QUÉBEC VO3 #11 | NOVEMBRE 2O18 CONSERVER LA DANSE M.I.L.F. GUILLAUME TREMBLAY ET OLIVIER MORIN SALOMÉ LECLERC BENOIT PARADIS TRIO CUISINE, CINÉMA ET CONFIDENCES KIM CÔTÉ À TOUS CEUX QUI NE ME LISENT PAS SAMUEL FOURACRE
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VIRGINIE FORTIN
UNE PRODUCTION
Julie Magnan, L’autre : ma torture, mon salut (détail), 2015. Photo : Étienne Dionne
LAISSEZ-VOUS IMPRESSIONNER PAR DU PIANO
E 2018
VEMBR MANYAN 18 NOEMBRE 2018 A H G R A H E R NA NTE 29 NOV 018 ANDRÉ LAPLDA-HAMELIN 12 DÉCEMBRE 2 R A H CHARLES RIC
DES JEUX VIDÉO
ÉO IE DU JEU VID LA SYMPH2O3 NNOVEMBRE 2018 22 ET
DU CINÉMA
4 HOLLYWCOEOMDBRE 2018
20, 21 ET 22
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QUÉBEC | NOVEMBRE 2018
RÉDACTION
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«QUAND JE SUIS À LA TÉLÉ, C’EST MON SURMOI QUI PARLE, TANDIS QUE, SUR SCÈNE, J’INCARNE LA VERSION LA PLUS CONFIANTE DE MOI-MÊME, CELLE QUI N’A PLUS DE DOUTES.» Photo | Maxyme G. Delisle (Consulat); Assistant | Julien Grimard; Maquillage | Sophie Parrot; Stylisme | Laurence Morisset-Blais; Retouche | Valérie Laliberté; Production | Vincent Boivent (Consulat) Remerciement au studio Trinidad
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SCÈNE
Conserver la danse
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MUSIQUE
Salomé Leclerc Benoit Paradis Trio
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CINÉMA
À tous ceux qui ne me lisent pas
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ART DE VIVRE
Cuisine, cinéma et confidences Portrait de chef: Kim Côté
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LIVRES
La petite Russie Aux premiers temps de l’anthropocène La société des grands fonds Ça raconte Sarah
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CRÉATION
Guillaume Tremblay et Olivier Morin
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ARTS VISUELS
Samuel Fouracre
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QUOI FAIRE CHRONIQUES
Simon Jodoin (p6) Émilie Dubreuil (p18) Mickaël Bergeron (p26) Normand Baillargeon (p32) Catherine Genest (p52)
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THÉOLOGIE MÉDIATIQUE
MOTS & PHOTO SIMON JODOIN
Question de souffle Je suis un vrai conservateur, dans le vrai sens du mot. Je veux conserver que c’est qu’on a. Y’a plus personne qui pense de même. Y ont ôté le dernier tramway à Montréal. Ben moi, ça m’a fait de la peine. J’aimais ça, moi, les p’tits chars, je trouvais ça beau pis je trouvais ça charmant. Ça marchait à l’électricité pis ça coûtait pas cher. Y remplacent ça par des autobus qui font un vacarme épouvantable, ça boucane noir, ça sent le yable, pis ça coûte une fortune. Y appellent ça le progrès. Le trafic va aller plus vite. Qui c’est qui est si pressé que ça? Où c’est qu’y veulent aller de même? — Duplessis (joué par Jean Lapointe), minisérie de Denys Arcand, 1978 ---
Il y a ici, en deux phrases, toute la chimie nécessaire pour provoquer une réaction en chaîne et un profond questionnement métaphysique. Qu’est-ce que je fais au cosmos alors que je respire? Suis-je en symbiose avec les arbres et les forêts? Quelle est donc ma place dans ces espaces infinis? D’ailleurs, ceux qui s’intéressent un tant soit peu à la théologie et à la spiritualité savent que la notion de souffle est, étymologiquement et conceptuellement, liée à la notion d’esprit. Je vous le dis, moi. Maxime Bernier est un philosophe.
Nathalie Normandeau, qui était en 2011 ministre des Ressources naturelles et de la Faune, avait tenté un exercice du genre à l’époque afin de rassurer ceux qui s’inquiétaient qu’on creuse un peu partout des puits de gaz de schiste. «Une vache émet plus de CO2 dans l’atmosphère qu’un puits, proposaitelle. C’est factuellement prouvé. Alors, est-ce qu’on peut arrêter de faire de la démagogie?» Je dois avouer que la vache, comme unité de mesure, c’est assez rassurant. Tout le monde peut comprendre ça. Dans Le Devoir, à l’époque, Louis-Gilles Francœur avait publié un article question de mieux comprendre les calculs bovins de madame Normandeau. En analysant trois puits de gaz, les agronomes de Nature Québec avaient découvert que les émissions mesurées correspondaient plutôt à 107 vaches, sur une base annuelle.
J’avais une chronique toute prête à vous proposer sur la cuisine automnale quand j’ai vu passer cette sortie de Maxime Bernier à propos de la pollution et du CO2. Je ne sais pas comment vous résumer la chose. C’est comme une blague entre amis, ça ne se raconte pas. Il fallait être là. C’était sur Twitter, par un beau mercredi un peu gris à la fin octobre, juste avant Halloween.
Je pense même qu’il ne peut pas être aussi con qu’il le laisse croire. Mais qu’il sait, par ailleurs, qu’il y aura assez de cons pour le croire.
Car ça pourrait marcher. En ces matières, plus rien ne devrait nous étonner.
La vache annuelle. Voilà une nouvelle unité de mesure facile à comprendre. Comme le pied linéaire ou le mètre carré.
«Le CO2 n’est PAS de la pollution, écrivait-il. C’est ce qui sort de votre bouche quand vous respirez et ce qui nourrit les plantes.»
Face au précipice des choses complexes, celui qui brandit la corde de la simplicité pourrait connaître un certain succès. Ça s’est déjà vu.
Notez au passage qu’à la même époque, afin de démystifier tout ça, il a fallu aussi préciser que les émissions bovines n’étaient pas, comme on le croit souvent, le résultat
Là se trouve tout le nœud à dénouer.
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de pets de vaches, mais bien de rots que font les animaux en ruminant. Toujours bon à savoir. Mais vous voyez? Le souffle encore. Respiration et digestion. Des choses simples. En brassant tout ça, on pourrait même se demander à combien de vaches annuelles équivaut le souffle hebdomadaire de Maxime Bernier. Toutes ces questions qui nous échappent.
Il y a de quoi sourciller lorsqu’on voit tous ces esprits partisans faire des simagrées et des grimaces dès qu’on amorce une réflexion écologique qui pourrait remettre en question non seulement nos modes de production, mais aussi notre mode de vie. Ce n’est pas être de droite ou de gauche que de considérer qu’il est plutôt idiot de se fatiguer inutilement et de saloper le paysage tout en rendant l’air pesant de puanteur. On peut même considérer que la remise en question de cette course effrénée à la croissance est, en soi, profondément et essentiellement conservatrice.
--Reste que l’air ambiant est en train de faire rouiller pas mal nos vieux camions et qu’on ne pourra plus creuser n’importe comment et n’importe où afin de brûler du gaz. Brûler du gaz, se fatiguer inutilement, déployer une énergie inutile. C’est bien de cela qu’il est question dans toutes ces discussions sur l’environnement.
Il est difficile de comprendre comment nous pourrions être divisés sur ces questions et sur quoi se fondent les rivalités lorsque nous considérons que nous devrions garder la maison propre, nous arrêter un instant et faire le point. D’où vient donc cette mystérieuse opposition, si ce n’est que d’un désir de préserver l’opulence de quelques industriels qui se shootent au cash en
hallucinant des mondes meilleurs qui n’arrivent jamais? Plus curieux encore, sur cette opposition, on nous propose un dilemme en forme d’acrobatie suicidaire: est-ce que l’économie doit passer avant l’écologie? Existe-t-il une question plus conne? Encore ici, les mots ont un sens têtu. Le préfixe éco-, commun à ces deux mots, vient du grec oiko, qui signifie maison ou plus justement la maisonnée, le milieu de vie, le lieu où nous habitons ensemble et que nous devons à la fois gérer et comprendre. Il n’y a pas à choisir ici… Il s’agit du recto et du verso de la même feuille de papier. Toutes ces querelles sont inutiles et devraient se régler en peu de mots: Tu brûles du gaz, man… Respire par le nez un peu. y sjodoin@voir.ca
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PARCOURS IMPROVISÉ IMPROVISATRICE CHEVRONNÉE, VIRGINIE FORTIN A PRIS LES DÉTOURS QU’IL FALLAIT POUR ÊTRE HEUREUSE. APRÈS S’ÊTRE CHERCHÉE DURANT UNE BONNE PARTIE DE SA VINGTAINE, LA MONTRÉALAISE DE 32 ANS A COMPRIS QU’ELLE NE FERAIT JAMAIS UNE SEULE CHOSE DE SA VIE. ENTREVUE AVEC UNE ANIMATRICE, COMÉDIENNE ET HUMORISTE QUI MULTIPLIE LES PROJETS À DÉFAUT D’AVOIR DES AMBITIONS IMMUABLES. MOTS | OLIVIER BOISVERT-MAGNEN
Avec ton premier one-woman-show, ton émis sion bihebdomadaire L’heure est grave et ton rôle dans la série Trop, on se doute que ton horaire doit être assez chargé depuis quelques mois. En septembre dernier, tu disais d’ailleurs au journal Métro que tu allais «être gossante cet automne» tellement tu avais de projets en branle. Est-ce que ton impression est maintenant confirmée? En ce moment, je ne me trouve pas gossante, car je ne me regarde pas constamment à la télévision, mais je trouve effectivement que je suis impliquée dans trop de projets en même temps. Le plus drôle là-dedans, c’est que j’ai même pas ce désir-là d’être sur toutes les plateformes. C’est vraiment juste une question de circonstances. L’une de ces «circonstances» est sans doute la popularité de Trop, qui a repris le petit écran pour une deuxième saison. Avais-tu prévu que le jeu allait prendre une place aussi grande dans ta carrière? Sincèrement, c’était mon rêve d’enfant d’être comédienne. Mon père (Bernard Fortin) est luimême comédien et, étant l’enfant du milieu, j’ai toujours cherché beaucoup l’attention, ce qui explique en partie ce rêve-là. C’est vraiment au cégep, durant mes études en théâtre, que tout ça a changé. Je ne me trouvais pas crédible dans la peau d’un personnage qui vit une émotion. Je préférais vraiment l’improvisation. Je suis donc entrée à la Ligue nationale d’improvisation (LNI) durant mes
PHOTOS | MAXYME G. DELISLE
études universitaires et, pendant cinq ou six ans, j’ai continué à voir cette passion-là comme un simple hobby, en parallèle de ma jobine de serveuse au Centre Bell. Tout ça jusqu’au jour où je me suis dit: «Virginie, qu’est-ce que tu fais dans la vie?» J’en étais rendue à me dire qu’il fallait peut-être que j’abandonne mon rêve de jeunesse, un peu comme tous ceux qui réalisent que, finalement, ils ne pourront pas être astronautes... Bref, quand j’ai reçu l’appel de Trop, ma tête était vraiment ailleurs. J’étais rendue humoriste et j’avais vraiment le syndrome de l’imposteur. Je trouvais les textes très bons, mais je ne savais pas si j’allais être capable de laisser la place à cette grande vulnérabilité là. En fin de compte, qu’est-ce qui t’a donné la con fiance nécessaire pour assurer ce rôle? En fait, je pense pas que je l’avais au départ, la confiance absolue. C’est vraiment en voyant la réaction de tout le monde sur le plateau que toutes mes craintes se sont dissipées. C’est moi la dernière qui ai cru en mon potentiel! Dans la vie, je suis pas le genre de personne qui va foncer si personne n’est là pour croire en moi. Mais à défaut d’avoir ce caractère-là, je crois avoir une certaine curiosité qui m’a amenée où je suis maintenant. Il y a beaucoup de hasard là-dedans, mais finalement, toutes ces curiosités-là ont fini par connecter ensemble. Parmi les curiosités auxquelles tu fais référence, il y a sans doute l’école d’improvisation The Second City, où tu as étudié durant tes séjours à Chicago
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et Toronto. C’est d’ailleurs dans la métropole ontarienne que tu as eu tes premières expériences de stand-up. Pourquoi avoir choisi cette ville? Je pourrais dire que c’est parce que je consommais davantage d’humour en anglais qu’en français, mais ce n’est pas juste ça. À ce moment-là, l’improvisation ne me stressait plus, et je cherchais un challenge différent. Je savais aussi que si je commençais le stand-up à Montréal, là où le milieu de l’impro est tissé très serré, je serais beaucoup plus stressée de me planter. Pour moi, faire de l’humour en anglais, c’était un peu comme jouer un personnage, et c’est pour cette raison que je participe encore annuellement au festival Fringe d’Édimbourg. J’aime être dans une réalité alternative qui n’a aucun impact sur ma vie au Québec. C’est vraiment l’idée de fuir la vie et de me mettre un masque. Dans plusieurs entrevues, tu dis avoir de la difficulté à t’ouvrir sur ta vie personnelle et, par conséquent, à comprendre l’intérêt des artistes qui se confient en détail aux médias et à leur public. Est-ce que ce refus du vedettariat excessif t’oblige, encore aujourd’hui, à te «mettre un masque»? Disons que j’aime pouvoir choisir la personne que je présente aux gens. Quand je suis à la télé, c’est mon surmoi qui parle, tandis que, sur scène, j’incarne la version la plus confiante de moi-même, celle qui n’a plus de doutes. Après ça, tout ce qui appartient à ma vie personnelle, j’essaie d’en donner le moins possible aux médias. Moi, je veux qu’on connaisse ce que je fais avant de s’intéresser à qui je suis. C’est probablement pour cette raison que j’ai refusé de participer à l’émission La vraie nature (à TVA). C’est un super véhicule promotionnel pour vendre des billets, mais le concept d’aller brailler dans une grange en regardant des photos de ma grand-mère morte ne m’intéresse pas. En fait, probablement que tout ça part de mon père qui faisait ce métier-là et qui, au début, avait accepté de jouer la game, d’aller prendre des photos en famille pour Le Lundi par exemple. Après un certain temps, il a décidé de tout arrêter, car il ne se sentait pas bien là-dedans. Reste que, malgré tous tes efforts, tu n’échappes pas au star-système. En cherchant «Virginie Fortin entrevue» sur Google, il y a les suggestions «Virginie Fortin enceinte» et «Virginie Fortin en couple avec» qui apparaissent avant... Effectivement, je n’y échappe pas! Le meilleur exemple pour illustrer ça, c’est mon passage au Gala des Olivier l’an dernier. J’y suis allée sans mon chum (l’humoriste Philippe Cigna de Sèxe Illégal),
et tout de suite en arrivant sur le tapis rouge, on m’a demandé: «Il est où ton chum?» J’ai répondu qu’il était en train de servir des repas au Refuge et qu’on se complétait bien comme couple, car il n’aimait pas vraiment les galas. Le lendemain, il y avait un article de six lignes à propos de moi avec, comme titre, «Un couple équilibré». J’étais découragée... À défaut de verser dans le récit anecdotique ou les confidences trop intimes, ton premier onewoman-show Du bruit dans le cosmos aborde des enjeux sociaux très actuels. On parle d’ailleurs de ton style comme d’«un humour posé et réfléchi». Es-tu à l’aise avec cette étiquette?
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«JE TROUVE QUE ÇA FAIT SNOB DE DIRE QUE JE RÉFLÉCHIS. T’ES PAS OBLIGÉ D’AVOIR UN PROPOS SOCIAL OU POLITIQUE POUR ÉCRIRE DE L’HUMOUR AVEC UNE RÉFLEXION.» Je trouve que ça fait snob de dire que je réfléchis. T’es pas obligé d’avoir un propos social ou politique pour écrire de l’humour avec une réflexion. Des conteurs d’histoires comme Jean-Marc Parent ou Simon Leblanc, je les trouve captivants, et ils réfléchissent tout autant que moi. C’est juste qu’on n’a pas les mêmes habiletés. Moi, ma zone de confort, c’est l’observation de l’existence au sens large. Si je parle de moi, c’est que je m’inspire d’une chose qui s’est déroulée dans ma vie pour ensuite amener un sujet plus grand. Par exemple, je peux lancer un numéro en disant que je possède 22 camisoles, mais tout ça va servir à mettre la table pour le sujet de la surconsommation et de la surproduction de linge. Je ne vais jamais faire une joke comme: «Hier, je suis allée à la quincaillerie et j’ai pété dans la rangée numéro 2!» Comment tes différentes réflexions s’intègrentelles dans le concept général de ton spectacle? La base du concept, c’est que j’observe la Terre de loin, comme si j’étais une extraterrestre. Je zoome ensuite sur les problèmes tangibles qu’on a en ce moment. C’est là que je constate que l’argent est un concept inventé qui n’a pas rapport dans le cycle de survie d’un humain, mais qui, en même temps, a fini par régir l’ensemble de nos vies et de nos sociétés, à un point où on n’est maintenant plus capables de s’en départir. Tout ça m’amène à me poser des questions sur le capitalisme et, donc, sur nos problèmes de surconsommation. Ah, et j’oubliais... À travers tout ça, il y a aussi des blagues!
