviendra à la Brasserie des Patriotes deux semaines après y avoir présenté le même spectacle devant une salle comble.
PROPULSÉ PAR
LUCIE PAGÉ JOURNALISTE ET AUTEURE
AFRIQUE DU SUD : LES MOTS QUI PORTENT LES GENS Plongez au cœur de la plus grande démocratie multiraciale d’Afrique et découvrez, en compagnie de la journaliste et auteure Lucie Pagé, qui y vit depuis plus de 20 ans, de quelle manière les artistes, la musique et les mots ont joué un rôle clé dans la libération de l’Afrique du Sud.
DÉPART EN MAI 2018
VIVEZ L’AFRIQUE DU SUD DE L’INTÉRIEUR AVEC LUCIE PAGÉ
POUR PLUS D’INFORMATION : lactualite.com/voyages — 1 866 722-0909
CINÉMA
80 THE FOREIGNER EN SALLE LE 13 OCTOBRE
Un humble entrepreneur au lourd passé camouflé tentera d’obtenir justice pour sa fille, tuée violemment dans une explosion terroriste. Un véritable jeu de chat et de souris s’ensuivra alors qu’un membre du gouvernement cache l’identité réelle des tueurs.
LE JEUNE KARL MARX EN SALLE LE 13 OCTOBRE
À l’âge de 26 ans, Karl Marx part en exil avec sa femme. Arrivé en 1844 à Paris, le couple rencontrera Friedrich Engels, fils d’un propriétaire d’usines, qui expliquera à Marx la naissance sordide du prolétariat anglais. Entre censure, émeutes et prises de pouvoir politiques, les deux jeunes hommes forgeront le mouvement ouvrier, la plus grande transformation politique et théorique de l’histoire depuis la Renaissance.
THE KILLING OF A SACRED DEER EN SALLE LE 27 OCTOBRE
VIVEZ L’EXPÉRIENCE LE STEAK FRITES ST-PAUL
Steven et Anna, respectivement un brillant chirurgien et une ophtalmologue respectée, vivent une vie de famille heureuse avec leurs deux enfants. Depuis quelques semaines, Steven a également pris sous son aile un jeune garçon ayant perdu son père. Celui-ci deviendra progressivement de plus en plus imposant au sein de la famille et menaçant, jusqu’à ce qu’il pousse Steven à commettre un sacrifice immense.
LOVING VINCENT EN SALLE LE 27 OCTOBRE
Chargé de livrer une lettre de Vincent Van Gogh à son frère Theo, Armand Roulin apprend que celui-ci n’a survécu que quelques mois à la disparition tragique de son frère aîné. Alors que Roulin ne pensait pas grand-chose de Van Gogh, il apprendra à connaître la vie surprenante et passionnée du peintre légendaire à travers des rencontres avec des gens qui l’ont connu. >
2125, boul. Le Carrefour Laval 450 682-6224
www.steakfrites.ca
HUMAN FLOW EN SALLE LE 20 OCTOBRE
À travers des images saisissantes capturées tour à tour en Irak, en Allemagne, en Israël, au Mexique, en Turquie et aux États-Unis, ce documentaire touchant explore la crise des réfugiés qui secoue actuellement notre monde.
SUBURBICON EN SALLE LE 27 OCTOBRE
Dans la plus typique des banlieues américaines des années 1950, une famille nucléaire modèle se retrouvera prise dans un cambriolage meurtrier. À la suite de celui-ci, le père sombrera dans une spirale de violence, de trahisons, de représailles et de chantage qui le mènera dans les tréfonds les plus sombres de sa propre personne. <
(GAUCHE) MISS D’VINE I, DE LA SÉRIE MISS D’VINE, 2007. ÉPREUVE À DÉVELOPPEMENT CHROMOGÈNE, 86,5 X 86,5 CM (DROITE) BESTER V, MAYOTTE, 2015, DE LA SÉRIE SOMNYAMA NGONYAMA, 2015. ÉPREUVE À LA GÉLATINE ARGENTIQUE, 60 X 51 CM AVEC L’AIMABLE AUTORISATION DE LA STEVENSON GALLERY (CAPE TOWN, JOHANNESBURG) ET DE LA YANCEY RICHARDSON GALLERY (NEW YORK)
ZANELE MUHOLI
IL ÉTAIT UNE FOIS... LE WESTERN
CENTRE D’ART ET DE DIFFUSION CLARK – JUSQU’AU 15 OCTOBRE
MUSÉE DES BEAUX-ARTS DE MONTRÉAL
La photographe et artiste visuelle sud-africaine Zanele Muholi «s’inspire de sa propre expérience pour défendre et dévoiler l’histoire et la culture visuelle de la communauté LGBTI». Dans le cadre de Portraits choisis, l’artiste de 45 ans présente des photos percutantes, défiant le racisme et renversant «les stéréotypes dont le corps noir a été victime au fil de ses représentations dans l’histoire».
TARYN SIMON MUSÉE D’ART CONTEMPORAIN DE MONTRÉAL JUSQU’AU 19 NOVEMBRE
S’intéressant aux hommes de pouvoir «flanqués de compositions florales» lors des cérémonies de signature d’accords politiques, l’artiste multidisciplinaire américaine Taryn Simon recrée ces arrangements afin de montrer les mécanismes du pouvoir économique et politique. Paperwork and the Will of Capital est présentée dans le cadre de l’édition 2017 de la biennale de l’image MOMENTA.
14 OCTOBRE AU 4 FÉVRIER 2018
Visant à documenter le phénomène western, cette exposition «établit un dialogue entre le cinéma et les beaux-arts». Prenant comme point de départ «les grandes peintures des paysages de l’Ouest, les romans populaires et le spectacle Wild West de Buffalo Bill», l’événement, produit et conçu par le MBAM, s’intéresse aussi au genre cinématographique qu’ont popularisé Leone et Ford, et que continuent de faire évoluer Tarantino, Lee et les frères Coen.
SALON DES VINS D’IMPORTATION PRIVÉE MARCHÉ BONSECOURS – 28 ET 29 OCTOBRE
Le Salon des vins d’importation privée, qui fête sa 10e année, accueille le grand public de 12h à 19h. Ce sont 150 vignerons du monde entier qui seront présents pour proposer plus de 2000 produits d’importation privée à découvrir et à déguster, ou à acheter sur place.
GASTRONOMIE
ARTS VISUELS
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