Auteur de plusieurs ouvrages sur la famille, dont celui-ci est le premier traduit en français, Mary DeMuth est aussi conférencière. Elle est mariée et mère de trois enfants. La famille habite au Texas. CHF 10.00 / € 9.00 ISBN 978-2-940335-53-4
Une famille qui donne enVie Mary E. DeMuth
Comment transmettre à nos enfants l’héritage spirituel que nous aurions aimé avoir? Comment leur communiquer une foi que nos parents n’ont jamais eue ou qu’ils ne vivaient pas de manière conséquente? Comme leur procurer l’environnement sécurisant qui n’a pas été le nôtre? Voilà le genre de questions abordées au fil de ces pages. Ayant ellemême connu une enfance difficile, Mary DeMuth est bien placée pour comprendre la crainte qui peut s’emparer des parents inexpérimentés et encore marqués par les souffrances du passé. Elle apporte ici non pas des méthodes d’éducation mais des conseils pratiques pour guérir, puis transmettre à ceux qui nous sont confiés ce dont ils ont besoin pour construire leur vie. Un livre encourageant, concret, illustré d’exemples vécus et qui comprend des questions pour l’étude en groupe.
1. «J’ai peur des fantômes!»
Créer un environnement sûr et rassurant Le nom de l’Eternel est une tour fortifiée: le juste s’y réfugie et se trouve en sécurité. Proverbes 18.10 J’avais 6 ans et, une fois de plus, j’avais peur… peur du fantôme de la nuit. Croyant l’apercevoir dans un rayon de lumière filtrant à travers la fenêtre de notre petite maison, je frissonnais de la tête aux pieds. J’avais l’impression qu’il m’épiait et qu’il allait fondre sur moi, peut-être même me tuer. Seule dans le salon, je n’avais personne pour me protéger contre le spectre redouté, hormis deux chats et un kangourou en peluche. Le parquet froid glaçait mes petits pieds d’enfant. Tapie derrière les rideaux, je scrutais la nuit à travers mes doigts, espérant ardemment que ma mère et mon beau-père allaient bientôt rentrer pour me délivrer des tentacules du fantôme qui menaçait de m’engloutir tout entière. Mais ils n’arrivaient pas. Tremblant de froid, je fixais l’allée du jardin à l’affût de la Datsun, aspirant à entendre le grincement de ses freins, puis les voix qui me réconforteraient. Je rêvais de parents qui, comme Tarzan, arriveraient en se balançant sur une liane et viendraient à mon secours juste au bon moment. Malheureusement, les miens n’étaient pas du genre à se soucier de mes craintes ni à prendre le temps de m’expliquer que le fantôme de la nuit n’existait pas et que je n’avais donc pas besoin d’avoir peur. 37
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Il me semblait maintenant que le spectre tournoyait autour de notre habitation en continuant à m’épier. Recroquevillée derrière les rideaux, les mains sur les yeux, je repensais alors aux histoires de revenants que les amis de mes parents (les fumeurs de marijuana) racontaient sous l’emprise de la drogue. Je suis sûre qu’ils n’avaient alors pas l’intention de m’effrayer, mais ils avaient fini par me persuader que notre maison était hantée. «Il y a un fantôme dans votre grenier», m’avait soufflé à l’oreille un homme à l’haleine douceâtre en s’approchant tout près de moi. J’avais oublié son visage, mais pas ses paroles. «Si tu écoutes bien, tu entendras le craquement de son fauteuil à bascule, juste au-dessus de ta chambre, vers minuit. Mais il faut que tu écoutes vraiment bien.» J’avais avalé ma salive et acquiescé de la tête. Au cours d’une autre fête, un de ces hippies m’avait mise en garde contre le «fantôme du placard», qui aimait par-dessus tout ouvrir et fermer les armoires de la cuisine pendant mon sommeil. «Quand tu te réveilles, est-ce qu’il t’arrive de trouver des placards ouverts?» J’avais fait oui de la tête. «Eh bien, c’est la preuve qu’il est passé par là!» Une autre fois encore, quelqu’un avait soulevé notre tapis oriental tout effiloché et m’avait montré une grosse tache brunâtre sur le parquet. «Tu vois ça? C’est une tache de sang, avait-il dit. Quelqu’un a été assassiné ici!» Recroquevillée sur ce même parquet, je tentais donc d’échapper au fantôme de la nuit. Puis, je me levais, courais en passant devant les placards ouverts de la cuisine et me réfugiais dans ma chambre. Mais là, au lieu de me calmer, je fixais le plafond, persuadée que le fantôme du grenier allait le faire craquer en se balançant sur son fauteuil au-dessus de ma tête. Je 38