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Et un peu de philosophie aussi? Oui, c’est une discipline qui m’habite encore beau coup et pour laquelle j’envisage de faire un retour à l’université. Depuis très longtemps, j’ai un vertige de l’existence. Tous les jours ou presque, je me rappelle que je suis prise dans mon corps. Avec Du bruit dans le cosmos, j’ai réalisé que, dans le fond, c’est pas grave si on comprend pas pourquoi on vit, car tout ce qu’on est existe seulement dans une petite parcelle de l’univers. En d’autres mots, tout ce qu’on vit sert à rien, donc le but, c’est juste d’avoir du fun. Pour les bienfaits de ce potentiel retour aux études, comptes-tu lâcher la scène ou la télé… ou les deux? En fait, même si je ne retourne pas étudier, je vais lâcher de quoi. Je peux pas garder un rythme comme ça. Je suis pas André Robitaille quand même! Mon but, c’est pas d’être partout le plus possible, mais bien de sentir que je fais de quoi que j’ai jamais fait dans la vie. J’aime les défis et, habituellement, j’ai tendance à aller vers les choses qui me terrifient. Quels sont ces prochains défis «terrifiants» que tu comptes relever prochainement? Je vais jouer dans une comédie musicale, un genre d’opéra rock humoristique avec un petit budget. Je peux pas trop en parler, mais ça risque fortement de faire partie de la prochaine édition du Dr. Mobilo Aquafest. Ensuite, j’aimerais aussi jouer dans un film. Je dis ça, mais en même temps, j’ai pas vraiment d’ambitions réelles. Tout ce que je veux, c’est que ma vie continue d’être le fun. Et si jamais mes affaires arrêtent de marcher un jour, je trouverai mon fun ailleurs. Dans le showbiz québécois, y a beaucoup de gens qui ont disparu de la mappe au fil du temps, et c’est pas nécessairement négatif. On se demande tous il est où Manuel Hurtubise, mais t’sais, peut-être qu’il est très heureux de ne plus être dans ce domaine-là. y Trop Diffusée à ICI Radio-Canada Télé jusqu’au 5 décembre et disponible sur Tou.tv Extra L’heure est grave Diffusée à Télé-Québec jusqu’au 9 décembre Du bruit dans le cosmos 15 mars au Cabaret des Amants (St-Georges) 16 mars à la Salle Promutuel (Montmagny)
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CONSERVER LA DANSE DU THÉÂTRE, IL NOUS RESTE LES TEXTES ET, EN MUSIQUE, LES DISQUES SURVIVENT AUX MUSICIENS QUI LES ONT ENREGISTRÉS. OR, QU’ADVIENT-IL D’UNE CHORÉGRAPHIE À LA TOMBÉE DU RIDEAU? LA DANSE CONTEMPORAINE, TELLE QUE NOUS LA CONNAISSONS AUJOURD’HUI, EST-ELLE IRRÉMÉDIABLEMENT VOUÉE À DISPARAÎTRE? ON EN DISCUTE AVEC CEUX QUI TENTENT, ET À TOUT PRIX, D’EN PRÉSERVER LES VESTIGES. MOTS | CATHERINE GENEST
La danse, contemporaine ou non, fait partie du patrimoine immatériel. On ne cristallise pas une pièce de Marie Chouinard comme s’il s’agissait d’une toile de Marcel Barbeau, par exemple. La danse s’inscrit d’abord dans le corps des interprètes, elle s’imprime dans leurs muscles, leurs articulations jusqu’au dernier tour de piste. Trop souvent, le mouvement meurt dans un dernier geste. Peu de traces subsistent des pièces, même des plus marquantes, lorsque les représentations viennent à échéance. Alors que le ballet jouit d’un lexique standardisé (exemple: pas de bourré, saut de biche, grand jeté) pour entrer dans l’histoire, les chorégraphes contemporains n’ont jamais su faire front commun. «C’est à la base même de ce qu’est la danse contemporaine», résume Harold Rhéaume, directeur général et artistique de la compagnie Le fils d’Adrien danse et ancien président du Regroupement québécois de la danse. «Chaque chorégraphe développe sa façon de travailler, son approche.» Quand le vocabulaire et les méthodes de création varient autant, il devient virtuellement impossible de s’entendre sur une technique de notation qui conviendrait à tout le monde. La danse contemporaine, après tout, est née en réaction à la rigidité du ballet, d’un besoin de liberté. Sésame, ouvre-toi Au Québec, ces années-ci et depuis déjà longtemps, le format d’archivage préconisé est celui de la boîte chorégraphique. Une méthode que Ginelle Chagnon, directrice de répétition notoire et pédagogue, a grandement aidé à développer à l’époque où elle assistait le légendaire Jean-Pierre Perreault. La Montréalaise voue aujourd’hui sa vie à la mémoire
PHOTO | EUGENIA MAXIMOVA
des autres, à la préservation d’un certain répertoire. Une démarche qui comporte son lot de défis. «L’expérience de la danse, de l’interprétation reçue, une fois faite, ça ne s’archive pas comme tel, admet-elle. La seule place où ça s’archive, c’est dans le cœur de la personne qui l’a reçue et l’a faite.» Mais qu’advient-il lorsque les artistes et le public se meurent, qu’il n’y a plus personne pour témoigner d’une œuvre? C’est là que le travail de Ginelle prend tout son sens, que ses boîtes chorégraphiques font office d’ultime témoin. Grosso modo, il s’agit d’un grand cartable colligeant des écrits, des disques compacts, des clés USB. Des mots, des vidéos et des images, en somme, qu’elle collecte pour préserver l’essentiel. «On peut faire de la documentation sur la régie de spectacles, sur la composition de la lumière, de la scénographie, énumère-t-elle. On peut faire des entrevues avec les artistes, les concepteurs, on peut faire des entrevues avec le public aussi et on essaie de conserver les articles qui ont été écrits [au sujet du spectacle]. Tout ça contribue à faire un portrait un peu plus complet.» La multiplication des angles constitue, pour ainsi dire, le nerf de la guerre. La vision du chorégraphe n’est pas la seule qui importe. Il suffit de réunir le plus d’échos, de témoignages possible pour que s’assemblent toutes les pièces du puzzle. Il arrive aussi que des éléments de décor subsistent, préservés par des institutions muséales. À cet égard, le Musée de la civilisation de Québec fait bonne figure. Quelques années seulement après la présentation de l’exposition Corps rebelles, Ginelle Chagnon a su le convaincre d’acquérir Cabane, homonyme de la pièce de Paul-André Fortier. Une installation de grande échelle démontée et rangée dans un coffre qui gît désormais dans sa réserve.
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GINELLE CHAGNON: «ON PEUT FAIRE DE LA DOCUMENTATION SUR LA RÉGIE DE SPECTACLES, SUR LA COMPOSITION DE LA LUMIÈRE, DE LA SCÉNOGRAPHIE… ON PEUT FAIRE DES ENTREVUES AVEC LES ARTISTES, LES CONCEPTEURS, ON PEUT FAIRE DES ENTREVUES AVEC LE PUBLIC AUSSI ET ON ESSAIE DE CONSERVER LES ARTICLES QUI ONT ÉTÉ ÉCRITS. TOUT ÇA CONTRIBUE À FAIRE UN PORTRAIT UN PEU PLUS COMPLET.»
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PHOTO AHMAD ODEH
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Partager l’information Conserver, c’est bien, mais diffuser, c’est mieux. Inaugurée en 2016, la plateforme EC2 de la Fondation Jean-Pierre Perreault propage des extraits de ces boîtes chorégraphiques sur la toile. Un corpus qui ratisse bien plus large que l’œuvre de l’artiste qui prête son nom à l’organisme. «La mission a changé, admet la directrice générale Lise Gagnon. Avant, c’était vraiment la valorisation et la transmission de l’œuvre de Jean-Pierre Perreault. Là, depuis cinq ans, on s’est vraiment ouverts au patrimoine chorégraphique québécois au pluriel. C’est toute une autre dimension.» Au moment d’écrire ces quelques lignes, on pouvait y consulter des extraits des boîtes de Bagne de Jeff Hall et Pierre-Paul Savoie et de Cartes postales de Chimère de Louise Bédard, notamment. L’initiative inspire. La ville de Québec a récemment vu naître le collectif Polygone formé du vidéaste David B. Ricard et des interprètes Étienne Lambert et Fabien Piché. La danseuse Geneviève Duong étudie actuellement en sciences historiques et études patrimoniales et complète le quatuor. À l’Université Laval, l’aspirante bachelière crée un précédent. Elle est la première à s’intéresser à la préservation de la danse contemporaine. «Mes possibilités de faire des liens avec le patrimoine en danse, c’est un projet de vie. Le programme est énormément teinté des démarches des enseignants, des professeurs qui sont des praticiens également. Il y en a beaucoup qui s’intéressent au patrimoine alimentaire et tout ça. Des gens qui s’intéressent au patrimoine en danse, il n’y en a pas actuellement dans le milieu universitaire à Québec.» Ensemble, les membres du groupe de recherche se livrent à un important travail de défrichage. La voie qu’ils empruntent n’est pas pavée, mais ils ont du cœur au ventre. «Il va falloir discuter avec des spécialistes dans leur domaine, prendre des modèles et voir qu’est-ce qu’on peut transposer en tout ou en partie en danse, admet Étienne Lambert.
C’est pour ça que, moi, en ce moment, c’est mon frère archéologue qui me nourrit dans sa façon de travailler. Il a une méthodologie intéressante.» Polygone travaille actuellement de pair avec Harold Rhéaume en vue du 20e anniversaire de sa pièce Les dix commandements, spectacle que le chorégraphe compte remonter avec une nouvelle distribution et transposer en film aux côtés de la réalisatrice Katrina McPherson. «Parallèlement à ça, j’ai trois beaux interprètes de Québec, Étienne, Geneviève et Fabien, qui me demandent s’ils peuvent me parler parce qu’ils ont un projet et tout ça, s’émeut Rhéaume. Je m’assois avec eux autres, moi, j’ai tout ça dans mes cartons, ils le savent pas. J’ai trouvé ça tellement touchant que des jeunes s’intéressent à la mémoire...» La première mission des quatre potes sera donc de restituer cette œuvre de 1998, le «premier gros show» d’un pilier qui fait pour eux office de mentor, une pièce qui avait jadis mis en vedette dix flamboyants danseurs, dont Dave St-Pierre et Lucie Boissinot, en plus d’avoir été présentée à la Place des Arts. Un véritable moment d’anthologie pour la danse au Québec. Évidemment, toutes les œuvres chorégraphiques ne connaîtront pas le même sort que Les dix commandements. Peu de femmes et d’hommes de danse passeront à travers le tamis, mais ceux qui y parviendront permettront à leurs héritiers de prendre du recul. Pour savoir où on va, il faut savoir d’où on vient. «C’est pas pour dire que le passé est plus intéressant, conclut Ginelle Chagnon, ça n’a rien à voir avec ça. L’archive, c’est pas pour montrer que “ah, c’était tellement mieux dans l’ancien temps”. Arrêtons de dire ça. C’est juste des traces qu’on a laissées. La chose qui est belle quand tu vas sur la plage, c’est de voir qu’il y a eu des traces de personnes qui sont passées et qui ne sont plus là. Tu sais, il y a une poésie là-dedans.» y La suite sur voir.ca
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MÈRES FOURRABLES ENTRE LES MÈRES À BOUTTE ET LES PARFAITES, TOUTES CELLES QUE L’ON ENVIE, DÉSIRE OU DÉTESTE, SE TIENNENT LES TROIS FIGURES MATERNELLES SEXUELLES, SEXUÉES, POQUÉES ET TOUCHANTES DE LA PIÈCE M.I.L.F. DE MARJOLAINE BEAUCHAMP. MOTS | CAROLINE DÉCOSTE
PHOTOS | MARIANNE DUVAL
Il y a celle qu’on voudrait fourrer – Mother I’d like to fuck. Il y a celle à sauver (MILS) et celle à tuer (MILK). Entre les trois se tissent des monologues qui s’entrecroisent, s’entrechoquent, donnent à voir les réalités plurielles de mères qui doivent composer avec les aléas d’une maternité à conjuguer avec la sexualité (ou avec l’absence de). Le sexe avec un grand S Pour cette deuxième collaboration entre la slameuse, interprète et dramaturge Marjolaine Beauchamp et le metteur en scène Pierre Antoine Lafon Simard, après Taram (Théâtre du Trillium, 2011), le public du Théâtre Périscope sera mis face à une esthétique tirée des codes de la pornographie qui appuie un texte sans tabous qui sonne non pas cru, mais vrai. Pour cause: l’auteure s’est appuyée sur des confidences pour créer un propos qui brasse la cage et le cœur. «L’élément déclencheur de M.I.L.F., c’est la rencontre de femmes. Je réfléchissais sur ma condition permanente de mère, parce que je m’intéresse dans ma création à l’aspect sociologique des choses. Faut dire que j’habite dans un HLM rempli de petites mamans qui sont s’ua goal… Je freestylais sur le sujet des mères pour Plus on est de fous, plus on lit!, j’avais envie d’écrire un truc à la fois humoristique et philosophique sur une mère qui a un one night, tsé la femme qui a eu un enfant pis qui a encore accès à la séduction. Finalement, j’avais beaucoup de choses à dire…» confie Marjolaine
Beauchamp au téléphone, le débit rapide et la voix assurée. Histoire de poursuivre sa réflexion sur les façons d’aborder ensemble la maternité et la sexualité, elle décide de réunir des femmes… autour d’une démonstration de jouets sexuels! «La démo, c’était juste un prétexte! [rires] Je côtoyais des mères ailleurs, en culture par exemple, mais je me demandais comment rendre ça plus universel. J’ai mis dans cette salle la variété la plus complète en matière d’âges, de milieux socioéconomiques, pis c’était empowering as fuck, les filles se confiaient, ç’a été des rencontres extrêmement riches. Y en a même qui ont acheté des produits!»
faire une vendetta contre l’acronyme. J’avais envie de prendre le pouvoir qu’il donne, de le désacraliser, de dire “voici les émois stériles de cette femme sacralisée qui serait la MILF”, de montrer son ambivalence, alors qu’elle est gênée et heureuse d’être désirée même après/en raison de ses enfants. Et pour désacraliser un terme, il faut l’employer à outrance!» De bon cœur, Marjolaine s’amuse des malaises des chroniqueurs culturels qui doivent dire MILF tout haut en ondes. «Les gens sont obligés de l’intellectualiser pis de l’acknowledger.»
En plus de cette soirée, Marjolaine a documenté des rencontres individuelles de mères et même des témoignages de gars dans sa messagerie Facebook. «Ce que je voulais savoir, c’était leur rapport de femmes, de mères avec l’acronyme MILF, tiré de la porno. Ma posture du début a beaucoup changé, comme ma vision de l’empowerment sexuel. Je me considère comme une fille assez progressiste, avec une position ouverte sur la sexualité, et je présumais que des femmes moins éduquées que moi auraient une sexualité plus complexée. C’était faux! Leur désira bilité en tant que mères, à leurs yeux, était incontestable. Dans mon écriture, j’ai eu envie de témoigner de ça.»