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me blottissais alors dans mon lit en priant pour qu’il ne me voie pas sous mes couvertures. Ces soirs-là, des choses aussi inoffensives qu’une enseigne publicitaire clignotant au garage d’à côté me rappelaient que le monde était un endroit effrayant et que moi, petite fille vulnérable de 6 ans, je devais l’affronter seule. On raconte qu’un jour, une maman est allée border son fils alors qu’un orage se préparait, puis qu’elle est partie vaquer à ses occupations. Lorsqu’un éclair a zébré le ciel et que la maison a été ébranlée par un terrible coup de tonnerre, elle s’est inquiétée pour son petit et est retournée dans sa chambre pour s’assurer qu’il allait bien. Il se tenait debout devant la fenêtre, un grand sourire sur son visage illuminé par les éclairs. «Pourquoi est-ce que tu souris, mon fils? lui a-t-elle demandé. Tu n’as pas peur?» «Oh non, Maman! C’est pas formidable? Dieu vient de me prendre en photo!» Voilà la différence entre un enfant qui grandit dans un foyer où il se sent en sécurité et un autre qui n’a pas cette chance: celui qui se sent protégé rit pendant l’orage en s’imaginant que Dieu le prend en photo, tandis que l’autre se blottit tout tremblant sous ses couvertures pour échapper au fantôme de la nuit. La plupart des parents désirent offrir à leurs enfants un environnement sécurisant. Mais peut-être avez-vous grandi dans un foyer dominé par la peur, ou bien par la colère, par la violence, ou encore par la hantise de «dépasser un certain poids». Quelque part, chaque famille a connu des dysfonctionnements, car chaque famille est composée de pécheurs. Bien sûr, il y a différents degrés de dysfonctionnement. Peutêtre avez-vous grandi dans un contexte de peur. Et peut-être êtes-vous hanté(e) par la crainte de faire subir à vos enfants ce que vous avez subi vous-même. 39
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Mon désir et ma prière, c’est que le Seigneur, par son Esprit, utilise ce livre pour vous aider à créer l’environnement sécurisant dont vos enfants ont besoin, qui les conduira à sourire devant «l’appareil photo de Dieu».
Qu’est-ce qu’un foyer sécurisant? Si nous voulons que nos enfants puissent grandir avec le sentiment d’être aimés et protégés, nous devons comprendre qu’en dehors de notre relation avec Jésus-Christ, il n’existe aucun lieu sûr. Le monde est ravagé par le terrorisme, les enlèvements d’enfants, la drogue, le suicide et une quantité d’autres fléaux. Jésus a dit: «Vous aurez à souffrir dans le monde, mais prenez courage: moi, j’ai vaincu le monde» (Jean 16.33b). Si vous avez grandi dans un foyer qui n’était pas régi par l’amour de Dieu, il y a de fortes chances que vous n’ayez pas connu ce lieu sûr et rassurant auquel aspire chaque enfant. Mon ami Jack se souvient que, lorsqu’il avait 4 ans, sa mère le saisissait par les épaules et le secouait violemment en hurlant: «Tu m’écoutes?!» Quand il a grandi et été moins facile à secouer, elle a pris l’habitude de le plaquer contre le mur et de le gifler sur les deux joues. Il se rappelle aussi le sentiment de solitude et de vulnérabilité qu’il a éprouvé lors d’une de ses rares visites chez son papa: «J’avais 12 ans, à l’époque. Tout le monde, y compris mon père, fumait des joints. Tout ce que j’ai pu faire a été de prendre mon vélo et d’aller au bord du lac pour pleurer. C’est devenu une habitude: à chaque moment difficile, je me réfugiais dans l’isolement. Et si jamais je tentais de parler à ma mère de quelque chose qui me pesait, elle réagissait avec une telle hostilité que j’ai appris à ne plus lui parler de rien et à me débrouiller seul.» 40
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Jack était parvenu à la conclusion que, pour se sentir en sécurité, il ne pourrait compter que sur lui-même. Il s’agit d’un exemple extrême, pourtant, même les familles considérées comme des modèles sont imparfaites. Nous sommes tous des pécheurs, depuis Adam et Eve. Heureusement, nous savons maintenant que le seul vrai refuge n’est pas un lieu, mais une Personne: Jésus. Au Psaume 4, verset 9, nous lisons: «Je me couche et aussitôt je m’endors en paix, car c’est toi seul, Eternel, qui me donnes la sécurité dans ma demeure.» Ce n’est que dans les bras de Dieu que nous pouvons être libérés de nos craintes. L’auteur du Psaume l’avait saisi. Durant toute mon enfance, mon cœur a aspiré à connaître Jésus, ce Compagnon qui ne m’abandonnerait jamais. Autour de moi, les adultes se moquaient de Dieu. Pourtant, dans ce foyer si déstabilisant qui était le mien, je continuais à le chercher. Lorsque j’avais peur, je le priais. Mais je ne me sentais toujours pas en sécurité. Le fait de grandir ainsi «à découvert», sans protection, a fait germer en moi un sentiment de vulnérabilité qui, aujourd’hui encore, tend à vouloir enserrer mon cœur. Comme personne ne veillait sur moi, je me sentais la plupart du temps livrée à moi-même. Et lorsque des grands garçons m’ont volé mon innocence d’enfant de 5 ans, j’ai compris que je devais prendre soin de moi toute seule. Ensuite, quand des cambrioleurs ont saccagé notre maison, mon sentiment d’insécurité n’en a été que renforcé. Le manque de soins dont j’ai été l’objet a eu deux conséquences: premièrement, il m’a donné un ardent désir d’aimer mes propres enfants d’un amour à toute épreuve; ensuite, il m’a fait craindre de reproduire sur eux les erreurs de mes parents. Mes enfants se sentiront-ils autant en danger que moi à 41
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leur âge? me demandais-je. Cette inquiétude me hante encore aujourd’hui. Même s’il est illusoire de penser que nous parviendrons un jour à procurer à nos enfants un environnement parfaitement sûr, il est possible, avec l’aide de Dieu, de construire avec eux une relation basée sur l’amour et un sentiment de sécurité. Et non seulement c’est possible, mais c’est absolument essentiel. La première chose dont nos enfants ont besoin est de s’attacher à quelqu’un qui (espérons-le) les protégera. Bien des parents pionniers n’ont pas pu tisser de tels liens avec leurs propres parents et ignorent le sentiment de sécurité qu’un enfant éprouve quand il se sent aimé. Nous savons peut-être, instinctivement, ce que n’est pas un foyer apportant sécurité et réconfort, mais à cause de nos mauvaises expériences, nous avons du mal à nous imaginer à quoi il ressemble véritablement. Il nous faut donc en saisir la portée et apprendre à le définir, tant pour notre bien que pour celui des nôtres. Considérons, pour ce faire, ce qui le caractérise.
1. Un lieu où on est en sécurité De même que, dans un parc naturel, les animaux sont à l’abri des balles des chasseurs, dans un foyer sûr et aimant, les enfants sont préservés des personnes malveillantes qui pourraient croiser leur route. C’est aussi un lieu où ils peuvent «vider leur sac» sans craindre d’être jugés. L’an dernier, notre fille Sophie s’effondrait dès qu’elle avait quitté le car de ramassage scolaire. Pendant un certain temps, cela m’a préoccupée. Je me demandais ce qui pouvait bien s’être passé en classe pour qu’elle soit dans un tel état. Puis, j’ai fini par comprendre que ses bouleversements hormonaux d’adolescente y étaient pour beaucoup et, aussi, que ma fille «craquait» parce qu’elle le pouvait. Nous avons réussi (du 42
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moins en partie) à créer un climat de confiance et de sécurité qui lui permet d’exprimer librement ses émotions. Lorsque j’enseignais dans le secondaire, j’ai fait le constat suivant: parfois, les parents d’un élève particulièrement indiscipliné étaient fort surpris d’apprendre que leur enfant se comportait ainsi en classe. «Ah bon? disaient-ils, il n’est pas du tout comme ça à la maison!» Et ils me regardaient comme si j’étais un terrible personnage parce que j’avais osé dire une telle chose. D’un autre côté, il arrivait que les parents d’un élève très consciencieux me disent, l’air tout étonné: «Chez nous, il est loin d’être aussi sage! Il est même déchaîné!» Ainsi, l’enfant qui travaillait bien en classe et qui faisait tout pour avoir de bonnes notes semblait être libre, une fois chez lui, de se laisser aller et de se «défouler» pour évacuer le stress de la journée. Ma théorie, qui n’a aucune ambition scientifique, est donc celle-ci: les enfants grandissant dans un foyer sûr peuvent se permettre de «craquer», tandis que les autres ne le peuvent pas. En réalité, nous avons tous nos moments de faiblesse, et Dieu a voulu que la famille soit le refuge par excellence, un refuge où l’on peut, sans crainte, avoir des poussées d’acné tout comme des accès de colère. Cela ne veut pas dire que tout y soit permis; mais c’est un endroit où l’on se sent en sécurité, un lieu où l’amour ne tient pas compte des sautes d’humeur et aide les enfants à surmonter leur colère.