Marjo, penses-tu que c’est une pièce pour les mamans qui ont le loisir de réfléchir à leur condition? «Tsé, tout le monde s’en vient voir une pièce “sur les mères”, mais y a des papas qui accompagnent leur fille, des grands-mères, des couples homosexuels… Je crois qu’on a besoin d’en parler, que ça ne devienne plus niché, que ça soit un truc d’actualité. Le sujet doit appartenir à tout le monde et toutes les entreprises d’exposition de la maternité en public me semblent essentielles et nécessaires, même celles qui sont superficielles et maladroites.» Ou celles qui, comme la pièce M.I.L.F., sont essentielles et nécessaires parce qu’elles portent la parole de celles qui se font «une brigade de filles toujours la tête drette/ même au moment d’rentrer dans le mur». y
Ni apologie ni critique, la pièce M.I.L.F. explore l’entre-deux, les multiples nuances qui viennent avec le double statut de mère et de personne sexuée. «Je n’avais pas envie de
Mères et monde
M.I.L.F. Du 27 novembre au 1er décembre Théâtre Périscope
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SALE TEMPS POUR SORTIR
PAR EMILIE DUBREUIL
Qu’est devenu le trou dans la couche d’ozone ? Quand tout le monde s’est mis à capoter sur le trou dans la couche d’ozone, j’étais encore au primaire, mais comme mes parents étaient abonnés à quatre journaux et que mon frère et moi imitions les adultes et lisions le matin des papiers gorgés d’encre en déjeunant, je le savais, moi, qu’il y avait un trou dans la couche d’ozone. Je crois me souvenir qu’en 85 ou 86, j’avais même poussé mon imitation des adultes jusqu’à boire du café en tournant les pages des journaux que nous nous échangions à tour de rôle. Il y avait, bien sûr, La Presse, Le Journal de Montréal, Le Devoir, mais aussi The Globe and Mail. Ni mon frère ni moi ne maîtrisions assez l’anglais pour lire le Globe, mais on regardait la page couverture et les «cartoons». En fait, c’est pas mal ce qu’on faisait pour tous les journaux qu’il y avait sur la table: on regardait les caricatures, les «cherchez l’erreur» à la fin. L’horoscope aussi. J’ai d’ailleurs gardé cette vilaine habitude de lire mon horoscope tous les matins, sinon je me sens un peu toute nue pour le reste de la journée. Il m’est difficile de ne pas connaître mon avenir,
ne serait-ce que 24 heures. C’est comme sortir sans culotte. L’avenir, c’est la clé. Tout cela pour dire que le trou dans la couche d’ozone, on en parlait beaucoup quand j’étais au primaire. Ça faisait la manchette presque quotidiennement et j’avais beaucoup impressionné (et profondément agacé sans doute) ma maîtresse d’école, Nicole, dans la classe 6B, en lui posant – à brûle-pourpoint – une colle du genre: «Ça sert à quoi d’apprendre les mathématiques si nous allons, de toute façon, tous mourir à cause du trou dans la couche d’ozone?» Nicole ne m’aimait déjà pas beaucoup. J’avais pas mal la bougeotte, faut dire. Aujourd’hui, on dirait hyperactive, mais c’était avant le Ritalin. Nicole était une religieuse défroquée, elle roulait ses «r» et portait des bas beiges. Parfois, pour calmer les élèves, elle fermait les lumières et demandait à la classe de faire des prières. À ce moment-là, elle me disait: «Emilie, tu peux sortir?» Comme je n’étais pas baptisée, elle me faisait sortir dans le corridor! J’étais la seule non baptisée dans la classe. Et, oui, bien sûr
qu’il y avait un crucifix dans la classe! Ben oui, il y en avait dans toutes les classes. À l’école publique? Ben oui, à l’école publique. En décembre, on m’excluait même de la sortie de la classe à l’oratoire pour aller voir les crèches. Ça rendait ma mère absolument furieuse! Je me souviens d’une scène où elle avait engueulé Nicole et la directrice de l’école devant tous mes camarades de classe en lui disant: «C’est pas parce que ma fille n’est pas baptisée qu’elle ne peut pas comprendre notre culture, notre histoire.» Pour ajouter à la stigmatisation, mes parents, tous deux abonnés à quatre journaux, étaient séparés et avaient inventé un système jugé fort suspect par Nicole: la garde partagée. Un truc totalement marginal en 1985. Bref, en cette année de trou dans la couche d’ozone et de l’entrée de Pierre Lambert dans notre mémoire collective, j’étais la seule à suivre l’ennuyant cours de morale alors que tous mes amis, eux, jouissaient d’une agréable séance de détente, qu’on appelait la «catéchèse», et coloriaient des saintes vierges avec des crayons de couleur
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qu’ils tiraient de leurs boîtes Prismacolor. Oui, oui, je suis vieille et d’ailleurs, je m’égare. La couche d’ozone donc. Ça me pogne souvent. Depuis des années que j’me dis: «Coudonc, pourquoi ne parle-t-on plus jamais du trou dans la couche d’ozone? J’ai fouillé un peu sur le net et il est en train de se refermer, ce fameux trou. Mais bon, faut pas croire tout ce qu’il y a sur internet, y paraît. Après la couche d’ozone, il y a eu les pluies acides. J’ai fait au moins 23 oraux, projets en groupe avec bricolages à l’appui pour expliquer le phénomène des pluies acides. Et ça aussi, ça me turlupine pas mal: les pluies acides ont-elles disparu? En tout cas, elles ont disparu des unes des journaux que nous lisions à la table du petit-déjeuner comme les cotons ouatés fluorescents de ma garde-robe. Bref, depuis que je lis les journaux et que je bois du café, ce qui est arrivé de
«MES PARENTS ÉTAIENT SÉPARÉS ET AVAIENT INVENTÉ UN SYSTÈME JUGÉ FORT SUSPECT PAR NICOLE: LA GARDE PARTAGÉE.» façon un peu précoce dans mon existence, j’en conviens, la chronique «d’une planète qui meurt» côtoie mon horoscope chaque matin.
Dans mon cours d’anglais en sixième année, l’enseignante, dont je ne me souviens plus du nom, nous avait fait apprendre par cœur Russians, une chanson de Sting. Trente ans plus tard, je suis encore capable de chanter cette chanson du début à la fin. C’est fou la mémoire. Le vidéo était hyper angoissant, en noir et blanc, avec des enfants qui dansent autour de vieux qui planifient de faire exposer la planète, avec des horloges en deuxième plan sur lesquelles il était minuit moins cinq. Le texte de cette chanson disait, essentiellement, que les Russes et les Américains devaient arrêter la course à l’armement nucléaire par amour de leurs enfants. Nucléaire, changements climatiques… Parfois, quand je lis les journaux, j’ai comme une impression de déjà-vu et je commence à me poser de quelques questions sur le sérieux des horoscopes. y
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LA FILLE DU VENT C’EST UN DISQUE QU’ON PORTE CONTRE SOI COMME UN PYJAMA DE FLANELLE. TANDIS QUE LA FROIDEUR S’INSTALLE, SALOMÉ LECLERC NOUS EMMITOUFLE DE SA PROSE DE DENTELLE. UN VENT CHAUD SOUFFLE SUR NOTRE AUTOMNE. MOTS | CATHERINE GENEST
PHOTO | JERRY PIGEON
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Salomé Leclerc n’est pas née des dernières pluies. Son étoile rayonne par-delà l’Atlantique: lauréate du prix Rapsat-Lelièvre en 2015, applaudie en France, à Paris comme en province. Là-bas comme ici, les lettres de son nom s’appuient contre la lumière des marquises. Ses disques ne font qu’ajouter à l’éclat de la constellation Audiogram, cette famille qu’elle partage avec Bélanger et Lapointe. Après deux bouquets de chansons qui ne risquent pas de faner, Sous les arbres puis 27 fois l’aurore, la gracile sirène nous envoûte avec une troisième offrande. Un album pavé de paroles impudiques, de textes tendres qu’elle emballe dans un écrin rock, presque grunge par moments. Quatre ans séparent Les choses extérieures de l’avant-dernier effort. Le cycle du second album passé, la compositrice s’est terrée loin des scènes, empoignant guitare et stylo pour extraire les pépites de son cœur. C’est dans le calme de cet entre-deux qu’elle a donné vie aux 10 perles dont elle se pare aujourd’hui. «Il est temps que ça sorte! En même temps, j’ai pas chômé [...]. On m’a demandé de participer à d’autres projets, ç’a vraiment bien meublé le temps. Je pense que c’est pour ça, justement, que j’en suis à sortir quelque chose après quatre ans. J’ai enrichi mon parcours pendant ces années-là.» Mais quelle importance, ce trajet entre nos écouteurs et son cœur. Salomé est de retour, forte, solidement ancrée, elle galope jusqu’à nous et dès les premières secondes de la plage 1. Un morceau (Entre ici et chez toi) qui capture un instant de pur abandon. «C’est un espèce de laisser-aller, peutêtre un laisser-aller qui s’exprime en faisant de la route, en voulant aller plus loin, aller ailleurs et sans trop de but. Des fois, on a juste des envies de road trips et on part. Advienne que pourra.» Qu’importe où la vie la mènera, la musicienne trime dur et sans broncher, constante comme les jardiniers, appliquée, récoltant honneurs et critiques emballées. Une rumeur qui tarde à gagner les masses, le proverbial grand public. Mais à quoi bon s’en formaliser? Les choses extérieures, on ne les contrôle pas. Broder sur les portées Cette fois encore, l’auteure brise le mur du son, ou simplement le quatrième, en nous interpellant directement au «tu». Une récurrence dans son écriture, sa façon d’installer un climat intime. «En 2009, j’étais à l’École de la chanson à Granby et on avait des cours d’interprétation avec Marie-Claire Séguin. Une fois, elle nous avait dit: “Peu importe le texte, qu’il soit au je, au il, au elle, au nous ou au vous, imagine que tu le chantes à quelqu’un que tu connais, rien que pour cette personne-là.” Et ça marchait dans mon cas! Quand j’étais en contact
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avec un texte qui ne me parlait pas tant que ça, j’imaginais quelqu’un assis au fond de la salle. Peutêtre qu’après ça, inconsciemment, j’ai développé le désir de parler directement aux gens. Je voudrais que ceux qui écoutent ce disque-là, ceux qui l’ont dans les oreilles, aient l’impression que je leur chuchote la chanson, que je suis super proche.» Réapparue à la fin de septembre avec Ton équilibre, un autre déterminant possessif à la deuxième personne du singulier, la Centricoise est venue cueillir les articles et elle a vu les billets de sa tournée s’envoler par dizaines. On ne l’avait pas oubliée. L’attente est bien réelle, grisante. «Oui, c’est une pression, mais en même temps, ça me met en confiance. C’est tellement le fun d’avoir ce soutien-là des pairs, autant des journalistes que des autres musiciens.» La brillante créatrice s’est d’abord présentée au monde sous un jour folk avant d’enchaîner avec un album tapissé de synthés. Cette fois, la réalisatrice et arrangeuse s’amuse surtout avec sa guitare électrique. «J’avais vraiment la volonté d’aller vers des instruments plus organiques, plus acoustiques cette fois-ci. [...] Je voulais écrire des chansons plutôt que de former un espèce de tapis musical et d’ajouter des mots et des mélodies par-dessus.» Dès le début, la multi-instrumentiste s’est mise en quête de tonalités chaleureuses, troquant ses pads de drums pour de la vraie batterie et mettant volontairement les Moog et Prophet de côté, ses claviers autrefois fétiches, pour renouer avec son piano. Elle s’y réinstalle sur la pièce-titre, assise sur ce siège de bois rond craquant sous son poids. De légères imperfections, des petits bruits parasites qui nous donnent l’impression d’entrer chez elle, dans sa maison. De toucher à son âme. y Les choses extérieures (Audiogram) En vente maintenant 22 novembre au Théâtre Petit Champlain
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JAZZ JOURNALIER DEPUIS 2006, LE BENOIT PARADIS TRIO SE TAILLE UNE PLACE ASSEZ UNIQUE DANS L’HORIZON MUSICAL QUÉBÉCOIS. À MI-CHEMIN ENTRE JAZZ ET CHANSON, ENTRE POÉSIE ET PUNK, L’UNIVERS QUE TISSE LA FORMATION MONTRÉALAISE ÉVITE LES CONVENTIONS NATURELLEMENT, SANS ARTIFICE. À LA VEILLE DU LANCEMENT DE SON TROISIÈME OPUS, LA QUINTESSENCE DU COOL, ENTRETIEN AVEC LE PRINCIPAL INTÉRESSÉ, BENOIT PARADIS. MOTS & PHOTO | ANTOINE BORDELEAU
«Eh boy, y a ben trop de mots dans cette maudite toune-là!» En pleine répétition pour son concert de lancement le 2 novembre, le Benoit Paradis Trio s’évertue à se remettre dans les doigts les chansons de l’album précédent, T’as-tu toute?, dans un appartement du Plateau transformé en local de pratique improvisé. Les trois musiciens font vibrer l’immeuble avec les portes grandes ouvertes, ce qui donne à la scène une aura de quotidien typiquement montréalais, les accords de piano soutenus par les voitures klaxonnant et se dépassant sur une avenue achalandée. C’est dans ce lieu où traînent des vinyles épars que Benoit Paradis fait naître ses chansons excentriques aux thèmes ancrés dans le day-to-day, matériel source servant de fondation aux accents jazz que la pianiste Chantale Morin et le contrebassiste Benoit Coulombe apportent à son œuvre. «J’aime ça qu’on puisse percevoir le texte et bien le comprendre, c’était comme naturel pour moi d’aller vers un genre de trio jazz acoustique pour faire vivre mes chansons, explique Paradis. Le jazz, c’est une musique élégante qui peut servir drôlement un texte qui pourrait être plus simpliste, ou même un texte très sombre mais sur une musique vraiment douce. C’est un peu ça que faisaient les grands chanteurs de l’époque swing, des tounes qui parlaient de leur vie de tous les jours, avec peu de mots, mais poétiques et remplies d’émotions. C’est un peu ça que je voulais; aller chercher quelque chose entre Ella Fitzgerald pis Tom Waits.» Sur ce nouvel album, la formation affine encore plus son esthétique unique, entre deux chaises. Alors que Paradis avait l’habitude de partir des textes pour aller vers la musique sur ses créations
précédentes, cette fois-ci, c’est les notes qui sont venues s’installer en premier. «C’est moi qui fais les propositions de départ pis qui finis par retoucher aux affaires, mais les arrangements, on fait vraiment ça tous ensemble. Les grandes lignes sont là quand j’arrive devant Chantale et Benoit, mais l’évolution de la toune est pas juste entre mes mains. Ce coup-ci, je trouve la musique plus aboutie que sur nos albums précédents, probablement parce qu’on a commencé par ça et qu’on a eu beaucoup d’échanges là-dessus avant d’y mettre des mots.» Si la musique est plus mesurée qu’avant, sa relation avec les paroles demeure un processus un peu mystérieux, du propre aveu de Benoit Paradis. «Y a pas de recette, on y va vraiment au feeling je dirais. Y a une chanson où je voulais vraiment parler de quelqu’un dans la rue qui quête, je voulais pas que ça devienne dramatique, pis finalement, c’est devenu une toune très be-bop, ben ben swing. C’est un peu le hasard qui fait bien les choses. Si ça avait pas marché de même, on aurait essayé autre chose! C’est de l’essai-erreur, pis ça fait voir un peu l’absurdité qui se dégage de tout ça.» Pour Paradis, l’inspiration naît littéralement de la vie courante. À travers ses rencontres, ses journées typiques, il écrit des tonnes de notes qui sont ensuite élaguées pour en extraire la substance et construire des textes auxquels on peut tous s’identifier. «Ça vient des interactions que j’ai avec le monde, de ce que j’apprends aux nouvelles à propos de la société, mais j’essaie de le traduire au quotidien pour pas que ce soit trop moralisateur ou facile, que ce soit un peu plus imagé. Autant des fois les textes sont retravaillés en malade, autant à
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BENOIT COULOMBE, CHANTALE MORIN ET BENOIT PARADIS
d’autres moments ça sort vraiment tout seul, d’un jet, pis c’est bon de même faque j’y touche pus.» Préconisant l’efficacité plutôt que la prose étoffée, il écrit des textes relativement courts et simples, qui vont droit au but. Cela apporte un contraste presque punk entre le jazz léché et les paroles qui y sont superposées. «Au niveau de la musique, on essaie d’éviter les trucs trop classiques, on veut raffiner ça autant que possible. Mais d’un autre côté, pour les textes, je suis un peu anarchiste. Y a une volonté de
pas trop pousser ça loin, de garder quelque chose de vraiment authentique et brut. Ça donne un mélange qui, je pense, est surprenant pis qui nous donne une identité qui est propre à nous. C’est ça qui est le plus important pour moi, je pense, qu’on soit aussi vrais que possible dans ce qu’on fait.» y La quintessence du cool sera en vente partout dès le 2 novembre 2018
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À ÉCOUTER
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HHHHH CLASSIQUE HHHH EXCELLENT HHH BON HH MOYEN H NUL
DEATH VALLEY GIRLS DARKNESS RAINS (Suicide Squeeze) HHH
CAT POWER WANDERER
(Domino) HHHH