2. Un lieu où Dieu peut se révéler Nous sommes les témoins du Seigneur devant nos enfants. Que nous ayons grandi dans un foyer chaotique ou, au contraire, dans une famille solide et stable, nous sommes appelés à refléter le véritable «caractère» de Dieu, et ce même si nos parents, à cause de leur nature pécheresse, ont fait 43
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l’inverse. Notre Père céleste n’est pas comme nos parents terrestres, qu’ils aient été mauvais ou bons. Il n’est pas acerbe, il ne nous condamne pas, ne nous insulte pas, n’est pas distant ni négligent. Même les meilleurs parents ne démontrent jamais totalement l’amour parfait et inconditionnel de Dieu. Nous sommes tous faillibles. Mais en élevant nos enfants, nous pouvons progresser dans la foi et lui ressembler toujours davantage. Pour y parvenir, nous devons nous débarrasser des comportements qui nous ont été transmis, nous jeter dans les bras de ce Père qui nous aime et apprendre à marcher dans ses voies. Mais pourquoi regarder en arrière? Pourquoi essayer de comprendre notre famille d’origine? Lorsque nous avons donné notre vie à Christ, les choses anciennes n’ont-elles pas été entièrement balayées? Oui, Jésus étant mort pour nos péchés, nous sommes justifiés aux yeux du Dieu trois fois saint et nous avons la joie d’être pleinement acceptés par lui. Cependant, notre passé ne disparaît pas comme par magie lorsque nous devenons chrétiens, ainsi que le développent Don et Jan Frank dans leur livre Unclaimed Baggage («Ces bagages indésirables»). «Dans ce sens, écrivent-ils, oublier le passé n’est pas une preuve de maturité spirituelle. Dieu sait ce que nous avons enduré. Il connaît notre souffrance. Et s’il ne l’ignore pas, ne la nie pas, ne la minimise pas et ne la fait pas disparaître en un instant, qu’en fait-il? Il la change en bénédiction.»1 Voilà comment Dieu agit dans notre vie. Il prend notre passé douloureux, y insuffle sa puissance de guérison et, par le Saint-Esprit, nous rend capables d’avancer sur un chemin nouveau et d’élever nos enfants selon lui. 1 Don & Jan Frank, Unclaimed Baggage: Dealing with the Past on Your Way to a Stronger Marriage, NavPress, 2003.
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L’apôtre Paul encourageait les chrétiens d’Ephèse en ces termes: «A celui qui peut faire, par la puissance qui agit en nous, infiniment plus que tout ce que nous demandons ou pensons, à lui soit la gloire dans l’Eglise et en Jésus-Christ, pour toutes les générations, aux siècles des siècles! Amen!» (Ephésiens 3.20-21). En tant que parents pionniers, nous avons le privilège de pouvoir refléter le véritable «caractère» de Dieu et de le faire ainsi connaître à nos enfants. Mais cela n’est possible que s’il nous guérit de nos souffrances passées et prend soin des nôtres à travers nous.