La grande Cat Power évoque ses errances sur ce 10e album studio à saveur folk et blues. Sans que le disque soit un livre ouvert, on y entend la chanteuse américaine faire écho à sa personnalité énigmatique. «My cage is a weapon, it’s perfect for me», chante-t-elle en guise de délivrance et d’acceptation de soi sur la pièce phare, l’énergique Woman (où l’on entend malheureusement à peine Lana Del Rey). Wanderer est toutefois doté d’une énergie intime, sans artifice, où règnent la guitare sèche et le piano, ce qui nous ramène à The Covers Record (2000) et aux récents concerts solo de l’artiste. N’est-ce pas, après tout, la meilleure formule pour admirer cette voix si joliment feutrée et chaude? À écouter absolument: la magnifique lettre d’au revoir Me voy, aérienne et sobre, et la reprise dénudée du tube Stay de Rihanna sur laquelle Cat Power atteint un sommet de performance vocale. (V. Thérien)
Ce troisième album du groupe de L.A. reprend là où le précédent Glow in the Dark s’était arrêté deux ans plus tôt. Toujours marqué par les trémolos vocaux de la chanteuse et multi-instrumentiste Bonnie Bloomgarden et les riffs plombés du guitariste Larry Schemel (appuyés par la bassiste Alana Amram et la batteuse Laura Harris), le witch rock de Death Valley Girls est sombre et lourd, mélancolique dans le fond et vitriolique dans la forme. Oscillant entre hard rock à la Black Sabbath, spleen soundgardenesque, 60’s garage, post-psychédélique apocalyptique digne du MC5 et proto-punk stoogien époque Funhouse – la pièce Disaster (Is What We’re After), et son clip mettant en vedette Iggy Pop, est plus qu’éloquente –, le combo livre en 10 chansons une puissante charge rock teintée de romantisme noir. Il ne manque qu’un peu de folie et de danger pour qu’on y croit vraiment. (P. Baillargeon)
NOISE TRAIL IMMERSION SYMBOLOGY OF SHELTER (Moment of Collapse Records) HHH 1/2 La description «black métal dissonant mélangé à du mathcore» donne une assez bonne idée du style musical de Noise Trail Immersion, et pourtant, Symbology of Shelter ne sonne pas exactement comme on s’y attend. C’est en grande partie dû au fait que l’album a été conçu comme une seule chanson de 43 minutes puis divisé en sept pistes qui se fondent les unes dans les autres. Tout en facilitant l’absorption de Symbology of Shelter, la tactique atténue le côté mathcore du groupe italien qui nomme Converge, Frontierer et Ion Dissonance parmi ses influences. Ainsi, au lieu d’être courtes et chaotiques, les chansons du troisième disque de Noise Trail Immersion s’étirent en un flot continu de variations rythmiques qui évoquent davantage une version black métal de groupes comme Gorguts, Daylight Dies et Ulcerate. (C. Fortier)
RACHEL BARTON PINE BLUES DIALOGUES: MUSIC BY BLACK COMPOSERS (Cedille Records/Naxos) HHHH La violoniste américaine Rachel Barton Pine est une habituée du Festival de musique de chambre de Montréal, où on a pu l’entendre jouer Bach ou Paganini et même, mais oui, Metallica. La voici qui se penche cette fois sur la musique de compositeurs noirs américains de blues, et le résultat est magnifique. Certaines pièces sont plus proches des débuts du genre, comme Suite for Violin and Piano (1945) de William Grant Still, ou In a Sentimental Mood (1935) de Duke Ellington, dans un superbe arrangement pour violon et piano (Matthew Hagle). D’autres sont plus récentes, comme Filter (1992), de Daniel Bernard Roumain, où Pine se prend presque pour Johnny Winter. Elle joue ces musiques avec une virtuosité éblouissante et, surtout, un plaisir palpable. Espérons qu’il ne se trouvera pas quelques puristes pour lui en dénier le droit. (R. Beaucage)
MATHEW ROSENBLUM LAMENT/WITCHES’ SABBATH (New Focus Recordings / Naxos) HHHH Le Boston Modern Orchestra Project (BMOP) est certainement l’un des orchestres les plus intéressants à suivre et son catalogue s’augmente à un rythme fou d’enregistre ments plus satisfaisants les uns que les autres. C’est lui et son chef, Gil Rose, que l’on entend ici interpréter la pièce titre, un concerto pour clarinette dans lequel l’instrument de l’excellent David Krakauer se mêle à des voix préenregistrées, dont une psalmodiant une lamentation ukrainienne obsédante. Northern Flicker, pour percussion solo (Lisa Pegher), vaut également le détour, comme Falling, interprétée par le Pittsburgh New Music Ensemble, qui peut faire songer à Steve Reich par son utilisation de voix préenregistrées. Enfin, Last Round (Ostatnia Runda) est un feu d’artifice rythmique rendu avec une précision chirurgicale par le FLUX Quartet et l’ensemble Mantra Percussion. (R. Beaucage)
DISQUES 25 VOIR QC
JACQUES SCHWARZ-BART HAZZAN
FUUDGE LES MATRICIDES
(Anja) HHH 1/2
(Lazy At Work) HHH 1/2
Jacques Schwarz-Bart est un brillant sax ténor guadeloupéen d’origine juive dont le parcours audacieux semble guidé par une profonde mystique. Lui qui puise autant dans les cadences populaires de la Caraïbe que dans le vaudou d’Haïti bifurque ici soudainement vers le Proche-Orient. Sur le simple compliment d’un rabbin qui l’a entendu jouer dans une cérémonie religieuse, Brother Jacques s’essaye à une relecture musclée des airs traditionnels et liturgiques du judaïsme. Ceux qui s’attendent à du klezmer mélancolique et larmoyant vont être déçus tant c’est enjoué et presque jubilatoire. David Linx intervient avec sa voix sur deux titres et les deux Antillais Gregory Privat (piano) et Arnaud Dolmen (batterie) confirment vraiment tout le bien qu’on pense d’eux sans cesse. (R. Boncy)
Après deux EP très bien reçus, FUUDGE présente enfin un opus initiateur à la hauteur des attentes. S’ouvrant sur une fresque de sons d’oiseaux et une ballade presque prog-rock, Les Matricides dérape assez rapidement vers des timbres acérés de guitares et de basse distorsionnées à souhait, signature de la formation psych-grunge québécomontréalaise. Valsant avec grande aise entre riffs coup-de-poing où tout veut arracher et moments de répit bien mérités, FUUDGE parvient à livrer un exemple de cohérence tout au long de l’album. Que ce soit sur le plan des intentions, des sonorités ou des structures elles-mêmes, Les Matricides donne l’impression d’une œuvre bien mûrie et réfléchie, où tout est à sa place malgré le chaos inhérent au style qu’explorent les quatre musiciens. (A. Bordeleau)
MARIANNE TRUDEL ET KAREN YOUNG PORTRAITS (SONGS OF JONI MITCHELL) (Trud / independent) HHHH Quel casting de rêve! La pianiste Marianne Trudel a cassé sa tirelire pour faire ce disque d’amour, se jetant à l’eau avec toute la créativité dont elle est capable, comptant les yeux fermés sur l’expérience et la fantaisie de Karen Young, trésor national de la spontanéité et des projets casse-gueule. Tout ça pour célébrer encore les écrits et la musique de Mrs Mitchell, l’icône canadienne, la légende, la singulière grande dame de la chanson. Mais attention! Ceci n’est pas un best of, même si l’on y retrouve California, l’incontournable Both Sides Now réinventée et une impensable version de Dry Cleaner from Des Moines sans la basse de Jaco Pastorius. Une exploration, un portrait en clair-obscur à méditer et un candidat sérieux aux meilleurs albums jazz et réinterprétation l’année prochaine! (R. Boncy)
SHAD A SHORT STORY ABOUT A WAR (Secret City Records) HHHH À une époque où les rappeurs tendent à évacuer leur propos au profit d’une trame phonétique pas toujours significative, le retour sur disque d’un artiste judicieux et clairvoyant comme Shad tombe à point. Sur son sixième album, le Kenyan d’adoption canadienne se penche sur toutes les formes de violence qui habitent notre monde, adoptant une pluralité de points de vue et d’approches qui montrent et dévoilent la complexité de l’action humaine dans ses rapports de force. Avec son flow souple, capable de varier les niveaux d’intensité sans jamais forcer la note, le rappeur de 36 ans dresse autant le portrait des tireurs d’élite et des révolutionnaires que de ces «hommes intelligents» qui perpétuent les conflits pour des raisons économiques. Sur des productions jazzy et soul placides ou, au contraire, beaucoup plus pesantes et chaotiques, Shad se fait le narrateur d’une histoire captivante et bien détaillée. (O. Boisvert-Magnen)
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ARIANE MOFFATT PETITES MAINS PRÉCIEUSES
(Simone Records) HHH 1/2
Avec ce sixième album studio, la fée marraine de l’électropop vogue vers des mers plus disco, vaguement soul, se prêtant à de succulents exercices de style sur La statue et Pour toi – les morceaux les plus réussis de cet opus. Mais sous ses dehors pailletés, au-delà de ces deux brûlots aigres-doux dignes d’Abba et du premier extrait (Les apparences) un brin répétitif, Ariane Moffatt se vautre dans une mélancolie qu’on lui connaissait déjà, une lenteur. Elle émeut avec Du souffle pour deux, en ouverture, un texte énigmatique sur l’amour qui s’étiole ou l’épuisement maternel, dur à dire, et davantage sur Pneumatique noir, cette chanson qui traite d’Alzheimer. La danse reprend sur la huitième piste avec O.N.O., une collaboration avec CRi, producteur d’avant-garde, avec des arrangements ancrés dans le futur qui nous révèlent l’auteure-compositrice-interprète sous un jour presque expérimental et plus rafraîchissant que jamais. (C. Genest)
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ROULETTE RUSSE
PAR MICKAËL BERGERON
Le bon vote Depuis le 1er octobre, cette expression revient sous différentes formes et sousentend que certaines personnes ont gagné leurs élections et d’autres les ont perdues. Si je comprends qu’on peut avoir l’impression de gagner quand la personne pour qui on a milité devient députée, je saisis moins bien tout le reste. Je trouve ça triste comme façon de voir la politique ou la dynamique de l’Assemblée nationale. Par exemple, je lisais le commentaire d’un élu de la Côte-Nord qui se plaignait que sa circonscription n’avait pas, «encore une fois», «voté du bon bord», c’est-à-dire du côté du parti qui formera le gouvernement. Même Sébastien Bovet, le journaliste de Radio-Canada, a lâché quelques fois cette expression en parlant d’une circonscription habituellement «baromètre», c’està-dire qu’au gré des changements de gouvernements, la ou le député élu est du parti formant le gouvernement. Mais pas cette année, car cette circonscription a «voté du mauvais bord». Il me semble même l’avoir entendu dire que cette année, la circonscription s’était «trompée»! Mais qu’est-ce que voter du bon bord? Comment peut-on se tromper en votant? Il ne faut pas oublier que notre système parlementaire a cette particularité de
permettre à des gens de «gagner» même si la majorité des gens n’ont pas voté pour eux.
Pour moi, c’est être avec ceux et celles qui partagent mes idées.
Prenons le cas de cette circonscription baromètre de Laval-des-Rapides. Le candidat libéral Saul Polo a «gagné» avec seulement 31,5% des votes. On comprend donc que 68,5% des gens, donc une bonne majorité, ne voulaient pas de lui. Quel est le «bon bord»? Celui du gagnant ou celui de la majorité?
Je me suis toujours méfié des gens qui veulent le pouvoir pour le simple plaisir d’avoir le pouvoir. Le pouvoir a toujours l’air d’être un lieu de liberté et de contrôle, alors qu’en fait, il est difficile d’être plus libre qu’une personne incognito sans aucune responsabilité.
Normalement, nous voterions pour nos convictions, en espérant qu’une majorité de gens partagent nos convictions, permettant alors à un parti qui partage nos valeurs de former le gouvernement. À partir du moment où nous votons pour nos propres valeurs, perdons-nous vraiment même si le parti que nous avons voulu encourager ne prend pas le pouvoir? Traitez-moi d’idéaliste si vous voulez – surtout que je ne vois pas ça comme une insulte –, mais sacrifier ses convictions juste pour accéder au pouvoir me semble bien plus «loser» que ne pas avoir le «pouvoir». Entre être au pouvoir avec des gens avec qui je ne partage pas les idées ou être dans l’opposition (à l’Assemblée ou dans la rue) avec des gens qui partagent mes valeurs, le choix me semble facile.
Le pouvoir vient avec une si grande responsabilité, avec une si grosse structure, avec de si grands devoirs qu’il est loin d’être un lieu de réel contrôle. Tu peux certes prendre des décisions, tu as beaucoup d’influence, mais tu vas vite te rendre compte que tes décisions ont des impacts sur bien des gens, et ça, ça met de la pression! Plus encore, ce «pouvoir» ne vient pas du ciel et n’est pas un cadeau, il est prêté pour un moment déterminé. On ne gagne pas le pouvoir, on se le voit confié. Le pouvoir n’appartient à aucun parti ni à aucun élu, ministre ou premier ministre. Ni à la reine. Malgré tout le cynisme que vous avez peut-être pour le système parlementaire ou vos critiques pour ses très nombreux défauts, et malgré le pouvoir monarchique théorique. Malgré toute l’influence des multinationales et des lobbyings économiques. Malgré la rigidité du système
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et le peu d’ouverture à la divergence. Malgré le poids de la norme. Ultimement, il demeure que le pouvoir appartient au peuple. Si les gens, pour une raison inimaginable aujourd’hui, se tannent de Facebook, ce géant du web va tomber. Si la majorité de la population investissait réellement les instances démocratiques qui existent en dehors des élections, plusieurs décisions gouvernementales seraient différentes. Si la majorité de la population arrêtait d’acheter des voitures, le gouvernement et les promoteurs immobiliers changeraient leur façon de concevoir l’urbanisme (et le débat du troisième lien tomberait à l’eau). Plein d’éléments viennent influencer les débats et l ’opinion publique. Je ne veux pas faire comme si je ne les connaissais pas. Clairement, des organismes comme Greenpeace ou Accès transports viables n’ont pas les mêmes moyens pour débattre que l’industrie automobile. Évidemment que la finance et les banques ont plus de tribunes et d’influence que les organismes communautaires. Ceux et celles qui luttent pour un contrôle des armes à feu n’ont vraiment pas les mêmes moyens que les entreprises qui font des millions avec les armes. Je pourrais nommer des dizaines d’exemples du genre.
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QUEL EST LE «BON BORD»? CELUI DU GAGNANT OU CELUI DE LA MAJORITÉ? Le débat n’est pas équilibré et ne se fait pas avec les mêmes outils, avec les mêmes tribunes, avec les mêmes forces. C’est dur de se tenir debout souvent, dans cette dynamique. La pente est parfois raide, le vent est parfois vigoureux. La résistance n’est pas facile. Néanmoins, des changements sociaux peuvent s’imposer au «pouvoir» lorsqu’une bonne partie de la population adopte une idée, une valeur. Ou du moins, ne trouve pas ça niaiseux. Le gouvernement n’est pas une finalité, il est un outil parmi d’autres, un gros outil, mais pas le seul levier. On a un premier ministre qui ne s’affiche pas du tout féministe, mais qui a quand même formé un gouvernement paritaire. En 2015, Trudeau a justifié sa motivation. En 2018, Legault aurait dû justifier de ne pas le faire. L’éducation populaire est parfois une force lente, mais elle est une force difficile à tasser. Voter pour le bon bord, selon moi, ne peut se faire qu’en votant pour ses convictions, même si ça peut vouloir dire de ne pas aller voter. y
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28 CINÉMA VOIR QC
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SE LIBÉRER DU FEU QUI NOUS DÉVORE YVES BOISVERT ÉTAIT UN POÈTE POUR QUI LA VIE N’ÉTAIT GUIDÉE QUE PAR UN IDÉAL: LA LIBERTÉ TOTALE. YAN GIROUX ET GUILLAUME CORBEIL LUI ONT CONSACRÉ UN FILM QUI TENTE DE TRADUIRE CE SENTIMENT DE LIBERTÉ EN SE TENANT LOIN DU FILM BIOGRAPHIQUE LINÉAIRE. MOTS | JEAN-BAPTISTE HERVÉ
«J’ai rencontré Yves alors que j’étais adolescent, à une époque où je commençais à écrire de la poésie», nous raconte le réalisateur Yan Giroux. «J’étais fasciné par Rimbaud et Nelligan et je n’avais aucune porte d’entrée dans la poésie contemporaine. C’est en rencontrant la fille de Dyane Gagnon [qui a été la compagne du poète pendant plus de 20 ans] que je suis entré en contact avec le monde du poète. Cela me changeait de l’univers plutôt straight de ma vie sherbrookoise de l’époque. Plusieurs années plus tard, quand j’ai commencé le cinéma et la publicité, Yves a joué le rôle de chien de garde moral par rapport à ce que je faisais.» L’histoire d’À tous ceux qui ne me lisent pas présente le poète Yves Boisvert (Martin Dubreuil), vivant dans un appart d’où il est déjà exproprié et qui tente de trouver sa vérité dans les bras de Dyane Gagnon (Céline Bonnier). Marc (Henri Picard), le fils de Dyane, devient témoin de cet amour naissant et désordonné. Il est fasciné par cet homme et nous observons la transformation du jeune homme au contact de la poésie et inversement du legs qu’apprendra à fabriquer Boisvert.