3. Un lieu de grâce Le seul véritable refuge se trouvant en Dieu, dans ses bras de Père, si nous voulons procurer un foyer sûr à nos enfants, nous devons faire preuve de grâce. Jésus a montré l’exemple en accueillant avec amour les enfants qui venaient à lui: Alors des gens lui amenèrent des petits enfants afin qu’il pose les mains sur eux et prie pour eux. Mais les disciples leur firent des reproches. Jésus dit: «Laissez les petits enfants, ne les empêchez pas de venir à moi, car le royaume des cieux est pour ceux qui leur ressemblent.» Matthieu 19.13-14 Mon ami Jack, qui est aujourd’hui père de famille, souhaite que son foyer soit empreint de grâce: «Je désire faire savoir à mes filles que, quoi qu’elles fassent, je les aimerai toujours.» Un jour, une de ses filles lui a posé cette question: – Papa, est-ce que tu m’aimerais encore si je tapais ma sœur? – Si tu faisais ça, ma chérie, a-t-il répondu, je serais très déçu et je devrais te punir, mais je t’aimerais encore. Je t’aimerai toujours. Voilà un foyer où règne la grâce! 45
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4. Un lieu régi par l’amour L’enfant qui grandit dans la sécurité d’un foyer affectueux ne se demande pas sans cesse: Est-ce que Papa et Maman m’aiment vraiment? Si je mourais, est-ce qu’ils me regretteraient? Ceux qui se posent de telles questions ne se sentent pas en sécurité. Pour être rassurés, les enfants ont besoin d’être absolument certains que leurs parents les aiment envers et contre tout. Pour ma part, j’étais très demandeuse. Comme j’avais l’impression que ma mère ne se préoccupait pas de mon sort, je lui disais constamment: «Maman, tu m’aimes?» J’avais soif de câlins et je savourais les instants où elle me témoignait spontanément de l’affection. En tant que parents pionniers, nous devons absolument être attentifs à ce genre de comportement chez nos enfants. Lorsque les miens me réclament sans cesse de les cajoler, je me dis que, quelque part, je ne suis pas parvenue à leur faire comprendre, au plus profond d’eux-mêmes, qu’ils sont aimés. Je désire qu’ils s’émerveillent devant le Dieu qui leur a donné la vie et non qu’ils se demandent à tout instant si je les aime ou non.
5. Un lieu de repères Un foyer sécurisant est un foyer qui sait fixer des limites claires et des objectifs précis. J’ai entendu parler un jour d’une école dont le terrain n’était pas fermé. Les enfants, par peur des voitures qui circulaient juste à côté, restaient au milieu de la cour pendant la récréation. Puis, un jour, un directeur intelligent a fait construire une palissade tout autour et, aussitôt, les élèves se sont mis à jouer librement, sans craindre le trafic de la rue adjacente. Rassurés par ce simple 46
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grillage qui les séparait de l’extérieur, ils pouvaient s’ébattre avec insouciance où ils voulaient. Les parents qui aiment leurs enfants leur fixent des limites précises et leur expliquent ce qui est permis et ce qui ne l’est pas. L’absence de règles, dans une famille, mène au chaos. Ce chaos n’est pas forcément visible, mais dans les jeunes cœurs, il est bien réel. Les enfants qui sont obligés de déterminer eux-mêmes leur ligne de conduite ne savent jamais vraiment comment se positionner face à leurs parents. En outre, ils ne sont pas capables de se fixer les bonnes limites. Un adulte qui a grandi en étant livré à lui-même parvient difficilement à se discipliner.
6. Un lieu où l’on a droit à l’erreur Si un foyer sûr est un foyer qui sait fixer des limites claires, ce n’est pas un endroit où l’enfant est prisonnier d’un carcan de lois et ordonnances à respecter coûte que coûte. Les parents pionniers ne doivent pas devenir des pharisiens légalistes qui imposent tant de règles strictes à leurs enfants que ceux-ci s’en trouvent déconcertés et même écrasés. Une famille qui procure un vrai sentiment de sécurité fixe des règles simples et réalistes et réprimande avec amour lorsque celles-ci sont transgressées. La discipline que nous exerçons sur nos enfants est à l’image de celle que le Père céleste pratique avec nous: il nous châtie pour notre bien. Ne leur rappelons pas sans arrêt leurs fautes et leurs erreurs. Certes, ils ne se conduiront pas toujours comme nous le souhaitons, mais c’est inévitable. Faisons preuve de patience, continuons à les aimer, aidons-les à se relever. Ainsi, ils apprendront que l’échec fait partie de la vie. En étant nous-mêmes prompts à reconnaître nos erreurs, y compris celle que nous commettons à l’égard de nos enfants, 47
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nous leur procurons un sentiment de sécurité. Nous montrons par là que nous sommes tous faillibles et que nous avons tous désespérément besoin du pardon, de la grâce et de la puissance de Dieu. Notre but devrait être de corriger nos enfants lorsque c’est nécessaire tout en sachant apprécier leur personnalité unique. Un foyer stable et sécurisant est empreint de la grâce et accorde le droit à l’erreur. Pour que nos enfants deviennent un jour des adultes autonomes, heureux de la personnalité que Dieu leur a accordée, il faut qu’ils puissent pleinement saisir son amour inconditionnel. Et pour cela, nous devons nousmêmes leur manifester un tel amour.