PHOTO | LES FILMS SÉVILLE
À tous ceux qui ne me lisent pas est un premier long métrage de fiction pour Yan Giroux, lui qui nous avait offert le documentaire alcoolisé Élégant sur le groupe Chocolat aux Îles-de-la-Madeleine et plusieurs courts métrages de fiction dont Lost Paradise Lost. C’est aussi un premier scénario de fiction pour l’auteur Guillaume Corbeil (Trois princesses, Nous voir nous [Cinq visages pour Camille Brunelle]). Les deux complices ont choisi de camper l’action aujourd’hui, parce que le sujet de leur film est contemporain: la place de l’artiste dans notre société québécoise. «Le danger dans ce type de film est de tenter de raconter toute la vie de l’artiste, cela crée souvent des films sans saveur», dit Giroux. «Guillaume m’a aidé à m’éloigner des faits et à circonscrire le personnage.» Le travail de coscénarisation s’est donc déroulé de façon à ce que Guillaume Corbeil distancie Giroux de sa relation de proximité avec la vie du poète. «Au début du processus d’écriture, je me méfiais des faits, mais plus on avançait dans notre travail et plus on se rendait compte de la vérité qu’ils portaient», raconte Guillaume Corbeil. «Notre objectif de départ n’était pas de faire un biopic, mais de faire un film sur un poète, dont Yves Boisvert n’est qu’une manifestation. On voulait savoir: qu’est-ce qu’un artiste? Qu’est-ce qu’un poète? Qu’est-ce que l’intégrité?» Le film de Giroux nous amène dans l’univers de la poésie et questionne la place qu’elle occupe dans notre monde. Dans le film, on sent la relation de proximité entre Boisvert et son agent joué par Jacques L’Heureux. Mais ce dernier a dû vendre sa
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DANS LA RÉGION DE QUÉBEC Promenades Beauport | Galeries de la Capitale | Laurier Québec | Galeries Chagnon
CINÉMA 31 VOIR QC
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> petite maison d’édition à un groupe plus grand, faisant un choix réaliste dans un monde où la poésie n’occupe plus d’espace. C’est le moment où le triptyque Cultures périphériques est refusé par son ami et éditeur, une claque dans la face du poète. C’est le triomphe de la pensée niaiseuse, du titre d’un de ses recueils. «On a choisi de présenter cet épisode de la vie du poète dans notre époque actuelle, en 2018, pour revendiquer sa pertinence», poursuit le réalisateur. «Nous appelons d’autres livres et d’autres poètes qui sauront confronter notre confort et l’ordre établi.» Car avant de brosser le portrait d’un homme habité par un feu que rien ne semble pouvoir éteindre, ce film provoque l’envie de lire et d’aller provoquer un peu de désordre dans un monde contemporain qui voit la culture comme une dépense. Ce que semblent vouloir nous dire Corbeil et Giroux, c’est que la culture n’est pas un bien matériel, c’est quelque chose qui place notre identité sur le grand échiquier américain. ann Voir nov18 copy.pdf
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18-10-19
Ce que nous dit Boisvert, c’est qu’il faut être libre, mais que nous avons aussi besoin des autres. Se libérer du feu qui nous dévore, c’est accepter l’idée du legs. y En salle le 23 novembre
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32 CHRONIQUE VOIR QC
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PRISE DE TÊTE
PAR NORMAND BAILLARGEON
Le séquençage de votre génome, ça vous tente? On appelle génome l’ensemble du matériel génétique d’un organisme, en un mot, de son ADN. Séquencer votre génome, cela signifie donc faire un portrait de vos gènes.
aujourd’hui devant des promesses et des périls, plus ou moins anticipés, qui soulèvent des enjeux éthiques souvent redoutables.
Voici comment cela se passera, si vous décidiez de tenter l’expérience.
C’est sur eux que je voudrais m’arrêter. C’est un très vaste sujet, avec plein d’inconnues, que je ne pourrai qu’effleurer. Je le ferai en me concentrant sur trois valeurs fondamentales que ces nouvelles technologies nous contraignent à réviser et, me semble-t-il, à vouloir défendre plus fortement encore.
Vous paierez d’abord par internet, à la compagnie de votre choix, le montant demandé – généralement quelques centaines de dollars. Vous recevrez ensuite par la poste un flacon dans lequel vous déposerez un peu de salive. Vous enverrez ensuite le flacon à l’adresse indiquée. Peu de temps après, vous obtiendrez le séquençage de votre génome. Ces gestes nous rappellent combien, en génétique, les choses avancent à une vitesse extraordinaire. Il y a une quinzaine d’années à peine, on vous aurait demandé quelques millions de dollars pour ce travail et seuls quelques très riches privilégiés auraient pu se payer ce luxe. Le séquençage du génome est désormais accessible à tout le monde. Si la procédure est interdite dans certains pays (comme la France), la simplicité de la démarche permet à quiconque le souhaite de contourner la loi. Comme c’est souvent le cas avec les avancées technologiques, on se retrouve
Autonomie L’autonomie de la personne est une des valeurs-clés de nos démocraties libérales et cela explique en partie la grande importance que nous accordons à l’éducation: la personne autonome doit en effet être outillée pour faire de manière consciente et en toute connaissance de cause les choix qu’elle fera. En médecine, cela se traduit notamment par l’exigence d’un consentement éclairé. Or ces analyses du génome peuvent être lourdes de conséquences et il est indispensable que les personnes qui choisissent de s’y prêter le fassent en toute connaissance de ce que cela implique.
On pourra, en découvrant ses résultats, apprendre des choses plutôt banales et pour certaines déjà connues: vous perdrez tôt vos cheveux; votre urine sent mauvais quand vous avez mangé des asperges; vous ne pouvez pas faire un rond en pointant votre langue; d’autres encore. Mais vous pourrez aussi apprendre des choses graves, voire dramatiques. Le souhaitez-vous? Il y a certes des arguments qui incitent à vouloir apprendre qu’on développera une maladie grave ou qu’on risque de la transmettre à nos enfants. Mais il y a aussi des arguments qui militent contre cette décision. Les connaissez-vous? Saurezvous les peser? Tout cela se complique encore en raison non seulement de tout ce que nous ignorons encore, mais aussi de l’interaction complexe entre gène, environnement et mode de vie. Par exemple, en sachant telle ou telle chose sur son bagage génétique, on pourra adopter des comportements qui retarderont le développement d’une maladie à laquelle on est prédisposé, voire qui l’empêcheront de se développer. On pourra de même apprendre comment on réagira à tel médicament et ainsi en préférer un autre. Ce que ces observations et d’autres
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suggèrent, selon moi, est non seulement qu’il est sage de bien se renseigner avant de se décider à aller de l’avant avec un séquençage de son génome, mais qu’il est également sage de lire ses résultats avec une personne (médecin, généticien) capable de les interpréter correctement. On peut d’ailleurs sans risque prédire que la recherche biomédicale, armée entre autres de ses formidables outils des big data, va énormément bénéficier de l’immense réservoir de données que constituent les descriptions de ces millions de génomes. Mais vous devinez sans doute comment une deuxième valeur fondamentale de nos démocraties libérales risque à son tour d’être menacée. Confidentialité L’entreprise qui aura séquencé votre génome vous demandera si elle peut, de manière anonyme et sans révéler votre identité, rendre accessibles vos données aux chercheurs. Compte tenu des promesses d’avancement des connaissances et des traitements, vous serez peut-être tenté de répondre oui. Mais beaucoup de gens ne le font pas par peur que l’on puisse retracer l’origine de leurs données. On comprend sans mal leurs craintes. Imaginez ce qui peut s’ensuivre si des compagnies d’assurance ou des employeurs peuvent savoir, pour m’en tenir à cet exemple, que telle ou telle personne présente un risque de développer une maladie grave. La valeur que nous accordons avec raison à l’exigence de confidentialité et à la protection de la vie privée est ici mise au défi par ces nouvelles technologies. Les simples promesses faites par les entreprises ou les gouvernements ne sont pas de nature à complètement nous rassurer. Ce qui me conduit à la troisième valeur dont je voulais toucher un mot. Des limites à la marchandisation Nous vivons, pour le meilleur et pour le pire, dans un monde dominé par une économie de marché. Mais il y a de bonnes raisons de penser que certaines choses, par essence, ne devraient en aucun cas être achetées et vendues. Plusieurs raisons peuvent être invoquées pour cela: le fait que la marchandisation peut corrompre le bien en question en est une; une certaine idée de la dignité humaine ou des droits reconnus à chacun en est une autre. Devons-nous permettre la marchandisation et donc la privatisation des données génétiques? Si oui, jusqu’où? Par le séquençage de génome personnalisé, nous sommes déjà devant l’obligation de répondre à ces difficiles questions… y
34 GASTRONOMIE VOIR QC
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GASTRONOMIE 35 VOIR QC
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GASTRONOMIE SUR GRAND ÉCRAN LE FESTIVAL CUISINE, CINÉMA ET CONFIDENCES REVIENT À BAIE-SAINT-PAUL POUR UNE DEUXIÈME ÉDITION. AU PROGRAMME: DES FILMS ET DES DOCUMENTAIRES SUR L’ALIMENTATION ET DES SOUPERS QUI ÉVOQUENT LE CINÉMA. MOTS | MARIE PÂRIS
C’est à la croisée de deux arts que se trouve ce festival, résultat de la rencontre et de l’amitié de la productrice Lucie Tremblay et du chef Jean Soulard. Un festival où l’on mange avec les yeux, où l’on déguste des films dans l’assiette. L’année dernière, près de 500 curieux assistaient aux projections organisées par Cuisine, cinéma et confidences; pour cette édition, qui se déroule du 2 au 4 novembre prochains, 2000 personnes sont attendues dans Charlevoix. Les produits de la région seront d’ailleurs mis en avant. C’est la ville de Baie-Saint-Paul, où Lucie Tremblay a grandi et a fondé sa maison de production, et où Jean Soulard s’est installé, qui accueille cet événement pas comme les autres. Une rencontre culturelle hybride qui a le mérite de faire sortir les festivals des métropoles. Si les projections et les soupers se limitaient l’année dernière à l’Hôtel Le Germain de Baie-Saint-Paul et à la Maison Mère, le duo d’organisateurs veut investir plus de lieux pour cette édition: «On veut développer le tout à l’intérieur de la ville et on va réquisitionner de nouvelles places, comme le Musée d’art contem porain et le Carrefour culturel Paul-Médéric», indique Jean Soulard. Dans la programmation gastronomie qu’il cha peaute, on note la présence des chefs Arnaud Marchand, du restaurant Chez Boulay, David Forbes du Ciel!, Marie-Chantal Lepage du Musée des beaux-arts de Québec et Alexis Jegou, chef exécutif de l’Hôtel Le Germain. À ce beau bouquet de chefs s’ajoutent Nathalie Samson, chocolatière de TroisRivières, et le biologiste Fabien Girard, spécialiste des produits boréaux, venu du Saguenay.
JEAN SOULARD, DAVID FORBES ET ALEXIS JEGOU
Sans oublier la star de la fin de semaine, le chef français Olivier Roellinger – qui a notamment décroché trois étoiles Michelin avec sa Maison de Bricourt, en Bretagne. «Il a les mains dans les épices, Monsieur Roellinger», commente Jean Soulard, ravi de cet invité international passionné. Le chef français parrainera le souper gastronomique du samedi soir sur le thème «Épices et chocolat», qui succédera à la projection du film Le chocolat de Lasse Hallström. La programmation se construit ainsi autour de fils rouges qui traversent aussi bien les œuvres cinématographiques que les soupers gastronomiques. France et chocolat Il y a donc le thème gourmand du chocolat, qu’on retrouve dès le film d’ouverture, Como agua para chocolate (Les épices de la passion) d’Alfonso Arau. «Pour moi, c’est un Festin de Babette à la Gabriel García Márquez. Le portrait d’une femme dans toute sa passion pour la cuisine, ses plats dans lesquels elle met tout son amour, commente Lucie Tremblay. Comme on est début novembre, c’est l’occasion d’offrir des couleurs chaleureuses, d’amener du bonheur et de l’amour avec le chocolat. Ça permet aussi de faire une excursion dans la gastronomie mexicaine… Le film va très bien avec le chef de l’Hôtel Le Germain, qui se passionne pour la cuisine latine!» Si le festival commence avec le Mexique, la pro grammation se poursuit avec un clin d’œil à la France, en cette année qui a vu partir Paul Bocuse et Joël Robuchon. Parmi les films français à l’affiche, notons Les saveurs du palais de Christian Vincent,
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GASTRONOMIE 37 VO3 #11
L’AILE OU LA CUISSE, © LES FILMS CHRISTIAN FECHNER
VOIR QC
où l’actrice Catherine Frot incarne une chef dans l’univers très masculin de la gastronomie. Un film qui permettra de lancer des discussions intéressantes sur la parité en cuisine, mais aussi, quelques mois à peine après la tenue du G7 dans Charlevoix, sur la question de nourrir les grands. Le festival est aussi l’occasion de revisiter les classiques, avec la projection du cultissime L’aile ou la cuisse de Claude Zidi, avec Louis de Funès et Coluche. «J’aime beaucoup mettre des films de répertoire dans notre programmation, souligne Lucie Tremblay. Ce film-là a 40 ans, mais il aborde déjà la thématique de la gastronomie versus le fast-food. Et c’est un film qui me fait mourir de rire!» Les cinéastes Mathieu Roy, Anaïs BarbeauLavalette, Émile Proulx-Cloutier, Nicolas Paquet et Philippe Lavalette viendront quant à eux présenter les films québécois Dépossession, Le plancher des vaches, Esprit de cantine et Chef Thémis. Parmi les 14 projections prévues pendant la fin de semaine, deux premières: Le magicien des épices, un documentaire de Jean-Pierre Petit sur Olivier Roellinger, et Les festins imaginaires d’Anne Georget. Cette dernière a retracé des livres de recettes écrits à la main par des gens dans des camps de concentration. «C’est un film qui m’a particulièrement touchée», commente la productrice charlevoisienne. «Pour être capables de survivre à l’horreur, ces gens ont partagé des recettes, imaginé des festins. Il y a beaucoup de tendresse et un fort pouvoir d’évocation dans ce film. Il me fait un peu penser à La vie est belle…»
Une soupe sur scène «Il faut faire quelque chose dans cette chapelle!», s’exclamait Christian Bégin l’année dernière, en voyant le superbe espace de la Maison Mère de Baie-Saint-Paul. Pour cette édition, le virevoltant porte-parole du festival a trouvé comment occuper la chapelle: aux côtés des comédiens Patrice Coquereau, Denis Harvey et Fannie Dubeau, il y présentera une pièce inspirée du livre de Mark Crick La soupe de Kafka – car, bien sûr, on parlera encore de bouffe. Avec le théâtre, c’est un nouveau volet artistique qui s’ajoute à la gastronomie et au cinéma. «On a beaucoup d’imagination et de créativité dans ce festival, indique Lucie Tremblay. On pense par exemple à une expo photo prochainement. Mais ça se construit une année à la fois...» En attendant, Cuisine, cinéma et confidences conti nue de nous en mettre plein la vue et la panse au cœur de l’automne, attirant cette année encore plus de curieux de l’extérieur de Charlevoix. «On a pu vérifier avec la première édition que le festival avait toute sa pertinence, et particulièrement ici dans la région, souligne la productrice. On a validé notre formule, festive mais aussi informative; les gens aiment habiter les lieux de Baie-Saint-Paul de façon différente et pouvoir échanger après les films.» Car au-delà des plaisirs de la table et des films, Jean Soulard et Lucie Tremblay veulent également pousser la réflexion sur la qualité de ce que nous mangeons. Le duo travaille déjà à la programmation de la troisième édition, avec un but en tête: que Cuisine, cinéma et confidences devienne le lieu de rendez-vous du monde de l’alimentation. Le cinéma est peut-être le 7e art, mais la gastrono mie a sans doute aussi sa place dans la liste. y Du 2 au 4 novembre À Baie-Saint-Paul cuisine-cinema-et-confidences.com
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LE POINT SUR L’AG R I C U LT U R E RAISONNÉE MD
Lorsqu’on se trouve face à un tigre, il faut choisir entre le combat et la fuite. L’agriculture industrielle est devenue un défi devant lequel la dérobade n’est plus une option. Dans nos champs de blé, le gros bon sens de l’Agriculture Raisonnée MD est une belle épée. Une fierté. Petite mise en contexte agronomique : afin de répondre aux besoins toujours grandissants de la population après la Seconde Guerre mondiale, l’agriculture est devenue intensive. Cet avènement a entraîné une utilisation massive d'engrais et de produits visant à lutter contre les maladies, le foisonnement des herbes indésirables et toutes ces mignonnes bestioles qui se disputent le fruit de nos efforts. Ces pratiques agricoles, on le sait, ont eu de multiples conséquences sur les eaux, la faune, la f lore et, par extension, les homo sapiens devenus aussi modernes qu’inquiets. Face à cette réalité, il se trouve que l’Agriculture Raisonnée MD apporte des solutions. En cherchant à se rapprocher de l’agriculture biologique sans toutefois en adopter toutes les contraintes, ce type de culture régie par une certification a longuement été étudié, évalué, puis privilégié par les Moulins de Soulanges, cette société chapeautée par Robert Beauchemin (La Milanaise) dans laquelle Bernard Fiset (Première Moisson) est également impliqué. Le vocable « Agriculture Raisonnée » est une adaptation française du concept « Integrated Farming » des Anglo-Saxons. À
mi-chemin entre l’agriculture intensive et l’agriculture biologique, l’agriculture raisonnée est encadrée par 103 balises visant une régie globale de l’exploitation agricole. Elle implique, par exemple, une gestion serrée de la fertilisation ; la réduction, puis l’élimination des pesticides ; le bannissement des phytocides, sauf en cas de force majeure pouvant mettre en péril la récolte ; la limitation des risques de pollution ; la gestion économe des ressources en eau ; le respect des conditions de vie des exploitants de la ferme et celui des animaux, ainsi que la protection des paysages. Un beau contrat ! On est à mille lieues d’un salto arrière dans la charrette de grand-papa. On est plutôt dans des techniques de pointe combinées à un savoir-faire « à l’ancienne » d’une valeur incontestable. Ce type d'agriculture a aussi, et peut-être surtout, le potentiel de servir de tremplin à des méthodes agricoles encore plus écologiques et durables. Il permet aux agriculteurs aux pratiques rétrogrades d’amorcer une transition vers une démarche plus responsable pour ensuite migrer vers le biologique. Ce n’est pas juste un pas en avant, ça, c’est plusieurs enjambées du côté d’une nouvelle réalité.
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GUIDE RESTOS 41 VOIR QC
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PORTRAIT DE CHEF KIM CÔTÉ
Il est aux fourneaux de Côté Est à Kamouraska, une pépite culinaire du Bas-Saint-Laurent. Installé dans un bâtiment patrimonial, le resto fait face au fleuve et régale les clients des produits du coin dans une ambiance franchement chaleureuse. À l’image de son chef propriétaire, un chasseur gourmand et bon vivant... MOTS | MARIE PÂRIS
PHOTO | JULIE HOUDE-AUDET
Voir: Pourquoi le choix de Kamouraska? Kim Côté: J’étais plongeur dans un resto de Saint-Hyacinthe, puis j’ai eu une écœurantite de la ville, j’en suis parti à 20 ans. J’ai suivi un cours en protection de la faune; j’étais guide dans le nord pour la chasse au caribou. J’ai déménagé en 2000 à Kamouraska, où vivent mes beaux-parents. Et c’est vrai qu’on a les plus beaux couchers de soleil! On ne s’en lasse jamais.
Ton style de cuisine, en quelques mots? C’est une cuisine très locale. Je travaille avec trois maraîchers pendant l’été. On a aussi nos propres jardins pour faire nos fines herbes et nos pousses. Il faut s’en occuper, mais ça fait des petits breaks aux cuisiniers!
Comment es-tu venu à la cuisine? J’ai lancé en 2008 La Camarine, un restaurant sous forme de coopérative. J’ai fait ça avec des amis, cinq fous avec des jeunes enfants! Il y avait notamment Martin, de la microbrasserie La Tête d’allumette. Ç’a finalement brûlé au bout de neuf mois…
L’aliment que tu préfères? Un bon steak d’orignal! Et la seule chose que j’aime pas, c’est le sarrasin.
Je suis donc allé travailler à la boulangerie de mes beaux-parents, Niemand. Je faisais le pain et les viennoiseries. En 2012, l’opportunité de louer le presbytère s’est présentée et on a commencé avec un petit café de village tout simple. C’est un superbe bâtiment avec un des seuls accès directs au fleuve! L’intérieur est très morcelé avec ses nombreuses salles, donc le service peut être difficile. Quels sont les enjeux quand on gère un resto dans une région touristique? C’est très élastique: l’été, on est à 400 couverts par jour, et j’ai de la misère à trouver le temps de tondre mon gazon! En ce moment, c’est plutôt entre 20 et 100 couverts. Mais on fait aussi traiteur à l’année pour une grande entreprise, et on vend nos produits dans les marchés de Noël.
Quel pays aimes-tu pour sa gastronomie? L’Espagne. J’adore la paëlla! J’en fais tous les dimanches au resto.
Un producteur dont tu aimerais souligner le travail? Rémi Hudon, producteur de chevreau. Il fait 300 000 litres de lait par an, c’est un travailleur exceptionnel. Il fait aussi de la pêche à l’anguille traditionnelle; il est la troisième génération dans sa famille à faire ça. Quel est le pire inconvénient du métier de chef? Le manque de temps, pour profiter de ma famille. Mon fils nous aide volontiers, mais je ne peux pas l’obliger à venir travailler tout le temps avec nous… Le plus bel avantage? J’aime la proximité avec les producteurs et le fait de faire découvrir aux clients la gastronomie du Bas-Saint-Laurent: les champignons forestiers, le vin et le raisin du vignoble Le Raku, la bière de La Tête d’allumette, les produits de la Boulangerie Niemand, Les Jardins de la mer…
J’aime cuisiner aux gens des produits qu’ils connaissent peu ou pas, comme la pintade (certains croient que c’est un poisson!), le phoque, l’agneau de Charlevoix, et le chevreau de lait aussi bien sûr. Le chevreau, c’est un produit que tu aimes particulièrement? Je suis le seul restaurateur à offrir ça au Québec. Le chevreau, c’est un goût qui m’a marqué: mon parrain élevait des chèvres, et je me souviens d’un méchoui au chevreau chez lui... Je n’ai réussi à en retrouver le goût que cette année. Tes trucs pour rester en forme, avec ce métier stressant et physiquement demandant? Moi, c’est la chasse. J’ai commencé à sept ans. Oie blanche, coyote, outarde, loup marin, orignal… Mon camp de chasse est à 45 minutes du resto; je passe l’aprèsmidi là-bas et je décroche. J’aime bien la chasse aux champignons aussi! La gastronomie québécoise pour toi, c’est quoi? Ça passe par encourager les producteurs locaux, et laisser aller son inspiration. Et il ne faut pas se fier trop aux critiques; c’est facile de nos jours de se laisser démolir par les réseaux sociaux. On ne peut pas plaire à tout le monde! y
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LA PETITE RUSSIE FRANCIS DESHARNAIS
AUX PREMIERS TEMPS DE L’ANTHROPOCÈNE ESTHER LAFORCE
Pow Pow, 180 pages La littérature n’a souvent rien à envier aux grands documentaires lorsque vient le temps de faire découvrir des facettes de notre histoire encore méconnues. Parmi celles-ci, le petit village de Guyenne en Abitibi. «Ben voyons donc! On est pas des communistes, on est des coopérants!» Si la paroisse, au nord-ouest d’Amos, faisait autant jaser «l’extérieur», c’est que quiconque choisissait de s’y installer – comme Marcel et Antoinette Desharnais – dès sa fondation en 1947 le faisait en signant un contrat de membre: 50% de son salaire devait être versé à la communauté pour assurer son expansion; le village était géré non pas par un maire, mais par sa population. Pas de blasphèmes, pas de «bagosse» – l’Église catholique influençant évidemment une partie des règlements. «Au final, ça reste une histoire de gars pis de curés votre affaire.» Antoinette ne s’est jamais privée de dire à son mari, lui qui se dévouait corps et âme au bon fonctionnement de la colonie, qu’il était inacceptable que les femmes n’aient pas leur mot à dire lors des soirées d’étude; discours féministe teintant l’album du début à la fin, jusqu’à ce que le couple – et ses 10 enfants – quitte Guyenne 20 ans après son arrivée. Un départ qui se fait non pas sans la moindre amertume, mais avec un certain sentiment de fierté. C’est d’ailleurs sur d’époustouflantes images de la forêt abitibienne que se clôt le récit, un moment de silence et de contemplation, comme un grand remerciement aux pionnières et pionniers qui bien avant nous se sont unis en suivant leurs rêves, en travaillant pour leurs idées. Avec La petite Russie, Francis Desharnais signe sans doute son œuvre la plus grandiose, chargée d’histoire et d’émotion. Une franche poésie est menée par un rythme habile entre le texte et le dessin texturé à l’aquarelle; des chapitres s’ouvrant sur des aurores nocturnes, illustrations desquelles se dégage le froid du Nord. La postface de l’historien Frédéric Lemieux complète parfaitement l’ouvrage de celui qui, humblement, n’a pas la prétention d’avoir écrit un livre historique; il souhaitait d’abord et avant tout rendre hommage à ses grandsparents, Marcel et Antoinette Desharnais, partageant ainsi avec grande générosité une partie d’un héritage familial et collectif. Un sanababiche de bel hommage. (Mélanie Jannard) y
Leméac, 96 pages Replonger dans le passé, rester «en équilibre sur [ses] souvenirs» pour retarder la fin: voilà ce à quoi s’adonne Émilie en écrivant cette lettre à sa sœur mourante. Le premier roman d’Esther Laforce, d’une apparence délicate lorsqu’on s’arrête au petit livre blanc entre nos mains, aborde le contraste le plus pur qu’est celui entre la vie et la mort. Une opposition évidente qui réussit à nous surprendre par sa forme, à nous secouer. S’il y a souvent quelque chose de réconfortant dans l’évocation des jeux d’enfance, ceux d’Émilie et de sa sœur Mélissa, qui passaient beaucoup de temps à la campagne – royaume de la liberté pour des petites filles de la «banlieue si réglée qu’on appelait la ville» –, ont quelque chose d’inquiétant; un voile gris, une brume chaude et dense qui plane au-dessus. À commencer par la découverte du corps d’un chevreuil décapité au pit de sable: une rencontre inattendue et indésirée, comme un prélude aux embûches de leur relation. «D’instinct, tu t’étais détournée et retirée vers le chemin d’où nous venions, fuyant la mort et ses traces.» Il faudra trouver comment éviter de faire demi-tour devant le décès prématuré des parents; l’infertilité malgré un désir d’enfanter pour pallier la disparition d’une famille, des lieux et des mémoires qui l’entourent. «Devrait-on craindre la fin du monde?» Les prophéties religieuses indiffèrent la narratrice qui se raccroche plutôt du mieux qu’elle peut aux gestes banals et à la nature qui, même si elle s’éteint elle aussi à vue d’œil, permet encore de s’enraciner quelque part. «C’est ainsi que j’apaisais ma frayeur quand, il y a longtemps, assise dans des montagnes russes, j’attendais que le train se mette à tomber à toute vitesse.» Vieillir seule effraie, mais c’est davantage la chute imminente vers l’inconnu qui terrorise. Malgré un récit très sombre, à la fois réaliste et franchement confrontant, l’espoir se faufile dans un mince filet de lumière qui perce à travers les voyages et la prose: de quoi «avancer d’heure en heure» vers la fin d’un monde, sans savoir comment occuper le temps qui nous en sépare sinon que par la correspondance avec celles et ceux qui l’auront quitté en premier. (Mélanie Jannard) y
Sur les rayons
Sur les rayons
LA SOCIÉTÉ DES GRANDS FONDS DANIEL CANTY
ÇA RACONTE SARAH PAULINE DELABROY-ALLARD
La Peuplade, 208 pages
Éditions de Minuit, 188 pages
Il arrive qu’un lecteur erre devant sa bibliothèque. Il arrive que ce lecteur, parcourant du regard le dos des livres cordés sur la tablette du centre, se remémore différents souvenirs de lecture. Un souvenir de lecture est bien souvent plus que l’histoire qu’il raconte. Ce sont les lieux imaginaires de la fiction, mais aussi ceux très réels de la lecture. C’est un banc de parc, une ville étrangère, une berge tranquille. Il arrive que ce lecteur en extirpe un livre, bousculant l’inébranlable ordre des choses, l’inébranlable quiétude d’une bibliothèque. Il arrive que ce livre soit gondolé. Peut-être par une pluie soudaine, alors que le lecteur se trouvait dans un parc. Peut-être par d’interminables soirées de lecture dans une baignoire où coulait en permanence un filet d’eau chaude. Il arrive que ce lecteur, par une offrande littéraire, vous convie d’intégrer La société des grands fonds.
Ça raconte Sarah. Ça raconte une histoire d’amour, d’inconnu, de désir et de déception. Ça ressemble à plein de choses qu’on a déjà lues, mais ça pique la curiosité. Ça s’installe lentement pendant la lecture. Quelque chose comme un point, au creux du ventre, juste à côté des envies. Ça bat de phrase en phrase, de page en page, de chapitre en chapitre. C’est étonnant, parce qu’on se dit: «J’ai déjà lu ça.» C’est fascinant, parce qu’avant d’y plonger, on pensait: «Pas une autre histoire d’amour.» Ça fonctionne, mais on ne saurait dire pourquoi. C’est vivant, incandescent, brûlant. C’est comme ça les livres parfois. C’est de la magie, ça ensorcelle. Ça raconte Sarah est un tour de force littéraire, un mausolée en l’honneur de ces histoires qui ne nous quittent pas.
Après Wigrum (La Peuplade, 2011) et Les États-Unis du vent (La Peuplade, 2014), Daniel Canty poursuit une œuvre hétéroclite, éclectique. Le parcours littéraire de cet artiste pluridisciplinaire marie contrainte et liberté, érudition et ludisme. Avec ce plus récent livre, l’auteur tente de nous faire accroire qu’il nous offre un livre d’eau, alors qu’à sa lecture, on se rend compte bien assez vite qu’il nous offre un livre de lecteur. Regroupant des textes parus dans Bathyscaphe, journal inactuel paru irrégulièrement à 10 reprises entre 2008 et 2013, La société des grands fonds s’était d’abord extrait de cette première vie pour loger sur la toile, avant de prendre la forme livresque sous laquelle il se présente maintenant à nous. D’une relecture de Nine Stories de J. D. Salinger ou d’une rencontre fortuite avec Alistair MacLeod à Vancouver, Canty en fait des morceaux de bravoure fluides dans leur disparité.
C’est quelque part entre latence et fulgurance que se retrouve ce premier texte de la Française Pauline Delabroy-Allard. À sa lecture, on se rappelle pourquoi on lit. On se souvient de l’espoir qu’on porte en chaque livre dans l’expectation d’une telle révélation. Professeure de lycée, la narratrice n’est jamais nommée. Jeune célibataire et mère d’une petite fille, elle rencontre Sarah lors d’un réveillon, chez des amis. C’est à ce moment qu’une allumette tombe. Celle qui met le feu aux poudres. Tout au long de la lecture, on a cette impression de suivre cette étincelle qui serpente le bitume jusqu’à l’éclatement. Partout dans Paris, tantôt même jusqu’à la mer et jusqu’à Trieste, en Italie, pourquoi pas. Et ça revient, et ça crépite, jusque dans la chambre à coucher et sous les draps. C’est une explosion à venir, ou peutêtre même advenue. Du moins, c’est un peu ça. Et beaucoup d’autres choses aussi.