«Tu es une bonne mère» Cette crainte de ne pas parvenir à procurer un vrai sentiment de sécurité à mes enfants est tantôt sourde, tantôt envahissante. Mais malgré la difficulté qui est la mienne en tant que mère chrétienne de première génération, il y a eu, le long du chemin, quelques instants privilégiés qui m’ont encouragée à persévérer. Je repense notamment à ce que m’a dit un jour mon amie Heidi, venue nous rendre visite. C’était en 1999. A la fin de son séjour, elle m’a regardée droit dans les yeux et m’a dit: «Mary, tu es une bonne mère. Tes enfants savent que tu les aimes.» Ces mots ont apaisé mon cœur angoissé. Petite, j’avais toujours l’impression d’être de trop, et j’avais peur de faire vivre la même chose à mes enfants. Mais une personne extérieure à la famille a vu qu’ils étaient sûrs de mon amour pour eux, et cela m’a beaucoup soulagée. Un soir, juste deux ans après, alors qu’ils étaient tous couchés et que, assise sur le canapé du salon, je profitais de cet 48
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instant de calme, j’ai entendu dans mon cœur le Seigneur me dire: «Mary, je veux que tu dises tout haut: ‘Je suis une bonne mère.’» Vraiment? ai-je pensé sans oser le formuler. «Oui», a été la réponse. Il m’a fallu un long moment pour parvenir à prononcer ces paroles. A vrai dire, je ne sais pourquoi j’avais aussi peur de le faire. Peut-être craignais-je de paraître prétentieuse ou égocentrique… «Je suis une bonne mère», ai-je murmuré. Aussitôt, quelque chose s’est comme détendu en moi. Pour la première fois en neuf ans de maternité, j’éprouvais un soulagement. En repensant à ces paroles libératrices, j’ai compris qu’en les exprimant à haute voix, j’avais déclaré que Dieu était capable de me guérir. Le Seigneur se plaît à attirer à lui des hommes et des femmes meurtris et à en faire des disciples de son Fils qui le suivent pas à pas, dans la dépendance et la faiblesse. C’est cette faiblesse qui lui permet d’agir en nous, comme l’écrit l’apôtre Paul: Mais Dieu a choisi les choses folles du monde pour couvrir de honte les sages, et Dieu a choisi les choses faibles du monde pour couvrir de honte les fortes. Dieu a choisi les choses basses et méprisées du monde, celles qui ne sont rien, pour réduire à néant celles qui sont, afin que personne ne puisse faire le fier devant Dieu. C’est grâce à lui que vous êtes en Jésus-Christ, lui qui est devenu, par la volonté de Dieu, notre sagesse, notre justice, la source de notre sainteté et notre libérateur. 1 Corinthiens 1.27-30 Par la grâce de Dieu, j’espère que mes enfants n’écriront jamais un livre intitulé: Je n’ai pas grandi dans un foyer où je me sentais en sécurité. 49
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Pour aller plus loin 1. Pendant votre enfance, vous sentiez-vous en sécurité? Pourquoi (ou pourquoi pas)? 2 Quel rôle la grâce a-t-elle joué dans l’éducation que vous avez reçue? Et quel rôle joue-t-elle dans votre vie aujourd’hui? 3. Aviez-vous, dans votre enfance, le sentiment d’être aimé(e)? Pourquoi (ou pourquoi pas)? 4. Quels principes, transmis par vos parents, vous restent en mémoire aujourd’hui? Lesquels vous ont été bénéfiques et lesquels vous ont plutôt fait du mal? Pourquoi? 5. Aviez-vous, chez vos parents, le droit à l’erreur? Si tel n’était pas le cas, donnez un exemple de ce que vous viviez. Que ressentiez-vous dans ces moments-là? De quelle façon ces expériences passées influent-elle sur votre manière d’éduquer vos enfants aujourd’hui? 6. Pensez-vous être une bonne mère ou un bon père? Pourquoi (ou pourquoi pas)? Comment avez-vous été encouragé(e) dans ce domaine?
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