Livre d’eau, peut-être. Livre de lecteur, assurément. Mais livre d’errances aussi, surtout. Entre Montréal et New York en passant par Halifax et Huntsville, Canty arpente des territoires et en invente différentes topographies. À celui qui «ignore si le monde, à l’instar d’un livre, est véritablement constitué de signes», je peux affirmer qu’à la tombée de la nuit, lorsque j’ai fait mon entrée dans La société des grands fonds, le vent s’est levé, la pluie s’est invitée à ma fenêtre. Alors un livre d’eau? Dans le fond, oui, pourquoi pas. (Jérémy Laniel) y
De cette rencontre en découle une autre et une autre. Assez rapidement, la narratrice – comme le lecteur – tombera folle amoureuse de Sarah, cette violoncelliste qui vit comme d’autres fantasment. C’est une première d’histoire d’amour homosexuelle pour chacune d’elle, mais ça importe si peu. C’est une histoire d’amour comme un météore. C’est une histoire de mort, aussi. De violence, bien sûr. C’est un cours d’écriture et un ravissement de lecture. C’est d’une maîtrise littéraire, un tour de force. Ça raconte Sarah, oui, mais nous aussi, certainement. (Jérémy Laniel) y
44 CRÉATION VOIR QC
VO3 #11
11 / 2O18
PAR GUILLAUME TREMBLAY ET OLIVER MORIN
ILLUSTRATION OLIVER MORIN
L’homme sans visage 2067. Le dernier baby-boomer est mort depuis longtemps, envoyé dans un «voyage» sur la lune, sans billet de retour. On les avait déclarés illégaux à l’ONU après avoir été reconnus coupables de la destruction des écosystèmes au profit de leurs volumineux REER. Depuis, le clonage humain est interdit. Des fois que quelqu’un aurait cloné un babyboomer. On n’est jamais trop prudent. Un test de sang, rien de plus banal, pendant une entrevue pour une job de bureau avait révélé à ma grande stupéfaction que j’étais… un clone. Moi, Gilles Douillette. Un clone. Les tests étaient sans équivoque. Mais le clone de qui? Clone de personne. Me voilà bien triste. Me voilà condamné. Le vide s’empare de moi. J’apprivoise ce soir ma nouvelle vie d’itinérant, en mangeant un restant de sandwich dans une ruelle partagée avec Hobo Murphy, un vieux clone itinérant (un pléonasme) qui est sur le point de s’étouffer et de mourir en citant Shakespeare un peu tout croche. Les sirènes de police se font entendre. Un troupeau de chats-chacals s’approche. Je me mets à genoux. Ils tournent autour de moi, me sentent, ronronnent.
Au moment de me croquer en équipe, un homme surgit en lançant une poubelle, m’accroche par le collet et court à toute vitesse, mon corps sur ses épaules en poche de patates. Cet homme n’a pas de visage.
L’homme sans visage tousse pas mal…
Nous voici cachés dans un vieux Tim Hortons désaffecté.
Un temps.
Sans Visage: J’ai pu de visage. Gilles: Je vois ben ça oui, mais…
Sans Visage: … Je suis un homme coquet. Sans Visage: (brusque) Assis-toi icitte, Douillette!
Gilles ne sait pas quoi répondre à ça. Mélodie, un Schubert du futur.
Gilles: (brusqué) OK, OK... Sans Visage: (raide) Veux-tu un café, Douillette? Gilles: Hein? Euh non non, c’est gentil. Sans Visage: Sûr? Tu sais pas ce que tu manques… Il prend une longue gorgée de café et l’apprécie de façon sonore. Gilles: Merci pour les chats-chacals. Froid. Temps. L’homme sans visage baisse sa capine de hoodie. On en sait pas plus sur lui. Son visage est lisse comme un derrière de genou. Gilles: Qu’est-ce qui est arrivé à votre visage?
Sans Visage: J’avais toujours rêvé d’un beau visage. J’étais pas laid mais j’étais certainement pas ce qu’on pourrait appeler un bel homme, loin de là. Ça me rendait malheureux. Très, pour être honnête. Je pensais rien qu’à ça, ma face, tel un boulet repoussant au pied de mon existence. Ça fait qu’un jour, en me rendant à la pharmacie, je me suis arrêté dans un comptoir de chirurgie plastique, machinalement, sans réfléchir. J’ai ouvert le catalogue en plein milieu pis je suis tombé sur la plus belle face d’homme que j’avais jamais vue de ma vie. Chu même venu un peu bandé (mais c’était rien de sexuel). J’ai pris mon courage, mes REER pis j’ai changé le cours de ma vie. Gilles: Pis quoi… le docteur vous a moffé? Sans Visage: Au contraire. J’étais parfait.
>
> (Il prend une grande inspiration.) J’ai TELLEMENT fourré cette semaine-là… Tout le monde me saluait, me respectait, me proposait des massages. J’étais unique. (Il devient sombre.) Les saisons passent puis viennent les soldes. Le visage que j’avais soigneusement adopté est finalement… tombé en vente. Une grande promotion. En quelques jours, tout le monde avait ma face. C’était pu ma face, c’était rendu la face à tout le monde. Je suis allé me plaindre au chirurgien, j’avais gardé mon reçu, heureuse habitude. Il me dit «très bien», il me fait m’asseoir, referme la porte de son atelier. Une heure plus tard, j’avais pu de face. Pu de nez. Pu rien. Un gros trou de face humide. J’aurais dû me méfier. C’était une offre Groupon.
m’a chassé à grands coups de balayeuse. J’ai refait ma vie ici, tel un barista des ténèbres. Gilles: Pis pourquoi vous m’avez sauvé tantôt?
Moi, Gilles Douillette, dont l’existence à ce jour fut aussi brune qu’un bas ben ben brun, c’est la curiosité qui m’a sauvé. Ou peutêtre mon stage chez Xerox au milieu des années 2050 à Trois-Rivières. «Le bon vieux temps.»
Sans Visage: Ton visage. La lame s’approche de ma joue. Ça sent fort la vieille roussette. Je frissonne.
Je l’ai reconnu. Tu me dois un visage, Douillette. Je t’ai reconnu, Robert. Robert Douillette. Voilà donc le nom de l’homme dont je suis le clone. Si je meurs dans les prochaines secondes, au moins mon âme sera rendue en je saurai le nom de l’homme qui m’a mis au monde. L’homme sans visage approche son couteau à pâtisserie de mon visage. Je ferme les yeux. Je pèse.
Gilles: Ils doivent pu en vendre beaucoup des imprimantes à face depuis que les modi fications génétiques pis le clonage ont été bannis par l’ONU. Sans Visage: Qu’est-ce que tu connais dins imprimantes? Gilles: Je connais un entrepôt où ils gardent des vieux modèles… Ils savent plus trop quoi faire avec… (petit rire nerveux)
Gilles: Vous avez pas eu envie de vous faire greffer un autre visage?
Pour: Si je devais perdre mon visage, peutêtre aurais-je au moins la chance de faire oublier aux autorités mon identité de clone, nouvellement révélée.
L’Homme sans visage jette son couteau par terre et sort une cartouche d’encre génétique. Une espèce de glu couleur peau.
Sans Visage: J’aurais ben voulu, Douillette, mais j’étais rendu tellement laitte, le docteur
Contre: L’identité de mon géniteur-mystère me donne envie d’en savoir plus.
Sans Visage: Connais-tu une machine qui prend les A91?
#PARTAGEZVOTREADN Aidez un patient atteint du cancer du sang à embrasser la vie. Tout ce que ça prend, c’est un prélèvement d’ADN - pas plus que ce qu’on partage dans un baiser.
Gilles: C’est le standard. Sans Visage: Pourquoi je te croirais? Gilles: J’ai-tu l’air de quelqu’un qui a quelque chose à perdre à soir? Je viens d’apprendre que j’étais un clone. Je le connais pas votre Robert Douillette. Aidez-moi à le retrouver pis je vous répare toutes les imprimantes génétiques que vous voulez. Ou ben prenez ma face pis faites une job de cochon avec vos outils de cuisine de restauration rapide. Sans Visage: Tu viens de sauver ta face, viens-t’en. Gilles: Où on va? Sans Visage: Je connais un bonhomme qui a un voilier. Il doit avoir proche de 184 ans. Il a l’air d’en avoir 60. On dit qu’il vit sur l’intérêt de ses placements. Quand il est pas en voyage organisé, les soirs de brume, il navigue sur le canal Lachine, il fait du BBQ ben tranquille, y est ben en bédaine tout de blanc vêtu en train de jouer à Dame de Pique avec sa petite poulette de 75 ans. Y aime pas ça perdre. C’est-tu un fantôme? C’est-tu un
boomer? Quelque chose est sûr, cette entité-là doit connaître Robert Douillette. Pis si ton créateur est en vie, il va cracher le morceau: j’apporte un vin rare et exceptionnel vendu seulement 10,25$ à la SAQ. Gilles: Je pensais qu’ils étaient tous morts? Un boomer? Sans Visage: T’es naïf. Y a ben pire que les clones tsé, Gilles. Si tu savais. Prépare-toi à rencontrer quelqu’un qui va ramener toute la conversation à lui-même. Mange une bonne roue de tracteur, tu vas avoir besoin de sucre. S’il essaie de te faire croire qu’il a jamais rien eu dans la vie, chante une chanson dans ta tête. Méfie-toi, Gilles. Quand il parle de vouloir du changement, il parle jamais de changement réel, il veut juste un nouveau polo.
Gilles: J’ai pas d’argent. Sans Visage: Il va te convaincre d’emprunter. Tu vas devenir stressé, tu vas négliger les gens autour de toi… pis ça… «et c’est pas fini, c’est rien qu’un début, l’effet boomer; tu l’as pas encore vu». Il s’agit pu juste de toi, Gilles. Il s’agit de l’avenir du monde entier. Le monde est influençable Gilles. Si le mal du boomer se propage à nouveau, ce coup-là, la Terre tiendra pas le coup. On va essayer de l’attirer au Vieux-Port en faisant respirer le vin; devant ce spectre, tiens-toi les fesses ben serrées. Sinon, je te naye dans la tank à cappuccino glacé. Je serre la main de cet homme sans visage. Deal sinistre. Dans la sueur de son nonvisage se reflète mon propre visage, ou plutôt celui de Robert Douillette.
Gilles: C’est ben rushant.
Suis-je… un baby-boomer? y
Sans Visage: Il va vouloir te donner des conseils, surtout sur les sujets qu’il connaît juste un peu. Fais BEN attention. Il pourrait te convaincre d’acheter des choses dont t’as pas besoin.
Ce texte est une variation sur un chapitre de Le Clone est triste, une création du Théâtre du Futur qui sera présentée au Théâtre Aux Écuries en janvier 2019. Un maudit bon cadeau de Noël ça (wink wink).
À DÉCOUVRIR AU PALAIS MONTCALM
Dweezil zappa
Choice cuts dimanche 11 novembre Information et billetterie
418 641-6040 1 877 641-6040
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thornetta davis band samedi 17 novembre
SÉLECTION RADIO-cANADA
gregory porter Nat King cole & me vendredi 7 décembre
48 ARTS VISUELS VOIR QC
VO3 #11
11 / 2O18
ARTS VISUELS 49 VOIR QC
VO3 #11
LES ALGORITHMES COMME LA VIE L’ARTISTE BRITANNIQUE SAMUEL FOURACRE PRÉSENTE D.^^.$.®. (DANCE.MUSIC.SEX.ROMANCE), UNE INSTALLATION VIDÉO OÙ IL EST QUESTION DE LA TRAJECTOIRE DES RELATIONS ROMANTIQUES ET ÉROTIQUES À L’ÈRE DES ALGORITHMES. MOTS | MARYSE BOYCE
«Nous sommes notre propre usine à relations publiques et, sans surprise, cela teinte comment nous nous engageons affectivement et sexuel lement», affirme d’emblée Samuel Fouracre. Dans la dernière décennie, les trajectoires que suivent les relations érotiques et romantiques se sont inscrites au cœur de la pratique de l’artiste, qui a articulé ses réflexions autour de la vidéo et de la synthèse d’images. «D.^^.$.®. pose un regard qui se concentre sur le numérique, à cause de l’escalade récente et rapide de notre usage de différentes applications. Celles-ci prétendent nous permettre de contrôler et d’affiner l’image que nous projetons de nous-mêmes», affirme-t-il. Le Britannique admet se fasciner pour l’autoreprésentation de nos expériences, à la fois dans la façon dont nous voulons être perçus par les autres que par la manière dont nous les jugeons. «Au départ, je voulais jouer avec mes propres expériences de la masculinité, plus spécifiquement mes relations affectives. Je voulais les tordre et les reconstruire grâce à l’imagerie banale du machisme hétérosexuel.» Fouracre aime explorer les archétypes. Le projet a toutefois pris une tangente évolutive, et l’artiste n’approche plus l’œuvre avec les mêmes intentions qu’à sa genèse en 2015: «Ç’a évolué en une réflexion beaucoup plus large, qui porte maintenant sur les étapes cycliques de la vie affective de chaque individu, de la romance au sexe, au cynisme, et inversement.» À l’origine du projet D.^^.$.®., «il s’agissait moins d’une inspiration soudaine que d’un besoin émotif», soutient-il. Fouracre avait jusqu’alors abordé son travail «en élaborant un horaire de tournage,
créant des versions de travail de [s]es scénarios et suivant un arc de production passant par un momentum précis, qui menait à une fin définie». À l’approche de cette fin, il a toutefois ressenti une angoisse l’étreindre et s’est mis à chercher par quel moyen l’éviter. «La seule façon à laquelle je pouvais penser était de garder l’œuvre en cours. J’ai donc commencé à tourner des fragments dans mon studio avec des collaborateurs au fil de leurs disponibilités, et à animer des scènes en utilisant des éléments qui se passaient dans ma vie.»
< > STILL FROM #ABOUTLASTNIGHT (2018), SAMUEL FOURACRE.
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> Quand le médium embrasse le message L’œuvre de Fouracre utilise donc principalement le tournage vidéo et la synthèse d’images en 3D. «Ça m’apparaît pertinent que l’ordinateur, ce dispositif quotidien qu’on utilise de manière très prosaïque, puisse être utilisé de manière poétique pour reconstruire ces expériences et leur fournir une réponse.» L’évolution rapide du matériel informatique et des logiciels élargit chaque année le champ des possibles de ce que le vidéaste peut créer à partir de son studio, bien qu’il préfère des techniques d’animation 3D plutôt rudimentaires: «Elles teintent nécessairement l’interprétation qu’on se fera des thématiques que j’explore. Par exemple, l’utilisation des avatars vient nécessairement avec une impression un peu glauque, de la même manière que les marionnettes peuvent faire peur: tout cela m’attire beaucoup.» Les multiples chemins du sens S’il n’est question d’éclipser le contenu de son projet avec la technique, la manière dont Fouracre consomme l’information a changé dans les dernières années – comme la plupart de ses contemporains. «Je ne suis pas seulement confortable, je dépends peut-être de cette manière de recevoir un flot continu de divertissements,
d’informations et de stimulations visuelles qui, a priori, ne semblent être que des fragments déconnectés les uns des autres. On sait toutefois maintenant que les algorithmes écrivent la narration pour nous.» C’est cette structure décousue, où «la narration n’est jamais absente, mais se montre incertaine et sans conclusion claire, à l’image de la vie de chacun», qu’a choisi d’adopter l’artiste britannique pour Dance.Music.Sex. Romance. L’installation vidéographique, présentée sur de multiples écrans à la fois, permet d’amplifier les possibilités: «Ça augmente les cases de l’échiquier et, je l’espère, ajoute ainsi des voies d’interprétation pour se construire une narration.» À tous ceux qui se présenteront à La Bande vidéo jusqu’au 2 décembre prochain pour expérimenter son œuvre, Samuel Fouracre leur souhaite d’éprouver un flot d’émotions contradictoires: «Malaise, séduction, cynisme, érotisme, un soupçon de tristesse et bien sûr, quelques manifestations scintillantes de plaisir... Bref, les mêmes sensations que j’ai vécues en le faisant.» y
STILL FROM #ABOUTLASTNIGHT (2018), SAMUEL FOURACRE.
D.^^.$.®. (Dance.Music.Sex.Romance) Jusqu’au 2 décembre à la Bande Vidéo
575 Grande Allée E, Québec (418) 647.2000 bistropatrizio.ca/ @bistropatrizio
52 CHRONIQUE VOIR QC
VO3 #11
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PETITS VELOURS
PAR CATHERINE GENEST
Changement de registres Marque maison
On ne peut être femme et écrire à la première personne du singulier, paver ses textes de «je», «me» ou «moi» sans être taxée de narcissique, sans être renvoyée à l’image d’un nombril qu’on décrotte au vu et au su de tous. Marie Darsigny avance sans peur dans cet ouvrage qui dénonce au passage le sort qu’on réserve à ses semblables qui osent se raconter en public. Trente est un livre brutal, à la frontière du journal intime et de l’essai, une œuvre inclassable puisée à même ses colères, ses souffrances, ses déceptions, ses dépendances. C’est une autopsie de sa psyché livrée pour nous, la retranscription de ses pensées intrusives, un dialogue intérieur impudique, chaotique et généreux. L’encre des pages porte l’empreinte de ses larmes. L’ère emo a forcément laissé une empreinte sur sa prose: M. D. crée à contre-courant et à rebours un équivalent littéraire aux étoiles de traceur liquide au coin des yeux, aux crêtes de coq sur des tignasses faussement noires, aux disques de My Chemical Romance. Une esthétique qu’elle ressuscite comme autant de collages post-internet de son cru, des références visuelles qui résonneront fort auprès de ceux qui ont grandi avec MySpace et autres MSN Messenger. Parce que, oui, ce livre est illustré. Comme Arcan avant elle, écrivaine qu’elle porte en gloire et à fort juste titre, Darsigny
Des motifs de dragons et des graphies tribales imprimées sur des chemises ajustées, des téléphones à clapet brandis comme autant de trophées. Les gars de Qualité Motel, cousins mottés autoproclamés de Valaire, embrassent l’esthétique néo-kitsch à pleine langue sur la pochette de leur plus récent disque compact. Ils nous présentent C’est pas la qualité qui compte, un album qui accote aisément n’importe quel millésime de Danse Plus, un CD qui exalte autant qu’une compile gravée et minutieusement puisée à même les confins de Kazaa.
signe la chronique d’un suicide annoncé. Elle s’épanche sur le poids du temps qui passe, les plis que laisse sur son front et au coin de ses yeux son âge croissant. Le thème n’est pas neuf, et elle est la première à l’admettre, mais la poète montréalaise l’aborde avec vigueur et intransigeance, un sens du rythme indéniable et ce lexique créolisé, bilingue à la limite, qui choquera les puristes. On y découvre une voix franche, nouvelle, une artiste imprégnée de son art jusqu’à la moelle et qui dérangera comme Marie-Sissi et Vickie avant elle. Aux Éditions du remue-ménage.
Une pléiade de disciples unissent leurs forces sur cette offrande prodigieusement coucoune, fofolle mais diablement bien produite. Karim Ouellet, collaborateur régulier des bros de Sherby, crooner fleur bleue de son état, y chante l’Amour, encore, toujours, mais avec une pointe d’autodérision qu’on ne lui connaissait pas. Tomber en amour c’est cool C’est mieux que de tomber tout court C’est mieux qu’une claque dans face (bis) C’est mieux qu’une pelle dans le front D’autres moments forts? L’infopub pharmaceutique de Jimmy Hunt (Personnelle) destinée aux palmarès de Radio Jean Coutu, la sulfureuse ballade pour cannibales de Fanny Bloom et
QUALITÉ MOTEL, PHOTO DOMINIC LACHANCE
Marie-Élaine Thibert, la voix d’Eman, force tranquille d’Alaclair et MC constant, posée sur des rythmes funky à faire pâlir d’envie un jeune Snoop Doggy Dog. Sans surprise, Maybe Watson et Ogden s’invitent aussi à la fête et sous la bannière de Rednext Level, arrachant les rires dans une ritournelle muscle pop bien huilée, complètement deuxième niveau, critiquant subtilement et par la bande une certaine dépendance à l’automobile. Lary Kidd, Koriass et Fouki complètent l’alignement hip-hop, mais c’est vraiment Sarahmée, rappeuse québ ô combien sous-estimée, qui leur dame le pion, armée d’une plume parfaitement affûtée, la sienne, mordant dans ses mots avec une force nouvelle. Puisse cette plage, ce cadeau emballé dans des petits motifs dance volontairement datés, lui permettre de se faire connaître et respecter d’un plus vaste public. C’est pas la qualité qui compte (Costume Records) porte mal son nom, tous l’auront saisi, et sort le 2 novembre. Lancement au Club Soda (Montréal) le soir même et 20 jours plus tard à L’Anti de Québec. Sur la pointe des pieds Virginie Brunelle est une spécialiste du duo, une dissectrice du couple, quel qu’il soit. La chorégraphe revient en scène cet automne, mais là où on l’attendait le moins, sous l’égide d’Eric Gauthier, ballerin reconverti et Allemand d’adoption. Elle présente une pièce de son cru, carte postale de 20 minutes, dans le cadre d’un quadruple plateau confectionné à Stuttgart. C’est là que
le Québécois, méconnu en ses terres, a refait son nid. C’est là, à une petite centaine de kilomètres de la France, que la Montréalaise a su apprivoiser une équipe d’interprètes qui lui étaient étrangers, les employés de Gauthier Dance, chairs fraîches qu’elle aura sculptées de son vocabulaire, de ses gestes. Où qu’elle soit, Brunelle reste Brunelle. Sa danse est un condensé de colère enveloppé dans un gant de soie, un amalgame habile de chutes et de portées. J’ai découvert son esthétique contrastée, aussi athlétique qu’introspective, avec Le complexe des genres il y a plusieurs années. Un spectacle si marquant que l’affiche trône encore sur mon mur de salon, ultime trace, l’image de cette femme et de cet homme entrelacés en araignée, se fondant l’un dans l’autre jusqu’à en altérer leurs chromosomes. Des X et des Y qui tournoient dans une valse infinie, jusqu’à se perdre. Une image forte. Autant dire que mes attentes sont grandes pour cette nouvelle pièce, mais je la sais capable d’honorer de telles promesses. Virginie est une grande chorégraphe, la digne héritière de Dave St-Pierre, diront certains, bien que la prémisse de Beating soit infiniment plus douce, plus tendre que ce à quoi elle nous a habitués. Cette fois, elle s’inspire des recherches de l’Université de Californie à Davis, cette étude de 2013 prouvant que les cœurs de ceux qui s’aiment battent à l’unisson. Sa courte forme s’articule autour de cette idée, celle de la pulsation, de nos corps qui se froissent et tanguent sous le poids d’une infatuation. À voir jusqu’au 3 novembre au Théâtre Maisonneuve (Montréal) et le 13 novembre au Grand Théâtre de Québec. y
aire extraordin Une
passion culinaire!
3100, chemin Saint-Louis Sainte-Foy (Québec) 418-653-3886
QUOI FAIRE
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PHOTO MARTA BEVACQUA
MUSIQUE
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POMME THÉÂTRE PETIT CHAMPLAIN – 14 NOVEMBRE
Avec sa voix de velours et ses textes minutieusement écrits, Claire Pommet alias Pomme charme tous ces mélomanes francophiles qui ont aimé et qui aimeront Piaf ou Barbara. Parce que oui, l’auteurecompositrice-interprète française s’inscrit dans la lignée de ces (très) grandes, privilégiant beaux mots et interprétations senties.
PL ACE PUBLIQUE
Cont a ct e z - nou s pour a ffi ch e r v ot r e comm e r c e 514 8 48 0 8 0 5
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LOU PHELPS
ALACLAIR ENSEMBLE
L’ANTI – 8 NOVEMBRE
IMPÉRIAL BELL – 23 NOVEMBRE
Signé sous Last Gang Records, étiquette emblématique de la scène indie torontoise, le rappeur Lou Phelps se dévoilait avec panache sur son premier opus officiel en septembre dernier. Album conceptuel créé dans la foulée d’une rupture amoureuse, 002/LOVE ME mise sur des propos humbles et des ambiances chaudes, notamment concoctées par son frère Kaytranada et par l’éminent trio Planet Giza.
Pionniers indiscutables de la nouvelle génération de rappeurs qui secouent le hiphop québécois depuis le début de la présente décennie, les compères d’Alaclair Ensemble se renouvellent une fois de plus avec Le sens des paroles, un cinquième opus à la facture trap. Après avoir présenté son album à son public français, le groupe revient chez lui pour un lancement à Québec et deux autres à Montréal.
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SIMON LAGANIÈRE L’ANTI – 15 NOVEMBRE
Avec son premier album solo Samedi soir de semaine, lancé au printemps dernier sous Grosse Boîte, Simon Laganière laissait tomber son personnage de Mario (de son groupe Les frères Goyette) au profit d’une pléiade de protagonistes aux destins insolites. Évoluant dans un registre indie folk aux tons vaporeux, l’artiste basé à Champlain, en Mauricie, y va maintenant d’une mini-tournée, qui s’arrêtera entre autres à Québec.
Notre équipe d’experts-visagistes se fera quant à elle un plaisir de vous proposer des montures tendance mettant votre visage en valeur. En faisant l’examen de la vue et l’achat de vos lunettes chez Opto-Réseau Langlois Opticien, vous obtiendrez un ajustement professionnel et le meilleur service possible. Chez Opto-Réseau, on vous voit comme personne.
SOULDIA COOPÉRATIVE MÉDUSE – 16 NOVEMBRE
Porte-étendard de la scène rap de Limoilou, l’un des quartiers le plus importants dans l’histoire du hip-hop québécois, Souldia carbure aux récits rudes avec son flow incisif, parsemé de moments plus mélodieux. Regorgeant de chansons accrocheuses, notamment des collaborations avec Rymz et Sinik, son septième album Survivant marquera sans doute un tournant dans sa carrière. <
SCÈNE
SHAD
PAUL-ANDRÉ FORTIER – SOLO 70
L’ANTI – 24 NOVEMBRE
MÉDUSE – SALLE MULTI – 29 ET 30 NOVEMBRE
Shad, l’un des rappeurs canadiens les plus respectés et les plus acclamés de la dernière décennie, revient sur les planches avec, sous le bras, un album ambitieux, A Short Story About a War, un sixième album solo lancé à la fin octobre sous l’étiquette montréalaise Secret City Records. Le CanadoKenyan fera un arrêt à Québec et Montréal durant sa tournée nord-américaine.
Plutôt que de mettre sa compagnie à mort sans un mot, Paul-André Fortier s’offre un ultime solo, et un faux de surcroît, une pièce où il est amené à partager la scène avec le comédien Étienne Pilon et la musicienne Jackie Gallant. C’est le grand Marc Séguin, peintre et documentariste de renom, qui signe la scénographie du chant du cygne, une chorégraphie déchirante et intense.
LES BALLETS JAZZ DE MONTRÉAL – DANCE ME (MUSIQUE DE LEONARD COHEN) GRAND THÉÂTRE DE QUÉBEC – 8 NOVEMBRE
MARCHÉ DE NOËL ALLEMAND DE QUÉBEC du 2 2 n o vem br e au 23 décemb re A u co e ur du Vieux-Q uébec, d a ns les j a rd ins et la p l ace de l ’H ôt el -de-Ville.
Venez vivre la magie de Noël dans un décor féérique et une ambiance festive. Au pro gramme: traditions de Noël allemandes, animations et spectacles extraordinaires, cuisine traditionnelle allemande réinventée et une tonne d’idées-cadeaux originales parmi plus de 80 exposants. Une activité gratuite, pour toute la famille!
L A FILLE QUI S’PROMÈNE AV E C U N E H A C H E D u 6 au 24 n o vem br e - P remier Acte
Dans le village de Malenfants, petite communauté accrochée à ses traditions où la pensée repose sur les préjugés, Cindy-Lou nourrit les mythes les plus glauques. Pourtant, son destin tragique rallumera les feux et déclenchera une nouvelle vague d’espoir. Fable rurale et comédie tragique, cette pièce dépeint une jeunesse en mal d’espoir et en manque de repères.
Dans un spectacle construit autour des chansons du regretté poète montréalais, les Ballets Jazz de Montréal rendent un hommage dansé à Leonard Cohen, lui qui leur avait donné sa bénédiction avant de disparaître. Dans une mise en scène d’Éric Jean, le spectacle reprend 17 chansons du répertoire de l’artiste.
PHOTO SANDRICK MATHURIN
F I F M A - É D I T I O N Q U É B E C 2018 F E S T I VA L I N T E R N AT I O N A L D U FILM SUR LES MÉTIERS D’ART D u 9 a u 11 nov e m br e - Mu sé e na t i ona l d es b ea ux - a r t s du Qu é be c
Découvrez des artisans de partout dans le monde! À l’affiche: quinze films provenant de différents pays et explorant une variété de disciplines. Une sélection des meilleurs films présentés lors du dernier FIFMA, en France. Julie Magnan, L’autre: ma torture, mon salut (détail), 2015. Photo Étienne Dionne.
T H O R N E T TA D AV I S B A N D S a m e di 17 nove m br e P a la i s Mont ca lm — Ma i son de l a m us iq ue
La reine du blues de Détroit de passage à Québec Thornetta Davis chante depuis plus de 30 ans et a partagé la scène avec les plus grands. En concert, soutenue par les meilleurs musiciens de Détroit, elle livre ses chansons avec une énergie incroyable. Chaque fois, le public en redemande!
LE
BRIGANTIN Le vrai bistro des copains !
TABLE D’HÔTE Entrées Croûtons au chèvre chaud
et ses deux confits (oignons et carottes) Ou
CINÉMA
<
Saumon fumé artisanal
CREED II
THE FRONT RUNNER
EN SALLE LE 21 NOVEMBRE
EN SALLE LE 16 NOVEMBRE
Adonis Johnson Creed va devoir affronter Viktor Drago, le fils d’Ivan Drago. Ce dernier n’est nul autre que le boxeur qui a autrefois tué son père Apollo Creed sur le ring. C’est sous la tutelle du légendaire Rocky Balboa qu’Adonis s’entraînera pour ce combat marquant.
L’histoire de l’ancien sénateur américain de l’État du Colorado Gary Hart, favori pour être à la tête du parti démocrate en 1988 mais qui dut se retirer de la course alors qu’un scandale d’adultère éclaboussa sa vie privée et sa carrière professionnelle.
BOHEMIAN RHAPSODY EN SALLE LE 2 NOVEMBRE
Dans ce tout nouveau biopic, découvrez le parcours de l’incroyablement populaire groupe britannique Queen et de son leader Freddie Mercury, de la formation du groupe à son apparition au concert Live Aid en 1985.
LE POIRIER SAUVAGE
Potage du moment
Plats principaux Pasta Alla Putanesca ; olives noires, câpres,
anchois et sauce tomatée
28 $
Mini-pizza d’automne et salade césar ;
sauce tomate, mozza, agneau, canard confit, tomates fraîches et réduction de vinaigre 29 $ balsamique
Filet de saumon aux 3 agrûmes ; (orange,
EN SALLE LE 30 NOVEMBRE
citron et lime) Servi avec riz et légumes
30 $
De retour dans sa ville natale, un aspirant écrivain redoute de devenir enseignant comme son père, un rêveur jovial et joueur invétéré qui a plongé sa famille dans les dettes et la honte et qui, aujourd’hui, s’entête à creuser un puits sur sa terre aride.
Bavette de bœuf Marinée ; Sauce aux poivres. Servie avec pdt et légumes
31 $
THE GIRL IN THE SPIDER’S WEB
Spécial pour 2 2 tables d’hôtes au choix et une bouteille de 85 $ vin sélectionnée. Café ou thé inclus Ajoutez 3 $ pour un dessert
EN SALLE LE 9 NOVEMBRE
Lisbeth Salander et le journaliste Mikael Blomkvist se retrouvent aux prises avec des espions, de cybercriminels et des membres corrompus du gouvernement. Par ailleurs, Lisbeth est suivie par une mystérieuse femme blonde. >
PLACE DE LA FAO
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Une vision unique. 1026, avenue Cartier 418 525-7286 optiboutiq.com Dr Patrick Sauvageau Dre Laurence Leclerc optométristes
CAROLINE MONNET, JUNO I, 2017. GOUDRON, ACRYLIQUE, CHEVEUX SYNTHÉTIQUES ET BOIS, 190,5 X 40 X 30 CM COLLECTION DU MUSÉE NATIONAL DES BEAUX-ARTS DU QUÉBEC, ACHAT (2018.64) © CAROLINE MONNET. PHOTO MNBAQ, IDRA LABRIE
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D’OÙ VENONS-NOUS? QUE SOMMES-NOUS? OÙ ALLONS-NOUS? MUSÉE NATIONAL DES BEAUX-ARTS DU QUÉBEC – 15 NOVEMBRE 2018 AU 20 OCTOBRE 2019
Pour savoir où on va, il faut savoir d’où on vient. C’est précisément cet adage que le MNBAQ met en application avec cette nouvelle exposition historique. Un corpus joyeusement anachronique regroupant des œuvres de Nadia Myre, Jean-Pierre Lemieux et Betty Goodwin.
BGL GALERIE 3 – 16 NOVEMBRE AU 16 DÉCEMBRE
Le redoutable trio d’artistes visuels qui a fait le tour du monde est composé de Jasmin Bilodeau, Sébastien Giguère et Nicolas Laverdière. BGL est de retour à la galerie de la rue Saint-Vallier qui le représente. L’exposition ne devrait laisser personne indifférent, étant donné le corpus généralement coloré et imaginatif du collectif local.
L’ALTERNATIVE the Alternative
FOLIE CHOCO MANGUE
UNE BOUCHÉE D’ÉTÉ EN AUTOMNE PP 40010891
PREMIEREMOISSON.COM